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Patricia GUYOMARC’H
Avocat Associé
LAW OFFICE
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Illustration pratique de la reprise d’une société en sous performance
L’intérêt des sociétés en sous performance, dans une situation de pénurie des sociétés in
bonis, n’est plus à démontrer (cf. newsletter CCEF, avril 2013, Evaluation et transmission des
entreprises : pourquoi aujourd’hui cession d’entreprise veut dire aussi cession d’entreprise en
sous performance). Souvent présentée de manière peu attractive, les sociétés en difficultés
peuvent présenter des atouts substantiels et de réelles perspectives d’investissement.
Prenons le cas d’une société de taille moyenne, employant une centaine de salariés, très
bien positionnée sur un secteur d’activité en pleine évolution. Spécialisée dans la
transformation de matières plastiques en produit secondaire, elle connait des difficultés du
fait de la désaffection de sa matière première au profit d’alternatives plus écologiques.
Conscient des difficultés de son entreprise, le dirigeant décide dans un premier temps de
recourir à la procédure du mandat ad hoc par ses propres moyens. Seul, et sans assistance
de professionnels spécialistes des procédures de retournement capable de mettre en place
une réelle stratégie de redressement de l’entreprise, cette procédure est un échec.
La situation ne s’améliore pas, les marges nettes ne sont pas satisfaisantes. La situation est
alarmante mais il n’y a pas d’état de cessation des paiements : il est trop tard pour une
procédure de conciliation mais surtout une restructuration salariale s’impose et pour ne pas
assécher la trésorerie de l’entreprise déjà mise à mal, il faut utiliser d’autre outil.
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La seule solution possible est de solliciter l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, avec,
cette fois, assistance de professionnels qualifiés. La société bénéficie alors de la suspension
des poursuites par ses créanciers et ceux-ci sont invités à s’asseoir à la table des
négociations. L’entreprise a de beaux atouts, elle est propriétaire de ses bâtiments mais elle
a eu recours à l’emprunt pour les financer. De plus, son équipement nécessitant de lourds
investissements financiers, elle a eu recours aux contrats de crédit-bail. L’entreprise a donc
un lourd passif bancaire à renégocier.
La mise en place des comités de créanciers est organisée : le comité des établissements
bancaires qui inclue les crédits bailleurs et le comité des fournisseurs.
La difficulté apparait dès les premières négociations au niveau du comité des banques: les
premiers (banquiers bénéficiant de prêts classiques) sont soumis à l’arrêt des paiements
tandis que les seconds (banques crédits bailleurs) bénéficient des dispositions relatives aux
contrats en cours et continuent de voir les échéances postérieures à l’ouverture de la
procédure, honorées. Les crédits bailleurs se montrent donc tout naturellement plus frileux
dans les négociations.
Cette difficulté révèle que la mise en place d’un comité spécifique au contrat en cours ou aux
contrats de crédits baux s’avère nécessaire.
Toutefois, un plan de sauvegarde parvient à être mis en place et est homologué par le
Tribunal : l’entreprise bénéficie d’un gel des emprunts bancaires et des remboursements de
certains contrats de crédit bail pendant trois ans, et les remboursements sont rééchelonnés
sur 10 ans avec abandon de certaines parties des créances.
Les premières échéances du plan sont respectées, la stratégie de la Direction est modifiée, et
deux ans plus tard la société parvient à sortir un excédant brut d’exploitation positif.
Mais la conjoncture économique ne s’améliore pas, et l’entreprise connait un fort
ralentissement de la consommation : la grande distribution réduit ses commandes et de
nombreux clients abandonnent progressivement la matière plastique au profit des produits
papiers.
L’entreprise tente de réduire ses charges, met en place un plan de sauvegarde de l’emploi,
recourt au chômage technique de longue durée mais le carnet de commande diminue
sensiblement, les résultats sont lourdement déficitaires et la trésorerie de l’entreprise chute.
Dans l’incapacité de faire face à ses charges, la société se retrouve contrainte de solliciter
l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire et le plan de sauvegarde est résolu.
Dès lors, 3 hypothèses sont envisageables : l’adoption d’un plan de continuation, l’adoption
d’un plan de cession ou la revente des actifs de manière isolée.
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En l’espèce, un plan de continuation n’est pas envisageable : la marge nette est négative, la
société a déjà bénéficié d’un plan de sauvegarde mais n’a pas su en honorer les échéances.
Les organes de la procédure lance donc un appel d’offre par le biais de l’administrateur
judiciaire.
Très rapidement, un concurrent étranger très performant, déjà implanté sur le marché
français, manifeste un grand intérêt pour l’entreprise. Cependant, son offre se révèle plus
qu’insuffisante : les actifs sont sous-évalués, le volet social est négligé, la poursuite de
l’activité de l’entreprise sur le long terme est mise en doute, et l’offre est soumise à de
nombreuses conditions suspensives irréalisables.
Le candidat repreneur envisage lui-même le rejet de son offre en formulant une offre
subsidiaire d’un simple rachat de certains actifs en proposant un prix plus fort que celui
proposé dans l’offre de reprise pour l’ensemble du matériel. Cette offre n’a qu’un seul but :
racheter une entreprise concurrente en difficultés pour mieux l’évincer du marché.
Le tribunal rejette l’offre.
A défaut d’un autre investisseur sérieux, la société risque de faire l’objet d’une procédure de
liquidation judiciaire, c'est-à-dire le licenciement de plus de 70 salariés dans les 15 jours de
l’ouverture de la procédure avec toutes les conséquences néfastes qui y sont attachés sur
l’économie locale.
D’où l’intérêt pour les tiers de s’intéresser aux sociétés très en amont de leurs difficultés. La
publication légale, au BODACC ou auprès du Greffe du Tribunal de commerce, imposée dans
le cadre de ces procédures ou le recours à des professionnels proches de l’information de
société en sous performance permet d’agir dans les temps, et de bénéficier du recul et la
réflexion nécessaire au rachat d’une société en sous performance.
Dans notre cas d’espèce, bien que l’entreprise soit positionnée sur un marché difficile, elle
garde de nombreux atouts pouvant intéresser un repreneur : des fichiers clients auprès de
marque prestigieuse, des salariés avec un véritable savoir faire, de l’immobilier, et des
possibilités de reconversion vers les matières écologiques pour s’adapter aux évolutions de
consommation et surtout de politique d’environnement dès lors que le repreneur
disposerait de fonds propres pour investir dans de nouvelles machines et présenterait un
business plan satisfaisant.
Finalement, un candidat de petite taille s’y intéresse pour développer son activité et sa
croissance externe.
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