Catalogue exposition HEROINES-Guyancourt 2014

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Catalogue exposition HEROINES-Guyancourt 2014
« Minerva Valencia de Puebla est nourrice à New York. Elle envoie au Mexique 400 dollars par semaine. »
Photographie : Dulce Pinzón – courtesy K-Echo photo
Éditorial
P
our cette nouvelle édition du Temps des femmes, l’exposition Héroïnes
s’intéresse à la représentation féminine dans l’art au travers de la figure de
l’héroïne.
Qu’est-ce qu’une héroïne ? Au sens figuré, littéraire, est héroïne toute femme dont
la vie, réelle ou fictionnelle, peut faire l’objet d’un récit (roman, film, etc..). En ce
sens, toutes les femmes sont potentiellement des héroïnes ! Mais cela suffit-il pour
être un personnage, ou une personne « héroïque », de celles dont on loue le
courage, l’abnégation ou la noblesse de la conduite ? Autrement dit, faut-il avoir un
destin exceptionnel, au-delà du « quart d’heure warholien », pour être une héroïne ?
Sans doute l’héroïne contemporaine s’incarne-t-elle quelque part au milieu de ces
deux acceptions : tel est l’axe principal que nous développerons dans cette exposition.
Héroïnes fantasmées vs. Héroïnes du quotidien : deux figures de la femme ? À
l’heure des « stars » de la télé-réalité, quelle porosité entre la femme « ordinaire » et
le « rôle model », entre la « super woman » du quotidien et l’icône rêvée ?
Ouvrant le propos à des formes alternatives de l’art contemporain, nous avons
souhaité donner, dans le parcours de l’exposition, une place particulière à l’univers
de la BD, qui regorge d’héroïnes fantastiques ou au contraire bien ancrées dans le
quotidien, depuis la littérature des comics et du manga, jusqu’aux parisiennes
délurées des dessinatrices françaises…
Au travers d’œuvres de tous médias, photographies, sculptures, dessins, broderies… mais aussi de documents audiovisuels issus des archives de l’Ina, et de représentations de figures féminines qui ont marqué l’Histoire, nous évoquerons en
filigrane la place de la femme dans les sociétés contemporaines, dans ses luttes,
parfois politiques, et ses conquêtes.
Marie Deparis-Yafil et Isabelle Vernhes
Commissaires de l’exposition
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Juliette Clovis
« Ève 1 » - N° 1/3
80 x 80 cm, vinyle sur plexiglas, 2012
Cette œuvre de l’artiste française Juliette Clovis représente « la » femme qui pourrait être vue
comme la première et l’ultime « héroïne » : Ève. Essentielle à la mythologie biblique, première
femme et mère de l’Humanité, Ève apparaît comme la première femme du récit de l’histoire
de notre monde. Cependant, la représentation d’Ève, ici en tentatrice, est à prendre au second
degré. Ne tentant aucune exégèse, cette Ève, qui pourrait tout aussi bien être Lilith, se veut
simplement une évocation synthétique de toutes les femmes à travers les âges, de la manière
dont celles-ci ont été perçues, notamment au travers des religions, jusqu’à l’émergence d’une
« nouvelle Ève », la femme libre et conquérante que représente l’artiste aujourd’hui.
Juliette Clovis vit et travaille aujourd’hui à Bordeaux. Elle a développé une technique très
particulière et dont elle est l’initiatrice : la découpe et le collage de vinyle sur plexiglas. Le travail
de Juliette Clovis est axé sur la représentation de la femme et sur son image. Dans une quête
d’esthétisme affichée, elle livre dans ses créations sa vision du beau et de l’étrange, mélangeant
codes ethniques, références historiques et religieuses, et univers parfois oniriques, pour créer
ces portraits de femmes, qu’elle veut fortes et intrigantes, parfois fragiles mais toujours
puissantes. Influencée dans ses premiers travaux par le Pop Art, et plus récemment par la photographie contemporaine, l’iconographie religieuse, la peinture flamande ou le lowbrow art,
l’artiste a ainsi peu à peu inventé un univers graphique singulier.
Ève 1 © Juliette Clovis
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Julie Dumont
« HÉROÏNES » - Appartenant à sa série de performances Newstoryboard.
