organisation d`un secteur de radiologie interventionnelle

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organisation d`un secteur de radiologie interventionnelle
ORGANISATION D’UN SECTEUR DE RADIOLOGIE
INTERVENTIONNELLE
F. JOFFRE
La radiologie interventionnelle est une activité spécifique qui implique des moyens
humains et matériels ainsi que des structures spécifiques. Les actes de plus en plus complexes,
concernant des malades de plus en plus lourd, devenant fréquemment des interventions
combinées (radio-chirurgicales ou radio-endoscopiques), ne peuvent plus se réaliser dans les
salles d’angiographie classique, situées de façon aléatoire au sein du service de radiologie.
Le professionnalisme de la radiologie interventionnelle, la nécessité de répondre aux
impératifs de l’accréditation tant en terme de qualité radiologique qu’en terme d’hygiène
imposent de créer de nouvelles structures adaptées ou de modifier l’existant.
OBJECTIFS :
Le secteur de radiologie interventionnelle ou bloc de radiologie interventionnelle :
(BRI), doit pouvoir répondre à l’ensemble des fonctionnalités internes d’un bloc opératoire
chirurgical. Il doit fonctionner en univers clos mais présenter des possibilités de connexions
externes. Il doit également fonctionner avec un équipement radiologique optimal. Les règles
d’organisation d’un bloc chirurgical imposent de raisonner en terme de circuits.
I LES CIRCUITS :
Quatre grands types de circuits doivent pouvoir être mis sur pied, concernant le
patient, le personnel, matériel, et enfin les images (ce circuit est spécifique au BRI).
L’aménagement des structures doit pouvoir permettre l’individualisation de ces
circuits :
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* circuit patient : Il comporte plusieurs étapes :
- accueil - réception, préparation (pré-anesthésie), ce temps doit être fait à
l’extérieur du bloc dans une salle de préparation, le malade devant être transféré de son lit sur
un brancard spécifique et ensuite préparé à l’intervention. Il est accueilli par une infirmière et
préparé selon un protocole pré-défini pour son intervention (voie veineuse, monitorage...).
- transfert : les brancardiers du service sont chargés du transfert mais ne
pénètrent pas dans le bloc qui présente un accès malade avec une porte automatique avec
code.
- après intervention : nouveau transfert vers la salle post-interventionnelle pour
réanimation et surveillance avec feuille d’anesthésie et feuille de soins. La surveillance post
opératoire est faite par une infirmière sous la responsabilité médicale d’un anesthésiste.
* circuit personnel : (médecins radiologistes ou autres, anesthésistes, manipulateurs,
infirmières instrumentistes, aides-soignants, brancardiers) L’ensemble du personnel qui
pénètre dans le BRI utilise un sas de déshabillage avec changement de tenue obligatoire,
utilisation d’un pyjama de bloc, de sabots ou couvre-chaussures, de masques et calots suivie
d’un lavage de main.
* circuit matériel : tout le matériel, avant de pénétrer dans l’enceinte du BRI, doit être
conditionné. Une structure de stockage importante et facilement accessible est indispensable
avec une gestion informatisée du stock et des réserves nécessaires pour au moins deux
semaines avec un réapprovisionnement chaque semaine. Le stockage des médicaments
fonctionne comme dans une officine avec un stock minimal, en double dotation. Pour chaque
intervention, le matériel est préparé dans un salle de préparation sur une table roulante, avant
transfert en salle d’intervention. Après intervention, le matériel a deux destinées :
- le petit matériel médico-chirurgical (pinces, ciseaux, plateaux etc...) est transporté en
salle de nettoyage et de décontamination où il est traité par trempage dans des bacs de
décontamination puis nettoyage dans une machine à laver spécifique et reconditionnement sur
place avant transfert à la stérilisation centrale.
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- le matériel a usage unique, qui représente la part la plus importante, est jeté dans des
sacs plastiques à double emballages et acheminé vers un compacteur avant élimination.
- les matériels coupants et piquants sont stockés avant élimination dans des collecteurs
spécifiques.
* circuit des images et de l’information : Le caractère isolé du BRI implique, autant
que faire se peut, l’utilisation des moyens modernes de communication.
- l’accès au dossier-patient peut se faire de façon traditionnelle avec consultation à
l’intérieur du bloc mais l’utilisation d’un réseau d’image, permettant d’obtenir les comptesrendus, les résumés d’hospitalisation et les images d’autres modalités, parait être
indispensable pour le futur.
