QOVOP, quant on veut, on peut 9782842657147EXT

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QOVOP, quant on veut, on peut 9782842657147EXT
Préface
Il y avait les Damiens, puis les Kifouineurs… Voici les Qovopins !
Trois triplettes (au départ, les Damiens étaient aussi trois à bord)
de jeunes étudiants/adultes qui s’en sont allés vérifier que la mer est
ronde au lieu de s’engager en droite ligne dans le sillon que la vie, la
famille et les études leur avait tracé. Si les premiers ont dû construire
un bateau (en 1968, l’industrie de la plaisance n’en était qu’à ses balbutiements), les suivants ont pu faire le choix dans les listings des
voiliers d’occasion à la hauteur de leurs – modiques – budgets. Même
distinguo dans le domaine de la navigation, de la sécurité et de la
communication. Si Gérard Janichon et Jérôme Poncet naviguaient au
compas, au sextant, au sondeur, au flair et à la baraka, Kifouineurs et
Qovopiens utilisent GPS, cartes numériques, balises de détresses et
de tracking, sans oublier Internet et l’incontournable logiciel Skype
pour rester en contact avec familles et amis. Bien sûr, toutes ces avancées technologiques ne remplacent pas l’expérience. N’empêchent
pas de commettre des erreurs, d’appréciation ou de jugement, face à
des situations inconnues. Mais elles limitent énormément les risques.
Le tout pour un prix relativement limité.
Car, ici comme ailleurs, l’argent reste le nerf de la guerre. Avec
un budget mensuel de cinq cents euros par mois tout compris pendant les trois années de leur circumnavigation, Bat, Manu et Will
ont prouvé de main de maître que naviguer autour du monde n’avait
absolument rien d’impossible. Même si cela impliquait de remettre à
flot la caisse du bord en travaillant sur la route. Toujours dans le volet
économique, rappelons que le parc des voiliers d’occasion capable
d’effectuer une grande boucle ne cesse de s’agrandir et de présenter
des prix à la baisse. Actuellement, pour une quinzaine de milliers
d’euros, il est tout à fait possible de trouver un voilier hauturier
digne de ce nom qui, moyennant plus ou moins d’huile de coude,
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offrira un toit, ou plutôt un rouf, aux jeunes équipages prêts pour la
longue route.
Mais outre un peu d’argent, il faut aussi de la motivation, de la
curiosité et l’envie de couper le cordon ombilical avec la mère-patrie.
Toutes qualités dont ne manquent pas les Qovopiens, qui s’en sont
retournés, plein d’usage et raison… pour reprendre Joachim du Bellay
dans Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage. Tellement
plein d’usage et de raison qu’ils n’ont pas hésité un instant à confier
leur valeureux Pearson 36 à un nouvel équipage de jeunes étudiants/
adultes un mois à peine après leur arrivée triomphale lors du Grand
Pavois de La Rochelle ! Beau geste, belle réalité et sacré parrainage
aussi, de la part de jeunes partis avec des rêves en bandoulière et
revenus avec une énorme maturité construite au fil des milles, des
rencontres et des expériences.
Maintenant, rêvons un peu… Pourquoi ne pas pérenniser ce
genre de voyage ? Pourquoi ne pas aider les jeunes à s’en aller naviguer à la rencontre des autres, à la recherche d’eux mêmes, avant de
s’impliquer dans la vie active de notre pays, de notre terre, de notre
monde ? Pourquoi ne pas favoriser, en termes de cursus scolaire, de
fiscalité et de législation, ce genre de démarche qui enrichit la société
en général ? Je rêve de voir dix, cinquante, cent équipages, porteurs
de projets solidaires ou personnels, mettre le cap à l’Ouest chaque
année pour aller se frotter aux aléas de la vie en mer. Et j’espère que
ce livre leur en donnera l’envie…
Jean-Luc Gourmelen
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Départ
Manu
16 novembre 2008
Les voiles gonflent et Qovop glisse lentement sur la mer plate. Un
dernier coup d’œil par-dessus l’épaule me permet de voir s’effacer au
loin la jetée des Sables d’Olonne.
Nous y sommes. Nous avons sauté dans le vide et nous voilà
embarqués pour un voyage, une aventure, qui s’annonce tellement
loin de nos repères habituels que nous ne parvenons pas à imaginer
ce qu’il va bien pouvoir se passer. Aucun de nous n’a de réelles expériences en voile, et nous voici pourtant sur notre voilier en direction
de Madère, à plus de mille cent miles nautiques de là… Je ne peux
pas m’empêcher de sourire en repensant au début, au comment du
pourquoi de ce défi complètement fou.