Performance le soir du vernissage de l’exposition : installation in situ, dessin en technique mixte
(Posca, peinture…), 2014
Pour « Héroïnes », Julie Dumont a imaginé l’une de ces impressionnantes installations de
dessins dont elle a le secret, un « newstoryboard » autour du thème de l’héroïne et de la représentation féminine, dans une technique « proche de l’art pariétal » et de la fresque. Comme
une sorte de « rêve dessiné », elle enchaîne, au cours d’une performance de plusieurs heures,
les scènes, les représentations, les images, inspirée dans l’immédiat par le dialogue d’un film
projeté dans l’espace de l’installation, dans une sorte de work in progress le temps de l’œuvre.
Selon l’artiste, « visionner un film, c’est se laisser prendre au jeu et entrer dans une caverne allégorique et mentale ». Reste ensuite, dans l’exposition, cet espace recouvert des bribes de la
rencontre entre l’artiste et ces images en mouvement. Après « HÉROS » (en blanc sur noir)
réalisée et présentée à Guyancourt pour « Screen Play » Julie Dumont revient avec « HÉROÏNES »
(en noir sur blanc) où elle représente ses icônes féminines, ses héroïnes - celles de la génération
80 - telles des constellations sur grand écran.
Le travail de Julie Dumont se déploie à travers différents médiums : volume, peinture, couture,
mais son expression principale reste le dessin dont elle exploite toutes les formes - gravure, sérigraphie, animation, graphisme, et performance dessinée, au travers des « NEWSTORYBOARDS© »,
qu’elle pratique depuis 2005. Son univers plastique s’inspire du quotidien, de la mémoire
collective (culture populaire, l’habitat…) et fait le plus souvent référence au septième art. Elle
est aussi à l’origine d’œuvres participatives intergénérationnelles comme notamment LE
PROJET NAPMOND (installation en broderie) qu’elle a présenté à NUIT BLANCHE à la Mairie
du 13e arrondissement à Paris en octobre 2013. Julie Dumont développe aujourd’hui ses
ATELIERS JULIE.D (ateliers pluridisciplinaires pour les enfants de 2 à 100 ans).
Julie Dumont, Performance Nuit Blanche, Saint-Quentin-en-Yvelines © J.J. Kraemer/photothèque CASQY/octobre 2012
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Sandrine Elberg
Série « Paris Burlesque »
Série d’œuvres photographiques, 21 x 29,7 cm chacune (hors cadre), tirage sur papier satiné,
encadré, 2011.
« Les photographies présentées ici sont issues de la série “Paris Burlesque”, qui rassemble des
portraits de femmes qui ont accepté de me recevoir chez elles en région parisienne et se sont prêtées
au jeu des métamorphoses, l’espace d’un instant », explique l’artiste. Ce projet photographique
est le résultat d’un travail intensif et quotidien de huit mois, fait de rencontres et de confiances
mutuelles, à la conquête d’un univers plus intime et secret qu’il n’y paraît. Au fil des rencontres
et des liens tissés avec ses modèles, Sandrine Elberg découvre un phénomène social et
culturel : des spectacles créés par des femmes pour les femmes. Le Burlesque à la française
réunit tous les physiques, tous les corps et toutes les origines, révélant une sorte de « nouveau
féminisme » décalé et décomplexé. Ces jeunes femmes se veulent fortes et héroïnes de leur
propre vie, exprimant avec vitalité et humour une revendication de liberté, qui peut passer par
la séduction, hors des codes et des diktats.
Photographe et plasticienne vivant à Paris, Sandrine Elberg réalise des séries photographiques
à la lisière de la photographie documentaire, de la photographie plasticienne et de la
sociologie, s’intéressant au gré de ses rencontres et de ses voyages à différentes réalités et
facettes de la représentation féminine, depuis la bourgeoise moscovite jusqu’à la parisienne
burlesque, passant en revue quelques typologies féminines contemporaines. Son travail de
portrait, montré dans de nombreux festivals et récompensé par de nombreux prix, fait la part
belle à une mise en scène soignée, offrant une esthétique recherchée et efficace dans son
apparente simplicité, parfois proche de l’image picturale ou théâtrale.
