Le Hounfor : le temple dans le vaudou haïtien Maison des esprits

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Le Hounfor : le temple dans le vaudou haïtien Maison des esprits
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Le Hounfor : le temple dans le vaudou haïtien
Maison des esprits, maison des hommes
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Le Hounfor
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Je remercie le centre Noroit de nous accueillir une nouvelle fois, fidèle à nos conférences, croyant à
nos projets, et nous soutenant matériellement et moralement.
Introduction
Aujourd’
hui, on va arrêter de faire la généalogie du vaudou, son histoire et ses influences. Version
plus muséographique, on visite un temple, on prend du temps à parler des objets, des fonctions, et
de la manière dont ils s’
insèrent dans une dimension sociale polyvalente (à la fois religieuse et
magique, mais aussi économique, politique, etc.). Pas beaucoup d’
images : il ne s’
agit pas de fixer
des représentations, un peu comme le film le Seigneurs des Anneaux a tué la représentation que
chacun se faisait de l’
histoire de Tolkien. Ici, que chacun se fasse son film dans sa propre tête, et le
jour où vous voyez des objets, vous calquez votre grille de lecture, fournie aujourd’
hui. On part de
l’
abstrait, le concret pour plus tard, il est important de ne pas se focaliser sur des exemples
particuliers.
Par ailleurs : images = pièges à touristes, et films très rares ou truqués. Voir Jean Rouch en
revanche, pour des transes en Afrique.
Méfiance aussi pour les expositions en Europe (je ne parle pas des hounfors européens) : ambition
soit ethnographique (on fige des pratiques qui sont vivantes, un objet n’
a de sens que mis en
situation, par exemple le trésor de la cathédrale d’
Arras dans le musée ne décrit qu’
imparfaitement la
religion chrétienne), soit artistique (et là des artistes haïtiens contemporains se font plaisir en parlant
du vaudou, mais là encore si une église n’
est pas un musée, ce n’
est pas non plus une galerie d’
art,
et on ne saurait prendre pour un hounfor les installations vues à Beaubourg, au Marché St Pierre, ou
en Bretagne (Le Bris) depuis quinze ans).
On cherche surtout ici à rendre compte de la richesse, de la densité et de la diversité des pratiques
cultuelles vaudouisantes, rien qu’
en Haïti (et encore plus vaste ailleurs), à partir de l’
étude de
l’
espace privilégié du culte, le temple, le hounfor. En France cérémonie catholique c’
est
essentiellement une messe, et objets de cultes pas très nombreux en comparaison. Là bien plus
large (au risque de s’
y perdre et de se diluer : ceux qui n’
aiment pas les descriptions dans les
romans, vous pouvez repartir, mieux vaut aujourd’
hui faire partie de ceux qui prennent du plaisir à lire
les deux pages de description de la pension Vauquer au début du Père Goriot).
Je propose un voyage, et les mots aux consonances si chantantes tiendront lieu d’
images sonores : il
ne s’
agit pas seulement de « faire exotique », mais dans le cadre d’
un cours sur le sujet, d’
acquérir
un minimum de vocabulaire technique, même si personne ne prend de notes.
NB : il était annoncé sur papier Noroit à la fois le temple et les rituels (danses), or le temple est à lui
seul un vaste programme, on mentionnera quelques rites pour faire vivre le temple et les objets, mais
rituels seront décrits plus précisément dans autres séances.
a) Un temple à la fois invisible et visible
- les autres Eglises occupent le terrain avec ostentation : congrégations religieuses, cathédrales,
sectes protestantes.
- peu visibles : pourquoi.
- POUR VIVRE HEUREUX VIVONS CACHE : Crainte des persécutions religieuses
(campagnes antisuperstitieuses, jouer un rôle politique occulte, fuir le touriste… )
- INVIBILITE SPATIALE … mais surtout se fond totalement dans l’
harmonie de la vie des
Haïtiens, et dans la nature environnante « comme un poisson dans l’
eau » : c’
est une ferme
ou c’
est un temple ?
Exemple d’
harmonie avec la nature : arbres et jardins et animaux autour ; un enfant
(chevauché) ou un animal peut modifier le cours d’
une cérémonie (araignée crabe (papa
Melbourne) Guédé Zaraignée). Tout est signe, mais rien n’
est grave.
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b) origine du mot
- le fon, langue fédératrice
- houn, for, houn, si, kpé, pé, etc.
- houn fo = houn = esprit , Fo = maison, maison des esprits = temple
Plan : maison des esprits (configuration générale, aménagements spécifiques), et maison des
hommes (comme le temple s’
insère dans l’
espace social, par le rôle qu’
il joue dans la communauté,
et par les rôles qu’
il donne à jouer à tous les membres de la communauté).
I)
Maison des esprits
I.1) A quoi ressemble un Hounfor ?
I.1.1) Le hounfor dans son environnement proche
SEUIL ? Pas de barrière autour, mais entrée symbolique est appelée le « portail » (cf Legba,
frontière entre monde des humains et monde esprit, et pourtant aucune frontière en fait ; par ailleurs
pas de délimitation entre profane et sacré, lent dégradé depuis la rue vers le djévo) : avec des arbres
reposoirs de Legba, utilisé pour son culte (ouvwé barriè pou nou).
LA NATURE ET LES HOMMES : Les arbres (arbres reposoirs avec bordure ronde en maçonnerie,
avec macoutes (sacoche en vannerie en feuilles de lataniers) accrochés aux branches, crânes
d’
animaux, chiffons… ) le jardin, ou la courette (avec cavité mini-prison aménagée à la suite d’
un
sep : cf image page 80 de Laennec Hurbon, on dirait un mitard de bagne militaire japonais rivière
kwai), la ferme (vie, animaux, odeurs)
Le toit et les tambours.
