Mise en page - Ortho Edition

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Mise en page - Ortho Edition
Rééducation
Orthophonique
Rencontres
Données actuelles
Examens et interventions
Perspectives
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ISSN 0034-222X
Rééducation Orthophonique Neuroimagerie et orthophonie : de la recherche à la pratique clinique N° 260 - 2014
52e Année
décembre 2014
Trimestriel
N° 260
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Couv 260_Mise en page 1 18/12/14 15:32 Page1
Fondatrice : Suzanne BOREL-MAISONNY
Neuroimagerie et orthophonie :
de la recherche
à la pratique clinique
Fédération Nationale des Orthophonistes
Couv 260_Mise en page 1 18/12/14 15:32 Page2
Revue créée par l’A.R.P.L.O.E.V.
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Pr ALLIERES
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DECROIX
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S.
DIATKINE
BOREL-MAISONNY
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R. GRIMAUD • L. HUSSON • Cl. KOHLER • Cl. LAUNAY
F.
LHERMITTE
•
L.
MICHAUX
•
P.
PETIT
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Dominique CRUNELLE
Pierre FERRAND
Lya GACHES
Olivier HERAL
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Frédéric MARTIN
Alain MENISSIER
Pr Marie-Christine MOUREN-SIMEONI
Bernard ROUBEAU
Anne-Marie SIMON
Monique TOUZIN
N° 259 : L’EDUCATION THÉRAPEUTIQUE DU PATIENT EN ORTHOPHONIE - Editorial : L’ETP en
orthophonie (Frédérique BRIN-HENRY ) — Rencontre : L’intégration d’un patient-expert dans un programme d’ETP : regards croisés, (Roland VARINOT , Frédérique BRIN-HENRY) — Données Actuelles :
Education thérapeutique du patient (ETP) : principes et intérêts, (Claire MARCHAND) - Au-delà du masque
de l’expert - Réflexions sur les ambitions, enjeux et limites de l’Éducation Thérapeutique du Patient,
(Alexandre KLEIN) — Examen et interventions : Interdisciplinarité autour du patient en éducation thérapeutique : le point de vue de soignants, (Sylvie DIANCOURT) - Education thérapeutique du patient aphasique et son conjoint, (Frédérique BRIN-HENRY) - Proposition d’un diagnostic éducatif dans le cadre du
programme « Communiquer malgré l’aphasie », (Estelle BERNARD) - Impact d’un Programme d’Education
Thérapeutique du Patient (ETP) pour des personnes aphasiques et leurs aidants, (Charline CÉSAR,
Frédérique BRIN-HENRY, Estelle BERNARD) - L’implication des aidants dans les programmes d’éducation
thérapeutique, (Nathaly JOYEUX) - Éducation Thérapeutique du Patient dysphagique : état des lieux et propositions, (Ariane LÉTUMIER, Antony, Caroline HELLY) - De la conception à la labellisation d’ateliers thérapeutiques pour adolescents dyslexiques, (Françoise GARCIA) — Perspectives : Le réseau dans l’éducation thérapeutique : intérêt pour l’orthophoniste et le médecin coordinateur - Expérience du réseau de
l’Espace Régional d’Education Thérapeutique de Basse-Normandie et du réseau Normandys, (Audrey
ARMAND) - La Fédération Nationale des Aphasiques de France et l’ETP, (Jean-Dominique JOURNET)
Rédacteur en chef
Jacques ROUSTIT
Secrétariat de rédaction
Marie-Dominique LASSERRE
Abonnements
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Commission paritaire : 1110 G 82026
N° 258 : DENISE SADEK-KHALIL ET SON ŒUVRE – HOMMAGES ET TÉMOIGNAGES - Editorial :
(Dominique MARTINAND-FLESCH) — Introduction : Denise Sadek-Khalil, le langage oral au carrefour
de la linguistique et de la clinique, (Marie-Pierre THIBAULT) — Apports de ses travaux : Un itinéraire
improbable, (Ronald LOWE) - Sur les pas de Denise Sadek-Khalil. Rigueur, Liberté et Interaction dans la
prise en charge orthophonique, (Shirley VINTER) - Donner libre(s) cours à la recherche du langage : l’enseignement de Denise Sadek, (Elisabeth MANTEAU-SÉPULCHRE) - Denise Sadek-Khalil, Gustave
Guillaume : psycho-pédagogie et psychomécanique du langage, (Philippe SÉRO-GUILLAUME) - Denise
Sadek-Khalil : de la théorie à la réalité du langage, (Guy CORNILLAC) - Prendre, apprendre et comprendre, (Denise SADEK-KHALIL) — Compagnonnage : Une pionnière en orthophonie : Denise Sadek-Khalil,
(Anne-Marie WEIL-LEVEN, Simone TERRIER) - Gustave Guillaume et Denise Sadek-Khalil : la philosophie du langage (Colette SIRAT) - Rencontres et Privilèges, (Mireille COHEN-MASSOUDA) - Denise
Sadek... l'art de transmettre la langue dans un plaisir mutuel - Témoignages du CEOP, (Marie-Claude
CAUVIN-GARRITY, Marie-Christine CHAPERON, Christine ROMAND, Michel MAULET, Martial
FRANZONI) - A propos de « 7 Leçons de 1980 à 1984 » par Mme Sadek à une fillette sourde, (Francine
JALABERT) - Voir, savoir, faire savoir : en suivant les traces de SADEK sur les sentiers de la langue,
(Martine MIR) - Denise Sadek-Khalil, maître de stage et penseur de l’orthophonie (Mireille KERLAN) - Un
incontournable pour l’orthophonie de demain : l’approche de Denise Sadek-Khalil sur les traces de Gustave
Guillaume, (Patricia MALQUARTI) — Rencontre et hommage : Grandeur et simplicité, (Monique et JeanMarie DUCROS, Pascale DUCROS) - Témoignages (Claire DEMATEÏS-KOPPEL, Frédéric DEMATEÏS) Introduction à l’hommage rendu à Denise Sadek-Khalil lors de son inhumation le 20 avril 2012 (Nadine
SERVAJEAN)
Réalisation TORI
01 43 46 92 92
Impression : CIA Bourgogne
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Sommaire
décembre 2014
N° 260
Rééducation Orthophonique
Ce numéro est dirigé par Pascale TREMBLAY, Ph.D., professeure
en réadaptation (orthophonie) à l’Université Laval et chercheure au centre
de recherche de l’Institut Universitaire en Santé Mentale de Québec
Neuroimagerie et orthophonie :
de la recherche à la pratique clinique
1. La neuroimagerie au cœur de la recherche et de la pratique clinique
en orthophonie,
Pascale Tremblay, Québec
1. Introduction à la neuroimagerie et à son application
dans l’étude du langage et de la cognition,
Michel-Pierre Coll, Sophie Blais-Michaud, Philip L. Jackson, Québec
2. La nature sensorimotrice de la parole,
Krystyna Grabski, Montréal et Marc Sato, Montréal et Aix-en-Provence
3. Le rôle du gyrus supramarginal lors du traitement phonologique,
Isabelle Deschamps, Québec et Shari Baum, Québec et Montréal
4. La sémantique, la lecture de mots irréguliers et les lobes temporaux antérieurs,
Sabryna Bergeron, Dominique Pichette, Gabrielle Ciquier,
Catherine Dubé, Simona M. Brambati, et Maximiliano A. Wilson, Québec et Montréal
5. Neuroimagerie du vieillissement normal du langage et de la parole,
Melody Courson et Pascale Tremblay, Québec
6. Substrats neuronaux et fonctionnels de la perception de la parole
chez les porteurs de l’implant cochléaire,
Maxime Maheu, Julie Roy, Sara Pagé et François Champoux, Montréal
7. Imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) et orthophonie :
Quelles applications cliniques ?
Edith Durand, Diana Mina, Elisa Vauclare, Marika Beaudoin Landry,
Francis Tremblay, et Ana Inés Ansaldo, Montréal
1. Contribution de l’IRM à l’analyse de la physiologie de la déglutition
et des dysphagies oropharyngées : étude fonctionnelle
des prothèses intra-laryngées,
Florence Guilleré, Strasbourg
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1. Quelques outils pour comprendre l’imagerie par résonance magnétique
et se repérer dans le cerveau,
Melody Courson, Québec
Comité de lecture pour le numéro
Pascale Tremblay, Ph. D.
Isabelle Deschamps, Ph. D.
Krystyna Grabski Ph. D.
Marc Sato, Ph. D.
Melody Courson, Orthophoniste
Merci à Line Charron, Orthophoniste et à Amélie Richard, Orthophoniste
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La neuroimagerie au cœur de la recherche et de la
pratique clinique en orthophonie
Pascale Tremblay, Ph.D. 1
Département de Réadaptation
Université Laval
1050 avenue de la Médecine
Québec (QC), CANADA, G1V 0A6
Courriel : [email protected]
Les orthophonistes sont de plus en plus souvent exposés à des données de
neuroimagerie, et particulièrement à des données d’imagerie par résonance
magnétique (IRM), que ce soit dans leur pratique clinique, ou dans la recherche
de données probantes dans la littérature scientifique. Très présents dans la littérature scientifique, les outils de neuroimagerie modernes ont en effet considérablement modifié notre compréhension de l’architecture des systèmes cérébraux
impliqués dans le contrôle de la voix, de la parole et du langage au cours des
deux dernières décennies. Ces connaissances nous aident aujourd’hui à mieux
comprendre les manifestations cliniques des atteintes neurologiques et à développer des interventions basées sur des modèles théoriques plus élaborés et plus
réalistes sur le plan neurobiologique. Les outils de neuroimagerie modernes
sont également d’une grande utilité pour établir des diagnostics précis et comprendre l’étiologie des troubles de la parole et du langage, ainsi que pour l’élaboration de plans d’intervention, et pour l’évaluation de l’efficacité des interventions orthophoniques.
Toutefois, du fait de leur complexité et de leur constante évolution, il est
parfois difficile de se tenir au fait des nouvelles technologies, de leur portée, et
des avancées scientifiques et cliniques qu’elles permettent. L’objectif de ce
numéro est donc de faire un tour d’horizon des différentes techniques de neuroimagerie et de neuromodulation (stimulation non invasive du cerveau) afin de les
rendre plus accessibles et de faciliter (et même favoriser !) leur utilisation dans
le domaine de l’orthophonie, autant en recherche qu’en clinique. De l’imagerie
par résonance magnétique anatomique, à l’étude de la connectivité en passant
1. Centre de Recherche de l’Institut Universitaire en Santé Mentale de Québec, Québec City, QC, Canada
2. Département de Réadaptation, Faculté de Médecine, Université Laval, Québec City, QC, Canada
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par la stimulation magnétique transcranienne (TMS), ce numéro spécial vous
fera découvrir les possibilités infinies de la neuroimagerie dans le domaine de
l’orthophonie !
Ainsi, en ouverture du numéro, Coll, Blais-Michaud et Jackson présentent une introduction aux principaux outils et techniques d’analyse utilisés en
neuroimagerie et en neuromodulation et aux différentes applications de ces
méthodes dans le domaine de l’orthophonie et des sciences du langage. En complément d’information, en toute fin de numéro, Courson présente quelques sites
internet fascinants portant sur le fonctionnement du cerveau et sur la neuroimagerie.
Les sept autres contributions de ce numéro présentent l’état actuel des
connaissances dans différentes sphères de la recherche en orthophonie, allant de
la recherche fondamentale à la recherche clinique, sans oublier les applications
cliniques. Ces contributions portent sur les bases neurologiques des aspects sensorimoteurs de la parole (Grabski et Sato), sur le rôle du gyrus supramarginal
dans le traitement phonologique (Deschamps et Baum), sur le rôle des lobes
temporaux dans le traitement sémantique et dans la variante sémantique de
l’aphasie primaire progressive (Bergeron, Pichette, Ciquier, Dubé, Brambati, et
Wilson). L’article de Courson et Tremblay présente l’état des connaissances sur
le vieillissement du cerveau et ses impacts sur le langage et la parole. Les deux
contributions suivantes discutent de l’utilisation de l’IRM et de la neuromodulation dans l’étude du phénomène de la réorganisation (« plasticité ») du cerveau
chez deux populations cliniques différentes, les porteurs d’implants cochléaires
(Maheu, Roy, Pagé et Champoux) et les patients aphasiques (Durand, Mina,
Vauclare, Beaudoin Landry, Tremblay, et Ansaldo). Finalement, une autre application des méthodes d’imagerie est également présentée, laquelle porte sur l’utilisation de l’IRM intra-laryngée dans le traitement des troubles de la déglutition
(Guilleré).
Ainsi, à travers une série de contributions méthodologiques et scientifiques fascinantes, ce numéro spécial vise à démontrer les avancées majeures
qui ont été faites dans le domaine de la neuroimagerie, et les retombées scientifiques et cliniques capitales que ces avancées ont eu dans le vaste et passionnant
domaine de la neuroimagerie et de l’orthophonie !
Bonne lecture !
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Introduction à la neuroimagerie et à son application dans l’étude du langage et de la cognition
Michel-Pierre Coll, Sophie Blais-Michaud, Philip L. Jackson
Résumé
Le développement des différentes techniques de neuroimagerie ainsi que l’amélioration de
l’accessibilité des appareils rendent la connaissance de ces techniques et la compréhension
des analyses qui y sont associées particulièrement importantes pour les cliniciens et les
chercheurs du domaine du langage. Deux principaux types de neuroimagerie sont utilisés
pour l’étude de la cognition et du langage, soit la neuroimagerie structurelle permettant
d’observer et mesurer l’anatomie du système nerveux central et la neuroimagerie fonctionnelle, permettant de mesurer l’activité cérébrale. Une des méthodes les plus couramment
employées pour effectuer ces deux types de neuroimagerie est l’imagerie par résonance
magnétique (IRM). Le présent article offre un résumé des principales techniques d’IRM utilisées dans le cadre de la recherche dans le domaine du langage. Plus précisément, il présente une description du fonctionnement des techniques ainsi que du type de données pouvant être recueillies avec celles-ci. Les analyses les plus typiques, des exemples pertinents
pour la clinique, ainsi que les avantages et inconvénients de l’IRM par rapport aux autres
techniques de neuroimagerie sont discutés. Finalement, deux techniques de neurostimulation pouvant être utiles à l’étude et à l’intervention sur le langage sont brièvement présentées.
Mots clés : langage, neuroimagerie, cognition, imagerie par résonance magnétique, neurostimulation.
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Introduction to neuroimaging methods and their applications in the study
of langage and cognition
Abstract
The development of different neuroimaging techniques and the increased accessibility to
neuroimaging devices make it particularly important for clinicians and researchers in the
fields of language and cognition to understand the functioning of these techniques as well
as the analyses and results associated with their usage. Two main neuroimaging techniques
are used for the study of cognition and language, namely, structural neuroimaging, which
allows the observation and measurement of the anatomy of the central nervous system, and
functional neuroimaging, which allows the measurement of brain activity. One of the most
common methods used for these two types of neuroimaging is magnetic resonance imaging
(MRI). This article provides a summary of the MRI techniques used in research in the field of
language. More precisely, it presents a description of the functioning of these techniques
and of the types of data that they can collect. The most typical analyses, clinically relevant
examples, as well as the the advantages and disadvantages of MRI compared to other neuroimaging techniques are discussed. Finally, a different set of tools for investigating brain
functions, neurostimulation techniques, are briefly discussed.
Key Words : language, neuroimaging, cognition, magnetic cerebral imaging, neurostimulation.
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Michel-Pierre COLL 1-2-3
Sophie BLAIS-MICHAUD 1
Philip L. JACKSON 1-2-3
1 - École de Psychologie
Québec, Canada, G1V 0A6
2 - Centre interdisciplinaire
de recherche en réadaptation
et intégration sociale (CIRRIS)
Québec, Canada, G1M 2S8
3 - Centre de recherche de l’Institut universitaire en santé mentale de Québec
Québec, Canada, G1J 2G3
Correspondance :
Philip L. JACKSON, Ph.D.
Professeur agrégé
École de psychologie
Pavillon Félix-Antoine-Savard
2325, rue des Bibliothèques
Université Laval, Québec (Québec) G1V
0A6
Courriel : [email protected]
L
es progrès techniques récents dans le domaine de la neuroimagerie rendent
son utilisation possible pour de multiples applications cliniques et scientifiques. En effet, l’augmentation de l’accessibilité aux appareils ainsi que
le développement et la diffusion des techniques et outils d’analyse ont mené à
une explosion du nombre de publications utilisant la neuroimagerie au cours des
dernières années. Il importe donc pour tout clinicien et chercheur désirant rester
à l’affût des plus récents résultats de recherche dans son domaine de posséder
une compréhension minimale des différentes techniques de neuroimagerie. Ceci
afin d’évaluer de façon critique la littérature scientifique et, dans la mesure du
possible, d’intégrer ces nouvelles connaissances à sa pratique.
On distingue deux grands types de techniques de neuroimagerie, soit la
neuroimagerie structurelle et la neuroimagerie fonctionnelle. La première vise à
acquérir des informations détaillées sur l’anatomie du système nerveux tandis
que la seconde vise à étudier son activité. L’imagerie structurelle permet de
documenter plusieurs aspects précis de l’anatomie, comme le volume de structures cérébrales, l’ampleur des connexions entre différentes régions ou la présence d’anomalies au sein du système nerveux (p.ex. tumeur, lésion). L’imagerie fonctionnelle permet, quant à elle, d’étudier l’activité cérébrale de façon
dynamique, souvent en réponse à des stimuli particuliers ou lors de tâches perceptuelles, motrices ou cognitives précises.
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Une des principales méthodes de neuroimagerie, de plus en plus utilisée
dans le domaine du langage et de la cognition, est l’imagerie par résonance
magnétique (IRM). L’IRM est une technique non invasive, qui présente très peu
d’inconvénients pour le patient ou le participant à une recherche et qui possède
de nombreux avantages par rapport aux autres techniques de neuroimagerie
comme la topographie par émission de positons (TEP), l’électroencéphalographie (EEG) et la magnétoencéphalographie (MEG). La variété des examens
qu’il est possible de conduire avec cette technique en fait également une
méthode très polyvalente qui permet d’étudier et d’évaluer plusieurs aspects du
cerveau tant sur sa structure que sur sa fonction. En effet, bien que l’IRM ait été
développée initialement comme une technique de neuroimagerie structurelle,
d’autres types d’acquisitions et d’analyses en font également un des principaux
appareils de neuroimagerie fonctionnelle de nos jours.
Le présent article offre donc une description sommaire du fonctionnement, du type de données pouvant être recueillies, des analyses les plus typiques
et quelques exemples appliqués à la cognition et au langage pour les différents
types d’examens et d’analyses d’IRM, en plus de présenter les principaux avantages et inconvénients de l’IRM par rapport aux autres techniques de neuroimagerie. Finalement, un ensemble de techniques de neurostimulation en émergence en neurosciences fonctionnelles seront brièvement discutées.
♦ IRM structurelle
IRM anatomique
L’IRM anatomique, souvent seulement nommée IRM (ou IRMa pour
IRM anatomique), est effectuée à l’aide d’un appareil comportant un aimant très
puissant dont la force du champ magnétique peut varier entre 1,5 et 7 teslas sur
les appareils commerciaux (soit plus de 25 000 fois le champ magnétique naturel de la terre). Certains appareils de recherche atteignent présentement jusqu’à
9,4 teslas chez l’humain (Vaughan et al., 2006 ; Qian et al., 2012). Le signal
capté par l’appareil repose sur les changements d’orientation des atomes d’hydrogène, élément le plus présent dans le corps humain. Alors que les atomes
d’hydrogène sont habituellement en état de rotation aléatoire, une partie de
ceux-ci s’alignent à la direction du champ magnétique fixe produit par l’aimant
de l’appareil d’IRM. Ensuite, un émetteur présent dans la machine envoie de
l’énergie sous forme d’impulsions de radiofréquence à ces atomes. Cette énergie
cause un changement temporaire dans l’orientation de certains atomes. Une fois
l’impulsion de radiofréquence terminée, ces atomes reviennent à leur état de
repos et émettent à leur tour une énergie qui sera captée par l’émetteur (Figure
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1). Cette étape est nommée résonance. Le temps nécessaire pour qu’un atome
excité par l’impulsion de radiofréquence revienne à son état de repos (temps de
relaxation) varie selon le type de tissus dans lequel cet atome se situe (p. ex.,
matière blanche, matière grise, liquide céphalorachidien ; voir Figure 2). Ce
sont ces différences qui permettent de distinguer les différents types de tissus.
Finalement, la localisation spatiale de la position d’un atome particulier est possible grâce à des champs magnétiques beaucoup plus faibles (champs de gradients) à l’intérieur du champ fixe qui font varier la fréquence de la résonance
des atomes localisés à différents endroits dans le corps. La reconstruction
mathématique de ce signal recueilli à travers les différents niveaux du cerveau
(tranches) permet de produire une image du cerveau à haute résolution et en
trois dimensions. Chacune de ces images est composée d’unités de volume
nommées voxels (équivalent du pixel d’une image en 2-D, mais possédant une
3e dimension, soit la profondeur) dont la dimension et le nombre varient en
fonction de la résolution de l’image, de la capacité de l’appareil et selon l’objectif de l’examen (p.ex. visualiser l’ensemble du cerveau ou visualiser une région
en particulier).
Analyse des données de l’IRM anatomique
Ce type d’image en trois dimensions du cerveau permet de distinguer
clairement différentes structures cérébrales (voir Figure 2 et Tableau 1A). Elles
sont donc fréquemment utilisées afin d’identifier la présence de lésions ou
d’anomalies dans les milieux cliniques. Elles peuvent aussi être utilisées en
recherche pour décrire et localiser la lésion ou l’anomalie d’un patient pour étudier l’impact sur son fonctionnement. Par contre, la simple observation de cette
reconstruction du cerveau est peu informative pour étudier la relation entre les
structures et leurs fonctions. Des mesures ont donc été développées afin de
quantifier, entre autres, le volume et la forme des structures cérébrales, l’épaisseur de la matière blanche et de la matière grise et l’aire et la surface corticale.
Ces mesures permettent ensuite d’étudier le lien entre ce volume et les processus cognitifs ou langagiers associés.
La principale technique de quantification de l’IRM structurelle est la morphométrie basée sur les voxels (MBV). Cette technique vise à segmenter une
structure cérébrale particulière afin de mesurer son volume (en cm3 ou mm3)
pour ensuite étudier le lien entre ce volume et différents facteurs (p. ex. présence de pathologies, performance à des tâches). Par exemple, Krafnick, Flowers, Napoliello et Eden (2011) ont utilisé cette technique afin de quantifier les
changements de volume cortical à la suite d’une intervention intensive auprès
d’enfants dyslexiques. L’intervention était basée sur l’imagerie et la visualisa-
9
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tion de lettres, puis de mots de plus en plus complexes. Des aspects tactiles et
moteurs ainsi que verbaux étaient aussi intégrés à l’intervention où les participants devaient tracer des lettres tout en prononçant le son associé. Les auteurs
ont observé des changements de volume spécifiques à cette intervention dans
plusieurs régions associées à la lecture, dont le gyrus fusiforme gauche et l’hippocampe bilatéral. Bien que la nature exacte de ces changements structuraux au
point de vue cellulaire soit encore le sujet de plusieurs recherches, la possibilité
de mesurer des corrélats neurophysiologiques associés à une intervention clinique informe sur la pertinence d’utiliser une intervention en plus de permettre
de préciser sa spécificité et de l’ajuster au besoin.
Une autre technique d’analyse des données d’IRM structurelle similaire à
la MBV est la mesure de l’épaisseur corticale. En effet, comme la matière grise
se situe principalement à la surface du cerveau, il est possible d’étudier l’épaisseur de celle-ci afin d’évaluer les changements morphologiques associés au
développement, au vieillissement, à un apprentissage, à une intervention ou à
une pathologie. Afin de mesurer cette épaisseur, il est tout d’abord nécessaire de
segmenter (subdiviser) l’IRM structurelle selon ses composantes, soit la matière
blanche, la matière grise, le liquide céphalorachidien, le crâne et les méninges.
Ensuite, on utilise diverses opérations mathématiques pour différencier les gyrus
et mesurer l’épaisseur du cortex (voir Fischl et Dale, 2000, pour plus d’information sur ces opérations). Une fois cette mesure déterminée, il est possible de
produire des cartes anatomiques illustrant, à l’aide d’un code de couleurs, les
changements d’épaisseur corticale observés entre deux groupes ou entre deux
temps de mesure. Rogalski et collaborateurs (2011) ont utilisé cette mesure pour
étudier de façon longitudinale les changements morphologiques du cerveau
chez des patients présentant une aphasie progressive primaire de type logopénique, agrammatique ou sémantique. En début de maladie, des différences morphologiques étaient évidentes entre les patients présentant les différents types
d’aphasie. Plus spécifiquement, les atrophies se situaient dans le cortex postérieur inférieur droit pour la variante logopénique, dans le cortex préfrontal
dorso-latéral et le gyrus frontal inférieur pour la variante agrammatique, et dans
le lobe temporal antérieur pour la variante sémantique. Toutefois, au second
temps de mesure, 2 ans plus tard, les auteurs ont observé une atrophie corticale
similaire pour tous les types d’aphasie, suggérant que les distinctions entre ces
types d’aphasie s’estompent avec la progression clinique.
L’imagerie par résonance magnétique de diffusion
La MBV et l’épaisseur corticale permettent de quantifier principalement
la matière grise cérébrale contenant les corps neuronaux. Toutefois, la matière
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blanche est également intéressante à quantifier et à étudier. La matière blanche
représente les axones des cellules nerveuses. Elle est nommée matière blanche,
car une couche de lipide recouvre les axones afin de les isoler et de faciliter la
transmission du signal nerveux. Comme ces fibres nerveuses assurent la communication nerveuse entre les cellules et les différentes régions cérébrales, il est
important d’étudier l’impact de leur volume, de la normalité de leur architecture
et de leur intégrité sur les fonctions langagières. L’imagerie par résonance de
diffusion désigne un ensemble de techniques d’IRM qui permettent d’imager
ces fibres nerveuses cérébrales (Tableau 1B). Une de ces techniques souvent utilisées est nommée l’Imagerie par diffusion du tenseur (IDT). Cette technique est
basée sur une mesure de la diffusion des molécules d’eau dans les tissus cérébraux. Comme la direction de celles-ci est contrainte par la présence de membranes cellulaires, il est possible de reconstruire mathématiquement une image
des axones du système nerveux en mesurant les vecteurs de diffusion de l’eau,
qui ont tendance à suivre les fibres, lors de la résonance magnétique.
L’IDT est parfois utilisée en neurochirurgie afin de guider le chirurgien et
ainsi de lui permettre de préserver le plus possible certaines voies nerveuses
dans des régions visées par l’opération. Sundaram, Sivaswamy, Makki, Behen et
Chugani (2008) ont utilisé l’IDT afin d’évaluer la présence et le volume d’une
des principales voies nerveuses impliquées dans le langage, soit le faisceau
arqué, chez des enfants présentant un retard de développement caractérisé par
des habiletés cognitives et langagières déficitaires. Le faisceau arqué est souvent décrit comme reliant deux aires cérébrales impliquées dans la production et
la compréhension du langage, soit le gyrus frontal inférieur et le cortex supratemporal postérieur. Toutefois, les aires précises reliées par le faisceau arqué
sont remises en question par des travaux récents (voir Dick, Bernal et Tremblay,
2013). De plus, bien que les aires reliées par le faisceau arqué soient traditionnellement appelées aires de Broca et de Wernicke, il est à noter que cette terminologie est anatomiquement non spécifique. Les travaux récents en neuroimagerie suggèrent l’utilisation d’une terminologie anatomiquement précise comme le
gyrus frontal inférieur postérieur (analogue à l’aire de Broca) et le cortex supratemporal postérieur (analogue à l’aire de Wernicke). En mesurant ce faisceau
chez des enfants présentant un retard de développement, les chercheurs ont pu
constater qu’il était absent soit des deux hémisphères pour neuf des vingt
patients à l’étude ou seulement de l’hémisphère gauche chez deux autres
patients. Toutefois, le faisceau était présent dans les deux hémisphères chez tous
les enfants avec un développement typique du groupe contrôle. Ces résultats
suggèrent l’importance de cette voie pour le développement normal du langage
et de la cognition puisque son absence est associée à des déficits au niveau de
11
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ces sphères. L’émergence de cette technique de neuroimagerie a également permis de remettre en question la conception classique des voies nerveuses centrales associées au langage. Une revue de littérature des études de neuroimagerie s’intéressant aux principaux réseaux impliqués dans le langage suggère que
cette fonction est supportée par des réseaux beaucoup plus distribués dans le
cerveau que ceux qui sont classiquement décrits (Dick et Tremblay, 2012).
Angiographie par résonance magnétique
Un autre aspect structurel du cerveau qu’il est possible d’imager à l’aide
de l’IRM est sa vascularisation, avec l’angiographie par résonance magnétique
(ARM). Plusieurs méthodes d’ARM existent, mais la plus fréquemment utilisée
repose sur l’injection dans le sang d’un agent de contraste. Cet agent de
contraste consiste souvent en une molécule radioactive (p. ex. gadolinium) qui
se distribue dans le système vasculaire, réduisant le temps de relaxation des
molécules du sang, et qui permet d’obtenir un contraste net entre celui-ci et les
autres types de tissus (Tableau 1C). Il est donc possible, par la suite, de déceler
plusieurs anomalies du système vasculaire, comme la présence d’anévrismes.
Cette technique peut également être utilisée afin d’imager la localisation et
l’ampleur d’un accident vasculaire cérébral hémorragique.
Ainsi, les différentes techniques d’imagerie structurelle sont utilisées
pour obtenir des détails sur l’anatomie du système nerveux. Elles permettent de
quantifier le volume de différentes structures du cerveau, d’imager les
connexions nerveuses cérébrales, et d’identifier des anomalies présentes dans le
système nerveux. Toutefois, c’est l’IRM fonctionnelle qui permet de mesurer
l’activité cérébrale de façon dynamique.
♦ IRM fonctionnelle (IRMf)
Principes de l’IRMf
L’IRMf est basée sur les mêmes principes physiques que l’IRM structurelle, mais s’intéresse particulièrement à la résonance des protons d’hydrogènes
présents dans le sang plutôt que dans les différents tissus. En effet, cette technique s’appuie sur le principe de couplage neurovasculaire, soit le lien entre le
système vasculaire et le système nerveux. Bien que les mécanismes cellulaires
précis du couplage neurovasculaire contribuant au signal enregistré en IRMf
fassent encore l’objet de débats (Moreno, Jego, de la Cruz, et Canals, 2013), il
est communément accepté que plus une région du cerveau est active et impliquée dans un processus, plus le débit sanguin vers cette région augmente, et
plus l’oxygène sanguin sera transféré du sang vers les neurones ou cellules
12
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gliales de cette région (Arthurs et Boniface, 2002). On nomme cette activité vasculaire associée à l’activité cérébrale « activité hémodynamique ». Ainsi,
l’IRMf est basée sur un contraste qui dépend du niveau d’oxygène sanguin. Le
sang oxygéné (haute concentration d’hémoglobine) présente des propriétés
magnétiques différentes du sang désoxygéné (haute concentration de désoxyhémoglobine). Il est donc possible, avec l’IRMf, de déterminer dans quelles
régions du cerveau les changements de concentration d’hémoglobine et de désoxyhémoglobine varient, et donc, d’évaluer quelles régions sont plus actives
pendant une condition cible, comparativement à une condition contrôle. Puisque
les paramètres des impulsions de radiofréquence utilisées en IRMf visent à optimiser le contraste du niveau d’oxygène sanguin, les structures et tissus sont
alors moins visibles lors de la reconstruction des images. Ainsi, on superpose
généralement les images recueillies en IRMf à une IRM structurelle du même
participant afin de visualiser plus facilement les structures étudiées.
L’IRMf mesure l’activité métabolique associée à l’activité cérébrale et
non directement l’activité électrique des neurones. On qualifie donc cette technique de neuroimagerie fonctionnelle indirecte, par rapport aux techniques de
neuroimagerie fonctionnelle directe qui enregistrent directement l’activité électrique neuronale (p.ex. EEG et MEG). Ceci a pour désavantage de limiter la
résolution temporelle de l’IRMf, c’est-à-dire sa capacité à étudier précisément
le décours temporel de l’activité cérébrale ou à distinguer l’activité relative à
des évènements présentés en succession rapide. En effet, plusieurs étapes physiologiques sont nécessaires avant que l’activité cérébrale ne se traduise en activité métabolique. La réponse hémodynamique débute habituellement près d’une
seconde après l’évènement qui la déclenche et atteint son maximum de 4 à 8
secondes plus tard (Matthews, 2002). Il est donc difficile, voire impossible,
d’utiliser l’IRMf pour étudier la réponse du cerveau immédiatement après la
présentation du stimulus ou l’initiation de la tâche. Certaines techniques de présentation et d’analyse permettent toutefois de pallier partiellement ce désavantage (Burock, Buckner, Woldorff, Rosen, et Dale, 1998). La résolution temporelle de l’IRMf est donc de l’ordre de la seconde (Matthews, 2002).
Cette latence de la réponse hémodynamique présente par contre certains
avantages pour l’étude du langage ou de l’audition. En effet, des considérations
importantes doivent être prises en compte lors de l’utilisation de l’IRMf pour
l’étude du langage. L’appareil d’IRM est bruyant (variant de ~80 à 120 dB selon
l’appareil et les paramètres d’acquisition utilisés) et l’acquisition est très sensible aux mouvements du participant. En effet, un mouvement de quelques millimètres de la tête lors de l’acquisition peut rendre les données difficiles à analyser et à interpréter. Ainsi, l’étude du langage dans un tel environnement
13
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nécessite l’utilisation de différents moyens visant à minimiser l’impact du bruit
de l’appareil et des mouvements d’articulations sur les résultats obtenus. Une
des méthodes de choix pour l’étude de la compréhension et de la production du
langage est celle de l’échantillonnage sporadique (sparse sampling ; Hall et al.,
1999 ; Eden, Joseph, Brown, Brown, et Zeffiro,1999). Cette méthode consiste à
cesser l’acquisition d’images alors que le participant écoute des sons ou parle, et
d’ensuite lancer l’acquisition immédiatement après la tâche. Comme la réponse
hémodynamique présente une latence d’environ une seconde et qu’elle atteint
son maximum de 4-8 secondes après son initiation, il est possible de mesurer la
réponse même si l’appareil n’est pas actif au moment de l’écoute ou de la production de paroles. La validité de cette technique pour l’étude du langage a été
établie, et ce, même pour des tâches exigeant des mouvements orofaciaux
importants (Gracco, Tremblay, et Pike, 2005).
Analyse des données d’IRMf
Puisque la densité des neurones et la vascularisation dans les différentes
régions du cerveau varient, il est nécessaire de prendre des précautions lorsque
l’on désire comparer l’activité de deux régions avec l’IRMf. En effet, il est
nécessaire de s’assurer que la différence d’activité hémodynamique entre ces
deux régions n’est pas due à une différence de vascularisation, soit en comparant des régions similaires (p.ex. une région de l’hémisphère droit par rapport à
la région analogue dans l’hémisphère gauche) ou en tenant compte de cette différence lors des analyses. L’IRMf est toutefois plus souvent utilisée afin de
comparer l’activité d’une région donnée lors de deux ou plusieurs conditions,
états, ou entre différents participants (Donaldson et Bucknar, 2002). Lorsque
l’IRMf est utilisée pour étudier le langage et la cognition, une approche par
soustraction des processus est généralement adoptée. En effet, l’activité cérébrale lors d’une tâche donnée est associée à de nombreux processus cognitifs,
sensoriels et moteurs. Par exemple, une simple conversation implique l’activation de régions impliquées dans la planification, l’activité motrice associée à
l’articulation, la récupération des représentations en mémoire sémantique, la
mémoire de travail, l’audition, etc. Ainsi, lorsqu’on désire étudier l’activité liée
à un processus particulier, il importe de l’isoler le plus possible en conceptualisant une tâche contrôle permettant de soustraire l’activité liée aux processus non
étudiés. Par exemple, pour étudier la perception de la parole, on peut enregistrer
l’activité cérébrale lors de l’écoute de paroles et y soustraire l’activité cérébrale
lors de l’écoute de paroles présentées de façon inversée (« reversed speech ») et
donc sans signification (p. ex. Binder et al., 2000). Ainsi, il est postulé que l’activité cérébrale reliée à des processus non spécifiques à la compréhension du
langage, comme la stimulation auditive, sera éliminée puisqu’elle est présente à
14
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la fois dans la condition d’intérêt et dans la condition contrôle. De nombreuses
études d’IRMf utilisant la soustraction des processus se sont intéressées à la
production et à la compréhension du langage chez des individus sains ou présentant diverses pathologies. Par exemple, Giraud et collaborateurs (2008) ont
étudié l’activation cérébrale chez des enfants présentant un bégaiement lors de
la lecture à haute voix à laquelle était soustraite une condition contrôle de lecture silencieuse de signes sans signification. Suite à cette soustraction, l’activité
des régions indiquant une activité significativement différente lors de la lecture
à voix haute par rapport à la lecture silencieuse a été corrélée avec un index de
la sévérité du bégaiement (défini comme le pourcentage de syllabes bégayées
dans quatre contextes de conversation différents). Les auteurs ont observé une
corrélation significative entre l’activité des noyaux moteurs sous-corticaux
(noyau caudé et substance noire) impliqués dans le contrôle du mouvement
volontaire et la sévérité du bégaiement. De plus, ils ont par la suite effectué une
intervention en orthophonie auprès de ces mêmes participants nommée Kassel
Stuttering Therapy, une version informatisée de la thérapie par formation de la
fluidité (Webster, 1974). Cette intervention intensive et multidimensionnelle de
trois semaines utilise une tâche informatisée au cours de laquelle les participants
doivent, entre autres, prononcer des mots à des rythmes d’abord lents, puis de
plus en plus rapides, tout en recevant une rétroaction (Euler et von Gudenberg,
2002). La mesure de l’activité cérébrale fonctionnelle à la suite de cette intervention montre que l’activité des noyaux gris centraux lors de la lecture à voix
haute ne corrèle plus significativement avec la sévérité du bégaiement mesurée
avant la thérapie. Ainsi, la diminution des symptômes de bégaiement permise
par la thérapie est accompagnée d’un changement de l’activité dans les régions
initialement identifiées comme problématiques. Les chercheurs interprètent ce
résultat comme une démonstration que la thérapie permet de réguler l’activité
cérébrale problématique dans le réseau de production de la parole plutôt que de
mener à l’utilisation de mécanismes compensateurs.
Parallèlement à l’approche par soustraction des processus, il est également possible d’utiliser une approche paramétrique. L’approche paramétrique
est basée sur l’idée que les processus cognitifs impliqués dans une tâche donnée
sont plus ou moins utilisés en fonction des caractéristiques de la tâche. Ainsi, il
est possible de concevoir différentes conditions expérimentales qui recrutent de
façon plus ou moins prononcée les processus étudiés. Tagamets, Novick, Chalmers et Friedman (2000) ont utilisé une approche paramétrique pour étudier le
traitement orthographique des mots lus. Au cours d’une expérience en IRMf, ils
ont manipulé, de façon paramétrique, la familiarité orthographique de mots lus
en utilisant quatre niveaux, soit des mots, des pseudomots, des séries de lettres
15
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et des séries de fausses lettres. Ainsi, ils ont pu conclure que ces variations dans
la familiarité orthographique étaient liées à une activité plus ou moins intense
dans les régions associées au traitement sémantique et/ou phonologique qui était
effectué à chacun de ces niveaux.
L’approche paramétrique et l’approche par soustraction des processus
permettent d’identifier les régions qui sont plus ou moins actives lors d’une
condition donnée en comparaison à une condition contrôle et sont utiles pour
répondre à certaines questions de recherche. Par contre, ces approches dites
« localisationistes » sont parfois critiquées puisqu’elles peuvent facilement
mener à tort à réduire un processus cognitif ou langagier complexe à l’activité
d’une seule région cérébrale (Uttal, 2001 ; Poldrack, 2010). Comme les structures cérébrales sont hautement interconnectées, l’activité cérébrale ne peut être
réduite à l’activité d’une seule région, particulièrement lors d’une tâche complexe comme la parole ou la compréhension du langage. Elle découle plutôt de
l’activité synchronisée et interactive de plusieurs régions. Certaines techniques
d’analyse en IRMf permettent d’étudier cette interaction entre les régions.
Parmi celles-ci, l’analyse de la connectivité fonctionnelle (Friston, 1994) permet
d’étudier la corrélation temporelle entre l’activité de deux ou plusieurs régions
lors d’une tâche donnée. Par exemple, si l’activité d’une région A augmente toujours lors de l’augmentation de l’activité d’une région B, on pourra affirmer que
ces deux régions présentent une forte connectivité fonctionnelle. La connectivité
fonctionnelle se distingue toutefois de la connectivité anatomique, qui concerne
le nombre de fibres nerveuses qui relie deux régions et qui est mesurée à l’aide
de l’IDT. Ainsi, il est possible que les régions A et B présentent une haute
connectivité anatomique en plus d’une haute connectivité fonctionnelle, mais il
est également possible qu’elles présentent une faible connectivité anatomique et
que leur connectivité fonctionnelle soit plutôt due à l’activité d’une troisième
région médiatrice liant ces deux régions.
Sonty, Mesulam, Weintraub, Johnson, Parrish et Gitelman (2007) ont étudié la connectivité fonctionnelle entre le gyrus frontal inférieur postérieur et le
cortex supratemporal postérieur, deux régions importantes pour la production et
la compréhension du langage. Pour ce faire, ils ont comparé un groupe de
patients atteints d’aphasie progressive primaire à un groupe contrôle lors d’une
tâche d’appariement sémantique ou visuel. La tâche d’appariement sémantique
représentait la condition active dans laquelle les participants devaient indiquer,
pour chaque paire de mots qui leur était présentée, si les mots étaient des synonymes ou non. La tâche d’appariement visuel constituait la condition contrôle
lors de laquelle les participants devaient indiquer si deux groupes de consonnes
sans signification de la même longueur que les mots dans la tâche sémantique
16
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étaient identiques ou non. Un contraste entre ces deux tâches a permis aux chercheurs d’isoler les régions impliquées dans la compréhension de mots chez les
patients et les participants contrôles. Ensuite une analyse de connectivité a été
effectuée, c’est-à-dire que les chercheurs ont mesuré à quel point l’activité dans
chacune de ces régions était reliée à celle des autres régions dans le temps. Les
chercheurs ont observé une connectivité réduite entre les deux régions chez le
groupe de patients spécifiquement lors de la tâche sémantique. De plus, la diminution de la connectivité était liée à une moins bonne performance à la tâche
sémantique. Ces résultats ont amené les auteurs à conclure que les changements
dans l’interaction entre deux régions, plutôt que l’hypoactivité d’une région spécifique, pourraient contribuer à l’apparition des déficits observés dans l’aphasie
primaire progressive.
Enregistrement des signaux physiologiques
Afin de raffiner les analyses d’IRMf, il est possible de mesurer d’autres
signaux physiologiques comme le rythme cardiaque et la respiration. En effet,
puisque des changements subtils dans le niveau d’oxygénation sanguin sont
observés en IRMf lors de changements dans le rythme cardiaque ou le rythme et
la profondeur de la respiration, la mesure de ces signaux permet de retirer la
variance de l’activité hémodynamique associée à ceux-ci (Birn, Diamond,
Smith, et Bandettini, 2006). Le rythme cardiaque est mesuré en utilisant des
électrodes posées sur la poitrine ou un pléthysmographe placé sur le doigt tandis
que le rythme et la profondeur de la respiration sont mesurés à l’aide d’une
ceinture placée autour de l’abdomen du participant. De plus, la mesure des
signaux physiologiques fournit également des informations très intéressantes sur
l’état du participant. En effet, le rythme cardiaque ainsi qu’un autre signal physiologique nommé conductance galvanique (mesure de la résistance de la peau à
un faible courant électrique diminuée lors d’une plus grande transpiration) sont
des indicateurs de l’activité du système nerveux autonome. Lorsqu’un participant est plus concentré ou qu’il y a un changement dans son état émotionnel, il
y aura habituellement une augmentation de l’activité du système nerveux autonome (p.ex. augmentation du rythme cardiaque, dilatation des pupilles, augmentation de la transpiration) lui permettant de se préparer à l’action. Ces mesures
peuvent donc être très utiles en combinaison avec l’IRMf pour étudier le traitement des aspects émotionnels du langage, comme la prosodie émotionnelle
(Wildgruber, Ackermann, Kreifelts, et Ethofer, 2006).
L’IRMf dans les milieux cliniques
En plus de ses applications en recherche permettant de mieux comprendre
la neuroanatomie fonctionnelle du langage dans les conditions normales et
17
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pathologiques, l’IRMf est de plus en plus utilisée à des fins cliniques. Dans ce
contexte, l’IRMf peut être appliquée en temps réel, c’est-à-dire que les analyses,
comme la soustraction de l’activité lors de la tâche contrôle, sont faites directement pendant l’acquisition. Il est donc possible d’observer directement à l’écran
quelles zones du cerveau sont plus actives lors d’une tâche spécifique pendant
l’examen, avec quelques secondes de délai. Ceci permet, par exemple, d’observer rapidement dans quel hémisphère sont latéralisées les fonctions langagières
chez un patient afin de tenter de les préserver lors d’une neurochirurgie subséquente (Fernandez et al., 2001). L’IRMf pourrait donc remplacer, dans certains
cas, le test hautement invasif à l’amobarbital intracarotidien (test de Wada) qui
est typiquement utilisé pour évaluer cette latéralisation (Bauer, Reitsma, Houweling, Ferrier, et Ramsey, 2013), notamment avant une chirurgie visant à enlever un foyer épileptique dans le cerveau. De plus, l’IRMf en temps réel permet
d’effectuer des thérapies par neurofeedback, au cours desquelles le patient
observe directement le niveau d’activité dans une région de son cerveau associée à la pathologie ou au processus étudié. L’activité de cette région lors de la
séance de neurofeedback est comparée en temps réel à l’activité lors d’une ligne
de base et affichée sous forme graphique à l’écran (p.ex. colonne plus ou moins
haute selon le niveau d’activité) avec quelques secondes de délai. Le participant
observe ce graphique et tente de le modifier (p.ex. augmenter ou diminuer la
taille de la colonne) en utilisant la stratégie thérapeutique demandée. On tente
donc, par l’utilisation de différentes stratégies thérapeutiques, d’amener le
patient à moduler efficacement l’activité dans cette région afin de produire des
gains thérapeutiques (Weiskopf et al., 2004). Par exemple, Rota et collaborateurs (2009) ont entraîné des participants sains à augmenter l’activité de leur
gyrus frontal inférieur afin d’augmenter leur performance lors des tâches linguistiques. Deux groupes de participants étaient entraînés, soit un groupe expérimental recevant une véritable rétroaction sur leur activité cérébrale et un
groupe contrôle recevant à leur insu une fausse rétroaction sur leur activité cérébrale. Deux tâches ont été effectuées avant et après l’entraînement pour chacun
de ces groupes, soit une tâche d’identification de la prosodie émotionnelle et
une tâche de traitement syntaxique. Au cours de la tâche de prosodie émotionnelle, les participants devaient identifier l’émotion présente dans une phrase
prononcée par un acteur parmi quatre émotions possibles (joie, colère, tristesse,
neutre). La tâche de traitement syntaxique consistait en une présentation rapide
de mots formant une phrase grammaticalement correcte ou non. Les participants
devaient indiquer le plus rapidement possible si les mots présentés formaient
une phrase grammaticalement correcte ou non suite à la présentation. Les résultats démontrent chez le groupe expérimental une augmentation de la perfor-
18
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mance pour la tâche de prosodie émotionnelle à la suite de l’entrainement, mais
pas pour la tâche de traitement syntaxique. Aucune amélioration n’a été observée aux deux tâches pour le groupe contrôle. Ainsi, l’IRMf en temps réel semble être une technique efficace pour procéder à l’entraînement des habiletés langagières. Toutefois, même s’il s’agit d’une technique prometteuse, l’IRMf en
temps réel est encore peu utilisée à des fins de neurofeedback thérapeutique
étant donné son coût élevé et l’absence d’études montrant clairement l’efficacité
et la supériorité de ce genre d’interventions chez des patients (Sulzer et al.,
2013).
Spectroscopie par résonance magnétique
La spectroscopie par résonance magnétique (SRM) permet de mesurer in
vivo la composition biochimique du cerveau. Comme l’IRM structurelle, elle
s’intéresse à la résonance des molécules d’hydrogène. Par contre, alors que
l’IRM structurelle s’intéresse à la résonance de l’hydrogène présent dans un
seul type de molécule, soit la molécule d’eau, la SRM s’intéresse à la résonance
de ce proton au sein d’autres molécules présentes dans les tissus cérébraux. En
effet, les protons d’hydrogène ont des fréquences de résonance différentes en
fonction de la molécule à laquelle ils sont liés. Il est donc possible de mesurer la
concentration d’une molécule donnée dans une région précise en recherchant sa
fréquence de résonance dans le spectre obtenu lors de l’IRM (voir Tableau 1).
Puisque la majorité de l’hydrogène dans le cerveau est présent dans les molécules d’eau, il est tout d’abord nécessaire de supprimer la résonance de l’eau en
utilisant une séquence d’impulsions de radiofréquence particulière (van der
Graaf, 2010). La SRM permet ensuite d’obtenir un spectre de résonance
(Tableau 1E) où différents niveaux de résonance sont présents sous forme de
pointes pour chacune des fréquences de résonance.
La fréquence de résonance de la plupart des molécules présentes dans les
tissus cérébraux est connue et il est possible d’identifier quelle molécule est
associée à chacune des pointes de résonance. De plus, plus la concentration de
la molécule associée est importante, plus le niveau de résonance est grand. On
peut ensuite comparer le spectre de résonance pour une ou plusieurs molécules à
un spectre cérébral normal. Les principales molécules identifiées par la SRM
dans les tissus cérébraux sont la N-Acetyl-Apartate (NAA), la choline (Cho) et
les groupes de lipides (LL). La concentration de chacune de ces molécules
donne des informations sur la santé des tissus observés. En effet, la NAA est
une molécule présente dans les neurones et une haute concentration est associée
à la santé neuronale. Certaines études ont, par exemple, montré un lien entre la
concentration de NAA et la performance cognitive (Kozlovskiy, Vartanov, Pya-
19
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sik, et Polikanova, 2012) ainsi que le fonctionnement cognitif après un traumatisme crânien (Babikian et al., 2006). La Cho, quant à elle, est présente dans les
parois des cellules cérébrales et une augmentation de sa concentration suggère
la présence d’une tumeur (Barker, 2014). Finalement, l’augmentation de la
concentration des LL survient lors de la présence d’une maladie ou d’un évènement entraînant la destruction de cellules nerveuses (Poptani et al., 1995). La
SRM peut donc être un outil clinique très utile pour évaluer la présence ou la
progression de différentes neuropathologies (van der Graaf, 2010). Toutefois,
étant donné la durée de l’examen (1-3 minutes par voxel, donc plusieurs heures
pour le cerveau entier), l’acquisition en SRM est souvent limitée à un nombre
réduit de voxels. Par contre, plusieurs groupes de recherche tentent de développer des séquences de SRM permettant de réduire le temps d’acquisition et
d’ainsi acquérir le spectre du cerveau entier dans un temps raisonnable (20 à 30
minutes ; Ding et al., 2014). Ces séquences restent toutefois peu disponibles et
il est donc présentement difficile d’utiliser la SRM pour étudier le cerveau en
entier. Il faut donc généralement limiter l’étude à une région préalablement
choisie (van der Graaf, 2010).