Louise Berlingot – Série Paris Burlesque © Sandrine Elberg
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Eliz Dream
« Super mamie » - Série « Mamy Mimi »
40 x 65 cm, tirage photographique sur papier Perlé, contrecollage sur Dibond
Cette photographie de la jeune artiste française Eliz Dream fait partie d’une série intitulée
« Mamy Mimi », dans laquelle l’artiste met en scène sa propre grand-mère, dans un hommage
pop et coloré. À travers une mise en scène particulièrement étudiée, elle lui redonne une
seconde jeunesse en la métamorphosant tour à tour en héroïne de conte de fée, en femme de
la haute société, en super-héroïne ou en femme cougar.
Eliz Dream est née en 1982. Elle vit et travaille à Lille, où est installé son studio. « Tombée dans
l’art » dès sa plus tendre enfance, sa mère étant peintre/photographe, elle décide assez naturellement de suivre ses pas. À l’adolescence, elle a déjà plus d’une corde à son arc et se dirige
vers des études d’arts graphiques et plastiques. Particulièrement attirée par la décoration et la
photographie, elle développe un sens aigu de la mise en scène, du détail et de la couleur, dans
un travail photographique très personnel. Influencée par le pop art, le street art et les arts graphiques, ses œuvres débordent volontairement du cadre photographique : personnages et
objets insolites se font acteurs de scènes glamour ou plus décalées, avec très souvent une
touche d’humour et de légèreté, qui sont la marque de fabrique de l’artiste.
Super mamie – Série Mamy Mimi © Eliz Dream – Courtesy PopSpirit
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Sacha Goldberger
« Working Out » - Série « Mamika »
120 x 80 cm, tirage sur papier Fine Art, 2010
Courtesy Galerie Sakura, Paris
Cette photographie est extraite de la série « Mamika », réalisée par le photographe français
Sacha Goldberger, mettant en scène la grand-mère de l’artiste dans des situations parfois
tendres, drôles ou plus grinçantes. Mamika, héroïne de l’artiste à plusieurs titres : en tant que
personnage majeur et récurrent d’une série photographique, au point de devenir une véritable
« héroïne » médiatisée, une icône pop, mais aussi et surtout héroïne dans les yeux de l’exenfant que fut l’artiste, qui a réussi à convaincre son aïeule de se plier à ses visions avec amour
et humour.
Mamika, alias Frederika, est cependant bel et bien une héroïne de la vraie vie, comme le
raconte l’artiste. Née à Budapest 20 ans avant la guerre, juive d’Europe centrale, baronne,
Frederika est issue d’une famille très riche et respectée. Pendant la guerre au péril de sa vie, elle
a sauvé dix personnes. Frederika a survécu au nazisme, ainsi qu’au communisme. Elle a
immigré en France après la guerre, sa famille sous le bras, contrainte par le régime communiste
de quitter son pays clandestinement sous peine de mort.
Une véritable héroïne donc, dans tous les sens du terme, et une série désormais célèbre dont
le décalage et l’humour sont le fil conducteur. « Il faut pouvoir s’amuser de tout, même de soi.
J’ai essayé de montrer qu’on pouvait encore s’amuser de la vie à 90 ans », commente Sacha
Goldberger.
Sacha Goldberger est né en 1968 d’un père normand et d’une mère juive hongroise. Il débute
très jeune comme directeur artistique dans une agence de publicité, milieu dans lequel il
travaille de nombreuses années avant de devenir freelance. Il dit cultiver le décalage et la
fantaisie depuis toujours, profondément marqué par la culture juive ashkénaze, d’où il tire,
entre autres, son sens de l’humour et de l’absurde et son goût pour les super-héros.
Working Out – Série Mamika © Sacha Goldberger – Courtesy Galerie Sakura
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Yann Kempen
« Chambre 7 »
70 x 60 cm, acrylique sur toile, 2012
Courtesy Galerie Artisti, Rueil-Malmaison
Lors d’un voyage au Japon, Yann Kempen découvre la culture manga et, avec elle, les représentations de ces héroïnes souvent délurées. Il commence alors une collection de portraits
inspirés de l’esthétique manga, élargissant la simple reproduction de vignette de bande
dessinée, travaillant l’encre noire et la couleur dans des acryliques de beau format.
Yann Kempen, né en 1963, vit et travaille dans le Nord. Il est issu de l’école des Beaux-Arts de
Valenciennes et expose depuis 1992. « Je m’intéresse à toutes les nouvelles icônes de la contreculture en me servant d’un style de peinture “très classique“. Les images photographiques et
télévisuelles sont mes sources, m’inscrivant en cela dans un courant de peinture de sensibilité postpop », commente l’artiste.