La demeure du houngan ou de la mambo, et celles des hounsi.
I.1.2) Le bâtiment principal : configuration générale
UNE OFFICINE PLUS PATRIOTE QUE RELIGIEUSE ? Vu de l’
extérieur, rien n’
indique sa fonction
religieuse dans sa forme, très variable, hormis tambours sur toit, ou guirlandes défraîchies (aizan),
ou néon (rouge et bleu, comme couleurs d’
Haïti), ou peintures murales sur la façade qui constitue le
fond du hounfo (opposé à l’
entrée) (et pourtant il se passe des trucs extraordinaires dedans) +
portraits des « Grands Nègres » (hommes politiques que l’
on soutient et avec qui on ne veut pas
avoir d’
ennui, et dont on réclame la protection et l’
aide : président de la république, députés,
sénateurs). Donc vu de dehors, on demande davantage la protection des hommes politiques, et vu
de dedans la protection du divin. On retrouve exactement le « rendez à César ce qui est à César, et
rendez à Dieu ce qui est à Dieu » (Saint Matth., ch. XXII, v. de 15 à 22 ; Saint Marc, ch. XII, v. de 13 à 17.)
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- INVISIBILITE FONCTIONNELLE : les fonctions religieuses sont noyées dans d’
autres
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fonctions (Durkheim explosé, pas de séparation rituelle, spatiale ou temporelle entre profane
et sacré, eh oui) : dans une cérémonie, palabres, puis chant, puis danse, puis rituel, puis
digression, tout est interprétable en termes religieux, et tout est trivial aussi.
- PETIT C’
EST MOINS VISIBLE : petite taille des temples, généralement : à l’
échelle de la
communauté proche, donc discret : la Gemeinschaft l’
emporte sur la Gesellschaft… permet
d’
éviter les mouchards, tout le monde se connaît.
- une des raisons de petite taille : religion très pauvre, n’
ont pas les moyens de faire
grand. Mais choix de sites naturels grandioses (les chutes d’
eau, les montagnes, les
cirques naturels, les carrefours, les clairières : le plein air en fout plein la vue).
- les vaudouisants ne souhaitent pas grande bâtisse : doit rester intime
- pourtant les temples peuvent se rendre socialement très visibles : la saison des raras, ou les
émeutes politiques
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TAILLE DU BÂTIMENT ? Taille variable, de très grand (plusieurs centaines de personnes, comme un
petit hameau, chez le houngan Mirabeau, à Bizoton (quartier populaire de Port-au-Prince) (mais on
est loin de la cathédrale, et de sa visibilité : pas de clocher, de muezzin… ) à très petit (quelques
dizaines de personnes ultra entassées dans une seule case, exemple chez le houngan Moïse, dans
cité Beauboeuf, faubourg de Port-au-Prince), claustrophobes et démophobes et ochlophobes (peur
de la foule) s’
abstenir
APPARENCE GENERALE : Look variable : rustique, kitsch, dancing, arène, MJC, hangar, maison de
sorcière, plus classe, hétéroclite, baroque, pompeux, inquiétant (dépend beaucoup des loas à
l’
honneur). Dans les grandes villes, moins de place qu’
à la campagne. Dépend aussi de la richesse
des adeptes.
ORGANISATION DU PROFANE VERS LE SACRE SANS RUPTURE FRANCHE : Par niveau
décroissant d’
ouverture aux non-initiés
Le péristyle
*
(pas de forme codée, hangar ouvert sur extérieur mais abrité des
intempéries ; dans pays froid comme EU et Europe, salle fermée) : ouvert à tous
Toiture en chaume (jusque dans année 50 : en fin de compte, tout comme bois et papier carton pour
baraques Japon à cause de tremblements de terre nous disait Anthony, toiture chaume renouvelé et
bien isolante, refaite après ouragans) ou en tôle ondulée ; cette toiture est soutenue par des poteaux
colorés (avec le principal : mitan)
La caye mystère
* Donnant sur péristyle,
(CAYE = mot créole signifiant « maison ») ou
bagui ou badji ou sobadji ou chambre des mystères (équivalent de chapelles transepts) (accès
prohibé si l’
on n’
est pas invité), sorte de tonnelle ou de pièce annexe dont le fond est occupé par un
ou plusieurs autels (pé) : parfois une ou plusieurs caye mystère, chacune pour une famille d’
esprits
(rada, petro, guédé, congo… ). Parfois une caye et son autel dédié à un seul esprit : Erzulie, Papa
Guédé, souvent le loa protecteur du hounfor (avec parfois sa parèdre ou autres membres de sa « famille »)
le guévo
* local sombre et fermé :
(se prononce souvent djévô : djo = protéger, dior = prière) :
encore plus inaccessible, jamais montré à un étranger. Chambre d’
initiation
* parfois une pièce spéciale pour les malades ; parfois une pièce spéciale pour recevoir les visiteurs ;
pièces d’
habitation (jouxtant le temple mais pas confondu avec) : le décor est alors petit bourgeois, le
style du logement n’
a pas de confusion des genres avec le temple proprement dit.