La SRM peut aussi être utilisée pour étudier le fonctionnement cérébral
lors de tâches cognitives ou langagières en s’intéressant à la concentration de
neurotransmetteurs associés à l’activité neuronale excitatrice ou inhibitrice,
comme la glutamine et le GABA. On peut, par exemple, mesurer la concentration du GABA au repos dans une région particulière afin de prédire la performance ou la réponse à une stimulation (Muthukumaraswamy, Edden, Jones,
Swettenham, et Singh, 2009 ; Eden, Muthukumaraswamy, Freeman, et Singh,
2009). Étant donné que cette technique est récente, encore peu d’études ont utilisé la SRM pour étudier le fonctionnement du langage et de la cognition, outre
certaines études comprenant des tâches cognitives simples (p.ex. Michels et al.,
2012).
Avantages et inconvénients de l’IRM par rapport aux autres techniques de neuroimagerie
L’IRM est une technique non invasive et sécuritaire lorsqu’utilisée correctement. Les principaux critères d’exclusion à un examen en IRM sont reliés à la
puissance du champ magnétique, comme la présence d’implants métalliques ou
de stimulateurs cardiaques. De plus, bien que certains appareils ouverts soient
disponibles sur le marché, et que les compagnies qui fabriquent ces appareils se
penchent ardemment sur cette question, la plupart des appareils d’IRM nécessitent l’insertion du patient dans un tube où l’espace est restreint. Cette particularité mène généralement à l’exclusion des participants claustrophobes, obèses ou
20
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de très grande taille. Ainsi, étant donné cet espace restreint, la grande sensibilité
au mouvement et le bruit très puissant de l’appareil, il peut être délicat d’utiliser
l’IRM avec des populations spécifiques, comme certaines populations psychiatriques ou avec les enfants. Des séances de préparation dans des imitations d’appareils en bois reproduisant le bruit et l’espace restreint de l’IRM sont parfois
réalisées avant un véritable examen afin de familiariser les participants avec la
machine sans débourser pour son utilisation.
En ce qui concerne l’imagerie structurelle, l’IRM est souvent comparée à
la tomodensitométrie par rayon X. La tomodensitométrie est généralement
l’examen clinique de première ligne lorsqu’une anomalie cérébrale est suspectée étant donné la grande disponibilité de ces appareils, la rapidité de l’examen
et leur coût moins élevé que l’IRM. L’absence de contre-indications relatives au
métal ou à la claustrophobie permet également d’imager de façon sécuritaire la
plupart des patients et d’étudier la présence de corps étrangers métalliques. La
tomodensitométrie permet aussi d’étudier en détail les structures osseuses
comme le crâne, ce qui est impossible à faire en IRM. Par contre, la tomodensitométrie présente une résolution nettement inférieure à l’IRM pour ce qui est
des autres tissus cérébraux, ce qui la rend moins utile pour identifier des anomalies plus subtiles ou pour étudier l’anatomie dans un contexte de recherche. De
plus, comme elle utilise des rayons X, chaque examen envoie au patient une
dose de radiation ionisante, ce qui en fait une technique invasive. Même si le
niveau de radiation émis par un seul examen de tomodensitométrie est inférieur
au seuil de dangerosité (Comité scientifique sur les effets des radiations atomiques des Nations Unies ; CSERANU, 2000), ce facteur doit être pris en
considération lorsque plusieurs examens sont requis ou lorsque l’examen est
effectué dans un contexte de recherche.
Pour l’imagerie fonctionnelle, l’IRMf est une des meilleures techniques
en ce qui concerne la résolution spatiale, soit la capacité à localiser précisément
l’origine anatomique de l’activité cérébrale (environ quelques mm avec les techniques actuelles ; Ugurbil et al., 2013). Les techniques d’imagerie fonctionnelle
directes comme la M/EEG enregistrent plutôt le signal électrique à la surface du
scalp et celui-ci est influencé par les différents tissus qu’il doit traverser (crâne,
méninges, peau, cheveux, etc.). La localisation de l’origine du signal avec ces
techniques est donc souvent laborieuse et imprécise comparativement à l’IRMf,
particulièrement pour les structures cérébrales profondes. Par contre, l’utilisation du changement du niveau d’oxygène sanguin comme marqueur de l’activité
cérébrale est à la source d’une des principales faiblesses de l’IRMf, soit sa faible résolution temporelle. Ainsi, de plus en plus de devis de recherche visent à
profiter des avantages relatifs à chacune de ces techniques en combinant, par
21
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exemple, l’enregistrement de l’activité EEG à un examen d’IRM, bien que cette
approche comporte d’importants défis techniques (Debener et al., 2006).
L’IRMf est également souvent comparée à la tomographie par émission
de positons (TEP), une autre technique d’imagerie fonctionnelle indirecte basée
sur l’activité métabolique. La TEP a pour principe d’utiliser un traceur radioactif (p.ex. Fluorodésoxylucose) qui se lie à une molécule particulière jouant un
rôle dans l’activité métabolique ou nerveuse du cerveau (p.ex. glucose ou neurotransmetteur). Le traceur émet, sous forme de radiation, des positons qui seront
annihilés lorsqu’ils entreront en collision avec un électron. Cette collision produira des photons captés par l’appareil. La TEP possède une résolution spatiale
similaire à celle de l’IRMf, mais une résolution temporelle inférieure (MeyerLindenberg, 2010). De plus, elle a pour inconvénient de nécessiter l’injection
chez le patient d’une molécule radioactive. Même si elle est sécuritaire et que la
radiation reçue par le patient est inférieure au seuil de dangerosité, l’injection
d’un traceur radioactif fait de la TEP une technique invasive. Aussi, comme les
molécules radioactives ont une demi-vie limitée (p.ex. 110 minutes dans le cas
du F18), le transport et le stockage de celles-ci peuvent être complexes, particulièrement si l’appareil est situé loin du cyclotron nécessaire pour les produire.
Toutefois, en utilisant des molécules radioactives qui vont se lier à des molécules cérébrales d’intérêt, la TEP rend possible l’imagerie de certaines composantes difficiles à imager précisément en IRM, comme les plaques amyloïdes
associées à la maladie d’Alzheimer (Johnson et al., 2013).
♦ Neurostimulation
Depuis quelques décennies, de nouvelles techniques permettant d’influencer directement le fonctionnement cérébral de façon sécuritaire et non
invasive ont été développées et perfectionnées. Ces techniques dites de neurostimulation sont de plus en plus utilisées pour des applications cliniques et pour la
recherche sur les processus cérébraux puisque, bien qu’elles ne soient pas à proprement parler des techniques de neuroimagerie, elles permettent de moduler
directement l’activité cérébrale et ainsi découvrir des liens entre les régions stimulées, les processus cognitifs et le comportement. De plus, cette manipulation
de l’activité cérébrale a comme avantage substantiel de permettre d’établir des
hypothèses causales sur l’association entre un processus cognitif et une région
cérébrale (p. ex. l’activité de la région cérébrale A est nécessaire au processus
cognitif B), contrairement aux techniques décrites précédemment qui utilisent
habituellement des hypothèses de recherche corrélationnelles (p. ex. l’activité de
la région cérébrale A est associée au processus cognitif B). La possibilité d’in-
22
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fluencer directement l’activité cérébrale de façon sécuritaire (Nitsche et al.,
2008 ; Rossi, Hallett, Rossini & Pascual-Leone, 2009) permet aussi d’utiliser la
neurostimulation à des fins thérapeutiques. Deux techniques de neurostimulation sont plus couramment utilisées, soit la stimulation magnétique transcrânienne (SMT) et la stimulation transcrânienne à courant continu (STCC).
Stimulation magnétique transcrânienne
Comme son nom l’indique, la SMT est effectuée grâce à un appareil permettant d’envoyer des impulsions électromagnétiques à travers les tissus afin
d’influencer le fonctionnement neuronal. L’appareil de SMT est constitué d’une
bobine de fil recouverte d’une gaine de plastique que l’on pose sur la tête du
participant et qui permet de transformer le courant dans le fil électrique en
impulsion électromagnétique focale, perpendiculaire à la bobine. Ce champ
magnétique traverse les différents tissus de la tête et lorsque de courtes impulsions (environ 100 microsecondes) atteignent le cerveau, elles pénètrent la
membrane des neurones dans une région ciblée créant un potentiel d’action ou
un potentiel postsynaptique (Terao & Ugawa, 2002) qui aura comme conséquence d’activer ou d’inhiber cette région. Cette impulsion est relativement précise et permet, par exemple, de faire bouger un muscle particulier de la main en
stimulant la partie correspondante du cortex moteur. Afin d’augmenter la précision de la stimulation, on peut guider la position de la bobine sur la tête afin de
se positionner au-dessus de la région cérébrale voulue en utilisant un système de
neuronavigation qui aide à positionner la bobine en fonction d’une image de
l’IRM structurelle du participant préalablement obtenue.
Cette impulsion peut être utilisée pour étudier l’implication du système
sensorimoteur dans différents contextes. Par exemple, Fadiga et collaborateurs
(2002) ont utilisé la STM pour stimuler la région du cortex moteur associée à la
langue tout en mesurant l’activité motrice de la langue. Ils ont observé que lors
de l’écoute de mots, l’activité motrice de la langue provoquée par la stimulation
était plus grande que lors de l’écoute de pseudo-mots. Cette étude suggère donc
que le système moteur pourrait jouer un rôle dans la perception du langage.
Dans le domaine du langage et de la cognition, la STM est souvent utilisée de façon répétitive (STMr), c’est-à-dire que plusieurs impulsions sont
envoyées en chaine afin de modifier l’activité d’une région cérébrale pendant
toute la durée de la stimulation. Lorsque les impulsions sont envoyées à haute
fréquence (> 5 Hz) elles provoquent généralement une excitation de la zone stimulée, tandis que les chaines d’impulsions à basse fréquence (≤ 1 Hz) mènent
généralement à une inhibition de la zone stimulée (Pascual-Leone, Vallis-Solé,
Wassermann & Hallett, 1994 ; Chen et al., 1997).
23
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L’inhibition soutenue provoquée par la stimulation à basse fréquence est
souvent nommée « lésion virtuelle » puisqu’elle diminue significativement la
possibilité que la région stimulée contribue au fonctionnement cognitif. Par
exemple, afin d’étudier la contribution du lobe temporal antérieur au traitement
des aspects sémantiques du langage, Holland et Lambon Ralph (2010), ont
demandé à des participants de générer les formes passées de verbes anglais
réguliers ou irréguliers avant et après avoir reçu une STMr à basse fréquence sur
cette région. Après avoir reçu la stimulation, les participants étaient plus lents et
effectuaient plus d’erreurs pour la génération des formes passées des verbes
irréguliers par rapport à leur performance avant la stimulation tandis qu’ils
étaient plus rapides pour la génération de verbes réguliers. Ces résultats suggèrent que le temporal antérieur est important pour récupérer et sélectionner les
représentations sémantiques des verbes irréguliers. Cette technique peut aussi
être utilisée à des fins thérapeutiques. En se basant sur plusieurs résultats suggérant que l’aphasie après un accident vasculaire cérébral est associée à une
hyperactivation du gyrus frontal inférieur droit et à une hypoactivation du gyrus
frontal inférieur gauche, Khedr et collaborateurs ont développé une intervention
utilisant simultanément deux systèmes de STM afin d’inhiber et d’exciter respectivement ces régions (Khedr et al., 2014). Ils ont combiné ces stimulations à
un programme spécifique d’entraînement du langage utilisant plusieurs soustests de la batterie Boston Diagnostic Aphasia Examination (Goodglass &
Kaplan, 1983). Leurs résultats démontrent que les patients ayant reçu de véritables stimulations combinées à l’intervention en orthophonie montrent davantage
d’amélioration que les patients ayant reçu des stimulations placébos (son de
l’appareil sans stimulation réelle) et l’intervention en orthophonie. La STMr est
donc un outil prometteur pour le traitement des troubles du langage qui est probablement appelé à être de plus en plus utilisé dans les milieux cliniques (voir
Murdoch & Barwood, 2013).
Stimulation transcrânienne à courant continu
Alors que la SMT envoie une très courte impulsion électromagnétique, la
stimulation transcrânienne à courant continu (STCC) envoie un très faible courant électrique (1-2 microampères) dans le cerveau pour des durées plus longues
(10-30 minutes). Ainsi, cette technique ne permet pas de créer des potentiels
d’actions neuronaux ou postsynaptiques, mais permet plutôt de modifier les propriétés membranaires des neurones d’une région et d’ainsi les rendre plus
faciles ou difficiles à exciter lors d’une tâche effectuée pendant ou après la stimulation. En effet, une stimulation en STCC de 9 à 13 minutes sur le cortex
moteur permet d’observer une augmentation de l’excitabilité de cette région
jusqu’à 90 minutes poststimulation (Nitsche & Paulus, 2001).
24
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Le fonctionnement de la STCC est simple : deux électrodes de polarité
contraire (anode et cathode) sont posées sur le crâne. Une des électrodes est
posée sur la région cible tandis que l’autre est posée sur une région de référence.
Ensuite, le courant est envoyé et traverse le cerveau de façon à voyager d’une
électrode à l’autre. Si on désire augmenter l’excitabilité de la région cible, on y
pose l’anode tandis que la cathode est posée sur la région de référence, mais si
on désire diminuer cette excitabilité, on pose la cathode sur la région cible et
l’anode sur la région de référence. Les appareils de tDCS présentement disponibles ont une faible résolution spatiale, c’est-à-dire que les électrodes ont des
dimensions de plusieurs centimètres carrés et qu’il est donc difficile de stimuler
une région de façon focale et précise. Toutefois, de nouveaux systèmes permettant une stimulation plus précise (STCC à haute définition) sont de plus en plus
utilisés (p. ex. Richardson, Datta, Dmochowski, Parra & Fridriksson, 2014).
Néanmoins, cette simplicité de fonctionnement, le coût relativement peu
élevé de l’appareil ainsi que la possibilité de modifier à long terme le fonctionnement cérébral ont entrainé un grand intérêt pour la STCC dans l’étude et le
traitement du fonctionnement langagier. Par exemple, Sparing et collaborateurs
(2008) ont observé une augmentation de la performance lors de la dénomination
d’images chez des participants sains suite à une stimulation excitatrice de 7
minutes du cortex périsylvien postérieur. Aussi, de façon similaire à la STMr,
quelques études suggèrent l’efficacité de la STCC pour traiter les déficits langagiers causés par un accident vasculaire cérébral, bien que davantage d’études
avec de plus grands échantillons soient nécessaires pour démontrer clairement
son efficacité (Kugler, Pohl & Mehrholz, 2013).
Bien que de plus en plus accessibles et prometteuses, ces techniques de
neurostimulation nécessitent quand même une expertise approfondie en neuroscience et des groupes d’experts se penchent périodiquement pour émettre des
recommandations quant aux paramètres considérés comme étant sécuritaires
pour différentes utilisations de ces techniques (Nitsche et al., 2008 ; Rossi et al.,
2009).
♦ Conclusion
En somme, de nombreuses techniques de neuroimagerie sont disponibles
pour étudier le langage dans ses aspects normaux et pathologiques. Certaines de
ces techniques peuvent également contribuer au diagnostic de pathologies
reliées au langage ou à la cognition, en plus d’évaluer et de guider les interventions cliniques. L’IRM permet de documenter les aspects structurels, fonctionnels et biochimiques du cerveau. Son caractère non invasif et sa grande résolu-
25
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tion spatiale en font un appareil de choix comparativement aux autres techniques disponibles pour l’étude du langage. Elle présente toutefois certaines
limites, comme une faible résolution temporelle, qui doivent être prises en
compte lorsqu’elle est utilisée en recherche ou en clinique.
Le présent article a survolé de façon sommaire et vulgarisée les différentes techniques de neuroimagerie pouvant être effectuées en IRM et les techniques d’analyse associées à chacune d’elles pour l’étude du langage. Il importe
toutefois de souligner que chacune de ces techniques nécessite de nombreuses
étapes de planification, d’acquisition et de traitement des données qui n’ont pas
été discutées et qui sont complexes et laborieuses. Ainsi, malgré l’augmentation
de la disponibilité des appareils de neuroimagerie, une connaissance approfondie de la technique utilisée demeure nécessaire pour effectuer des travaux de
recherche ou cliniques de qualité. L’avenir de la neuroimagerie pour l’étude du
langage réside donc certainement dans une approche multidisciplinaire où
orthophonistes, neuroscientifiques, informaticiens, mathématiciens et physiciens
combinent leurs compétences et leur expertise afin d’optimiser l’utilisation de
ces nouvelles technologies pour l’étude et le traitement des troubles du langage.
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Figures et tableau
Tableau 1. Illustration des différentes techniques d’imagerie discutées ainsi qu’un résumé de leur
fonctionnement et applications. (A) Imagerie par résonance magnétique anatomique, (B) Tractographie par résonance magnétique (image : Gigandet et al., 2008 ), (C) Angiographie par réso-
30
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nance magnétique (image : Samuel R. Barnes, image publique, 2009), (D) Imagerie par résonance
magnétique fonctionnelle (image des auteurs), (E) Spectroscopie par résonance magnétique
(image des auteurs).
Figure 1. Illustration d’une image obtenue avec l’IRM structurelle ainsi que de la segmentation des différents types de tissus cérébraux. Le cerveau moyen de l’Institut Neurologique de Montréal a été utilisé.
31
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Figure 2. Représentation schématique du fonctionnement de l’IRM. (A) À l’état naturel,
les protons d’hydrogènes présents dans le cerveau sont alignés dans des directions aléatoires. (B) Dans l’appareil d’IRM, des protons s’alignent au puissant champ magnétique
de la machine. (C) Une impulsion de radiofréquence est appliquée perpendiculairement
au champ magnétique et cause un changement temporaire de l’orientation de certains
protons. (D) Lorsque l’impulsion de radiofréquence cesse, les protons se réaligneront au
champ magnétique et émettront à ce moment de l’énergie, ce qui cause un signal de
radiofréquence mesurable qui sera capté par l’appareil. Le temps nécessaire pour que ce
réalignement soit effectué dépend du type de tissu.
32
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La nature sensorimotrice de la parole
Krystyna Grabski, Marc Sato
Résumé
Les premières étapes d’acquisition de la parole sont traditionnellement considérées comme
dépendantes d’une co-structuration des représentations motrices et sensorielles - auditives,
visuelles et somatosensorielles - des unités de parole. A partir des premières capacités
motrices et de discrimination acoustique, la maturation du système phonologique de l'enfant
découlerait de l’imprégnation linguistique ambiante et d’une spécification progressive et
conjointe des actes moteurs et des cibles sensorielles pertinentes. Chez l'adulte, de nombreux modèles psycholinguistiques et neurobiologiques de la perception et/ou de la production de la parole appuient également l’idée d’un couplage fonctionnel entre systèmes sensoriels et moteur et ont pour point commun l’importance attribuée aux interactions
sensorimotrices. Dans ces modèles, la production de parole impliquerait la mise en œuvre
de mécanismes de contrôle moteur en ligne permettant d’évaluer les conséquences sensorielles prédites des actions planifiées en les comparant avec les retours sensoriels effectifs
et, de là, de corriger et réguler si nécessaire la réalisation des unités produites. Lors de la
perception de la parole, des mécanismes inférentiels de simulation motrice permettraient de
déterminer, ou tout du moins de contraindre, l’interprétation phonétique des entrées sensorielles. En regard de ces modèles, l’étude conjointe et systématique des systèmes de perception et de production de la parole et des liens perceptivo-moteurs pourrait permettre de
mieux comprendre le langage commun de la perception et de l’action dans la communication parlée. À terme, une meilleure compréhension de ce couplage fonctionnel entre systèmes sensoriels et moteur pourrait permettre d’envisager de nouvelles approches thérapeutiques prenant avantage de ces interactions perceptivo-motrices dans la réadaptation
des troubles perceptifs et moteurs de la parole.
Mots clés : perception de la parole, production de la parole, interactions sensorimotrices.
Rééducation Orthophonique - N° 260 - décembre 2014
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The sensorimotor nature of speech
Abstract
The first steps of speech acquisition are traditionally considered as dependent of a co-structuration of motor and sensory (auditory, visual and somatosensory) representations of
speech units.
Based upon the earliest motor and acoustic discrimation abilities, the maturation of the phonological system of the infant would result from ambient language impregnation and from
progressive and common specification of motor acts and the relevant sensory goals. In
adults, numerous psycholinguistic and neurobiological models of speech perception and/or
production support the idea of a functional coupling of sensory and motor systems and
share the importance of sensorimotor interactions. In these models, speech production
involves the implementation of online motor control mechanisms permitting an evaluation of
the predicted sensory consequences, and, if necessary, correct and regulate the execution of
the produced speech units. In speech perception, inferential motor simulation mechanisms
permit to determine, or at least to constrain, the phonetic interpretation of sensory inputs. In
light of these models, a joint and systematic investigation of speech perception and production systems and of perceptuo-motor links could lead to a better understanding of the common language of perception and action in spoken communication.
Eventually, a better understanding of this functional coupling of sensory and motor systems
could help to consider new therapeutic approaches taking advantageof the perceptuo-motor
interactions in the rehabilitation of perception and motor speech disorders.
Key Words : speech perception, speech production, sensorimotor interactions.
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Krystyna GRABSKI 1
Marc SATO 2
1 Montreal Neurological Institute
McGill University
International Laboratory for Brain
Music and Sound Research (BRAMS)
and Centre for Research on Brain
Language and Music (CRBLM)
Montreal, Canada
2 Laboratoire Parole & Langage et Brain
and Language Research Institute
CNRS & Aix-Marseille Université
Aix-en-Provence, France
Correspondance :
Krystyna Grabski, Ph.D.
Cognitive Neuroscience Unit, Montreal
Neurological Institute, McGill University
3801 Rue University, Montréal, Québec
H3A 2B4, Canada
Courriel : [email protected]
♦ La perception de la parole sous l’angle des interactions sensorimotrices
C
omment parvient-on à traiter le signal de parole pour extraire les invariants phonologiques et décoder l’information linguistique ? Bien que la
perception de la parole soit en premier lieu associée à des processus de
traitement et de décodage purement auditif, des théories et modèles neurobiologiques proposent que l'interprétation phonétique des informations issues du
signal de parole dépende également des connaissances procédurales articulatoires de l’auditeur. Cette première section a pour but une brève présentation de
ces différentes approches théoriques et sera suivie d’une description des bases
neurales de la perception de la parole et des modèles neurobiologiques récents
postulant l’existence de mécanismes sensorimoteurs mis en œuvre dans la compréhension des signaux de parole.
♦ Approches auditives, théories motrices et sensorimotrices
Un problème fondamental et ancien en parole concerne la difficulté à
décrire de manière simple les relations existantes entre sons et phonèmes. Du
fait de la grande variabilité du signal acoustique de parole, les processus de
décodage acoustico-phonétique à partir des propriétés et informations issues du
signal acoustique restent en effet à ce jour encore largement incompris. Cette
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variabilité du signal acoustique de parole provient de nombreuses causes, parfois sous-jacentes et imbriquées. En premier lieu, la variabilité provient évidemment des différences anatomiques et de stratégies articulatoires entre locuteurs
(chaque conduit vocal est unique et les stratégies articulatoires liées à la réalisation d’un énoncé linguistique diffèrent parfois grandement). De plus, pour un
même locuteur, la production de tout message linguistique implique des mécanismes de co-articulation entre phonèmes produits, soit une combinaison de
gestes articulatoires à débit temporel élevé et largement parallélisé. Si ces mécanismes de co-articulation permettent de minimiser l'effort articulatoire produit
par le locuteur, cette combinaison de gestes articulatoires est transformée de
manière fortement non linéaire en une séquence de sons dans laquelle la correspondance entre sons et gestes est dès lors peu transparente pour l’auditeur … et
pour le chercheur. Cette variabilité inhérente du signal acoustique de parole et
les relations complexes existant entre sons et phonèmes ont entraîné ces cinquantes dernières années de nombreux débats quant à la nature auditive et/ou
motrice des processus mis en œuvre dans le décodage des informations phonétiques à partir des entrées sensorielles.
Pour les tenants des approches générales auditives (voir par exemple,
Diehl et Kluender, 1989 ; Massaro, 1998 ; Kuhl, 2000 ; Diehl, Lotto et Holt,
2004), l'objet de la perception de la parole serait de nature purement auditive.
Les invariants phonémiques seraient récupérés et directement accessibles dans
le signal acoustique et traités uniquement par le système auditif, les processus
de décodage acoustico-phonétique ne faisant donc pas appel à des mécanismes
moteurs articulatoires, ni inférentiels, ni directs. De plus, ces mécanismes de
décodage acoustico-phonétique reposeraient sur des mécanismes auditifs et
d’apprentissage perceptifs non propres aux seuls sons de parole mais liés à des
prédispositions et capacités perceptives plus générales (pour une revue, voir
Diehl, Lotto et Holt, 2004).
A l’opposé des approches générales auditives, la théorie motrice de la
perception de la parole (Liberman et al., 1962, 1967 ; Liberman et Mattingly,
1985 ; Liberman et Whalen, 2000) suppose que les informations issues du signal
de parole sont mises en correspondance avec les représentations motrices des
gestes articulatoires à l’origine du signal acoustique perçu (en termes de commandes neuromotrices globales plus qu’en termes de gestes articulatoires précis,
permettant de minimiser partiellement les problèmes de variabilité articulatoire).
En d’autres termes, face à la non-linéarité entre propriétés acoustiques du signal
de parole et représentations phonétiques sous-jacentes, Liberman et collègues
proposent de considérer les invariants non pas en termes acoustiques mais en
termes moteurs. Leur hypothèse est donc que la perception de la parole repose
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sur un appariement des représentations phonétiques et des commandes motrices
neuronales et sur une récupération des gestes articulatoires du locuteur par l’auditeur. La communication est ainsi rendue possible (1) grâce à un mécanisme de
parité des représentations phonétiques et motrices invariantes entre locuteur et
auditeur (pour reprendre les termes de Liberman et Whalen, 2000 : "Ce qui
compte pour le locuteur doit compter pour l’auditeur"), (2) permettant que les
mêmes représentations (de nature motrice dans cette théorie) soient utilisées
aussi bien en production qu'en perception de la parole.
En désaccord sur le caractère spécifique de la parole et sur la nature intrinsèque de l'objet perceptif, la théorie directe réaliste de la perception de la
parole (Fowler 1986, 1996) propose que les processus à la base de la perception
des sons de parole et des sons non langagiers reposent sur les mêmes mécanismes perceptifs généraux, également liés à d'autres modalités sensorielles
comme la vue ou le toucher. Pour Fowler, la perception de la parole ne repose
donc pas sur un module spécifique mais sur des prédispositions et mécanismes
perceptifs plus généraux, et consiste en la reconnaissance directe de la nature de
la source de la perturbation ressentie/perçue dans l’environnement (par exemple,
la lumière pour la vision, la peau pour le toucher et l'air pour l'audition). En d’autres termes, dans cette théorie, ce sont les gestes articulatoires d’un locuteur lors
de la réalisation d’un message linguistique qui structurent le signal acoustique,
cette information étant supposée contenue dans le signal acoustique et directement perceptible par l’auditeur sans recours à des mécanismes inférentiels.
Enfin, face aux approches générales auditives et aux théories motrices, la
théorie de la perception pour le contrôle de l'action (Schwartz et al., 2002,
2012 ; voir Figure 1) propose une position de compromis quant à la nature des
processus mis en œuvre lors de la perception de la parole, processus ni purement auditifs, ni purement moteurs mais bien sensorimoteurs.
Figure 1 : Architecture simplifiée de la perception de la parole selon la théorie de la perception pour le contrôle de l’action (Figure adaptée de Schwartz et al., 2012).
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La théorie de la perception pour le contrôle de l’action est notamment
basée sur différents postulats théoriques. Premièrement, une co-structuration des
systèmes sensoriels et moteurs de la parole est postulée les premières années de
vie, notamment du fait de mécanismes exploratoires, imitatifs et d’apprentissage
sensorimoteur lors des phases de babillage et d'acquisition des premiers mots
chez l'enfant. Cette co-structuration a pour effet la mise en place de cartes sensorimotrices reliant réprésentations sensorielles et motrices de la parole. Deuxièmement, la perception structure l'action. En d’autres termes, le système de perception fournit au système de production des gabarits auditifs, les gestes de parole
sont donc façonnés et sélectionnés dans les systèmes phonologiques en regard de
leurs propriétés perceptives auditives et visuelles. Enfin, l'action met en forme la
perception. Le système perceptif se construit en fonction des contraintes motrices
des gestes orofaciaux. Si ce postulat théorique est principalement lié à la période
d’acquisition de la parole chez l’enfant, même à l'âge adulte la perception peut
impliquer le recours à de telles connaissances procédurales motrices permettant
au locuteur d’extraire, de prédire et d’intégrer les évènements sensoriels perçus
en ligne de manière cohérente.
Bases neurales de la perception de la parole
Le cortex auditif qui reçoit et analyse les informations acoustiques est
structuré hiérarchiquement en aires primaires, secondaires et tertiaires (ou associatives), anatomiquement organisées dans les parties supérieures et moyennes
du lobe temporal. À noter que les connaissances du système auditif cortical
humain sont notamment inférées à partir des études sur les primates non
humains, dont les aires corticales auditives sont organisées de manière concentrique (aires auditives centrales / 'core', à la ceinture / ‘belt’ et régions auditives
entourant la ceinture / 'parabelt’; voir Scott et Johnsrude, 2003). Le premier traitement auditif cortical est effectué au niveau de l'aire auditive centrale (qui correspond à l'aire auditive primaire, située bilatéralement au niveau du gyrus de
Heschl) qui répond préférentiellement aux sons purs. Elle est entourée par une
ceinture d'aires auditives secondaires, qui reçoivent des informations depuis
l'aire primaire et le thalamus auditif, mais effectuent des traitements moins précis en terme tonotopique en favorisant des analyses spectrales des sons plus
complexes. Enfin, les régions auditives associatives effectuent des traitements
de plus haut niveau des stimuli (notamment de décodage acoustico-phonétique)
impliquant des processus d'attention sélective, de mémoire auditive et d'intégration multimodale avec les régions associatives visuelles, somatosensorielles.
Il est largement admis que le signal acoustique de parole est traité par des
voies parallèles spécialisées dans différents niveaux de traitements. Les pre-
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miers traitements acoustiques de bas niveau, non spécifiques aux sons de parole,
auraient ainsi lieu dans les gyri temporaux supérieurs dorsaux bilatéraux
(incluant le gyrus de Heschl et des régions antérieures du planum temporale).
La localisation exacte des régions cérébrales spécialisées dans le décodage
acoustico-phonétique et la catégorisation des phonèmes perçus reste néanmoins
controversée. En effet, certains chercheurs proposent que les signaux acoustiques complexes (non spécifiques à la parole) sont d’abord traités dans la partie
médio-latérale du gyrus/sulcus temporal supérieur et que les représentations
phonétiques des sons de parole seraient instanciées suite à ces traitements dans
sa partie antérieure (Scott et Johnsrude, 2003 ; Rauschecker et Scott, 2009 ;
Rauschecker, 2011). Au contraire, d’autres chercheurs soutiennent que les catégories phonétiques sont instanciées dans la partie postérieure du gyrus temporal
moyen et au sein de la partie adjacente du sillon temporal supérieur (Belin et
Zatorre, 2000 ; Hickok et Poeppel, 2007). Néanmoins, à ce jour, aucune étude
ne permet véritablement d’appuyer ni de contredire l’existence d’une voie auditive antérieure (Scott et Johnsrude, 2003) ou postérieure (Hickok et Poeppel,
2007) impliquée dans les processus de décodage acoustico-phonétique.
D’autre part, une spécialisation hémisphérique quant aux traitements de
la parole et du langage a été mise en évidence (pour une revue, voir Zatorre,
Belin et Penhune, 2002) : l’hémisphère droit semble spécialisé dans le traitement des informations supra-segmentales, notamment prosodiques, et la distinction des hauteurs tonales (pour la perception de la musique par exemple), et
l’hémisphère gauche dans les traitements spectro-temporels précis des stimuli
auditifs et les processus de discrimination phonétique (voir par exemple, Zatorre
et Belin, 2001 ; Zatorre et Gandour, 2008). Poeppel (2003 ; voir également
Giraud et Poeppel, 2012) souligne également que le traitement acoustique de la
parole se fait sur différents niveaux d'échelles temporelles et propose que l'implication différentielle des deux gyri temporaux peut être expliquée par référence aux fenêtres d'intégration temporelle : l'hémisphère droit traiterait les
informations acoustiques au sein de "longues" fenêtres de traitement (entre 150
et 250 ms, soit de l'ordre d'une unité syllabique) alors que l'hémisphère gauche
peut analyser des changements acoustiques survenant entre 20 et 40 ms.
Enfin, bien que l’audition soit considérée comme la modalité sensorielle
principale de la communication parlée, la perception de la parole est par essence
multisensorielle. Dans la plupart des situations naturelles, l’auditeur utiliserait
les informations visuelles afin d’améliorer l’intelligibilité du message linguistique transmis par le locuteur. De nombreuses études de neuroimagerie fonctionnelle démontrent l’existence de régions spécifiques impliquées dans l’intégration des modalités auditive et visuelle. Il a notamment été constaté
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l’activation de la partie postérieure des gyrus et sillon temporaux supérieurs au
sein du cortex auditif associatif, principalement dans l’hémisphère gauche, lors
de la perception de parole aussi bien auditive, visuelle qu’audio-visuelle (Calvert et al., 1997, 2000 ; Callan et al., 2003, 2004 ; Calvert et Campbell, 2003 ;
Skipper et al., 2005, 2007). En accord avec les recherches effectuées sur la
région homologue du cerveau de primates non humains, une parcellisation fonctionnelle de cette région a été démontrée chez l’homme en réponse à des stimuli
auditifs, visuels et tactiles (soit l'existence de sous-régions activées de manière
spécifique par rapport à chacune de ces modalités ; Beauchamps, 2005). De
plus, une augmentation d’activité de la partie postérieure des gyrus et sillon
temporaux supérieurs a été observée lors de la présentation de stimuli audiovisuels cohérents par comparaison à la somme des activités observées lors de la
présentation de stimuli unimodaux auditifs et visuels (réponse supra-additive ;
Calvert et al., 1997, 2000). Inversement, une diminution d’activité a été observée dans le cas de stimuli audio-visuels incongruents (réponse sous-additive ;
Calvert et al., 1997, 2000). Cette modulation des réponses neuronales serait en
partie due à des mécanismes de projection puis de rétropropagation de l’information entre les aires primaires, secondaires et associatives au sein des différentes régions auditives et visuelles (Hertrich et al., 2007). Ainsi, l’implication
de cette région en réponse à des stimuli unimodaux et audio-visuels et les phénomènes de supra- et sous-additivité lors de la perception de parole audiovisuelle laissent à penser qu'elle serait le lieu principal d’intégration des signaux
auditifs et visuels de parole.
Implication du système moteur dans la perception de la parole
Face aux modèles phonétiques et psycholinguistiques de la perception de la
parole présentés précédemment, la plupart des modèles neurobiologiques
actuels s’accordent sinon sur leur rôle précis tout du moins sur l’activation et le
recrutement de structures motrices corticales lors de la perception des unités de
parole. Avant une présentation de ces différents modèles neurobiologiques, nous
présenterons dans cette sous-section différentes études ayant permis d'apporter
des éléments nouveaux en faveur de l'implication du système moteur dans l'observation et la reconnaissance de l'action de manière générale, et de la parole en
particulier.
Ces deux dernières décennies, l’utilisation des nouvelles techniques de
neurophysiologie et d’imagerie et les découvertes sur le cerveau des primates
humains et non humains ont fourni des arguments empiriques importants en
faveur du rôle possible du système moteur dans la reconnaissance des actions.
Dans ce cadre, une découverte fondamentale est celle des neurones miroirs au
sein des cortex prémoteur et pariétal des singes macaques, formant un système
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spécialisé dans l’observation et l’exécution des actions. Les neurones miroir
sont des neurones polymodaux visuo-moteurs ou audio-visuo-moteurs localisés
dans les cortex prémoteur ventral et pariétal (aires F5 et PF/PFG) du singe
macaque et dont les réponses/décharges neuronales interviennent aussi bien
lorsque le singe exécute des actions manuelles ou orofaciales que lorsqu’il perçoit visuellement ou entend des actions similaires exécutées par un autre individu (Di Pellegrino et al., 1992 ; Gallese et al., 1996 ; Rizzolatti et al., 1996 ;
Ferrari et al., 2003 ; Kohler et al., 2002 ; Keysers et al., 2003 ; Fogassi et al.,
2005). L’existence des neurones miroirs suggère ainsi que l’observation d’actions implique partiellement les mêmes circuits neuronaux que ceux utilisés
pour la réalisation de ces actions. Depuis cette découverte, de nombreuses
études en neurophysiologie et neuroimagerie suggèrent l’existence, bien que
controversée, d’un tel système de neurones miroirs chez l’homme (pour des
revues, voir Rizzolatti, Fogassi et Gallese, 2001 ; Rizzolatti et Craighero, 2004 ;
Rizzolatti et Sinigaglia, 2010). En plus de la reconnaissance de l’action, il a été
proposé que le système de neurones miroir chez l’homme jouerait un rôle fondamental dans le traitement de la parole en fournissant un mécanisme neurophysiologique à la base du principe de "parité motrice" entre le locuteur et son
interlocuteur (Rizzolatti et Arbib, 1998 ; Arbib, 2005 ; Gentilucci et Corballis,
2006 ; voir aussi Aboitiz et Garcia, 1997).
Des arguments plus directs en faveur d’un lien entre la perception et la
production de la parole proviennent de l’observation de l’activation des régions
motrices (la partie postérieure, operculaire, du gyrus frontal inférieur, le cortex
prémoteur ventral et le cortex moteur primaire) et des régions proprioceptives
liées aux mouvements orofaciaux (cortex somatosensoriel) lors de tâches de
perception de la parole selon des modalités auditive, visuelle ou audio-visuelle
(par exemple, Nishitani et Hari, 2002 ; Calvert et Campbell, 2003 ; Callan et al.,
2003 ; Paulesu et al., 2003 ; Callan et al., 2004 ; Möttonen et al., 2004 ; Wilson
et al., 2004 ; Ojanen et al., 2005 ; Pekkola et al., 2005 ; Skipper, Nusbaum et
Small, 2005 ; Pulvermüller et al., 2006 ; Wilson et Iacoboni, 2006 ; Skipper et
al., 2007 ; Callan et al., 2010 ; Tremblay et Small, 2011 ; Grabski et al., 2013a).
De manière importante, des études montrent une activité accrue de
régions du système moteur lors de la perception de parole masquée ou bruitée
(Binder et al. 2004 ; Zekveld et al., 2006) par comparaison à des stimuli non
bruités. De plus, d’autres études démontrent une plus forte implication du système moteur lors de l'identification de phonèmes non natifs vs. natifs (Callan et
al., 2004 ; Wilson et Iacoboni, 2006). Enfin, d'autres études ont également montré une augmentation d’activité des régions motrices frontales lors de la perception audio-visuelle de la parole lorsque les deux modalités étaient phonétique-
41
texte 260_Mise en page 18/12/14 15:28 Page42
ment conflictuelles (par exemple, Ojanen et al., 2005 ; Skipper et al., 2007).
Face à ces résultats, le système moteur serait ainsi plus fortement recruté en
condition d’écoute difficile ou en cas d’ambiguïté perceptive, dans le but de permettre une meilleure reconnaissance/interprétation phonétique des sons de
parole perçus.
La technique de stimulation magnétique transcrânienne à impulsion
unique (single pulse TMS) a également permis de mettre en évidence un mécanisme de "résonance motrice", correspondant à une augmentation de l'excitabilité des neurones du cortex moteur primaire reliés aux muscles orofaciaux
labiaux et linguaux lors de la perception de la parole (Sundara, Namasivayam et
Chen, 2001 ; Fadiga et al., 2002 ; Watkins, Strafella et Paus, 2003 ; Watkins et
Paus, 2004 ; Roy et al., 2008 ; Sato et al., 2010). Rappelons que cette technique
non invasive de stimulation d'une région spécifique du cerveau, lorsqu’elle est
appliquée au système moteur à une intensité appropriée, permet l’enregistrement des potentiels évoqués moteurs relatifs à la région motrice stimulée et
ainsi de déterminer avec une précision temporelle importante une possible
modulation d'excitabilité des neurones de cette région en fonction des différentes conditions expérimentales testées. De plus, lorsqu'une série d'impulsions
est délivrée pendant un intervalle de temps donné, cette technique permet de
modifier de manière temporaire l'activité de la région stimulée (on parle alors de
TMS répétitive ou de TMS à double impulsion) et, de là, de déterminer un possible rôle causal de cette région lors des conditions expérimentales par rapport à
une condition de non-stimulation ou à la stimulation d'une région contrôle. Watkins et Paus (2004), en utilisant conjointement les techniques de TMS et de
tomographie par émission de positons (PET) ont montré que cette excitabilité
du cortex moteur primaire labial lors de la perception de la parole était corrélée
avec l’activité du gyrus frontal inférieur postérieur. Enfin, les résultats de certaines études en imagerie magnétique fonctionnelle et par stimulation magnétique transcrânienne à impulsion unique suggèrent également que l’activité au
sein des cortex prémoteur ventral et moteur primaire orofacial serait organisée
de manière somatotopique en relation avec les effecteurs orofaciaux impliqués
dans la production des sons et/ou gestes de parole perçus auditivement et/ou
visuellement (Fadiga et al., 2002 ; Pulvermüller et al., 2006 ; Skipper et al.,
2007 ; Roy et al., 2008 ; Sato et al., 2010).
Si les données de neuroimagerie démontrent clairement le recrutement du
système moteur lors de la perception de la parole, ces résultats sont par nature
corrélationnels et ne permettent pas de démontrer un rôle médiateur, causal, du
système moteur dans la reconnaissance et la compréhension de la parole. En
effet, l'activité observée d'une région ne permet pas de déduire son implication
42
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véritable et son importance dans la réalisation de la tâche expérimentale. A
contrario, certaines études récentes utilisant les techniques de stimulation électrocorticale au cours d’opérations neurochirurgicales chez des patients éveillés,
de TMS répétitive ou de TMS à double impulsion, ont permis de démontrer
qu’une modulation temporaire de l’activité neuronale de ces régions perturbe les
capacités du sujet dans des tâches phonologiques "complexes" nécessitant un
recrutement important de processus de segmentation et de mémoire de travail
verbale (Boatmann, 2004 ; Nixon et al., 2004 ; Romero et al., 2006 ; Sato et al.,
2009). De manière importante, des effets d’interférence lors de tâches plus simples d’identification ou de discrimination de syllabes sont également observés
mais seulement dans le cas de stimuli auditifs ambigus, par exemple présentés
dans du bruit blanc (Meister et al., 2007 ; d’Ausilio et al., 2009 ; Möttonen et
Watkins, 2009 ; d’Ausilio et al., 2011, 2012 ; Grabski et al. 2013b ; voir également Sato et al., 2011). Il est à noter que les modulations de performance observées dans ces études, bien que significatives, restent néanmoins limitées (de
l’ordre de 10%) et que d’autres études TMS ne montrent pas de tels effets d’interférence ou de facilitation dans le cas de stimuli de parole non ambigus (Sato
et al., 2009; d’Ausilio et al., 2011). Pris ensemble, les résultats de ces études
démontrent néanmoins clairement le rôle fonctionnel causal des régions
motrices et prémotrices de l’hémisphère gauche dans la perception de stimuli
ambigus de parole et ce, conformément avec l’organisation somatotopique des
régions du cortex moteur primaire.
♦ Modèles neurobiologiques de la perception de la parole
En accord avec les études démontrant l’activation de régions du système
moteur orofacial lors de la perception de la parole, la plupart des modèles neurobiologiques récents de perception de la parole postulent l’existence d’une
connexion forte entre les systèmes de perception et de production (pour une
revue récente sur les connexions anatomiques entre régions motrices et sensorielles, voir Dick et Tremblay, 2012). Ces modèles ont pour point commun de
supposer que les liens entre ces systèmes dérivent de liens perception-action
observés pour un large ensemble d’actions non linguistiques et, pour certains,
l’existence de mécanismes inférentiels de simulation motrice permettant de
contraindre l’interprétation phonétique des entrées sensorielles (Hickok et Poeppel, 2000, 2004, 2007 ; Scott et Johnsrude, 2003 ; Callan et al., 2004 ; Scott et
Wise, 2004 ; Wilson et Iacoboni, 2006 ; Skipper et al., 2007 ; Rauschecker et
Scott, 2009 ; Rauschecker, 2011 ; Hickok, Houde et Rong, 2011). Nous présenterons dans cette sous-section trois de ces modèles dans lesquels le rôle possible
du système moteur diffère sensiblement d’un modèle à l’autre.
43
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Modèle d'analyse par synthèse de Skipper et collaborateurs (voir Figure 2).
Figure 2 : Modèle d'analyse par synthèse de Skipper et collaborateurs (Figure adaptée
de Skipper et al., 2007).
Dans le modèle d'analyse par synthèse proposé par Skipper et al., (2007),
l'entrée auditive est tout d'abord traitée par le cortex auditif qui élabore des
hypothèses phonémiques. Celles-ci vont être projetées sur le gyrus frontal inférieur et appariées aux buts articulatoires qui peuvent le plus typiquement être à
l'origine de ces hypothétiques phonèmes. Ensuite, le cortex prémoteur ventral,
en passant par le cortex moteur primaire, simule des commandes motrices sousjacentes et de là, émet des copies d'efférence (soit une copie interne des commandes motrices permettant une simulation et une anticipation des conséquences sensorielles de ces commandes). Celles-ci seront finalement renvoyées
au cortex auditif afin de contraindre l'interprétation phonétique de l'hypothèse
phonémique. De manière capitale, les auteurs proposent une implication des
centres moteurs de la parole en fonction de la modalité de présentation et de
l’ambiguïté des entrées sensorielles, et ce d’autant plus que la correspondance
entre information sensorielle et catégories phonétiques est dégradée.
Modèle de double voie ventrale/dorsale de Hickok et Poeppel (2000,
2004, 2007). Inspiré directement du modèle de deux voies ventrale et dorsale en
vision (Milner et Goodale, 1995), le modèle de double voie de la perception
auditive de la parole et du langage d’Hickok et Poeppel (2000, 2004, 2007) postule l'existence de deux voies de traitement, respectivement lexico-sémantique
ventrale et d’intégration sensorimotrice dorsale. Dans ce modèle, les premiers
traitements de décodage du signal perçu consistent en une analyse spectrotemporelle du signal acoustique au sein du cortex auditif primaire et secondaire dans la
partie dorsale moyenne du gyrus temporal supérieur bilatéral. Les traitements
phonologiques et de décodage acoustico-phonétique sont alors mis en œuvre
dans la partie postérieure des sulci temporaux supérieurs. A partir de là, deux
voies de traitement, lexico-sémantique ventrale et d’intégration sensorimotrice
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dorsale, sont postulées. La voie ventrale apparie les informations auditives/phonologiques avec les représentations conceptuelles lexico-sémantiques localisées
au niveau des parties postérieures du gyrus temporal moyen et du sulcus temporal inférieur et des parties antérieures de ces mêmes régions principalement dans
l’hémisphère gauche. La voie dorsale apparie les représentations auditives/phonologiques et articulatoires au niveau des régions prémotrices et frontales inférieures de l’hémisphère gauche, la jonction temporo-pariétale gauche (ou aire
SPT pour sylvian-parietal-temporal) servant d’interface sensorimotrice.
Pour Hickok et Poeppel (2007), la voie dorsale jouerait un rôle critique
dans l’appariement des représentations auditives et motrices lors de l’acquisition
de la parole et du langage. Chez l’adulte cependant, cette voie dorsale n’est pas
considérée comme une composante déterminante de la perception de la parole.
Pour les auteurs, les mécanismes d’intégration sensorimotrice mis en œuvre au
sein de cette voie joueraient un rôle dans des tâches méta-phonologiques "nonécologiques", soit lorsque l’auditeur doit explicitement utiliser des processus
moteurs pour maintenir actives des représentations auditives, par exemple dans
des tâches phonologiques ou de mémoire de travail verbale (pour une revue,
voir Poldrack et al., 1999 ; Démonet, Thierry et Cardebat, 2005 ; Vigneau et al.,
2006). Enfin, un autre rôle de cette boucle sensorimotrice concerne la production de la parole et, plus spécifiquement, des mécanismes de correction et de
régulation articulatoires (Hickok, Houde et Rong, 2011 ; Hickok, 2012).
Modèle à double voie antérieure/postérieure de Scott, Rauschecker et
collègues (2003, 2009, 2011). Basé sur des études liées aux traitements auditifs
et visuels chez le primate non humain, un modèle de double voie de la perception auditive de la parole a également été proposé par Scott, Rauschecker et collègues (Scott et Johnsrude, 2003 ; Scott et Wise, 2004 ; Rauschecker et Scott,
2009 ; Rauschecker, 2011). Ce modèle propose l’existence d’une voie antérieure
(ou voie ‘quoi’/’what’) impliquée dans l’identification des objets auditifs et
dans la compréhension de la parole intelligible, alors qu’une voie postéro-dorsale (ou voie ‘où’/‘where’) serait impliquée dans la localisation des sources
auditives. De plus, comme pour la voie dorsale d’Hickok et Poeppel (2007),
cette voie postéro-dorsale serait également impliquée dans les mécanismes d’intégration entre représentations auditives et motrices notamment lorsque le signal
acoustique est dégradé, lorsque les phonèmes appartiennent à un système phonologique non natif ou lorsque les mots entendus sont rares et peu fréquents.
De manière plus spécifique, la voie antérieure implique, suite à des traitements acoustiques de bas niveau dans le gyrus de Heschl (consistant principalement en un décodage fréquentiel du signal acoustique), des processus de déco-
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dage acoustico-phonétique dans une région antérieure du gyrus supérieur temporal et dans des régions frontales inférieures supposées contenir des représentations invariantes des catégories phonétiques. Ces informations seraient ensuite
envoyées au cortex prémoteur ventral pour être appariées avec les représentations
articulatoires correspondantes. Les conséquences sensorielles de l’exécution
simulée de telles commandes motrices seraient alors envoyées au lobule pariétal
inférieur par le biais de copies d’efférence. En direction inverse, une voie dorsale
impliquerait le lobule pariétal inférieur en tant que région d’intégration sensorimotrice, où des comparaisons entre les copies d’efférence prédictives provenant
du cortex prémoteur ventral et les informations sensorielles réelles auraient lieu
et permettraient une désambiguïsation de l’information phonétique.
♦ La production de la parole sous l’angle des interactions sensorimotrices
Contrairement au rôle possible et débattu du système moteur lors de la
perception de la parole, les interactions entre systèmes sensoriels et moteur sont
largement considérées comme jouant un rôle fondamental en production de la
parole. Ces interactions sont en effet supposées permettre une comparaison des
conséquences sensorielles prédites des actes moteurs de parole et des entrées
sensorielles réelles et ainsi un contrôle en ligne des productions de parole.