Chambre 7 © Yann Kempen – Courtesy Galerie Artisti
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Bertrand Lefebvre
« Catwoman »
80 x 80 cm, collage BD et acrylique sur toile, 2012
Courtesy Galerie Artisti, Rueil-Malmaison
L’œuvre présentée dans l’exposition « Héroïnes » est un clin d’œil à la fois à l’univers de la BD,
des comics et des super-héros. Ici, une super-héroïne, personnage de fiction de l’Univers DC.
Créée en 1940, « Catwoman » est souvent l’incarnation d’une femme abusée, qui doit mourir
pour changer d’identité, reprendre le contrôle de sa vie et se venger. Dans la culture populaire
occidentale, Catwoman est devenue un symbole de la femme fatale, associant élégance, indépendance, beauté et ambivalence.
Bertrand Lefebvre est illustrateur et peintre. Sa carrière a d’abord commencé dans la marine.
Alors qu’il rentre d’un voyage à Cuba, il réalise puis publie son premier carnet de voyage
imaginaire à bord d’un sous-marin pendant la seconde guerre mondiale. Il donne ensuite des
cours de carnet de voyage au Musée du Quai Branly. Inspiré par la culture amérindienne
autant que par les blockbusters américains et l’univers des Comics, il réalise aujourd’hui les
portraits de ses héros les plus divers, utilisant en fond une toile couverte de vieilles images de
BD qui situent ainsi son univers. « Je travaille essentiellement sur la mythologie américaine, celle
des héros, des icônes, des grands espaces… mais aussi des travers de l’histoire et d’un pays qui me
fascine, des ruines de Detroit jusqu’aux montagnes des Black Hills », précise l’artiste.
Catwoman © Bertrand Lefebvre – Courtesy Galerie Artisti
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Alfredo Lopez
« Mme Banner »
195 cm de haut, mannequin, peinture acrylique et résine, 2014
Pour « Héroïnes », Alfredo Lopez a choisi de créer une œuvre inédite, un clin d’œil à la
revendication de « parité », valable aussi pour le monde des super-héros !
Hulk est la seule création de Marvel, grand spécialiste des super-héro(ïne)s s’il en est, qui puise
son super pouvoir dans son émotion, indépendamment de toute volonté. « Cette particularité
provient de l’enfance de Hulk. Certes, son potentiel énergétique a été révélé lors d’une manipulation
scientifique avortée, mais c’est surtout dans sa jeunesse compliquée que je devine la racine : enfant
timide, réservé, n’aspirant qu’à une vie tranquille, il n’avait pas l’étoffe d’un héros. Il incarne la force
brutale gratuite et absolue : ni mauvaise, ni bonne, ni volontaire, ni calculée. Juste brute. D’où mon
intérêt pour Mme Banner, la mère du super-héros : porteuse du potentiel de son fils, mélange de
douceur innocente, d’un devenir en gestation. J’aime cette histoire humaine : la mère de Hulk pleine
de son enfant, représente la première des deux extrémités de la vie » précise l’artiste. « Mme Banner
est morte sous les coups de son mari. Alors c’est qui, le super-héros ? »
D’origine bolivienne et né en Espagne, Alfredo Lopez vit et travaille près de Chartres. Son
parcours professionnel varié l’amène à travailler dans des domaines allant du multimédia (infographie, web design) à l’illustration et la bande dessinée. Totalement inscrit dans notre
époque, son travail puise ses racines dans notre quotidien. Alfredo Lopez célèbre en effet
l’ordinaire et s’intéresse plus particulièrement à la condition féminine. Pour créer ses œuvres, il
se base sur la collecte d’informations les plus triviales, de visu ou de sources diverses et de tous
supports : confidences, bribes de conversation, blogs… L’œuvre devient ainsi un portrait de la
trace, une narration de saynètes de vie universelles et si éloquentes qu’on ne peut que
s’identifier et sourire en contemplant ses œuvres. Polyvalent, l’artiste travaille sur divers
supports tels que la toile, le plexiglas ou encore des mannequins de vitrine qu’il reconstruit,
tout en conservant le dessin comme technique initiale.