I.1.3) L’aménagement intérieur du Hounfor
Sol en terre battue, ou en béton
Plutôt tenu très propre (mais variable selon quantité des adeptes et discipline qui y règne, et très
salissant les vévés piétinés, l’
alcool répandu, la fumée des bougies, le sang des animaux sacrifiés, la
transpiration des danseurs en transe qui se roulent par terre) et en ordre : primo car image de
marque du houngan, secundo car lieu de présence des loas /sanctuaire
Mais en même temps, quel bric à brac !
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Peintures
murales : le nom de la Société (nom de la communauté religieuse, « Cotte d’
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« Dieu Devant », « Etoile Polaire », « Qui dirige », « Société Fleur de Guinée », « Société
souvenance »), les armes de la République d’
Haïti (Les Armes de la République sont : Le
Palmiste surmonté du Bonnet de la Liberté et, ombrageant de ses Palmes, un Trophée d'Armes
avec la Légende: L'Union fait la Force), les emblèmes des principaux loas, d’
autres motifs
ornementaux.
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Le poteau mitan (dans le péristyle) : objet éminemment sacré. il reçoit des hommages
pendant cérémonie ; chemin des esprits, la notion de verticalité très présente dans la symbolique,
notamment des vévés ; axis mundi, Yggdrasil (mais ni vraiment phallus (lequel plutôt dédié à Legba
(ou aux Guédés, ou à Damballah), et plutôt en Afrique), ni obélisque solaire) ; supposé contenir un
esprit, on doit respect à ce poteau même hors des cérémonies (comme ces gens qui entrant dans
une Eglise disent bonjour au tabernacle, comme si Dieu n’
était pas partout : forme de
métempsychose animiste chez nous aussi) ; décoré de bandes de couleurs vives disposées en
spirales, ou points clairs sur fond uniforme (façon aborigène). Base du pilier encastrée dans socle en
ciment de forme cylindrique ou conique qui peut servir de table pendant rituel.
Le pé (dans la caye mystère). Vient du Fon Kpé = la pierre (amusant : sur temple cathos, le
chrisme montre en français une lettre P (= rho)… le rot, le pet, c’
est pourtant pas scatologique). Bloc
de ciment/ maçonnerie parfois disposé en gradins pour faciliter rangement et exposition des objets
de culte. Niches cintrée à l’
intérieur (ou y range les bouteilles, etc.).
Vévés. (tracés ressemblant à des marelles, soit permanent dessinés au mur, soit très temporaires
dessinés sur le sol durant les cérémonies, avec poudre blanche, et rapidement piétinés). ON
consacrera un atelier à l’
interprétation symbolique des vévés.
I.2) Les objets du culte
Principes généraux de décoration :
Franges : AIZAN : frange faite avec des fibres du palmiste (Oredoxa regia). L’
aizan a le pouvoir
d’
écarter le mal, c’
est pourquoi il est porté par les initiés lorsqu’
ils sortent de leur retraite. L’
aizan est
souvent suspendu au linteau des portes du hounfo, au « poteau-mitan » ou à d’
autres objets sacrés.
Il recouvre parfois aussi les offrandes.
Des bougies partout, des flacons et bouteilles et bols et soucoupes et carafes partout : petit bon
ange des vivant, ou contient un loa, ou contient le gros bon ange de certains morts
Statues en ferronnerie, œ uvres d’
art
Bannières de procession en paillettes
Lampes éternelles (une ou plusieurs) : récipient rempli d’
huile sur lequel flotte une mèche allumée :
cf l’
Odyssée d’
Astérix)
Sur le pé : (moins dépouillé que sur un autel catholique, méga bric à brac, soit quasiment
entassé, soit bien aligné comme dans une vitrine (mais souvent sur les photos d’
anthropologues je
crois que l’
on a rangé aligné pour l’
occasion de la photo !!)
- la pierre sacrée
o (digression pierre tonnerre hâche néolithique arawak caraïbos (mais existait aussi en
Afrique !), ou météorite ou forme étrange ou couleur jolie : spontanément les enfants
sur la plage attirés par cailloux)
o (digression Cybèle mercure à Arras, kaaba, pierre enchâssée dans l’
autel chrétien,
temple maçonnique pierre brute et pierre taillée image de la perfectibilité de l’
homme)
o supposé parfois contenir un loa
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piste de danse entourée de sièges ou de gradins (apparence de dancing boîte de nuit ou
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salle de spectacle)
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o baigne parfois dans l’
huile
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les gôvi : cruche dans laquelle on fait descendre les loas et qui contient des esprits (le
parler nan dlo, un an après la mort les morts parlent à travers ces cruches d’
eau via le
houngan).
-
les POT’TÊT (notamment ceux des hounsi) : bouteilles scellées ou pot (contenant
cheveux, poils ou ongles d’
un initié) et donc contenant le Petit Bon Ange des initiés, afin de les
mettre à l’
abri de la capture par des magiciens hostiles (des bokors) ; ces bouteilles
contiennent aussi parfois des loas achetés qui sont ainsi prisonniers de leur maître (un peu
comme le démon Calcifer dans Le château ambulant, ou comme la lampe d’
Aladin). Un indice
qui montre qu’
un hounfor commence à être déserté et perd de son succès, ou qu’
un houngan
n’
est plus crédible, c’
est lorsque les initiés de ce temple viennent retirer leur pot’
têt pour le
mettre en dépôt dans un autre hounfor !
