Applique zoomorphe en cuivre trouvée à Saint-Benoist-sur

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Applique zoomorphe en cuivre trouvée à Saint-Benoist-sur
GROUPE VENDEEN D'ETUDES PREHISTORIQUES, n° 30, 1994, p. 31
APPLIQUE ZOOMORPHE EN CUIVRE TROUVEE
A ST-BENOIST-SUR-MER (VENDEE)
par Jean-Marie JAUNEAU *
En hommage à la famille TESSIER
Résumé: Une exceptionnelle applique en cuivre, qui devait à l'origine être recouverte d'une mince feuille d'or, a été trouvée à Saint-
Benoist-sur-Mer, lieu-dit 'La Pierre-Couchée', dans un environnement très riche en matériaux de construcjion, céramique, menus
fragments d'objets en verre, monnaies gauloises et romaines, fibules et autres débris métalliques. Une datation à la Tène finale ou au
Gallo-romain precoce est hautement probable.
Abstract : A copper appliqué of exceptional quality was discovered near Saint-Benoist-sur-Mer, at ' La Pierre-Couchée'. This piece, which
must have originally been plated with a th in layer of gold, was buried in the ground together with numerous remnants of building mate rials,
ceramics, small fragments of broken glass, Gallic ans Roman coins, fibulas and various bits of metal. In ail likelihood, this omamental
piece dates from late Tene or early Gallo-Roman times (1).
Mots·dés : applique zoomorphe, cuivre, fer, or, estampage, Téne finale, Gallo-romain, fibules, monnaies.
AVERTISSEMENT
Ma découverte, cependant, a déjà fait l'objet
d'une publication succincte (Jauneau, 1984), et
d'une brève mention dans Gallia (Aubin, 1985).
J'ai différé pendant quatorze ans la publication
de cet article, dans l'attente d'éléments patents
ou éventuellement significatifs, qui devraient
être recherchés à mon intention en Europe
Centrale. Par l'intermédiaire d'un collége, des
comparaisons
avec d'autres
appliques
zoomorphes devaient en effet être obtenues
auprès du Professeur Polenz (Université de
Münster, Allemagne) . Malheureusement, de
graves difficultés ont empêché ce collège de
poursuivre son enquête, Convenait-il de différer
davantage encore la publication de mon article,
ou fallait-il le publier tel quel, c'est-à-dire
amputé des comparaisons ? J'ai finalement
opté pour cette deuxième solution (2) .
ENVIRONNEMENT ARCHEOLOGIQUE
La remarquable applique qui fait l'objet
essentiel de cet article, a été trouvée en 1978,
après un labour, lieu-dit "La Pierre-Couchée" à
Saint-Benoist-sur-Mer. Le point de trouvaille est
situé dans la partie haute de la parcelle A 572
de l'ancien cadatre (aujourd'hui parcelle ZD 15
du cadastre remEl!T1bré), secteur qui se signalait
déjà par des trouvailles de monnaies et fibules.
(1) Traduction par mon amie Marguerite Gray, que je remercie vivement..
(2) Sur la suggestion de Jean Hiernard, j'ai communiqué une photograph'ie de cette applique au
Professeur Paul-Marie Duval (Collège de France), en 1980. L'objet a été examiné, de visu, par plusieurs
archéologues, en particulier: Emile Bernard, mon ami Gérard Cordier, le Professeur Pierre-Roland Giot,
José Gomez de Soto et Jean Hiernard, J'exprime à tous ma profonde gratitude pour les avis qu'ils mont
donnés, soit verbalement, soit au travers des correspondances échangées.'
CAIRN , (Centre Archéologique d'Initiation et de Recherche sur le Néolithique), rue de la
Courolle, 85440 Saint-Hilaire-La-Forêt.
Adresse personnelle : 1, rue de l'Ancienne Cure, 85540 Saint-Benoist-sur-Mer
31 .
Nous sommes ici sur un site de hauteur qui
recèle les vestiges d'une importante occupation
(Jauneau, 1967). Il est implanté derrière
l'ancienne ferme de la Pentrelle, à proximité du
ruisseau de la Bonde, au débit intermittent, qui
se fraye tant bien que mal un passage dans les
alluvions fluviatiles modernes et les alluvions
flandriennes issues de la remontée du niveau
marin . Ce ruisseau fait sa jonction, 300 mètres
plus loin, avec le Golfe des Pictons, aujourd'hui
marais poitevin. Gageons que cette situation
privilégiée devait encore offrir divers avantages
il y a 2.000 ans ...