Mme Banner © Alfredo Lopez
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Miss.Tic
« Soyons heureuses en attendant le bonheur »
65 x 50 cm, tirage aux encres pigmentaires sur papier Fine Art Museum Rough 300 g, 2011
Courtesy Galerie Lélia Mordoch, Paris
Depuis toujours, Miss.Tic défend dans son désormais célèbre travail au pochoir l’image d’une
femme sensuelle et fantasque, et surtout libre, forte et indépendante. Une femme qui prend sa
vie en main et se veut héroïne de sa propre vie, que celle-ci soit exceptionnelle ou ordinaire.
Tout aussi célèbre pour ses aphorismes parfois poétiques, parfois plus cinglants, Miss.Tic
propose ici une sorte de maxime rêveuse et un brin ironique, enjoignant les femmes contemporaines à prendre en main la construction de leur bonheur, qui ne peut évidemment
dépendre que d’elles et des conditions qu’elles construisent pour elles-mêmes.
Figure de l’art de rue depuis le milieu des années 80, Miss.Tic est une artiste plasticienne et
poète d’art urbain. « Elle est, écrit Christophe Genin, la première à utiliser les murs pour raconter
sa vie, ses désirs, ses ruptures sentimentales, ses travers, ses fantasmes, comme lieu d’expression
directe et synthétique. »* Dans son œuvre, elle joue sur les stéréotypes de la femme séductrice,
venant percuter ses épigrammes poétiques. Ce contraste fait imploser l’expression aguicheuse
du dessin. Son œuvre provoque un questionnement, foulant aux pieds les archétypes de la
« femme marchandise »*. « Les images de femmes que je représente sont issues des magazines
féminins, je les détourne. Je développe une certaine image de la femme non pour la promouvoir
mais pour la questionner. Je fais une sorte d’inventaire des positions féminines. Quelles postures
choisissons-nous dans l’existence ? », analyse l’artiste.
Soyons heureuses en attendant le bonheur © Miss.Tic – Courtesy Galerie Lélia Mordoch
*Christophe Genin, Miss.Tic, femme de l’être, Les Impressions Nouvelles, 2008.
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Piet.sO & Peter Keene
« Happy Birthday Mr President »
210 x 140 x 140 cm, Leds RGB, Jelly en silicone, châssis métallique, moteur et bande sonore,
2009
« Happy Birthday Mr President », « sculpture spectacle titubant » mi-édifice, mi-pièce montée,
est une œuvre un peu à part dans la production de ce duo d’artistes. Elle évoque, de manière
particulièrement inventive et originale, l’icône absolue et l’héroïne pop par excellence : Marylin
Monroe. Faite d’une multitude de « jellies » en silicone éclairées de Leds sur une structure
métallique, suggérant la silhouette de l’actrice moulée dans la robe mythique portée le soir de
l’anniversaire du président John Fitzgerald Kennedy, elle ondule sur elle-même et se déplace,
murmurant le non moins mythique air « Happy birthday Mr President », que la star adressa au
président américain ce soir de mai 1962, quelques semaines avant sa disparition. Une
apparition un peu fantomatique et vacillante pour cette Marylin-là, prenant de la distance avec
le mythe, et inscrivant la notion de destinée malheureuse propre à l’héroïne romanesque, dans
ce rapport de gloire et de chute qui fascine toujours.
Artiste française, Piet.sO vit et travaille entre Paris et Bruxelles. Depuis 1997, elle produit des
dispositifs infiniment poétiques, évoquant l’enfance mais aussi la femme et à la féminité dans
sa dimension la plus « originelle », dans une sorte de recherche de pureté, avec une certaine
virtuosité technique et plastique, se mettant au service de cette poésie. « Ses sculptures,
installations, armées parfois de sons, de lumière ou de mouvement, sont un hommage au vide empreinte du merveilleux, de la chute, du passage. » En 2001, elle rencontre Peter Keene, avec
qui elle produit régulièrement des pièces communes, en plus de son travail personnel. Peter
Keene, artiste anglais, vit à Paris et travaille à Bruxelles. Né dans les environs de Birmingham,
sur les terres de la révolution industrielle, Peter Keene manipule les techniques comme une
grande boîte de jeux. Ondes, rayons, réinventions du monde : il en fait ce qu’il veut !
Happy Birthday Mr President © Piet.sO et Peter Keene - photo Piet.sO
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Dulce Pinzón
3 photos de la série « La véritable histoire des super-héros », 2005-2010
« Catwoman » : Minerva Valencia de Puebla est nourrice à New York. Elle envoie au Mexique
400 dollars par semaine. 53,3 x 63,3 cm, tirage sur papier, encadrement bois blanc, protection verre.