- les images numériques peuvent être transférées sur une console de traitement
permettant de se connecter éventuellement à plusieurs salles, ainsi que le collage automatique
après acquisition en suivie de bolus. Cette console doit être connectée à un reprographe laser.
Les techniques actuelles sans chimie permettent d’installer ce système à l’intérieur du BRI.
Cette console doit être connectée au réseau, s’il existe, à condition que les images soient au
format DICOM.
Les images scopiques doivent pouvoir être transmises par circuit vidéo, de la salle
d’intervention à la salle d’interprétation et si possible à l’extérieur du BRI pour avis extérieur
ou pour enseignement.
Pour l’interprétation, qui doit pouvoir se faire à l’intérieur du BRI, il est possible de
connecter le système de dictée à un serveur extérieur au BRI, connecté au secrétariat médical.
De même les systèmes de dictée par reconnaissance vocale pourront être utilisés
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II LES AUTRES SPECIFITES
- la salle d’intervention :
Superficie moyenne 50 - 60 m2 permettant d’accueillir outre le matériel purement
radiologique, le matériel d’anesthésie, du matériel d’échographie, du matériel chirurgical ou
endoscopique.
Moyens de radio protection. Elles doivent correspondre au norme de l’OPRI et de la
circulation Euraton de mai 2000.
- accès par portes plombées automatiques et condamnables.
- murs bétonnés ou plombés (2 mm).
- paravents plombés fixes pour les consoles de commande et d’injection.
- paravents plombés mobiles sur roulette et/ou fixés à la table et/ou sur
suspension plafonnière.
Matériel d’anesthésie et de réanimation permettant la prise en charge d’une
complication et également la réalisation d’un intervention chirurgicale sous anesthésie
générale :
- fluides médicaux et aspiration par le vide.
-
appareillage
de
surveillance
permettant
l’enregistrement
électrocardiographique sur deux dérivations en simultanée, ainsi que les courbes de pressions
artérielles périphériques, la fréquence cardiaque, les coupes de pressions dans le cathéter et les
courbes de saturation en oxygène.
- chariot mobile de réanimation avec seringue autopousseuse, médications,
ventilation artificielle à pression positive, matériel d’intubation, de canulation etc...
- un défibrillateur externe.
Equipement chirurgical. Il doit comporter un scialytique performant ainsi que du
matériel de coagulation électrique, d’aspiration chirurgicale ainsi que les boites d’instruments
nécessaires en cas de conversion chirurgicale.
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Les équipements radiologiques sont envisagés dans un autre cours.
- les locaux annexes. Ils comportent :
- un local technique pour chaque salle.
- une salle de préparation du matériel.
- une salle de repos du personnel et de réunion.
- une salle de stockage du matériel,
- une salle d’interprétation,
- une salle de stockage d’anesthésie,
- une salle de décontamination.
- la salle post interventionnelle (décret du 5 décembre 1994). Elle peut être
compartimentée en différents éléments :
* salle de préparation.
* éventuellement des boxes pour malades ambulatoires.
* la salle post-interventionnelle qui doit être identique à celle d’un bloc
opératoire et permettre la surveillance jusqu’au maintien de l’autonomie respiratoire, de
l’équilibre circulatoire et récupération neurologique. Elle doit comporter des fluides médicaux
et l’aspiration par le vide, la surveillance du rythme cardiaque et saturation en oxygène, de la
pression artérielle d’un défibrillateur externe ainsi qu’un système d’assistance ventilatoire.
L’ensemble doit disposer d’un système d’alerte.
III LES REGLES D’AMENAGEMENTS
- l’accès général doit se faire par une porte à code.
- l’accès aux salles d’intervention par portes coulissantes automatiques et
condamnables.
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- les planchers peuvent être, soit en linoléum à joints soudés, soit par dalles
antistatiques, amovibles mais avec des joints étanches et lavables, s’il existe un plancher
technique.
- les murs sont peints sur support de fibre de verre et lavables. L’aménagement des
plafonds pose des problèmes en particulier en raison des nombreux points de fixation des
suspensions plafonnières. Un plafond lavable est impossible à réaliser, mais la fixation au sol
des arceaux est préférable.
- le renouvellement de l’air avec climatisation doit appliquer les règles de l’OMS (13
volume/heure). Le risque bactérien et viral des climatisations impose une surveillance
régulière (légionellose).