- tessons de La Tène finale ;
- tessons d'amphores républicaines;
- tessons de poterie commune, grise, rouge et
blanche ;
- tessons de céramique sigillée;
- tessons de terra nigra (ou céramique
fumigée) ;
- rares tessons de céramique paléochrétienne ;
- débris de récipients en verre ;
- monnaies gauloises et romaines ;
- fibules à ressort protégé et probablement à
charnière ;
- menus objets et débris métalliques en bronze;
- couteau et clous en fer ;
- vestiges osseux (de bovidés notamment) et
coquilles d'huîtres en grand nombre.
La probable villa sur laquelle nous nous
trouvons, important temoin de l'habitat dispersé
du 1er siècle, voisine avec un site occupé au
Néolithique récent et final, qui domine la vallée
de la Bonde et dont j'ignore encore s'il était
barré par un système de fossés et de murailles.
C'est le site des Quartiers-Moreau , qui a livré
de la cèramique peu-richardienne, plus ·de
3.000 perçoirs Moulin-de-Vent, des centaines
de grattoirs et d'armatures à tranchant
transversal de type Sublaines, une cinquantaine
de flèches perçantes, du matériel en silex
pressignien , des haches polies, etc.
Je voudrais insister sur l'environnement
"métallique" de l'applique, et par conséquent
revenir un peu sur les monnaies, fibules et
autres objets en bronze qui n'ont été décrits
qu'en partie dans divers articles publiés de
1967 à 1984.
Monnaies :
1) Un quart de statère namnète en électrum
(fig . 1, n° 1). C'est une pièce usée. Au droit,
tête bouclée à droite, sans doute entourée de
cordons perlés, pratiquement invisible et
surchargée d'une double entaille au ciseau en
forme de croix de Saint-André ; au revers, on
distingue malgré l'usure un aurige conduisant
un cheval androcéphale à droite, dont les rênes
sont bien visibles, mais les pattes antérieures
sont effacées ; au-dessous du symbole
ethnique, presque entièrement disparu, ne
subsiste que la partie supérieure (la tête) du
génie hippophore aux bras écartés, typique des
monnaies attribuées aux Namnètes (Hiernard
1980).
Depuis sa découverte par mon père, le 20 mars
1965, le site de la Pierre-Couchée a révélé un
matériel abondant et varié dont je donne une
rapide énumération :
- moëllons bien réguliers en calcaire;
- éléments de pavage en calcaire non local ;
- débris de tégulae et d'imbrices ;
- débris de mortier et d'enduits peints;
- fragment d'une colonne moulurée en tuffeau,
découvert en 1986 par Guy Tessier, l'un des
copropriétaires du terrain, en promenant son
chien (3) ;
(3) J'en ai informé quelque temps après la Circonscription des Antiquités Historiques des Pays de la
Loire, dirigée alors par Gérard Aubin. Je n'ai reçu aucune réponse. Au cours de toutes ces années de
surveillance, il paraît surprenant qu'un seul débris de colonne ait été repéré. Peut-être faut-il supposer
que des éléments architecturaux. ont été réemployés dans des constructions aujourd'hui disparues,
postérieurement à une destruction des bâtiments primitifs. En l'absence de fouilles, il est bien difficile
d'évaluer les potentialités archéologiques . Je renouvelle mes remerciements à mon ami Guy Tessier
pour sa perspicacité (le débris de colonne était à l'envers !) et sa célérité à me prévenir ; je suis
également reconnaissant envers Bertrand Poissonnier pour la détermination du matériau dont est faite
la colonne.
32.
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6
Fig. 1 - Quelques monnaies gauloises et romaines de Saint-Benoist-sur-Mer
2) Un potin gaulois, imitation antique d'une
monnaie probablement pictonne, à légende
VIRIIT rétrograde. Au droit, tête à droite ; au
revers, cheval galopant à droite; au-dessus un
temple (?), au-dessous un point dans un cercle
perlé (Jauneau 1967 ; Henry 1978 ; Hiernard
1980).