Bases neurales de la production de la parole
Du point de vue bio-mécanique et physique, la production de la parole
implique trois systèmes différents travaillant de concert : le système respiratoire,
le larynx avec les cordes vocales et le conduit vocal avec les articulateurs supralaryngés. De manière très simplifiée, tout acte moteur de parole est constitué de
trois étapes. (1) La production d'un souffle pulmonaire par le système sous-glottique (diaphragme et muscles inspirateurs et expirateurs) va expulser de l’air
jusqu’au larynx. (2) La pression d'air va faire entrer en vibration les cordes
vocales, qui avec le larynx sont à la source de la phonation et responsables de la
production du flux laryngé (son périodique complexe). (3) Suite à la vibration
des cordes vocales, l’air va remonter le long du pharynx, du conduit vocal et des
cavités nasales qui vont moduler le flux laryngé et filtrer de cette manière l'air
sortant par la bouche ou le nez.
Afin de produire des patterns vocaux appris, tels que les sons de parole
dont l'objectif est d'effectuer des mouvements du conduit vocal très fins à des
visées communicatives, il est nécessaire de contrôler à la fois la respiration, la
phonation et la musculature supralaryngée. Liée initialement à un apprentissage
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sensorimoteur des représentations phonologiques, cette action complexe nécessite le fonctionnement de plusieurs boucles de contrôle impliquant des structures corticales et sous-corticales (pour des revues, voir Jürgens, 2002, 2009 ;
Riecker, 2005). Une boucle de préparation, en charge des processus d’initiation
et de coordination motrice (Riecker et al., 2005), serait composée du gyrus frontal inférieur et du cortex prémoteur (qui se chargent de l'élaboration et du
séquençage du plan moteur), de l'insula, de l'aire motrice supplémentaire et du
cervelet supérieur. Une boucle d’exécution motrice inclurait le cortex moteur
primaire orofacial (la première étape de la voie pyramidale), le thalamus (le
principal relai entre le cortex et les autres structures centrales), le putamen et le
noyau caudé, ainsi que le cervelet inférieur. Un troisième ensemble fonctionnel
de correction/régulation motrice peut être proposé par rapport aux travaux sur le
contrôle en ligne de la production de la parole (discutés plus en détail ci-dessous) et inclurait le cortex somatosensoriel, le lobule pariétal inférieur et le
gyrus temporal supérieur.
Interactions sensorimotrices en production de la parole
Tel que mentionné précédemment, l’existence d’interactions sensorimotrices est un concept central dans le domaine de la production de la parole. Du
point de vue cérébral, une modulation des réponses du cortex auditif lors de la
production ouverte de parole, par rapport aux réponses neuronales observées
lors de l’écoute passive de ces mêmes productions, a été démontrée dans de
nombreuses études utilisant les techniques d’électroencéphalographie, de
magnétoencéphalographie et d’imagerie magnétique fonctionnelle (voir par
exemple Paus et al., 1996 ; Numminen et Curio, 1999 ; Curio et al., 2000 ;
Houde et al., 2002 ; Christoffels, Formisano et Schiller, 2007 ; Christoffels et
al., 2011). Pris ensemble, ces résultats sont généralement interprétés dans le
cadre théorique de modèles internes direct et inverse. La notion de "modèle
interne" est reliée à l’existence de représentations internes nécessaires au
contrôle moteur des actions (voir par exemple, Wolpert, Ghaharamani et Jordan
1995 ; Wolpert, 1997 ; Blakemore, Wolpert et Frith 1998). Il a été proposé que
les modèles internes soient constitués d’un modèle inverse qui permet de retrouver les commandes motrices apprises et relatives à la réalisation d’une action
donnée et d’un modèle direct qui permet de prédire le résultat de ces commandes en estimant et comparant la position et la dynamique des articulateurs
en mouvement avec les conséquences sensorielles des commandes motrices
effectuées. Ainsi, le système moteur peut, à l'aide du modèle direct, inférer les
conséquences sensorielles des actions réalisées à partir du modèle inverse sous
forme de copie d’efférence. Ainsi, la modulation de réponse du cortex auditif est
supposée refléter des mécanismes de contrôle du feedback acoustique permet-
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tant d’évaluer les conséquences auditives prédites des retours réels des actes
moteurs de manière à contrôler et corriger si nécessaire notre production et de
distinguer les conséquences sensorielles de nos actions des signaux sensoriels
de notre environnement (pour des revues, voir Guenther, 2006 ; Guenther et
Vladusich, 2012).
De même, une modulation de l’activité du cortex auditif a été observée
lors de la modification en ligne du feedback auditif. Ce résultat est observé par
l’ajout de bruit (par exemple, Christoffels, Formisano et Schiller, 2007 ; Christoffels et al., 2011), en effectuant un décalage temporal du feedback auditif lors
de la prononciation des mots ou de phrases (Hashimoto et Sakai, 2003 ; Takaso
et al., 2010) ou en modifiant directement les propriétés acoustiques du signal de
parole produit. Par exemple, par rapport à une condition sans perturbation auditive, une diminution d’amplitude du potentiel évoqué auditif N1 (EEG ; HeinksMaldonaldo et al., 2005) et M100 (MEG ; Heinks-Maldonaldo et al., 2006),
apparaissant 100ms après la production de la voyelle, a été observée dans les
régions auditives bilatérales suite à une modification en ligne de la fréquence
fondamentale de voyelles produites. Tourville, Reilly et Guenther (2008) ont
mesuré les modulations neuronales lors de la modification en ligne du premier
formant lors de la production de syllabes et ont observé une activation accrue au
niveau des gyri temporaux supérieurs bilatéraux (tout comme l'activation des
aires prémotrices et motrices ventrales et le cervelet antérieur). Enfin, de
manière intéressante, Golfinopoulos et al. (2011) ont montré un effet similaire
de perturbation de la production de la parole en modifiant le feedback somatosensoriel (en bloquant de manière imprévue les mouvements de la mâchoire).
Par rapport à une condition contrôle sans modification somatosensorielle, ils ont
observé des activations accrues du cortex moteur primaire et prémoteur ventral,
du gyrus frontal antérieur, du gyrus supramarginal et du cervelet, ainsi qu’un
renforcement des connexions fonctionnelles entre ces régions.
♦ Modèles neurobiologiques de production de la parole
Pris ensemble, ces résultats sont généralement interprétés dans le cadre de
mécanismes de contrôle articulatoire et de boucles sensorimotrices régulatrices.
La modulation des réponses neuronales du cortex auditif est considérée refléter
des mécanismes de contrôle et de comparaison en ligne des représentations articulatoires et auditives. Les conséquences sensorielles prédites de l’acte moteur
seraient ainsi évaluées par rapport au feedback sensoriel réel de nos actions de
manière à permettre, si nécessaire, des modifications rapides de production de
parole.
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Modèle DIVA (Directions Into Velocities of Articulators) de la production
de la parole (voir Figure 3). Le modèle DIVA de production de la parole développé par Guenther et collaborateurs (par exemple, Guenther, 2006 ; Guenther
et Vladusich, 2012) est une implémentation neuro-computationnelle permettant
d’une part, de tenir compte de plusieurs propriétés caractéristiques de la production de parole (comme les principes d'économie articulatoire, de co-articulation,
d’équivalence motrice ou encore les étapes d'acquisition de l'inventaire phonémique et la prise en compte de mécanismes de régulations sensorimotrices) et,
d’autre part, de s’appuyer sur de nombreuses vérifications expérimentales comportementales et neurophysiologiques.
Figure 3 : Modèle DIVA de Guenther et collaborateurs (Figure adaptée de Guenther et
Vladusich, 2012).
Le modèle DIVA comprend deux systèmes de contrôle direct (feedforward) et par rétroaction (feedback), qui se co-structurent lors de l’apprentissage
du modèle (simulation des étapes d’acquisition de la parole lors du développement). Afin de pouvoir efficacement gérer les commandes motrices en fonction
des buts sensoriels du locuteur, le système direct doit apprendre lors de cette
étape les relations entre représentations phonémiques, motrices, auditives et
somatosensorielles. Les cibles de parole sont initialement de nature auditive et
guident, grâce au système rétroactif, la mise en place des commandes motrices
sous-jacentes. Suite à cette phase d’apprentissage, des cibles somatosensorielles
sont créées et intégrées dans le système de contrôle. Chez l'adulte et pour des
unités surapprises, ces deux systèmes peuvent fonctionner de manière relativement indépendante et parallèle. Le système direct serait impliqué dans l’exécution des commandes motrices tandis que le système rétroactif, dont le rôle est de
comparer les prédictions des actes moteurs avec les conséquences sensorielles
réelles, n’interviendrait qu’en cas de situations conflictuelles (par exemple, dans
des conditions environnementales bruitées).
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Dans ce modèle, la production d'une unité de parole commence par l'activation de la carte des sons de parole ("speech sound map"), supposée contenue
dans la partie operculaire du gyrus frontal inférieur gauche et le cortex prémoteur ventral adjacent. Cette carte des sons de parole répertorie tous les sons
appris par le modèle dans la phase d’apprentissage (un phonème, une syllabe ou
même une séquence de syllabe, voir Guenther et Vladusich, 2012). Bien que
reliées à des structures prémotrices, l’emploi des termes de cartes de sons de
parole pour désigner cette unité de stockage reflète la nature supposée sensorielle, auditive et somatosensorielle, des cibles de parole. A partir de là, les deux
systèmes sont mis en route. En ce qui concerne le système direct, le cortex
moteur primaire reçoit les informations de l’unité à produire sous forme de plan
moteur (élaboré par le cervelet et stocké dans la carte des sons de parole) de
manière à exécuter le programme moteur requis (via la voie pyramidale). En
parallèle, le système rétroactif reçoit une copie de la commande motrice, ou plus
exactement, les conséquences/cibles sensorielles de celle-ci, au sein de cartes
d'erreurs auditives (situées dans le cortex temporal supérieur postérieur bilatéral) et somatosensorielles (situées dans les aires somatosensorielles primaires
orofaciales et le gyrus supramarginal bilatéral). Les conséquences sensorielles
réelles sont analysées par des cartes d’état sensoriel auditif et somatosensoriel
(dans le cortex temporal supérieur postérieur bilatéral et les aires somatosensorielles primaires orofaciales et le gyrus supramarginal bilatéral). En cas d’une
détection d’erreur entre conséquences réelles et prédites, les informations nécessaires à la correction de l’acte moteur sont envoyées à une carte de contrôle
rétroactif (située dans la partie operculaire du gyrus frontal inférieur droit et le
cortex prémoteur ventral adjacent) qui, enfin, signale au cortex moteur primaire
les corrections nécessaires.
Des modèles similaires faisant référence à des modèles internes du
conduit vocal ont été également proposés (voir par exemple, Tian et Poeppel,
2010 ; Price, Crinion et MacSweeney, 2011 ; Hickok, Houde et Rong, 2011 ;
Houde et Nagarajan, 2011 ; Hickok, 2012).
Par exemple, le modèle hiérarchique de contrôle moteur par feedback de
Hickok (2012 ; voir également Hickok, Houde et Rong, 2011 ; Houde et Nagarajan, 2011) propose d'intégrer de manière hiérarchique les aspects psycholinguistiques et moteurs de la production de la parole. Le modèle reprend l’idée
d’un système conceptuel et lexical (pour une revue, voir Indefrey et Levelt,
2004) et, de là, propose une décomposition des mots produits en phonèmes et
syllabes. Ce modèle se base également sur la supposition que les buts des actes
de parole sont de nature sensorielle et codés à différents niveaux hiérarchiques :
les buts de "haut niveau" correspondraient aux structures syllabiques et seraient
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codés par des représentations auditives, alors que les buts de "bas niveau" correspondraient aux phonèmes et seraient codés en termes somatosensoriels. Lors
de la réalisation des phonèmes et syllabes, des projections seraient envoyées en
parallèle au système moteur et aux systèmes sensoriels, pour dans ce cas permettre une comparaison des prédictions auditives et somatosensorielles avec les
retours réels. Pour les syllabes, ces transformations audiomotrices entre programme moteur syllabique (codé dans la partie postérieure du gyrus frontal
inférieur) et représentations auditives correspondantes (partie postérieure du
gyrus supérieur temporal) seraient effectuées grâce à une région à la frontière
temporo-pariétale au niveau de la scissure sylvienne (l'aire 'SPT'). Pour les phonèmes, les transformations somatosensorimotrices entre plan moteur phonémique (cortex prémoteur ventral et aire motrice primaire) et représentations
auditives (cortex somatosensoriel primaire et partie antérieure du gyrus supramarginal) seraient réalisées par le cervelet. Les éventuelles erreurs de prédictions seraient corrigées de manière à mettre à jour les commandes motrices relatives aux syllabes et aux phonèmes produits.
♦ Conclusion
Nous l'avons vu, de nombreux modèles psycholinguistiques et neurobiologiques suggèrent l'existence d'interactions entre systèmes sensoriels et moteur
lors de la perception et production de la parole (voir Figure 4).
Figure 4 : Représentation schématique des interactions entre régions corticales sensorielles et motrices lors de la production (gauche) et perception (droite) de la parole.
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Lors de la production de parole, la modulation des réponses neuronales
observées au sein des cortex sensoriels refléterait des mécanismes de contrôle
en ligne des productions de parole, par la comparaison des conséquences sensorielles prédites des actes moteurs de parole et des entrées sensorielles réelles.
Inversement, l’implication du système moteur observée lors de la perception de
la parole pourrait correspondre à des mécanismes de simulation motrice dont le
but serait de contraindre l’interprétation phonétique finale des entrées sensorielles par la génération interne de possibles candidats articulatoires. Pris
ensemble, ces modèles appuient ainsi l’hypothèse de représentations de la
parole intrinsèquement sensorimotrices, ni purs produits sensoriels, ni purs
objets moteurs, mais des percepts multimodaux régulés par l’action. A la
lumière de ces avancées récentes, l’étude conjointe et systématique des systèmes de perception et de production de la parole et des liens perceptivomoteurs pourrait permettre de mieux comprendre le "langage commun de la perception et de l’action dans la communication parlée" (Schwartz, Fadiga et Sato,
2008). À terme, une meilleure compréhension de ce couplage fonctionnel entre
systèmes sensoriels et moteur pourrait permettre d’envisager de nouvelles
approches thérapeutiques prenant avantage de ces interactions dans la réadaptation des troubles perceptifs et moteurs de la parole, notamment par la mise en
oeuvre d'exercices perceptivo-moteurs.
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Le rôle du gyrus supramarginal lors du traitement
phonologique
Isabelle Deschamps, Shari Baum
Résumé
Les différentes techniques de neuroimagerie cérébrale ont permis d’étudier les corrélats
neurofonctionnels recrutés lors des tâches phonologiques. Les résultats d’études en neuroimagerie démontrent que les mécanismes de traitement phonologique mettent en jeu plusieurs aires corticales et sous-corticales mobilisant un réseau distribué. Parmi ces régions,
le gyrus supramarginal (GSM) est recruté lors de différentes tâches ciblant les mécanismes
de traitement phonologique lors de la perception de la parole et la compréhension du langage oral et écrit. Toutefois, le mécanisme sous-tendant le recrutant du GSM lors des tâches
phonologiques n’a pas encore été caractérisé. Cette revue de littérature vise à caractériser
le rôle du GSM lors du traitement phonologique. Il émerge de cette revue que le GSM est
une région non seulement impliquée lors de tâches ciblant les mécanismes de traitement
phonologique, mais également lors de tâche de mémoire à court terme verbale (MCTv). Afin
de réconcilier le rôle du GSM lors des tâches phonologiques et des tâches de MCTv, l’hypothèse que le GSM est impliqué lors du décodage phonologique et du maintien d’information
phonologique en mémoire sera émise. Cette hypothèse s’appuie sur de récentes études
anatomiques qui ont démontré que le GSM est composé de différentes sous-régions qui se
distinguent les unes des autres en fonction de leur composition cellulaire.
Mots clés : neuroimagerie, gyrus supramarginal, traitement phonologique, mémoire à court
terme verbale.
Rééducation Orthophonique - N° 260 - décembre 2014
59
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Role of the supramarginal gyrus in phonological processing
Abstract
Advances in neuroimaging techniques have allowed researchers to gain insights into the
neural correlates associated with phonological processing. The results from studies investigating the neural correlations associated with phonological processing have identified a
broad network of regions distributed across the different lobes of the brain. Among these
regions, the supramarginal gyrus (SMG) is a region that is recruited by tasks targeting phonological processes during speech perception as well as spoken and written word recognition. However, the underlying phonological processing mechanism associated with SMG
activation during phonological tasks has not yet been identified. The goal of this literature
review is to characterize the role of the SMG during phonological tasks. The emerging picture that results from this literature review is that the SGM is a region not only recruited
during tasks targeting phonological processes but is also recruited during tasks targeting
verbal short-term memory. In order to reconcile these findings, the hypothesis that the SMG
is both involved during phonological decoding (i.e. phonological process) and the storage of
phonological information in memory (verbal short-term memory) will be brought forth. This
hypothesis is supported by recent neuroanatomical studies that have demonstrated that the
SMG is composed of different sub-regions that differ in terms of their anatomical architecture..
Key Words : neuroimaging, supramarginal gyrus, phonological processing, short-term verbal
working memory.
60
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Isabelle DESCHAMPS1,2
Shari BAUM 3,4
1. Département de réadaptation, Université
Laval, Québec, QC, Canada.
2. Centre de Recherche de l’Institut
Universitaire en santé mentale de Québec,
Québec, QC, Canada.
3. Université McGill, Faculté de Médecine,
École des sciences de la communication
humaine, 2001 McGill College, 8ème
étage, Montréal, Québec, Canada.
4. Centre for Research on Brain, Language
and Music, Rabinovitch House, Université
McGill, 3640 rue de la Montagne,
Montréal, Québec, Canada.
Correspondance :
Isabelle Deschamps, Ph.D.,
Université Laval, Département de
Réadaptation
Centre de Recherche de l’Institut
Universitaire en santé mentale de Québec,
2601 rue de la Canardière
bureau F-2424A
Québec, Québec, Canada, G1J 2G3
Courriel : [email protected]
L
a phonologie est un système complexe qui regroupe les sons ainsi que les
principes qui régissent leur apparition et leur agencement dans une langue
donnée. À l’intérieur du système phonologique, le phonème et la syllabe
sont deux types de représentations qui se distinguent l’une de l’autre non seulement quant à leurs propriétés acoustiques (Nusbaum & DeGroot, 1990 ; Treiman,
1985) mais également quant à l’âge auquel les enfants apprennent à les manipuler (Backman, 1983 ; Goswami, 1993 ; MacNeilage, 1998). De plus, plusieurs
modèles psycholinguistiques considèrent soit la syllabe soit le phonème comme
étant l’unité perceptuelle de base lors de la perception de la parole et de la compréhension du langage. Par exemple, certains modèles stipulent que le signal
acoustique est segmenté au niveau du phonème et que les représentations lexicales sont construites à partir d’une chaîne de phonèmes (Liberman, Cooper,
Shankweiler, & Studdert-Kennedy, 1967 ; Stevens, 2002). D’autres modèles présupposent que les unités perceptuelles extraites du signal acoustique sont plus
complexes que le phonème, telles que la syllabe ou ses composantes (p. ex.
61
texte 260_Mise en page 18/12/14 15:28 Page62
attaque, nucleus, rime, coda) (Greenberg, 2005 ; Healy & Cutting, 1976 ;
Massaro, 1974). Ainsi, le traitement de l’information phonologique (c.-à-d. phonémique ou syllabique) semble jouer un rôle important lors de la perception de
la parole et la reconnaissance de mots à l’oral ou à l’écrit.
Suite aux récentes avancées technologiques dans le domaine de la neuroimagerie (voir l’article de Coll, Blais-Michaud et Jackson, dans ce même
numéro), plusieurs études ont tenté de caractériser les mécanismes phonologiques associés avec le traitement de l’information syllabique ou phonémique
en étudiant leurs corrélats neuronaux lors de la perception de la parole et lors de
la reconnaissance de mots à l’oral ou à l’écrit (Benson et al., 2001 ; Berent et
al., 2014 ; Booth et al., 2002 ; Burton, 2001 ; Celsis et al., 1999 ; Dehaene-Lambertz et al., 2005 ; Devlin, Matthews, & Rushworth, 2003 ; Fiez et al., 1995 ;
Gelfand & Bookheimer, 2003 ; Jacquemot, Pallier, LeBihan, Dehaene, &
Dupoux, 2003 ; Jäncke, Wüstenberg, Scheich, & Heinze, 2002 ; Liebenthal,
Binder, Spitzer, Possing, & Medler, 2005 ; S. D. Newman & Twieg, 2001 ;
Okada & Hickok, 2006 ; Poldrack et al., 2001; Poldrack et al., 1999 ; Price,
Moore, Humphreys, & Wise, 1997 ; Pugh et al., 1996 ; Rimol, Specht, Weis,
Savoy, & Hugdahl, 2005 ; Siok, Jin, Fletcher, & Tan, 2003 ; Vouloumanos,
Kiehl, Werker, & Liddle, 2001 ; Wilson & Iacoboni, 2006 ; Zaehle, Geiser,
Alter, Jancke, & Meyer, 2008). Les résultats de ces études démontrent que les
mécanismes de traitement phonologique mettent en jeu plusieurs aires corticales
et sous-corticales mobilisant un réseau distribué. Parmi ces aires, le GSM est
une région qui est activée lors de différentes tâches recrutant des mécanismes de
traitement phonologique (p.ex. tâche de discrimination syllabique ou phonémique, tâche de jugement d’homophones, tâche de jugement de rimes, pour en
nommer quelques-unes). Le GSM (aire de Brodmann 40) fait parti du lobe
pariétal inférieur et, avec le gyrus angulaire (l’aire de Brodmann 39), il forme le
lobule pariétal inférieur (voir Figure 1 ; Brodmann & Gary, 2006). Les résultats
des études en neuroimagerie mentionnées ci-haut suggèrent que le GSM est
impliqué lors de tâches impliquant des mécanismes de traitement phonologique.
Toutefois, une description du ou des mécanisme(s) de traitement phonologique
associé(s) à l’activation du GSM lors de tâches phonologiques n’a pas encore
été établie avec certitude.
62
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Figure 1 : Division anatomique du lobule inférieur pariétal (Caspers et al., 2012)
En effet, une description détaillée du rôle fonctionnel du GSM est difficile car le terme « traitement phonologique » est souvent utilisé de manière
générale pour désigner plusieurs mécanismes différents (p. ex. encodage, décodage, conversion de graphème-phonème, pour en nommer quelques-uns ; pour
une discussion similaire, voir : Poeppel, 1996). Il est évident que le terme « traitement phonologique » englobe plusieurs mécanismes et qu’il ne réfère pas à
une seule opération psychologique mais bien à plusieurs. De plus, plusieurs
tâches utilisées afin d’étudier les corrélats neuronaux associés au traitement
phonologique (p. ex. tâche de rimes, tâche de comptage de syllabes, tâche de
discrimination) impliquent d’autres fonctions cognitives telle que la MCTv et
l’attention. Ainsi, un des défis à surmonter lors de l’étude des mécanismes de
traitement phonologique est de spécifier le mécanisme phonologique ciblé à
l’étude. Un autre défi est de réussir à isoler les régions corticales et sous-corticales qui sont sensibles à l’information phonologique de celles qui sont sensibles à d’autres processus cognitifs (MCTv, attention).
L’observation que les tâches de traitement phonologique impliquent d’autres fonctions cognitives comme la MCTv est particulièrement intéressante
puisque le GSM est également activé lors de tâches ciblant les mécanismes de
MCTv (p. ex. empan numérique, empan de mots, empan de syllabes, empan de
phonèmes, empan de chiffres à rebours, tâche de discrimination avec délais,
63
texte 260_Mise en page 18/12/14 15:28 Page64
pour en nommer quelques-unes) (Crottaz-Herbette, Anagnoson, & Menon,
2004 ; Koelsch et al., 2009 ; McKenna, Brown, Drummond, Turner, & Mano,
2013 ; Paulesu et al., 1996 ; Ravizza, Delgado, Chein, Becker, & Fiez, 2004 ;
Rothmayr et al., 2007 ; Salmon et al., 1996 ; E. E. Smith, Jonides, & Koeppe,
1996).
Ainsi, afin d’arriver à une meilleure compréhension du rôle du GSM lors
du traitement phonologique, un survol des résultats d’études en neuroimagerie
fonctionnelle portant sur le traitement phonologique avec stimuli visuels et
auditifs, ainsi que sur les tâches de MCTv avec stimuli visuels et auditifs, sera
présenté. De plus, outre les résultats d’imagerie fonctionnelle auprès d’individus
sains lors de tâches phonologiques et de MCTv, une courte synthèse des résultats d’études en neuroimagerie fonctionnelle en lecture sera également présentée
puisque la lecture implique également des mécanismes de traitement phonologique (p. ex conversion de graphèmes en phonèmes). Une courte discussion portant sur les résultats d’études en neuroimagerie fonctionnelle et structurelle chez
des individus souffrant de dyslexie sera également incluse puisque des anomalies au niveau de l’activation au sein du GSM lors de tâche de lecture ainsi que
des anomalies au niveau de l’anatomie du GSM ont été observées auprès de
cette population. Un survol de toutes ces données neurofonctionnelles et neuroanatomiques offre plusieurs sources d’information afin de détailler le rôle du
GSM lors du traitement phonologique. Deux possibilités seront explorées : (1)
le GSM joue un rôle dans le traitement d’information phonologique (décodage
phonologique) et (2) le GSM régit les mécanismes impliqués lors du maintien
d’information phonologique en mémoire une fois que celle-ci est décodée. Plus
précisément, afin de caractériser le rôle du GSM, une distinction entre les processus de traitement phonologique reliés au décodage (c.-à-d. conversion de graphèmes en phonèmes lors de la reconnaissance de mots écrits, et de la correspondance entre l’information phonétique et l’information phonologique lors de
la reconnaissance de mots à l’oral) et le maintien d’information phonologique
en mémoire sera faite (voir Figure 2).
64
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Figure 2 : Modèle putatif de la mémoire verbale à court terme et des mécanismes de
traitement phonologique impliqués. GSMa = partie antérieure du gyrus supramarginal ;
GSMp = partie postérieure du gyrus supramarginal.
♦ Traitement phonologique et GSM
Imagerie par résonance magnétique fonctionnelle et tomographie
par émission de positrons
Tel que mentionné dans l’introduction, le GSM est une région recrutée
lors de tâches ciblant les mécanismes de traitement phonologique. Par exemple,
des études utilisant l’imagerie par résonance magnétique (IRMf) ou la tomographie par émission de positrons (TÉP) (voir l’article de Coll, Blais-Michaud et
Jackson, dans ce même numéro) ont documenté une augmentation au niveau de
l’activation du GSM lors de la perception de mots, de non-mots et de syllabes
(Benson et al., 2001 ; Celsis et al., 1999 ; Dehaene-Lambertz et al., 2005 ;
Howard et al., 1992 ; R. L. Newman & Joanisse, 2011 ; S. D. Newman &
Twieg, 2001 ; Zatorre, Evans, Meyer, & Gjedde, 1992). Puisque ces études ont
utilisé des stimuli avec (p. ex. mots) ou sans représentation lexicale (non-mots,
syllabes), l’activation observée au sein du GSM doit être associée à un mécanisme commun au traitement de ces stimuli. Une possibilité à explorer est que
ce mécanisme commun soit relié au traitement de l’information phonologique
65
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puisque tous les stimuli utilisés lors de ces études ont une représentation phonologique même en l’absence de représentation lexicale. Ainsi, en se basant sur
cette hypothèse, il est fort plausible que le rôle du GSM lors de la perception de
la parole et de la reconnaissance de mots à l’écrit ou à l’oral soit associé à des
mécanismes de traitement phonologique. Néanmoins, puisque ces études ont
utilisé différentes modalités de présentation (p. ex. auditive, visuelle), ainsi que
différentes tâches expérimentales (p. ex. écoute passive, discrimination, décision
lexicale, identification), il est difficile de déterminer le mécanisme sous-tendant
l’activation du GSM lors de ces tâches. Par exemple, l’utilisation de stimuli
visuels requiert un mécanisme de conversion de graphèmes en phonèmes
contrairement aux stimuli auditifs qui requièrent la conversion d’information
phonétique en information phonologique.
Néanmoins, les résultats d’études ayant comparé l’activation cérébrale
associée à des tâches ciblant différentes propriétés de stimuli verbaux (p. ex.
propriétés acoustiques, phonologiques, sémantiques) étayent le rôle du GSM
lors du traitement d’information phonologique. Par exemple, un plus haut
niveau d’activation est observé dans le GSM lors de tâches portant sur les propriétés phonologiques des stimuli que lors de tâches portant sur leur contenu
sémantique (Chee, O'Craven, Bergida, Rosen, & Savoy, 1999 ; Demonet, Price,
Wise, & Frackowiak, 1994 ; Devlin et al., 2003 ; McDermott, Petersen, Watson,
& Ojemann, 2003 ; Mummery, Patterson, Hodges, & Price, 1998 ; Price et al.,
1997) ou leurs propriétés acoustiques (Celsis et al., 1999 ; Dehaene-Lambertz et
al., 2005 ; Jacquemot et al., 2003). Ainsi, en se basant sur les résultats de ces
études, l’hypothèse que le GSM est une région impliquée dans le traitement
phonologique reçoit de plus en plus de support. Ainsi, même si l’IRMf et la TEP
offrent des informations extrêmement intéressantes sur les corrélations entre le
cerveau et les mécanismes de traitement phonologique, il est impossible d’établir des relations causales (c’est-à-dire si une aire est réellement obligatoire ou
si sa contribution n’est pas essentielle) à l’aide de ces techniques puisque ni
l’IRMf ni la TEP ne peuvent « manipuler » l’activation au niveau d’une région
du cerveau. Ainsi, il est donc impossible d’établir avec certitude si le GSM est
nécessaire ou non au traitement phonologique.
Stimulation magnétique transcranienne
La stimulation magnétique transcranienne (SMT) est un outil de
recherche utilisé en neuroscience qui permet d’explorer le rôle fonctionnel
d’une région en interférant avec le fonctionnement d’une région cérébrale (voir
l’article de Coll, Blais-Michaud et Jackson, dans ce même numéro, pour plus de
détails). Plus précisément, l’application de la SMT induit un champ magnétique
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très faible qui à son tour génère un champ électrique qui modifie temporairement l’activité des neurones qui sont situés à l’intérieur du champ magnétiqueinterférant ainsi avec le fonctionnement de cette région. Par exemple, des protocoles de SMT à basse fréquence et à impulsions continues ont tendance à
diminuer le niveau d’activation alors que les protocoles de SMT à haute fréquence et à impulsions discontinues ont tendance à les augmenter (pour plus de
détails, voir : Bolognini & Ro, 2010). Afin de pouvoir établir un lien de causalité entre une fonction cognitive spécifique (p. ex. traitement phonologique) et
une tâche, on compare la performance d’un participant lors d’une tâche spécifique avant l’application de la SMT à la performance après l’application de la
SMT. En somme, en observant les modifications comportementales entraînées
suite à l’application de la SMT, il est possible de déterminer si une aire est
impliquée lors d’une tâche spécifique.
Par exemple, plusieurs études ayant utilisé la SMT ont impliqué le GSM
lors de tâches phonologiques. Sliwinska et collègues (2012) ont démontré, en
utilisant un protocole de SMT, que le traitement phonologique de mots présentés visuellement est perturbé lors d’une tâche ciblant le traitement phonologique. Plus spécifiquement, l’application d’impulsions au GSM gauche a augmenté les temps de réaction lors d’une tâche de jugement de rimes alors
qu’aucun effet n’a été observé lors d’une tâche sémantique (c.-à-d. jugement de
synonymes ; tâche contrôle). Des résultats similaires ont été rapportés par Hartwigsen et collègues (2010). Suite à l’application de la SMT soit au GSM
gauche, soit au GSM droit, soit simultanément au GSM gauche et droit, Hartwigsen et collègues ont observé une augmentation des temps de réaction lors
d’une tâche phonologique avec des stimuli auditifs et visuels (comptage de syllabes). Toutefois, l’application de la SMT n’a eu aucun effet lors de tâches
contrôles1. Les résultats de ces deux études suggèrent que le GSM joue un rôle
lors du traitement phonologique puisque la performance des participants se
détériore suite à l’application de la SMT sur cette région uniquement lorsque les
tâches ciblent des mécanismes de traitement d’information phonologique. Néanmoins, tout comme les tâches utilisées lors d’études d’IRMf ciblant le traitement phonologique, les tâches de comptage de syllabes ou de jugement de rimes
recrutent également des mécanismes de MCTv. De plus, ces études ayant utilisé
des stimuli auditifs et visuels, il est difficile de déterminer quel mécanisme de
1 Les tâches contrôles étaient un jugement sémantique (déterminer si l’objet présenté est fabriqué par l’humain ou non), un jugement de tons (déterminer s’il y avait un changement au niveau de la hauteur de la voix
dans un mot) et un jugement visuel (déterminer s’il y avait un changement de taille de caractères d’une police
dans un mot).
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traitement phonologique sous-tend le recrutement du GSM (voir Figure 2). Par
exemple, la conversion de graphèmes en phonèmes est un mécanisme de traitement phonologique associé à la modalité visuelle alors que la conversion d’un
code phonétique à un code phonologique est généralement associée à la modalité auditive.
Ainsi, en se basant sur les résultats d’études ayant exploré le traitement
phonologique à l’aide de l’IRMf, la TÉP et la SMT, il est difficile de déterminer
si le GSM est recruté par des mécanismes de traitement phonologique (p. ex.
conversion de graphèmes en phonèmes) ou MCTv (p. ex. de maintien d’information phonologique en mémoire). En prenant ces faits en considération, une
possibilité à explorer est que le rôle du GSM n’est pas directement relié au traitement de l’information phonologique mais plutôt relié au maintien de l’information phonologique dans la MCTv. Cette hypothèse est en accord avec de
récentes études d’IRMf qui ont documenté une augmentation de l’activation
dans le GSM lors de tâche de MCTv (pour plus de détails, voir : Awh, Jonides,
Schumacher, Koeppe, & Katz, 1996 ; Barch & Csernansky, 2007 ; Jonides et al.,
1998 ; Paulesu, Frith, & Frackowiak, 1993 ; Paulesu et al., 1996 ; Salmon et al.,
1996 ; E. E. Smith & Jonides, 1999 ; E. E. Smith et al., 1996). Dans la prochaine section, le rôle du GSM lors de tâche de MCTv sera exploré.
♦ La mémoire verbale à court terme et le GSM
Tel que mentionné précédemment, une possibilité qui pourrait expliquer
l’activation observée dans le GSM lors de tâches phonologiques est que cette
région joue un rôle dans le maintien en mémoire des représentations phonologiques une fois que celles-ci ont été traitées.
En effet, les études qui ont tenté de localiser les composantes de la MCTv
telles que définies par le modèle de Baddeley et Hitch (Baddeley, 1986, 1998 ;
1974), ont impliqué le GSM (Awh et al., 1996 ; Jonides et al., 1998 ; Paulesu et
al., 1993). Selon le modèle de Baddeley et Hitch, le maintien d’information verbale repose sur une boucle phonologique. La boucle phonologique est un système mnésique comprenant une composante de stockage qui maintient l’information verbale en mémoire et un mécanisme de récapitulation articulatoire
(boucle articulatoire) qui active la trace phonologique (c.-à-d. représentation
phonologique) afin de retarder l’oubli. La boucle phonologique maintient en
mémoire l’information verbale en modalité auditive et visuelle. Toutefois,
contrairement à l’information présentée en modalité auditive qui est immédiatement transformé en code phonologique, l’information présentée en modalité
visuelle doit tout d’abord être analysée et un code visuel est gardé en mémoire.
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Par la suite, ce code visuel est transformé en représentations phonologiques
(c.-à-d. conversion de graphèmes en phonèmes).
Imagerie par résonance magnétique fonctionnelle et tomographie
par émission de positrons
Afin de localiser les composantes de la boucle phonologique, des études
en neuroimagerie (IRMf et TÉP) ont comparé l’activité associée à une tâche
ciblant uniquement une composante de la boucle phonologique (p. ex. tâche de
répétition) à l’activité associée à une tâche ciblant les deux composantes de la
boucle phonologique (p. ex., tâche d’empan à rebours). Par exemple, Paulesu et
collègues (1993), à l’aide de la TÉP ont comparé l’activation associée à une
tâche de rimes, tâche nécessitant la composante de stockage à l’activation associée à une tâche de reconnaissance de lettres qui requiert non seulement la composante de stockage mais également la boucle articulatoire. Alors que la tâche
de reconnaissance de lettres recrutait le gyrus inférieur frontal (GIF) et le GSM,
la tâche de rimes ne recrutait que le GSM. Les auteurs ont interprété les résultats de cette comparaison comme démontrant que le GSM était impliqué dans la
composante de stockage alors que le GIF était recruté par la boucle articulatoire.
De manière similaire, Awh et collègues (1996) ont comparé l’activation associée
à une tâche d’empan de chiffres à rebours (composantes de stockage et de boucle articulatoire) à celle associée avec une tâche de répétition (boucle articulatoire). Les résultats de cette comparaison ont identifié le GSM comme étant une
région impliquée dans le stockage d’information phonologique alors que le GIF
et le cortex pré-moteur étaient recrutés par la boucle articulatoire. En se basant
sur les résultats d’études d’IRMf et de TÉP, il a été suggéré que le GSM est
impliqué dans la composante de stockage d’information phonologique et que le
GIF et le cortex prémoteur sont impliqués dans le mécanisme régissant la boucle articulatoire (Awh et al., 1996 ; Chein & Fiez, 2001 ; Jonides et al., 1998 ;
Paulesu et al., 1993 ; Salmon et al., 1996 ; Edward E. Smith, Jonides, Marshuetz, & Koeppe, 1998). Toutefois, il est important de mentionner que le locus
d’activation associé avec la composante de stockage dans le GSM varie d’étude
en étude. Certaines études impliquent la portion antérieure du GSM (Paulesu et
al., 1993 ; Paulesu et al., 1996 ; Salmon et al., 1996) alors que d’autres études
impliquent la portion postérieure (Awh et al., 1996 ; Jonides et al., 1998 ; E. E.
Smith et al., 1996).
En somme, les résultats de ces études semblent impliquer le GSM dans le
maintien d’information phonologique en mémoire. Toutefois, puisqu’aucune de
ces études n’a comparé l’activité associée à une tâche phonologique à celle
associée à une tâche de MCTv, une possibilité qui reste à explorer est que le
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GSM soit composé de différents champs fonctionnels (c.-à-d. des sous-régions
ayant différentes fonctions). Cette possibilité pourrait expliquer pourquoi le
GSM est recruté lors de tâches phonologiques et de tâche de MCTv. Une façon
d’aborder cette possibilité est d’utiliser la SMT et de stimuler une région spécifique du GSM lors de tâches phonologiques et de tâches de MCTv.
Stimulation magnétique transcranienne
Afin de caractériser plus précisément le rôle du GSM gauche lors de
tâches de MCTv et de tâches de traitement phonologique, Romero et collègues
(2006) ont utilisé un paradigme de SMT lors des tâches suivantes : (1) empan
numérique, (2) similarité phonologique (son de la première syllabe), et (3) similarité d’accentuation syllabique avec des mots présentés visuellement. Selon les
auteurs, la tâche d’empan numérique engage des processus de traitement phonologique (c.-à-d. la conversion d’un code orthographique à un code phonologique) et de stockage puisqu’à la fin de chaque série de chiffres, les participants
devaient déterminer si une séquence de deux chiffres présentée après un délai
faisait partie de la série de chiffres qu’il avait mémorisée. Les tâches de similarité phonologique et d’accentuation recrutent des processus de traitement phonologique puisque les mots écrits doivent être transformés en représentations
phonologiques tout en minimisant la composante de stockage phonologique
puisque les deux mots étaient présentés dans un court délai contrairement à la
tâche d’empan numérique. Logiquement, si le GSM est impliqué dans la composante de stockage, l’application de la SMT devrait seulement perturber la performance des participants lors de la tâche d’empan numérique. Toutefois,
contrairement à l’hypothèse de départ, l’application de la SMT a ralenti les
temps de réactions pour les trois tâches. Puisque les mots étaient présentés de
manière orthographique, il est possible que la conversion de l’information
orthographique en représentation phonologique requière que l’information soit
maintenue en mémoire, recrutant la composante de stockage. Afin d’éliminer
cette possibilité, les auteurs ont utilisé le même protocole de stimulation et les
mêmes tâches phonologiques, toutefois en gardant les mots à l’écran jusqu’à
temps que le participant ait répondu. La logique étant qu’en gardant chaque
paire de mots à l’écran, les demandes imposées sur la composante de stockage
seraient minimisées. Toutefois, des résultats similaires à la première étude ont
été observés. Ainsi, il semble que le GSM soit impliqué lors de tâches phonologiques même si les demandes de stockage sont minimisées. Néanmoins, l’utilisation de mots écrits requiert la transformation de codes orthographiques en
codes phonologiques ce qui recrute probablement la composante de stockage
car l’information doit être gardée en mémoire par le biais du mécanisme de
récapitulation articulatoire. En somme, l’utilisation de stimuli visuels requiert la
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MCTv ce qui rend difficile la dissociation des mécanismes impliqués dans le
traitement phonologique (décodage) de ceux impliqués dans la MCTv.
Ces résultats sont similaires à ceux décrits par Stoeckel et collègues
(2009), qui ont démontré que l’application de la SMT au GSM gauche facilitait
la performance des participants lors d’une tâche de jugements d’homophones
(c.-à-d. tâche phonologique) et de jugements de synonymes (c.-à-d. tâche
sémantique ; tâche contrôle) avec des mots présentés visuellement. Contrairement à l’hypothèse de départ que seule la tâche phonologique serait affectée par
la SMT, la tâche sémantique fût également perturbée par la SMT. Les auteurs
ont interprété ces résultats en stipulant que lors de la lecture de mots (processus
requis pour les deux tâches), les participants ont accédé à une représentation
phonologique des sons de chaque mot. Ainsi, la présentation de mots écrits
nécessiterait la conversion de graphèmes en phonèmes, ce qui taxe la composante de stockage phonologique.
Dans le but de caractériser le rôle du GSM lors du traitement phonologique, nous avons utilisé un protocole de SMT jumelé à une tâche de MCTv
(tâche d’empan à rebours de mots et pseudomots) et à une tâche de discrimination (2014). La complexité syllabique a été manipulée en variant la distance sur
l’échelle de sonorité des deux consonnes formant le groupe consonantique dans
l’attaque de la première syllabe. Plus la distance entre deux consonnes est petite
(p. ex. /tr/ versus /pl)/, plus complexe est l’attaque (Clements, Kingston, &
Beckman, 1990 ; Gierut, 2007). L’hypothèse testée était que si le GSM est
impliqué dans le traitement de l’information phonologique, la performance des
participants devrait être perturbée lors de la tâche de MCTv et la tâche de discrimination suite à l’application de la SMT puisque les stimuli auditifs doivent être
traités (conversion de l’information phonétique en information phonologique)
dans les deux cas. Toutefois, si le GSM est impliqué lors du maintien en
mémoire de l’information phonologique, la SMT devrait avoir un plus grand
effet sur la tâche d’empan à rebours que sur la tâche de discrimination puisque
la tâche d’empan à rebours impose de plus grandes demandes sur les mécanismes de MCTv que la tâche de discrimination. Les résultats de cette étude ont
validé cette deuxième hypothèse ; la SMT a ralenti les temps de réactions lors
de la tâche d’empan à rebours mais n’a eu aucun effet sur la tâche de discrimination.
Kirschen et collègues (2006) sont également arrivés à une conclusion
similaire suite à l’analyse des résultats d’une étude utilisant un protocole de
SMT jumelé à une tâche d’empan de pseudomots. Afin de manipuler le degré de
difficulté associé au maintien de l’information phonologique en mémoire, des
71
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listes de pseudomots similaires (p. ex. mell, pell, rell) et des listes de pseudomots dissimilaires (p. ex. shen, floy, stap) ont été utilisées. Cette manipulation
se base sur les résultats de plusieurs études démontrant que lorsque les stimuli
sont phonologiquement similaires, il est beaucoup plus difficile de les garder en
mémoire que lorsqu’ils ne le sont pas. Suite à l’application de la SMT, les
auteurs ont observé une amélioration au niveau de la performance des participants (c.-à-d. diminution des temps de réaction et du nombre d’erreurs) pour les
listes de mots similaires suggérant ainsi que le GSM est impliqué dans le maintien d’information phonologique en mémoire.
En somme, les résultats d’études ayant utilisé la SMT afin de caractériser
le rôle du GSM lors du traitement phonologique et du maintien en mémoire
d’information phonologique démontrent que le GSM est recruté lors du maintien en mémoire d’information phonologique et non lors du traitement d’information phonologique. Afin de détailler plus précisément le rôle du GSM lors du
traitement phonologique, un survol des résultats d’études en neuroimagerie portant sur les corrélats neuronaux de la lecture s’avère nécessaire puisque la lecture requiert de nombreux processus cognitifs (p.ex. MCTv) et langagiers dont
des processus phonologiques (p. ex. conversion de graphèmes en phonèmes) qui
recrutent un réseau distribué de régions incluant le GSM (Bookheimer, Zeffiro,
Blaxton, Gaillard, & Theodore, 1995 ; Graves, Desai, Humphries, Seidenberg,
& Binder, 2010 ; Menard, Kosslyn, Thompson, Alpert, & Rauch, 1996 ; Price,
1998 ; Price, Wise, & Frackowiak, 1996).
♦ La lecture, la dyslexie et le GSM
La lecture est une activité cognitive complexe qui requiert non seulement
des processus phonologiques (p. ex. conversion de graphèmes en phonèmes)
mais également d’autres processus cognitifs (MCTv). Ce qui est particulièrement intéressant dans le cadre de cet article est que selon le modèle de lecture à
double voie (DRD), la reconnaissance de mots écrits repose sur l’existence de
deux voies par lesquelles l’information orthographique peut être traitée ; une
voie lexicale et une voie phonologique (Coltheart, Curtis, Atkins, & Haller,
1993 ; Coltheart & Rastle, 1994 ; Coltheart, Rastle, Perry, Langdon, & Ziegler,
2001). Ainsi, en principe, il est possible de dissocier les mécanismes de lecture
basés sur le traitement phonologique (c.-à-d. conversion de graphèmes en phonèmes) de ceux basés sur le traitement orthographique-lexical lors de la reconnaissance de mots écrits.
La voie lexicale repose sur la reconnaissance visuelle globale des mots
qui sont déjà familiers au lecteur. C’est un processus rapide qui fait appel à des
72
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représentations lexicales gardées en mémoire. La voie phonologique quant à
elle, repose sur la conversion de graphèmes en phonèmes. C’est un processus de
lecture plus lent que celui associé avec la voie lexicale parce que le décodage
orthographique est une opération séquentielle, car après la conversion de chaque
graphème en phonème, celui-ci doit être gardé temporairement en mémoire
jusqu’à ce que tous les graphèmes d’un mot soient convertis.
Une récente méta-analyse démontre que la lecture par la voie phonologique recrute un réseau d’aires localisé dans l’hémisphère gauche dont le GSM
(pour plus de détails, voir : Jobard, Crivello, & Tzourio-Mazoyer, 2003). Par
exemple, Mei et collègues (2014) ont documenté une plus grande augmentation
du niveau d’activation dans le GSM lors d’une tâche de lecture recrutant la voie
phonologique que lors d’une tâche de lecture recrutant la voie lexicale. Afin de
pouvoir identifier les corrélats neuronaux de chacune de ces voies les auteurs
ont appris à deux groupes de participants à lire un langage artificiel basé sur le
Koréan Hangul ; le premier groupe a appris en utilisant la voie lexicale (c.-à-d.
reconnaissance globale) alors que le deuxième groupe a appris en utilisant la
voie phonologique. Roux et collègues (2012) ont démontré en jumelant un protocole de SMT à une tâche de lecture de pseudomot que la stimulation de la portion antérieure et inférieure du GSM gauche interférait avec la lecture par la
voie phonologique, puisque les pseudomots n’ayant aucune représentation lexicale ne peuvent être lus par le biais de la voie lexicale. En somme, les résultats
de ces études suggèrent que le GSM joue un rôle important lors de la lecture par
la voie phonologique.
L’importance du GSM lors du traitement phonologique en lecture est également démontrée par de récentes études en neuroimagerie ayant rapporté des
anomalies structurelles et fonctionnelles au niveau du GSM chez des individus
dyslexiques par rapport aux individus non dyslexiques. La dyslexie développementale est un trouble d’apprentissage spécifique de la lecture causé par un désordre neurologique qui touche environ 5% à 17% des enfants (Shaywitz, 1998 ;
Shaywitz & Shaywitz, 2003 ; Wolf, 2008). La dyslexie développementale se
manifeste par des difficultés de lecture chez des enfants avec des capacités intellectuelles normales, en l’absence de déficit sensoriel ou visuel. Les difficultés
de lecture de mots ou de textes sont généralement associées à un déficit au
niveau du traitement phonologique. Plus précisément le déficit phonologique
observé serait lié au décodage phonologique ou à l’assemblage phonologique
lors de la lecture (c.-à-d. maintien en mémoire des représentations phonologiques) (Stanovich, 1988). Des études de neuroimagerie ont identifié des anomalies structurelles au niveau du GSM chez des individus dyslexiques. Par
exemple, une réduction au niveau de la matière grise dans le lobe pariétal infé-
73
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rieur gauche (incluant une portion du SMG, Hoeft et al., 2007) et dans le GSM
droit (Kronbichler et al., 2008) a été observée chez des individus dyslexiques.
De plus, des études d’IRMf ont également documenté des différences au niveau
des patrons d’activation observés chez des individus dyslexiques lorsque ceux-ci
sont comparés à des contrôles (c.-à-d. des individus n’ayant aucun trouble de
lecture). Par exemple, chez les enfants dyslexiques, lors de tâches de lecture,
aucune activation n’est observée dans la partie postérieure du gyrus supérieur
temporale et du cortex pariétal inférieur gauche (incluant le GSM) par rapport à
des enfants non dyslexiques (Hoeft et al., 2007 ; Pugh et al., 2000 ; Shaywitz et
al., 1998 ; Simos, Breier, Fletcher, Bergman, & Papanicolaou, 2000 ; Temple et
al., 2001). De manière similaire, Kast et collègues (2011) ont observé lors d’une
tâche de décision lexicale une baisse au niveau de l’activation dans le GSM
gauche chez des individus dyslexiques comparé à des individus non dyslexiques. Ruff et collègues (2002) ont également observé une baisse au niveau
de l’activation dans le GSM (bilatéral) chez des individus dyslexiques lors de la
perception de contrastes phonémiques (p.ex.: ma-na, ma-ma).
En somme, les résultats d’études portant sur les mécanismes de lecture et
la dyslexie démontrent que le GSM est une région importante pour la lecture,
particulièrement lorsque la voie phonologique est utilisée. Toutefois, puisque la
lecture par la voie phonologique recrute non seulement des mécanismes de traitement phonologique (p. ex. conversion de graphèmes en phonèmes) et des
mécanismes de MCTv, il est difficile de déterminer quel rôle le GSM joue lors
de la lecture.