-
les colliers maldioques (par grappes entières, perles colorées) : pendent à
-
des fils tendus, ou recouvrent objets ou s’
enroulent autour des gôvi.
images de saints, chromos kitsch (façon Saint Expédit à la Réunion)
- paket’congo
-
cornes de taureau ou bélier
cartes à jouer
-
hochets : CHANSI (hochet en fer blanc)
-
bouteilles de vin, de liqueur, de rhum, de tafia, de clairin (rhum blanc bon marché) (offrandes)
matériel pour vévés : talc, poudres de couleurs
CROISIGNIN : « croix signer », croix rituelle
parfois livre pieux (bible, etc.) : sert pour un CHAPITREUR (individu, souvent un BOKOR, qui
pratique la divination en interprétant un passage d’
un livre pieux, choisi au hasard)
gad, wanga
osselets
objets magiques :
(objet à sortilège),
(divination
BOKONO)
durant les cérémonies, on dispose sur pé (ou sur poteau-mitan) les animaux sacrifiés
Asson
(c’
est le symbole du vaudou, cf La croix contre l’
asson ; prendre l’
asson = devenir
Houngan) : hochet du houngan et de la mambo, fait d’
une calebasse (par exemple comme coloquinte
dévidée et séchée) recouverte d’
un filet dans les mailles duquel sont prises des graines de
porcelaine ou des vertèbres de serpent) (avec beaucoup de colliers colorés par-dessus : agité
comme maracas)
un bassin rempli d’eau (petit ou possibilité immersion) : pour Damballah et /ou Simbi (kongo)
le « « chouket’»
planté sur le sol :
(sabre / coupe-chou) preuve que le maître est
dépositaire du secret et a gravi le grade suprême (la prise des yeux, clairvoyance) ; Metraux suppose
que c’
est le sabre d’
Ogou (pas sûr… ). Sabre souvent brandi dans processions par le La-Place.
CANARI : grande jarre consacrée et cassée pendant les rites funéraires. Les débris du canari
sont jetés dans un carrefour. Le rite du « casser canari » est surtout répandu dans le nord d’
Haïti.
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chandeliers
: cf Metraux :
est une fourche tordue (metraux p. 69) qui sertd o cde
reposoir ; chandelier en forme d’
assein). On vend le même genre de ferronnerie au
marché d’
Abomey en Afrique !
instruments de musique :
- mannouba sorte de contrebasse (planson p 48) : caisse de résonnance sur laquelle
on a adapté des lames d’
acier, souvent prises à un vieux sommier. Le timbre resemble
beaucoup à celui de la contrebasse.
-
le « hogan »,
-
tambours
pièce métallique battue avec une tige de fer, qui accompagne les
batteries de tambours rada
énormes (rangés sur toit, pendant par grappes) : classe de tambours,
contiennent esprits :
o tambours massivement brûlés par les antisuperstitieux en 1941 (censés abriter les
esprits, on brûle donc les dieux) : témoignage d’
Alfred Métraux dans son avant propos,
p. 13 : « C’est à Croix-des-Bouquets, près de Port-au-Prince, que j’eus la
révélation de la vigueur avec laquelle les cultes africains avaient proliféré en
Haïti : l’énorme pyramide de tambours et d’ « objets superstitieux », qui se
dressait dans la cour du presbytère, attendant le jour fixé pour un autodafé
solennel, en était comme le symbole. Je plaidais en faveur de quelques pièces
qui, pour des raisons esthétiques ou scientifiques [NB : des pièces anciennes, datant
de plus d’
un siècle, ce qui est beaucoup pour la nation haïtienne], auraient mérité d’
être
épargnées. En vain : le curé m’expliqua que l’honneur d’Haïti était en jeu et que
tout devait être détruit. »
o
BATTERIE = terme qui désigne en Haïti les tambours de l’orchestre. (sauf dans
« sirop de batterie », sirop de canne à sucre)
ROUMBLER
o
: appeler des loas par des battements de tambour
o Les tambours sont consacrés au cours d’
une cérémonie appelée PLACER-NANM
(pour ensorceler un objet, on dit aussi RANGER).
o Les plus gros tambours font parfois 140 kilos, se déplacent en les roulant sur eux-
ASSOTO
mêmes ou portés par plusieurs, son énorme qui porte très loin) :
=
tambour de grande taille frappé par plusieurs tambourinaires qui dansent autour de lui.
C’
est un objet sacré dont la fabrication s’
accompagne de longues cérémonies. Il est
habité par un loa et, pour cette raison, est fréquemment habillé.
o Trois sortes de tambours dans le service « rada » :
§
la « manman »
§
le « second », ou ségond (tambour moyen de la batterie rada)
§
et
le HOUNTO
(appelé aussi
, « esprit des
tambours » (HOUN = esprit, TO = Tambour), le plus grand des tambours rada),
le « boula »
(le plus petit des tambours rada, le tambourinaire
s’
appelle alors le boulayer) (selon la taille et le son).
§ Ces tambours sont battus à l’
aide de baguettes ou de crosses de bois. Les
tambours « rada » sont recouverts de peau de vache (son plutôt grave, rythme
plutôt lent).
o Dans le service « petro », deux sortes de tambours, battus à la main. Les tambours
sont recouverts de peau de chèvre, son plutôt moins grave, rythme plutôt rapide.
utilisés à la fois pour fête profane (bal) et pour religion (alterne dans une même soirée, au gré des
humeurs)
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Les costumes :
Couleurs rituelles selon le loa célébré (blanc prédominant, puis rouge, rose, puis noir ou bleu
marine). Souvent foulard autour de la tête, pour les femmes (rien à voir avec voile islamique : retient
AOUESSAN
les cheveux, pompe la transpiration, décoratif, encercle le visage).
(mot
introuvable sur Internet) : sautoir (collier avec un pendant) en soie, portée par les hounssi kanzo
(initiés).