Baptiste et moi étions étudiants à Grenoble. Pour ma part, je me
suis laissé porter par le courant tout au long de ma scolarité et me
suis réveillé un jour en amphithéâtre. Une copie de micro-économie sous les yeux, je me suis demandé ce que je pouvais bien faire
ici… Vingt ans plus tôt, je rêvais de devenir Marco Polo, Indiana
Jones ou encore Christophe Colomb ! Jamais je n’ai rêvé de finances,
marketing et autres disciplines économiques ! Bien sûr, c’étaient des
rêves d’enfants… Et alors ? Qu’est-ce qui nous pousse à les mettre de
côté, ou même à en rire ? Le système éducatif nous embarque dans
un wagon qui ne sort jamais de ses rails, et gare à celui qui veut sauter
en route pour choisir un autre chemin.
Avec Baptiste, nous nous mettons à rêver… J’évoque le cargo-stop
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jusqu’en Polynésie française où un rythme de vie différent semble
possible ; Bat veut voyager autour du monde, sans savoir vraiment
comment…
Puis un jour, alors qu’un professeur sermonne la classe sur l’aspect polluant du tourisme, l’idée vient à nous ! D’après ce dernier, le
voyage en avion est extrêmement polluant. Certes… Mais également,
les ferries, les voitures, les bus, et même le train ! Le voyage autour du
monde semble compromis… Et là, la blague fuse : reste le voilier ! Les
mots restent dans l’air quelques secondes et le déclic se fait dans notre
tête ! Le voilier… L’idée peut paraître évidente à beaucoup, mais
lorsque l’on vit au pied de la montagne, elle ne tombe pas sous le sens.
Ni Bat ni moi n’avons d’expérience en voile. Rien, pas une heure
de navigation. Bien entendu, nous n’avons pas de voilier, et encore
moins les moyens d’en acquérir un… Alors, le sourire jusqu’aux
oreilles, nous savons que ce sera ÇA notre aventure. Quitte à faire un
voyage, faisons LE voyage : le tour du monde ; et quitte à faire un tour
du monde, faisons-le en voilier, poussés par les vents, pour aller visiter
les endroits les plus reculés, les îles de rêve… Jules Vernes et Colomb
n’ont qu’à bien se tenir, nous aussi allons pouvoir crier : « Terre ! » à
la vue de cocotiers après plusieurs semaines de navigation !
Le soir même, nous commençons les recherches. Combien coûte
un voilier d’occasion ? Combien de temps minimal pour faire la
boucle ? Comment trouver des aides ? Internet tourne à plein régime
et le projet est lancé. L’idée mûrie une douzaine d’heures, pas plus et
déjà faire marche arrière nous semble inimaginable.
Évidemment, on fait bien rire autour de nous ! Personne ne nous
prend vraiment au sérieux, mais comment leur en vouloir ? Face
au scepticisme général et à l’Everest qu’il nous faut gravir, le nom
du projet nous vient très vite : QOVOP : Quand On Veut On Peut !
Puis, tout s’enchaîne. Toujours en étude, nous créons l’association du
même nom, nous montons le site Web, les projets pédagogiques et
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environnementaux, trouvons un vieux voilier blanc pour qui nous
avons le coup de foudre et nous l’achetons.
Notre entourage a commencé à nous prendre au sérieux lorsque
l’achat du bateau a été fait. Bien que nécessitant le recours au prêt
bancaire pour l’acquérir, le voilier a coûté moins cher que prévu. Le
posséder nous a permis de gagner en crédibilité face aux potentiels
sponsors et mécènes, et surtout a été la preuve physique de notre
engagement total dans cette aventure.
N’ayant toujours pas la moindre heure de navigation derrière
nous, le voilier a rejoint la Vendée par la route avant d’être déposé
dans le jardin des parents de Bat.
Quelques mois plus tard, diplôme en poche, nous pouvons être
sur place pour attaquer la rénovation et l’équipement du bateau,
renommé Qovop bien sûr ! Nous avançons, et vite. Des partenariats
avec des sponsors voient le jour et le département de la Vendée décide
de nous soutenir. Nous ne sommes plus seuls à y croire, et le soutien
de tous nous porte plus que jamais.
Nous allons à la rencontre des classes de primaire qui nous suivront durant le voyage et partageons de super moment avec les élèves
qui ont la tête pleine de ces mêmes rêves qui nous ont poussés à partir. Mickael, un ami de Bat, nous rejoint dans l’aventure avant de
décider finalement de rester à terre… Nous revoilà deux, et toujours
remontés à bloc. Les jours s’enchaînent ensuite à une vitesse folle et le
voilier tout de rouge repeint est mis à l’eau. Sans nous en apercevoir
le temps passe et William vient compléter l’équipage de Qovop. Dès
le début nous avions fixé la date de départ au 16 novembre 2008, et
nous comptons bien nous y tenir.
Bien sûr, nous ne sommes pas prêts à cent pour cent, et nous ne
possédons que la moitié du budget désiré… Mais à trop attendre
d’être prêt on ne part jamais. C’est ainsi qu’une semaine après le
départ du Vendée Globe, après un bain de foule aussi inattendu
qu’émouvant, nous avons largué les amarres.
