Underground - Ciné-club Ulm
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Underground - Ciné-club Ulm
mardi 28 novembre 2000 CINÉ-CLUB NORMALE SUP’ Underground - Emir Kusturica S C É N A R IO : EM I R K U S T U R I C A , D U S A N K O V A C E V IC D I R E C T E U R D E L A P H O T O G R A P H IE : V I L K O F I L A C CHEF DÉCORATEUR : MILJEN KLAKOVIC M U SIQ U E : G O R A N B R E G O V I C MONTAGE : BRANKA CEPERAC D U R É E : 2H 4 7 PRODUCTION : CIBY 2000 ET PANDORA FILM AVEC M IKI M A N O JLO V I C , L A Z A R R I S T O V S K I , M I R J A N A J O K O V I C , S L A V K O S T I M A C , E R N S T S T Ö T Z N E R , SD R A N T O D O R O V IC, MIRJANA KARANOVIC, MILENA PAVLOVIC, B O R A T O D O R O V IC, DAVOR DUJMOVIC. L ’histoire B e lgrade, 1941. A lors que les prem ières bom b e s a l l e m a n d e s t o mbent sur la ville, M a r k o e t B l a c k y p r o f i t e n t d e l a d é r o u t e g é n é r a l e p o u r se lancer dans une vaste entreprise de m a g o u illes en tous genres. Marko, le rusé, a très vite com p r i s q u ’ u n p a y s e n g u e r r e p e u t représenter une véritable m ine d’or. Il cache alors dans la cave de son grand-père un groupe de réfugiés, auquel il fait fabriquer des arm e s e t o b jets divers, aussitôt écoulés au m a rché noir. En 1943, Blacky est blessé, et m is à l’abri dans la cave. D é s o r m a is libre de toute contrainte, M arko n’hésite pas à le trahir en séduisant Natalja. En 1944, la paix revient, m a is M arko fait croire aux habitants de la cave q u e la guerre se poursuit : la m y stification durera ainsi plue de 15 ans … Il était une fois un pays ... “C’est avec peine, avec tristesse et joie que nous nous souviendrons de notre pays, lorsque nous raconterons à nos enfants des histoires qui commencent comme tous les contes de fées : il était une fois un pays…“ Underground est né d’une pièce de théâtre de Dusan Kovacevic, dans laquelle un homme maintenait des compatriotes dans une cave et leur faisait travailler le textile pour son profit personnel. De ce canevas est resté l’idée de manipulation d’un homme par un autre, au départ pour une femme, puis par intérêt économique. Peu à peu, Emir Kusturica a été rattrapé par ses origines, et a transformé cette histoire en fable sur les cinquante années d’une aventure sociale, politique et humaine qui s’appelait Yougoslavie. Suite à sa Palme d’Or à Cannes, le film a fait l’objet d’une vive polémique dans les milieux intellectuels français. A leur décharge, Underground est vraisemblablement un film de propagande. Mais pas en faveur des Serbes, ni des croates, ni des bosniaques. Underground est surtout un film en faveur de l’humanité toute entière et contre la guerre. On a reproché à Kusturica de ne pas se soucier de la véracité historique. On peut effectivement noter un certain manque d’objectivité dans le traitement des faits historiques, notamment ceux qui concernent la guerre en exYougoslavie. A titre d’exemple, la Forpronu y est ridiculisée, devenant sous la caméra de Kusturica synonyme de lâcheté. C’est oublier un peu vite la vie que des hommes ont perdus dans ce conflit. Mais c’est aussi une vision que beaucoup de caricaturistes français ont fait des casques bleus. Underground, c’est avant tout une prise de position très claire d’Emir Kusturica contre toutes les formes de manipulation, qu’elles soient d’hier ou d’aujourd’hui, médiatiques ou politiques. Pour Kusturica l’histoire n’est qu’un prétexte à la parabole sur la trahison et la manipulation, la puissance et la gloire, les victimes du système. Le sens de la parabole d’Underground n’est pas celui qu’y ont vu les intellectuels. Kusturica s’attaque aux politiciens de toutes bords, à ces électoralistes sans scrupules qui se compromettent dans toutes les formes du