3-7) Cinq monnaies gauloises à la légende
CONTOVTOS (fig . 1, n° 2 à 4). Au droit, tête à
droite attribuée à Marc-Antoine; au revers, loup
à droite posant ses pattes sur un bucrane
devant un arbre (Jauneau 1967 ; Hiernard
1980) (4).
8) Une monnaie gauloise à la légende
ANNICCOIOS. Elle a été trouvée depuis la
publication de mon article avec J. Hiemard
(Hiernard 1980). Sa description est en tous
points identique à celle çles ANNICCOIOS qui
proviendraient d'un trésor monétaire du Pays de
Retz (Tessier 1989) : au droit, tête regardant à
gauche ; au revers , sanglier machant à droite ;
au-dessus un triscèle ; au-dessous un rameau
à deux feuilles opposées concaves tournées
vers le bas.
9-11) Trois as de Nîmes (fig. 1, n° 5 et 6), aux
effigies adossées d'Auguste et Agrippa ; PP de
chaque côté, IMP DIVI Fau-dessous ; au
revers, l'inscription COL NEM (pour COLONIE
de la NEMANSUS) et un crocodile attaché à
u ne palme (Jauneau 1967 ; Hiemard 1980)
(5) .
Elles mériteraient largement de faire l'objet d'un
article séparé. Pour l'heure, je vais m'en tenir à
une bréve énumération de leurs principales
caractéristiques :
1) Fibule à disque médian et douille couvreressort ; arc fortement convexe, disque décoré
de triangles, queue cassée ; il subsiste une
infime partie de la plaque d'arrêt (Jauneau
1967).
2) Fibule à disque médian et douille couvreressort ; arc fortement convexe, collerette
ajourée mais cassée, queue legèrement
évasée, plaque d'arrêt percée de deux
ouvertures rectangulaires.
3) Fibule à disque médian et douille couvreressort ; arc fortement convexe, collerette
ajourée en partie conservée et ornée de
triangles, queue légèrement évasée avec traces
d'étamage dans les grénetis, plaque d'arrêt
percée de deux orifices restangulaires.
r
E
4) Fibule à plaque rhomboïdale et douille
couvre-ressort ; arc convexe, légère trace d'une
collerette disparue, queue cassée, plaque
d'arrêt ajourée mais cassée (Jauneau 1967).
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S
e
J
5) Petite fibule à plaque rhomboïdale et douille
couvre-ressort ; arc court fortement convexe;
collerette
ajourée
presque entiérement
conservée, queue à paon, plaque d'arrêt
cassée
percée
de
deux
ouvertures
rectangulaires.
ri
n
e
12) Un sesterce de Marc-Aurèle (Hiemard
1980). C'est la monnaie le plus récente trouvée
sur le site, émise entre 161 et 180 après J.C.
(Surmely 1991).
6) Fibule à disque médian .et plaquette couvreressort; arc court, légérement convexe, orné
d'une ligne en relief, disque décoré de cercles
concentriques (pas · de collerette ou "rosace"),
queue et plaque d'arrêt cassées.
Fibules :
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A
dl
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(4) C'est à tort que ces monnaies ont été attribuées aux Pétrocores de Périgueux, et ce, jusqu'à une
.époque récente (Mainjonet 1975 ; Dhénin 1976). En fait, compte tenu de leur répartition dans le
Centre-Ouest (fréquence dans le Niortais et la plaine vendéenne, abondance dans les trésors baspoitevins et siantongeais de la Mailleraie-Tillay, du Langon et de Saint-Seurin-d'Uzet), il faut plutôt
restituer ce monnayage d'époque augustéenne aux Pictons, probablement liés aux Santons "d'une
manière ou d'une autre" (Hiernard 1982, voir aussi Rouvreau 1973 et Gomez de Soto 1977, qui
attribuaient déjà ces pièces aux Santons et aux Pictons).
(5) Je rappelle qu'un as de Nîmes a été découvert au siècle dernier à Saint-Denis-du-Payré (Brochet
1891).
34.
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7 ) Fragment de fibule à plaquette couvreressort; arc court, convexe, omé d'une ligne
ondée en relief, disque, queue et plaque d'arrêt
manquants.
plus en plus poussée du protomé". C'est le cas
de la fibule de Saint-Benoist, omée simplement
d'une excroissance à gorge entre la douille et la
plaque.
