11 novembre 2015 : La Provence
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11 novembre 2015 : La Provence
Marseille Métropole: le combat continue au plan juridique Après l’élection de Jean-Claude Gaudin, chaque camp fourbit ses armes ◗ CE QUI S’EST PASSÉ Lundi matin, à l’heure prévue dans la convocation, Maryse Joissains ouvrait la séance d’installation de la métropole Aix Marseille Provence au Pharo, animait le débat en distribuant la parole, se faisant tantôt prier, tantôt vertement ordonner de procéder à l’élection du président. Et décidait de la clore au motif que le tribunal administratif avait suspendu quelques jours plus tôt deux arrêtés du préfet cadrant la composition et la clé de répartition selon les communes de cette assemblée. Dans les dernières interventions, Robert Assante déclamait : "Nous allons élire le président et vous ferez ce que vous voulez ! S’il y a des candidats qu’ils se fassent connaître !". Et Sylvia Barthélemy d’invoquer le non-respect de l’ordre du jour et d’appeler à la tribune le deuxième doyen d’âge, Guy Teissier. La suite, on la connaît. L’élection s’est déroulée et Jean-Claude Gaudin a été élu président de la métropole . ◗ CE QUI POSE QUESTION Le code général des collectivités territoriales encadre la vie des Établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) comme la Métropole. Le protocole d’installation est sensiblement toujours le même : c’est le doyen qui préside la réunion, fait procéder à l’appel Le coup de bambou D’ici vendredi, des recours vont être déposés contre l’élection de Jean-Claude Gaudin à la présidence de la Métropole. / PHOTO C.S. des élus par le benjamin de l’assemblée, puis à l’élection du président qui, une fois élu, reprend la police des débats et l’application de l’ordre du jour. Dans le camp du pays d’Aix, on ne va pas manquer de faire valoir l’entorse au protocole : Maryse Joissains a clos la séance et un nouveau président a été appelé à la tribune. Selon l’usage, pour changer de président, il faut qu’il soit empêché. Maryse L’ÉTAT OFFRE ENTRE 66 ET 80 MILLIONS ¤ Alors que les élus mettaient péniblement en place la Métropole, lundi matin, tout en renvoyant l’État à ses responsabilités, notamment financières, celui-ci avançait enfin à Paris. Dans la soirée, les députés ont voté l’amendement 957 de la loi de finances, présenté par le gouvernement, portant sur l’aide accordée au démarrage de la machine institutionnelle. "Le montant garanti est au minimum de 66 millions d’euros, explique le député PS Patrick Mennucci, mais en fonction de la nouvelle carte intercommunale qui sera prochainement publiée, c'est près de 80 millions d'euros que pourrait recevoir notre territoire." Si la gauche applaudit, la droite s’en satisfait. "Cette somme de 80 millions d’euros contre les 50 millions annoncés en son temps par Jean-Marc Ayrault vaudrait à la ministre des remerciements, note le député LR Dominique Tian, même si cela reste très insuffisant face aux enjeux." F.T. Joissains n’était pas absente. Victime de malaise ? Elle avait plutôt l’air très en forme. En ne respectant pas l’ordre du jour qui prévoyait qu’il fallait élire le président de la Métropole, a-t-elle commis une faute ? C’est ce qu’avancent les équipes du président Gaudin. Un motif d’intérêt général autorise à modifier un ordre du jour : l’ordonnance du tribunal administratif pourrait être considéré de la sorte par un juge, estiment plusieurs experts interrogés par La Provence. C’est donc dans les moindres détails du déroulement de la séance de lundi que vont aller fouiller les auteurs des recours à venir tout comme les équipes de Jean-Claude Gaudin en défense. Lesquels avaient déjà dû en amont rechercher les jurisprudences et autres décisions du Conseil d’État pour préparer la parade au plan de Maryse Joissains. Des précédents du même ordre validés par la justice comme autant d’atouts à faire valoir devant une juridiction pour entériner la valse protocolaire de lundi. Et que le porte-parole de 5 Mercredi 11 Novembre 2015 www.laprovence.com La CPA étant "riche", elle contribue, à hauteur d’environ 2M¤, au Fonds national de péréquation des ressources intercommunales, qui en fait profiter les plus pauvres. En entrant dans la Métropole, elle serait passée dans l’autre catégorie et n’aurait plus eu à le faire. Sauf... Qu’un amendement au projet de loi de finances a été voté lundi soir pour obliger les communes soumises à cette contribution de continuer à le faire. Cerise sur le gâteau, si l’amendement est