♦ Discussion
L’objectif de cet article était de faire état des connaissances concernant le
rôle du GSM dans le traitement phonologique. Notre analyse de la littérature
montre que le GSM est recruté non seulement lors de tâches impliquant des
mécanismes de traitement phonologique lors de la reconnaissance de mot à
l’oral et à l’écrit, mais également lors de tâches ciblant les mécanismes de
MCTv. Afin de mieux comprendre le rôle du GSM, une distinction entre le traitement phonologique (c.-à-d. décodage) et la MCTv (c.-à-d. le maintien d’information phonologique en mémoire une fois que celle-ci fut encodée) a été faite.
Malgré la diversité de stimuli utilisés dans la littérature, une possibilité est que
le GSM est impliqué dans le maintien de l’information phonologique en
mémoire. Par exemple, dans la majorité des tâches phonologiques présentées
dans cet article, les participants devaient émettre un jugement. Afin de pouvoir
émettre leur jugement, les participants devaient garder en mémoire les stimuli
74
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présentés soit de manière visuelle ou auditive jusqu’à temps qu’ils soient prêts à
répondre. Ainsi, ces tâches taxent les mécanismes impliqués dans le maintien en
mémoire d’information phonologique.
De même, les tâches de lecture ciblant les mécanismes de traitement
associés à la voie phonologique impliquent également la MCTv, puisque la
nature séquentielle du décodage orthographique (c.-à-d. la conversion de graphèmes en phonèmes) nécessite que chaque phonème soit maintenu en mémoire
jusqu’à ce que le stimulus soit entièrement décodé.
Néanmoins, la découverte que le GSM est composé de différentes aires
fonctionnelles pourrait signifier que le GSM est impliqué non seulement lors du
maintien de l’information phonologique en mémoire mais également lors du
décodage phonologique. En effet de récentes études ont démontré que le GSM
est composé de sous-régions (voir Figure 1 : Caspers et al., 2008 ; Caspers et
al., 2006). Plus spécifique, ces études ont démontré que ces sous-régions se distinguent par leur composition cellulaire (c.-à-d. différences au niveau de l’arrangement des cellules) et leur patron de connectivité avec d’autres régions. Cinq
sous-régions (aires PFop, PFt, PF, PFm et PFcm) formeraient ainsi le GSM (voir
Figure 1 ; Caspers et al., 2008 ; Caspers et al., 2006). Par exemple, en étudiant
les types de récepteurs cellulaires retrouvés dans chacune des sous-régions, il a
été démontré que la portion antérieure du GSM (GSMa) est connectée avec le
lobe frontal, le cortex pré-moteur, le cortex moteur et le cortex somatosensoriel ;
la portion postérieure du GSM (GSMp) a une connectivité similaire à celle de la
portion antérieure du GSM en plus d’avoir des connections avec des régions du
lobe pariétal postérieur, du cortex temporal et du cortex visuel (Caspers et al.,
2011 ; Catani, Jones, & Fytche, 2005 ; Rushworth, Behrens, & Johansen-Berg,
2006 ; Tomassini et al., 2007). Ainsi, la portion antérieure et la portion postérieure du GSM pourraient être recrutées par différents mécanismes. Cette hypothèse est congruente avec le fait que dans la majorité des études en IRMF il est
difficile de dissocier les mécanismes de traitement phonologique (c.-à-d.
conversion de graphèmes en phonèmes) des autres mécanismes cognitifs recrutés par la tâche expérimentale (p. ex. MCTv) et que le locus d’activité observé
dans le GSM lors de ces études varie. Cette variation pourrait être expliquée en
tenant compte que différents processus cognitifs (traitement phonologique,
MCTv) sont taxés de manière différentielle selon les demandes de la tâche. De
plus, puisque la région du GSM stimulée lors d’études de SMT varie également,
une hypothèse qui ne peut être ignorée est que le GSM soit impliqué lors du
décodage phonologique et dans le maintien d’information phonologique en
mémoire puisque les sous-régions pourraient être recrutées par différentes fonctions.
75
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Une récente étude a démontré, au moyen de la SMT, que le GSMa était
impliqué lors du maintien d’information en mémoire et non de décodage phonologique. En utilisant une tâche ciblant le décodage phonologique (tâche de discrimination) et une tâche ciblant le décodage phonologique et la MCTv (tâche
d’empan à rebours de mots et pseudomots), nous avons montré que la SMT du
GSMa affecte la performance lors de la tâche d’empan à rebours mais pas la
tâche de discrimination. Ainsi, les résultats de cette étude suggèrent que le
GSMa est impliqué lors du maintien d’information phonologique en mémoire.
Ces résultats sont congruents avec les résultats d’études qui ont démontré que
les tâches de MCTv recrutent un réseau de régions dont le GSM, le GIF, le cortex prémoteur dorsal, le cortex insulaire antérieur, et le planum temporale, des
régions avec lesquelles le GSMa partage des connections (Koelsch et al., 2009 ;
Sharlene D. Newman, Just, & Carpenter, 2002 ; Schulze, Zysset, Mueller, Friederici, & Koelsch, 2011). Ainsi, si le GSMa est impliqué lors du maintien d’information phonologique en mémoire, il est plausible que le GSMp soit impliqué
lors du traitement phonologique (voir Figure 2).
♦ Conclusion
En somme, la présente revue de littérature démontre que le GSM est une
région très complexe d’un point de vue anatomique et fonctionnel puisque celuici est composé de différentes régions cytoarchitectoniques et qu’il est recruté
lors de tâches de MCTv et de processus phonologiques. Plus précisément, cette
revue de littérature montre l’importance qui devrait être accordée aux différentes méthodes d’investigation, notamment l’IRM, l’IRMf, la SMT, la TÉP,
afin de caractériser le rôle du GSM lors de processus de traitement phonologique et de MCTv. De plus, l’importance de prendre en compte les processus
cognitifs liés aux processus phonologiques lors de certaines tâches, telle que la
MCTv est un point important qui ressort lors de la synthèse des différentes
études en neuroimagerie portant sur les tâches phonologiques, les tâches de
MCTv et les tâches de lecture. En somme, afin de pouvoir caractériser les mécanismes cognitifs associés à la portion antérieure et postérieure du GSM, de plus
amples études utilisant différents outils en neuroimagerie ainsi que des tâches
recrutant à différents degrés des processus phonologiques et des processus de
MCTv avec des stimuli (p.ex. mots, non-mots, syllabes) sont un prérequis. À
notre connaissance il n’existe à ce jour aucune étude de ce type. Les connaissances qui seront générées par ces avancées importantes dans la compréhension
du rôle du GSM lors de tâches langagières auront un impact important sur
l’étiologie complexe reliée à différents troubles (p. ex. troubles de la lecture,
76
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troubles phonologiques, troubles de MCT) afin de cibler des mécanismes de
traitement spécifiques lors d’interventions orthophoniques.
REFERENCES
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La sémantique, la lecture de mots irréguliers et
les lobes temporaux antérieurs
Sabryna Bergeron, Dominique Pichette, Gabrielle Ciquier, Catherine Dubé,
Simona M. Brambati, Maximiliano A. Wilson
Résumé
Dans cette recension des écrits nous présentons les résultats d’études comportementales et
de neuroimagerie mettant en rapport la sémantique et la lecture de mots irréguliers, ainsi
que la sémantique et les lobes temporaux antérieurs (LTA). Plus particulièrement, nous nous
concentrons sur l’atteinte de la lecture à voix haute de mots irréguliers, soit la dyslexie de
surface, chez la variante sémantique de l’Aphasie Primaire Progressive (vsAPP). Cette maladie neurodégénérative débute par l’atrophie des lobes temporaux antérieurs et touche
d’abord la mémoire sémantique. À partir des études comportementales, il est possible de
conclure que la dyslexie de surface est très souvent observée chez des patients atteints de
vsAPP. Ceci semble mettre en avant le rapport entre la dyslexie de surface et la dégradation
de la mémoire sémantique chez ce type de patients. De plus, la nature neurodégénérative
de la vsAPP a permis d’établir le rapport entre l’atteinte sémantique et les LTA. Les études
de neuroimagerie menées auprès des participants sains ont aussi mis en évidence le rôle
des LTA lors du traitement sémantique et lors de la lecture de mots irréguliers. Le rôle des
LTA en lecture de mots irréguliers semblerait être celui de la sémantique, plutôt que celui de
la lecture elle-même. En somme, les modèles théoriques et computationnels qui postulent
l’activation sémantique pour la lecture de mots irréguliers permettraient d’expliquer le profil
de lecture et l’atteinte sémantique trouvés en vsAPP, ainsi que le réseau de lecture de mots
irréguliers qui inclut le LTA gauche.
Mots clés : lecture, sémantique, variante sémantique de l’Aphasie Primaire Progressive,
lobes temporaux antérieurs, neuroimagerie, maladie dégénérative.
Rééducation Orthophonique - N° 260 - décembre 2014
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Semantics, irregular word reading and the anterior temporal lobes
Abstract
This review presents the results of behavioural and neuroimaging studies that address the
relationship between semantics, irregular word reading and the anterior temporal lobes
(ATLs). In particular we focused on acquired surface dyslexia, i.e., irregular word reading
impairment , in patients suffering from the semantic variant of primary progressive aphasia
(svPPA). svPPA is a neurodegenerative disease that occurs following the atrophy of the ATLs.
This disease is early characterized by semantic memory impairments. Taken together, behavioural studies show that svPPA patients often suffer from acquired surface dyslexia. This
pattern highlights the relationship between acquired surface dyslexia and semantic knowledge degradation in svPPA. Moreover, the neurodegenerative nature of svPPA has pointed
out to the relationship between semantic impairment and the ATLs. Neuroimaging studies in
healthy participants have also provided evidence of the role of the ATLs in semantic processing and irregular word reading. The ATLs seem to be related to semantic processing in irregular word reading, more than to irregular word reading itself. In sum, the results of the studies reviewed here provide evidence for theoretical and computational models that predict
semantic activation during irregular word reading. This semantic contribution can explain
the profile of surface dyslexia in svPPA, as well as the brain network that sustains the processing of this type of words and that includes the left ATL.
Key Words : reading, semantics, semantic variant of primary progressive aphasia, anterior
temporal lobes, neuroimaging, degenerative disease.
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Sabryna BERGERON 1,2
Dominique PICHETTE 3
Gabrielle CIQUIER 1
Catherine DUBÉ 4
Simona M. BRAMBATI 1,2
Maximiliano A. WILSON 3,4*
1 Centre de Recherche de l’Institut
Universitaire de gériatrie de Montréal,
Montréal, Québec
2 Département de Psychologie, Université
de Montréal, Montréal, Québec
3 Département de Réadaptation, Université
Laval, Québec, Québec
4 Centre de recherche de l'Institut
Universitaire en Santé Mentale de Québec
(CRIUSMQ), Québec, Québec
Correspondance :
Maximiliano A. Wilson, Ph.D.
Département de Réadaptation, Faculté de
Médecine - Pavillon Ferdinand-Vandry,
1050, Avenue de la Médecine, Bureau
4483,
Université Laval,
Ville de Québec
Québec G1V 0A6, Canada
Courriel :
[email protected]
D
e nos jours, il n’y a pas d’accord entre les modèles computationnels de
lecture concernant le rôle de nos connaissances du monde, dite mémoire
sémantique, et la lecture de mots d’exception ou irréguliers. Depuis les
dernières décennies, les chercheurs ont montré beaucoup d’intérêt pour une
maladie neurodégénérative, la variante sémantique de l’Aphasie Primaire
Progressive (vsAPP), qui commence par l’atrophie des lobes temporaux antérieurs (LTA). La vsAPP, autrefois connue sous le nom de démence sémantique,
est traditionnellement reconnue comme un syndrome clinique caractérisé par une
atteinte relativement sélective de la mémoire sémantique qui serait restreinte au
début de la maladie aux concepts et connaissances du monde. La plupart des
patients atteints de la vsAPP développent des troubles de lecture de mots irréguliers, soit une dyslexie de surface. Cette maladie a donc permis d’étudier le lien
entre la sémantique, la lecture de mots irréguliers et les LTA.
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Sur le plan du langage, l’atteinte sémantique de la vsAPP entraîne une
anomie importante de même qu’une altération de la compréhension des mots
(Gorno-Tempini et al., 2011 ; Hodges, Martinos, Woollams, Patterson, &
Adlam, 2008 ; Mesulam, Grossman, Hillis, Kertesz, & Weintraub, 2003). Quant
à l’expression spontanée, les mots moins fréquents sont substitués par des mots
plus familiers, généralement ceux de la catégorie superordonnée (par exemple,
« animal » au lieu de « chat »). De plus, un nombre important de paraphasies
sémantiques sont décelables. Les déficits de la mémoire sémantique mènent
aussi à une reconnaissance déficitaire des objets au niveau de différentes modalités, notamment les modalités visuelle, tactile, olfactive et même gustative
(Adlam et al., 2006 ; Bozeat, Lambon Ralph, Patterson, Garrard, & Hodges,
2000 ; Hodges, Patterson, Oxbury, & Funnell, 1992 ; Luzzi et al., 2007 ; Snowden, Goulding, & Neary, 1989). La capacité d’identifier correctement des objets
est fortement dépendante de facteurs tels que le type de matériel (objet réel versus une représentation picturale), la familiarité de l’objet ainsi que sa typicalité
(Hodges & Patterson, 2007 ; Mayberry, Sage, & Ralph, 2011). De plus, la difficulté à reconnaitre les visages connus peut être présente (Blazely, Coltheart, &
Casey, 2005 ; Hodges et al., 1992). Toutefois, le langage reste fluent, bien que
vide, et la phonologie et la syntaxe demeurent adéquates (Blazely et al., 2005).
Les habiletés non verbales de résolution de problèmes, les habiletés perceptuelles ainsi que la mémoire épisodique sont préservées (Blazely et al., 2005 ;
Hodges et al., 1992).
Les objectifs de cet article sont de : 1) présenter l’état des connaissances
actuelles sur la lecture en vsAPP, tout en soulignant brièvement les répercussions de ces données sur la conceptualisation des processus impliqués dans la
lecture à voix haute ; et 2) évaluer le rôle des LTA au niveau du système sémantique à partir des résultats provenant de la vsAPP et de la neuroimagerie.
♦ La sémantique et la lecture de mots irréguliers
Dès les premières descriptions de la vsAPP, des particularités sont notées
quant à la lecture à voix haute de ces patients. Warrington (1975) remarque déjà
que les patients éprouvent davantage de difficulté à lire les mots divergeant des
règles phonémiques habituelles de l’anglais. De plus, compte tenu de l’atteinte
relativement sélective de la mémoire sémantique, la vsAPP constitue, selon plusieurs, une opportunité unique d’étudier l’implication de la sémantique dans différents processus cognitifs, dont la lecture à voix haute (McKay, Castles, Davis,
& Savage, 2007 ; Patterson et al., 2006). Ainsi, bon nombre d’écrits se penchent
sur la relation entre la vsAPP et la lecture (voir Coltheart, Saunders, & Tree,
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2010 pour une recension). La majorité de ceux-ci pointent vers un profil de dyslexie de surface, c’est-à-dire, des difficultés en lecture de mots irréguliers ou
d’exception avec une tendance à la régularisation de ce type de mots (par exemple, lire « orCHidée » en rimant avec « CHocolat »). Cependant, ce n’est pas le
seul profil ayant été décrit en vsAPP, comme la dyslexie globale (McKay et al.,
2007). D’ailleurs, quelques études de cas unique chez des patients vsAPP ont
trouvé une lecture de mots irréguliers préservée en présence de déficits sémantiques (Carlomagno, Colombo, Lavarone, Buongiorno, & Parlato, 1989 ; Cipolotti & Warrington, 1995 ; Hosogi Senaha, Caramelli, Nitrini, Charchat-Fichman, & Weekes, 2006 ; Schwartz, Marin, & Saffran, 1979 ; Wilson &
Martínez-Cuitiño, 2012).
Toutefois, à l’heure actuelle, le profil de lecture le plus souvent associé à
la vsAPP dans la littérature demeure la dyslexie de surface. En effet, en anglais,
plusieurs auteurs ont présenté des cas de patients atteints de vsAPP ayant : 1)
une lecture des mots réguliers relativement préservée ; 2) une lecture des mots
irréguliers altérée ; et 3) une tendance à commettre des erreurs de régularisation
(Funnell, 1996 ; Graham, Hodges, & Patterson, 1994 ; Patterson & Hodges,
1992 ; Ward, Stott, & Parkin, 2000). Quant à Woollams, Lambon-Ralph, Plaut,
& Patterson (2007), ils ont regroupé les observations en lecture de 51 patients
atteints de vsAPP pour retrouver, de façon générale, le même profil. En plus de
montrer un effet de régularité (avantage des mots réguliers par rapport aux mots
irréguliers), ces études dénotent un effet de fréquence plus marqué pour les mots
irréguliers. Qui plus est, Woollams et al. (2007) démontrent une corrélation
entre le degré d’atteinte sémantique et la performance en lecture.
Plusieurs études s’intéressent également aux temps de latence en lecture
en plus de la performance (Cumming, Patterson, Verfaellie, & Graham, 2006 ;
Gold et al., 2005 ; McKay et al., 2007). Ces études démontrent des temps de
latence significativement augmentés par rapport aux contrôles chez les patients
avec vsAPP et dyslexie de surface. Ces patients ont aussi un effet de fréquence
et un effet de longueur disproportionnés (Cumming et al., 2006 ; Gold et al.,
2005). Cependant, les patients avec vsAPP sans dyslexie de surface (ou avec
dyslexie globale) ont aussi des temps de latence augmentés (McKay et al.,
2007). Cette augmentation des temps de latence survient même pour les mots
réguliers. Ainsi, même si les patients réussissent à bien lire ce type de mots, cela
leur coûte en efficacité car la lecture est plus lente (Gold et al., 2005).
Par ailleurs, des études sur la lecture en vsAPP ont aussi été menées dans
des langues autres que l’anglais. L’importance des résultats provenant d’études
translinguistiques est liée au fait que celles-ci permettent d’évaluer l’universalité
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du rapport, par exemple, entre l’atteinte sémantique de la vsAPP et la dyslexie
de surface. En japonais, le système orthographique est considérablement différent de celui de l’anglais. En effet, pour lire, le lecteur doit se référer à deux
codes écrits : le kana, utilisé pour les mots fonctionnels et les inflexions, et le
kanji, utilisé pour les noms et les radicaux des verbes et adjectifs. L’orthographe
des kana est régulière et chaque caractère correspond à un seul mora (unité phonologique). Les mots kanji, quant à eux, présentent une orthographe avec différents degrés de régularité. Certains sont consistants, c’est-à-dire, composés de
caractères n’ayant qu’une seule prononciation, d’autres sont inconsistantstypiques, soit composés de caractères ayant plusieurs prononciations, mais dont
la prononciation correcte dans ce mot domine, et enfin, d’autres sont inconsistants-atypiques, c’est-à-dire composés de caractères ayant plusieurs prononciations et dont l’un des caractères doit être prononcé selon une prononciation
minoritaire (Fushimi, Komori, Ikeda, Lambon-Ralph, & Patterson, 2009). Ainsi,
Fushimi et al. (2003), Sakurai et al. (2006) et Fushimi et al. (2009) décrivent
plusieurs cas de patients atteints de vsAPP chez qui la lecture des kana est largement préservée, alors que celle des kanji est marquée par un effet significatif de
fréquence, de consistance ainsi qu’une interaction entre ces deux variables.
Moins les mots sont consistants plus les erreurs commises sont de type
«LARC» (Legitimate Alternative Reading Component). Les erreurs de type
«LARC» consistent à assigner à une composante une prononciation correcte
dans un autre mot, mais inappropriée pour celui-ci. Ainsi, elles englobent les
erreurs de régularisation tout en étant plus larges que celles-ci pour justifier que
la consistance, à la différence de la dichotomie régulier/irrégulier, est un continuum. Cette catégorie d’erreurs peut s’appliquer aisément aux systèmes orthographiques sans correspondances grapho-phonémiques (Fushimi et al., 2009 ;
Wu, Liu, Sun, Chromik, & Zhang, 2014). Finalement, la performance en lecture
de mots inconsistants, et surtout inconsistants-atypiques, est corrélée au degré
d’atteinte sémantique (Fushimi et al., 2009). Les patients japonais atteints de
vsAPP démontrent de façon soutenue un profil de dyslexie de surface.
En coréen, bien qu’un profil différent soit observé selon le type de matériel à lire -lecture des hangul (phonogrammes, comparables au kana en japonais)
préservée, lecture des hanja (idéogrammes, comparables au kanji en japonais)
altérée - une dyslexie de surface n’explique pas ce profil, selon Suh et al.
(2010). En effet, il n’existe pas de règles qui permettent de lire les hanja, et la
très grande majorité de ceux-ci n’ont qu’une seule prononciation même s’ils
peuvent avoir plusieurs sens. Ainsi, les processus impliqués dans la lecture des
hanja ressembleraient davantage à ceux de la dénomination et requerraient
d’emblée le passage par la sémantique (Suh et al., 2010).
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Quant au chinois, une seule description détaillée de la lecture chez un
patient atteint de vsAPP est répertoriée (Wu et al., 2014). Le système d’orthographe chinois est logographique, c’est-à-dire que les caractères représentent un
concept plutôt que des phonèmes. Toutefois, un système de radicaux phonétiques permet de déterminer la prononciation des caractères à différents degrés.
Ainsi, un caractère est considéré comme étant régulier si son radical phonétique
a la même prononciation que le caractère comme un tout, et irrégulier si son
radical phonétique n’a pas la même prononciation que le caractère comme un
tout (Weekes & Chen, 1999). Pour ces caractères irréguliers il y a une correspondance imprévisible - qui ne suit aucune règle - entre les radicaux et la prononciation du caractère. Le patient de Wu et al. (2014) présente une difficulté
particulière à lire les caractères irréguliers par rapport aux réguliers, et ce, de
façon plus marquée pour les caractères de basse fréquence. Plusieurs de ses
erreurs sont des LARC, bien que des erreurs visuelles soient aussi commises.
Une erreur était de nature visuelle lorsque la prononciation pour un caractère
présenté était celle d’un autre caractère visuellement similaire. Ce patient est
également en mesure de lire des pseudocaractères en se basant sur les radicaux
phonétiques. En somme, ce profil est compatible avec la dyslexie de surface
(Wu et al., 2014).
Les multiples observations d’une co-occurrence entre la vsAPP et la dyslexie de surface ont mené plusieurs auteurs à proposer une relation causale entre
ces deux entités ainsi qu’une hypothèse explicative (Funnell, 1996 ; Patterson &
Hodges, 1992 ; Ward et al., 2000 ; Woollams et al., 2007). Pour tous ces auteurs,
alors que les mots réguliers peuvent être lus par des processus non lexicaux, les
mots irréguliers nécessitent, d’une manière ou d’une autre, un apport de la
sémantique.
Par exemple, pour Funnell (1996), des connaissances sémantiques résiduelles sur le mot irrégulier à lire sont nécessaires pour faire pencher le choix
vers l’entrée lexicale activée (prononciation irrégulière) plutôt que la réponse
générée par la voie non lexicale (prononciation régularisée), ce qui constitue un
biais lexical. Pour Ward et al. (2000), tenants de l’hypothèse de la sommation
des sources (Hillis & Caramazza, 1991 ; Miceli, Capasso, & Caramazza, 1994),
l’information des voies lexico-sémantique et non lexicale s’additionne afin de
sélectionner la représentation lexicale à produire. En effet, Hillis et Caramazza
(1991) ont postulé que la lecture correcte de mots irréguliers peut être faite par
l’interaction entre les voies lexico-sémantique et non lexicale. L’intégration de
ces deux sources pourrait donc amener à la lecture correcte de mots irréguliers.
Finalement, l’hypothèse qui découle des modèles connexionnistes de lecture
(Plaut, McClelland, Seidenberg, & Patterson, 1996) qui est reprise dans plu-
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sieurs écrits, notamment Fushimi et al. (2009), stipule trois composantes intimement inter-reliées impliquées dans la lecture : la phonologie (P), l’orthographe
(O) et la sémantique (S). Afin de maximiser son efficacité, le système de lecture
développe la division du travail suivante : la voie O P se spécialise pour les correspondances fréquentes et consistantes entre les formes orthographiques et
phonologiques qu’elle apprend via l’exposition, tandis que la voie O S P supporte la lecture des mots irréguliers et encore plus ceux de basse fréquence
(Woollams et al., 2007). Ainsi, une atteinte de la sémantique déstabilise la voie
O S P et fait reposer la lecture davantage sur la voie O P, créant ainsi le profil de
dyslexie de surface. Les variations interindividuelles dans la division prémorbide du travail expliquent, selon Woollams et al. (2007), les quelques observations d’atteinte de la sémantique sans dyslexie de surface. Selon Woollams et al.
(2007), alors que la sémantique continue de se dégrader, notamment en vsAPP,
un profil de dyslexie de surface devrait invariablement apparaître.
Toutefois, les défenseurs du modèle Dual-Route-Cascaded (DRC) (Coltheart, Rastle, Perry, Langdon, & Ziegler, 2001) proposent une tout autre explication à cette association fréquente entre la dyslexie de surface et la vsAPP
(Blazely et al., 2005 ; Coltheart et al., 2010). Selon eux, l’association de ces
deux entités est secondaire à la contiguïté neuroanatomique des régions soutenant les processus sémantiques et les processus de lecture. Selon le modèle
DRC, la lecture à voix haute s’effectue via deux voies : la voie non lexicale
basée sur les correspondances graphophonémiques et la voie lexicale non
sémantique basée sur des représentations orthographiques globales des mots qui
activent leurs contreparties phonologiques (Coltheart et al., 2010). Bien qu’une
voie lexicale sémantique soit aussi proposée, son apport à la lecture à voix haute
est traditionnellement jugé minimal, d’où le « dual » du DRC (McKay et al.,
2007). Ainsi, Coltheart et al. (2010) revisitent les données de Woollams et al.
(2007) en leur donnant un tout autre éclairage. Pour eux, les résultats des
patients de ce groupe suggèrent plutôt trois phases distinctes dans la lecture en
vsAPP : la lecture intacte, la dyslexie de surface et finalement la dyslexie globale où tous les types de mots et non-mots sont atteints. Ces phases témoigneraient de la progression de la maladie aux diverses composantes du système de
lecture. Initialement, seul le système sémantique est atteint et, en accord avec le
DRC, la lecture à voix haute demeure intacte. Par la suite, la voie lexicale non
sémantique est atteinte, ce qui cause la dyslexie de surface. Finalement, une
atteinte de la voie non lexicale se surajoute occasionnant une dyslexie globale
(Coltheart et al., 2010). En accord avec cette explication, dans le groupe de
Woollams et al. (2007) ainsi que dans plusieurs autres études, on retrouve des
patients qui, lorsque considérés individuellement, ne se conforment pas au profil
90
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de dyslexie de surface pure, soit parce qu’ils ont une lecture intacte malgré l’atteinte sémantique (Blazely et al., 2005 ; Cipolotti & Warrington, 1995 ; M. Wilson & Martínez-Cuitino, 2012), soit parce que la lecture des mots réguliers et/ou
des non-mots est également altérée (Graham et al., 1994 ; Graham, Patterson, &
Hodges, 2000 ; McKay et al., 2007 ; Noble, Glosser, & Grossman, 2000).
Si, comme le suppose le modèle connexionniste, l’atteinte sémantique
cause la dyslexie de surface, alors tous les patients ayant une atteinte sémantique,
notamment en vsAPP, devraient avoir ce profil. Or plusieurs études décrivent, tant
en anglais (Blazely et al., 2005 ; Cipolotti & Warrington, 1995) que dans d’autres
langues, dont l’espagnol (M. Wilson & Martínez-Cuitino, 2012), des patients
ayant une atteinte sémantique substantielle sans dyslexie. À l’encontre de l’hypothèse de sommation des sources (Hillis & Caramazza, 1991) ou de celle de biais
lexical (Coltheart et al., 2010), ces patients n’arrivent pas à démontrer de connaissances sémantiques résiduelles pour de nombreux mots irréguliers qu’ils lisent
pourtant correctement (Blazely et al., 2005 ; M. Wilson & Martínez-Cuitino,
2012). Ces dissociations semblent donc témoigner de l’indépendance de la lecture
à voix haute par rapport à la sémantique et sont un argument de poids pour l’existence d’une voie lexicale directe entre l’orthographe et la phonologie (Blazely et
al., 2005 ; M. Wilson & Martínez-Cuitino, 2012).
Par ailleurs, en examinant de plus près les résultats de plusieurs études,
on remarque que la performance en lecture de mots réguliers et de non-mots est
parfois altérée (Graham et al., 1994 ; N. L. Graham et al., 2000 ; McKay et al.,
2007 ; Noble et al., 2000). Cette atteinte, bien que souvent de moindre importance que celle des mots irréguliers, ne peut s’expliquer dans aucun modèle par
une atteinte de la sémantique seule. Ainsi, il appert que d’autres composantes du
système de lecture sont atteintes en vsAPP (Graham et al., 1994 ; McKay et al.,
2007).
Deux autres observations viennent à nouveau appuyer la thèse de l’implication de la sémantique en lecture à voix haute. Il s’agit de l’effet item-spécifique (Funnell, 1996 ; Graham et al., 1994), ainsi que du profil d’atteinte similaire à travers différentes tâches aux composantes non sémantiques diverses
(Patterson et al., 2006). L’effet item-spécifique consiste à constater une corrélation entre les items réussis/manqués entre les tâches de lecture et celles de compréhension, et suggère une relation fonctionnelle entre la compréhension et la
lecture. En effet, il est difficile d’expliquer que les mêmes mots soient atteints
dans les deux types de tâches si la sémantique n’est pas impliquée dans la lecture (McKay et al., 2007). Or les études de Graham et al. (1994) et de Funnell
(1996) observent toutes deux un effet item-spécifique pour les mots irréguliers,
91
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tandis que McKay et al. (2007) observent des effets item-spécifique pour certains patients sur les mots réguliers et irréguliers quant aux latences, et sur les
mots irréguliers quant à la performance.
Par ailleurs, Patterson et al. (2006) démontrent que plusieurs tâches généralement considérées comme « présémantiques » partagent le même type d’atteinte que la lecture à voix haute en vsAPP. Bien qu’elles impliquent des processus hautement différents, l’étude de la lecture, l’écriture sous dictée, la décision
lexicale, la décision d’objet, le dessin et la génération d’inflexion verbale montrent toutes le patron suivant : 1) une atteinte prédominante aux items atypiques
(par exemple, un mot irrégulier qui ne suit pas la règle de la langue ou une
phrase comme « un singe avec les oreilles de grande taille », qui est inusitée car
la plupart des singes et des animaux ont des petites oreilles) par rapport aux
typiques (par exemple, un mot régulier qui suit les règles de la langue ou une
phrase comme « un éléphant avec des grandes oreilles », qui est typique puisque
ce trait est caractéristique des éléphants), plus marquée pour ceux de basse fréquence (interaction entre typicalité et fréquence), 2) une tendance (dans les
tâches expressives) à produire les items atypiques selon une forme plus typique
(par exemple, un éléphant avec des petits oreilles, comme la plupart des animaux), erreur similaire aux LARC, 3) et une performance sur les items irréguliers ou atypiques corrélée au degré d’atteinte sémantique (Patterson et al.,
2006). Il apparaît difficile de réconcilier ces données avec l’hypothèse que la
lecture est atteinte par contiguïté anatomique en vsAPP. Expliquer que ces six
tâches, dont les processus non sémantiques sont distribués à travers différentes
régions cérébrales, aient parallèlement le même patron d’atteinte nécessite un
rôle de la sémantique et donc une influence de sa dégradation dans ces tâches
(Patterson et al., 2006).
En somme, les études comportementales montrent que bien que la dyslexie de surface soit très fréquemment observée chez des patients atteints de
vsAPP, et ce, dans plusieurs langues, d’autres profils de lecture demeurent possibles. En effet, certains patients semblent conserver une lecture intacte malgré
une importante atteinte sémantique, alors que d’autres présentent rapidement
une atteinte plus généralisée des processus de lecture. Ces observations, sans
nier l’implication possible de la sémantique en lecture à voix haute, suggèrent
qu’elle n’est pas indispensable pour la lecture des mots, mêmes irréguliers, chez
certains, et que, même en vsAPP, des atteintes surajoutées aux autres composantes de lecture peuvent venir compliquer le tableau.
Autre que l’atteinte sémantique et les difficultés de lecture de mots irréguliers, les études qui utilisent la neuroimagerie permettent d’étudier le rôle des
92
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LTA, structure atrophiée chez les patients atteints de vsAPP, dans la sémantique
et, en conséquence, dans la lecture de mots irréguliers. Ce type d’études sera
abordé dans la prochaine section.
♦ La sémantique et les lobes temporaux antérieurs
Dans les dernières décennies, la neuroimagerie a permis d’avancer nos
connaissances concernant l’organisation cérébrale des différentes fonctions cognitives. L’imagerie structurelle est utilisée pour identifier, localiser et mesurer
les différentes parties du système nerveux central. Dans le cadre de la recherche
en neurosciences cognitives avec des populations neurologiques, l'imagerie
structurelle apporte des éléments critiques permettant de mettre en relation les
observations cliniques et le profil structurel du patient. En déterminant quelle
atteinte cérébrale correspond à un déficit cognitif particulier, il est possible
d'établir que la région cérébrale endommagée interfère avec le mécanisme sousjacent. L’imagerie fonctionnelle, au contraire, permet d’étudier in vivo le fonctionnement du cerveau et d’identifier les réseaux neuronaux impliqués lors de
différentes tâches cognitives, soit dans un état de repos, en mesurant le signal
produit par l’activité cérébrale. L’utilisation traditionnelle de la neuroimagerie
dans un contexte de recherche en neurosciences cognitives consiste à faire effectuer une tâche cognitive à un participant en vue d’identifier les régions cérébrales activées par la tâche administrée (pour plus d’information sur le sujet,
voir l’article de Coll, Blais-Michaud, & Jackson, dans ce numéro).
Les études en neuroimagerie structurelle menées avec des patients atteints
de la vsAPP, ainsi que celles en neuroimagerie fonctionnelle avec des participants sains, semblent souligner l’implication du lobe temporal antérieur dans la
lecture des mots irréguliers. Les études utilisant la neuroimagerie qui s’intéressent à la vsAPP démontrent notamment que la sévérité des déficits lors de la
lecture de mots irréguliers corrèle avec la sévérité de l’atrophie des LTA (Brambati, Ogar, Neuhaus, Miller, & Gorno-Tempini, 2009). En effet, cette région
spécifique semble démontrer une activation significative durant la lecture de
mots irréguliers en français chez des participants sains durant un protocole
d’imagerie par résonnance magnétique fonctionnelle (IRMf) (M. Wilson et al.,
2012). Ainsi, il y aurait une relation entre le LTA gauche et la lecture de mots
irréguliers. Cependant, il demeure important de mentionner que le rôle spécifique du LTA au niveau des habiletés de lecture reste encore controversé.
La perte graduelle des connaissances conceptuelles formant la mémoire
sémantique en vsAPP serait principalement associée à une atrophie asymétrique
des LTA, généralement plus sévère dans l’hémisphère gauche, ou à un métabo-
93
texte 260_Mise en page 18/12/14 15:28 Page94
lisme réduit au niveau de cette même région (Diehl et al., 2004 ; Galton et al.,
2001 ; Gorno Tempini et al., 2004 ; Hodges et al., 1992 ; Mummery et al.,
2000 ; Rabinovici et al., 2008 ; Rosen et al., 2002).
Les études portant sur la vsAPP et les autres deux types d’Aphasie Primaire Progressive (APP), soit les variantes non fluente et logopénique, et la
démence de type Alzheimer, entre autres, utilisant la neuroimagerie suggèrent
qu’il existe une forte corrélation entre l’atteinte à l’intégrité des LTA et le développement de symptômes. La majorité de ces études utilise une mesure fondée
sur la morphométrie de voxel (VBM), une technique d’analyse basée sur l’imagerie par résonance magnétique (IRM). La VBM est une méthode permettant
une comparaison entre voxels de la concentration ou du volume local des tissus
cérébraux (substance grise ou blanche) soit au sein d’un groupe, soit entre plusieurs groupes. Elle permet aussi de mettre en évidence les corrélations entre
ces variables et des variables démographiques et/ou cliniques (âge, sexe, sévérité des symptômes, etc.) (Ashburner & Friston, 2000). Les études utilisant la
technique VBM montrent que le niveau d’atrophie des LTA corrèle avec le
niveau de performance, notamment dans une tâche de dénomination (Amici et
al., 2007 ; Brambati et al., 2006), avec les habiletés sémantiques (Butler, Brambati, Miller, & Gorno-Tempini, 2009 ; Joubert et al., 2010) et le contenu lexical
en expression spontanée (S. Wilson et al., 2010). Aussi, il a été rapporté que le
degré de progression de l’atrophie des LTA mesurée par la morphométrie basée
sur les tenseurs - une technique d’imagerie mesurant l’atrophie ou le degré de
perte de tissus dans la structure du cerveau de façon longitudinale ou transversale - corrèle avec les changements du niveau de compréhension de mots durant
la première année suivant le diagnostic (Brambati et al., 2009).
Jusqu’à maintenant, la littérature semble donc indiquer que les LTA
jouent un rôle majeur dans la sémantique. En accord avec le modèle du « hub »
sémantique, les LTA joueraient un rôle central au niveau de la sémantique en
combinant les informations des aires sensorielles et motrices pour former une
représentation sémantique amodale (Hoffman, Evans, & Lambon Ralph, 2014 ;
Patterson, Nestor, & Rogers, 2007 ; Rogers et al., 2004).
L’implication des LTA a aussi été testée chez des participants en santé
avec la neuroimagerie fonctionnelle. Cependant, de nombreuses études ne trouvent pas l'implication du LTA durant l’exécution d’une tâche sémantique chez
des participants sains (Chee, Westphal, Goh, Graham, & Song, 2003 ; Demb et
al., 1995 ; Denkova, Botzung, & Manning, 2006 ; Gold et al., 2006 ; Mechelli,
Sartori, Orlandi, & Price, 2006 ; Wible et al., 2006). Cette contradiction trouvée
entre les patients et les participants sains a mené certains chercheurs à conclure
94
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que les substrats neuronaux critiques pour la mémoire sémantique se retrouvent
à l’extérieur des LTA (Catani & Jones, 2005 ; Martin, 2007).
Par conséquent, Visser, Jefferies, & Lambon-Ralph (2010) ont mené une
méta-analyse afin d’élucider les causes éventuelles de cette disparité entre les
résultats. De façon plus précise, ils ont porté une attention particulière aux facteurs méthodologiques (par exemple, le type de technique de neuroimagerie, de
tâche de base pour la soustraction de l’activation, etc.) qui auraient pu influencer les résultats, notamment au niveau des LTA. La méta-analyse inclut des
études utilisant la tomographie par émission de positrons (TEP) et d'autres utilisant l’IRMf. L’IRMf, comme la TEP, sont des techniques de neuroimagerie
fonctionnelle permettant de visualiser, de façon indirecte, l'activité neuronale
cérébrale.
Ainsi, ces auteurs ont démontré que les études utilisant la TEP étaient
plus susceptibles de révéler une activation des LTA, comparativement aux
études utilisant l’IRMf. Ceci serait expliqué par le fait qu’il semble être plus difficile d’obtenir un signal BOLD (Blood Oxygen Level Dependant) significatif
provenant du LTA, dû à la proximité des os et des sinus remplis d’air au niveau
des structures temporales. Ces résultats sont cohérents avec ceux obtenus par
Devlin et al. (2000), où une activation significative des LTA durant l’exécution
d’une tâche de catégorisation sémantique a été détectée en utilisant la TEP, et
non pas par l’IRMf.
Ces résultats indiquent que l’utilisation d’une correction de la distorsion,
et/ou une optimisation des paramètres d’acquisition sont nécessaires pour obtenir un signal BOLD valide au niveau des LTA et pour étudier l’implication de
cette région cérébrale au niveau du système sémantique par le biais de l’IRMf.
En effet, en utilisant un paradigme IRMf corrigé pour la distorsion, Embleton,
Haroon, Morris, Lambon-Ralph, & Parker (2010) ont réussi à détecter une activation des LTA en utilisant la même tâche que Devlin et al. (2010). De plus, des
études récentes utilisant des paramètres d’acquisitions optimisés ont démontré
une activation significative des LTA associée à l’exécution d’une tâche sémantique impliquant la détection de visages connus (Brambati, Benoit, Monetta,
Belleville, & Joubert, 2010). Plus précisément, Brambati et al. (2010) ont montré que l’activation des LTA est modulée par la spécificité du processus de traitement sémantique : un traitement plus spécifique (par exemple, lors d’une tâche
de catégorisation sémantique plus détaillée, telle que catégoriser un chihuahua
comme étant un chien, vs. une tâche sémantique plus générale, comme catégoriser un chien comme étant un animal) entrainerait une activation plus importante
de cette aire. Ainsi, toutes ces informations suggèrent que les résultats contra-
95
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dictoires obtenus entre les patients et les participants sains seraient dus à des
limitations méthodologiques reliées à l’IRMf et non à une implication réduite
des LTA au niveau du traitement sémantique.
Visser et al. (2010) ont aussi relevé le fait que l’utilisation de stimuli verbaux versus non verbaux (par exemple, des mots vs. des sons environnementaux) ne semble pas influencer l’activation des LTA. Ce résultat renvoie à la
théorie voulant que les LTA soient centraux au traitement sémantique, ce dernier
regrouperait les informations concernant les modalités spécifiques pour former
des représentations sémantiques amodales et déterminer des généralisations
sémantiques afin d’établir, par exemple, qu’une crevette et une coquille sont des
fruits de mer, malgré leurs différences de forme, couleur, goût et nom (Patterson
et al., 2007 ; Rogers et al., 2004). De plus, certaines études utilisant la TEP ont
rapporté une activation des régions communes du LTA lors du traitement de
mots et d’images (Bright, Moss, & Tyler, 2004 ; Vandenberghe, Price, Wise,
Josephs, & Frackowiak, 1996), et du traitement d’images et de sons environnementaux (Tranel, Grabowski, Lyon, & Damasio, 2005), ce qui renforce l’idée de
traitement amodal des LTA.
Le rôle des LTA dans le traitement sémantique est aussi soutenu par plusieurs études utilisant la stimulation magnétique transcranienne (TMS). La TMS
consiste à appliquer une impulsion magnétique sur le cortex cérébral à travers
le crâne de façon indolore au moyen d'une bobine. Le champ magnétique
déclenche une activité électrique dans le cortex. Les courants à basse fréquence (<
1 Hz) réduisent l’activité, alors que les courants à haute fréquence l’augmentent.
Les modifications induites par la TMS au niveau des performances cognitives
nous permettent de déduire des informations concernant le rôle fonctionnel de la
région soumise au champ magnétique (Pascual-Leone, Walsh, & Rothwell, 2000).
Les études utilisant la TMS ont constaté que des déficits sémantiques
comparables à ceux observés chez les patients vsAPP peuvent être induits chez
des participants normaux en bloquant l’activité des régions temporales antérieures (Pobric, Jefferies, & Lambon-Ralph, 2007 ; Lambon-Ralph et al., 2009).
La stimulation par la TMS perturbe le jugement sémantique au niveau des mots
et des images, ce qui renvoie à l’idée que les LTA fonctionnent comme un système amodal (Pobric et al., 2007 ; Lambon-Ralph, Pobric, & Jefferies, 2009).
En conclusion, les résultats en neuroimagerie chez les patients et les participants normaux semblent indiquer que les LTA jouent un rôle central au
niveau du traitement sémantique. Ainsi, la nature de son implication dans la lecture des mots irréguliers, telle qu’observée chez les patients vsAPP, devrait être
au niveau sémantique plutôt qu’au niveau de la lecture. Des études plus appro-
96
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fondies sont nécessaires afin d’élucider la relation entre les LTA, la sémantique
et la lecture des mots irréguliers.
♦ Conclusion
Le but de cette recension des écrits était de présenter les études portant
sur la lecture à voix haute en vsAPP, une maladie neurodégénérative qui atteint
d’abord la mémoire sémantique, ainsi que de montrer les études en neuroimagerie qui mettent en rapport les LTA et le traitement sémantique. À partir des
études comportementales, nous pouvons conclure que la difficulté à lire des
mots irréguliers, c’est-à-dire, la dyslexie de surface, est très souvent observée
chez des patients atteints de vsAPP. Cependant, certains cas de patients atteints
de vsAPP sans troubles de lecture ont été décrits en anglais et en espagnol, entre
autres (Blazely et al., 2005 ; M. Wilson & Martínez-Cuitino, 2012). L’existence
de ce type de dissociation (atteinte sémantique sans trouble de lecture) semble
être difficile à réconcilier avec les modèles comme le connexionniste ou triangle
(Plaut et al., 1996). Ce type de modèle propose que le passage sémantique est
obligatoire pour la lecture de mots irréguliers. Pour expliquer les cas de vsAPP
qui présentent cette dissociation entre atteinte sémantique et lecture préservée,
Woollams et al. (2007) ont postulé l’idée des différences individuelles qui créent
une dépendance prémorbide différentielle de la sémantique pour la lecture. En
effet, pour les cas présentant une atteinte sémantique sans dyslexie de surface,
un type de lecture moins dépendante de la sémantique est théorisé. Ce type de
lecture moins « sémantique » devrait être manifesté avant le début de la maladie. Bref, la plupart des études comportementales montrent un rapport entre la
dyslexie de surface et la dégradation de la mémoire sémantique chez les patients
atteints de vsAPP.
De plus, la nature neurodégénérative de la vsAPP a permis de commencer
à établir le rapport entre l’atteinte sémantique et les LTA. En effet, la maladie
débute par une atrophie des LTA, ce qui mène par la suite à des problèmes au
niveau de la mémoire sémantique. Les études menées auprès des participants
sains ont aussi mis en évidence le rôle des LTA pour le traitement sémantique
(Brambati, Benoit, Monetta, Belleville, & Joubert, 2010 ; Pobric et al., 2007).
Ceci a mené Patterson, Nestor, & Rogers (2007) à postuler la notion des LTA
comme un « hub » sémantique amodal. Cette structure du cerveau mettrait en
rapport les différentes caractéristiques d’un stimulus (ex : nom, couleur, forme,
action, mouvement, etc.) distribuées dans plusieurs parties du cerveau.
Bien que le rapport entre la sémantique et les LTA semble être assez bien
établi, celui entre la lecture, notamment de mots irréguliers, et les LTA reste
97
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moins clair. Le gyrus fusiforme antérieur gauche et le pars triangularis du gyrus
frontal inférieur gauche font partie du réseau de lecture de mots irréguliers
(Mechelli et al., 2005). Si les LTA sont liés au traitement sémantique et que la
sémantique est nécessaire pour la lecture de mots irréguliers, alors l’activation
des LTA devrait être trouvée lors de la lecture de mots irréguliers chez les participants contrôles sains. Jusqu’à présent, seulement une étude IRMf a rapportée
l’activation du LTA gauche pendant la lecture de mots irréguliers du français.
M. Wilson et al. (2012) ont montré que le LTA gauche fait partie du réseau de
lecture de mots irréguliers. Ces résultats permettent d’établir le rapport entre les
LTA, la sémantique et la lecture de mots irréguliers.
Néanmoins, étant donné la nature de l’implication des LTA dans la lecture de mots irréguliers, et à la lumière de l’atteinte généralisée des patients
vsAPP dans le traitement de toute tâche sémantique, le rôle des LTA en lecture
de mots irréguliers semblerait être celui de la sémantique, plutôt que celui de la
lecture elle-même. De cette façon, les modèles qui postulent l’activation sémantique pour la lecture de mots irréguliers (ex : Plaut et al., 1996 ; Woollams et al.,
2007) permettraient d’expliquer le profil de lecture et l’atteinte sémantique trouvée en vsAPP, ainsi que le réseau de lecture de mots irréguliers qui inclut le
LTA gauche. Plus d’études de neuroimagerie chez les sujets sains seraient souhaitables pour approfondir nos connaissances des liens entre les LTA, la sémantique et la lecture de mots irréguliers.
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Neuroimagerie du vieillissement normal du langage et de la parole
Melody Courson, Pascale Tremblay
Résumé
Les techniques d’imagerie cérébrale permettent d’étudier les corrélats neurostructurels et
neurofonctionnels du vieillissement normal du langage et de la parole. Cette revue de littérature vise à décrire et analyser les résultats des études d’imagerie par résonance magnétique structurelle et fonctionnelle portant sur le vieillissement des capacités langagières que
sont le traitement syntaxique, la récupération lexicale, ainsi que sur le vieillissement de la
perception et de la production de la parole. Il émerge de cette revue que plusieurs mécanismes neurobiologiques pourraient intervenir au cours du vieillissement : la compensation,
la dé-différentiation, la diminution de l’activation, la réduction de flexibilité cérébrale, ainsi
qu’un phénomène connu sous le nom de réserve cérébrale. Ces mécanismes, qui sont présents dans de nombreuses aires du cerveau à des degrés divers, affectent les habiletés langagières à différentes échelles, révélant un processus de vieillissement complexe et hétérogène.
Mots clés : vieillissement, Imagerie par résonance magnétique, récupération lexicale, traitement syntaxique, perception de la parole, production de la parole.
Neuroimaging of normal aging and its impacts on speech and language
Abstract
Brain imaging methods have enabled the investigation of the neurostructural and neurofunctional correlates of the aging of language and speech. The present review of literature aims
to describe and analyze the results of structural and functional magnetic resonance imaging
studies focusing on the aging of language abilities such as syntax processing, lexical retrieval, as well as speech perception and production. This review shows that different neurobiological mechanisms appear to play a role in the aging of language functions: compensation,
dedifferentiation, brain activation decline and reduction in cerebral flexibility, as well as a
phenomenon known as the brain reserve capacity. These mechanisms are present, to different extents, in distinct brain areas, and they affect language skills to different degrees,
revealing a complex and heterogeneous aging process in the human brain.
Key Words : aging, magnetic resonance imaging, lexical retrieval, syntactic processing,
speech perception, speech production.
Rééducation Orthophonique - N° 260 - décembre 2014
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Melody COURSON 1,2
Pascale TREMBLAY 1,2
1. Université Laval, Faculté de médecine,
Département de Réadaptation, Québec,
Qc., Canada
2. Centre de Recherche de l’Institut
Universitaire en santé mentale de Québec
(CRIUSMQ), Québec, Qc., Canada
Correspondance :
Pascale Tremblay, Ph. D.
Université Laval, Département de
Réadaptation
Centre de Recherche de l’Institut
Universitaire en santé mentale de Québec
(CRIUSMQ)
2601 rue de la Canardière
Office F-2445
Québec (Québec), CANADA, G1J 2G3
Courriel :
[email protected]
♦ Introduction
L
e vieillissement de la population mondiale constitue une importante préoccupation médico-sociale actuelle. Au-delà de l’âge de 85 ans, la probabilité de développer une démence liée à une pathologie neurodégénérative
est en effet de 50% (Hebert, Scherr, Bienias, Bennett, & Evans, 2014). Il est donc
nécessaire de mieux comprendre les mécanismes qui sous-tendent l’apparition et
le développement de ces pathologies neurodégénératives. Il est cependant primordial, dans le but de caractériser les anomalies cognitives et neurologiques
liées aux maladies neurodégénératives, de comprendre les mécanismes cognitifs
et neurologiques liés au vieillissement normal afin de pouvoir effectuer des diagnostics différentiels plus précis, plus rapidement. Dans cet article, nous effectuerons d’abord un survol des effets du vieillissement sur la cognition et le langage
(section 1.1), puis nous introduirons les changements neurologiques qui surviennent avec l’âge (section 1.2). Nous détaillerons ensuite les changements neurologiques qui surviennent et leurs impacts sur les fonctions langagières, incluant la
syntaxe (section 2), la récupération lexicale (section 3) et la parole (section 4).