8) Fibule à douille couvre-ressort, excroissance
à gorge, plaque triangulaire avec traces
d'étamage omée de deux rainures latérales,
plaque d'arrêt non ajourée.
Autres objets remarquables :
A la suite des monnaies et fibules, il me faut
encore signaler:
1) Des fragments de miroirs en bronze.
9) Fragment de fibule (à chamiére ?) ; le pied,
terminé en pointe, porte une plaque d'arrêt
cassée, vraisemblablement triangulaire et
munie d'une seule ouverture ; il manque la
partie supérieure de la fibule et l'ardillon.
2) Un pendentif de forme elliptique, de très
faible épaisseur (Jauneau 1967).
3) Un anneau découpé dans une mince tôle de
bronze (l'épaisseur est seulement d'un quart de
millimètre) ; diamètre extérieur : 42 mm ;
diamètre intérieur : 26 mm . Plié lors de sa
découverte et en mauvais état (il manque une
partie), j'ai dû le coller sur un support en carton.
Il est décoré d'un motif solaire qui se reproduit
indéfiniment : rayons en S très ouvert à partir
d'un point, toujours au nombre de 20, dont 16
émanés à partir de ce point forment les rayons
du point suivant et ainsi de suite.
10-14) Fragment de plaque d'arrêt ajourée ,
fragment de pied (cf. n° 9), avec plaque d'arrêt
triangulaire percée d'un trou ; trois fragments de
ressorts .
Toutes ces fibules correspondent à des
modèles connus entre la fin du 1er siècle avant
et la fin du 1er siècle après J.C .. Je n'entrerai
pas ici dans le détail des périodes, laissant ce
soin à des spécialistes plus qualifiés que moi
en l'espèce.
L'APPLIQUE
DESCRIPTION
INTERPRETATION STRUCTU RALE
ET
Je dois cependant préciser que :
- Les exemplaires à plaque circulaire ou
rhomboïdale (type moins fréquent) , sont des
modèles répandus à l'époque Julio-Claudienne.
- Les deux fibules à plaque rhomboïdale (n° 4
et 5), sont très proches de celle découverte à
Muron (Charente-Maritime), sur un site galloromain dont l'occupation "apparaît comme
assez précoce" (Gendron, in David 1974). Un
autre exemplaire a été trouvé "sur le site des
Ateliers municipaux de Saintes, dans un
dépotoir datable de l'époque Claude-Néron"
(Gendron ibid).
- Pour l'exemplaire n° 8, les prototypes doivent
être recherchés "à la Tène III et à l'époque
augustéenne (fibules à ailettes)" (Galliou
1974). Comme l'écrit cet auteur, citant
l'important travail de R. Joffroy, "·Ies ailettes
sont progressivement remplacées par des
protomés d'animaux", et l'àn assiste par la
suite, au cours du premier siècle de notre ère
(période
Claude-Néron) ,
à
"une
dégénérescence du motif et une stylisation de
Obtenue par coulage, elle a la forme d'un
oiseau en vol, aux ailes déployées (fig . 2) . Le
bec est fort, les yeux saillants, le cou gonflé. La
largeur maximale de l'objet est de 84 mm.
Quant à l'épaisseur, elle varie de 1,5 mm
(extrémité des ailes), à 2,5 et 3mm (différentes
parties du corps) . Celui-ci est creux, tandis que
les ailes et le bec sont pleins. La face
supérieure est décorée de motifs divers et de
palmettes, disposés avec une remarquable
symétrie. Ces éléments s'organisent en une
composition complexe qui cherche peut-être à
styliser le plumage (Jauneau 1984). Ils sont
prolongés par un motif rhomboïde omé d'une
fine cannelure inteme. Une belle patine verte
recouvre l'applique.
Un trou existe à l'extrémité de chaque aile, celle
de gauche ayant perdu son système de fixation .
Celle de droite, en revanche, possède une
cheville en fer en partie conservée, autour de
laquelle subsiste une mince pellicule d'or qui
ressort en blanc 'Sur la photographie (fig . 2,
n° 2) .
35.
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Fig . 2 - Applique zoomorphe en cuivre
36.
