3. Le touriste et le voyageur Jean-Didier Urbain 3.1. L`histoire d`un

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3. Le touriste et le voyageur Jean-Didier Urbain 3.1. L`histoire d`un
Jean-Didier Urbain
3. Le touriste et le voyageur
– « L’idiot du voyage:
histoires de touristes »
(1991)
Histoire d’un mépris
3.1. L’histoire d’un mépris
• Aujourd’hui (en
2012): 1 milliard de
voyages
internationaux.
a. Le stéréotype
des relations nord/sud
• Quelle est l’image du
touriste aux yeux de
tout un chacun?
b. L’accumulation visuelle
– « J’ai vu déjà Alexandrie,
Lafté, Le Caire, Fostat,
Héliopolis, Giseh,
Schoubra, Les Pyramides;
– « je vais voir encore
Mansourah et Damiette, et
la plus belle partie du Delta
en redescendant le Nil: ce
sera donc complet quant à
l’Egypte. »
– (Lettre de Gérald de
Nerval, 1843).
• Qui y a-t-il de particulier,
de propre au tourisme
dans ce langage?
– Goût pour l’image
– Empressement
– Superficialité du
comportement
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d. Un comportement
individualiste
c. Un comportement de masse
• Le touriste se déplace
en ‘troupeaux’
(Urbain, p.50)
•
la galerie des miroirs à Versailles
• Confession d’un touriste:
– « En descendant de la
citadelle, je pris un
morceau de marbre du
Parthénon.
– J’avais aussi recueilli un
fragment de la pierre du
tombeau d’Agamemnon et
depuis j’ai toujours dérobé
quelque chose aux
monuments sur lesquels
j’ai passé. »
– Chateaubriand, Itinéraire
de Paris à Jérusalem, 1811
e. Le mépris vient d’ailleurs
• Le mépris touristique
vient d’ailleurs
• André Métraux, 1939
(« Itinéraires)
– « Madame raconte son
voyage; encore une fois
je constate la naïveté et
la stupidité des
voyageurs de cette
classe ».
f. De la fierté à la honte
• Le passage de la
fierté d’être touriste à
la honte s’est fait très
rapidement.
3.2. Le touriste face au
voyageur
Le procès du touriste
• Le procès ne devrait pas
être un procès
– du touriste…
– mais du tourisme !
Touriste, va
!!!
• Si…
– l’image du touriste est
dévalorisée,
– celle du voyageur est
extrêmement
valorisée.
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Les récits de voyage
•
•
•
Mais dans les imaginaires, le
voyage est distingué du
tourisme.
Le touriste et le voyageur sont
deux figures opposées.
L’espace du touriste est
Être le premier
• Le voyageur se veut
toujours inaugural.
• « Syndrome de
Armstrong », fantasme du
premier pied sur la lune.
– l’espace de la foule, du
groupe, de la civilisation, du
banal.
– Il corrompt, il détruit.
•
L’espace du voyage est un
espace d’héroïsation, de
distinction.
Vision du touriste par le
voyageur
• Le voyageur méprise
le touriste.
• A. Gerbault à SainteHélène.
– « Ma sensibilité ne
peut supporter les
endroits fréquentés
par les touristes »
3.3. Le voyage aujourd’hui
• Est-il possible
aujourd’hui d’être un
voyageur?
Crise identitaire
• Le voyageur supporte
mal le touriste qui est,
en fait, son propre
reflet.
• Le miroir se brise
• Le voyageur perd son
statut héroïque!
Plus de ‘terra incognita’?
• Est-il possible
aujourd’hui d’être un
voyageur?
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Les mailles du réseau
•
Louis Bertrand
– « Damas elle-même, - Damas, la
reine du Désert, - est tout aussi
facilement accessible.
– « Un chemin de fer à crémaillère
vous fait gravir, sans trop de
cahots, les pentes roides du Liban
et vous dépose, au bout de
quelques heures, sur une petite
place poudreuse toute grouillante
de cochers et de pisteurs d’hôtels.
– « On entre en fiacre dans la ville
des Omeyyades. Le pèlerin luimême, le pèlerin du SaintSépulcre, n’a plus grand mérite à
visiter les lieux saints… »
• Michel Serres:
– « l’espace est plein, les
lieux sont pleins, chaque
section est pleine […]
– « Vous diriez, ailleurs, que
la terre est riche, vous ne
pouvez le dire ici:
– « elle est dense, elle est
saturée, elle est bondée,
elle est au comble, elle
étouffe. J’étouffe. Une
claustrauphobie me saisie
dehors. » (cité par Urbain,
p.94)
3.4. Stratégies de reconquête
du monde par le voyageur
• Lorsque l’accès par
chemin de fer n’existe
pas, c’est la voiture
qui prend le relais.
• 1ère stratégie:
• Puisque tous les bouts du
monde sont atteints,
• 2ème stratégie:
• Se glisser
• 3eme stratégie:
• Se fondre avec le décor.
• Les exemples sont
nombreux
– dans les intervalles, dans
les interstices,
– dans les petits espaces
vides où peut encore
survivre l’aventure.
– et que le voyageur cherche
toujours à se distinguer du
touriste,
– il va essayer d’innover
dans la manière de les
rejoindre
– dans les ouvrages, les
récits de voyages,
– écrits par ces grands
explorateurs.
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Evans-Pritchard
•
« Quand je suis allé chez les
Nuers,
Le Wwoofing
•
– je ne m’intéressait pas
particulièrement au bétail,
– mais eux, oui,
– si bien que, bon gré mal gré,
– j’avais à m’y intéresser aussi.
•
– « Le samedi, nous avons
emporté les chapeaux au
marché de Salamanque, à
Hobart, la capitale de l’île ».
– « Debout derrière l’étal, en
vendant ces chapeaux que
j’avais fabriqués moi-même, je
me suis sentie étrangement
fière de mon travail artisanal,
et un léger sentiment de
supériorité m’a envahie face
aux hordes de touristes qui
traînaient sur le marché. »
« Il me fallait éventuellement
– acquérir un troupeau
personnel
– pour que l’on m’accepte
– ou du moins que l’on me
tolère. »
• 4eme stratégie adoptée
par les voyageurs qui
veulent se distinguer
des touristes:
• Il ne suffit plus de voir,
• Il s’agit de bien voir!
Le Courrier International,
Novembre 2005
•
J.-D. Urbain, p.269:
– « Nous, nous sommes allés à
Florence cette année.
– Vous êtes allé à Firenze!
Veinards! Ville magnifique
n’est-ce pas? Vous y êtes
restés longtemps?
– Oh, le plus longtemps
possible, mais je devais
reprendre mon travail le 4 et…
• http://www.wwoof.org
• World-Wide
Opportunities on
Organic Farms
– J’espère que vous avez quand
même eu le temps d’aller dans
ce petit ristorante où l’on
mange la meilleure
saltimbocca a la romana. Il est
dans un passagio dont j’ai
oublié le nom, mais il suffit, en
partant de la piazza X,
d’emprunter la via Y qui longe
le palazzo Z et, au bout, de
tourner à gauche puis à droite.
– Euh… non!
– Quel dommage! Là, mon
vieux, vous êtes passé à côté
de l’essentiel. Le truc à ne pas
manquer. »
3.5. Conclusion
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