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Vieillissement des fonctions cognitives et langagières
La littérature comportementale rapporte que le vieillissement cognitif
n’est pas uniforme. Certaines fonctions cognitives, telles que la mémoire autobiographique, le traitement des émotions et les processus de mémoire automatique semblent largement préservées (Hedden & Gabrieli, 2004) tandis que
d’autres subissent un déclin au cours du vieillissement. C’est le cas de la vitesse
de traitement, c’est-à-dire la vitesse à laquelle une information est traitée ou une
tâche réalisée, (Cerella & Hale, 1994), la mémoire de travail (Hester, Kinsella,
& Ong, 2004 ; Park et al., 2002), la mémoire à court terme (Hester et al., 2004),
la mémoire épisodique (Souchay, Isingrini, & Espagnet, 2000), les capacités
visuo-spatiales (Kumar & Priyadarshi, 2013) et le raisonnement non verbal
(Miller, Myers, Prinzi, & Mittenberg, 2009). Certaines fonctions cognitives
telles que la mémoire de travail, la mémoire épisodique et la vitesse de traitement déclinent de manière linéaire tout au long de la vie, tandis que d’autres
incluant la mémoire sémantique et la mémoire à court terme semblent décliner
très peu jusqu’à environ 70 ans, âge à partir duquel le déclin est plus drastique
(Hedden & Gabrieli, 2004). L’ensemble de ces observations démontre que le
vieillissement des facultés cognitives est un phénomène hétérogène.
En plus des pertes cognitives, le vieillissement normal est accompagné de
modifications comportementales au niveau du langage et de la parole. La littérature rapporte en effet un déclin de capacités langagières telles que (1) le traitement syntaxique, à la fois pour la compréhension de phrases syntaxiquement
complexes (Stine-Morrow, Ryan, & Leonard, 2000) et pour la production de
phrases syntaxiquement complexes à l’écrit (Kemper, 1987) comme à l’oral
(Kemper, Thompson, & Marquis, 2001) et (2) la récupération lexicale lors de
tâches de dénomination d’images (Evrard, 2002 ; Feyereisen, 1997 ; Kavé,
Knafo, & Gilboa, 2010). La perception de la parole, particulièrement lorsque
celle-ci est rapide et qu’elle contient de longues phrases (Wingfield, Poon, Lombardi, & Lowe, 1985), et la production de la parole, en termes de vitesse et de
fluence (Duchin & Mysak, 1987 ; Searl, Gabel, & Fulks, 2002 ; Wingfield et al.,
1985) sont également altérées par le vieillissement normal. Le déclin des capacités de récupération lexicale apparaissant au cours du vieillissement normal
pourrait être lié à des difficultés d’ordre phonologique (White & Abrams, 2002),
qui pourraient également avoir un effet sur la perception et la production de la
parole, bien que ceci demeure à démontrer. Bien qu’un rôle potentiel des fonctions cognitives telles que la mémoire de travail dans le déclin des facultés langagières reste également à éclaircir (Kemtes & Kemper, 1997 ; Caplan &
Waters, 2005), la littérature démontre clairement que le vieillissement a un
impact profond sur un grand nombre de processus langagiers.
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Vieillissement cérébral
Les recherches sur le vieillissement se sont intensifiées depuis une quinzaine d’années grâce au développement de techniques d’imagerie du cerveau
puissantes et sécuritaires (pour une introduction à ces différentes techniques,
voir l’article de Coll, Blais-Michaud et Jackson, dans ce numéro). Les différentes techniques de neuroimagerie telles que l’imagerie par résonance magnétique (IRM) et l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) permettent d’étudier les associations entre les modifications comportementales et
cognitives liées au vieillissement, et les modifications de la structure et du fonctionnement du cerveau. Les modifications structurelles liées au vieillissement
les plus étudiées au moyen de l’IRM incluent le volume et l’épaisseur de la
matière grise (i.e. la densité de corps cellulaires des neurones formant le cortex
cérébral) et la quantité de matière blanche1 (i.e. les fibres reliant les différentes
aires corticales) du cerveau. L’IRMf permet d’étudier les modifications du fonctionnement du cerveau liées au vieillissement : l’activation des aires corticales
et sous-corticales lors de la réalisation d’une tâche spécifique, et la connectivité
fonctionnelle qui est l’analyse de la synchronisation temporelle de l’activation
de différentes aires lors d’une tâche et qui permet de déterminer le décours temporel des activations cérébrales. Ce type d’analyse repose sur le principe que
des aires dont l’activation est synchrone lors de la réalisation d’une tâche font
partie d’un même réseau neuronal fonctionnel.
De nombreuses études démontrent que la quantité de matière grise (De
Leon et al., 1997 ; Salat et al., 2004 ; van Velsen et al., 2013) et la quantité de
matière blanche (D H Salat, Tuch, Greve, et al., 2005 ; D H Salat, Tuch, Hevelone, et al., 2005 ; David H Salat, 2011 ; Walhovd et al., 2005), diminuent avec
l’âge. Toutefois, la perte de matière grise liée au vieillissement n’est pas uniforme au travers du cerveau (Chee et al., 2009 ; Thambisetty et al., 2010 ; Walhovd et al., 2005 ; van Velsen et al., 2013). Certaines régions et aires corticales
sont plus vulnérables au vieillissement : il s’agit des lobes pariétaux, des gyri
postcentraux et précentraux, du cortex insulaire, du gyrus cingulaire antérieur,
du gyrus frontal moyen (MFG) gauche, du planum temporale gauche et des gyri
temporaux transverses (Good et al., 2001). Une étude longitudinale conduite sur
cinq ans chez des adultes sains âgés de 59 à 85 ans au début de l’étude a révélé
une perte annuelle de 2.4 cm³ de matière grise et de 3.1 cm³ de matière blanche
(Resnick, Pham, Kraut, Zonderman, & Davatzikos, 2003) et confirmé que les
1. L’étude structurelle de la matière blanche est aussi appelée étude de la connectivité structurelle.
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régions frontales inférieures, cingulaires, insulaires et pariétales inférieures,
subissaient une réduction de matière grise plus importante que les régions temporales et occipitales.
Sur le plan du vieillissement du fonctionnement du cerveau, on note également une grande hétérogénéité, tant au niveau de la nature des changements,
que de leur localisation dans le cerveau et de leur impact sur le langage, la cognition et la motricité. Les principaux mécanismes neurofonctionnels de vieillissement qui ont été identifiés sont (1) la compensation, (2) la dé-différenciation,
(3) la diminution de l’activité cérébrale, et (4) la réduction de flexibilité cérébrale. Afin de distinguer ces patrons de changements les uns des autres, il est
nécessaire de mettre en lien l’activité du cerveau et la performance d’un même
individu. Le mécanisme de compensation se traduit par une corrélation positive
entre une augmentation de l’activité cérébrale et la performance, c’est-à-dire
qu’une forte activité cérébrale est associée à une meilleure performance. Cette
augmentation de l’activité cérébrale peut se produire dans des aires impliquées
dans la tâche ou encore engager des circuits non typiquement associés à une
tâche mais qui sont moins vulnérables au vieillissement (notion de réserve cérébrale). La même augmentation d’activité corticale, lorsque corrélée négativement à la performance (i.e. lorsqu’une forte activité corticale est associée à une
réduction de la performance), suggère un mécanisme de « dé-différentiation »
plutôt que de compensation. Cette dé-différentiation peut refléter (1) une réduction d’efficacité neuronale, c’est-à-dire qu’un plus grand recrutement neuronal
devient nécessaire pour effectuer une tâche qui autrefois était accomplie avec
moins d’effort, ou (2) une perte de sélectivité neuronale, c’est-à-dire une réduction de la capacité à recruter les populations de neurones spécialisés dans la
tâche à réaliser résultant en une augmentation nuisible de certaines aires du cerveau (Carp, Park, Hebrank, Park, & Polk, 2011 ; Carp, Park, Polk, & Park,
2011 ; J. O. S. Goh, 2011 ; J. O. Goh, Suzuki, & Park, 2010 ; Park et al., 2004).
Le troisième mécanisme, la diminution de l’activité cérébrale, associée à une
diminution de la performance, est généralement attribué à une réduction de l’activité neuronale, c’est-à-dire une difficulté à activer adéquatement des aires
impliquées dans une tâche. Le quatrième mécanisme, la réduction de flexibilité,
se traduit par une rigidité de l’activité cérébrale, consistant en une activation
cérébrale constante, quelle que soit la difficulté de la tâche, chez les personnes
âgées, alors que chez les jeunes on observe une modulation de l’activité cérébrale en fonction du degré de difficulté de la tâche ou des stimuli à traiter. Ce
déficit d’adaptation de l’activité corticale à la difficulté de la tâche est associé à
une diminution des performances. Ces quatre mécanismes neurofonctionnels du
vieillissement cérébral seront davantage discutés plus loin (cf. discussion).
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Plusieurs théories tentent d’expliquer les mécanismes cérébraux qui soustendent les modifications du comportement et des capacités cognitives qui surviennent au cours du vieillissement. Le modèle HAROLD (i.e. Hemispheric
Asymmetry Reduction in Old Adults) de Cabeza (2002) s’appuie sur des études
portant sur les corrélats neurologiques du vieillissement de la perception
visuelle, de l’encodage de la mémoire épisodique, de la récupération des
mémoires épisodique et sémantique, de la mémoire implicite, de la mémoire de
travail et du contrôle inhibiteur pour proposer qu’au cours du vieillissement,
pour lutter contre les déficits neurocognitifs, le cerveau recrute le cortex préfrontal bilatéralement lors de la réalisation de tâches qui ne requièrent qu’un
hémisphère chez les jeunes adultes. Cette réduction de l’asymétrie hémisphérique serait bidirectionnelle : lors de tâches nécessitant l’implication du cortex
préfrontal droit chez les jeunes adultes, par exemple, lors de la récupération de
mémoire épisodique, le cortex préfrontal gauche serait sur-recruté chez les
adultes âgés, et à l’inverse, lors de tâches nécessitant l’implication du cortex
préfrontal gauche chez les jeunes adultes, comme dans le cas de l’encodage épisodique, le cortex préfrontal droit serait sur-recruté chez les adultes âgés. Il
existe deux interprétations possibles à ce mécanisme : l’hypothèse de la compensation et l’hypothèse de la dé-différentiation. Une corrélation entre une
réduction de l’asymétrie hémisphérique et un maintien des performances cognitives chez les personnes âgées (p. ex. Reuter-Lorenz et al., 2000) renforce l’hypothèse d’un mécanisme de compensation, tandis que la corrélation entre une
augmentation des aires recrutées et une baisse des performances appuie l’hypothèse d’une dé-différentiation liée au vieillissement (p. ex. Burianová, Lee,
Grady, & Moscovitch, 2013), ainsi, les mécanismes neurobiologiques qui soustendent la réduction de l’asymétrie hémisphérique demeurent à clarifier.
Un second modèle neurocognitif du vieillissement postule qu’un déplacement postéro-antérieur de l’activité corticale, le « Posterior-Anterior Shift in
Aging » ou PASA (Davis, & Ball, 1989), serait le mécanisme prédominant du
vieillissement cognitif. D’après ce modèle, l’observation d’une réduction de
l’activation des aires corticales sensorielles (aires plus postérieures) et d’une
augmentation de l’activation des aires corticales frontales (plus antérieures),
associées à une augmentation des performances, refléterait un mécanisme de
compensation. Pour expliquer le sur-recrutement préfrontal lié au vieillissement,
il existe toutefois une hypothèse complémentaire, selon laquelle cette modification des patrons d’activation cérébrale observée chez les personnes âgées ne
serait pas due au vieillissement en tant que tel, mais à une baisse du seuil de difficulté liée au vieillissement. Il a en effet été observé (Meinzer, Seeds, et al.,
2012) que les adultes jeunes et plus âgés présentaient une augmentation de l’ac-
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tivation préfrontale lors de la réalisation de tâches complexes. Toutefois, les
tâches pour lesquelles les adultes âgés présentaient cette augmentation accrue
étaient plus simples que les tâches pour lesquelles les jeunes adultes présentaient une augmentation accrue des mêmes aires, c’est-à-dire que des tâches qui
étaient simples pour des jeunes adultes étaient plus complexes pour les adultes
âgés, qui sur-recrutaient alors les aires préfrontales. Cette hypothèse est connue
sous le nom de « Compensation-Related Utilization of Neural Circuits Hypothesis » ou CRUNCH (Reuter-Lorenz et al., 2005), et stipule que le manque d’efficacité au niveau du traitement cognitif entraîne le recrutement de ressources
cognitives additionnelles à des niveaux de difficultés plus bas chez les personnes âgées que les jeunes.
Ce bref aperçu de la littérature démontre que les changements neurostructurels et neurofonctionnels liés au vieillissement varient en fonction de l’aire
cérébrale (certaines aires étant en effet plus vulnérables que d’autres) et de la
fonction cognitive et langagière étudiée. L’étude des associations entre ces changements et les performances cognitives et comportementales rend compte d’une
grande complexité dans les mécanismes neurocognitifs du vieillissement. Afin
de comprendre les mécanismes neurologiques structurels et fonctionnels impliqués dans le vieillissement normal, il est donc nécessaire d’étudier les fonctions
cognitives et langagières (1) isolément, car elles peuvent présenter des mécanismes cognitifs et neurologiques différents les unes des autres, et (2) en interaction, car leur fonctionnement peut être modifié par d’autres fonctions cognitives et langagières, elles aussi potentiellement vulnérables au vieillissement.
Les techniques d’IRM et d’IRMf sont utilisées pour l’étude spécifique du vieillissement du langage et de la parole et permettent de corréler des données
neuro-anatomiques et neuro-fonctionnelles aux observations comportementales ; ces techniques ont ainsi permis de grandes avancées dans le domaine des
neurosciences cognitives du langage. Les études d’imagerie cérébrale s’intéressant au vieillissement du langage2 portent essentiellement sur le traitement syntaxique et la récupération lexicale, tandis que celles portant sur la parole s’intéressent principalement à la perception de la parole dans le bruit. Ces données
seront discutées et évaluées en détail dans les sections suivantes.
2. Notons que le vieillissement est une notion relative et que les études s’intéressant au vieillissement du langage et de la parole ne situent pas le début du processus de vieillissement au même âge. Ainsi, lorsque certaines études considèrent que les adultes sont âgés à partir de l’âge de 60 ans, d’autres incluent des adultes
de 49 ans dans leur population âgée. Il est également notable qu’aucun adulte de plus de 88 ans n’a participé à ces études ; il est en effet difficile de rencontrer des adultes très âgés, exempts de tous troubles neurocognitifs.
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♦ Vieillissement du traitement syntaxique
Les corrélats neurologiques du vieillissement du traitement de la syntaxe ont été très peu étudiés. À notre connaissance, il n’existe dans la littérature que deux études en imagerie qui se sont spécifiquement intéressées aux
caractéristiques cérébrales anatomiques et fonctionnelles du traitement de la
syntaxe chez les sujets âgés (Peelle, Troiani, Wingfield, & Grossman, 2010 ;
Tyler et al., 2010). L’étude de Peelle et al. (2010) repose sur l’hypothèse d’une
augmentation des difficultés des personnes âgées à traiter les structures syntaxiques complexes (Kemper et al., 2001) en raison de difficultés plus générales survenant au cours du vieillissement normal comme le déclin de la
mémoire de travail et la réduction de la vitesse de traitement. Dans cette
étude, un groupe d’adultes jeunes (17-27 ans) et un groupe d’adultes âgés (6077 ans) ont réalisé une tâche de compréhension de la syntaxe dans laquelle ils
devaient déterminer qui était l’acteur de chaque phrase entendue, dans des
phrases syntaxiquement simples et complexes. D’un point de vue comportemental, la performance du groupe âgé était aussi bonne que celle du groupe
jeune pour le traitement des phrases simples, tandis qu’elle était significativement inférieure pour les phrases complexes. L’analyse IRMf a révélé que de
nombreuses aires corticales bilatérales (gyrus frontal inférieur (IFG), cortex
insulaire, gyrus temporal moyen (MTG), aire motrice supplémentaire (SMA),
précunéus, gyrus cingulaire antérieur et gyrus frontal supérieur (SFG)) et
sous-corticales (putamen et noyau caudé) étaient davantage activées, chez les
adultes jeunes et âgés, lors du traitement des phrases complexes. Il est à noter
que l’augmentation de l’activité du cortex insulaire antérieur gauche, ainsi que
la connectivité entre les aires activées, étaient significativement plus importantes chez les jeunes adultes que chez les personnes âgées lors du traitement
des phrases complexes. Toutefois, pour les personnes âgées, la performance
était positivement corrélée à l’activation du cortex insulaire antérieur et de
l’IFG gauches et à une bonne connectivité fonctionnelle entre les aires activées. Il semble donc que l’IFG et le cortex insulaire antérieur, même si ce dernier participe à d’autres fonctions cognitives et langagières (cf. discussion),
soient nécessaires au traitement syntaxique. Une corrélation négative entre
l’activation du MTG postérieur gauche et les performances syntaxiques complexes indique que le sur-recrutement de cette aire chez les personnes âgées
ne permet pas le maintien de leurs performances.
L’étude de Tyler et al. (2010), au contraire, s’appuie sur l’hypothèse selon
laquelle le traitement syntaxique n’est pas altéré par le vieillissement (Caplan &
Waters, 2005). Parce qu’une absence de changements comportementaux n’est
pas nécessairement associée à une absence de modifications anatomiques et
110
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fonctionnelles3, les auteurs ont étudié les corrélats neuronaux du traitement syntaxique - normal - chez un groupe de jeunes adultes (19-34 ans) et un groupe
d’adultes âgés (49-86 ans). Les auteurs ont utilisé une tâche mise au point dans
des études antérieures (p. ex. Tyler & Marslen-Wilson, 2008). Dans cette tâche,
ne nécessitant pas l’implication de la mémoire de travail, souvent difficile à
séparer des processus syntaxiques, les participants devaient repérer un mot cible
dans différents types de phrases, incluant des phrases possédant une structure
syntaxique mais n’ayant pas de sens (i.e. n’induisant pas de construction sémantique), comme : « Sa dent était conduite parce qu’il avait un ongle faible ». Les
performances comportementales étaient similaires chez les adultes jeunes et
plus âgés. L’analyse IRMf a révélé l’activation d’un réseau fronto-temporal (FT)
gauche chez le groupe âgé similaire à celui du groupe jeune (IFG gauche et
MTG gauche) mais plus étendu (incluant également le MFG gauche et le MTG
gauche). De plus, le réseau FT droit n’était activé que par les adultes âgés. Une
corrélation négative entre le volume de MG du MTG gauche et l’activité du
réseau FT droit a été mise en évidence chez les personnes âgées. Selon les
auteurs, le recrutement du réseau FT droit chez les personnes âgées, de même
que le recrutement plus étendu du réseau FT gauche, reflèteraient une forme de
plasticité cérébrale consécutive à la perte de MG du réseau FT gauche qui permettrait aux personnes âgées, par compensation, de maintenir leurs capacités en
traitement syntaxique. Selon les auteurs, ces résultats démontrent que l’activation frontale observée chez les personnes âgées lors du traitement syntaxique
n’est pas nécessairement liée à une compensation générale (i.e. une compensation réalisée par l’implication de processus cognitifs généraux comme l’attention), mais, au moins en partie, à une compensation spécifique, au sein du
réseau cortical lié au traitement syntaxique.
De ces résultats, en apparence opposés, il est possible d’extraire plusieurs
observations d’ordre général concernant les corrélats neurologiques du vieillissement du traitement syntaxique. Tout d’abord, les mécanismes impliqués dans
le vieillissement du traitement syntaxique semblent être principalement corticaux et distribués. De plus, ces études montrent que le vieillissement s’accompagne d’une augmentation des activations corticales chez les personnes âgées,
3. En effet, on pense ici à la possibilité d’une réorganisation neuronale de type compensation qui permettrait
de maintenir la performance au cours du vieillissement.
111
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autant lorsque la performance décline que lorsqu’elle est stable. La divergence
observée par rapport au comportement lui-même pourrait s’expliquer par le type
de traitement syntaxique étudié – simple et complexe - et son vieillissement, à
plusieurs niveaux fonctionnels : de manière isolée, et en interaction avec d’autres processus cognitifs tels que la mémoire de travail et l’attention. Une interprétation possible est que le traitement syntaxique en soi ne soit pas dégradé
avec le vieillissement, mais que le déclin d’autres processus cognitifs, comme la
mémoire de travail, l’attention ou les capacités de contrôle exécutif, ait un
impact néfaste sur les capacités de traitement des structures syntaxiques complexes. Davantage d’études en imagerie cérébrale, alliant les analyses structurelle, fonctionnelle et de connectivité, et variant à la fois la difficulté syntaxique
et cognitive sont nécessaires pour identifier, avec précision, les impacts du vieillissement sur le traitement syntaxique.
♦ Vieillissement de la récupération lexicale
Une des difficultés liées au vieillissement les plus documentées est le
trouble de la récupération lexicale, ou « manque du mot », c’est-à-dire des difficultés à récupérer des mots en mémoire. La récupération lexicale est un processus impliquant à la fois un accès sémantique et un accès phonologique.
Étude globale de la récupération lexicale (processus sémantiques et
phonologiques confondus)
Dans une étude récente (Obler et al., 2010), une analyse du volume de
matière grise et de matière blanche, a été effectuée chez des adultes de 56 à 79
ans, et mise en relation avec les résultats d’une tâche de dénomination de noms
et de verbes afin de déterminer si des changements au niveau de la structure du
cerveau affectent la récupération lexicale au cours du vieillissement. Les adultes
jeunes et âgés ont démontré des performances similaires dans la dénomination
des verbes et des noms. Les résultats montrent que pour la dénomination de
verbes, les performances sont positivement corrélées : (1) au volume de matière
grise dans le MFG gauche, le gyrus angulaire droit et le MTG droit ; et (2) à la
quantité de matière blanche dans le MTG, l’ITG, le MFG droit et les projections
cortico-calleuses. Pour la dénomination de noms, les temps de réponses sont
négativement corrélés : (1) au volume de matière grise dans le MFG gauche et
le planum temporal gauche, et (2) à la quantité de matière blanche dans les gyri
temporaux moyens et les gyri temporaux inférieurs. Ces résultats suggèrent
qu’avec le vieillissement, de bonnes performances de dénomination de verbes et
de noms sont liées à la préservation de la matière grise de régions frontales et
temporales bilatérales, ainsi qu’à la préservation de la matière blanche. Des
112
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études de Fridriksson et al. (2006), Berlingeri et al. (2013) et Wierenga et al.
(2008), menées avec des adultes de (1) 20-82 ans, (2) 18-30 ans et 50-80 ans, et
(3) 20-34 ans et 68-84 ans, montrent également d’aussi bonnes performances de
dénomination chez les personnes âgées que chez les jeunes. Au niveau cérébral,
certaines aires corticales gauches, telles que l’IFG, la partie postérieure du gyrus
temporal supérieur (STG) (Fridriksson et al., 2006), le gyrus cingulaire antérieur et le SMA (Wierenga et al., 2008) semblent être davantage activées chez
les personnes âgées durant la tâche de dénomination. D’autre part, si les adultes
jeunes et âgés semblent partager des activations latéralisées à gauche (i.e. IFG,
gyrus précentral4 et cortex insulaire) lors d’une tâche de dénomination (Berlingeri et al., 2013), les adultes âgés ont également présenté des activations dans
les homologues droits de ces aires (Berlingeri et al., 2013 ; Fridriksson et al.,
2006 ; Wierenga et al., 2008). Ces trois études suggèrent que de bonnes performances de dénomination sont liées à une augmentation de l’activité des aires
habituellement impliquées dans cette tâche chez les jeunes adultes, mais également à un recrutement d’aires non recrutées chez les jeunes adultes dans l’hémisphère droit. Des analyses supplémentaires (Wierenga et al., 2008) ont cependant montré que la performance était positivement corrélée à l’activation de
l’IFG gauche chez les adultes âgés performants et moins performants, tandis
qu’elle était positivement corrélée à l’activation de l’IFG droit chez les personnes âgées performantes et négativement corrélée à l’activation de l’IFG droit
chez les moins performantes. Il semble donc qu’une augmentation de l’activité
cérébrale de l’hémisphère droit ne soit pas systématiquement associée à une
augmentation ou à un maintien des performances de récupération lexicale chez
les adultes âgés. Les résultats combinés de ces études suggèrent que les modifications des patrons d’activation corticale et les caractéristiques neurostructurelles liées au vieillissement varient d’un individu à l’autre en lien avec le
niveau de performance langagière.
Comparaison des processus sémantique et phonologique dans la récupération lexicale
Plusieurs études ont comparé les processus sémantique et phonologique
de la récupération lexicale via des tâches de fluences verbales (Meinzer, Flaisch,
et al., 2012 ; Meinzer et al., 2009, Meinzer, Seeds, et al., 2012) plutôt que des
tâches de dénomination. Dans ces études, les activations cérébrales associées à
4 Le gyrus précentral, ainsi que le sulcus précentral, contiennent le cortex prémoteur. Le sulcus précentral,
situé derrière le gyrus précentral, contient le cortex moteur primaire, lequel contient une grande quantité de
neurones moteurs supérieurs. Voir les Figures 1 et 2 pour l’emplacement exact de ces régions.
113
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la fluence verbale chez des adultes jeunes (respectivement de : 20-33 ans, 19-32
ans, et 19-32 ans) et âgés (respectivement de : 64-88 ans, 69-80 ans, et 61-80
ans) ont été comparées. Lors d’une tâche simple de fluences phonologiques
(avec les lettres H, F, N et A) et sémantiques (avec les catégories : sports, fruits,
parties du corps et instruments de musique), Meinzer et al. (2009) ont observé,
chez les adultes âgés, que les performances en fluences phonologiques étaient
aussi élevées que chez les jeunes, tandis que leurs performances en fluences
sémantiques étaient significativement inférieures. Cette diminution de la performance des adultes âgés était corrélée à des activations plus bilatérales que chez
les jeunes. En effet, en plus des aires corticales de l’hémisphère gauche activées
dans les deux groupes lors de la tâche de fluence sémantique (i.e. STG, IFG,
MFG), les adultes âgés ont également activé l’IFG et le MFG droits. Dans une
étude subséquente (avec les lettres M, J, S, K, T, Q, P, N et les catégories
sémantiques suivantes : parties du corps, types de musique, vêtements, insectes,
couleurs, épices, boissons, actes criminels), les auteurs (Meinzer, Seeds, et al.,
2012) ont toutefois obtenu des résultats comportementaux opposés (i.e. de meilleures performances sémantiques que phonologiques). Chez les adultes âgés,
une réduction des performances était corrélée à des activations dans l’hémisphère droit plus importantes lors de la tâche sémantique (MFG et IFG) et lors
de la tâche phonologique (STG, gyrus cingulaire postérieur et gyrus supramarginal). Dans une troisième étude, les auteurs (Meinzer, Flaisch, et al., 2012) ont
à nouveau démontré de plus grandes difficultés en fluence phonologique qu’en
fluence sémantique, indépendamment de l’âge. Dans cette étude, les auteurs se
sont particulièrement intéressés aux patrons d’activation des IFG. Pour chaque
tâche de fluence, deux niveaux de difficulté ont été employés : facile (fluence
sémantique avec les catégories sémantiques familières « parties du corps »,
« vêtements », « couleurs », « boissons » et fluence phonologique avec des
consonnes fréquemment présentes en début de mot : M, S, T, P) et difficile
(fluence sémantique avec les catégories sémantiques peu familières « types de
musique », « insectes », « épices », « actes criminels » et fluence phonologique
avec des consonnes peu fréquemment présentes en début de mot : J, K, Q, N),
formant un ensemble de quatre tâches variant de la plus simple à la plus complexe : fluence sémantique facile, fluence sémantique difficile, fluence phonologique facile, et fluence phonologique difficile. Dans les deux groupes d’âge et
pour les deux niveaux de difficulté de fluence verbale, une meilleure performance était corrélée à une activité moins importante de l’IFG gauche. L’IFG
droit n’a été activé que lors de la tâche difficile de fluence phonologique (i.e. la
tâche la plus difficile des quatre) chez les jeunes adultes, tandis qu’il était activé
dès la tâche de fluence sémantique difficile chez les personnes âgées. Malgré
114
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des performances similaires chez les adultes jeunes et âgés dans chaque tâche de
fluence, l’implication de l’IFG a augmenté en fonction de l’âge. Les résultats de
ces trois études semblent indiquer que : (1) le seuil de difficulté des tâches de
fluence est plus bas chez les adultes âgés, et (2) les adultes âgés recrutent davantage l’hémisphère droit, dont l’IFG droit, que les jeunes adultes pour maintenir
leur performance dans des tâches difficiles.
115
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Étude du traitement sémantique dans la récupération lexicale
Lors d’une tâche de jugement sémantique, dans laquelle des adultes en
bonne santé devaient déterminer si les phrases entendues avaient du sens ou
non, Berlingeri et al. (2013) ont comparé les patrons d’activation d’adultes
jeunes (18-30 ans) et âgés (50-80 ans). Tous les participants, jeunes et âgés, ont
obtenu de bonnes performances à la tâche. Les jeunes adultes ont présenté une
forte latéralisation gauche des activations lors de cette tâche : IFG, gyrus précentral, gyrus supramarginal5, STG, MTG et gyrus temporal inférieur (ITG).
Les aires activées chez les personnes âgés étaient également latéralisées à
gauche, bien que moins fortement, avec des activations droites : IFG, gyrus précentral, MTG, ITG, gyrus parahippocampique et gyrus occipital moyen. Cette
étude révèle donc un lien entre la préservation des performances sémantiques au
cours du vieillissement et une réduction de la latéralisation des activations corticales. Dans une autre étude d’IRMf, Gold et al. (2009) ont comparé les patrons
d’activations corticales aux performances obtenues lors d’une tâche de décision
lexicale chez des adultes jeunes (19-26 ans) et âgés (63-83). Dans cette étude,
les participants devaient déterminer si chaque suite de lettres était un mot ou un
pseudo-mot. Certains de ces mots étaient amorcés (i.e. leur contenu sémantique
était pré-activé par la présentation d’un mot lié sémantiquement avant la présentation du mot à juger). Pour les mots non-amorcés, les adultes âgés ont obtenu
des temps de réponse plus longs que les jeunes adultes, ce qui indique un traite5. Le gyrus supramarginal est impliqué dans la mémoire verbale à court terme. Les auteurs ne font cependant
aucune mention de l’implication que pourrait avoir un manque d’activation de cette aire cérébrale sur le
traitement du langage chez les adultes âgés.
116
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ment plus long, et possiblement plus difficile, chez les adultes âgés. Ces résultats ont été associés à un sous-recrutement des régions perceptuelles visuelles et
du cortex pariétal inférieur gauche6, ainsi qu’à un sur-recrutement de régions
impliquées dans le traitement sémantique (i.e. l’ITG et l’IFG gauche). Les
auteurs émettent l’hypothèse que les adultes âgés s’appuient davantage sur le
contenu sémantique que sur l’orthographe des mots pour résoudre la tâche,
contrairement aux jeunes adultes. Le traitement sémantique étant plus long que
le traitement orthographique, cela expliquerait les temps de réponse plus longs
chez les personnes âgées. Pour les mots amorcés (i.e. avec une pré-activation
sémantique), les adultes jeunes et âgés ont répondu aussi rapidement ; l’amorçage sémantique a éliminé le délai de réponse observé chez les adultes âgés
lorsqu’il n’y avait pas d’amorçage. Les temps de réponse étaient positivement
corrélés à l’activation de l’ITG gauche et du gyrus fusiforme moyen gauche ;
des temps de réponses plus courts étaient associés à une moindre activation de
ces aires corticales. Lorsque le traitement sémantique est amorcé, les performances et les activations corticales des adultes âgés sont similaires à celles des
jeunes adultes. Ces résultats semblent indiquer que le traitement sémantique en
soi ne serait pas dégradé au cours du vieillissement, mais que la dégradation liée
au vieillissement d’autres processus cognitifs, notamment la mémoire de travail,
pourrait avoir un impact néfaste sur le traitement sémantique.
Étude du traitement phonologique dans la récupération lexicale
Chez des adultes jeunes (21-34 ans) et âgés (55-71), des données neurofonctionnelles ont été recueillies lors d’une tâche visuelle de jugement de rimes
(Geva et al., 2012). Les deux groupes ont obtenu des performances similaires,
toutefois les auteurs ont mis en évidence une activation de l’IFG plus importante chez les adultes âgés. Une corrélation positive entre l’augmentation de
l’activation de l’aire triangulaire7 droite (i.e. la partie médiane de l’IFG) et la
performance a été montrée chez tous les adultes. Les auteurs suggèrent que cette
augmentation est liée à une meilleure inhibition des erreurs. D’autres études ont
étudié l’aspect phonologique de la récupération lexicale liée au vieillissement en
utilisant le paradigme expérimental du « mot sur le bout de la langue », ou « tip
of the tongue » (TOT) en anglais (Shafto, Burke, Stamatakis, Tam, & Tyler,
2007 ; Shafto, Stamatakis, Tam, & Tyler, 2010 ; Stamatakis, Shafto, Williams,
Tam, & Tyler, 2011). Ce paradigme permet de provoquer chez les adultes une
6. Le cortex inférieur pariétal regroupe deux aires anatomiquement et fonctionnellement distinctes, le gyrus
supramarginal et le gyrus angulaire.
7. Aussi connue sous son nom latin de "pars triangularis”.
117
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situation de récupération phonologique difficile, au cours de laquelle ils ont la
sensation d’avoir le mot sur le bout de la langue : après avoir accédé à la sémantique du mot, les personnes ne parviennent pas à accéder à sa forme phonologique. Dans l’étude de Shafto et al. (2007), les corrélats structurels de la récupération phonologique ont été mis en évidence chez des adultes de 19 à 88 ans.
Les auteurs ont observé que la fréquence des TOT augmentait en lien avec une
diminution du volume de matière grise : (1) du STG et du gyrus précentral
lorsque l’analyse tenait compte du facteur « âge » et (2) du cortex insulaire
lorsque le facteur « âge » était exclu de l’analyse. Les modifications structurelles associées à l’augmentation des difficultés de récupération phonologique
ne sont donc pas nécessairement liées à l’âge. Dans une étude d’IRM fonctionnelle et structurelle (Shafto et al., 2010), alors que les performances étaient
similaires pour les deux groupes d’âge, l’augmentation de l’activité du cortex
insulaire était atténuée chez les adultes âgés (66-88 ans) en comparaison aux
jeunes adultes (20-37 ans). Cette différence était liée à l’atrophie du cortex insulaire gauche. Ensemble, ces deux études suggèrent un rôle important du cortex
insulaire antérieur dans la récupération phonologique. Étant donné l’implication
du cortex insulaire dans de multiples processus langagiers, cognitifs, émotionnels et moteurs, il est cependant possible que le cortex insulaire joue un rôle
plus général dans le traitement du langage (cf. discussion). Ce groupe de chercheurs s’est également intéressé à la connectivité structurelle liée au vieillissement (Stamatakis et al., 2011). Conduite chez des personnes de 19 à 82 ans,
cette étude montre une préservation de l’asymétrie hémisphérique de la matière
blanche (en termes de volume de matière blanche) faisant partie du réseau du
langage, avec une prédominance de l’hémisphére gauche. D’autre part, l’augmentation du nombre de TOT accompagnant le vieillissement semble liée à la
détérioration de l’intégrité de la matière blanche de la partie postérieure du fascicule supérieur (FLS) gauche. Les auteurs proposent que le FLS participe à ce
processus langagier et que sa détérioration entraîne des difficultés de récupération phonologique car la connectivité des aires impliquées dans la récupération
phonologique est alors moins efficace. Ainsi, ces trois études suggèrent que
l’augmentation des difficultés de récupération phonologique est liée à la fois à
des déclins structurels, fonctionnels et de connectivité.
♦ Vieillissement de la parole
En plus d’entrainer des changements au niveau du traitement syntaxique
et de la récupération lexicale, le vieillissement s’accompagne également de
changements affectant la perception et la production des sons du langage. Ces
changements sont décrits dans les paragraphes qui suivent.
118
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Perception de la parole
La perception de la parole se dégrade avec le vieillissement, particulièrement dans des environnements bruyants. Plusieurs études (Erb & Obleser,
2013 ; Hwang, Li, Wu, Chen, & Liu, 2007 ; Wong et al., 2009) se sont intéressées aux corrélats cérébraux fonctionnels du vieillissement normal de la perception de la parole. Dans ces trois études, les patrons d’activation cérébrale
ont été comparés chez des adultes jeunes (respectivement de 21-31 ans, 19-27
ans, et 22-31 ans) et âgés (respectivement de 61-76 ans, 63-75 ans, et 56-77
ans) lors de tâches de perception de la parole dans des conditions de bonne et
de mauvaise intelligibilité : un questionnaire de compréhension suite à la perception de phrases (Hwang et al., 2007), une tâche d’identification de mots
(Wong et al., 2009) et une tâche de répétition de mots (Erb & Obleser, 2013).
Dans ces trois études, l’audition normale des participants avait été contrôlée
lors d’une évaluation audiométrique (audiométrie tonale complète ou partielle).
Ces études rapportent des résultats comportementaux similaires : une meilleure
performance chez les jeunes adultes que chez les adultes âgés, particulièrement
marquée lors de la perception de parole peu intelligible. L’étude de Hwang et
al. (2007) a montré que lors de la perception de la parole dans le bruit, chez les
jeunes adultes, certaines aires corticales étaient davantage activées qu’elles ne
l’étaient chez les adultes âgés : le cortex auditif, la partie antérieure du STG et
la partie postérieure du STG. De plus, des activations sous-corticales n’ont été
mises en évidence que pour les jeunes adultes : une activation du thalamus
droit lors de la perception de parole sans bruit, et une activation bilatérale du
thalamus lors de la perception de parole dans le bruit. Ces résultats suggèrent
un sous-recrutement des aires corticales sensorielles auditives et sous-corticales des personnes âgées lors de la perception de la parole, principalement
quand celle-ci est présentée dans du bruit. D’autre part, une diminution de la
flexibilité des activations semble présente chez les adultes âgés lors de la perception de la parole. L’analyse de Wong et al. (2009) a révélé que les jeunes
adultes présentaient des variations d’activation en fonction de la difficulté de
perception de la parole, sous la forme d’une augmentation de l’activation du
gyrus cingulaire antérieur et du STG gauche, et d’une réduction de l’activation
du précunéus dans la condition la moins intelligible. Cependant, chez les
adultes âgés, qu’elles soient suractivées (précunéus droit) ou sous-activées
(gyrus cingulaire et STG gauche), l’activation dans ces aires n’était pas modulée en fonction de la difficulté de perception de la parole. Il semble donc que
l’activité de certaines aires corticales manque de flexibilité chez les adultes
âgés. Erb et al. (2013) ont obtenu des résultats similaires dans le gyrus cingulaire antérieur qui, chez les jeunes adultes, était suractivé lors de la perception
119
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de la parole dégradée, alors qu’il était suractivé quel que soit le niveau d’intelligibilité chez les adultes âgés, reflétant une réduction de flexibilité cérébrale
dans cette aire. Enfin, la corrélation entre la performance aux tâches de perception de parole et les patrons d’activation corticale ont fait émerger, chez les
personnes âgées, la présence de mécanismes de compensation principalement
fronto-pariétale dans le précunéus et le gyrus précentral droit (Wong et al.,
2009), ainsi que dans le gyrus de Heschl, le MTG, le gyrus précentral, le gyrus
angulaire, le putamen et le MFG (Erb & Obleser, 2013). Un mécanisme similaire a également été démontré chez les jeunes adultes, mais dans des aires
cérébrales différentes : le gyrus fusiforme gauche, le cervelet droit et le gyrus
cingulaire postérieur (Erb & Obleser, 2013). De plus, une analyse de la capacité d’adaptation à la parole dégradée dans cette même étude montre que les
adultes âgés ayant obtenu un meilleur score à un test de mémoire de travail se
sont plus rapidement adaptés à la parole dégradée, ce qui suggère que les
adultes âgés peuvent avoir recours à la mémoire de travail dans la perception
de la parole lorsque celle-ci est peu intelligible.
D’autres études (Bilodeau-Mercure, Lortie, Sato, Guitton, & Tremblay,
2014 ; Eckert et al., 2008 ; Harris, Dubno, Keren, Ahlstrom, & Eckert, 2009) se
sont penchées sur les liens pouvant exister entre changements structurels,
patrons d’activation et perception de la parole au cours du vieillissement normal. Des adultes jeunes et âgés (respectivement de 21 à 75 ans ; de 19-39 ans et
61-79 ans ; et de 21-32 ans et 61-74 ans) ont réalisé des tâches de répétition de
mots (Eckert et al., 2008 ; Harris et al., 2009) ou de séquences de syllabes (Bilodeau-Mercure et al., 2014) dans lesquelles les stimuli étaient présentés auditivement, à différents degrés d’intelligibilité. Ces études rapportent une baisse de
performance lors de ces tâches de perception de la parole lorsque l’intelligibilité
des stimuli est réduite chez l’ensemble des participants (Bilodeau-Mercure et
al., 2014 ; Eckert et al., 2008) ou uniquement chez les adultes âgés (Harris et al.,
2009). Sur le plan neurofonctionnel, la plupart des effets mis en évidence dans
ces trois études concernent l’ensemble des participants. Lors de la perception de
parole peu intelligible, une réduction de l’activation d’aires temporales a été
mise en évidence, plus spécifiquement dans le sulcus temporal supérieur antérieur, le STG (Eckert et al., 2008 ; Harris et al., 2009), l’hippocampe gauche et
le cortex entorhinal (Eckert et al., 2008). Eckert et al. (2008) ont également
observé une dé-différentiation (i.e. un sur-recrutement cérébral non bénéfique à
la performance) dans le lobe frontal. Les aires motrices participeraient également à la perception de la parole et leur activation serait modulée par le degré
d’intelligibilité de la parole ; lors de la perception de parole peu intelligible,
l’activation du cortex moteur primaire gauche et du gyrus postcentral supérieur
120
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gauche8 semble diminuer, tandis que l’activation du SMA semble augmenter.
Faisant écho à la notion de flexibilité cérébrale abordée dans les études décrites
plus haut, ces travaux rapportent un manque de flexibilité d’activation chez les
adultes âgés dans le cortex insulaire antérieur gauche, qui est moins activé qu’il
ne l’est chez les jeunes adultes, quel que soit le degré d’intelligibilité de la
parole (Bilodeau-Mercure et al., 2014), et dans le gyrus cingulaire antérieur
(Harris et al., 2009), qui est plus activé qu’il ne l’est chez les jeunes adultes,
quel que soit le degré d’intelligibilité de la parole. Chez les personnes âgées,
Eckert et al. (2008) ont observé un mécanisme de compensation, c’est-à-dire
l’association de bonnes performances à une augmentation de l’activation du
gyrus cingulaire antérieur bilatéral et du MFG gauche, ainsi qu’un effet de dédifférentiation, c’est-à-dire une augmentation de l’activation d’une aire cérébrale (ici, le MFG) associée à une réduction des performances.
D’un point de vue neurostructurel, un effet médiateur de la réduction de
l’épaisseur corticale du cortex insulaire antérieur droit sur la baisse des performances à la tâche de perception de parole a été observé chez les personnes
âgées (Bilodeau-Mercure et al., 2014). L’analyse des modifications cérébrales
structurelles et fonctionnelles sur le vieillissement de la perception du langage
n’a révélé aucune interaction entre les mécanismes du vieillissement structurels
et fonctionnels (Bilodeau-Mercure et al., 2014). Ces auteurs ont toutefois
démontré une interaction indépendante de l’âge : une réduction de l’épaisseur
corticale serait en effet liée à (1) une augmentation de l’activation du gyrus
postcentral supérieur gauche et du gyrus précentral supérieur droit, et (2) une
réduction de l’activation du cortex insulaire droit et du gyrus précentral inférieur gauche. Lorsque des interactions liées au vieillissement ont pu être observées, elles étaient indirectes : d’une part, une réduction du volume de la
matière grise temporale serait liée à une augmentation du recrutement d’aires
frontales, qui serait liée à une augmentation de la performance chez les adultes
âgés (Eckert et al., 2008) ; d’autre part, une réduction du volume de la matière
grise du STG serait liée à une diminution des performances, qui serait liée à
une augmentation de l’activation du gyrus cingulaire antérieur (Harris et al.,
2009). Un effet plus direct de l’épaisseur corticale sur la performance a toutefois été démontré dans une autre étude (Wong, Ettlinger, Sheppard, Gunasekera, & Dhar, 2010). Dans cette étude, Wong et al. (2010) ont en effet démontré que l’épaisseur corticale dans la partie triangulaire de l’IFG gauche et dans
le SFG gauche étaient corrélées positivement à la performance dans une tâche
de perception de phrases dans le bruit. Ces résultats montrent que, dans cer8. Le gyrus et le sulcus postcentral contiennent le cortex somatosensoriel primaire. Voir la Figure 1.
121
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taines aires, une épaisseur corticale plus importante peut être associée à de
meilleures performances langagières.
Production de la parole
À notre connaissance, la littérature comporte seulement trois articles traitant spécifiquement des corrélats neurologiques du vieillissement normal de la
production de la parole (Sörös, Bose, Sokoloff, Graham, & Stuss, 2011 ; Tremblay, Dick, & Small, 2013 ; Tremblay, Bilodeau-Mercure, & Sato, 2014)9,10.
Dans ces études, des adultes jeunes (de respectivement 21-32 ans, 18-38 ans, et
20-34 ans) et âgés (de respectivement 62-84 ans, 57-70 ans, et 61-74 ans) ont
produit des mots isolés (Tremblay et al., 2013) ou des séquences de sons simples et complexes (Sörös et al., 2011 ; Tremblay et al., 2014) suite à la présentation auditive (Sörös et al., 2011), visuelle ou audiovisuelle (Tremblay et al.,
2013) de ces stimuli linguistiques. Dans les études de Soros et al. (2011) et
Tremblay et al. (2013), les adultes jeunes et âgés ont obtenu des performances
de production identiques, tandis que Tremblay et al. (2014) ont observé un effet
néfaste de la complexité des séquences de syllabes11 sur les performances et les
temps de réponses. D’un point de vue neurofonctionnel, les adultes âgés ont
présenté un sur-recrutement de certaines aires telles que le MTG, le SMA, le
MFG et l’IFG (Sörös et al., 2011), ainsi qu’un sous-recrutement d’autres aires
telles que le gyrus précentral inférieur, le sulcus temporal supérieur moyen et le
SMA droit (Tremblay et al., 2013), le cortex moteur primaire inférieur gauche,
le gyrus précentral supérieur droit, le sulcus temporal supérieur gauche et le sulcus postcentral supérieur droit (Tremblay et al., 2014). Divers mécanismes liés
au vieillissement de la production de la parole ont été mis en évidence dans
cette dernière étude, démontrant la diversité des mécanismes neurologiques
impliqués dans le vieillissement de la production de la parole. Ainsi, les analyses ont révélé, chez les personnes âgées, des phénomènes : (1) de compensation aux niveaux cortical (cortex insulaire) et sous-cortical (putamen gauche et
9. Plusieurs études ont utilisé des tâches impliquant la production de mots dans le but d’étudier les processus
linguistiques et non la production de la parole spécifiquement. Ces études ne seront pas discutées ici.
10. L’étude de la production de la parole (incluant son vieillissement) a été plus lente à se développer que les
autres domaines du langage en raison de difficultés techniques liées aux mouvements de la tête associés
avec la production de sons et de mots, lesquels causent des artéfacts dans les images IRM. Des techniques
d’imageries à échantillonnage discontinue (« sparse sampling ») ont été développées et validées pour
l’étude de la production de la parole (Gracco, Tremblay, & Pike, 2005), ce qui permet maintenant au chercheur d’étudier la production du langage au moyen de l’IRMf.
11. L’effet de complexité reflète une difficulté à produire des séquences de syllabes différentes (p.ex. /pa-taka/) comparé à des séquences de syllabes identiques (p.ex. /pa-pa-pa/). Cet effet a été reproduit dans une
étude comportementale de notre équipe (Bilodeau-Mercure et al., 2014).
122
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noyau caudé gauche), (2) de dé-différentiation aux niveaux cortical (gyrus précentral supérieur droit et cortex moteur primaire inférieur droit) et sous-cortical
(noyau caudé, putamen, thalamus et cervelet). Chez les adultes âgés, le cortex
insulaire antérieur supérieur droit et le sulcus temporal supérieur antérieur
gauche étaient davantage activés lors de la production de séquences complexes
que de séquences simples. Au niveau neurostructurel, chez les adultes âgés, des
diminutions du volume et de l’épaisseur corticales en comparaison aux jeunes
adultes ont été observées dans le SMA, le SFG postérieur, le sulcus temporal
supérieur moyen gauche et le gyrus précentral inférieur. Une diminution du seul
volume était présente dans le gyrus temporo-occipital et le sulcus temporal
supérieur moyen droit, tandis que le sulcus temporal transverse et le planum
temporal gauche ne présentaient qu’une réduction de l’épaisseur de matière
grise. Enfin, un effet direct de la structure sur l’activation fonctionnelle a été mis
en évidence : un effet de compensation au niveau du SFG postérieur gauche,
dont la diminution de l’épaisseur de matière grise était liée à une augmentation
d’activation de cette aire.
♦ Discussion
L’objectif de cet article était de fournir un portrait de l’état actuel des
connaissances dans le domaine du vieillissement normal des facultés langagières, et de montrer l’apport de l’imagerie à l’étude du vieillissement de ces
fonctions. Sur le plan comportemental, il ressort de la présente analyse des difficultés liées à l’âge sur le plan du traitement syntaxique, de la récupération lexicale ainsi que de la perception et la production de la parole ; ces difficultés
apparaissent lorsque la complexité est augmentée, ce qui suggère que le vieillissement est lié à une réduction du seuil de difficulté ou de la capacité à effectuer
des performances langagières maximales, en lien avec l’hypothèse CRUNCH
abordée dans l’introduction. Il apparait que certaines de ces difficultés, notamment syntaxiques, pourraient être liées à une réduction de capacités cognitives
plus générales telles que la mémoire de travail. Tous ces changements comportementaux sont accompagnés de changements neurostructurels et neurofonctionnels. Les relations entre les changements neurologiques et comportementaux sont discutées dans les sections suivantes.