Les offrandes :
MANGER-GUININ : (GUININ = Guinée = Afrique) on dit aussi MANGER-DYO
(DYO = dieux) ou MANGER-LOA (MANGER = offrandes de nourriture) : nourriture offertes
aux loas radas, par exemple dans les rites de consécration.
Nourriture : alcool (vu plus haut), autres exemples
Légumes : patates, ignames, malangas, mirilitons, maïs moulu, le tout souvent mélangé et arrosé de
sirop et d’
acassan (boisson jus de canne et de maïs ???). Pour les rites de sacralisation, on utilise
aussi du maïs, des cacahuètes grillées, et des morceaux de cassave (c’
est du manioc, aliment de
base dans les Caraïbes) (Kassav = groupe de musique antillaise)
MALANGA : Malanga
Xanthosoma sagittifolium
Aliment de base dans les Antilles, le malanga (que l'on nomme également «yautia» ressemble à la patate douce et au
taro. Comme la pomme de terre, il contient beaucoup d'amidon. Peler le malanga, puis le recouvrir d'eau fraîche. On le
cuit à l'eau environ 20 min et on le sert comme légume d'accompagnement ou en purée. Aux Antilles, on l'utilise râpé
pour préparer les acras, une sorte de beignet frit fait d'une pâte et de poisson ou de légumes assaisonnés.
MIRLITON (ressemble à un coing ou à une poire)
Le chouchou est un cousin des concombres, melons, margozes etc. Il leur ressemble peu en apparence, mais il joue un rôle important dans la cuisine réunionnaise ou antillaise.
Chez les martiniquais et guadeloupéens, on dit : christophine (du nom de Christophe Colomb qui la ramena aux Antilles et, en Haïti, on le nomme Mirliton. En Métropole (plutôt
dans la région du sud) on dira chayotte. Pour nous dans notre île c'est le chouchou
Son nom scientifique est Sechium edule. La plus grande diversité de formes de ce légume se situe en Guatemala. Le chouchou compte plusieurs introducteurs dans notre île nous
dit Roger Lavergne : Sully Brunet (1834), Th. Taunay (1836), Arnaud Bourdon (1861), il fut rapporté la première fois de Rio de Janeiro au Brésil.
C'est une plante grimpante à longues pousses s'agrippant à l'aide de vrilles foliaires. Elle est vivace, envahissante qui nous vient d'Amérique Centrale. Elle est très consommée
dans notre île, et très répandue dans tous les pays chauds. Dans certains endroits le chouchou fait l'objet de culture, c'est le cas à Salazie. Cette liane possède de larges feuilles
ovoïdes ou « triangulaires-ovoïdes » de 10 à 20 cm de large légèrement poilues, et s'agrippe aux arbres, murs, et autres grâce à ses vrilles foliaires. Il possède de toutes petites
fleurs blanches. Le fruit est côtelé, ridé à la base, recouvert d'épines plus ou moins proéminentes selon l'espèce. Il peut peser jusqu'à 1 Kg. Certaines variétés sont vertes, d'autres
verts pâles, et d'autres blancs.
Le chouchou comestible était déjà cultivé par les Aztèques, il s'est depuis répandu partout dans les tropiques et il est un légume important en particulier en Amérique Latine. Il
n'en demeure pas moins non plus dans l'île Bourbon !!!
Ces fruits sont comestibles et s'accommodent de différentes manières : crus, cuit à l'eau, farci, en daube, en gratin, en rougail etc.
Dans le sud de l'Espagne les jeunes pousses remplacent avantageusement les pointes d'asperges. Dans notre île, ces jeunes tiges sont consommées en brèdes soit fricassé ou
bouillon.
Il est important de noter que la graine unique de ce légume, est de grande taille, et commence à germer à l'intérieur.
Les propriétés médicinales du chouchou varient, mais en général d'une espèce à l'autre, elles sont toutes connues pour son action diurétique et anti-inflammatoire. Ce serait
également un sédatif léger. Sa faible valeur nutritive associée à la diversité de ses préparations culinaires, en fait un aliment précieux de tout traitement hypocalorique (obésité,
diabète).
Sa tige, isolée et lavée donne des rubans de paille blanc-argenté que les femmes de Salazie exploitent pour fabriquer des chapeaux, autres objets. Vers 1925, la paille de
chouchou fit la fortune de certains de la région où cette liane pousse en abondance : Salazie, Plaine des Grègues. C'est surtout pour la qualité de ses fibres qu'ils exportaient
jusqu'en Italie, que les salaziens cultivèrent ce légume sur de basses treilles. Les chapeaux « en paille d'Italie »étaient en fait tressés avec de la paille de chouchou de Salazie.
Cette commune organise chaque année la fête du chouchou
akra (comme akra de morue) : beignet fait de farine, de manioc, ou de malanga
Animaux voir plus bas
Atoutou : boulette de farine brûlante que les initiés serrent dans la main à la fin de leur période
de réclusion ( sorte d’
hostie pour la première communion !).
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- .c autres instruments : violons, flûte de roseau, clochette, maracas…
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Le principal instrument de musique, c’
est quand même la voix, utilisée à la fois en chanson, paroles
scandées, (on tape dans les mains) et onomatopées (« abobo » = acclamation rituelle qui ponctue
la fin des chants rada, ou exprime l’
enthousiasme religieux. L’
exclamation est accompagnée parfois
du bruit que l’
on produit en frappant la bouche avec les doigts).
