Discours du Ministre Benoit Conference Financement Sante
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Discours du Ministre Benoit Conference Financement Sante
MINISTERE DES AFFAIRES SOCIALES ET DU TRAVAIL (MAST) CABINET DU MINISTRE Conférence internationale sur le financement de la santé en Haïti Thème : «L’accès aux soins de santé pour tous en Haïti : défis et perspectives pour son financement» Discours du Ministre Victor Benoit 28.04.15 Mesdames, Messieurs, C’est pour moi un immense plaisir et un grand honneur de prendre la parole aujourd’hui à l’ occasion de la conférence internationale sur le financement de la santé, pour présenter la vision du gouvernement sur la protection sociale en santé. Je remercie les organisatrices et les organisateurs de cet évènement, particulièrement mon homologue, la Ministre de la Santé Publique et de la Population, Dr. Florence Guillaume-Duperval, pour l’invitation qui m’a été faite. Je salue le travail important de toutes celles et de tous ceux qui ont rendu possible la tenue de cette conférence internationale dont le thème renvoie a « L’accès aux soins de santé pour tous en Haïti : défis et perspectives pour son financement ». Il s’agit la d’un débat nécessaire pour le pays dans le contexte actuel de la refondation nationale. Il s’agit la d’un débat on ne peut plus intéressant au regard des enjeux et passions qu’il soulève. Mais c’est aussi et surtout un débat complexe. C’est un débat complexe a plus d’un titre. Complexe du fait de la prédominance de l’exclusion dans la société haïtienne. Complexe par rapport aux valeurs culturelles et aux pratiques traditionnelles qui contribuent a la définition de notre identité nationale. Complexe lorsque l’on considère la faiblesse des ressources financières, tant publiques que privées, allouées a la prise en charge des soins de santé en Haïti. Face a toute cette complexité, comment porter et asseoir une vision cohérente et soutenable de la protection sociale en matière de santé ? Cette question sous-tend l’idée que nous avons déjà développé et arrêté notre vision de la protection sociale en Haïti. C’est le cas, en effet. Et voici les sept (7) principes sur lesquels nous avons reposé notre vision de la protection sociale : 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. Le principe de la justice sociale Le principe de la solidarité Le principe de la mutualisation des risques Le principe de la continuité du service public Le principe de l’égalité des citoyennes et des citoyens Le principe de l’universalité des droits Le principe de dignité de la personne humaine L’ensemble de ces principes constitue un faisceau de lumières qui guident nos pas vers la stabilité politique que nous recherchons tous. Ils sont considérés comme une boussole qui oriente nos actions dans le domaine de la protection sociale en Haïti. Et nous tenons a ce qu’ils se retrouvent au fondement des prestations et services offerts par les partenaires avec lesquels nous travaillons au quotidien en vue de l’amélioration des conditions matérielles d’existence des populations les plus démunies. Lorsque nous parlons de protection sociale, nous l’entendons comme un vecteur de cohésion sociale, un instrument stratégique de premier ordre dans la lutte contre la pauvreté et la réduction des inégalités socioéconomiques. Pour nous, la protection sociale renvoie a l’ensemble des mécanismes mis en place par l’Etat et au travers desquels la société arrive a assurer a l’ensemble de ses membres une véritable couverture contre les risques susceptibles de porter atteinte a la dignité humaine. Au nombre des différents risques contre lesquels chaque citoyenne et chaque citoyen ont besoin et ont le droit d’être couverts, on retrouve celui de la maladie en tant quelle constitue une « forme élémentaire de l’évènement » du processus global de l’existence humaine. En effet, les maladies, les épidémies, les accidents, la vieillesse constituent autant de risques auxquels tous les membres de la société haïtienne doivent faire face directement et indirectement. Dans ce pays qu’est notre pays, les populations sont tellement affectées par les multiples manifestations de la maladie que nos scientifiques, nos chanteurs, nos écrivains ne cessent de nous répéter a longueur de journée que le pays est malade. Le pays est malade parce que sa terre arable s’en est allée vers l’océan. Voici Délira Délivrance, ce personnage créé par Jacques Roumain dans « Gouverneurs de la rosée » qui prenait la terre dans ses bras et qui disait les larmes aux yeux : « Nous mourrons tous ». Oui, voici Délira avec cette poignée de terre morte et qui dit la douleur du pays : la terre s’en va. Le pays est malade parce qu’il ne sait plus que pleurer sur les veines ouvertes de ses montagnes. Le pays est malade parce que ses villes sont obligées de faire profil bas devant la montée des quartiers précaires. Le pays est malade parce que le territoire est aménagé de manière a ce