Vieillissement neurostructurel et langage
En accord avec la littérature (Chee et al., 2009 ; De Leon et al., 1997 ; D
H Salat, Tuch, Greve, et al., 2005 ; D H Salat, Tuch, Hevelone, et al., 2005 ;
David H Salat, 2011 ; David H Salat et al., 2004b ; Thambisetty et al., 2010 ;
Walhovd et al., 2005 ; van Velsen et al., 2013) les études d’imagerie structurelle
123
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sur le vieillissement du langage et de la parole rapportent une réduction globale
du volume de matière blanche, ainsi qu’une réduction du volume et de l’épaisseur de matière grise qui varient d’une aire à une autre. Certaines corrélations
entre structure cérébrale et performance ont été établies chez les personnes
âgées ; dans plusieurs études portant sur la récupération lexicale (Shafto et al.,
2007 ; Stamatakis et al., 2011) et la parole (Tremblay et al., 2013 ; Tremblay et
al., 2014 ; Wong et al., 2010), la réduction de l’épaisseur ou du volume de certaines aires corticales et sous-corticales ou de faisceaux de matière blanche est
associée à un déclin des performances. Ces données impliquent qu’il existe un
effet de la dégradation cérébrale structurelle sur les fonctions langagières. Cet
effet doit être nuancé car, il est à noter qu’il existe également des relations entre
les variations structurelles et les performances langagières qui sont indépendantes de l’âge (Obler et al., 2010 ; Tremblay et al., 2013) ; bien que le vieillissement soit généralement associé à une réduction de la matière grise et de la
matière blanche, la dégradation structurelle, davantage que l’âge en tant que tel,
pourrait être l’élément clé lié au déclin des capacités langagières. De plus, il
semble que les changements neurofonctionnels puissent avoir un plus grand
impact sur les fonctions langagières que les changements neurostructurels ; toutefois la comparaison entre l’impact des changements structurels et fonctionnels
sur les fonctions langagières n’en est qu’à son commencement.
Vieillissement neurofonctionnel et langage
L’analyse des données fonctionnelles liées au vieillissement fait émerger
plusieurs mécanismes de vieillissement neurobiologique impliqués dans le vieillissement des facultés langagières : la diminution de l’activation, la dé-différenciation, la compensation, la diminution de la flexibilité cérébrale. Tous ces
mécanismes ont également été observés dans les études d’imagerie du vieillissement d’autres fonctions cognitives, sensorielles et motrices (p. ex. Burianová et
al., 2013 ; Carp, Park, Hebrank, et al., 2011 ; Carp, Park, Polk, et al., 2011 ;
Reuter-Lorenz et al., 2000 ; Tucker-Drob, 2009). Il est également important de
considérer la théorie de la réserve cérébrale en lien avec le vieillissement des
facultés langagières. Dans les prochains paragraphes, nous présentons une discussion de chacun de ces mécanismes (diminution de l’activation cérébrale, dédifférentiation, compensation, diminution de la flexibilité des activations, capacité de réserve).
Le premier mécanisme, la diminution de l’activation cérébrale, est associé à la réduction de l’activation (ou la non-activation) de certaines aires cérébrales durant une tâche chez les personnes âgées comparativement aux personnes jeunes, et est souvent associée à un déclin des fonctions langagières, et à
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une réduction de l’efficacité des neurones situés dans cette aire. Elle pourrait
toutefois également refléter une diminution de la connectivité de ces aires. En
effet, il est connu que la connectivité (matière blanche) diminue avec l’âge, ce
qui a pour effet de réduire les échanges d’informations entre différentes parties
du cerveau. Il est possible que cette perte de connectivité se traduise par une
baisse d’activation. Le deuxième mécanisme, la dé-différentiation, est un mécanisme neurofonctionel qui consiste en une augmentation nuisible de l’activation
dans une partie du cerveau, laquelle est associée à une réduction de la performance. Ce phénomène a été observé principalement dans des aires frontales
(IFG, MFG, gyrus cingulaire postérieur, cortex moteur primaire et gyrus précentral). Les activations de ces aires étaient plus bilatérales chez les personnes
âgées que chez les jeunes adultes, c’est-à-dire que les adultes âgés recrutaient
davantage les aires frontales droites. Dans une étude sur la production de la
parole, toutefois, le phénomène de dé-différentiation a été observé dans de nombreuses aires sous-corticales incluant le cervelet et le striatum (Tremblay et al,
2014). Le rôle du mécanisme de dé-différentiation reste peu clair. Il est possible
qu’il s’agisse d’une tentative de compensation inefficace. Il pourrait également
s’agir d’une compensation partielle, qui ne permettrait pas de maintenir les performances à leur niveau initial, mais de limiter le déclin des performances lié au
vieillissement.
Le troisième mécanisme neurocognitif mis en évidence est la compensation ; le sur-recrutement d’aires corticales impliquées dans une tâche, ou encore
le recrutement d’aires qui ne sont pas habituellement impliquées dans la tâche
(compensation par réorganisation cérébrale), associé à un maintien des performances chez les adultes âgés (Grady, 2009). Ce mécanisme a principalement été
observé, au sein des études évaluées dans le cadre de cet article, dans les régions
frontales : IFG bilatéral, MFG, gyrus cingulaire antérieur, SMA, gyrus précentral droit. Cette implication de régions frontales lors de tâches langagières ou de
parole est interprétée par certains auteurs comme reflétant l’intervention de processus cognitifs ou exécutifs, tels que la mémoire de travail ou l’attention, qui
permettraient de maintenir la performance des personnes âgées (Cabeza, 2002 ;
S. W. Davis, Dennis, Daselaar, Fleck, & Cabeza, 2008). Des données comportementales appuient cette hypothèse : la corrélation positive entre performances
de mémoire de travail et (1) la performance de répétition de phrases complexes
(Norman, Kemper, Kynette, Cheung, & Anagnopoulos, 1991), et (2) la rapidité
d’adaptation à la parole dégradée (Erb & Obleser, 2013). Pour résumer, la littérature rapporte que le vieillissement normal s’accompagne : (1) d’une diminution des activations corticales sensorielles temporales, et (2) d’une augmentation
des activations corticales frontales, ce qui semble correspondre au modèle de
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compensation selon un déplacement postéro-antérieur PASA (S. W. Davis et al.,
2008). Il est cependant rare que ces deux mécanismes (i.e. sous-recrutement
temporal et sur-recrutement frontal) soient observés dans une même étude ; le
rattachement de ces observations à ce modèle théorique doit donc être envisagé
avec prudence.
Le quatrième et dernier mécanisme neurobiologique ressortant de la littérature est une diminution de la flexibilité des activations liée au vieillissement
(Bilodeau-Mercure et al., 2014 ; Wong et al., 2009), un mécanisme bien connu
dans la littérature sur le vieillissement du cerveau (D’Esposito, Deouell, & Gazzaley, 2003 ; D'Esposito, Jagust, & Gazzaley, 2009 ; Gazzaley & D’Esposito,
2003 ; Gazzaley & D'Esposito, 2005). Une rigidité des activations de certaines
aires corticales a été observée chez les personnes âgées en comparaison aux
jeunes adultes – c’est à dire une perte de différentiation, au niveau cérébral, des
niveaux de complexité ou de difficulté chez les personnes âgées. Cette rigidité a
été associée à une diminution des performances des adultes âgés en comparaison à des jeunes adultes. Alors que chez les jeunes adultes, l’activation de ces
aires s’ajuste au niveau de difficulté de la tâche et est associée à de bonnes performances, elle reste stable chez les adultes âgés et est associée à de mauvaises
performances. Il semble donc que ce manque de flexibilité d’activation participe
au déclin des capacités de langage et de parole lié au vieillissement.
Un autre modèle théorique dominant, celui de la théorie de la capacité de
réserve (Satz, 1993 ; Stern, 2002, 2003 ; Stern et al., 2003), pourrait cependant
expliquer la diversité de ces observations, du moins en partie. La théorie de la
capacité de réserve repose sur deux mécanismes neurobiologiques : la compensation neurale (i.e. le recrutement accru d’aires déjà impliquées dans une tâche,
ou le recrutement d’aires supplémentaires) et la réserve neurale. Ce dernier
principe repose sur l’observation qu’il existe d’importantes différences interindividuelles dans l’organisation cérébrale. Un individu dont les réseaux neuronaux sont plus efficaces, et ont une plus grande capacité de traitement ou sont
plus flexibles lutterait plus efficacement contre les symptômes liés à un déclin
structurel. Ainsi l’autopsie de cerveaux d’individus ayant ou non développé une
démence, a montré que le cerveau de 33% des adultes âgés décédés sans symptômes de démence présentait les traces de plaques neuritiques, habituellement
liées au développement de la maladie d’Alzheimer (Neuropathology Group.
Medical Research Council, 2001). D’après le modèle de la réserve, les différences inter-individuelles joueraient donc un rôle important dans l’apparition ou l’absence d’apparition - du déclin de fonctions cognitives au cours du vieillissement. De nombreux facteurs, tels que la génétique, mais aussi
l’environnement socio-économique, le niveau d’alphabétisation, le niveau
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d’éducation, les loisirs, pourraient entrer en ligne de compte et avoir eu un effet
protecteur sur le fonctionnement cérébral des adultes âgés (Stern, 2009). Cette
théorie apporte une explication à la difficulté de mettre en évidence un ou même
plusieurs mécanismes neurobiologiques systématiquement liés au vieillissement
du langage et de la parole. L’évolution individuelle du cerveau, ainsi que le
développement d’une capacité de réserve plus ou moins grande, pourraient jouer
un rôle déterminant dans la manifestation – ou l’absence de manifestation - des
« symptômes » du vieillissement normal.
Vieillissement et langage : rôle du cortex insulaire
Avant de conclure, il nous apparaît important de discuter plus avant d’une
aire corticale, le cortex insulaire antérieur, l’une des régions les plus robustement associées au vieillissement du langage et de la parole. Le cortex insulaire
est une très large aire corticale située au fond du sillon latéral et divisée en de
nombreuses sous-régions. Malgré les nombreux résultats liant la partie antérieure du cortex insulaire au vieillissement des fonctions langagières, le cortex
insulaire antérieur n’est vraisemblablement pas spécialisé dans les processus
langagiers et de la parole. En effet, une revue de la littérature concernant le cortex insulaire antérieur révèle que celui-ci est impliqué dans un éventail très vaste
de tâches cognitives, motrices, perceptuelles et langagières (Nelson et al., 2010).
Par exemple, le cortex insulaire a été identifié comme appartenant au réseau de
la production de la parole dans un grand nombre d’études (Ackermann &
Riecker, 2004 ; Bohland & Guenther, 2006 ; Bookheimer, Zeffiro, Blaxton,
Gaillard, & Theodore, 2000 ; Haller, Radue, Erb, Grodd, & Kircher, 2005 ;
Peschke, Ziegler, Kappes, & Baumgaertner, 2009 ; Riecker et al., 2005 ; A.
Riecker, Brendel, Ziegler, Erb, & Ackermann, 2008 ; A. Riecker, Wildgruber,
Dogil, Grodd, & Ackermann, 2002), ce que confirment Dronkers et al. (Dronkers, 1996 ; Ogar et al., 2006) qui ont montré, en utilisant la morphométrie
basée sur le voxel, qu’une lésion de cette région entraîne une apraxie de la
parole, un trouble de la planification de la parole affectant le séquençage. D’autres études ont toutefois montré que le cortex insulaire antérieur est impliqué
dans le décours temporel/séquençage d’autres modalités telles que dans la réalisation de séquences de mouvements de doigts (Bengtsson, Ehrsson, Forssberg,
& Ullén, 2004 ; Lewis & Miall, 2002). Il est donc possible que le cortex insulaire antérieur contribue à des tâches langagières et motrices orientées vers un
but, de manière plus générale, possiblement en termes de contrôle exécutif ou
d’attention, davantage qu’à des processus langagiers spécifiques tels que la
récupération phonologique. Cette hypothèse est supportée par la découverte
d’une augmentation de l’activité de cette aire en fonction du degré d’intelligibilité de phrases présentées auditivement (Bilodeau-Mercure et al., 2014), ainsi
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que par la répétition de pseudo-mots contenant des syllabes ne faisant pas partie
de la langue maternelle des participants, ce qui, en comparaison à la répétition
de pseudo-mots ne contenant que des syllabes familières, nécessitait une plus
grande attention (Moser et al., 2009). Ces études et d’autres suggèrent que toute
manipulation expérimentale faisant appel à des capacités attentionnelles/exécutives accrues entraîne la modulation de l’activation du cortex insulaire antérieur.
En accord avec cette hypothèse, le déclin lié au vieillissement observé dans de
nombreux aspects du comportement humain a été associé à des modifications
dans l’étendue de l’activation du cortex insulaire antérieur, incluant des déclins
dans les capacités d’abstraction (Goh, Beason-Held, An, Kraut, & Resnick,
2013), d’empathie (Chen, Chen, Decety, & Cheng, 2014), d’inhibition (Turner
& Spreng, 2012), et de la perception visuelle (Seo, Jeong, Kim, & Choi, 2010).
Il est donc possible que les modifications des patrons d’activation du cortex
insulaire antérieur observées dans les études présentées ici reflètent un mécanisme de compensation neurobiologique non spécifique au langage qui pourrait
jouer un rôle important dans le soutien de fonctions langagières et de la parole
au cours du vieillissement.
♦ Conclusion
La présente revue de littérature, bien que non exhaustive, révèle que le
vieillissement des facultés langagières est relié à l’intervention de différents
mécanismes neurobiologiques incluant la dé-différentiation, la compensation, la
diminution de l’activité cérébrale et la réduction de flexibilité cérébrale. Ces
avancées importantes dans la compréhension de la neurobiologie du vieillissement ont été permises par l’avènement de techniques d’imagerie puissantes,
sécuritaires et dont l’utilisation, autant en recherche qu’en clinique, est de plus
en plus répandue. L’étiologie complexe et multifactorielle des difficultés langagières liées au vieillissement suggère que le développement de nouvelles interventions en neuro-réadaptation devra cibler les particularités du vieillissement
des différentes facultés langagières, en termes d’aires et de mécanismes impliqués, de même que prendre en compte des différences individuelles importantes, afin de développer des interventions efficaces pour lutter contre l’apparition des troubles de la communication dans le vieillissement.
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Substrats neuronaux et fonctionnels de la perception de la parole chez les porteurs de l’implant
cochléaire
Maxime Maheu, Julie Roy, Sara Pagé, François Champoux*
Résumé
La surdité s’accompagne souvent d’une importante réorganisation cérébrale lorsqu’elle survient précocement et pour une longue période. Les porteurs d’implant cochléaire (IC)
deviennent alors une population chez qui il est intéressant d’étudier ce phénomène. Par le
biais des différentes techniques d’imagerie cérébrale, il est possible d’identifier et de caractériser les substrats neuronaux de cette réorganisation. Les méthodes de neuroimagerie
permettent aussi l’examen des changements fonctionnels pouvant s’effectuer au sein du
système auditif central. Ces connaissances permettent une meilleure évaluation de la réorganisation qui limite parfois la réadaptation suite à l’acquisition de l’IC. Par conséquent, un
protocole de réadaptation individualisé pour les porteurs de l’IC devient envisageable. L’objectif du présent article est d’effectuer un recensement des examens en neuroimagerie
effectués chez les personnes sourdes. Un effort particulier sera fait pour souligner l’apport
de ces données à la compréhension des difficultés de la perception de la parole chez les
porteurs de l’IC lors de certaines tâches auditives et multisensorielles.
Mots clés : implant cochléaire, neuroimagerie, plasticité cérébrale, perception de la parole,
surdité.
Neural and functional substrates of cochlear implant speech perception
proficiency
Abstract
Hearing loss is often accompanied by changes to peripheral and central auditory pathways.
Factors such as the age at the onset hearing loss and duration of auditory deprivation can
have a significant impact on cerebral reorganization. Cochlear implant (CI) users are a particular interesting population in which to study this plasticity due to the temporary nature of
their hearing loss. A number of studies have investigated cerebral reorganization in CI users
using various imaging techniques. Results from these investigations have provided clinically
useful insight on the repercussions of CI on cortical reorganization. The objective of this
review is to survey the existing neuroimagery literature on CI users. A particular attention
will be given to the relationship between CI users’ auditory and multisensory task performance, and speech perception ability.
Key Words : cochlear implant; deafness, neuroimagery, plasticity, speech perception.
Rééducation Orthophonique - N° 260 - décembre 2014
135
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Maxime MAHEU
Julie ROY
Sara PAGÉ
François CHAMPOUX
Centre de recherche interdisciplinaire en
réadaptation du Montréal métropolitain
(CRIR)
Institut Raymond-Dewar (IRD)
Montréal, Québec, Canada.
École d’orthophonie et d’audiologie (EOA)
Université de Montréal
Montréal, Québec, Canada.
Correspondance :
François Champoux, PhD
Professeur adjoint
7077 avenue du parc, bureau 3001-44
Université de Montréal
Faculté de médecine
École d'orthophonie et d'audiologie
C.P. 6128, Succursale Centre-Ville
Montréal, (Québec) H3C 3J7
Courriel: [email protected]
L
a particularité la plus prodigieuse du système nerveux central est son aptitude à s’adapter aux problématiques de la vie courante. Les permutations
sensorielles engendrées par une privation auditive ou visuelle représentent
effectivement un défi majeur de réajustement pour l’organisme. Le système nerveux doit alors se réorganiser au niveau central afin de s’adapter à ces nouvelles
conditions. C’est la plasticité du cerveau qui permettra une réorganisation fonctionnelle et adaptée. La neuroimagerie offre l’opportunité d’examiner de quelle
façon les réponses corticales et sous corticales peuvent se réorganiser suite à une
privation sensorielle.
Les diverses variables impliquées dans le processus de la plasticité intermodale ont reçu une grande attention chez les personnes aveugles. L’une des
conclusions majeures des études sur les effets d’une privation visuelle est que la
réorganisation intermodale survient de façon à ce que les régions déafférentées
soient prises en charge par les autres modalités sensorielles, soit tactiles ou
auditives (par ex. Gougoux et coll., 2005 ; Pascual-Leone et coll., 2005). Au
contraire des résultats retrouvés chez les personnes aveugles, de récentes études
chez les personnes sourdes suggèrent que la plasticité neuronale est variable en
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fonction des modalités sensorielles (Bavelier et Neville, 2002). Les changements sensoriels chez les personnes sourdes ne semblent pas se faire de façon
aussi uniforme puisqu’on observe une variabilité quant à l’amélioration et la
diminution de la performance de certaines habiletés (pour une revue complète
des recherches effectuées chez les personnes aveugles et sourdes, voir Collignon
et coll. 2011). Bien que partielles, ces données mettent en évidence les conséquences de la réorganisation intermodale chez les personnes sourdes et soulignent l’impact d’une mauvaise adaptation dans un contexte de réadaptation
(voir Merabet et Pascual-Leone, 2010). Ces données sont particulièrement
importantes dans le cadre d’un programme de réadaptation à la suite de l’implantation cochléaire. L’implant cochléaire (IC) est un dispositif qui permet de
convertir un signal auditif en impulsions électriques afin de stimuler directement
le nerf auditif. Ce dispositif permet de restaurer la capacité de détection auditive
d’un individu avec surdité profonde à un niveau se situant dans les limites de la
normale (Mens, 2007). Depuis plusieurs années, des centaines de chercheurs ont
exploré les performances auditives chez les porteurs de l’IC, sans égard à l’influence possible des autres modalités sensorielles sur les résultats. Le consensus
général qui ressort des études dans ce domaine révèle que les performances
auditives sont pratiquement imprévisibles (Peterson et coll., 2010). Cependant
depuis les dernières années, un nombre d’études ont révélé que la plasticité
intermodale s’avère un facteur clé dans les limitations auditives et le déclenchement de conflits multisensoriels chez les porteurs de l’IC (voir Champoux et
coll., 2009 ; Doucet et coll., 2006 ; Landry et coll., 2012a ; Lee et coll., 2001 ;
Lee et coll., 2007 ; Tremblay et coll., 2010). Ces découvertes suggèrent que la
plasticité intermodale ne peut plus être ignorée dans l’intervention et le développement de stratégies de réadaptation chez les personnes porteuses de l’IC.
Depuis peu, on note un important besoin d’adapter les programmes d’entrainement perceptuel pour les porteurs de l’IC en lien avec la nature et le degré de
réorganisation intermodale (Landry et coll., 2012b).
Dans les prochaines lignes, les connaissances actuelles portant sur la réorganisation cérébrale chez les individus ayant une surdité profonde seront résumées. Trois grands thèmes seront abordés. Tout d’abord, les études ayant examiné les changements morphologiques et fonctionnels à l’aide de la
neuroimagerie chez l’individu sourd seront discutées. Par la suite, l’apport de
ces études sur l’identification des facteurs prédictifs de la perception de la
parole chez les porteurs de l’IC sera exposé. Finalement, un aspect plus
moderne de l’apport de la neuroimagerie au domaine de l’audiologie sera approfondi, soit l’importance de ces examens dans l’identification des substrats neuronaux des conflits multisensoriels de la parole chez les porteurs de l’IC.
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♦ Changements morphologiques et fonctionnels
Plusieurs études suggèrent que l’expérience auditive pourrait avoir une
influence majeure sur le développement structurel du cerveau. Par exemple, certaines études ont révélé des modifications structurelles (c.-à-d. une modification
dans la structure macroscopique ou microscopique du cerveau) importantes
chez les musiciens professionnels. En effet, à l’aide de mesures d’épaisseur corticale, Hyde et coll. (2009a ; 2009b) ont révélé des différences importantes dans
les aires auditives et motrices primaires des musiciens. À l’aide de la spectroscopie par résonance magnétique (SRM), Aydin et coll. (2005) ont quant à eux
révélé des différences importantes dans le planum temporale (PT) gauche des
musiciens. Plus spécifiquement, les chercheurs ont démontré que la concentration d’un marqueur d'intégrité neuronale dans le PT, le N-acétylaspartate
(NAA), était modifiée par l’expérience auditive chez l’humain ; la concentration
de NAA étant beaucoup moins grande chez les non-musiciens que chez les
musiciens professionnels. Comme l’expérience auditive semble modifier la
structure anatomique du cerveau, une perte auditive devrait avoir une influence
correspondante dans ces aires cérébrales.
Les examens en tractographie (c.-à-d. en imagerie par diffusion, une technique basée sur l’IRM) n’ont pas réussi à révéler de différences significatives au
niveau de l’intégrité des connexions dans l’aire auditive primaire (Husain et
coll., 2011 ; Kim et coll., 2009). Par contre, la présence de modifications structurelles au niveau des aires auditives a été révélée à quelques reprises chez les
personnes sourdes à l’aide de la volumétrie. On retrouve cependant une grande
variabilité dans les résultats des aires auditives primaires (gyrus de Heschl : HG)
et/ou associatives (PT et gyrus temporal supérieur : STG). Penhune et coll.
(2003), de même que Leporé et coll. (2010) ont révélé une densité normale de
matière grise et de matière blanche dans les aires auditives (HG ou PT) de personnes sourdes. Shibata (2007) rapporte, quant à lui, une réduction de la densité
de matière blanche dans le STG gauche, alors que Emmorey et coll. (2003) ont
révélé une réduction bilatérale de la matière blanche du HG. Chez l’animal, il
semble que la surdité réduit de manière importante la transmission GABAergique (neurotransmetteur inhibiteur) dans le cortex auditif, laquelle est cruciale
à la transduction du signal neuronal (voir Kotak et coll., 2008 ; Sarro et coll.,
2008).
Quelques données suggèrent aussi des différences morphométriques
importantes dans les aires motrices chez les personnes ayant une surdité profonde. Encore une fois, on retrouve une grande variabilité dans les résultats.
Une étude a révélé une augmentation du volume de la matière grise dans l’aire
138
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motrice gauche représentant la main chez les personnes sourdes (Penhume et
coll., 2003). Leporé et ses collaborateurs (2010) ont aussi rapporté des changements importants dans l’aire motrice chez les personnes sourdes de naissance.
Les auteurs rapportent une augmentation de plus de 20% du volume de la
matière blanche dans certaines régions motrices, incluant l’aire de Broca et les
aires adjacentes reliées à la production de la parole. Toutefois, Shibata (2007),
ne rapporte aucune différence de densité de matière blanche ou grise dans les
aires motrices. Finalement, Bogolepova et coll. (2002) ont révélé des différences significatives dans la cytoarchitecture (c.-à-d. l'arrangement et la distribution des cellules) des aires motrices liées à la production de la parole chez un
enfant sourd âgé de 4 ans, suggérant que le développement du cerveau des
enfants « puisse être bouleversé dans des conditions de déficience auditive ».
En somme, les données morphologiques sont très divergentes. Selon
Leporé et coll. (2010), les divergences observées pourraient être expliquées par
un manque d’homogénéité des groupes, notamment en ce qui concerne la durée
de la surdité et l’âge au moment de la surdité. Bien qu’il semble évident que
certains changements soient observables, il ne semble pas y avoir de réorganisation commune observable chez toutes les personnes sourdes.
Au contraire des études morphologiques, les études en neuroimagerie
fonctionnelle sont beaucoup plus concluantes. De façon similaire aux études
menées chez les personnes aveugles, des études en neuroimagerie fonctionnelle
ont révélé que le cortex auditif déafférenté pouvait être pris en charge par le système visuel (voir Doucet et coll., 2006 ; Emmorey et coll., 2003 ; Finney et
coll., 2001 ; 2003 ; Hirano et coll., 2000 ; Lee et coll., 2001 ; Lomber, Meredith
et Kral, 2010 ; Nishimura et coll., 1999 ; Petitto et coll., 2000 ; Shibata, 2007).
Il est effectivement observé chez les personnes ayant une surdité profonde que
la stimulation visuelle de bas niveau active la région de l’aire auditive primaire
droite (Finney et coll., 2001). Il a aussi été établi chez des personnes ayant une
surdité que les aires auditives primaires et secondaires bilatérales peuvent être
impliquées dans la perception du langage gestuel (Petitto et coll., 2000) ou dans
le traitement de la lecture labiale (Hirano et coll., 2000). Les fonctions cognitives de haut niveau semblent occuper la région sous-utilisée du cortex auditif.
Aussi, plus le degré et la durée de la perte auditive sont importants, plus la réorganisation corticale est imposante (Petitto et coll., 2000 ; Hirano et coll., 2000).
Contrairement aux multiples études suggérant une importante réorganisation visuelle chez les personnes sourdes, un nombre moins important d’études
ont suggéré une réorganisation tactile chez l’individu ayant une surdité profonde. Des recherches en imagerie fonctionnelle ont révélé que des stimulations
139
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tactiles de vibrations au niveau des mains pouvaient activer les régions auditives
chez les individus sourds (Levänen, Jousmäki et Hari, 1998 ; Schurmann et
coll., 2006 ; Sharma et coll., 2007). Une étude récente en électrophysiologie de
haute densité démontre des changements tactiles chez l’enfant sourd. Cette
étude suggère une représentation topographique plus étendue d’une composante
précoce (c.-à-d. la composante N20) des potentiels évoqués somesthésiques
(PES) chez certains enfants sourds, plus spécifiquement chez ceux ayant une
plus longue période de privation sensorielle (Charroó-Ruíz et coll., 2013).
♦ Identification des facteurs prédictifs de la perception de la parole
chez les porteurs de l’implant cochléaire
En partant du principe que la réorganisation cérébrale est l’élément clé
pouvant limiter la restauration de l’entrée auditive chez les porteurs de l’IC, les
variables responsables d’une plus grande réorganisation cérébrale deviennent
par conséquent les variables permettant de prédire les performances auditives de
l’individu porteur de l’IC (Green et coll., 2007). Les recherches en neuroimagerie citées plus haut ont permis de déterminer les variables favorisant ou limitant
la réorganisation intermodale. Parmi les variables les plus déterminantes pour la
performance dans les tâches de perception de la parole chez les individus porteurs de l’IC, on retrouve : la durée de la surdité et l’âge au moment de l’apparition de la surdité. Certaines variables plus controversées font présentement l’objet d’études, soit les stratégies de communication et l’utilisation d’aides
auditives permettant de maintenir l’entrée auditive. Finalement, un facteur postimplantation semble aussi déterminant, soit la durée du port de l’implant.
Durée de la surdité. Les résultats des études en neuroimagerie suggèrent
qu’une grande période de surdité peut encourager les fonctions sensori-motrices
à s’approprier les aires du cortex auditif sous-utilisées. Des corrélations directes
ont été rapportées entre la performance de reconnaissance des mots postimplantation, l’activité corticale en réponse à une stimulation auditive et la
durée de la surdité. En effet, il semblerait que l’individu sourd avec une plus
grande période de privation sensorielle démontre un plus faible niveau d’activité
corticale en réponse aux stimulations sonores et une moins bonne performance
avec l’IC (Lee et coll., 2001). Lors de leur étude réalisée à l’aide de la tomographie par émission de positons (TEP), Lee et coll. (2001) ont démontré que la
performance au niveau de la perception de la parole peut être corrélée avec la
durée de la perte auditive. Effectivement, les personnes ayant une surdité depuis
6.5 années avant l’implantation cochléaire présentent une plus grande activation
des aires auditives que les individus ayant perdu l’audition depuis 11 ans avant
140
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l’implantation cochléaire. Les receveurs de l’IC après une période de surdité de
plus de 20 ans sans support auditif ne montrent pratiquement aucune activation
des aires auditives, et ce, bilatéralement.
Âge au moment de l’apparition de la surdité. Le fait que la privation sensorielle survienne à un plus jeune âge comparativement à un âge plus avancé
semble amplifier les changements intermodaux. (Giraud et coll., 2001 ; Lee et
coll., 2001). En effet, il est communément accepté que les candidats chez qui la
surdité survient après l’acquisition du langage (post-lingual) performent mieux
suivant l’implantation cochléaire à toutes les tâches auditives comparativement
aux candidats chez qui la surdité est survenue avant l’acquisition du langage
(pré-lingual) (voir Giraud et coll., 2001). Effectivement, ces personnes peuvent
atteindre des performances de perception de la parole allant jusqu’à 90% après
seulement 2 à 4 années suivant l’activation de l’appareil. Parallèlement à ces
changements comportementaux, des données en neuroimagerie suggèrent aussi
une réorganisation intermodale importante chez les personnes ayant une surdité
congénitale et porteuses d’un IC. En effet, il a été révélé que des stimuli auditifs
activent à la fois les aires auditives primaires et secondaires des personnes porteuses de l’IC ayant une surdité acquise après l’acquisition du langage, alors que
ces mêmes stimuli auditifs activent seulement l’aire auditive primaire chez les
personnes avec une surdité acquise avant l’acquisition du langage (Naito et coll.,
1997). En fait, l’activation de l’aire auditive primaire est similaire chez les personnes ayant reçu l’IC avant l’acquisition du langage et après l’acquisition du
langage dès le moment de l’implantation (Herzog et coll., 1991) alors que l’activation des aires auditives associatives diffère (Hirano et coll., 2000). En d’autres
termes, une surdité précoce semble engendrer une plus grande réorganisation
intermodale qu’une surdité tardive.
Stratégies de communication. Peu de recherches ont révélé l’impact d’un
mode de communication alternatif durant la période de surdité sur la réorganisation cérébrale et sur l’efficacité de l’IC. Certaines recherches ont suggéré que
l’utilisation d’un mode de communication visuel (c.-à-d. l’utilisation de la
langue des signes ou de la lecture labiale) durant la période de surdité pourrait
engendrer des performances réduites dans des tâches de perception de la parole
suite à l’implantation cochléaire (Hirano et coll., 2000, Lee et coll., 2001 ; Doucet et coll., 2006). Par exemple, Hirano et ses collaborateurs (2000) ont révélé
que des patients entrainés à un mode de communication visuel seraient plus
enclins à des changements intermodaux importants comparativement aux individus entrainés à un mode de communication oral. Ce dernier mode de communication semble prévenir l’utilisation par l’information sensori-motrice des
régions corticales sous-stimulées (Hirano et coll., 2000). Ces résultats restent
141
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cependant très controversés. En effet, Lyness et ses collaborateurs (2013) ont
récemment avancé qu’il n’existerait en réalité pas de lien évident entre l’utilisation d’un mode de communication visuel chez les personnes sourdes et les performances dans des tâches de perception de la parole suite à l’implantation
cochléaire. En fait, les auteurs émettent l’hypothèse que la réorganisation cérébrale dans le cortex auditif pourrait survenir et ce, peu importe le mode de communication utilisé.
Utilisation d’aides auditives pré-implantation. Notre équipe de recherche
a récemment exploré les facteurs pouvant contribuer à la variabilité au niveau des
changements intermodaux en étudiant la relation entre la réorganisation intermodale et l’utilisation d’appareils auditifs avant l’implantation cochléaire (Shiell,
Champoux et Zatorre, 2014). L’utilisation de l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle a permis d’identifier l’activité liée aux mouvements des yeux
chez 17 personnes avec surdité acquise en bas âge et 17 contrôles entendants. Il a
été révélé que l’amplitude de l’activité reliée à la réorganisation intermodale au
niveau du gyrus temporal supérieur (GTS) et des connexions entre le GTS et la
région de la scissure calcarine est reliée à la durée du port des appareils auditifs
pré-implantation ; le port continu d’appareils auditifs limitant la réorganisation
cérébrale, même chez les individus sourds de naissance et utilisant un mode de
communication visuel. Ces données supportent l’hypothèse voulant que l’audition résiduelle joue un rôle dans la réorganisation intermodale. Plus spécifiquement, ces données suggèrent que la privation auditive en bas âge altère non seulement la réorganisation des régions auditives, mais aussi l’interaction entre le
cortex auditif primaire et le cortex visuel, et que la stimulation auditive tout au
cours de la vie, aidée par l’utilisation d’appareils auditifs, peut inhiber la réorganisation intermodale chez les personnes sourdes en bas âge. Ces données suggèrent que, dans certains cas précis, l’implantation cochléaire pourrait être indiquée
même chez des personnes ayant une surdité de longue durée et acquise avant
l’acquisition du langage. Encore une fois, ces données restent controversées. En
effet, afin d’éliminer l’action concomitante de certaines variables reliées à la
perte auditive, telle la période d’acquisition du langage (voir Lyness, et coll.,
2013), ces données nécessitent d’être examinées chez un plus grand nombre de
personnes, et ce, en contrôlant plus spécifiquement chacune des variables impliquées dans la réorganisation intermodale citées ci-haut.
Durée du port de l’implant cochléaire. La durée du port de l’IC a été
démontrée comme ayant un effet significatif sur la performance auditive dans
plusieurs études électrophysiologiques. Ces études suggèrent qu’une plus
grande expérience avec l’IC peut aider à recouvrir la fonction auditive après une
privation sensorielle prolongée (par ex. Allen, Nikolopoulos et O'Donoghue,
142
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1998 ; Damen et coll., 2007 ; Nicholas et Geers, 2006 ; Pantev et coll., 2006).
La durée du port de l’IC exerce une influence sur l’évolution de l’activité de la
zone corticale recrutée. À cet effet, l’étude effectuée par Giraud et coll. (2001) à
l’aide de la TEP montre clairement que plusieurs régions du cortex auditif
deviennent de plus en plus actives en réponse à des stimuli auditifs en fonction
d’une plus grande période de temps post-implant. Cette activité s’exacerbe donc
avec le temps et est positivement corrélée avec la capacité de décodage des sons
de la parole. Toutefois, le plus remarquable demeure l’augmentation concomitante de l’activité corticale visuelle. Effectivement, celle-ci a été démontrée
comme étant relativement spécifique puisque l’activité visuelle était corrélée à
l’exposition de sons de la parole, mais non à celle du bruit. Les chercheurs
concluent donc que le cortex visuel participe au décodage de la parole en
empruntant la voie de la lecture labiale.
♦ L’identification des substrats neuronaux des conflits multisensoriels
de la parole chez les porteurs de l’implant cochléaire
Chez les personnes sourdes, les fonctions sensorielles non auditives prennent en charge les régions corticales typiquement associées à l’audition, démontrant la capacité impressionnante du cerveau à s’adapter aux changements. Une
importante question survient alors en regard des fonctions auditives. L’étendue
de la réorganisation cérébrale à la suite d’une surdité revêt une importance particulière pour les audiologistes, spécialement dans les cas où une personne ayant
une surdité profonde fait le choix d’obtenir un IC. Cet appareil permettra de stimuler le système auditif et l’information auditive sera alors redirigée vers les
aires auditives corticales. À la lumière des informations mentionnées ci-haut
concernant la réorganisation intermodale, il est possible que d’autres sens non
auditifs stimulent les régions auditives corticales. D’où la question de savoir
comment l’audition et une autre modalité sensorielle peuvent interagir dans les
tâches exigeant un traitement multisensoriel. Une grande partie de la compréhension de la parole survient dans un environnement multisensoriel dans lequel
des indices sensori-moteurs et auditifs sont présents. Sachant que le cortex auditif peut être stimulé par l’information sensori-motrice après une période de surdité prolongée, il est possible d’émettre l’hypothèse que l’information sensorimotrice peut interférer avec le traitement auditif et le traitement multisensoriel
de certains utilisateurs de l’IC ayant subi une réorganisation plus importante
durant la période de privation auditive (avant l’implantation).
Les interactions audiovisuelles ont été étudiées en profondeur chez l’humain comme chez l’animal. Ces évidences supportent la notion que l’intégration
143
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entre deux sens augmente la précision et la saillance des stimuli auditifs et
visuels par le biais d’un avantage coopératif dans les situations congruentes
(voir Calvert et Thesen, 2004 ; Stein et Stanford, 2008) et fournit la redondance
des indices auditifs et visuels nécessaires pour caractériser plus rapidement et
efficacement les objets dans notre environnement (voir Driver et Noesselt,
2008). Les interactions entre les modalités auditives et visuelles ont été révélées
dans plusieurs conditions expérimentales (Murray et Wallace, 2012). Les caractéristiques spécifiques à l’interaction audiovisuelle chez les individus porteurs
de l’IC ont aussi reçu beaucoup d’attention. Il semble y avoir un consensus
quant à la facilité des individus porteurs de l’IC d’accéder à l’information
visuelle et auditive quand les deux indices sont congruents (par ex. Geers,
2004 ; Giraud et coll., 2001 ; Kaiser et coll., 2003 ; Moody-Antonio et coll.,
2005 ; Tyler et coll., 1997). Certains soutiennent même que les individus porteurs de l’IC seraient meilleurs que les individus avec audition normale pour
intégrer l’information auditive et visuelle dans ces circonstances (par ex. Rouger
et coll., 2007). L’habileté à intégrer l’information audiovisuelle incongruente
(c.-à-d. où le stimulus auditif est sans lien avec la stimulation visuelle présentée
simultanément) a aussi été étudiée récemment. Schorr et coll. (2005) ont utilisé
des stimuli similaires à ceux utilisés pour l’effet McGurk (McGurk et McDonald, 1976) afin d’investiguer la capacité des enfants avec IC à intégrer des
indices multisensoriels incongruents en fonction de l’expérience du langage
oral. Les auteurs ont découvert des résultats comparables aux individus entendants pour les enfants âgés de 2 ans et demi ou moins. Par contre, la capacité de
fusion chez les enfants ayant reçu l’IC plus tard au cours de leur vie était
réduite. Ceci est cohérent avec la notion que la durée de la surdité pourrait être
un facteur important à l’utilisation de l’IC puisque ce facteur a été démontré
comme ayant une influence sur la réorganisation corticale. Ces résultats ont été
confirmés par notre équipe de recherche chez des candidats avec surdité acquise
après l’apprentissage du langage (Tremblay et coll., 2010). Ces données sont
conformes aux différentes notions de changements intermodaux en fonction de
l’âge d’apparition de la privation sensorielle (voir Giraud et coll., 2001). La
capacité de séparer ou fusionner l’information auditive et visuelle conflictuelle
chez les porteurs d’IC a aussi été étudiée par notre équipe de recherche en utilisant des stimuli de parole et de non-parole (voir Champoux et coll., 2009 ; Landry et coll., 2012a ; Tremblay et coll., 2010). Nos plus récents résultats suggèrent que certains utilisateurs d’IC dépendent de façon trop importante des
indices visuels pour séparer les indices auditifs et visuels de façon adéquate.
Ces résultats suggèrent que dans certaines situations multisensorielles, l’information visuelle peut faciliter la perception auditive, mais peut parfois gêner la
144
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performance de discrimination auditive chez certains porteurs de l’IC quand
l’entrée audiovisuelle demande une séparation de l’information (c.-à-d. lorsque
l’information visuelle n’est pas pertinente à la tâche de discrimination auditive).
Il a été suggéré que de tels changements dans le traitement de l’information
multisensorielle soient présents chez les individus ayant eu une plus grande
réorganisation cérébrale. Dans l’ensemble, ces études démontrent l’importance
de comprendre le degré de réorganisation corticale à la suite de la privation sensorielle. Il semble que la nature de la plasticité intermodale suivant la privation
sensorielle soit au cœur de la réadaptation fonctionnelle suivant l’implantation
cochléaire puisque la capacité de restaurer l’audition via cet appareil est directement liée au processus de plasticité neurale.
Les substrats neuronaux de tels conflits multisensoriels de la parole n’ont
toutefois été confirmés que récemment. À l’aide de la TEP, Song et coll. (2014)
ont démontré que les porteurs de l’IC, contrairement aux sujets contrôles, utilisent de manière plus prononcée les aires visuelles et l’aire de l’amygdale droite
dans des tâches audiovisuelles congruentes. Les analyses corrélationnelles ont
aussi révélé que de bonnes performances dans les tâches de parole étaient positivement corrélées avec l’activité de l’amygdale droite dans les situations multisensorielles congruentes (c.-à-d. dans des situations où l’information provenant
de la modalité auditive et visuelle est complémentaire), mais qu’elle était négativement corrélée avec l’activité bilatérale visuelle, peu importe la congruence
dans la tâche. La plus grande différence de l’étude se retrouvait dans une tâche
audiovisuelle incongruente, où les porteurs de l’IC démontraient une activité du
gyrus frontal inférieur gauche, suggérant une modulation cognitive dans la résolution du conflit multisensoriel. Pris dans leur ensemble, ces résultats confirment les données obtenues par notre laboratoire suggérant que les porteurs de
l’IC utilisent de façon prédominante les stimuli visuels dans des tâches de perception de la parole congruentes et qu’ils sont plus distraits par ces derniers
dans des tâches audiovisuelles de perception de la parole incongruentes (Champoux et coll., 2009 ; Landry et coll., 2012a ; Tremblay et coll., 2010).
♦ Conclusion
La surdité, lorsqu’elle survient précocement, peut être accompagnée de
plasticité intermodale. Bien que les données en neuroimagerie soient difficilement utilisables à elles seules afin de préconiser une approche thérapeutique ou
un mode de communication plutôt qu’un autre chez une personne ayant une surdité, elles demeurent instructives pour l’audiologiste et l’orthophoniste
lorsqu’une personne considère l’implantation cochléaire. En effet, il demeure
145
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que pour ceux qui font le choix d’acquérir un IC, cette réorganisation cérébrale
aura un impact indéniable sur la performance dans des tâches de perception de
la parole ; cette réorganisation est un facteur clé pouvant être déterminant dans
les performances auditives et engendrer des conflits intersensoriels chez les porteurs de l’IC (par ex. Champoux et coll., 2009 ; Doucet et coll., 2006 ; Lee et
coll., 2001 ; Lee et coll., 2007 ; Landry et coll., 2012a ; Tremblay et coll.,
2010). Les mesures en neuroimagerie sont souvent les seules permettant de prédire l’efficacité potentielle de l’IC ou d’expliquer les performances perceptuelles supérieures ou amoindries dans certaines tâches spécifiques.
L’étude de la réorganisation cérébrale et de la neuroplasticité est un
domaine très large qui nécessite d’être examiné à des niveaux très différents, du
domaine moléculaire, aux systèmes neuraux jusqu’au domaine du comportement
(Merabet et Pascual-Leone, 2010). Chez les porteurs de l’IC, la neuroimagerie
permet l’identification et la caractérisation de la plasticité cérébrale pré- et postopératoire. Les méthodes de neuroimagerie permettent une connaissance approfondie des changements fonctionnels pouvant s’effectuer au sein du système
auditif central. Ces connaissances permettent une évaluation précise de la réorganisation qui limite parfois la réadaptation suite à l’acquisition de l’IC. Par conséquent, un pronostic de réhabilitation individualisé devient plus envisageable.
À ce jour, il n’existe aucune mesure d’évaluation pouvant prédire avec
certitude quel sera le niveau global de bénéfice de l’IC apporté à une personne.
Il est évident que les techniques d’imagerie ne pourront jamais, à elles seules,
prédire la réussite d’un plan de réadaptation individualisé, bien qu’elles puissent
s’avérer un complément de haute qualité au support offert aux intervenants en
milieux de réadaptation fonctionnelle. Toutefois, comme les données morphologiques ne sont pas encore concluantes et que les données fonctionnelles sont,
pour l’instant, trop complexes et coûteuses, elles sont toujours loin d’être utilisées de manière courante dans la pratique audiologique. Les données en neuroimagerie restent cruciales d’un point de vue fondamental. Comme il a été illustré
dans le présent article, ces données permettent de révéler i) l’origine des problèmes dans la perception de la parole chez les porteurs de l’IC et ii) l’abondance de facteurs affectant la performance post-implantation. Jusqu’à maintenant, les méthodes de réadaptation auditive reflètent ces découvertes et ont
généralement remporté du succès. En effet les données des recherches ont aidé à
prédire la performance de l’IC sur une base individuelle préalablement à l’implantation cochléaire, ont permis un counseling plus efficace et ont permis des
attentes réalistes quant à la performance de l’IC. Ces données ont aussi mené à
la compréhension de la variabilité importante de la performance des individus
porteurs d’IC dans certaines situations. Ces avancées ont permis la mise en
146
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place de procédures de réadaptation post-implant plus individualisées, diminuant ainsi le coût des soins de santé.
Malheureusement, plusieurs domaines de recherches en neuroimagerie
chez les personnes sourdes restent sous-explorés. La plupart des études sont
conduites chez un nombre relativement restreint de personnes et chez des
groupes plus ou moins hétérogènes. Ceci a comme résultat de confondre certaines variables de la réorganisation cérébrale (Lyness et coll., 2013). Par conséquent, plusieurs éléments demeurent très controversés. Les connaissances des
mécanismes associés aux changements sensori-moteurs suivant la période de
privation auditive demeurent encore réduites. De manière encore plus troublante, ce qui reste de ces altérations après la restauration de l’audition via l’IC
et les conflits qui peuvent en découler entre les différents sens demeurent pratiquement inexplorés. En fait, il subsiste encore un débat quant à l’identité des
systèmes qui sont altérés et des mécanismes sous-jacents à la plasticité neuronale adaptative ou maladaptative suivant une période de surdité (pour une revue
complète, voir Bavelier et Neville, 2002). Il va sans dire que les facteurs qui
peuvent réduire ou promouvoir ces changements sont encore moins bien admis
(voir Bavelier et Neville 2002 ; Collignon et coll., 2011 ; Merabet et PascualLeone, 2010). Aussi, ces facteurs n’ont été que survolés chez les personnes porteuses de l’IC (Landry et coll., 2012b). Par ce fait, il devient crucial de découvrir les conséquences de la surdité dans les processus unisensoriels et
multisensoriels chez ces personnes. Parions que ces informations pourront être
appuyées sous peu à l’aide des techniques de neuroimagerie.
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Imagerie par résonance magnétique fonctionnelle
(IRMf) et orthophonie : quelles applications cliniques ?
Edith Durand, Diana Mina, Elisa Vauclare,
Marika Beaudoin Landry, Francis Tremblay, Ana Inés Ansaldo
Résumé
L’orthophonie évolue en se nourrissant des avancées de plusieurs disciplines en vue de
mieux saisir les troubles du langage et de la communication et de parvenir à aider ceux qui
en souffrent. La neuroimagerie fonctionnelle (NIF), ou l’étude du cerveau en action, s’impose
comme une source inépuisable de données empiriques concernant l’origine des troubles de
langage et les phénomènes de plasticité cérébrale qui sous-tendent la récupération induite
par la thérapie orthophonique. Le virage vers des soins axés sur des données probantes est
maintenant très avancé et par conséquent, il est d’autant plus important de traduire les
résultats des études utilisant la NIF ayant été publiées au cours des dernières années à des
applications cliniques pour enrichir la pratique des cliniciens soucieux de l’efficacité des
interventions auprès de la clientèle.
Mots clés : orthophonie, neuroimagerie, IRMf, plasticité cérébrale, aphasie.
Magnetic Resonance Imaging in Speech-Language Pathology: what clinical applications ?
Abstract
Speech-language pathology as a science has been inspired by different paradigms to obtain
a comprehensive understanding of language impairments and develop therapeutic
approaches, from linguistic models to psychological theories. Functional neuroimaging (FNI)
gives us the chance to study human brain in action, a tremendous source of empirical data
describing language impairments and, more importantly, therapy-induced neuroplasticity.
Thus, advances in fMRi research on therapy-induced neuropalsticity must now be translated
to clinical pratice, so as to favor evidence-based interventions in persons with communication disorders.
Key Words : speech-language pathology, neuroimaging, fMRI, neuroplasticity, aphasia.
Rééducation Orthophonique - N° 260 - décembre 2014
151
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Edith DURAND1
Diana MINA1
Elisa VAUCLARE1
Marika BEAUDOIN LANDRY1
Francis TREMBLAY1
Ana Inés ANSALDO1, 2
1 Laboratoire de plasticité cérébrale, communication et vieillissement
Centre de recherche de l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal
2 École d’orthophonie et d’audiologie
Faculté de médecine
Université de Montréal
Correspondance :
Ana Inés Ansaldo, Ph.D.
Professeure agrégée
Département d'orthophonie et d'audiologie
Faculté de médecine, Université de
Montréal
Centre de recherche de l'IUGM
4565, chemin Reine Marie
Montréal, Québec H3W 1W5
Canada
Web: http://www.laboansaldo.com
L
La question de l’efficacité des interventions et du pronostic de récupération du langage est une préoccupation importante pour les orthophonistes,
notamment pour les cliniciens qui interviennent auprès des personnes présentant des troubles acquis du langage. L’avancée des techniques de neuroimagerie fonctionnelle en recherche a permis de donner un nouvel éclairage à ces questionnements, étayant les observations cliniques et les résultats comportementaux
de données neurofonctionnelles. En effet, la neuroimagerie fonctionnelle (NIF)
permet l’étude du cerveau en action et de mettre en évidence la plasticité cérébrale, soit la capacité que le cerveau possède à se remodeler, tout au long de la
vie, et même suite à une lésion cérébrale occasionnée, par exemple, par un accident vasculaire cérébral (AVC). Grâce aux avancées des techniques en NIF, il est
désormais possible d’analyser l’activation des aires cérébrales impliquées dans
une tâche langagière et d’identifier les changements neurofonctionnels corrélés à
l’amélioration comportementale observée chez les patients aphasiques suite à
une thérapie.
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Après un bref rappel à propos de l’aphasie et de la plasticité cérébrale, cet
article s’attachera à présenter différentes techniques en neuroimagerie fonctionnelle. Nous discuterons ensuite des changements neurofonctionnels identifiés
suite à une thérapie en orthophonie et présenterons les perspectives cliniques de
la neuroimagerie envisageables en orthophonie. Étant donné que notre laboratoire cible particulièrement la population des personnes présentant une aphasie,
notre exposé portera sur cette population.
♦ Aphasie, plasticité cérébrale et neuroimagerie
AVC-Aphasie
L’accident vasculaire cérébral est un problème majeur de santé publique.