Des ethnomusicologues ont enregistré des sons polyphoniques béninois chantés à onze voix par des
initiés à genou face contre le sol, ne se regardant pas mais coordonnées avec une complexité
stupéfiante (a quasiment disparu : années 50, lu dans Le Monde).
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Animaux :
Parfois bouc chèvre se balade avec chiffon sur cornes, et broute partout : cf hurbon p. 90, ou dans
enclos
Souvent animaux très dociles, se prêtent de bonne grâce au sacrifice, comme hypnotisés (ou
drogués ?), même taureaux !
Coq (cinéma adore cette image), poules, pigeons, pintades, perchés sur arbres reposoirs, picorent
dans cour ou jardin
Véritable ferme. Taureau blanc (pour Ogou), Bœ uf…
I.3) Les spécificités selon les loas
Dieu unique mais multiples esprits
Un peu comme une église catholique se focalise sur certains saints qu’
elle choisit particulièrement
d’
honorer
- attributs du loa :
Véritable vestiaire à attributs, objets et déguisement saisi au moment où le loa chevauche le chwal.
Simbi ou Damballah : un bassin (+ Serpent en fer forgé)
Guédé : la croix noire
Zaka : sacoche en toile (macoute), chapeau de paysan (paille, toile) ou foulard rouge
Ogou : machette, sabre, cigare, rhum, mèches allumées, manteau rouge
Agoué : bateau (comme église de St Jean de Luz !! Eglise St Jean Baptiste)
heure actuelle), béquilles
Legba : Phallus de bois ou de pierre (surtout en Afrique à l’
Baron Samedi : Chapeau haut de forme ou chapeau melon, redingote, maquillage blanc ou farine,
tête de mort, lunettes de soleil, croix, fausse tombe en ciment
Jumeaux divins (Marassas): plats + poupée
Ezili : véritable cabinet de toilette, avec rose, blanc, rouge
Criminel ( ?) ou Baron Criminel (proche d’
Ogou) ou Lemba ou Zaou ou Adum : « pince » (barre de
fer) se dressant au dessus d’
un brasier qui brûle dans la cour : durant le rite on jette fer rougi dans
l’
eau sulfureuse (à la source Balan) coupé de clairin (rhum blanc bon marché) + poivre + piment +
cœ ur de bœ uf hâché + petites charges de poudre explosive (qui en pétant déclenchent des
possessions) : le « bain » flambe, on remue avec tige de bois (sic), puis on ramène la pince rougie et
on la lance dans le bain : mariage de l’
eau et du feu. Un fouet. La mambo est possédée et fouette les
hounssi !
Conclusion partielle
Très grande variété de façons d’
aménager un hounfor, mais continuité de la symbolique et du
principe, d’
une communauté à l’
autre. Pourtant pas de dogme, pas de hiérarchie.
C’
est le propre des traditions vivantes, et de l’
art populaire : porté par son passé et par une
symbolique profonde et universelle, mais décliné au gré des modes, des personnalités, des
contextes. C’
est comme cela qu’
une religion opprimée, une religion de dominée, se maintient malgré
l’
absence de corpus écrit, de soutien des autorités, et sans pape.
Cette vitalité du temple s’
explique aussi par le rôle majeur qu’
il joue dans la vie sociale, non
seulement parce que le temple remplir des fonctions qui soude le groupe, y compris des fonctions
économiques et politiques, mais parce que le temple intègre en donnant à chacun un rôle à la fois
religieux et domestique : tout le monde trouve sa place, le groupe est plus fort, et la foi perdure. C’
est
ce que l’
on verra lors d’
une prochaine séance.
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: mélange fait avec du « sirop de batterie » (sirop tiré de la canne à sucre) et de l’
eau.
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II) Maison des hommes
Houn fo = maison des esprits. pourtant grande spécificité :
- Dans Eglise chrétienne on ne s’
y rend que pour prier et culte, grande séparation sacré
profane, sauf églises touristiques où short interdit mais entrée payante, mélange des genres,
Prague (idem synagogues : kippa et musée).
- Dans hounfo, répond à tous les besoins, même les plus humbles : fait social total.
- Le hounfo n’
est pas un temple fermé, mais plutôt une « cour » qui groupait autrefois les
ménages de la « grande famille »
II.1) Les fonctions religieuses au sein du hounfor
- fonction d’
intégration : tout le monde a un rôle :
§ la Société religieuse a un nom ( parfois société magique, secte ruj dirigée par un
bokor) : noms (nom vaillant) de Sociétés Hounfor (ou Société Soutien) : « Cotte
d’
Or », « Dieu Devant », « Etoile Polaire », « Qui dirige », « Société Fleur de
Guinée », « Société souvenance »
§ Chaque titre est ronflant
§ Chaque fonction a une utilité à la fois religieuse, domestique et sociale (pas de
frontière)
Les rôles :
HOUNGAN / MAMBO
HOUNGAN : prêtre / magicien qui pratique à la fois la religion vaudou et la magie blanche (vaudou
blanc) (mais souvent « on travaille des deux mains »).
o LA HOUNSI
§ houn si = épouse des esprits (mais peut être un homme)
§ se dit au féminin : homme ou femme qui a passé par les rites d’
initiation et qui
assiste le houngan ou la mambo, non seulement dans les rites, mais aussi dans
l’
entretien quotidien du hounfor
§ Il s’
agit notamment de gérer son personnel de hounsi : être exigeant mais ne pas
les voir filer
Rôle crucial et solidarité mutuelle (un peu mère fille : la mère soutient sa fille quand elle est bébé, la
fille soutient la mère quand elle est impotente), dépendance réciproque, chanson adorée au box
office des hounssi
Vévélo : marque l’
équilibre du
Vévélo, c’
est la hounssi
Vévélo, cé hounssi
temple
(du
mot
vévé,
dessin
Qui fait la mambo, zégouélo !
