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OPÉRATION « DISNEY » IL ÉTAIT UNE FOIS... DES PICKPOCKETS par Angélina Gagneraud Les financiers/receleurs du clan sont interpellés avec le concours d’un agent du service d’intervention de la police roumaine. Coups de bélier, la porte cède. Ce matinlà, dix-sept individus, dont plusieurs mineurs, sont interpellés simultanément en région parisienne et en Roumanie. Plus de mille faits, pour un préjudice estimé à un million d'euros. Ces chiffres éloquents ne concernent qu'un seul clan familial, originaire de la ville de Craiova. Ses membres dérobaient aux touristes, émerveillés par le parc Disneyland Paris ou envoûtés par les centres commerciaux à proximité, leurs porte-feuilles, téléphones, bijoux ou objets de petite maroquinerie de luxe. Pour ces visiteurs détroussés, l'enchantement « made in France » tournait alors au cauchemar. La traite des êtres humains sous « alias » Tout commence sept mois plus tôt par l'accumulation de plaintes de touristes au commissariat de Chessy (77), compétent sur le parc d'attraction et le centre commercial Val d'Europe. Les agents de sécurité du site identifient plusieurs mineurs, auteurs présumés de vols à la tire. Ils récupèrent de nombreux renseignements, utiles aux enquêteurs de l'OCLDI, finalement saisis du dossier. Les mineurs utiliseraient de multiples alias pour échapper aux forces de l'ordre et leur donner du fil à retordre ! C'était compter sans le Une vague d'interpellations, en France et en Roumanie, a permis le démantèlement d'un groupe criminel, le 9 février dernier. Organisé, itinérant et transnational, il sévissait dans le parc d'attractions Disneyland Paris, ses alentours et en région parisienne. Ce dossier met en lumière la coopération entre l'Office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI) et les services de police français et roumains, de son déclenchement jusqu'aux opérations judiciaires. Une première ! Reportage photos : Sirpa Gend © MAJ F. Balsamo et A. Gagneraud 14 MAGAZINE savoir-faire de l'Office, qui active alors l'ensemble de ses partenaires. Agents du parc, services de police français et roumains, spécialistes d'Europol : tous à leur niveau participent aux recoupements. Via l'analyse criminelle, les vraies identités sont révélées. Les enquêteurs mettent ainsi en lumière l'organisation pyramidale du clan : les parents obligeaient leurs sept enfants à commettre des vols. Quant aux grands frères et sœurs, ils contraignaient les plus jeunes. Ces derniers, mineurs, « la cheville ouvrière », leur reversaient le butin quotidien. « Il s'agit-là de vols en bande organisée, de recels de vol en bande organisée, mais également de traite des êtres 123 15 CHIFFRE Intervention de l’équipe cynophile de l'Isle-Adam (95) spécialisée en recherche de billets. humains et de blanchiment d'argent. Des infractions graves... », souligne le major Philippe Stevenard, directeur d'enquête. Sept mois d'enquête sous haute coopération Les faits sont sensibles. Les victimes sont des touristes étrangers et les auteurs des ressortissants roumains. Ce dossier a donc nécessité la coopération des autorités judiciaires françaises et roumaines. Des officiers de liaison roumains (en poste auprès de l'OCLDI et du bureau des affaires criminelles de la DGGN) et français (affecté en Roumanie) ont sollicité les services de leur pays d'origine. Ces échanges ont permis d'identifier les auteurs présumés, et de connaître les filiations ainsi que l'autorise l'accord signé entre les deux pays. L'ambassade de Roumanie en France a également apporté son concours pour faciliter ces coopérations. Le jour des interpellations, le consulat de Roumanie a aidé les services sociaux de Seine-SaintDenis (93) à la prise en charge des enfants dont les parents ont été placés en garde à vue puis en détention provisoire. De même, quatre policiers roumains (deux agents du service d'intervention de la police roumaine et deux de la direction des investigations criminelles) sont intervenus aux côtés de leurs homologues français. « C'est la première fois qu'une coopération s'effectue avec la présence spécifique de policiers roumains pour une opération en France ! Il s'agit d'une véritable bonne pratique à développer, commente le lieutenant-colonel François Despres, adjoint à l'Office. Tous les acteurs ou ser- vices dont nous pouvions avoir besoin ont été engagés : la chaîne criminalistique, l'observation/surveillance, les services de police français et roumains, les agents du parc, les attachés de sécurité intérieure et les officiers de liaison des ambassades, Europol, les équipes cynophiles, la section aérienne de la préfecture de police... Tous ont permis de mettre un coup d'arrêt à ce réseau familial criminel. » VIDÉO Retrouvez sur GendCom un reportage photo exclusif ainsi qu’une vidéo de l’opération judiciaire. Fin d’une opération coordonnée internationale. 7 mois d'enquête. 11 individus interpellés en France (6 gardes à vue au sein de l'OCLDI, 5 autres au commissariat de Chessy) et 6 en Roumanie (mandats d'arrêts européens délivrés). 4 lieux d'interpellation en France, 10 en Roumanie. 3 interprètes à temps complet pendant l'enquête. 23 lignes sur écoute. 12 000 communications. 340 P.V. de transcription. 2 commissions rogatoires techniques (vidéos). 3 enquêteurs OCLDI envoyés en Roumanie au cours d'une commission rogatoire internationale. 4 policiers roumains en France dont 2 agents de l'intervention. 2 officiers de liaison roumains OCLDI et DGGN. 2 agents Europol. 1 000 faits estimés. 25 000 € retrouvés et de nombreux biens neufs (télévisions, téléphones, bijoux...). 80 gendarmes et policiers engagés pour les interpellations en France et en Roumanie. 3 équipes cynophiles. 1 appui aérien de la préfecture de police.