validé à l’issue des débats parlementaires, ce n’est pas dans la caisse de la Métropole qu’ira l’argent mais dans celle des communes les plus pauvres de l’EPCI. Dont Marseille. A.D. Jean-Claude Gaudin, interrogé, préfère réserver à la justice le cas échéant. ◗ RECOURS TOUS AZIMUTS "Faites ce que vous voulez, il y aura un recours", avait prévenu Robert Dagorne, maire d’Eguilles. Qui déposera d’ici vendredi, un recours en annulation de l’élection de Jean-Claude Gaudin devant le tribunal administratif. Pour démultiplier les chances, feront de même Maryse Joissains au titre de la ville d’Aix et les maires de Pertuis, de Gardanne et Cabriès. Dont le maire Hervé Fabre-Aubrespy, avait tenté d’empêcher devant le tribunal la tenue de la séance de lundi et s’était, par la suite, présenté à la présidence contre Jean-Claude Gaudin. Un paradoxe pour le commun des mortels. Un argument pour ce conseiller d’État, membre pendant cinq ans du cabinet Fillon à Matignon. En droit, les candidats et les électeurs sont les plus fondés à contester un scrutin. JOURNÉES HANDI-CITOYENNES Des jeunes dans la peau des handicapés Ils sont une dizaine de jeunes en fauteuil roulant. En file indienne, ils freinent, tentent d’éviter les obstacles, accélèrent le rythme. "Je ne me verrai pas tous les jours comme ça", soupire Mohamed, 13 ans, en se levant du fauteuil. Ça fait très mal aux bras". Hier, à l’Hôtel du département (4e), trois classes de collégiens dont deux de Marseille, Saint-Joseph et Henri-Wallon, ont participé à des ateliers ludo-pédagogiques pour se glisser dans la peau de personnes souffrant de handicap. "Comment vit-on quand on ne voit pas ses jambes, quand on marche en fauteuil, quand on parle avec des gestes ? Vous repartirez différent de cette journée", prévient Jean-Christophe Parisot de Bayard, premier préfet en fauteuil, chargé de la lutte contre l’exclusion. C’est la première fois que l’association "Différent… comme tout le monde" et l’académie d’Aix-Marseille organisent ces journées handicitoyennes dans les Bouches-du-Rhône du 3 au 13 novembre. Pendant dix jours, près de 1 800 élèves en classe de cinquième issus de 29 collèges de l’académie vont être sensibilisés à ce sujet souvent tabou. "Est-ce que vous connaissez beaucoup de personnes handicapées ?", demande la déléguée Sandra Dalbin, lors de son discours d’introduction. La m a j o r i t é l è v e l a main."Ah quand même ! Vous avez déjà dû vous demander comment se comporter avec eux. Soyez naturels. Ils veulent être considérés comme tout le monde". Après ces quelques recommandations, les enfants ont fait des parcours en fauteuil. "Longez la passerelle en fer…", explique un bénévole. "Mais, il y a des cailloux", rétorque une élève, inquiète. "C’est fait exprès", répond-il. "Qu’est-ce que c’est lourd à pousser !", s’étonne Haydil, 14 ans. "Moi, quand j’ai été opérée du genou, j’étais quelque temps en fauteuil. Tout le monde me regardait", raconte Dalal 13 ans, en balayant de la main ce mauvais souvenir. Un peu plus loin, les enfants découvrent la dysgraphie. Casque sur les oreilles pour reproduire leurs difficultés de concentration, deux filles doivent réussir à recopier un texte rédigé par un dyslexique : "Sleon une edtue de l’uvinertisé"... "On ne va pas y arriver", souffle l’une d’elle. À côté, des collégiens doivent colorier un mandala avec des gants de jardinier sur les mains. "Ah, ça y est ! J’ai déjà dépassé", rit Sihem, 12 ans. Ces exercices empiriques font leur preuve. "Tout est dur à faire", constate un groupe. "Surtout le fauteuil, c’est tarpin rapide". D’autres apprendront à marcher avec une canne blanche, ou encore à découvrir le langage des signes. Elsa MARI Les collégiens ont pu se mettre dans la peau des personnes souffrant de handicap en essayant d’avancer en fauteuil. / E. M Alexandra DUCAMP ÉCONOMIE HÔPITAUX DE MARSEILLE Les experts-comptables Le Département poursuivra l’aide financière inquiets pour la région Poursuivant son tour d’horizon des grands secteurs d’intervention du Conseil départemental 13 préalablement identifiés dans le cadre des États généraux de Provence, la présidente (LR) du département des Bouches-du-Rhône a fait escale hier dans plusieurs établissements de santé marseillais, à commencer par le plus emblématique d’entre eux : l’hôpital de La Timone. Impressionnée - au mauvais sens du terme - par l’état des urgences pédiatriques et les condi- 10 M¤ seront affectés chaque année aux investissements jugés prioritaires. tions de fonctionnement du