« Wonder Woman » : Maria Luisa Romero de l’État de Puebla travaille dans une laverie
de Brooklyn, New York. Elle envoie au Mexique 150 dollars par semaine. 53,3 x 63,3 cm,
tirage sur papier, encadrement bois blanc, protection verre.
« Fantastic Twins » : Elizabeth et Enrique Alonzo de l’État de Puebla sont employés dans un
restaurant à New York. Ils envoient au Mexique 400 dollars par semaine. 43,3 x 53,3 cm, tirage
sur papier, encadrement bois blanc, protection verre.
Les trois photographies présentées ici font partie d’une série aujourd’hui mondialement
connue : « La véritable histoire des super-héros », réalisée par la photographe mexicaine
Dulce Pinzón. Elle y fait le portrait de ces héros ordinaires « quasi invisibles », qui œuvrent
chaque jour dans les rues de New York. Dulce Pinzón déguise ces hommes et ces femmes du
quotidien, tous immigrés latino-américains, en super-héros, afin de souligner le don de soi,
le sacrifice dont ils font preuve pour leur communauté. Le travailleur immigré mexicain à
New York est l’exemple même du héros qui passe inaperçu : il travaille souvent de longues
heures dans des conditions extrêmes, et économise sur son salaire, pour envoyer de l’argent
au Mexique à sa famille et à sa communauté. Face à chaque photographie mettant en scène
le travailleur dans son contexte professionnel, l’artiste fait figurer une légende où sont
indiqués son nom, sa ville natale, sa profession, la somme d’argent qu’il envoie aux siens et
à quelle fréquence.
Née en 1974 à Mexico, Dulce Pinzón a vécu et travaillé à Brooklyn avant de retourner
s’installer dans son pays natal. Elle étudie la communication et les médias à l’Universidad de
las Americas à Pueblo Mexico et la photographie à l’Université d’Indiana en Pennsylvanie. En
1995, elle s’installe à New York où elle étudie à l’International Center of Photography et c’est
en 2010 qu’elle s’impose vraiment avec sa série « La véritable histoire des super-héros »,
série présentée notamment aux Rencontres d’Arles de 2011.
Catwoman : Minerva Valencia de Puebla est nourrice à New York. Elle envoie au Mexique 400 dollars par semaine.
© Photographie : Dulce Pinzón – Courtesy K-Echo photo
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Yveline Tropéa
« Le Printemps » - Série « Les Quatre saisons »
166 cm x 248 cm, broderie sur toile, 2013
Cette impressionnante œuvre richement brodée fait partie d’une série de 4 œuvres
intitulée « Les quatre saisons », allégorie du temps qui passe et ici, de la vie d’une femme.
Cette femme, c’est l’artiste elle-même, qui, en filigrane de tout son travail, se fait héroïne
de son art, explorant la représentation de soi, exercice classique depuis la Renaissance
mais toujours énigmatique, et l’autobiographie. La profusion des motifs, l’éclatement, la
surenchère baroque rendent l’œuvre légère, mais elle n’est pourtant pas dénuée de symbolique. Son visage contraste avec la débauche presque rococo de la coiffure, produisant
un premier effet ludique destiné à masquer ce que l’artiste appelle « la dureté de la vie »,
et le désenchantement, qui n’épargne personne. D’une certaine manière, ce type
d’autoportrait rejoint, dans son esthétique, certaines formes de vanités luxuriantes,
rappelant par contraste que sous la joyeuse profusion se tapit le monde des ombres. Ce
n’est donc peut-être pas tant un hasard si, comme Marie-Antoinette avant de périr sur
l’échafaud, elle arbore ici une coiffure des plus extravagante, composition délirante,
symbole de la plus absolue frivolité contre la plus certaine vacuité, du jeu contre le sérieux
de la vie, de la démesure contre la misère.
Le travail d’Yveline Tropéa pourrait se définir comme une tentative de sublimer l’autobiographie, et en particulier les tourments de la vie intime du corps, dans sa précarité et sa
fragilité, par une réappropriation esthétique et fantasmatique de sa représentation. Têtes
brodées, planches anatomiques, tableaux allégoriques, vanités, madones, toutes ses
œuvres sont sous-tendues de son histoire personnelle, et de la question de la représentation
de soi. Sur le motif de la fugacité de la vie, Yveline Tropéa croise antiques « Memento
Mori » et « vanités », chers à la peinture classique, dans cette « nécessité poétique » de
maintenir la conscience de la finitude de notre existence.