Ki fê Mambo vévélo
symbolique)
est la hounssi
Zégouélo, cé hounssi Zégouélo, c’
Zégouélo : c’
est le sentiment qui
Ki fê Mambo zégouélo Qui fait la mambo, zégouélo ! unit la mère mambo à ses
Si la mambo tombe
Mambo tombé
« enfants » (esprit saint père
fils ?)
La hounssi la relève,
Hounssi levé
Si la mambo culbute
Si Mambo kilbité
Pitite : Pitite Caye, super hounssi
La hounssi se tient debout
Pipite li yo kampé
A sa place !
Pou li
Histoire d’
un retournement : au
Zégouélo, c’
est la mambo
Zégouélo, cé Mambo
début c’
est la hounssi qui fait la
mambo, la mambo tombe,
Qui fait la hounssi
Ki fê hounssi
renversement, c’
est la mambo
Zégouélo !
Zégouélo
qui fait la hounssi
CONFIANCE CAYE (ou MAITRESSE CONFIANCE ?)
SERVANTE DE L’
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LA FOULE DES ADEPTES : des femmes portant leur bébé à l’
africaine, surla hanche, des paysans
avec de grands chapeaux de paille, des enfants, des militaires, des ouvriers, de vieilles dames
convenables et des prostituées, des messieurs bien sapés et des camionneurs en marcel. Tout le
monde fraternise.
II.2) Le rôle quotidien du hounfor au sein de la communauté : un fait social total
Pas de distinction sacré profane, en grande partie parce que tout est trivial et simple, mais aussi tout
acte quotidien est considérés comme éminemment important : la hiérarchie des besoins n’
existe pas
dans le vaudou, manger c’
est sacré, dormir aussi, et l’
acte sexuel = possibilité d’
entrer en contact
avec la création (et acte de création en soi) est acte essentiellement divin
II.2.1) Une officine en partie commerciale
- La concurrence entre les hounfors : fait penser à la concurrence entre les synagogues privées
chez les pharisiens (sauf qu’
en Haïti il n’
y a pas de Sadducéens défendant le Temple Central).
- Et bien entendu attirer les fidèles : anecdote : en fonction du nombre de pot tête.
II.2.2) De nombreuses fonctions hors de la religion
- Usage personnel du houngan / mambo : lieu de vie, pas loin de son habitation personnelle
(comme curé habite presbytère) : on y reçoit ses amis, membres de la maisonnée y flânent
(grand salon-cuisine-atelier
- fonction sociale
Lieu de rencontre équivalent de l’
arbre à palabre africain (ou de l’
esplanade Beaubourg) :
discussions problèmes de la communautés, problèmes humains plus larges (l’
homme marche sur la
lune, etc.),
Restaurant communautaire : repas unique servi au milieu du jour dans un grand chaudron, préparé
sur place
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Sur vévés
HONGUENIKON
Chef des chœ urs (souvent sert aussi de REINE CHANTERELLE)
LAPLACE ou LA-PLACE : le maître des cérémonies. Armé d’
un sabre ou d’
un coupe-liane
(machette), il conduit les processions, rend les honneurs aux loas, et assiste l’
officiant
Les PORTE-DRAPEAUX
REINE DRAPEAUX
REINE SILENCE
IMPERATRICE DE LA JEUNESSE DAHOMEENNE (on dirait titres des sapeurs et des ambianceurs
zaïrois)
DAME DIRIGEUSE
DAME AGACEUSES (« qui poussent les hommes à la consommation » Metraux p. 62)
HOUNTOGUI (Planson p. 52)
Tambour (à ne pas confondre avec un simple « Tambouillé »)
PITIT’
CAYE
« enfant de la maison » : initiée qui a le droit de tout voir et de tout toucher (super hounsi) : planson
pp 53 54
PITITT-FEUILLES (ceux qui ont reçu des soins)
HOUNSI KANZO (en cours d’
initiation) : HOUNSI qui a passé par certains premiers rites d’
initiation
HOUNGNO (HOUN = esprit, GNO = nouveau né) = celui qui naît à l’
esprit = l’
apprenti
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II.3) Le réseau des hounfor
Ils n’
ont pas le téléphone, ou ne l’
avaient pas, ni de pigeon voyageur, ni de télégraphe à bras de
Chappe, ni signaux fumée, et pourtant info à fond (voyageurs itinérants, enfants inrepérables,
magie ?) :
Hounfor = Lieu d’
accueil des jeunes initiés, qui voyagent beaucoup : trouvent gite et couvert, s’
ils
connaissent « les mots de passe » et les bonnes adresses. Ils marchent en chantant, dans la joie,
sieste sous les manguiers, bains dans rivières. Traversent tout le pays, des Cayes (sud ouest) au
cap haîtien (nord est), ou de Port au prince (la côte) aux pentes du Morne la Selle (montagne de près
de 3000 mètres, 10 degrés).
Beaucoup de jeunes hommes vivent ainsi de temple en temple depuis la petite enfance, sans
domicile personnel (mais grande famille du vaudou), mais sans être à la charge de personne
(rendent petits services : couture notamment, y compris invention de vêtements nouveaux, etc.)