Quel a été le but recherché 7 J'ai d'abord
envisagé une hypothèse pragmatique : sorte de
rondelle de la dimension d'un confetti, placée
sous la tête de la cheville pour éviter la
corrosion entre le fer et le cuivre. Mais cette
idée n'emporta pas la conviction d'un ingénieurchimiste qui ne vit pas la nécessité d'une telle
protection (6) .
Je serais sans doute resté perplexe si je n'avais
pas suivi avec attention la communication de
Jean Flouret, donnée à Jonzac le 29 septembre
1979 lors de la tenue du Congrès des Sociétés
Savantes du Centre-Ouest, et relative à des
bijoux gallo-romains découverts près de La
Rochelle. Il s'agit de deniers en argent,
enveloppés d'une mince feuille d'or qui en
épouse les reliefs par estampage. Ces
monnaies ainsi estampées étaient ensuite
serties dans une monture en or et c'est en
démontant l'un des bijoux que la prouesse
technique fut découverte.
C'est désormais l'hypothèse que je retiens,
d'autant plus que le "confetti" présente un
contour irrégulier, comme s'il y avait eu
arrachement. On peut donc raisonnablement
penser que le lambeau de métal précieux est le
reste d'une mince feuille d'or appliquée par
estampage et qui recouvrait primitivement toute
la surface de l'applique en épousant ses reliefs.
Le travail d'orfèvrerie terminé, il ne restait plus
qu'à fixer le bijou sur son support (en bois, en
cuir 7) et l'illusion était parfaite ... (7) .
ANALYSE METALLOGRAPHIQU E
Elle a été confiée à Jean-Roger Bourhis,
ingénieur-chimiste
au
Laboratoire
d'Anthropologie Préhistorique de la Faculté des
Sciences de Rennes. Le prélèvement a été
effectué sous le bec, dans le partie la plus
épaisse. On attendait un bronze, ce fut un
cuivre ... Voici le résultat de cette analyse :
Cu
Sn
Pb
As
Sb
Ag
96 .•
0\0
0.05
0.50
0005
0.02
Ni
Bi
Fe
Zn
Mu Au
0.Q1
000\
0\0
005
"
J-R Bourhis précise :
"- La teneur en cuivre a été dosée par
électrolyse.
- Les teneurs en impuretés ont été dosées par
spectrographie d'arc .
- tr : inférieur à 0,001 % ; - : non décelé.
L'applique est donc en cuivre, l'impureté
principale est l'arsenic, les autres impuretés
sont à l'état de traces plus faibles . La teneur en
cuivre est légèrement déficitaire car le
prélèvement contenait un peu de patine.
Aucune trace d'or n'a été décelée.
Cette composition reste assez exceptionnelle
pour un objet datant de la Tène finale." (8) .
PROPOSITION DE DATATION
A défaut de "données objectives" , telles que les
enseignements tirés d'une fouille et les
comparaisons avec des appliques bien datées.
il reste à envisager le style. Pour J. Hiemard.
"cet oiseau est stylisé dans la plus pure
tradition ténienne (ou laténienne), c'est donc un
pur produit de l'artisanat celtique" (... ). "L'objet poursuit-il - me semble de toute façon antérieur
à la conquête. Pour la date exacte, il faudrait
écrire à Paul-Marie Duval" (lettre du 2 janvier
1980).
Dans une première lettre datée du 15 avril
1980, le Pr. Duval m'a écrit . "L'applique est
belle, la feuille d'or n'aurait rien d'impossible
(.. .). La Tène tardive me paraît possible (ou
Gallo-romain précoce) mais je ne connais pas
d'équivalent."
(6) Que Monsieur Jacques Braunstein soit ici remercié pour son amicale collaboration .
(7) La cheville et le lambeau d'or ont disparu depuis, éliminés en avril 1984 par un employé de la Ville
d'Angoulême qui trouva plus rationnel de disposer de deux trous pour fixer l'applique sur un présentoir 1
La conservatrice du Musée Municipal d'Angoulême se confondit en excuses et proposa de m'indemniser
(l'objet étant assuré), mais je déclinai cette offre. Il ne subsiste aujourdh'ui qu'une parcelle d'or
microscopique à l'intérieur du trou. Heureusement, le dessin et les photographies avaient été faits avant
ce fâcheux avatar. ..