- des protocoles de lavage, de décontamination des salles doivent être appliqués deux
fois par jour ainsi qu’à la demande en cas d’intervention septique.
- un réseau de détection incendie avec bouches de désenfumage automatique et portes
coupe feu doivent être mises en place selon les règlements actuels.
- le secteur doit comporter des prises de réseau informatique, des téléphones
numériques de type mains libres.
- des points de lavage des mains chirurgicale avec auges doivent être implantés en
nombre suffisant avec cellules de distribution automatique de produits bactéricides.
- le mobilier doit être en PVC, suspendu au mur ou sur roulette de façon à faciliter le
néttoyage.
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IV LE PERSONNEL
Le fonctionnement d’un BRI justifie la présence d’une équipe médicale et paramédicale ayant bénéficié d’une formation spécifique. Cette équipe doit comprendre, suivant
les cas :
- un ou plusieurs radiologues ayant satisfaisant aux critères de formations requises.
- une présence permanente de médecins anesthésistes réanimateurs.
- une équipe para-médicale comprenant par salle d’intervention, une infirmière,
éventuellement une infirmière de salle d’opération (IBODE) et un manipulateur diplôme
d’état, les deux ayant reçu une formation spécifique.
La présence d’une équipe d’aides-soignants est souhaitable.
La présence d’un infirmier anesthésiste est également souhaitable en cas de plusieurs
salles d’intervention.
Un réprésentant du personnel doit être responsable en radio protection et avoir reçu la
formation requise.
REALISATION :
La réalisation d’un BRI doit obéir à certains critères :
- critères financiers.
- critères d’adéquation avec la structure hospitalière.
- critères politiques de relation avec les autres services d’hospitalisation (par exemple
chirurgie vasculaire).
L’environnement hospitalier doit être pris en compte :
- nécessité d’un secteur de prise en charge des urgences avec possibilité pour le
radiologiste d’assurer 24 h/ 24 h des gestes endovasculaires.
- présence d’un service de réanimation.
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- présence d’une activité de médecine et de chirurgie vasculaire dans le cadre d’une
activité spécifique de radiologie interventionnelle vasculaire avec staffs multi-disciplinaires,
dossiers communs, protocoles de prise en charge et de surveillance élaborés en commun.
- possibilité d’hospitalisation de semaine et de jour.
Les relations avec la chirurgie vasculaire peuvent imposer des solutions de compromis
mais la tendance actuelle est à l’organisation de plateaux techniques communs comprenant
entre autres les blocs opératoires et les services d’imagerie. La réalisation d’un BIR à
proximité du bloc opératoire chirurgical est souhaitable pour pouvoir bénéficier de structure
commune (salle post interventionnelle).
SOLUTIONS
Les solutions proposées sont multiples.
1°) L’utilisation d’une salle de radiologie au bloc opératoire. Cette solution a la faveur
de certains chirurgiens mais elle a l’inconvénient de déboucher éventuellement sur une
marginalisation progressive de la radiologie. Elle a beaucoup d’inconvénients techniques :
- les tables chirurgicales, même modifiées, ne permettent pas la souplesse d'acquisition
d'images qu’autorisent aujourd'hui les tables d'angiographie : le déplacement automatique du
plateau, l'utilisation plus commode de l'arceau permettent des acquisitions complexes (suivi
d'embol, angiographie rotationnelle) qui optimisent l'imagerie artérielle.
- les systèmes de radiologie numérisés portatifs présentent également des lacunes :
taille du champ d'exploration limitée, cadence image faible par rapport aux performances des
installations d'angiographie modernes, qualité inférieure de l'image scopique, absence de
documents couvrant 1'ensemble de l'arbre artériel. L'absence habituelle d'injecteur
automatique dans les blocs chirurgicaux ne permet pas une opacification satisfaisante des
vaisseaux. La réalisation au bloc opératoire oblige la pratique obligatoire de l'artériographie
diagnostique préalable alors qu'en salle de radiologie, le temps diagnostique peut être couplé
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au temps thérapeutique. Ces appareillages ne sont pas enfin, soumis à autorisation et donc à
un renouvellement régulier, à l'inverse des installations d'angiographie. Ceci peut poser des
problèmes de dérive qualitative.