mensonge, ainsi qu’à leur principaux complices, les médias, qui disposent du pouvoir le plus fort, celui de distiller l’information à leur gré, et de maintenir le monde à l’état d’ignorance, dans un souterrain virtuel. La vocation d’Underground n’était pas de faire un docu-drama sur les Balkans de 1941 à 1991, mais de raconter la vie d’un peuple, ses illusions et ses désillusions, ses joies et ses peines. Pour exprimer la vie malgré tout, Kusturica a utilisé toute la palette de son talent, créant un univers baroque peuplé de personnages aux physiques insensés, d’animaux, de caractères typiquement balkaniques jovials et fêtards, utilisant à merveille l’humour et le burlesque, accordant un rôle primordial à la musique comme symbole de vie et de mouvement dans la cave, filmant encore de magnifiques scènes oniriques comme celle célèbre du mariage de Jovan. Underground est le poème d’adieu d’un homme à ce pays qu’ il a aimé, qui a disparu dans la guerre, et qu’il ne retrouvera plus. C’est un hommage au peuple yougoslave tout entier, à ses cinquante années de vie commune entre les différentes ethnies, à cette vie passée à jamais perdue par la folie des hommes. la polémique Encensé au soir de sa Palme d’Or à Cannes, Underground n’a pas tardé à être la cible d’une campagne incendiaire, menée dans la presse française par un courant d’intellectuels sous l’impulsion du philosophe Alain Finkielkraut. Le crime de Kusturica ? On l’accuse d’avoir signé une œuvre de propagande pro Serbe, au moment même où l’on découvrait avec horreur le massacre de Tuzla, en pleine guerre déchirant l’exYougoslavie. ment pro Serbe. L’accusation est rude, médiatiquement bien relayée, même si l’accusateur n’avait pas vu le film encore à ce moment là... Les jours qui suivent la parution de ce texte voit la polémique s’amplifier, entre pros et antis Kusturica. Serge Regourd publie dans Le Monde du 9 juin 1995 un article qui parle vraiment du film, et essaie de réparer l’épisode Finkielkraut : " Une invention esthétique de tous les instants, des images et des plans, dont on peut penser qu’ils resteront dans l’anthologie du cinéma, au même titre que celles et ceux de Fellini, dont Kusturica est désormais l’alter ego. Avec, en prime, un humour à proprement parler dévastateur, un rythme étourdissant, des personnages et des acteurs qui font aimer la vie. […] Le commissaire politique aux questions artistiques (Finkielkraut, ndlr) analyse laborieusement … non les images du film, mais de longues citations du réalisateur ". Cependant le mal est fait : le film subira un échec au box-office, amalgamé par le public aux crimes de guerre, et rejeté par les distributeurs en Amérique du Nord, sur les simples accusations d’un censeur sans scrupules. Profondément troublé par la désaffection du public, Kusturica annoncera alors son intention d’abandonner le cinéma. “Il est désespérant que l’absence de haine de ce film ait suscité de la haine “ Télé Obs n° 115 France-Marie Lacaille “En récompensant Underground, le jury de Cannes a cru distinguer un créateur à l’imagination foisonnante. En fait, il a honoré un illustrateur servile et tape-àl’œil de clichés criminels ; il a porté aux nues la version rock, postmoderne, décoiffante, branchée, américanisée, et tournée à Belgrade, de la propagande serbe la plus radoteuse et la plus mensongère.” Alain Finkielkraut, L’imposture Kusturica, Le Monde, 2 juin 1995 Actualités Il est clair que Kusturica évoque cette guerre. Mais où se situe-t-il? Yougoslave et donc complice d’un régime criminel? Bosniaque musulman, né à Sarajevo et donc désormais apatride? Son film a été tourné en partie à Belgrade avec l’accord de Milosevic et les intellectuels européens en font un film forcé- http://www.eleves.ens.fr/cof/cineclub/ [email protected]