Samu, Martine Vassal, qui était accompagnée de Brigitte Dievesa, déléguée à la santé du Département et du sénateur (LR) Bruno Gilles, vice-président de l’AP-HM, a confié au Pr Marc Alazia, chef du pole urgences de La Timone, ses intentions en matière de santé publique. "La solidarité doit s’exercer au Martine Vassal devrait aider le Samu à acheter deux ambulances et les urgences pédiatriques à se rénover. / PHOTO CYRIL SOLLIER profit de ceux qui en ont vraiment besoin", a indiqué la présidente du Département, déplorant le fait que sous la précédente mandature (celle de Jean-Noël Guérini), "il n’y avait pas eu de ligne directrice" et que "les soutiens financiers étaient attribués au coup par coup". Confirmant que "les 10 millions d’euros affectés par l’ex-CG13, chaque année, pour l’aide à l’acquisition de nouveaux équipements, seront maintenus, malgré la baisse des dotations de l’État aux collectivités territoriales", Martine Vassal a tenu à souligner que n’étant pas elle-même médecin ni spécialiste du médical, elle allait réactiver le Conseil départemental de la santé publique. Mis en sommeil par son prédécesseur, cet organisme va donc jouer à nouveau pleine- ment son rôle afin de définir, en concertation avec les professionnels de santé, les priorités d’action du Département. Sans doute inscrira-t-il en tête de sa liste l’accélération des travaux des futures urgences pédiatriques de La Timone, incapables pour l’heure de répondre de manière satisfaisante à l’arrivée quotidienne de près de 150 petits patients, ni d’affronter les épidémies hivernales, ne pouvant, faute de place, mettre à l’isolement les enfants victimes d’affections virales de type bronchiolites, gastro-entérites, etc. Devrait également figurer en bonne place sur cette liste la commande de deux véhicules au profit du Samu dont la flotte vieillissante a de plus en plus de mal à atteindre les extrémités du département et en revenir… Plus tôt dans la matinée, Martine Vassal avait visité les urgences de l’hôpital Nord - bien mieux loties - avant de parcourir plusieurs services de l’hôpital Saint Joseph, qui lui aussi a un vaste projet de réaménagement. Histoire d’affirmer que "l’action du CD13 s’exercera en fonction des besoins exprimés par les professionnels de santé", du secteur public comme du privé. Philippe GALLINI Président du Conseil régional de l'ordre des experts-comptables, Mohamed Laqhila a présenté récemment le nouveau baromètre économique commandé et financé par la profession. Baptisé Eco-Experts Paca, cet outil qui constitue la première déclinaison de Statexpert en province, permet de suivre au plus près l'activité des petites et moyennes entreprises grâce à l’exploitation des informations recueillies par les membres de l'ordre auprès des sociétés dont ils ont la charge. Détaillée par l'économiste Nicolas Bouzou, cette première édition du baromètre livre une photographie très contrastée de l'économie provençale au premier semestre 2015, avec d'un côté une hausse de 1 % du chiffre d'affaires des entreprises (il avait reculé de 2 % en 2014) et une parfaite stabilité de leurs effectifs (deux données d'ailleurs strictement identiques à la moyenne française), et de l'autre une baisse de 1 % des exportations (7 points de moins que le reste de la France) et surtout un net recul des investissements (-15 %, soit 9 points de moins que la moyenne française). Évolution d'autant plus préoccupante qu'en 2014, les entreprises avaient accru leurs investissements de 2 %. De même, la hausse de 1,1 % du chiffre d'affaires des entreprises de Paca entre le 1er semestre 2015 et le 1er semestre 2014 reste en retrait par rapport à celles qu'enregistrent les autres régions françaises, notamment "le grand Montpellier" et Rhône-Alpes (+2,2 %), mais aussi la Bretagne et Paris-Île de France (+1,9 %). Concernant le montant moyen du chiffre d'affaires annuel des entreprises, il s’établit au premier semestre 2015 à seulement 333000 ¤ en Paca, soit 23 % de moins que la moyenne nationale (408 000 ¤). Par secteur d'activités, le baromètre révèle qu'au 2 e trimestre 2015, le chiffre d'affaires des services à haute valeur ajoutée (numérique, services aux entreprises, etc.) a progressé de 4 % - malgré un effondrement des recettes à l'export (- 47 %) - et celui de l'économie productive a augmenté de 7 %. Quant aux investissements, ils sont en baisse parfois très forte (-17 % dans les services à haute valeur ajoutée ; -7 % dans l'économie résidentielle), mais augmentent dans le bâtiment (+3 %). Ph.G.