En effet, à la suite d’un AVC, une personne sur quatre est atteinte d’aphasie. La
prévalence des AVC au Canada est de 50 000 chaque année. Au Canada, 315
000 canadiens et canadiennes vivent avec les séquelles d’un AVC, dont 100 000
vivant avec une aphasie chronique (Agence de la Santé Publique du Canada,
2011). En France, 200 000 à 250 000 personnes vivent avec les séquelles d’une
aphasie (Organisation Mondiale de la Santé, 2013).
L’aphasie peut affecter le langage oral dans son versant expressif comme
réceptif, mais aussi la lecture et l’écriture. Ces troubles acquis du langage
constituent une source de handicap à long terme, car il entrave la participation
sociale, pouvant mener la personne à l’isolement social et à la dépression (Le
Dorze & Brassard, 1995). Il existe différentes façons de classer les différents
types d’aphasies. Dans cet article, nous avons choisi la classification la plus souvent adoptée dans la littérature, à savoir une classification fondée sur la fluence,
divisant les aphasies non fluentes ou de type Broca correspondant à une atteinte
portant davantage sur les capacités d’expression du langage et les aphasies
fluentes ou de type Wernicke correspondant à une atteinte portant davantage sur
les capacités de compréhension du langage (Chomel-Guillaume & Leloup,
2010).
Malgré la diversité de tableaux cliniques d’aphasie, l’anomie ou communément appelée « manque du mot », est la caractéristique commune à toutes les
aphasies. L’anomie constitue une entrave majeure dans les échanges interpersonnels (Macoir, 2012 ; Marcotte, Vitali, Delgado, & Ansaldo, 2006). La récupération de l’aphasie dépend des mécanismes de plasticité cérébrale. Une compréhension accrue de l’interaction entre ces mécanismes et la thérapie du
langage permet de mieux cibler l’intervention orthophonique auprès des personnes aphasiques.
153
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Les mécanismes de la plasticité cérébrale
Définition
La plasticité cérébrale, ou neuroplasticité, est la capacité du cerveau à se
modifier et se remodeler tout au long de la vie. Ce phénomène permanent rend
possible l’apprentissage et l’adaptation à l’environnement (Chomel-Guillaume
& Leloup, 2010 ; Pulvermüller, 2005). Quel que soit l’âge, le cerveau est flexible et capable de changement (Raymer, 2008).
Nous savons aujourd’hui que le cerveau s’appuie sur un fonctionnement en
réseaux fonctionnels. Un réseau est un ensemble de régions cérébrales interconnectées qui sont activées préférentiellement selon la tâche à effectuer. Dans le
fonctionnement normal, le cerveau remodèle continuellement ses réseaux pour
encoder de nouvelles expériences par le principe hebbien (Kleim & Jones, 2008).
Deux processus fondamentaux contribuent à la neuroplasticité cérébrale :
l’un consiste à multiplier les connexions, on parle alors de synaptogénèse, l’autre est responsable de la suppression de connexions inefficaces ou inutilisées,
processus appelé « élagage synaptique ».
La synaptogénèse peut s’envisager selon l’image suivante : si deux neurones sont en activité simultanément, ils créent ou renforcent leur connexion,
via leurs synapses, de sorte que l'activation de l'un par l'autre sera facilitée à
l'avenir. Ce principe est connu sous le nom de « fire-together-wire-together
rule » (traduction libre : « la règle de la stimulation simultanée-connexion spontanée »). Lorsque deux objets ou évènements apparaissent ensemble, les
connexions synaptiques entre deux neurones s’établissent et ils resteront par la
suite connectés fonctionnellement. Ce phénomène soutient l’apprentissage, particulièrement pour l’acquisition du langage (Boulenger, Hauk, & Pulvermüller,
2009 ; Pulvermüller, 2011). En effet, l’apprentissage se fait de manière associative par la mise en relation d’aires cérébrales responsables de la perception et
d’aires du langage pour comprendre les mots relatifs à une situation et les produire également dans le contexte adéquat, avec suffisamment de répétition et de
stabilité pour ancrer la relation (Pulvermüller, 2011). Au fil des expériences, des
réseaux robustes de langage se construisent. Par contre, si les neurones sont
actifs indépendamment et ne sont plus associés, leur lien s’affaiblit (Pulvermüller, 2011 ; Pulvermüller & Berthier, 2008), c’est le processus de l’élagage
synaptique.
Le cerveau remodèle donc continuellement ses réseaux pour encoder de
nouvelles expériences (Kleim & Jones, 2008). Dans le cas de la survenue d’une
lésion, d’autres mécanismes de neuroplasticité sont enclenchés.
154
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Les mécanismes de plasticité cérébrale post-lésionnels
Quand une région cérébrale perd ses connexions suite à une lésion, une
cascade de changements s’opère, liés au drainage des débris dégénératifs, au
remodelage des processus neuronaux et à la production de nouvelles connexions
synaptiques (Kleim & Jones, 2008). D’autre part, les lésions cérébrales peuvent
aussi entraîner à la fois une perturbation de la fonction temporaire et des changements fonctionnels de longue durée, tels que la modification de l’excitabilité
corticale (Carey & Seitz, 2007).
Deux types de processus soutiennent les mécanismes neurobiologiques de
récupération : la réactivation fonctionnelle et la réorganisation fonctionnelle. La
réactivation fonctionnelle est caractérisée par la récupération par les aires périlésionnelles de leurs fonctions antérieures. Dans le cas du langage, les aires lésées
de l’hémisphère gauche recouvrent leur fonctionnement antérieur après une
période d’hypoactivité occasionnée par la période de latence post-lésionnelle
appelée diaschisis. La réorganisation fonctionnelle, quant à elle, consiste en l'activation d’aires cérébrales non canoniques pour la tâche, aussi bien dans l'hémisphère ipsilésionnel que contra-lésionnel (Grafman, 2000). Ce phénomène survient généralement lorsque les lésions sont plus massives (Crosson, 2007 ;
Heiss, 2003 ; Perani, 2003 ; Thompson, 2010). Ainsi, les aires homologues aux
aires lésées peuvent être recrutées. Plus récemment, les avancées en recherche
animale ont permis de mettre en évidence qu’il était possible d’agir sur les
mécanismes de plasticité cérébrale post-lésionnels ; ces recherches ont dégagé
des principes qui, adaptés à la recherche en neuro-réadaptation chez l’humain,
sont à intégrer dans les thérapies en vue d’optimiser ces mécanismes.
Principes de neuroplasticité dépendante de l’expérience
Les études menées chez les animaux (Taub, Uswatte, & Elbert, 2002) ont
permis de dégager les principes thérapeutiques essentiels rendant possible des
améliorations au niveau comportemental associées à des changements neurofonctionnels. Selon Kleim et Jones (2008), ces principes de neuroplasticité
dépendante de l’expérience (NPDE) sont à appliquer dans les protocoles des
thérapies et incluent notamment la spécificité, la répétition, la fréquence, la
durée et la saillance. La spécificité d’une thérapie désigne le fait de cibler un
traitement spécifique lors d’une intervention qui impliquera la nature des changements neurofonctionnels. De plus, pour que des changements neurofonctionnels opèrent, un taux de répétition par séance suffisant est nécessaire afin d’atteindre un niveau d’amélioration et ce, en effectuant plusieurs séances de
thérapie par semaine. Enfin, la saillance désigne le fait que la thérapie doit porter sur une tâche utile pour la personne, susceptible de capter toute son attention
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et sa motivation, avec l’importance bien connue par les cliniciens de proposer
des items personnalisés d’intervention. Nous relaterons ci-après les résultats
d’une étude de notre laboratoire qui a identifié les changements neurofonctionnels associés aux améliorations comportementales suite à une thérapie sémantique intégrant les principes de spécificité, répétition, intensité, durée et saillance auprès de personnes aphasiques chroniques avec anomie (Marcotte et al.,
2012). En ce qui concerne les autres principes, leurs impacts n’ont pas été
démontrés en utilisant la NIF. Nous ne les relaterons donc pas dans cet article.
L’ensemble des principes NPDE sont importants à intégrer dans une thérapie en vue d’obtenir des changements comportementaux associés à des changements neurofonctionnels inscrits sur le long terme. En vue d’identifier les
changements neurofonctionnels associés aux changements comportementaux
dans le cadre des recherches concernant l’aphasie et sa récupération, différentes
techniques de neuroimagerie ont été exploitées.
♦ Techniques de neuroimagerie fonctionnelle
IRMf et outils d’analyse de données
IRM et IRMf
L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est une technique basée sur
la génération d’un champ magnétique combinée à l’émission de radiofréquences. L’IRM permet la mise en évidence des structures anatomiques et
l’identification de lésions anatomiques chez les personnes ayant subi un AVC.
L’IRM fonctionnelle, ou IRMf, permet, par une mesure indirecte, l’étude du
« fonctionnement » du cerveau avec une bonne résolution spatiale, mais une faible résolution temporelle. Pour plus de détails sur l’IRMf, nous renvoyons le
lecteur au travail présenté dans ce volume par Coll, Blais-Michaud et Jackson :
« Introduction à la neuroimagerie et à son application pour l’étude du langage et
de la cognition ».
Outils d’analyse de données
Suite à une acquisition de données en IRMf, il existe différents outils
d’analyse de données qui permettent de répondre à différents besoins de
recherche. En effet, d’une part, il est possible d’étudier les activations des aires
cérébrales de manière isolée ; on parle alors d’analyses en ségrégation. Il est
alors possible d’identifier les activations locales liées à une tâche. D’autre part,
il est possible d’étudier l’activation de réseaux cérébraux, soit des ensembles
d’aires qui agissent de manière synchrone pour accomplir une tâche ; on parle
156
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alors d’analyses en intégration. En effet, les aires cérébrales activées au cours
d’une tâche sont interconnectées de manière proximale ou via des faisceaux de
matière blanche, formant ainsi une grande variété de réseaux fonctionnels dynamiques, qui changent leur configuration selon la nature et le niveau de difficulté
de la tâche. Des réseaux sont désormais identifiés au niveau de la mémoire, de
l’attention, du langage, mettant en évidence le travail synchrone et en synergie
de certaines aires recrutées pour effectuer des tâches cognitives (Katell, 2009).
L’étude des réseaux fonctionnels constitue une avenue très intéressante pour
comprendre le fonctionnement cérébral normal. Par exemple, le « réseau du
mode par défaut » (RMD), décrit de manière très précise chez les participants
sains, est identifiable lorsque le participant est au repos, les yeux fermés, sans
faire d’activité spécifique. Lors de la survenue d’une tâche précise, ce réseau
diminue son intégration, au profit de la mise en jeu d’autres réseaux spécifiques
au traitement de l’information reliée à la tâche.
La spectroscopie proche infrarouge
Une autre technique de NIF est la spectroscopie proche infrarouge (Near
InfraRed Spectroscopy (NIRS)), appelée aussi « imagerie optique ». Cette technique permet de déterminer les activations cérébrales provoquées par la réalisation d’une tâche par le participant. Utilisant un type de lumière proche de l’infrarouge, l’imagerie optique permet de mesurer les variations hémodynamiques
(modification de l’oxygénation de l’hémoglobine du sang). Cette technique, peu
coûteuse et facilement déplaçable, s’est avérée efficace pour étudier le fonctionnement cérébral. Cette technique à haut potentiel clinique pourrait, dans l’avenir, devenir un outil de prise de décision clinique accessible aux orthophonistes,
qui pourraient s’en servir pour faire des courts tests du potentiel de plasticité
cérébrale en lien avec des approches d’intervention précises. De la sorte, l’orthophoniste pourrait tenir compte des facteurs neurofonctionnels pouvant moduler le pronostic de récupération des clients et l’efficacité des interventions orthophoniques. Ceci étant dit, nous sommes encore loin de ces applications. Par
contre, l’étude du langage à l’aide de la NIRS est en pleine évolution et de nombreux travaux sur le langage ont été publiés dans la dernière décennie. Nous
référons le lecteur au numéro spécial de la revue Brain & Language sur ce sujet
(Ansaldo, Kahlaoui, & Joanette, 2012).
La stimulation transcrânienne magnétique
La dernière technique que nous aborderons est la stimulation transcrânienne magnétique (STM). Cette technique non invasive consiste en l’application d’une impulsion magnétique sur le cortex cérébral à travers le crâne, au
moyen d’une bobine. L’impulsion magnétique induit de brefs courants intra-cor-
157
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ticaux qui dépolarisent les neurones (Di Lazzaro et al., 1998). Pour exemple, si
la STM est appliquée au niveau des régions motrices, alors elle induit une activité motrice, si elle est appliquée au niveau des aires associatives corticales, elle
induit de brèves perturbations dans des tâches cognitives dans lesquelles le participant s’inscrit (Valero-Cabré, Pascual-Leone, & Coubard, 2011). La STM a
notamment permis de dresser des cartes des aires motrices du cerveau et d’explorer les liens entre stimulation et comportements observables.
Développement d’outils de thérapie utilisant les principes de NIF
La STM fait partie des outils aujourd’hui explorés pour leurs apports thérapeutiques. En effet, la stimulation transcrânienne répétitive utilise le principe
de stimulation focale en vue de modifier l’activité d’aires cibles, dont nous donnons quelques résultats dans la section suivante. Nous ajouterons enfin la stimulation électrique transcrânienne à courant direct (transcranial Direct Current Stimulation (tDCS)), qui utilise des électrodes positionnées sur le crâne en
fonction des régions dont on souhaite influencer le fonctionnement. L’application d’un faible courant entre les électrodes permet de modifier l’activation
d’aires cibles. Nous relaterons aussi quelques résultats obtenus suite à l’application de la tDCS.
♦ Les apports de la neuroimagerie fonctionnelle à la thérapie orthophonique
En plus d’offrir la possibilité d’étudier les mécanismes de plasticité cérébrale soutenant la récupération spontanée de l’aphasie, les techniques de neuroimagerie mettent en évidence les changements neurofonctionnels induits par les
thérapies du langage.
Marqueurs fonctionnels plus spécifiques par thérapie
Dans son acception première, un marqueur est un élément permettant de
repérer une chose ou un phénomène. Dans le domaine médical, un marqueur
biologique ou biomarqueur est une mesure objective de la réponse biologique
qui est quantifiable, précise et reproductible (Leppänen, 2013). De nos jours, le
terme « marqueur » est davantage utilisé comme indicateur de la présence d’un
état pathologique. Ainsi, en biologie moléculaire, les marqueurs biologiques,
tels que certains antigènes spécifiques, sont recherchés pour identifier la présence de cancers. L’avancée des techniques de neuroimagerie, et notamment la
neuroimagerie fonctionnelle, a impliqué la définition de marqueurs d’une nouvelle génération : les marqueurs neurofonctionnels. Les marqueurs neurofonctionnels sont définis par le rapport entre l’amélioration comportementale et les
158
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changements neurofonctionnels (Burke, Dobkin, Noser, Enney, & Cramer,
2014). Ils permettent l’identification des processus neurofonctionnels déficitaires ou bien le niveau d’efficacité probable d’une thérapie du langage administrée à des populations spécifiques. Une compréhension des mécanismes neurofonctionnels permettra de mieux cibler l’intervention orthophonique auprès des
personnes aphasiques. Les marqueurs neurofonctionnels peuvent être identifiés
en utilisant des méthodes d’analyses en ségrégation (activation d’aires) ou des
méthodes d’analyses en intégration (connectivité fonctionnelle). Dans les études
mesurant l’efficacité d’une thérapie du langage, les calculs de corrélation permettent l’identification de marqueurs neurofonctionnels prédictifs de la réponse
à une thérapie donnée.
À cet égard, Meinzer, Djundja, Barthel, Elbert et Rockstroh (2005) ont
effectué une revue de littérature sur les marqueurs neurofonctionnels caractérisant l’application de thérapies par contrainte induite (TCI). Les TCI sont une
adaptation des thérapies initialement appliquées au traitement des troubles
moteurs secondaires à des accidents vasculaires (Taub et al., 2002). Elles intègrent les principes de neuroplasticité dépendante de l’expérience. Ainsi, la thérapie par contrainte induite (voir page 230 dans cet article) vise l’amélioration
de la communication fonctionnelle en imposant une contrainte spécifique au
patient : se limiter à la communication verbale, donc pas de gestes ni d’utilisation du langage écrit. De plus, le patient doit produire des énoncé précis, dans
des contextes de communication contrôlés (Pulvermüller et al., 2001). Dans une
de leurs études, Meinzer et al. (2008) mentionnent que 11 participants présentant des aphasies chroniques de types variés, mais dont le symptôme commun
est l’anomie, ont bénéficié d’une thérapie par contrainte induite administrée à
raison de 3 heures de traitement par jour pendant 10 jours consécutifs. Une
séance d’IRMf avant et une après la thérapie ont permis d’identifier les marqueurs neurofonctionnels de neuroplasticité induite par la TCI. Les résultats de
cette étude indiquent que tous les participants ont montré une amélioration en
dénomination d’images traitées et non traitées ainsi que dans une variété de tests
langagiers inclus dans leur batterie. Quant aux données d’IRMf, elles ont permis
de mettre en évidence une corrélation entre l’amélioration en dénomination et
l’activation post-thérapie des aires périlésionnelles spécifiques à chacun des participants. Cette étude est intéressante, mais elle ne permet pas d’associer l’efficacité de la TCI à un profil neurofonctionnel commun à tous les participants, ce
qui empêche la généralisation des observations en IRMf à l’ensemble de la
population étudiée.
Une autre étude du même type mesurait l’impact de la TCI auprès de 16
participants présentant une aphasie chronique (Richter, Miltner, & Straube,
159
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2008). Les résultats ont montré une amélioration de la production spontanée
chez les participants. De plus, les analyses de corrélation ont permis de mettre
en évidence que l’activation du gyrus inférieur droit et de l’insula en pré-thérapie serait prédictive de l’amélioration suite à la TCI. Cette étude est intéressante,
car elle fait un lien direct entre l’activation pré-thérapie de l’hémisphère droit et
la réponse positive à la TCI. Par contre, les auteurs (Richter et al., 2008) ne
fournissent pas une description détaillée de la procédure de la thérapie, ce qui
empêche de reproduire le protocole et limite donc la généralisation des observations à d’autres cohortes de personnes avec aphasie non fluente et chronique
souffrant d’anomie.
Une autre étude de ségrégation menée par Marcotte et al. (2012) au sein
de notre laboratoire s’est intéressée à étudier les changements neurofonctionnels
associés à une thérapie par analyse des traits sémantiques (SFA) chez 9 participants souffrant d’aphasie chronique non fluente et d’anomie, qui participaient à
une séance d’IRMf avant et après la thérapie. Suite à la thérapie, en plus d’une
amélioration de la dénomination chez tous les participants, des changements
neurofonctionnels ont permis de documenter la plasticité cérébrale induite par la
thérapie. Plus spécifiquement, deux aires ont joué un rôle clé : le lobule pariétal
inférieur gauche et le gyrus précentral gauche dont l’activation post-thérapie a
été observée chez l’ensemble des participants. Ces aires, recrutées lors de tâches
de dénomination chez les participants sains, font partie du système de neurones
miroirs (Aziz-Zadeh, 2012 ; Aziz-Zadeh, Wilson, Rizzolatti, & Iacoboni, 2006 ;
Kemmerer, Castillo, Talavage, Patterson, & Wiley, 2008 ; Pulvermüller, 2005,
2011 ; Rizzolatti & Craighero, 2004 ; Rizzolatti & Sinigaglia, 2010 ; Tettamanti
et al., 2005) et participent à l’encodage d’informations sensorimotrices et multimodales qui étaient stimulées par la nature sémantique de la thérapie SFA. La
stimulation intensive des traits sémantiques sensorimoteurs induite par la SFA
favoriserait le recrutement de ce système qui prendrait en charge la dénomination lorsque le circuit canonique est endommagé par un AVC (Durand, 2013).
De plus, cette étude a permis d’identifier des marqueurs neurofonctionnels prédictifs d’une bonne réponse à la thérapie SFA chez l’ensemble des participants.
En particulier, l’activation du cortex moteur primaire avant la thérapie SFA a été
associée à une réponse positive à la SFA. De plus, la procédure de la thérapie est
décrite en détail, et donc reproductible. Ainsi, le devis expérimental de cette
étude (Marcotte et al., 2012) permet de généraliser les observations à l’ensemble
de la population souffrant d’aphasie chronique non fluente, avec anomie sévère.
Bien que l’utilisation d’indices sémantiques dans la thérapie du manque du mot
soit fréquente, elle ne s’avère pas toujours efficace ; les données de Marcotte et
al. (2012) permettent de cibler les meilleurs candidats à bénéficier de cette
160
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approche. Malgré le fait que l’IRMf ne soit pas un outil accessible dans les centres de réadaptation, il est possible que dans un futur pas si lointain, on puisse
adapter ce protocole au milieu clinique en le rendant accessible aux orthophonistes par le biais de l’imagerie optique qui, tel que discuté dans la section 2.2.,
est un outil bien plus économique et adapté à une situation clinique que l’IRMf.
L’observation d’un lien positif entre l’activation du cortex moteur et
l’amélioration de la dénomination rapporté dans ces études (Durand, 2013 ;
Marcotte et al., 2012) vient corroborer des observations convergentes provenant
de plusieurs études (Pulvermüller, 2011 ; Small, Buccino, & Solodkin, 2013)
parmi lesquelles les activations cérébrales concomitantes des aires motrices et
des aires langagières montrent que le geste pourrait améliorer la production
(Raymer et al., 2006 ; Rose, 2006). Ces études ouvrent aussi des perspectives en
neuro-réadaptation, notamment l’intérêt des thérapies transdisciplinaires mettant
en synergie les ergothérapeutes et les orthophonistes, par exemple.
Des marqueurs neurofonctionnels révélateurs des différents réseaux
impliqués dans la récupération du langage
Le langage, par sa complexité, implique la mise en relation de plusieurs
fonctions cognitives telles que la mémoire, l’attention et les fonctions exécutives. Ainsi, Fridriksson, Nettles, Davis, Morrow et Montgomery (2006) ont
montré via une étude comportementale auprès de 25 participants présentant une
aphasie des corrélations significatives entre les scores en communication fonctionnelle et les scores aux tests de fonctions exécutives. Cette étude met en évidence les liens entre les fonctions cognitives et le langage. Les études en neuroimagerie fonctionnelle viennent étayer ces constats comportementaux. Ainsi, les
études d’intégration permettent d’explorer les changements neurofonctionnels
observés suite à une thérapie orthophonique dans le réseau langagier, mais aussi
dans d’autres réseaux identifiés. Une étude de Marcotte, Perlbarg, Marrelec,
Benali et Ansaldo (2013) s’est focalisée sur le RMD, bien décrit chez des participants sains et altéré dans plusieurs conditions associées aux troubles du langage telles que la maladie d’Alzheimer, le trouble du spectre de l’autisme, la
schizophrénie et le traumatisme crânien (Buckner, Andrews-Hanna, & Schacter,
2008). Neuf participants avec aphasie chronique non fluente et anomie ayant
reçu une thérapie par analyse des traits sémantiques (SFA) ont été examinés à
l’aide des analyses de connectivité fonctionnelle permettant de décrire le RMD.
Les résultats démontrent que la lésion causant l’aphasie diminue la connectivité
du RMD, mais que la thérapie SFA, administrée de manière intensive, permet
d’améliorer cette connectivité jusqu’à atteindre des niveaux comparables à ceux
présents chez des participants sains. Étant donné l’importance du RMD dans le
161
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cadre du traitement attentionnel et mnésique, ces résultats montrent que la thérapie orthophonique a un impact au-delà des circuits spécifiques au langage, mettant en évidence l’effet potentiel des interventions orthophoniques auprès d’autres populations présentant des troubles cognitifs non langagiers. Ceci est un
argument de poids pour justifier les interventions orthophoniques dans des cas
où les difficultés attentionnelles et mnésiques sont le premier signe observé.
Une autre étude plus récente de Tremblay, Durand, Marcotte et Ansaldo (2013)
a trouvé une corrélation positive entre l’intégration du RMD pré-thérapie et la
récupération de l’anomie de verbes suite à une thérapie SFA pour les verbes.
L’état du RMD avant la thérapie pourrait donc permettre de prédire une réponse
positive à la thérapie SFA chez une population souffrant d’aphasie et d’anomie
pour les verbes, contribuant ainsi à une prise en charge plus efficace de ce type
de trouble langagier. Ces deux études (Marcotte et al, 2013 ; Tremblay et al,
2013) pourraient avoir des applications cliniques importantes, car l’étude du
RMD demande peu de temps et ne nécessite pas un protocole IRMf complexe,
ce qui permettrait d’avoir accès aux marqueurs d’efficacité de manière économique en termes de temps et de coût. (Marcotte et al., 2013 ; Tremblay et al.,
2013, November 7th).
Les thérapies combinant traitement et utilisation d’un outil de stimulation
La stimulation transcrânienne magnétique répétitive (STMr) : un outil en
développement pour les thérapies du langage
En phase aiguë post-AVC, tandis que l’excitabilité cérébrale de l’hémisphère intact est augmentée, celle de l’hémisphère lésé est diminuée (Mally,
2013). Cette activité importante dans l'hémisphère préservé pourrait inhiber et
interférer avec la récupération fonctionnelle du langage (Weiduschat, 2011).
Des techniques de stimulation cérébrale non invasive utilisent la stimulation
transcrânienne magnétique (STM) ou la stimulation transcrânienne à courant
direct (tDCS), qui peuvent modifier l’excitabilité des groupes de neurones. Les
résultats obtenus suggèrent que la stimulation magnétique inhibitoire de la zone
homologue de Broca dans l'hémisphère droit, couplée à des séances de thérapie
orthophonique, permet d’éviter une latéralisation hémisphérique droite pour le
langage (Weiduschat, 2011). En outre, la normalisation des activations cérébrales peut être accompagnée d'une amélioration clinique (ibid.). Les stimulations peuvent être uniques, séparées de quelques secondes ou répétées (STMr).
La combinaison de STMr ou de tDCS avec des séances de thérapie orthophonique immédiates peut promouvoir des améliorations additionnelles du langage
pour une variété de patients aphasiques (Martin, 2014 ; Naeser, 2010). En effet,
162
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les résultats ont démontré une augmentation de l’activation de l’aire motrice
supplémentaire gauche chez les participants présentant des aphasies chroniques
non fluentes qui recevaient des séances d’orthophonie couplées avec la stimulation cérébrale par STMr. Ils ont pu rehausser un circuit neuronal spécifique pour
la tâche de dénomination et ce circuit a été renforcé immédiatement post-STMr
avec la pratique additionnelle de la tâche. Il est à espérer que l’utilisation combinée des thérapies et de la STMr puisse optimiser les changements de neuroplasticité induits par chacune d’elles, ce qui augmenterait les gains cliniques
chez les patients avec des aphasies chroniques et des déficits langagiers stabilisés. Il s’agit ici d’orienter la neuroplasticité pour permettre de meilleurs gains
en concomitance avec les activités de rééducation (Naeser, 2010).
L’apport de la STM et la STMr à l’orthophonie est indiscutable. Les
études de Tremblay et Gracco (2009) avec des participants sains démontrent les
effets spécifiques de la STM appliquée sur le cortex ventral prémoteur gauche
dans des tâches de discrimination de phonèmes et le recrutement du système
moteur pour assister la segmentation phonologique ainsi que le processus de
mémoire de travail. Grâce à l’utilisation de la STM, les résultats de cette étude
confirment l’étroite connexion entre la perception de la parole et les systèmes de
production.
Dans une autre étude, Tremblay, Sato et Small (2012) utilisent la STMr
afin de créer une « lésion » réversible du cortex prémoteur ventral gauche et
examinent les conséquences de la lésion dans la construction de phrases décrivant à la première personne des actions et des objets. Le principal résultat de
cette étude démontre que l’inhibition par la STMr du cortex prémoteur ventral
gauche module la construction de phrases décrivant des actions manuelles
Tremblay, Satto et Small (2012).
L'importance de la recherche fondamentale est ici renouvelée pour permettre ce type de percée au plan clinique. Toutefois, cette technique d'avantgarde se butte aux données limitées que nous détenons actuellement sur les processus neurofonctionnels en réseaux qui sous-tendent le langage.
Enfin, les avancées des méthodes d’analyse en neuroimagerie anatomique
permettent actuellement d’appréhender l’analyse de la substance blanche corticale, via des acquisitions en imagerie du tenseur de diffusion (diffusion tensor
imaging (DTI)). Le rôle de la substance blanche est primordial dans la transmission des informations. Van Hees et al. (2014) ont identifié des changements au
niveau de la diffusivité du faisceau arqué et du faisceau unciné avant et après
l’application d’une intervention intensive de 12 séances de traitement phonologique et sémantique auprès de 8 participants aphasiques. Avant la thérapie, les
163
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mesures chez les participants aphasiques montraient une plus faible diffusivité
dans le faisceau arqué en comparaison avec des participants contrôles appariés.
Après la thérapie, les mesures dans le faisceau arqué gauche étaient similaires à
celles des participants contrôles. Aucun changement significatif n’a été démontré pour le faisceau unciné. Ces changements neurofonctionnels démontrent
l’impact de la thérapie sur la substance blanche sous-jacente, notamment le faisceau arqué gauche. Des études futures se pencheront sur la recherche de marqueurs en DTI pouvant prédire la réponse à une thérapie donnée. Ce type
d’études aurait un potentiel clinique important, car il pourrait informer les
orthophonistes sur les meilleurs choix thérapeutiques selon le statut (préservé ou
touché) de la matière blanche.
♦ Discussion et conclusion
La contribution de la neuroimagerie fonctionnelle à la pratique orthophonique est indéniable et elle se trouve à plusieurs niveaux. Premièrement, elle
permet d'obtenir des repères quant au traitement neurofonctionnel du langage
chez des participants sains (Price, 2000) en documentant la complexité des processus langagiers qui mettent en action un ensemble d’aires bien au-delà des
aires de Broca et de Wernicke. Puisque le traitement du langage est largement
distribué à travers le cerveau, des lésions très variées sont susceptibles d’entraîner des déficits langagiers qui mériteraient d’être évalués par des orthophonistes. De plus, les études en neuroimagerie montrent l’impact des interventions
orthophoniques au niveau cérébral, soit par la réactivation des aires induite par
une intervention orthophonique, soit par le recrutement d’aires non canoniques
suite à une intervention orthophonique. De plus, la NIF peut contribuer à orienter le choix des interventions par le biais des marqueurs neurofonctionnels de
pronostic ; ces marqueurs indiquent qu’un tel profil d’activation observé avant
la thérapie est associé à une bonne réponse à une thérapie donnée. Ce type d’information a le potentiel d’augmenter l’efficience et l’efficacité des interventions
orthophoniques.
Ceci étant dit, la validité écologique des études menées en NIF dans un
contexte clinique est à considérer. En effet, la lourdeur technologique des
approches, le coût des examens et le caractère complexe des protocoles actuels
ne permettent pas de se servir de la NIF dans un contexte clinique orthophonique. Toutefois, les données probantes issues de la NIF servent d’arguments
pour justifier des interventions orthophoniques chez des populations variées, et
fournissent des pistes quant aux approches plus efficaces selon le type de profils
d’aphasie. Aussi, l’aspect social et contextuel de la communication entre deux
164
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interlocuteurs est difficile à reproduire dans un contexte technologique lourd
comme celui de la majorité des techniques de NIF. Il est possible que dans
l’avenir, des données recueillies en imagerie par résonance magnétique fonctionnelle puissent inspirer des études se servant de l’imagerie optique, une technologie légère et portative, où le participant peut être assis face à un interlocuteur et en interaction communicationnelle. Ainsi, il sera important de développer
des protocoles adaptés en termes de durée et de coût pour que les découvertes
dans le domaine puissent être intégrées à la pratique clinique.
Une autre contribution importante de la NIF à la clinique orthophonique
découle des données probantes sur les interactions entre réseaux divers, tels le
réseau moteur et le réseau langagier. Ces données pointent vers l’intérêt d'orienter la neuro-réadaptation vers l’application des approches transdisciplinaires
d’intervention pouvant stimuler la synergie existant entre ces réseaux. Ainsi, la
neuroplasticité induite par la thérapie est interprétée dans sa globalité, amenant
chaque professionnel de la réadaptation à travailler en collaboration pour
converger vers un objectif commun.
Par ailleurs, les données provenant des études en connectivité indiquent
que des interventions visant le langage pourraient avoir un impact réparti sur les
fonctions exécutives (Marcotte et al., 2013). Cela n’est pas surprenant quand on
considère la complexité du langage, une fonction cognitive intégratrice de multiples fonctions telles la mémoire et l’attention. De plus, ces données probantes
mettent en valeur les interventions orthophoniques au-delà de la clientèle « traditionnelle » et justifient davantage le rôle de l’orthophoniste auprès d'une
grande diversité de clientèles. Par ailleurs, grâce à la neuroimagerie fonctionnelle, l’impact des interventions orthophoniques chez des populations avec déficits chroniques n’est plus à questionner ; la NIF montre que la neuroplasticité
induite par la thérapie orthophonique est possible même longtemps après la
lésion.
En conclusion, les données de la neuroimagerie fonctionnelle constituent
de précieuses ressources pour les activités d'évaluation et d'intervention des cliniciens. Une pratique basée sur les données probantes est enrichie par des
conceptions théoriques et des paradigmes décrivant l’activité cérébrale et ses
multiples facettes. En plus de considérer les besoins du patient et l'expérience
clinique, le professionnel dispose également de données empiriques se référant
à la réactivité du cerveau à la stimulation orthophonique et aux perspectives
d'évolution pour réussir à offrir un traitement optimal. Le potentiel de réadaptation d’un patient peut dès lors être mieux défini pour optimiser l’offre de services du système de santé.
165
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Pour assister le travail des cliniciens, les recherches futures devront continuer à identifier des marqueurs neurofonctionnels pouvant orienter le choix
d’une approche au profit d’une autre. Par exemple, dans le cas de l’aphasie, certaines caractéristiques du profil neurologique d’un patient pourraient mener au
choix d’une thérapie d’indiçage phonologique, alors que d’autres inviteraient à
privilégier une approche sémantique.
La poursuite de ce type de recherches permet d’argumenter l’introduction
prochaine de techniques de neuroimagerie fonctionnelle dans les établissements
de santé pour assister le travail des cliniciens par le biais de protocoles adaptés
aux besoins du milieu. Visualiser l’activité cérébrale d’un patient lors de tâches
langagières pourrait permettre d’inférer le pronostic de récupération et les interventions potentiellement efficaces. De plus, l’étude de l’état de repos pourrait
permettre d’utiliser la neuroimagerie fonctionnelle en clinique sans avoir systématiquement recours à une procédure spécifique durant la prise d’images. En
demandant simplement au patient de s’allonger sans bouger, il serait possible
d’obtenir de précieuses informations sur l’intégrité du réseau du mode par
défaut, valeur prédictive de la récupération du langage. En somme, investir dans
l’introduction de technologies de neuroimagerie fonctionnelle accessibles aux
cliniciens et à leurs patients permet de rentabiliser les ressources en place en
orientant la prise en charge par des mesures objectives. À moyen terme, la rentabilité de l’investissement est envisageable et mérite d’être davantage étudiée
par nos institutions.
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Contribution de l’IRM à l’analyse de la physiologie
de la déglutition et des dysphagies oropharyngées :
étude fonctionnelle des prothèses intra-laryngées
Florence Guilleré
Résumé
Ces travaux ont pour objectif, à partir de l’analyse en ciné-IRM du processus de déglutition
salivaire chez un sujet sain, d’optimiser le rendement clinique de cette technique pour les
dysphagies. Un protocole d’imagerie rapide et une grille d’évaluation (D-GRID) ont été
conçus. Leur application a été étudiée chez des patients présentant une tumeur des voies
aéro-digestives supérieures, et chez des patients porteurs de Prothèses Intra-Laryngées
(PIL). La D-GRID permet de mesurer et d’évaluer le mécanisme de protection des voies
aériennes, de concevoir des programmes de réhabilitation et de suivre l’évolution des dysphagies. L’analyse de la déglutition en ciné-IRM est limitée par l’absence de bolus et la
position de decubitus dorsal, mais nos résultats montrent sa fiabilité. La ciné-IRM définit des
modèles du déplacement normal ou anormal des structures anatomiques au cours de la
déglutition. Les données de l’imagerie dynamique contribuent au développement des PIL.
Mots clés : ciné-IRM, déglutition salivaire, dysphagies oropharyngées, grille d’évaluation
(D-GRID), prothèses Intra-Laryngées.
Contribution of cine-MRI to the physiology of swallowing and oro-pharyngeal dysphagia. Functional study of intra-laryngeal prostheses
Abstract
The aim of this study was to develop the use of fast imaging to assess the swallowing
mechanism in healthy volunteers, and to optimize its clinical use in case of oro-pharyngeal
dysphagia. A fast imaging protocol during dry swallowing and an evaluation grid (D-GRID)
were designed. Healthy subjects, patients with head and neck cancer or patients implanted
with intra-laryngeal prostheses underwent kinetic MRI. True-FISP sequences provide accurate information about morphological aspects of the oro-pharyngo-larynx and displacements
of anatomical structures involved in the normal or impaired swallowing mechanism. The
analysis of the swallowing process with cine-MRI is restricted because of the lack of bolus
and the supine position, but our results show the reliability of this method. Patterns of normal or abnormal anatomical structures movements during swallowing are determined by
cine-MRI. The development of Intra-Laryngeal Prostheses represents a therapeutic solution
partly based on dynamic MRI data.
Key Words : Cine-MRI, Dry Swallowing, Oro-Pharyngeal Dysphagia, Evaluation grid
(D-GRID), Intra-Laryngeal Prostheses.
Rééducation Orthophonique - N° 260 - décembre 2014
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Florence GUILLERÉ, Ph.D.
Orthophoniste
Service d’ORL et de chirurgie cervicofaciale
CHU de Strasbourg
Hôpital Hautepierre (Strasbourg)
1 Av Molière
67098 Strasbourg Cedex
Courriel :
[email protected]
L
’article présenté est un extrait de la thèse soutenue en septembre 2013 par
Florence Guilleré, orthophoniste au service d’ORL et de chirurgie cervico-faciale du CHU de Strasbourg15. Depuis octobre 2005, F. Guilleré
développe l’application des techniques d’IRM du mouvement à l’évaluation et à
la rééducation des dysphagies oropharyngées en collaboration avec Christian
Debry et Philippe Schultz, chirurgiens ORL, Francis Veillon et Sophie Riehm,
radiologues du service de radiologie du CHU9. Ces travaux ont eu pour objectifs, à partir de l’analyse en ciné-IRM de la déglutition de la salive chez le sujet
sain, de préciser son intérêt diagnostique pour les dysphagies, d’analyser le
mécanisme physiopathologique, de concevoir des programmes de rééducation
des dysphagies, d’évaluer objectivement l’évolution des troubles de la déglutition, l’impact de la rééducation, et d’étudier la fonctionnalité d’implants intralaryngés.
♦ Ciné-IRM et DÉGLUTITION
La déglutition est le mécanisme permettant le passage de la salive et des
aliments de la cavité buccale vers l’œsophage tout en protégeant les voies respiratoires. Les perturbations de ce processus, observables à tout âge, de la naissance au plus grand âge, peuvent être la conséquence d’une atteinte périphérique des structures anatomiques du carrefour aéro-digestif ou de celle des
structures corticales et/ou sous-corticales impliquées dans le contrôle neurologique de la déglutition7,22,23,26,30,31. Les étiologies susceptibles d’entraîner des
troubles de la déglutition et d’engager le pronostic vital et fonctionnel sont nombreuses et variées (tumeurs des Voies Aéro-Digestives Supérieures (VADS),
affections neurologiques tumorales ou dégénératives, traumatismes, vieillissement…). Plusieurs spécialités médicales dont l’ORL sont concernées par les
dysphagies et leur prise en charge, et les explorations fonctionnelles de la déglutition sont en constante évolution.
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Actuellement, le « gold-standard » des méthodes d’exploration de la
déglutition en cas de dysphagie demeure la vidéofluoroscopie. Néanmoins les
informations concernant les tissus mous restent limitées, la vidéofluoroscopie
est irradiante et contre-indiquée en cas de fausses-routes majeures. La méthode
d’investigation idéale des troubles de la déglutition serait une technique non
invasive, de résolutions spatiale et temporelle permettant de visualiser précisément i) les phases de la déglutition, ii) le transfert de la salive ou d’un bolus de
différentes textures au travers des voies aéro-digestives, iii) la morphologie et le
déplacement des structures anatomiques impliquées et iiii) les fausses-routes.
Les premières applications de l’IRM dynamique à l’étude de la déglutition et des
dysphagies oropharyngées datent des années 90, avec le développement des
techniques d’imagerie rapide ou ultra-rapide du mouvement pour l’imagerie
cardiaque et vasculaire1-6,10-13,16-19,24,28,29. Les premières IRM dynamiques de
déglutition ont été pratiquées en déglutition salivaire ou avec ingestion d’un produit de contraste liquide ou solide. L’IRM s’effectue en position de decubitus
dorsal (voir glossaire, annexe 1) : avaler un bolus solide ou liquide en position
allongée sur le dos n’est pas un contexte physiologique standard de déglutition
et présente des risques de fausses-routes. En revanche, la déglutition de la salive
dans cette position s’apparente à la déglutition de la salive au repos. L’IRM est
ainsi envisageable dans la majorité des cas, en particulier pour les patients traités pour un cancer ORL qui présentent des troubles sévères de la déglutition, et
pour lesquels une vidéofluoroscopie est contre-indiquée23.
La prise en charge des dysphagies comporte la rééducation de la déglutition ; les programmes rééducatifs sont fondés sur les données de l’exploration
du mécanisme physiopathologique. Les études portant sur les effets de la réhabilitation de la déglutition sont peu nombreuses et hétérogènes. En 2009, R.
Speyer et al.27 ont analysé 59 articles rédigés en allemand, anglais, français, hollandais et espagnol, publiés de 1986 à 2008. Il ressort de cette revue de la littérature que, tandis que les effets à court terme de la rééducation sont bien documentés, les données des effets à long terme restent rares. Les points faibles les
plus fréquemment rencontrés dans la méthodologie sont l’absence de groupe
contrôle – groupe constitué de patients n’ayant pas bénéficié de rééducation -,
les possibilités de récupération spontanée qui ne sont pas évoquées, le faible
nombre de patients inclus aux études, le manque d’analyses statistiques, d’évaluation objective, et de données pré-traitement. L’examen de la déglutition de la
salive par IRM dynamique permet une évaluation objective de la dysphagie.
Les dysfonctionnements majeurs du pharyngo-larynx sont responsables
de troubles sévères de la déglutition et/ou de problèmes respiratoires importants
(e.g. sténose laryngée (voir glossaire, annexe 1)). Une bio-prothèse implantable
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en silicone et en titane comportant des valves, dénommée PIL (Prothèse Intra
Laryngée), conçue afin de suppléer aux fonctions déficientes, est actuellement à
l’étude8,14. Elle a été mise au point à partir de travaux théoriques associant ingénieurs et cliniciens (ERT 1061 – UMR 977 – Protip SAS). La PIL est proposée
lorsqu’aucune amélioration notable ne peut être rapidement espérée par la
rééducation orthophonique ou par les techniques chirurgicales répertoriées dans
la littérature. Le suivi pré- et post-opératoire clinique et radiologique des
patients comporte l’analyse à différents intervalles de la fonction respiratoire, du
fonctionnement des valves par nasofibroscopie et par ciné-IRM, de l’appréciation des fausses-routes sous réalimentation per os par nasofibroscopie et vidéofluoroscopie.
La première partie de cet exposé présente le développement du protocole
d’IRM de la déglutition et la conception de la grille d’évaluation (D-GRID*). La
deuxième partie illustre à partir d’un cas détaillé comment analyser le mécanisme physiopathologique et concevoir un programme de rééducation de la
déglutition d’après les données de l’IRM. La troisième partie ouvre des perspectives d’application de la ciné-IRM par l’étude de la fonctionnalité d’implants
intra-laryngés.
♦ L’analyse de la déglutition par ciné-IRM
L’application de la ciné-IRM chez des patients présentant une dysphagie
oropharyngée a rendu nécessaire l’exploration de la déglutition chez des sujets
sains en ciné-IRM afin d’obtenir des données standard et mettre en évidence la
physiopathologie.
Matériels et Méthodes
Des acquisitions morphologiques et dynamiques dans les 3 plans au
cours de la déglutition de la salive ont été obtenues chez des individus sains
(n=30). La population témoin est constituée de 10 hommes et 20 femmes (sexratio : 1/2), âgés de 23 à 61 ans (moyenne : 39 ans, médiane : 42 ± 19 ans). La
cohorte est composée de personnel médical ou paramédical hospitalier exempt
de tout antécédent de troubles de la déglutition.
Le protocole d’imagerie comporte l’IRM morphologique puis l’IRM
dynamique de déglutition dans les 3 plans de l’image : le plan sagittal
médian pour l’analyse des mouvements ; le plan coronal dont : - une coupe
oblique postérieure (COR 1) parallèle à la Paroi Pharyngée Postérieure (PPP)
pour apprécier le recul de la langue, - une coupe oblique antérieure (COR 2)
passant par l’épiglotte et le pharyngolarynx pour mettre en évidence l’action des
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muscles palato-pharyngiens et la fermeture glottique (Fig.1) ; le plan axial passant par la Base De Langue (BDL) et la vallécule parallèlement au disque intervertébral C3/C4 afin de visualiser l’occlusion oropharyngée maximale (Fig.2).
Fig.1. Copies d’écran des plans de coupe a) coronale postérieure -COR1- b) coronale
antérieure –COR2*.
*NB : comme en radiologie, sur les coupes coronales et axiales, ce qui est à
droite de l’écran correspond au côté gauche du sujet, ce qui est à gauche sur
l’image est la droite du sujet
Fig.2. Copie d’écran du plan de coupe axial -AX1-
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Aucun produit de contraste n’a été utilisé. Il a été simplement demandé
au sujet d’avaler en continu sa salive pendant toute la durée du bruit de chaque
séquence dynamique. Les séquences d’imagerie rapide ont été obtenues sur un
système de 1.5 T (MAGNETOM Avanto, Siemens, Erlangen, Allemagne). La
durée d’acquisition était de 22 secondes pour 128 images soit 5.8 images par
seconde dans le plan sagittal ; dans les plans coronal et axial, la durée d’acquisition était de 18 s pour 100 images soit 5.5 images par seconde (les caractéristiques techniques complémentaires figurent en annexe 2). L’examen dure environ 15mn.
*D-GRID : Déglutition-Guilleré RIehm Debry
Interprétation
Les images ont été enregistrées sous format numérique DICOM (Digital Imaging and COmmunications in Medicine) gravées sur CD Rom. Les séries ont été
interprétées sur une console en double lecture (SR radiologue et FG orthophoniste). Les différentes phases de la déglutition ont été analysées en mode dynamique et également image par image.
Calculs statistiques
Les calculs statistiques ont été réalisés par un biostatisticien (FL), avec le logiciel R-2.14.0. Les comparaisons entre variables -déplacements des structures
anatomiques (déplacement de la PPP-stades 0 et 1-, élévation du larynx -1, 1,5,
2, 2,5 vertèbres- et élévation de l’os hyoïde –1, 1,5, 2 vertèbres–), sexe des
témoins- et les coefficients de corrélation ont été calculés avec les tests de
Fisher, de Spearman et de Student. Nous rapporterons ici les résultats principaux. La concordance entre les mesures de ces déplacements effectuées par les
observateurs a été évaluée avec le coefficient Kappa de Cohen pondéré. Les
intervalles de confiance de ce coefficient ont été calculés à 95%. La significativité de chaque test a été retenue au seuil de 5%, (p-value<0.05).
Résultats
Les structures anatomiques participant à la déglutition sont identifiées aussi bien
en imagerie morphologique qu’en imagerie ultra-rapide, quel que soit le plan de
coupe (Fig.3-5). Visualisation des mouvements : Deux phases de la déglutition
salivaire sont identifiées : mouvement lingual, élévation du voile du palais et
fermeture vélo-pharyngée pour la phase orale ; élévations du larynx et de l’os
hyoïde, recul de la BDL, bascule de l’épiglotte, contraction des muscles palatopharyngiens, rapprochement des cartilages aryténoïdes, occlusion oropharyngolaryngée à l’exception de la relaxation et de l’ouverture du Sphincter Supérieur
de l’Œsophage (SSO) pour la phase pharyngée.
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Fig. 3. Identification et correspondance des structures anatomiques en coupe sagittale
médiane cervicale haute a) en IRM morphologique b) en mode True-FISP.
1. palais dur, 2. uvule palatine, 3. lèvres, 4. paroi pharyngée postérieure, 5. langue,
6. oropharynx, 7. épiglotte, 8. mandibule, 9. os hyoïde, 10. vestibule laryngé, 11. vallécule, 12. cartilage aryténoïde, 13. cartilage cricoïde, 14. bouche de l’œsophage.
Fig. 4. Identification et correspondance des structures anatomiques en coupe coronale
cervicale haute
a) en IRM morphologique
b) en mode True-FISP.
1. uvule palatine, 2. muscle palato-pharyngien, 3. épiglotte, 4. repli ary-épiglottique,
5. vestibule laryngé, 6. bande ventriculaire, 7. ventricule de Morgagni, 8. cartilage thyroïde, 9. corde vocale.
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Fig. 5. Identification et correspondance des structures anatomiques en coupe transversale cervicale
a) en IRM morphologique
b) en mode True-FISP.
1. mandibule, 2. os hyoïde, 3. épiglotte, 4. sinus piriforme, 5. larynx, 6. bouche de
l’œsophage.
Grille d’évaluation (D-GRID) et mesures (Tableau 1)
La D-GRID, fondée sur les observations en imagerie dynamique, a été conçue
pour représenter et évaluer la mobilité des tissus mous et des cartilages essentiels à la déglutition et à la rééducation de ses troubles : recul de la BDL, avancée de la PPP (facteur oropharyngé) et élévations du larynx et de l’os hyoïde
(facteur laryngé). Les mouvements de ces structures anatomiques ont pour
objectif la fermeture complète de l’isthme oropharyngolaryngé à la déglutition :
la qualité de l’occlusion oropharyngée a été intégrée à la grille, destinée à des
patients susceptibles de présenter des fausses-routes, des capacités motrices
réduites et une occlusion oropharyngée déficiente. Nous avons choisi une
échelle à 3 degrés d’évaluation : 0 pour absence de mouvement et d’occlusion,
1 pour mouvement et occlusion incomplets, 2 pour mouvement et occlusion
complets.
Facteur oropharyngé : Un recul lingual et une occlusion oropharyngée complets
(stade 2) correspondent à un déplacement antéro-postérieur net de la langue et à
la disparition de la filière aérique de l’oropharynx (Fig.6) ; un déplacement de la
BDL et une occlusion complets, de stade 2, ont été constatés chez tous les
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témoins (Tableau 1). Les stades 0 et 1 reflèteraient des troubles de déglutition
graves (0 : pas de recul de la BDL) ou modérés (1 : recul incomplet de la BDL).