L’artiste, dont l’enfance fut baignée dans une sorte de « christianisme à l’italienne », est
sensible aux représentations religieuses. Elle leur emprunte quelque chose d’une quête
d’éternité.
Toutes ses œuvres entièrement brodées à la main, sont réalisées dans un atelier que
l’artiste a monté au Burkina Faso, où elle réside.
Le Printemps © Yveline Tropéa
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Un espace de lecture spécialement aménagé
au sein de l’exposition, pour découvrir
les plus grandes héroïnes de la BD.
Héroïnes
du 19 mars au 11 mai 2014
© CASQY / Christian Lauté
Commissaires de l’exposition :
En partenariat avec la médiathèque Jean-Rousselot de Guyancourt et le site internet
spécialisé ComiXology, un coin BD est aménagé au sein de l’exposition. Cet espace offre
en libre consultation une sélection d’albums en version papier ou en version digitale, qui
nous entraînent dans les aventures des plus grandes héroïnes de la bande dessinée :
Mafalda, Martine (qui célèbrent respectivement leur 50e et 60e anniversaire en 2014),
Adèle Blanc-Sec, Agrippine, Persepolis, Pénélope, Margaux Motin, Fantômette, la Schtroumpfette, Lara Croft, Ekhö, Atalante, Buffy, Luuna, Fatale, Joséphine, La Rose écarlate, Mamette,
Wendy, Elyne, Marlysa, Milady de Winter…
À propos de ComiXology :
Fondée en 2007, comiXology a révolutionné l’industrie de la
bande dessinée, du comics et du manga en proposant une plateforme cloud de BD numériques qui rend la découverte, l’achat et
la lecture de BD plus fun que jamais. La technologie de lecture
Vue Guidée™ de comiXology transforme la bande dessinée en
une expérience de lecture unique en case-à-case ou en pleine
page, tout en aidant comiXology à devenir l’une des apps iPad les
plus rentables d’iTunes en 2011, 2012 et 2013. ComiXology offre
la plus large bibliothèque de BD, comics et mangas en provenance des 75 plus grands
éditeurs américains et des principaux éditeurs en France. Site internet : www.comixology.fr
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Marie Deparis-Yafil / commissaire indépendante
Isabelle Vernhes / agence PopSpirit
assistées de Charlotte Vincent / agence PopSpirit
http ://www. pop-spirit.com
http://mariedeparis-yafil.over-blog.com
En collaboration avec :
Sylvie Pelade, Directrice de la Culture, Ville de Guyancourt
Katy Blondeau, Responsable du service Action culturelle, Ville de Guyancourt
Angélique Normand, Assistante du service Action culturelle
Aurélien Demaison, chargé des publics et de la médiation du service Action culturelle
Avec les services de la Ville de Guyancourt
Remerciements :
ComiXology
Galerie Artisti, Rueil-Malmaison
Galerie Lélia Mordoch, Paris
Galerie Sakura, Paris
Ina – Institut national de l’audiovisuel
K-Echo Photo (Carole Colnat)
Médiathèque Jean-Rousselot, Guyancourt
Musée d'art et d'histoire de la Ville de Genève
Catalogue de l’exposition :
Textes : Marie Deparis-Yafil, avec l’aide d’Isabelle Vernhes - sauf mention contraire
Conception graphique : Direction de la Communication - Ville de Guyancourt
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En savoir plus sur les artistes :
Juliette Clovis :
www.julietteclovis.com
Julie Dumont :
http://julie-dumont.blogspot.fr
Sandrine Elberg :
www.sandrine-elberg.com
Eliz Dream :
www.elizdream.com
Sacha Goldberger :
www.galerie-sakura.com
Yann Kempen :
www.artistigalerie.fr
Bertrand Lefebvre :
www.artistigalerie.fr
Alfredo Lopez :
www.alfredolopez.fr
Miss.Tic :
www.leliamordochgalerie.com
Piet.sO & Peter Keene :
www.pietso.fr
www.peter-keene.fr
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Dulce Pinzón :
www.k-echo-photo.com
Yveline Tropéa :
www.yvelinetropea.fr
Réalisation et impression : Ville de Guyancourt

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