- l’inconvénient majeur concerne la radioprotection : outre l'absence de formation à
l'utilisation des rayons X et à la radioprotection, les performances plus limitées de
l'appareillage conduisent à une augmentation du temps d'irradiation. Les structures chirurgicales sont fréquemment inadaptés à l'utilisation des rayons X (absence de paravents plombés,
absence de plombage des murs). Il n'y a pas en effet, d'obligation de plombage des murs pour
utilisation au bloc opératoire d'un ampli mobile. Cette pratique risque de représenter un
danger non négligeable pour le malade et 1'équipe chirurgicale, étant donné l'utilisation de
plus de plus fréquente de ces méthodes endovasculaires et la longueur des interventions.
L'installation en bloc opératoire d'une salle d'angiographie complète pourrait être proposée.
Elle implique une restructuration totale de la salle d'opération dans le sens d'une meilleure
radioprotection. Elle pose surtout le problème de sa rentabilité, son utilisation risquant d'être
limitée.
2°) L’équipement opératoire d’une ou plusieurs salles de radiologie représente une
alternative que nous devons défendre. Ce choix respecte à la fois les règles de radioprotection
ainsi que les règles d'asepsie propres aux blocs opératoires. Il présente plusieurs avantages :
- utilisation des meilleures conditions radiologiques possibles : cadence d'acquisition,
angiographie dynamique, radioscopie de haute résolution... ;
- rentabilisation des installations, utilisées à la fois pour toutes les angiographies
diagnostiques et pour toutes les interventions radiologiques (radio-endoscopiques ou
radiochirurgicales). Cette ouverture permet a la radiologie d'accueillir 1'ensemble des
spécialités souhaitant, pour ces interventions combinées, bénéficier à la fois des appareillages
et des compétences radiologiques en matière de guidage et de navigation endovasculaire ;
- possibilité instantanée de « conversion », du geste endovasculaire en geste chirurgical
en fonction du déroulement de l'intervention. Cette nécessité de conversion est toutefois
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exceptionnelle (1 cas sur 152 patients traités pour anévrisme de l'aorte abdominale par voie
endoluminale dans la série de Blum) ;
- coût modéré de la transformation d'un secteur de radiologie vasculaire en bloc
radiochirurgical (majoration de 10% environ pour 1'ensemble des travaux d'aménagement
d'une salle)
- conditions optimales de radioprotection, locaux adaptés, personnel formé à
l'utilisation des rayons X et à la radioprotection, matériel soumis aux règles d’autorisation
d'équipements lourds et donc soumis à renouvellement régulier.
Cette stratégie, ménageant l’approche multidisciplinaire de la prise en charge du
patient, peut se réaliser de plusieurs façons :
- soit inclusion de la ou des salles d’angiographie à proximité d’un bloc opératoire afin
de bénéficier des caractéristiques techniques du bloc opératoire en matière d’accès, de circuit
et de condition de celle-ci, les salles fonctionnent alors alternativement en mode diagnostic
avec accès de type radiologique ou en mode chirurgical avec accès réglementé de type
chirurgical.
- soit un secteur isolé à l’intérieur du service central de radiologie avec une table
adaptée aux besoins et obéissant à l’ensemble des impératifs radiologiques et chirurgicaux.
- une salle modulable, dont la « partie chirurgicale » peut être isolée à la demande par
des cloisons amovibles.
CONCLUSION :
L’aménagement d’un BRI répond à deux types d’objectifs :
- objectif clinique d’amélioration des soins :
* amélioration des conditions d’hygiène,
* amélioration de la sécurité,
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* amélioration du confort du patient et du personnel.
- objectif stratégique :
* adaptation à l’évolution vers le concept de « minimal invasive therapy ».
* réponse aux critiques concernant les conditions d’hygiènes des activités d’un
service de radiologie.
* valorisation de la radiologie interventionnelle.
* réponse aux impératifs réglementaires :
° consignes du CLIN,
° normes européennes de radio protection, ceci dans un optique future
d’accréditation de ces blocs de radiologie interventionnelle.
Les perspectives sont à la création d’un plateau technique interventionnel regroupant
toutes les modalités de « minimal invasive therapy » réalisées sous contrôle de l’image, quelle
qu’en soit la modalité technologique :
TERRAIN NEUTRE
MULTIDISCIPLINARITE
MULTIMODALITES THERAPEUTIQUES :
* interventions guidées par Rx
* interventions guidées par ultrasons.
* interventions guidées par endoscopie.
* chirurgie vidéo assistée.
* interventions guidées par IRM.
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