Portrait Ernst Möckly

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Portrait Ernst Möckly
Ernst Möckly fondateur de la première société de troupes sanitaires et de la première section de samaritains
Samaritain aujourd’hui
Mieux former les soldats et les civils
aux premiers secours
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Ernst Möckly, un des tout premiers sergents de la jeune troupe sanitaire, avait un objectif qui ­
lui tenait à cœur : améliorer les connaissances des soldats et de la population en matière de premiers secours.
Texte : Urs Amacher/td
« Monsieur Möckly est l’instigateur
du mouvement samaritain suisse et
le principal fondateur de l’Alliance
suisse des samaritains », écrivait
Robert Vogt dans son rapport à
l’occasion du jubilé de l’ASS. Robert
Vogt fut non seulement le premier
président de l’Alliance suisse des
samaritains (ASS), mais aussi le
médecin ayant organisé avec le
sergent-major sanitaire Ernst Möckly
pour la première fois un cours de
samaritain à Berne en 1884. À
l’occasion du centenaire de sa mort,
l’hommage suivant lui a été rendu :
« Ce qu’Henry Dunant représente
pour la Croix-Rouge au niveau
international, Ernst Möckly le représente pour la Croix-Rouge de notre pays. »
Jeunesse à Lausanne, cordonnier
à Berne
Ernst Möckly est né le 21 novembre
1856 à Lausanne où il passa sa jeu-
Ernst Möckly, le fondateur de la première
section de samaritains à Berne.
nous, samaritains 11-12/12
nesse avec ses cinq frères et sœurs.
Cela explique pourquoi il préférait
écrire son nom de famille avec un
« y » à la fin, à la mode romande.
August Möckli, son père, était un
maître cordonnier originaire de
Basadingen, dans le canton de
Thurgovie. Installé dans la capitale
vaudoise, il s’y maria en 1854 avec
Marie Willenegger.
À la mort d’August en 1873, le jeune Ernst, alors âgé de 17 ans, reprit
l’affaire paternelle. Mais elle fut vendue deux ans plus tard et la famille
déménagea à Berne. Ernst Möckly
trouva un emploi chez « Jakob Scheidegger, Fabricant de Chaussures »,
une entreprise spécialisée dans la
confection de chaussures orthopédiques sise à la Waisenhausplatz à
Berne. Il y travailla pendant dix-sept
ans, pour finir en qualité de gérant.
Les relations qu’Ernst Möckly entretenait avec Jakob Scheidegger, le propriétaire de l’entreprise, politicien
actif élu plus tard au Conseil national, dépassaient le cadre purement
professionnel. En 1881, Jakob Scheidegger épousa en secondes noces Alice Marie Möckli, la sœur cadette
d’Ernst, mais cette union ne dura
que deux ans.
En 1893, Ernst Möckly entra au
service de la Confédération. Il fut
« nommé (provisoirement) assistant
spécialisé du secteur du chaussage
du haut-commissariat fédéral de la
guerre », comme la Revue militaire
l’expliquait dans un beau jargon
administratif.
Concrètement,
Möckly travaillait comme premier
contrôleur des chaussures militaires
au service de l’équipement de
l’Administration fédérale du matériel de guerre à Berne. En parallèle, il
s’adonnait à un loisir artistique, il
jouait de la flûte dans l’ensemble
Stadtmusik de Berne.
Marié jeune, mort à cinquante ans
Ernst Möckly avait tout juste vingtet-un ans lorsqu’il épousa Elisabeth
von Arx le 25 octobre 1877. Ensemble, ils eurent deux enfants. Elisabeth était originaire de Niedererlinsbach, dans le canton de Soleure,
et avait cinq ans de plus que son
époux. Elle était née le 4 avril 1851
dans le village voisin de Niedergösgen, où son père, Jakob von Arx,
gagnait sa vie comme paysan et
d’où sa mère était également originaire. Jakob von Arx avait été
auparavant agriculteur dans les fermes de Wartburg, près d’Olten. La
petite église dans laquelle il s’était
marié ne se trouve d’ailleurs pas
très loin du nœud ferroviaire
d’Olten, où se situe aujourd’hui le
siège de l’Alliance suisse des samaritains. Car la bénédiction du couple formé par Jakob von Arx et Anna
Maria Wiser « fut prononcée après
la deuxième publication des bans
sur mandat conféré par Monsieur le
curé à Starrkirch », comme le rapporte le registre des mariages de
Niedergösgen.
On ne sait pas quand ni où le jeune cordonnier de Berne et la fille de
paysan Elisabeth von Arx se sont
rencontrés. Leurs chemins se sontils croisés grâce à la cordonnerie ?
Ce serait tout à fait concevable, car
bien que le père d’Elisabeth ne fut
pas cordonnier, plusieurs membres
de la famille von Arx travaillaient
dans le domaine.