qu’il étouffe le bien-être tant individuel que collectif. Le pays est malade parce que la majorité de ses habitants est malade et sans ressources pour y faire face. Les chiffres sont malheureusement éloquents. Sur le continent américain, Haïti est le pays avec la plus forte prévalence du VIH/Sida : 2%. Sur tout le continent américain, Haïti est le pays qui a payé le plus lourd tribut a l’épidémie du cholera au cours du 21e siècle : plus de 8 000 décès directement liés au cholera. Sur tout le continent américain, Haïti est le pays ou le taux de mortalité maternelle est le plus élevé : 350 décès pour 1000 femmes. Environ 30 000 cas de paludisme sont confirmés chaque année en Haïti. Tous ces chiffres nous rappellent a quel point les problèmes de santé sont graves dans notre pays. Comment faire alors pour protéger les citoyennes et les citoyens contre les risques de dégradation de leur état de santé ? Quels sont les mécanismes de protection sociale que nous devons définir et renforcer en matière de santé en Haïti? Je tiens a signaler ici que notre vision de la protection sociale en matière de santé souscrit entièrement a la « Stratégie mondiale de la santé pour tous » adoptée en 1979, lors de la 32e Assemblée Mondiale de la Santé. D’après nous, la santé pour tous implique : 1) l’accès de tous aux informations liées a la santé ; 2) l’accès de tous aux services de soins de santé ; 3) le respect des droits de tous a des services de soins de qualité. Nous pensons qu’il est urgent de combattre et réduire les inégalités socioéconomiques d’accès aux soins de santé en Haïti qui sont trop criantes. Pour gagner ce combat, nous faisons les propositions suivantes : a. Le renforcement du réseau sanitaire haïtien par l’augmentation du nombre de dispensaires, de centres de santé, d’hôpitaux, d’infirmières et de médecins, des agents de santé pour plus de proximité avec la population. b. Une meilleure coordination des actions humanitaires et d’assistance sociale destinées aux populations en situation de vulnérabilité en vue d’un plus grand impact et de meilleurs résultats. c. Une rationalisation de la gestion du système de sécurité sociale existant actuellement en Haïti. Ceci passe par la modernisation et la décentralisation des deux institutions phares de la sécurité sociale en Haïti, a savoir l’OFATMA et l’ONA. Ces deux structures peuvent faire plus et mieux si elles sont mieux accompagnées par les autorités politiques placées au plus haut niveau de l’Etat. Par exemple, en facilitant l’accès aux médicaments pour tous les utilisateurs des services de soins. d. Définir et appliquer une stratégie claire visant a assurer une couverture contre les risques de maladie au profit du secteur informel qui absorbe la part la plus importante de la main d’œuvre active haïtienne tant dans les centres urbains que dans les zones rurales. Mais à quoi servirait-il de faire toutes ces propositions si elles ne rencontrent pas l’adhésion des principaux acteurs concernés par la question de la protection sociale en matière de santé ? Nous sommes convaincus que la meilleure politique de protection sociale en matière de santé qui pourra être appliquée est celle élaborée dans la concertation, celle qui permet d’inscrire la parole de tous les secteurs de la vie sociale et économique dans l’agenda politique, celle qui part du principe de l’inclusion de tous dans la réflexion et dans les prises de décisions. C’est fort de cette conviction que nous envisageons de convoquer les Etats Généraux de la Protection Sociale en Haïti. Dans le cadre de ces Etats Généraux, la santé aussi bien que l’éducation, le transport, le logement, occupera une place centrale dans les débats. Le Ministère de la Santé et de la Population a déjà été invitée a la mise en place de la Table Sectorielle de la Protection Sociale en Haïti dans les jours a venir. Plusieurs rencontres et séances de travail ont déjà eu lieu avec les cadres supérieurs et la direction générale du MSPP sur la question. Mesdames, Messieurs, nous sommes réunis ici a l’initiative de la Ministre de la santé et de la Population pour discuter du financement de la santé en Haïti. Permettez que je vous dise ceci : les principaux financeurs du système de santé en Haïti doivent être les Haïtiens eux-mêmes. Cela est nécessaire pour notre dignité de peuple et cela est possible si nous organisons mieux notre système de protection sociale en Haïti. Le Gouvernement de la République d’Haïti a travers le Ministère des Affaires Sociales et du Travail vous invite toutes et tous a œuvrer a une redéfinition des approches et une réorientation des actions dans le domaine de protection sociale en général, et dans le domaine de la protection sociale en matière de santé particulièrement. Je formule de souhait que cette conférence internationale soit une occasion spéciale de riches échanges et de propositions pertinentes pour notre système de santé. Je souhaite bon travail a toutes et a tous. Merci.