La motilité de la PPP est variable : elle reste immobile (stade 0) chez
33,33% de la cohorte (Tableau 1). La mesure de son avancée (d) peut être réalisée à partir d’un point fixe, le corps vertébral de C2 ou l’interligne C2-C3 en
regard de l’oropharynx, selon la morphologie du sujet (Fig.7). Pour cela, il suffit
d’effectuer une première mesure au repos, soit de sélectionner la réglette proposée dans la barre d’outils à disposition sur l’écran, de cliquer sur le premier
point de référence à l’extrémité du corps vertébral de C2, et de déplacer la souris jusqu’à l’extrémité de la PPP (vers la gauche de l’écran), de cliquer une nouvelle fois pour fixer la mesure : la valeur de la distance s’affiche en mm. La
deuxième mesure sera réalisée de la même façon au point maximal de déglutition repéré en faisant défiler les images une à une (Fig.7). La mesure du déplacement est obtenue par soustraction de la valeur minimale de la valeur maximale. Les valeurs de d obtenues chez 66,67% des témoins sont réparties de 0,5
à 3 mm (précision au 5/10ème de mm) : elles peuvent correspondre au stade 1,
soit 0<d≤3 mm (Tableau 1). Les stades 0 et 1 de l’avancée de la PPP sont physiologiques ; les valeurs de d supérieures à 3 mm correspondraient à un stade 2.
Fig.6. Coupes sagittales médianes cervico-faciales en mode True-FISP
a) au repos
b) à la déglutition, recul de la BDL et
occlusion oropharyngée complets (stades 2).
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Fig.7. Mesure de l’avancée de la PPP (d) sur des coupes sagittales médianes en mode
True-FISP a) épaisseur de la PPP au repos : 4 mm
e) épaisseur maximale de la PPP à la déglutition : 6 mm, d=2 mm (stade 1).
Facteur laryngé : l’élévation laryngée est repérable par le déplacement du cartilage cricoïde et celui de l’os hyoïde dans l’axe vertical. La colonne cervicale,
qui est une unité anatomique fixe, individuelle relative, a été choisie comme
unité de mesure. L’ascension du larynx est calculée à partir du bord inférieur du
cartilage cricoïde, du point de référence à l’horizontale au repos en regard de C6
à son point le plus haut, et celle de l’os hyoïde à l’horizontale au repos en regard
de C3 à son point le plus haut, de ½ vertèbre en ½ vertèbre (Fig.8). Le larynx
s’élève de 1 à 2,5 vertèbres et l’os hyoïde de 1 à 2 vertèbres chez les sujets sains
(Tableau 1).
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Fig.8. Mesures de l’élévation du larynx et de l’os hyoïde
b) élévation maximale au cours de la déglutition :
larynx: 1,5 vertèbres ; os hyoïde : 1 vertèbre.
a) position au repos
Résultats statistiques
Les résultats ne font pas apparaître de corrélations statistiquement significatives
entre âge, avancée de la PPP, élévations du larynx et de l’os hyoïde (p>0.05). Le
coefficient de corrélation rho de Spearman, calculé pour la PPP dont le mouvement est une variable à deux valeurs (stade 0 ou stade 1), est légèrement négatif,
plus l’âge augmente, moins la paroi pharyngée se déplace. Une corrélation entre
l’élévation du larynx et celle de l’os hyoïde est observée (p Fisher=0.002). La
comparaison des élévations deux à deux n’est pas significative (p>0.05).
L’avancée du mur pharyngé est plus importante chez les femmes que chez les
hommes (p Fisher=0.044). Les élévations du larynx et de l’os hyoïde ne sont
pas sexe-dépendantes (p Fisher=0.904). L’étude de la fiabilité inter-lecteurs
montre un niveau d’accord entre les juges (coefficient Kappa modéré) excellent
(0.81<K<1) pour les mesures des déplacements du mur pharyngé postérieur
(0.93), du larynx (0.93) et de l’os hyoïde (0.92).
Discussion
Les études répertoriées de 1995 à 20101-6,10-13,16-19,24,28,29 (Tableau 2)
concernent exclusivement ou en partie l’analyse de la déglutition en IRM dynamique chez des volontaires sains en temps réel. Différentes séquences d’imagerie rapide ont été testées : les séquences les plus appropriées à la déglutition
(peu d’artefacts de mouvements) sont les séquenses Turbo-FLASH4,6,11,17,24,28,
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SSFSE3,16 et True-FISP1,5. Les images obtenues dans notre série (Fig. 1 à 8)
offrent une qualité satisfaisante pour la visualisation statique morphologique ou
dynamique de la déglutition. Les systèmes d’IRM dynamique de la déglutition
les plus fréquemment utilisés ont une induction magnétique de 1,5 T (Tesla, voir
glossaire - Tableau 2), rarement en-dessous (0,5 T18). Les essais (n=2) que nous
avons menés sur un système à 3 T (Signa, General Electric, Buc, France), se
sont avérés de moins bonne qualité : un système à haut champ magnétique est
plus sensible aux artefacts de mouvements20. De plus, les éléments d’antenne
équipant l’Avanto sont plus spécialisés, et dédiés à l’imagerie cervicale. Nous
avons poursuivi les examens sur le système de 1,5 T. La majeure partie des
études rapportées (n=18, Tableau 2) comportent des acquisitions de ciné-IRM
ou d’IRM morphologiques de référence en séquences sagittales (n=16) ;
quelques-unes s’intéressent aux séquences coronales (n=6) et axiales (n=3) :
nous avons réalisé les premières acquisitions et recueilli des données en IRM
dynamique de déglutition dans les 3 plans de l’image. Le protocole en ciné-IRM
a été développé dans notre équipe en déglutition salivaire en raison de son
objectif : son application en carcinologie ORL. Les traitements des tumeurs des
voies aéro-digestives supérieures peuvent être à l’origine de fausses-routes
majeures chez des patients déjà sévèrement fragilisés par la maladie. En outre,
la rééducation de la déglutition est réalisée en déglutition salivaire lorsque la
reprise de l’alimentation n’est pas possible par voie orale : les données de l’IRM
dynamique ont été exploitées dans la perspective de l’évaluation des capacités
de la déglutition de la salive et de leur évolution. La position en decubitus dorsal
et la déglutition salivaire sont apparentées à la déglutition naturelle au cours du
sommeil. Honda et al. relèvent une différence de coordination des mouvements
entre la déglutition en position assise ou en position allongée : l’IRM à champ
ouvert offre des perspectives intéressantes pour une imagerie de déglutition avec
bolus en position assise17. Les études réalisées avec des séquences True-FISP
ont porté sur la déglutition de bolus liquide5 (eau), de bolus de texture lisse5
(yaourt) ou pâteuse1, 5 (semoule5, pudding1), avec ou sans agent de contraste5
(gadolinium5 (voir glossaire) ou dérivé de gadolinium1). Notre équipe a réalisé
les premières IRM dynamiques de déglutition salivaire en séquences True-FISP.
L’interprétation des images dépend des connaissances préalables de la
physiologie de la déglutition. En vidéofluoroscopie l’interprétation des images
est subjective et les études de fiabilité inter- ou intra-individuelle montrent des
différences (Léonard et al.21, communication de V. Woisard, congrès de la
SFP&PaCo, oct. 2010). Dans notre étude, la concordance inter-observateurs à
l’interprétation des images et à la cotation de l’avancée de la PPP et de l’élévation de l’os hyoïde et du larynx est statistiquement excellente (0.81<K<1). Une
182
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étude de la concordance inter- et intra-observateurs serait à mener avec un plus
grand nombre de lecteurs.
Parmi les études de la déglutition en ciné-IRM répertoriées (Tableau 2), la
seule échelle proposée (Honda et al. en 200317) est ciblée sur la comparaison de
la qualité des images obtenues en ciné-IRM et en vidéofluoroscopie. La DGRID, fondée sur les observations en imagerie dynamique, a été conçue pour
représenter et évaluer la mobilité des tissus mous et des cartilages essentiels à la
déglutition et à la rééducation de ses troubles : recul de la BDL, avancée de la
PPP (facteur oropharyngé) et élévation du larynx (facteur laryngé). En position
de decubitus dorsal et en déglutition salivaire, les données de notre cohorte
montrent que le déplacement de la PPP n’est pas observé pour un tiers de sujets
sains (stade 0) : cette absence de mobilité doit être considérée comme normale.
Lorsqu’il est observé, le déplacement de la PPP (d) est compris entre 0,5 et 3
mm (stade 1) : l’avancée standard de la PPP correspond au stade 0 ou 1. Des
valeurs supérieures à 3 mm ou stade 2 pourraient signifier une compensation par
développement de ce déplacement pour améliorer un mécanisme de protection
des voies aériennes déficitaire ou problématique.
Les mesures des élévations en unités anatomiques de notre cohorte déterminent les valeurs standard qui serviront de référence pour les patients dysphagiques : élévation du larynx de 1 à 2,5 vertèbres, élévation de l’os hyoïde de 1 à
2 vertèbres (Tableau 1). Les mesures des déplacements de l’os hyoïde et du
larynx en vidéofluoroscopie de la déglutition montrent une corrélation entre
l’élévation de l’os hyoïde et de celle du larynx dans l’étude de Palmer et al.25,
qui suggèrent que le mécanisme musculaire est commun aux deux structures.
Nos résultats retrouvent cette corrélation statistiquement significative (p<0.05).
Nous avons décidé de conserver les deux structures anatomiques dans notre
grille d’évaluation malgré leur corrélation pour deux raisons : une raison statistique (comparaison deux-à-deux non significative -p>0.05-) et une raison clinique (résections partielles ou totales de l’os hyoïde et atteinte plus ou moins
importante des muscles sous- ou sus-hyoïdiens dans les traitements des cancers
des VADS).
♦ Conclusions
Globalement, nos résultats confirment les données de la littérature sur
l’application de l’imagerie rapide à l’analyse de la déglutition. Les séquences
True-FISP sont adaptées à la visualisation directe des lèvres, de la langue, du
palais mou, du pharynx, du larynx et de l’œsophage, et à la description quantitative et qualitative des mouvements des structures laryngées au cours du cycle
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normal de la déglutition. Notre protocole d’imagerie permet une analyse chronologique du processus de déglutition. La D-GRID est un outil simple de
mesure des composantes de la physiologie de la déglutition, conçu pour être
appliqué à la physiopathologie des dysphagies oropharyngées, en complément
d’autres méthodes d’exploration, comme la nasofibroscopie et la vidéofluoroscopie de déglutition. Nous avons déterminé des valeurs de référence des déplacements des structures anatomiques au cours de la déglutition chez des sujets
sains afin d’évaluer les déplacements de ces structures anatomiques chez des
patients dysphagiques. L’exploitation de la D-GRID dans ce contexte est étudiée
et illustrée dans la partie 2.
♦ Application de la ciné-IRM à l’examen des dysphagies oropharyngées d’étiologie ORL au CHU de Strasbourg : Étude de cas
Le but de cet exposé est de décrire, à partir d’un cas clinique de dysphagie en carcinologie ORL, comment la ciné-IRM de la déglutition de la salive
contribue de façon précise à l’analyse de la physiopathologie et à la rééducation
de la déglutition.
Étude de cas - Patient N°45
Le patient (♂, 54 ans), présente une tumeur classée pT3N1M0 (voir glossaire) de la région des 3 replis à droite traitée par laryngectomie sus-glottique
avec hémiépiglottectomie droite étendue au repli ary-épiglottique, ablation de la
moitié de l’os hyoïde du côté droit et curage cervical fonctionnel bilatéral (voir
glossaire) avec gastrostomie et trachéotomie. L’exérèse carcinologique est
représentée en figure 9. La respiration est assurée par une canule de trachéotomie ; le système est non fenêtré (voir glossaire) au début afin de protéger les
voies respiratoires des fausses-routes salivaires, puis fenêtré (voir glossaire) au
8ème jour pour laisser un passage au flux d’air par les voies respiratoires hautes.
L’alimentation est garantie par voie entérale (sonde de gastrostomie). La cicatrisation au bout de 10 jours autorise le sevrage de la canule. La décanulation bien
supportée dans les 24 h permet l’entraînement rééducatif avec apprentissage de
la technique sans et avec déglutition salivaire (manœuvre de déglutition supra
sus-glottique avec rotation à droite22,31). L’exercice des praxies oro-pharyngolaryngées stimule les glandes salivaires et favorise la production de la salive : il
sera abordé quand la déglutition de la salive et la reprise alimentaire seront assurées.
La reprise de la nutrition par voie orale est progressive, avec de l’eau gélifiée puis des aliments de textures mixées ou lisses (yaourts, compotes…) ; les
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liquides sont proscrits afin d’éviter les fausses-routes et sont épaissis. La chirurgie est suivie d’une Radio- et ChimioThérapie (RCT) qui débute 2 mois et demi
après l’intervention, et dure 7 semaines. Le patient bénéficie de 11 séances de
rééducation orthophonique post-opératoire au cours de son hospitalisation et de
4 séances après hospitalisation, sur une période de 7 mois. Durant cette période,
très motivé, il s’entraîne quotidiennement (4 fois par jour, durée de quelques
minutes à 20 minutes) avec des interruptions dues à son état de fatigue au cours
de la RCT. Le mode de nutrition est mixte pendant la durée des traitements, et
laissé à l’appréciation du patient. Il sera sevré de sa sonde de gastrostomie 2
mois après la RCT.
Fig.9. Exérèse carcinologique patient N°45
IRM1
Chez ce patient, nous ne disposons pas de données pré-traitement, et la
première acquisition en ciné-IRM (représentée par X sur le tableau 3) est réalisée
1 mois après le traitement chirurgical. Le patient présente un recul lingual incomplet, une avancée de la PPP de stade 1, une occlusion oropharyngée complète
dans le plan sagittal médian (Fig. 10 a), et une élévation laryngée réduite (0.5
vertèbre). Les données sont exposées sur le tableau 3. Les coupes coronales et
axiale objectivent une fermeture oropharyngée quasi-complète, avec un sinus
piriforme droit semi-fermé (à gauche sur l’image) (Fig. 10 b,c). Une faiblesse de
la fermeture apparaît par intermittence, l’occlusion oropharyngée est effective de
façon plus brève à droite qu’à gauche. Le mécanisme de protection des voies respiratoires est insuffisant. Les données du facteur oropharyngé dans le plan sagit-
185
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tal montrent un déficit du recul lingual qui n’entrave pas l’occlusion oropharyngée dans le plan sagittal : le déplacement de la PPP, dans les limites standard
(d1=1,5 mm, 0<d1≤3 mm, stade 1), permet une occlusion complète. Ce mouvement spontané de la PPP pourrait être un moyen de compensation développé
spontanément par le patient ou préexister à la pathologie. Il peut être renforcé par
la rééducation (par exemple par la déglutition langue tirée31). Les exercices de
phonation fondés sur l’articulation des phonèmes vélaires, les mouvements de
recul mandibulaire (menton rentré) vs. avancée mandibulaire, sans et avec déglutition salivaire, sont indiqués pour améliorer la qualité du recul lingual.
Les données du facteur laryngé montrent une élévation du larynx et de
l’os hyoïde (0,5 vertèbre) en-deçà des valeurs de référence (de 1 à 2,5 vertèbres
pour le larynx et de 1 à 2 vertèbres pour l’os hyoïde). Ce déficit pourrait expliquer le défaut de fermeture du vestibule laryngé (Fig.10 a, 2.). Glottages actifs
ou passifs, sans et avec déglutition salivaire, voix chantée (le patient chantait
dans une chorale avant la maladie), théâtralisation, sont programmés.
En conclusion, la rééducation orthophonique, à poursuivre après hospitalisation, doit être axée sur l’élévation laryngée et l’augmentation de la mobilité
des structures participant à la déglutition. L’alimentation par voie orale reste
possible en évitant les liquides en raison du pertuis (voir glossaire). Afin d’évaluer l’évolution de la déglutition, une IRM comparative est indiquée.
Fig.10. a 1 Recul lingual incomplet, 2 défaut de fermeture du vestibule laryngé en
coupe sagittale (image 76 série 2), b 3 occlusion incomplète en coronale (image 4 série
4) et c 4 en axiale (image 20 série 7) IRM 1, M1 post-opératoire patient N°45.
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IRM 2
L’IRM dynamique réalisée 12 mois après l’intervention (IRM 2 = O,
Tableau 3), montre un recul lingual standard complet en coupe sagittale, une
augmentation conséquente de l’avancée de la PPP ayant évolué de 1,5 mm
(0<d1≤3 mm, stade 1) à 5 mm (d2>3 mm, stade 2). L’occlusion oropharyngée se
maintient : satisfaisante dans le plan sagittal, elle reste incomplète dans les
autres plans. L’élévation laryngée est meilleure, avec des valeurs standard, de
1,5 vertèbres au lieu de 0,5 à l’IRM 1 (=X) (Fig. 11 a, Tableau 3). Les coupes
coronales objectivent une contraction symétrique des piliers palato-pharyngiens
ainsi qu’une occlusion glottique complète. Un pertuis visible en coronale et en
axiale persiste (Fig. 11 b,c).
Fig.11. IRM 2, M12 post-opératoires patient N°45 a 1 meilleur recul lingual en coupe
sagittale et 2 fermeture du vestibule laryngé (image 95 série 8), b 3, 4 pertuis en coupes
coronale (image 9 série 9) et c axiale (image 27 série 11).
Le facteur oropharyngé a évolué avec des déplacements des tissus mous
(langue et PPP) meilleurs. La qualité de l’occlusion oropharyngée reste déficitaire dans les plans coronal et axial (pertuis du côté de l’exérèse de l’épiglotte).
Les fausses-routes aux liquides persistantes sont contrôlées par le patient avec
manœuvre de protection (déglutition supra sus-glottique avec rotation à droite).
La manœuvre n’est pas nécessaire avec des textures mixées.
En conclusion, les améliorations mises en évidence incitent à la poursuite
de l’entraînement rééducatif afin de réduire le pertuis persistant du côté droit à
la déglutition.
187
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♦ Discussion
Nous avons mis en œuvre l’examen de la déglutition salivaire par IRM
dynamique et exploité la D-GRID à l’examen et à la prise en charge des dysphagies oropharyngées en carcinologie ORL depuis octobre 20059. Les IRM sont
inscrites dans le cadre du suivi carcinologique pour les tumeurs dont la localisation ou le traitement génère ou sera susceptible de générer des fausses-routes ou
des dysphagies complexes. L’objectif de l’IRM est i) l’analyse de la déglutition
avant traitement, ii) l’analyse de la dysphagie avant et après traitement chirurgical, radio- et/ou chimiothérapique, iii) la conception de programmes de réhabilitation de la déglutition, iv) l’étude de l’évolution de la dysphagie et de l’impact
de la rééducation. L’exérèse chirurgicale du patient affecte une zone clé de la
déglutition du transit pharyngé et de la fermeture oropharyngée : celle-ci est
complète dans le plan sagittal et incomplète dans le plan coronal et axial, en raison de la localisation de la tumeur et de la dissymétrie résultant de son traitement (chirurgie, RCT). L’avantage de l’IRM dynamique sur la vidéofluoroscopie est de fournir un angle de vue dans les 3 plans de l’espace et de rendre
compte des mouvements des structures anatomiques dans chacun de ces 3 plans.
Les acquisitions des IRM 1 et 2 ont mis en évidence la présence d’un déficit
minime de l’occlusion oropharyngée, interprété comme source de fausses-routes
aux liquides. L’évolution du pertuis n’est pas analysée : ses dimensions pourraient être mesurées.
La D-GRID indique des valeurs du facteur oropharyngé et du facteur
laryngé 12 mois après intervention se rapprochant des valeurs standard pour le
recul lingual et l’élévation du larynx et de l’os hyoïde. Le patient a retrouvé une
mobilité oro-laryngée efficiente et développé l’avancée de la PPP permettant
une fermeture dans le plan sagittal, néanmoins insuffisante. Les fausses-routes
ponctuelles à la déglutition de liquides peuvent être contrôlées par les manœuvres de protection. Ces indications incitent à la poursuite de l’entraînement
rééducatif. La rééducation a duré 7 mois après l’intervention, soit 3 mois après
RCT. En l’absence de données pré-traitement, l’avancée de la PPP (d), supérieure aux valeurs de référence (d2=5mm, pour des valeurs standard telles que
0<d≤3 mm) pourrait aussi bien être un mécanisme de compensation développé
spontanément par le patient ayant débuté avant traitement, renforcé par la rééducation, qu’un résultat de la réhabilitation. Un contrôle en IRM dans un délai de
6 à 12 mois permettrait de mesurer l’évolution du mécanisme de déglutition :
l’un des effets secondaires de la radiothérapie est la fibrose musculaire3,7,31.
Une "surveillance" avec imagerie de la déglutition permettrait d’apprécier la
mobilité des structures anatomiques engagées dans le processus de déglutition et
de guider la rééducation si elle est nécessaire.
188
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D’un point de vue économique, le coût d’une IRM est environ 6 fois celui
d’une vidéofluoroscopie (288€ vs. 47€ en 2014). Non irradiante, étroitement
liée à la programmation de la rééducation et à l’entraînement orthophonique,
elle autorise une mesure objective précise de la déglutition et de sa réhabilitation. Il serait indispensable d’étudier de la même façon les déplacements observés en vidéofluoroscopie des cartilages, de la langue, de la PPP, si la qualité des
images le permet. Un mémoire d’orthophonie est en cours sur la comparaison
de l’impact de la nasofibroscopie, de la vidéofluoroscopie et de la ciné-IRM de
déglutition sur les programmes de rééducation des dysphagies d’étiologie ORL
ou neurologique (Marion Kessler, Université de Lorraine, 2014-2015).
♦ Conclusions
Cet exemple de dysphagie oropharyngée d’étiologie carcinologique ORL
illustre l’analyse des acquisitions en IRM dynamique et décrit l’exploitation de
notre grille d’évaluation. L’exploration de la déglutition salivaire en ciné-IRM
couplée à la D-GRID montre comment i) le traitement d’un processus tumoral
affecte les capacités à déglutir, ii) la biomécanique de la déglutition évolue et
iii) le plan de la rééducation de la dysphagie est déterminé. Des acquisitions prétraitement fourniraient des informations sur le mécanisme de déglutition préexistant aux traitements thérapeutiques. L’IRM renseigne dans les 3 plans de
l’image et autorise des mesures qui pourraient être développées (mesure des
pertuis). La ciné-IRM de déglutition pourrait être intégrée au suivi carcinologique des patients. Les perspectives d’application de l’IRM de déglutition salivaire et de travaux sont nombreuses : l’efficience de cet examen sur la prédiction des fausses-routes avec une comparaison de l’exploration de la déglutition
en vidéofluoscopie, l’impact de la RT sur la biomécanique de la déglutition,
l’influence du port de la canule de trachéotomie sur la déglutition, l’application
de cette technique aux dysphagies d’étiologie neurologique, l’effet de l’âge et
du genre sur la déglutition, etc. Dans le cadre des dysfonctionnements majeurs
du pharyngo-larynx avec implantation de prothèses intra-laryngées, un suivi
fonctionnel en imagerie est nécessaire. L’IRM dynamique a été intégrée aux
méthodes objectives d’exploration de la déglutition pré- et post-implantation.
♦ Étude fonctionnelle des Prothèses Intra Laryngées
Introduction
La Prothèse Intra-Laryngée (PIL) est actuellement en phase d’essai clinique chez des patients trachéotomisés ayant un larynx présent mais non fonc-
189
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tionnel. L’objectif primaire de la PIL est de restaurer les fonctions primitives de
respiration par voie haute, de déglutition, d’olfaction, et de supprimer l’orifice
de trachéotomie pouvant faire espérer aux patients une réinsertion socioprofessionnelle et une diminution de ce handicap ressenti à titre personnel de manière
très négative et dégradante8,14. L’objectif secondaire de la PIL est de constituer
un larynx artificiel pour les patients ayant subi une laryngectomie totale14. Cette
étude de faisabilité a pour but d’évaluer la capacité de la PIL à i) permettre une
rééducation alimentaire en minimisant les risques de fausses routes en complément ou sans gastrostomie d’alimentation, ii) éviter les complications liées aux
canules à ballonnets (voir glossaire), sources potentielles de complications (sténose trachéale, trachéomalacie (voir glossaire)), iii) permettre une respiration
haute sans orifice de trachéotomie si l’état du patient le permet. Ces travaux
visent à étudier l’impact de la prothèse sur la restauration de la déglutition par
des acquisitions comparatives en ciné-IRM de déglutition avant et après mise en
place de la PIL.
Matériel et méthodes
L’étude pilote PRI 2006, HUS N°3866, ID RCB 2006-A00270-51, a été
menée de 01/2007 à 01/06/2013, sur une population de n=5 patients (sex-ratio
0.7, âge médian 64 ± 17 ans, Tableau 4 ) ; les essais sont ouverts, non randomisés et multicentriques. La prothèse intralaryngée (Newbreez®) est composée de
deux parties : une valve amovible en titane qui permet au patient de respirer et
de déglutir, insérée sur un corps en silicone qui conforme l'ensemble des structures laryngées (Fig. 12 A), la valve se situant au-dessus de l’espace glottique.
La valve de plus petit diamètre s’abaisse seule à l’inspiration, la valve de plus
grande dimension restant en position de repos (Fig. 12 B) ; à l’expiration les
deux valves sont solidaires et s’élèvent (Fig. 12 C). A la déglutition les clapets
sont fermés ; leur position est maintenue par des aimants pour éviter le passage
du bol alimentaire au travers de la prothèse (Fig. 12 D). Les aimants résistent à
une pression exercée sur les valves par un bolus de 7 g. Les PIL sont disponibles
en plusieurs diamètres. Afin de s’assurer avant toute pose que la prothèse choisie correspond bien à l’anatomie du patient, une imagerie médicale et/ou un
contrôle per-opératoire par ancillaire (voir glossaire) sont réalisés. La PIL est
posée sous anesthésie générale par voie endoscopique : la mise en place de sa
partie supérieure au même niveau que les aryténoïdes assure une impaction optimale de la prothèse (Fig 13). Sans trachéotomie, un ancillaire spécifique permettra de la placer. La PIL peut facilement être extraite sous endoscopie et anesthésie locale. Le déroulement pratique de l’essai comporte un suivi
post-opératoire clinique et radiologique (J8, J15, M1, M2…M..). Les critères
190
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d’évaluation de l’efficacité de la PIL retenus sont apportés par les analyses postopératoires à différents intervalles de temps de la fonction respiratoire sur le
plan clinique, du fonctionnement des valves par nasofibroscopie et par cinéIRM en déglutition salivaire, de l’appréciation des fausses-routes sous réalimentation per os par nasofibroscopie et par vidéofluoroscopie de déglutition.
Fig.12. PIL A. constitution de l’implant B. à l’inspiration, le petit clapet s’ouvre vers
l’intérieur C. à l’expiration, le grand clapet accompagné du petit s’ouvre vers l’extérieur
de la prothèse D. position fermée à la déglutition maintenue par un aimant.
Fig.13 A. Illustration en 3D de la PIL B. Scanner de la PIL en place chez le patient N°96.
191
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Résultats (Tableau 5)
Les essais fonctionnels de la PIL ont été réalisés en nasofibroscopie avec
décanulation du patient. L’évaluation du fonctionnement des valves rend nécessaire la décanulation et l’occlusion de l’orifice de trachéotomie ; secondairement,
la réalisation d’une nasofibroscopie avec essais de déglutition est possible. Les
examens montrent que les valves sont fonctionnelles et permettent une respiration de type inspiration et expiration, normale et sans effort. Leur fermeture à la
déglutition est assurée. Toutefois, la présence de stases salivaires entraîne une
inhalation à l’inspiration par regorgement, du fait du déficit de la vidange pharyngée, insuffisante. Au fur et à mesure des essais, la durée de port de la PIL
s’est améliorée (de 5 jours à 6 mois). Les douleurs, lorsqu’elles sont présentes,
sont contrôlées par les antalgiques et s’atténuent progressivement. Le patient N°3
a rencontré des difficultés de tolérance de la canule de trachéotomie. La canule
n’autorisant pas le passage du flux respiratoire par le haut, restreint le fonctionnement et l’auto-nettoyage de la PIL, l’assèchement de l’oro-pharyngo-larynx et
l’entraînement rééducatif. La présence de l’aimant (Fig. 12 D), dont le fonctionnement assure l’occlusion de la prothèse à la déglutition, limite les examens par
ciné-IRM : l’intégrité de l’implant est menacée et l’artefact métallique qu’il
génère altère la qualité des images. Des chevrons ont équipé le fût de la PIL, afin
d’assurer une meilleure stabilité de la PIL (expulsée par le patient N°40).
♦ Discussion
Peu de chercheurs s’intéressent actuellement à la conception d’une prothèse laryngée artificielle. De nombreuses prothèses en titane poreux ont été
implantées jusqu’à maintenant chez l’homme par notre équipe : implants de thyroplastie, implants phonatoires, prothèses mandibulaires. La totalité des
implants ont été acceptés sans rejet chez les patients n’ayant pas été irradiés
auparavant8. Les essais menés avec la PIL confirment les études menées in
vivo8. Ils ont permis de déterminer les indications, les examens et les types de
prothèses les plus appropriés à la gestion des déficits fonctionnels du larynx.
L’utilité présupposée d’une PIL ne peut être estimée qu’au cas par cas. Le critère décisif est l’engorgement du pharynx, qui est évaluable avant la mise en
place par examens cliniques et paracliniques (Vidéofluoroscopie de déglutition,
etc.). S’il y a des fausses-routes secondaires (troubles de l’ensemble des effecteurs de la déglutition), la PIL ne sera d’aucune utilité. Une adaptation de la
structure du fût de la PIL avec l’ajout de chevrons a pu remédier à son instabilité. Secondairement, ce dispositif limite les risques de nécrose des tissus aux
points de contact. Les évaluations successives chez nos patients ont montré que
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les troubles de la déglutition majeurs sont une contre-indication absolue à la
mise en place d’une PIL, en raison de la stase par regorgement venant recouvrir
le plan des aryténoïdes où se situe la partie proximale de l’implant : l’inspiration entraîne une inhalation à l’ouverture des valves. Ce fait aurait pu être anticipé comme la partie sommitale de la prothèse, pas assez surélevée par rapport
au plan des aryténoïdes, n’améliorait pas la configuration anatomique pré-existante. La PIL n’a pas résolu la problématique des fausses-routes salivaires. En
conséquence, les indications de mise en place sur sténose glottique associée à
des troubles de la déglutition mineurs ou moyens sont très nettement précisées.
Les mécanismes de protection des voies aériennes à la déglutition
incluent la fermeture oropharyngée, résultant du recul de la base de la langue,
de la bascule de l’épiglotte et de l’ascension laryngée. Un score significatif
d’occlusion oropharyngée, indicatif de fausses-routes potentielles, déterminé en
ciné-IRM de déglutition pourrait contribuer à la décision d’implantation et au
choix d’un type de prothèse laryngée. Les acquisitions IRM devront comporter
des séquences dans les trois plans ; l’évaluation de l’occlusion oropharyngée est
obtenue en additionnant les stades de chacun des plans (2 occlusion complète, 1
complète, 0 absente). La présence d’une filière étroite sera cotée 1,5 (Tableau
6). Une PIL sans aimant de rappel, de conception différente de sa partie sommitale, permettant les investigations par IRM, est à l’étude.
♦ Conclusion
Les indications d’implantation de PIL sont liées aux essais cliniques et
aux études préliminaires ; elles évolueront en fonction de l'expérience des
équipes. Dans notre série, les essais avec troubles majeurs de déglutition présentés par 4 patients sur 5, ont permis i) de mieux cibler les indications d’implantation : la PIL est indiquée dans tous les types de sténose laryngée, associée ou
non à des troubles de la déglutition mineurs ou moyens, ii) de vérifier leur fonctionnement en respiration et en déglutition en enlevant la canule le temps de
l’examen, iii) de préciser le suivi par ciné-IRM, envisageable avant implantation
et dans les jours précédant l’explantation, en raison du risque de dysfonctionnement des aimants, et iiii) d’adapter la rééducation. Le tableau 6 présente les
types et concepts de prothèses intra-laryngées correspondant aux capacités fonctionnelles de déglutition, de respiration et de phonation. La phonation est réalisée en voix soufflée, en chuchotant. Á terme, le type IV devrait disparaître au
profit du type III permettant la phonation sans fausses-routes. Une prothèse de
larynx artificiel a été conçue à partir de la PIL afin de suppléer aux fonctions de
respiration et de déglutition chez les patients traités par laryngectomie totale
193
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pour cause carcinologique (Étude HUS N° 4493, ID RCB N° 2011-A00032-39,
"Mise en place d’un larynx artificiel après laryngectomie totale").
♦ Conclusions générales et perspectives
La compréhension et la prise en charge thérapeutique des troubles de la
déglutition requièrent des techniques d’exploration dont les plus courantes sont
la nasofibroscopie et la vidéofluoroscopie. Le champ d’investigation de l’examen de la déglutition par IRM a été jusqu’à maintenant peu exploité : ces travaux sont le reflet du développement de son utilisation. La ciné-IRM pour l’évaluation de la déglutition est un outil prometteur : elle fournit des informations
différentes en permettant des études multiplanaires des tissus mous sans irradiation ni produit de contraste. Notre grille d’évaluation, la D-GRID, visualise des
données précises qu’elle permettrait de comparer chez les témoins et les patients
avant et après traitement chirurgical, radiochimiothérapique ou orthophonique.
Les programmes de rééducation de la déglutition pourraient être mieux ciblés et
les effets des différents traitements thérapeutiques mesurés.
Les perspectives sont nombreuses. Des acquisitions en ciné-IRM de
déglutition d’une cohorte plus importante de volontaires sains permettraient de
constituer des effectifs statistiquement suffisants et de fixer les valeurs standard
des facteurs oropharyngés et laryngés. Les données temporelles, notamment la
coordination des mouvements des structures anatomiques impliquées dans la
déglutition, et le degré d’occlusion du vestibule laryngé seraient à explorer, le
score global d’occlusion oropharyngée de la D-GRID à exploiter. Les effets de
l’âge (>70 ans), de la radio- et/ou chimiothérapie, du port de la canule de trachéotomie pourraient être recherchés, les données recueillies en IRM comparées
à celles de la vidéofluoroscopie. La ciné-IRM pourrait être appliquée aux dysphagies d’étiologies diverses (neurologique, infectieuse..) et en pédiatrie.
Peu de données existent dans la littérature sur les maladies rares : le suivi
en imagerie de patients présentant une dysphagie dans le cadre d’une maladie
systémique comme la sclérodermie pourrait documenter la physiopathologie et
son évolution. Les autres fonctions de l’oro-pharyngo-larynx, la respiration et la
phonation, seraient aussi susceptibles d’être étudiées par ciné-IRM.
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Européennes).
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196
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IRM et DÉGLUTITION - ANNEXES
Annexe 1
Glossaire
Ancillaire : Instrument destiné à aider le chirurgien à effectuer une mesure.
Canule à ballonnet : Canule équipée d’un ballonnet à son extrémité inférieure qui une
fois gonflé permet une meilleure étanchéité de la trachée et empêche le passage d’aliments dans les poumons en cas de fausses-routes.
Curage cervical fonctionnel : Exérèse des chaînes ganglionnaires situées dans le cou en
respectant les nerfs moteurs, les gros vaisseaux sanguins et les muscles.
Decubitus : en médecine, le terme decubitus décrit un corps allongé à l’horizontale.
Decubitus dorsal : la personne est à plat dos.
Gadolinium : Terre rare ferromagnétique utilisée comme agent de contraste en IRM.
Non fenêtré vs. fenêtré : se rapporte au système de canule constitué de tubes à parois
pleines ne permettant la respiration que par la canule de trachéotomie (système non
fenêtré) ou comportant des parois perforées afin de laisser passer l’air à travers les tubes
vers le haut et permettre de respirer par la canule de trachéotomie ou par le nez ou la
bouche (système fenêtré).
Pertuis : Ouverture, trou.
Séquence True-FISP : séquence d’imagerie rapide Siemens dédiée à l’imagerie du
mouvement (True-Fast Imaging SPin). Les types de séquences d’imagerie rapide sont
désignés par des acronymes propres à chaque constructeur de système IRM. Les études
répertoriées en imagerie rapide de la déglutition chez le sujet sain, de 1995 à 2013, ont
utilisé des séquences SSFSE, SPGR, EPI (GE HEALTHCARE), FLASH, TurboFLASH, Multi-Shot Spiral FLASH, True-FISP (SIEMENS), BTFE (PHILIPS).
Sténose laryngée : une sténose est une modification anatomique de proportions variables qui se traduit par le rétrécissement d’une structure. Dans la sténose laryngée le calibre du larynx est diminué, ce qui entraîne des difficultés respiratoires plus ou moins
sévères selon le degré de la sténose.
Tesla : unité d’induction magnétique.
Trachéomalacie : Ramollissement des anneaux cartilagineux de la trachée dont les
parois se collabent à la respiration et empêchent le passage de l’air.
Tumeur pT3N1M0 : classification internationale des cancers selon leur extension anatomique pTNM (Pathological Tumor Nodes Metastasis = Tumeur, Ganglions, Métastases Pathologiques), 2009 (dernière édition). p : résultats des analyses anatomo-pathologiques ; T3 : tumeur primitive >4 cm ; N1 : adénopathie
homolatérale unique voisine ≤3 cm; M0 : pas de signe de métastases à distance.
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Annexe 2
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Quelques outils pour comprendre l’imagerie par
résonance magnétique et se repérer dans le cerveau
Melody Courson
Rééducation Orthophonique - N° 260 - décembre 2014
201
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Melody COURSON1,2
1. Université Laval, Faculté de médecine
Département de Réadaptation
Québec, Qc., Canada
2. Centre de Recherche de l’Institut
Universitaire en santé mentale de Québec
(CRIUSMQ)
Québec, Qc., Canada
Correspondance :
Melody Courson
Orthophoniste
Étudiante au doctorat en médecine expérimentale
Université Laval, Département de
Réadaptation
Centre de Recherche de l’Institut
Universitaire en santé mentale de Québec
(CRIUSMQ)
2601 rue de la Canardière, office F-2445,
Québec (Québec), CANADA, G1J 2G3
Courriel: [email protected]
L
a compréhension de l’anatomie et du fonctionnement du cerveau au
moyen de l’imagerie par résonance magnétique (IRM), est utile lors de la
lecture d’articles scientifiques en neuroimagerie. Internet est une source
quasi-inépuisable d’information, mais il est parfois difficile de découvrir des
sites à la fois accessibles et sérieux, offrant une information vérifiée et valide.
Cette section a pour objectif de répertorier de manière non exhaustive des sources
d’information fiables et accessibles, portant sur l’IRM et le cerveau.
♦ Comprendre l’imagerie par résonance magnétique
IMAIOS : http://www.imaios.com/fr
Il s’agit du site d’une entreprise française d’e-learning médical, créée en
partenariat avec de nombreuses universités incluant, pour n’en citer que
quelques-unes, la Havard Medical School (Boston, États-Unis), l’Université
Paris Descartes (Paris, France), l’Université de Tokyo (Tokyo, Japon), et la
Faculté de Médecine de l’Université de Zurich (Zurich, Allemagne). Ce site propose des cours en ligne portant sur divers aspects de la médecine, incluant une
section explicative du fonctionnement de l’IRM intitulée : « e-MRI. L’IRM pas
à pas : cours interactif sur l’imagerie par résonance magnétique ». Une partie du
202
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contenu de ce site est payante, mais la section IRM est en accès gratuit après
inscription au site. Cette section est composée de plusieurs modules ou chapitres qu’il est possible de suivre dans un ordre préétabli ou selon ses préférences/besoins. Des concepts complexes tels que la résonance magnétique
nucléaire, les notions techniques de l’IRM telles que le codage spatial et l’amélioration du contraste, ainsi que des techniques d’imagerie différentes telles que
l’imagerie du tenseur de diffusion, l’imagerie fonctionnelle cérébrale et l’IRM à
très haut champ, sont abordés avec clarté, et de nombreuses illustrations en facilitent la compréhension. Ce site a été certifié jusqu’en juillet 2015 (avec des
vérifications trimestrielles) par le HON (Health On the Net Foundation), dont
on peut retrouver les critères de certification ici :
http://www.hon.ch/HONcode/Patients/Visitor/visitor.html.
♦ Comprendre le cerveau
Le cerveau à tous les niveaux : http://lecerveau.mcgill.ca/
Ce site, existant en français et en anglais, qui a été développé à l’Université McGill (Montréal, Canada) en 2003, est composé de trois sections : (1)
principes fondamentaux, (2) fonctions complexes, et (3) dysfonctions. Dans ces
sections, de nombreux modules abordent des sujets variés des neurosciences
comme l’évolution du cerveau, les émotions et le sommeil. Un module est dédié
au langage et traite des corrélats neurologiques du langage et de la parole, tout
en adoptant une approche critique et éclairée de l’apport des associations anatomo-fonctionnelles à notre compréhension du langage. Ce site présente la particularité d’offrir chaque module en trois niveaux de difficulté - débutant, intermédiaire et avancé – ce qui lui permet de s’adresser à un public varié. Pour un
approfondissement des sujets abordés, le site contient des liens vers des publications scientifiques. Le site donne également accès au blogue du cerveau à tous
les niveaux dans lequel un article scientifique est résumé et vulgarisé toutes les
semaines. Il est possible d’accéder à tous les articles publiés sur le blogue
depuis 2010. Une dernière caractéristique du site est qu’il est « copyleft », c’està-dire que contrairement à un « copyright », il permet, et il encourage même la
reproduction, ainsi que la modification de son contenu dans un objectif de diffusion et de partage libre et gratuit de la connaissance.
Brain Explorer : http://fr.brainexplorer.org/
Ce site a été créé par le Lundbeck Institute, un forum international à but
non lucratif pour l’éducation et l’interaction des professionnels de la santé, rattaché à la société pharmaceutique danoise H. Lundbeck A/S. Ce site a été certi-
203
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fié jusqu’en janvier 2013 par le HON (Health On the Net Foundation), dont on
peut retrouver les critères de certification ici :
http://www.hon.ch/HONcode/Patients/Visitor/visitor.html. Ce site, écrit en français, aborde les concepts et principes fondamentaux du fonctionnement cérébral
dans plusieurs rubriques :
Atlas du cerveau : cette rubrique contient la définition de toutes les composantes du cerveau, de la matière grise et blanche, au système limbique, en
passant par les hémisphères et les ventricules. De très nombreux liens permettent d’obtenir la définition des termes employés tout au long du texte.
Contrôle neurologique : cette section décrit les principes permettant la
transmission de l’information neuronale tels que la neurotransmission, le potentiel d’action, la synapse et les neurotransmetteurs.
Les troubles cérébraux : l’épidémiologie, le diagnostic, l’évolution, l’étiologie, la comorbidité, le traitement et la prévention relatifs à de nombreux troubles (AVC, démence, dépression, épilepsie, maladie de Parkinson, migraine,
schizophrénie, sclérose en plaques, troubles anxieux, trouble bipolaire, trouble
panique, troubles du sommeil) sont décrits dans cette section.
Des illustrations, un glossaire et des lectures complémentaires achèvent
d’offrir une information claire et complète du fonctionnement du cerveau.
♦ Se repérer dans le cerveau
Brain Explorer : http://fr.brainexplorer.org/
La section « Illustrations » de ce site (décrit plus en détail dans la section
« Comprendre le cerveau ») permet de visualiser les principales structures du
cerveau telles que les hémisphères, les différents lobes et les structures souscorticales, de manière schématique. Il permet donc d’avoir une idée grossière de
la structure du cerveau.
The whole brain Atlas : www.med.harvard.edu/aanlib/home.html
Ce site, créé par la faculté de médecine de l’Université Harvard (Boston,
États-Unis), développé par Keith Johnson et Alex Becker, permet de visualiser
les structures corticales et sous-corticales, sur des images de scans anatomiques,
dans les trois plans : axial, coronal et sagittal. Au-delà de la localisation anatomique dans le cerveau sain, ce site propose une visualisation détaillée du cerveau dans le cas de certaines pathologies telles que :
- Le mutisme post-AVC
- L’aphasie fluente post-AVC
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- L’alexie sans agraphie post-AVC
- La Maladie d’Alzheimer
Bien que ce site soit en anglais, la traduction des termes anatomiques en
français (sur Google ou n’importe quel site de traduction) est suffisamment
aisée pour que la navigation de ce site reste fluide et son contenu accessible.
Big Brain : https://bigbrain.loris.ca/
Ce site est le résultat d’un partenariat entre les chercheurs de deux principaux instituts – le McConnell Brain Imaging Centre du Montreal Neurological
Institute (Montreal, Canada) et l’Institute of Neuroscience and Medicine,
Research Centre Jülich (Jülich, Allemagne) – ainsi que d’autres institutions
internationales. Il est nécessaire de faire une demande d’inscription pour accéder à ce site. Cette demande peut prendre quelques jours à être traitée… mais
l’attente en vaut la peine ! Ce site permet de visualiser un cerveau en 3D, selon
les trois plans axial, coronal et sagittal. Dans l’onglet « 3D volumes », il est possible de sélectionner un cerveau 3D en fonction de son volume, de sa résolution
et de la taille du fichier (et par conséquent du degré de détail de l’image). Ce
site est particulièrement précieux dans le cas où l’on souhaite localiser une aire
en fonction de ses coordonnées MNI. Lorsqu’un cerveau 3D a été sélectionné, il
suffit en effet d’inscrire les coordonnées souhaitées dans l’onglet de gauche.
L’image est alors centrée sur le point correspondant à ces coordonnées. Les trois
coupes axiale, coronale et sagittale sont disponibles sur la même page et permettent une visualisation optimale de l’aire recherchée. Grâce à ce site, il est
possible de localiser n’importe quelle aire corticale et sous-corticale pour peu
que l’on en connaisse les coordonnées MNI.
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NOTES
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Aucun article ou résumé publié dans cette revue ne peut être reproduit sous forme d’imprimé, photocopie, microfilm ou par tout autre procédé sans l’autorisation expresse des auteurs et de l’éditeur.
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Revue créée par l’A.R.P.L.O.E.V.
Paris
Revue éditée par la Fédération
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PETIT
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Comité scientifique
Aline d’ALBOY
Dr Guy CORNUT
Ghislaine COUTURE
Dominique CRUNELLE
Pierre FERRAND
Lya GACHES
Olivier HERAL
Jany LAMBERT
Frédéric MARTIN
Alain MENISSIER
Pr Marie-Christine MOUREN-SIMEONI
Bernard ROUBEAU
Anne-Marie SIMON
Monique TOUZIN
N° 259 : L’EDUCATION THÉRAPEUTIQUE DU PATIENT EN ORTHOPHONIE - Editorial : L’ETP en
orthophonie (Frédérique BRIN-HENRY ) — Rencontre : L’intégration d’un patient-expert dans un programme d’ETP : regards croisés, (Roland VARINOT , Frédérique BRIN-HENRY) — Données Actuelles :
Education thérapeutique du patient (ETP) : principes et intérêts, (Claire MARCHAND) - Au-delà du masque
de l’expert - Réflexions sur les ambitions, enjeux et limites de l’Éducation Thérapeutique du Patient,
(Alexandre KLEIN) — Examen et interventions : Interdisciplinarité autour du patient en éducation thérapeutique : le point de vue de soignants, (Sylvie DIANCOURT) - Education thérapeutique du patient aphasique et son conjoint, (Frédérique BRIN-HENRY) - Proposition d’un diagnostic éducatif dans le cadre du
programme « Communiquer malgré l’aphasie », (Estelle BERNARD) - Impact d’un Programme d’Education
Thérapeutique du Patient (ETP) pour des personnes aphasiques et leurs aidants, (Charline CÉSAR,
Frédérique BRIN-HENRY, Estelle BERNARD) - L’implication des aidants dans les programmes d’éducation
thérapeutique, (Nathaly JOYEUX) - Éducation Thérapeutique du Patient dysphagique : état des lieux et propositions, (Ariane LÉTUMIER, Antony, Caroline HELLY) - De la conception à la labellisation d’ateliers thérapeutiques pour adolescents dyslexiques, (Françoise GARCIA) — Perspectives : Le réseau dans l’éducation thérapeutique : intérêt pour l’orthophoniste et le médecin coordinateur - Expérience du réseau de
l’Espace Régional d’Education Thérapeutique de Basse-Normandie et du réseau Normandys, (Audrey
ARMAND) - La Fédération Nationale des Aphasiques de France et l’ETP, (Jean-Dominique JOURNET)
Rédacteur en chef
Jacques ROUSTIT
Secrétariat de rédaction
Marie-Dominique LASSERRE
Abonnements
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Commission paritaire : 1110 G 82026
N° 258 : DENISE SADEK-KHALIL ET SON ŒUVRE – HOMMAGES ET TÉMOIGNAGES - Editorial :
(Dominique MARTINAND-FLESCH) — Introduction : Denise Sadek-Khalil, le langage oral au carrefour
de la linguistique et de la clinique, (Marie-Pierre THIBAULT) — Apports de ses travaux : Un itinéraire
improbable, (Ronald LOWE) - Sur les pas de Denise Sadek-Khalil. Rigueur, Liberté et Interaction dans la
prise en charge orthophonique, (Shirley VINTER) - Donner libre(s) cours à la recherche du langage : l’enseignement de Denise Sadek, (Elisabeth MANTEAU-SÉPULCHRE) - Denise Sadek-Khalil, Gustave
Guillaume : psycho-pédagogie et psychomécanique du langage, (Philippe SÉRO-GUILLAUME) - Denise
Sadek-Khalil : de la théorie à la réalité du langage, (Guy CORNILLAC) - Prendre, apprendre et comprendre, (Denise SADEK-KHALIL) — Compagnonnage : Une pionnière en orthophonie : Denise Sadek-Khalil,
(Anne-Marie WEIL-LEVEN, Simone TERRIER) - Gustave Guillaume et Denise Sadek-Khalil : la philosophie du langage (Colette SIRAT) - Rencontres et Privilèges, (Mireille COHEN-MASSOUDA) - Denise
Sadek... l'art de transmettre la langue dans un plaisir mutuel - Témoignages du CEOP, (Marie-Claude
CAUVIN-GARRITY, Marie-Christine CHAPERON, Christine ROMAND, Michel MAULET, Martial
FRANZONI) - A propos de « 7 Leçons de 1980 à 1984 » par Mme Sadek à une fillette sourde, (Francine
JALABERT) - Voir, savoir, faire savoir : en suivant les traces de SADEK sur les sentiers de la langue,
(Martine MIR) - Denise Sadek-Khalil, maître de stage et penseur de l’orthophonie (Mireille KERLAN) - Un
incontournable pour l’orthophonie de demain : l’approche de Denise Sadek-Khalil sur les traces de Gustave
Guillaume, (Patricia MALQUARTI) — Rencontre et hommage : Grandeur et simplicité, (Monique et JeanMarie DUCROS, Pascale DUCROS) - Témoignages (Claire DEMATEÏS-KOPPEL, Frédéric DEMATEÏS) Introduction à l’hommage rendu à Denise Sadek-Khalil lors de son inhumation le 20 avril 2012 (Nadine
SERVAJEAN)
Réalisation TORI
01 43 46 92 92
Impression : CIA Bourgogne
Rééducation
Orthophonique
Rencontres
Données actuelles
Examens et interventions
Perspectives
ne
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al le ra r ra n ad c m im tiv tiie tur ar ot e,
dé e, gin rigé sé al
né -
ISSN 0034-222X
Rééducation Orthophonique Neuroimagerie et orthophonie : de la recherche à la pratique clinique N° 260 - 2014
52e Année
décembre 2014
Trimestriel
N° 260
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Fondatrice : Suzanne BOREL-MAISONNY
Neuroimagerie et orthophonie :
de la recherche
à la pratique clinique
Fédération Nationale des Orthophonistes