II.3.1) Aspects politiques
- lieu de décision communautaire et collégiale (même si mambo / houngan a souvent dernier mot,
doit tenir compte des avis et pressions des ouailles)
- réseau d’
information parallèle bien plus efficace et rapide que radio et télé : 1963 tentative
d’
invasion US
- lieu de résistance oppression : dictature politique intérieure (mais pas oppression colon : à
l’
époque, il n’
y avait pas de hounfor au milieu des villes, mais seulement dans les villages
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ceux qui ne savent où dormir
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Hôpital avec nattes et malades allongés
Université parallèle (univ pop, quoi !!! Noroit = Hounfo = musique, théâtre, cinéma, politique, science,
culture gé = la vaudou bobo)
Cours de danse et chant, salle de bal
Travaux ménagers (ménage, cuisine, écosser les pois… )
Atelier de couture : de jeunes filles cousent et repassent en bavardant
Copularium lieu de drague et de coït : éducation sexuelle pas malsaine mais gosses voient adultes
baiser
Lieu de soutien psychologique mutuel : un nouveau venu dans la communauté, un émigrant revenu
au pays, soutien psy aussi de la mambo par les hounsis, et inversement. On vous retourne aussi des
intrus : venus prêcher la bonne parole Mormon ou Jéhovah, la communauté les accueille et ils
(re)deviennent vaudou. J’
ai essayé avec un Témoin de J à Paris, M. Pallud, Martiniquais, de le
convertir au vaudou, mais échec : il manquait l’
aspect communautaire, et puis je n’
ai rien d’
un
vaudouisant dans mes aspects, et puis je mets en avant l’
aspect magique contre le religieux. Mais
bon moyen de faire fuir les TJ et les Mormons d’
Arras : je suis vaudouisant, ils fuient, pas de point
d’
accroche (alors que « j’
aime le porno sur Internet » attire leurs prêchi prêcha). Plus généralement
fonction thérapeutique du vaudou, sert d’
asile psychiatrique mais justement sans enfermement, par
intégration de ceux qui ailleurs seraient considérés comme déviants (comme l’
idiot du village
autrefois,etc.)
Lieu d’
expression artistique réellement populaire : au lieu d’
un art d’
esthètes, un art profondément
ancré sur attaches ethniques profondes, sur tradition à maintenir et à retrouver, et sur goûts simples
et kitsch, sans jugement de classe (mais chouette quand même).
Lieu de fête : bal les samedi soir dans les hounfors (imaginez dans une église !) sauf si cérémonie
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II.3.2) Une religion sans dogmes, sans hiérarchie, sans pape, mais qui ne connaît pas de
schismatiques ni d’
hérétiques
Grand Mêt n’
a rien à voir avec un Grand Maître maçonnnique : c’
est Dieu lui-même, ou Mawu Lisa
Pas de pape, ni évêques, ni cardinaux, pas d’
infaillibilité papale, pas de Livre de référence, et
pourtant religion bien vivante.
Pour reprendre formule maçonnique, le vaudouisant est « un homme libre dans une loge libre »
Minces variations d’
un hounfor à l’
autre, surtout différences villes / campagnes et nord / sud, mais
unité de culte maintenue, pas de ruptures ni de schisme
Grâce à :
- contacts entre temple
- religion ésotérique avec filiation initiatique, donc l’
esprit du culte se maintient et se reproduit.
- Religion souple : la nouveauté des histoires entre loas, comme Paris Match (Damballah Wedo
trompe Aidah Wedo avec Ezili, etc.), il existe une actualité religieuse
- Religion intégratrice : à partir d’
une base dahoméenne et d’
une forte composante bakongo et
chrétienne, intégration de religion musulman sénégalaise, caraibos arawak, etc. (multi polaire) +
composition géographique : aux Radas et Guédés se sont ajoutés au XIXème les loas Petro (ou
aspect Petro) donc la nouveauté intégrée. Dabns autre mythologie, le nouveau dieu est le fils ou
le mari de l’
ancien dieu. Ici c’
est une autre face, un autre avatar de l’
ancien dieu
- La modernité est intégrée sans vatican 2 : dans le décorum (le néon), dans les attributs
symboliques (Agoué comme capitaine d ebateau à voile, puis comme capitaine de bateau à
moteur ; Baron samedi a des lunettes de soleil), dans les objets de culte (poupée barbie), le vévé
est fait avec « Jonhson baby powder » (talc pour fesses de bébé).
- Donc pas de nostalgie d’
une époque où le culte était mieux (messe en latin… ) puisque par
essence le culte est inactuel, à la fois très ancien, et sans cesse renouvelé.
- En même temps vaudou est pratiqué par des confréries autonomes dont chacune a souvent son
style et ses traditions propres, donc les observation ethnologiques diffèrent beaucoup d’
un
anthropologue à l’
autre.
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cimarrons),
oppression religieuse, invasions US… Mais si les hounfors décident a contrario de
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pas intervenir, rien ne pourrait les faire intervenir.
- Les opinions politiques se forgent, mais sur un mode philosophique, on prend du recul, on écoute
tout le monde, femmes et hommes, adolescents, adultes et vieillards : sorte de Café philo avant
l’
heure, ou de salon des précieux en moins snob, ou de club politique façons girondins, en moins
ambitieux et paranos.
- Lieu de résistance à police, mais pas de subversion en soi, ni d’
illégalité : lorsque descentes de
police (parfois mais moins que bals popu en France), pas d’
arrestation sans que la mambo ait
donné son accord aux flics, lesquels craignent et respectent mambo ou houngan.
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Documents pareils