(8) Lettre du 1er décembre 1981 . J'exprime à Jean-Roger Bourhis mes plus vifs remerciements.
37.
Cependant, dans une seconde lettre en date du
30 avril 1980, il me faisait part de ses doutes :
"Ayant montré la photographie que vous
m'aviez envoyée à l'un de mes collègues très
versé dans l'archéologie de la Tène III, je crois
devoir revenir sur l'avis que je vous avais
donné : le style ressemble à un style celtique
mais pourrait aussi être moderne, à moins que
l'objet n'ait été découvert dans un contexte
strictement archéologique et antique. Pouvezvous m'éclairer sur la circonstance précise de la
découverte 7 Je vous en serais très obligé."
peuvent que renforcer la vraisemblance de
notre hypothèse, en écartant l'idée d'un objet
intrusif moderne.
DISCUSSION ET CONCLUSION
Pour parachever cette étude, il m'est apparu
indispensable de faire procéder à une révision
du mobilier céramique trouvé sur le site (10) . La
synthèse est la suivante : à part quelques
tessons laténiens indiscutables, la majorité de
la céramique est gallo-romaine. Elle date
essentiellement du premier siècle et du début
du second , c'est-à-dire qu'elle couvre un laps
de temps compris entre la période augustèenne
et les Flaviens. Cela conforte les datations
obtenues à partir du mobilier métallique. On
remarque aussi de rares tessons de céramique
paléochrètienne du Vè siècle. Par conséquent,
il semble exister un hiatus entre le second
siècle (abandon 7) et une réoccupation peutêtre brève au Vè siècle. Des fouilles seraient
souhaitables pour obtenir une confirmation de
ce point de vue. Ce site important, assez
étendu, est probablement un site-clé pour la
connaissance du Gallo-romain dans notre
région .
A la suite de cette lettre, j'ai renseigné le Pro
Duval sur la nature des principaux vestiges
mobiliers récoltés après les labours, lui
précisant notamment que "l'applique a été
découverte à quelques mètres seulement de
plusieurs monnaies et fibules" (lettre du 14 mai
1980).
Il me fit la réponse suivante (lettre du 16 juin
1980) : "Dans les conditions que vous
m'indiquez, la preuve par le contexte immédiat
n'est pas acquise : une analyse s'impose mais
ses résultats devront être communiqués à
quelqu'un qui cannait la question des bronzes
celtiques et gallo-romains" (...) (9).
Je n'ai pas remarqué de vestiges plus
modernes, à l'exception de rares tessons
vernissés (on en trouve dans tous les champs
de la région) , de débris d'assiettes cassées il y
a moins d'un siècle, de quelques douilles et
chargeurs abandonnés à l'issue des
manoeuvres militaires qui se dèroulèrent
pendant mon enfance, et de menus fragments
de pigeons d'argile éclatès par un fin tireur qui
ne m'est pas inconnu 1
Finalement, dans un petit article assez neutre
publié en 1984, J. Gomez de Soto et moi-même
avons proposé la datation suivante : fin du 1er
siècle avant ou début du 1er siècle après J.C.
(Jauneau 1984). Nous attendions alors (et
attendons toujours 1) des informations en
provenance d'Europe centrale.
En tout état de cause, les découvertes
effectuées sur le site depuis cette époque ne
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(8) Lettre du 1er décembre 1981 . J'exprime à Jean-Roger Bourhis mes plus vifs remerciements.
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(9) Je dois avouer que, pressé par d'autres tâches, j'ai négligè la deuxième partie de ce sage conseil.
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(10) Afin de cerner le mieux possible l''occupation la plus ancienne et l'occupation la plus tardive du site,
j'ai sollicité le concours d'Emile Bernard , archéologue départemental. Toutes les informations relatives à
la céramique émanent de lui. Avec un savoir consommé et un total désintéressement, il a bien voulu
prendre le temps d'examiner avec le plus grand soin les centaines de tessons que j'ai récoltés pendant
vingt-neuf ans. Son concours m'a été des plus précieux et je tiens à lui renouveler ici l'expression de ma
plus vive reconnaissance.
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pé
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33.
En revanche, dans un champ voisin situé au
nord-ouest du site (parcelle A 719 des
Quartiers-Moreau), j'ai récolté un morceau de
bracelet d'époque gauloise. Il est en verre bleu
et omé de filets en zigzag de couleur jaune.