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Désormais tout est calme. Plus de rendez-vous, plus de téléphone
portable, plus d’email, plus de téléviseur, plus de voiture. Gauche,
droite, toilettes, salon… tout se transforme en un charabia incompréhensible : bâbord, tribord, poulaine, carré… Qovop nous porte
lentement au cap deux cent quarante, et nous avons vingt mois
devant nous. Je me demande: Qu’est-ce qui fait qu’un jour nous choisissons un chemin et pas un autre ? Qu’est-ce qui a fait que ces idées
d’étudiants ne soient pas restées au stade d’idées ?
Quoi qu’il en soit, nous sommes là, heureux comme des gosses.
Mes compagnons pour les années à venir siestent et je barre tranquillement, écoutant le bruit du vent dans les voiles et fixant l’horizon
où rien ne pointe. Tout est parfait, Éole semble clément. Le vent est
faible, mais suffisant pour avancer, idéal pour récupérer de la fête de
la veille ! Dire que la semaine dernière, le même golfe de Gascogne a
fait trembler les coureurs du Vendée Globe, en poussant neuf skippers à l’abandon… Qovop, lui, semble ronronner de plaisir à l’idée de
rejoindre les mers chaudes, il vit. C’est parti !
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Table des illustrations
—
Présentation de Qovop . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
Mouillage de Qovop . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
Conserver le poisson sans frigo . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
Leurre maison – tête de bois . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87
La bière maison (ou bateau) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157
La passion du tampon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211
La voile pirate . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 239
Table des photos
—
Planche I
Transatlantique, réveillon – 31 décembre 2008
Transatlantique : des daurades sèchent – 6 janvier 2009
Martinique, Manu à la barre – 11 janvier 2009
Écluse de Gatún, au revoir Atlantique – 1er avril 2009
Planche II
Arrivée à Beveridge Reef – 27 septembre 2009
Bat veille dans les barres de flèches, Beveridge Reef – 27 septembre 2009
Stratification de la coque (Manu et Will), Nuku’alofa aux Tonga – 27 nov. 2009
Remontée sous spi vers les Fidji – 30 mai 2010
Planche III
Retrouvailles avec Canela, Taha, Polynésie française – 23 août 2009
Archipel des Louisiades, Papouasie-Nouvelle-Guinée – 1er septembre 2010
Mouillage de Duchâteau, Papouasie-Nouvelle-Guinée – 3 septembre 2010
Planche IV
Will et la Navy, golfe d’Aden – 12 mars 2011
Djibouti, avec la Marine française – 27 avril 2011
L’équipage © Jean-Luc Gourmelen
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Table des matières
—
Préface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
1. – Départ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
2. – Première tempête 15 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3. – Madère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
4. – Canaries . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
5. – Navigation vers le Cap-Vert . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
6. – Cap-Vert . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
7. – Notre transat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
8. – Martinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
9. – Dominique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
10. – République dominicaine . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
11. – Haïti . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
12. – Jamaïque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65
13. – Panama, San Blas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
14. – Panama, Isla Linton . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76
15. – Panama, suite et fin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80
16. – Vers les Galápagos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89
17. – Transpacifique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93
18. – Marquises . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97
19. – Tuamotu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112
20. – Îles de la Société . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118
21. – Beveridge Reef, Niue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125
22. – Tonga . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132
23. – Tonga bis, réparations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142
24. – Nouvelle-Zélande : Ka Maté ! Ka Maté ! . . . . . . . . . . . . 149
25. – Fidji . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159
26. – Fidji, Navadra . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169
27. – Vanuatu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 175
28. – Vanuatu 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 186
29. – Nouvelle-Calédonie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 190
30. – Papouasie - Nouvelle-Guinée . . . . . . . . . . . . . . . . 193
31. – Papouasie 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 199
32. – Torres Strait . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 205
33. – Timor-Oriental . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 207
305
34. – Kupang . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 212
35. – Rindja . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 219
36. – Bali . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 222
37. – Bawean, karimata ou la vie sauvage . . . . . . . . . . . . . 226
38. – Malaisie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 231
39. – Phuket . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 237
40. – Sri Lanka . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 240
41. – Maldives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 249
42. – Pétole chez les pirates . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 254
43. – Réparations en terrain militaire . . . . . . . . . . . . . . . 260
44. – Djibouti, sous l’emprise du khat . . . . . . . . . . . . . . . 266
45. – Mer Rouge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 270
46. – Suez, aux portes de l’Europe . . . . . . . . . . . . . . . . 272
47. – Méditerranée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 277
48. – Bienvenue en Europe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 280
49. – Remontée vers le Grand Nord, escale à l’île d’Yeu . . . . . . . 283
50. – L’arrivée… . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 290
Glossaire de mots à définition qovopienne . . . . . . . . . . . . . . 296
Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 302
Table des illustrations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 304
Table des photos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 304
—
Achevé d’imprimer par Durand-Peyroles
85200 Bourneau
Dépôt légal 4e trimestre 2011

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