En 1902, Ernst Möckly contracta une grave maladie des organes
respiratoires, dont il ne se remit
jamais. Une cure au Tessin
n’apporta pas l’amélioration espérée. Ernst Möckly mourut le 22
avril 1905 à Contra près de Tenero,
peu de temps avant de fêter son 50e
anniversaire.
Une toute jeune troupe
Ernst Möckly avait été affecté aux
troupes sanitaires. Lorsqu’il intégra
l’école de recrues, le service sanitaire
existait depuis peu au sein de
l’Armée suisse. Ce n’est qu’après la
réorganisation militaire de 1874
qu’il fut organisé en tant que troupe
indépendante. Le personnel était
composé de médecins, d’infirmiers
et de brancardiers. Möckly suivit
d’abord le cours préparatoire de
douze jours, puis fréquenta l’école
de recrues qui durait alors cinq
semaines. Soldat sanitaire assidu, il
devint sergent très jeune, ce qui
n’était pas fréquent à l’époque.
Le procès-verbal de la première séance
du Comité central de l’Alliance suisse des
samaritains montre que le vice-président
Ernst Möckly était la cheville ouvrière
de la jeune association.
Ernst Möckly constata rapidement
que la brièveté du service ne permettait pas de bien former les soldats
sanitaires. À l’automne 1880, il évoqua avec quelques camarades un projet de formation continue en dehors
du service militaire. Son initiative fut
un succès, en novembre 1880, les soldats sanitaires de Berne fondèrent la
première Société de troupes sanitaires,
et le sergent-major Möckly fut élu
président. Dans l’article des statuts
qui décrit le but de la société,
l’entraînement en dehors des heures
de service était consigné, mais également déjà à l’époque « la prestation de
premiers secours en cas d’accident ».
Formation également pour
les civils
Les sociétés sanitaires ne suffirent
bientôt plus pour dispenser les premiers secours lors d’accidents dans
les usines ou les ménages. Il devint
donc nécessaire de former des civils.
Dans ses mémoires, le médecin
bernois Robert Vogt décrit les débuts
comme suit: « Le président de la société des troupes sanitaires de Berne de
l’époque, le sergent-major Möckly,
est venu me voir pour me demander
si, en ma qualité de médecin, je voulais bien l’aider à former chez nous
aussi, des civils destinés à devenir des
‹samaritains›, à l’image de ce que faisait, depuis un certain temps, le célèbre chirurgien Esmarch à Kiel, en Allemagne,
selon
l’exemple
des
Johannites en Angleterre. Il s’agissait
de donner un cours succinct à des
personnes ne disposant pas de connaissances préalables pour les rendre
capables, même en tant que non-professionnels sur le terrain médical, de
prodiguer immédiatement les premiers secours adap­tés en cas d’accident
jusqu’à ce que le blessé soit pris en
charge par le personnel médical. »
Et en effet, c’est à Berne-Länggasse qu’Ernst Möckly organisa le premier cours de samaritain de Suisse. Il
débuta le 25 mai 1884 avec vingtcinq participants. Tandis que Robert
Vogt, médecin, assurait la partie théorique, Möckly et le sergent sanitaire
Maurer se chargeaient de la partie
pratique. Dans son discours de 1887,
lors de l’Assemblée générale de la
section de samaritains de Berne,
Möckly rappelait: « C’est en 1882
que la société des troupes sanitaires
de Berne pensa fonder des ‹ sections
de samaritains › [...] – au même
moment que l’Allemagne, comme on
s’en aperçut plus tard. »
Samaritain aujourd’hui
Lors de la première Assemblée des délégués de l’Alliance suisse des samaritains du 1er juillet 1888 à Aarau, Ernst Möckly était le
président du jour. La photo montre sa signature dans le procès-verbal d’assemblée.
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1888 : création de l’Alliance suisse
des samaritains
Au début, les cours firent l’objet de
controverses, car on soupçonnait les
samaritains de cacher un mouvement religieux. À l’automne 1884,
Möckly organisa des cours de premiers secours dans d’autres quartiers de Berne, et l’assemblée constitutive de la société de samaritains de
Berne eut lieu le 1er janvier 1886.
Vogt et Möckly assurèrent également des cours destinés aux femmes.
La première société de samaritaines
vit le jour en 1887 à Berne.
Au terme d’assemblées préparatoires, les sections de ZurichAussersihl, Neumünster, Bâle et
Winterthour, ainsi que la section de
Berne se regroupèrent le 1er juillet
1888 à Aarau pour fonder l’Alliance
suisse des samaritains. Les délégués
élirent le docteur Robert Vogt comme premier président central alors
qu’Ernst Möckly assumait la charge
de suppléant.
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