Toutes ces observations, si elles n'ont pas
valeur de preuve absolue, militent en faveur
d'une occupation haute et renforcent ma
conviction d'avoir trouvé une applique antique,
mais difficile à dater avec exactitude en
l'absence de possibles termes de comparaison
connus dans d'autres contextes.
densément peuplée à la fin de la période
gauloise, a été très tôt touchée par la
civilisation romaine , au même titre, d'ailleurs,
que la Saintonge" (David 1974).
BIBLIOGRAPHIE
Aubin 1985 : AUBIN (G.) - Informations
archéologiques, Circonscription des Pays de la
Loire. Gallia , 1. 43, 1985, fasc . 2, p. 466.
Sans doute, et bien qu'il m'en coûte, faut-il
établir une distinction entre le praticien local, qui
connaît son terrain, et le fondamentaliste,
auteur de grands traités, spécialiste d'une
littérature savante qui constitue l'autre versant
de la documentation archéologique ... En aucun
cas cependant cette distinction ne saurait
constituer une opposition irréductible entre deux
modèles de recherche ! Mais le lecteur' aura
constaté que l'histoire de cette découverte m'a
laissé un goût amer à plus d'un titre, et que me
plaidoyer pro domo, dût-il pécher par excès
d'optimisme, a au moins le mérite de n'être pas
étouffé par des abus de casuistique!
Brochet 1891 : BROCHET (L.) - Une excursion
chez les Gallo-romains de Saint-Denis-duPayré. Revue du Bas-Poitou, 1891 , p. 204-212.
David 1974 : DAVID (P.) , GABET (C.), avec la
collaboration de GENDRON (C.) et GOMEZ (J .)
- Le site gallo-romain de Muron. Roccaforlis, 1.
111, 1974, n° 4, p. 111-122.
Dhénin 1976 : DHENIN (M .) - Nouvelles
monnaies gauloises récoltées à Muron. Revue
de la Saintonge et de l'Aunis, 1. Il, 1976, p. 133134.
Je dois ajouter que j'ai repéré, peu à peu, des
sites laténiens et gallo-romains dans le triangle
formé par les lieux-dits "La Gillerie", "La
Maison-Neuve" et "Beauvoir", commune de
Saint-Cyr-en-Talmondais, soit à des distances
comprises entre 1,5, 1,7 et 2 km du site de la
Pierre-Couchée. Ils n'ont livré jusqu'à présent
que des débris céramiques. D'autres
occupations gallo-romaines sont attestées à
Saint-Benoist par des vestiges divers, lieux-dits
"Brenessard", "La Vallée de la Bonde", "Le
Charbonneau" et "Les Ciboires". Enfin, je
rappelle la découverte d'un trésor monétaire
gaulois à la Cigogne, commune de La Jonchère
(Hiemard, 1978), lieu-dit distant de 4,6 km de la
Pierre-Couchée par les chemins d'accès les
plus directs.
Favre 1973 : FAVRE (M .) - Le site gaulois de
Muron (Charente-Maritime). Recueil de la
Société d'Archéologie et d'Histoire de la
Charente-Maritime et Groupe de Recherches
Archéologiques de Saintes, 1. XXV, 1973, p. 7788.
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de
Quiberon) .
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d'Archéologie, 1974, p. 17.
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de la Saintonge et de l'Aunis , 1. III, 1977, p.
119-124.
Ainsi donc, il apparaît que la bordure nordoccidentale du Golfe des Pictons révèle encore
bien des surprises, insoupçonnées il y a
quelques années. Par suite, en établissant un
parallèle avec la région de Muron dans la
province d'Aunis, je reprends à mon compte et
fait totalement miennes les constatations de
P. David et C. Gabet : "Cette région ,
Henry 1978 : HENRY (B.-M .) - L'Anjou dans les
textes anciens, Mille ans d'histoire celtique et
gallo-romaine. Les Edtions du Choletais, 1978,
p. 70, fig . 9, pl. hors texte, fig . 35 et 36.
39.
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monétaire gaulois en Pays-de-Retz. Groupe
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pl. hors texte.
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Antiquités Historiques de Poitou-Charentes,
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