La question de l`immersion linguistique dans la presse francophone
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La question de l`immersion linguistique dans la presse francophone
Ramona Bäßler La question de l’immersion linguistique dans la presse francophone belge Contenu 1 Introduction ................................................................................................................. 2 2 Le concept d’immersion linguistique ......................................................................... 2 2.1 Définition et modèles .................................................................................... 3 2.2 Exemple Canada............................................................................................ 3 2.3 Résultats de la recherche ............................................................................... 3 3 Corpus ......................................................................................................................... 4 4 Questionnement, méthode et objectif scientifiques .................................................... 4 5 Analyse ....................................................................................................................... 5 5.1 Articles de Pierre Bouillon ............................................................................ 5 5.2 Article de Fréderic Soumois.......................................................................... 8 5.3 Article de Philippe de Boeck......................................................................... 9 5.4 Article de Michelle Lamensch ...................................................................... 9 5.5 Article de Catherine Pleeck ......................................................................... 11 6 Présentation et interprétation des résultats................................................................ 11 7 Conclusion ................................................................................................................ 13 8 Annexe ...................................................................................................................... 14 9 Bibliographie ............................................................................................................ 34 2 1 Introduction Il existe trois langues officielles en Belgique, le flamand qui est parlé dans le nord du pays, le français dans le sud et une petite partie de la population dans l’est de la Belgique parle l’allemand. L’histoire montre que la Belgique a connu beaucoup de conflits qui se sont enflammés par rapport à cette coexistence de langues. La question linguistique reste un sujet sensible qui concerne tous les domaines de la vie quotidienne. La Constitution belge règle l’emploi des langues dans les institutions et dans les services publics. Dans la vie privée, les habitants sont toutefois libres à choisir la langue qu’ils veulent parler. Dans le domaine scolaire, par contre, l’emploi de langues est strictement réglé par l’État, c’est-à-dire que les écoles situées dans la région francophone sont obligées d’enseigner en français et vice versa. De plus, tous les enfants qui vivent en Flandre sont obligés d’aller à l’école néerlandophone et les enfants qui vivent en Wallonie doivent fréquenter une école francophone. La seule exception est Bruxelles qui est officiellement bilingue (voir Geckeler / Dietrich 2003). Étant donné qu’il s’agit d’un sujet d’une actualité perpétuelle, nous analysons la représentation de l’immersion linguistique scolaire dans la presse francophone belge. Il est à remarquer que beaucoup de quotidiens font le point sur ce sujet. Ainsi, nous nous proposons d’analyser des articles qui traitent du rôle des langues étrangères dans l’enseignement, notamment le néerlandais et le français dans les régions respectivement de l’autre langue officielle. Avant de procéder à l’analyse, il est nécessaire de définir le terme ‘immersion linguistique’. Nous présentons ensuite le corpus examiné et la méthode dont nous nous sommes servis pour exploiter l’ensemble des textes assemblés. 2 Le concept d’immersion linguistique Nous examinons des articles qui ont été publiés sur le site web du journal Le Soir (www.lesoir.be) et qui se penchent sur l’immersion dans les écoles francophones belges. Ainsi, il est nécessaire de définir le terme immersion linguistique et d’aborder l’exemple du Canada où l’immersion linguistique scolaire s’organise à la base de conseils et de données scientifiques. 3 2.1 Définition et modèles Dans un premier temps, il est nécessaire de distinguer les termes immersion linguistique et bilinguisme. Selon Fäcke (2010), la notion d’immersion linguistique se définit de la manière suivante: Immersion basiert auf der Überlegung, dass eine Zweitsprache besser in einer authentischen, natürlichen Lernsituation erworben wird als im gesteuerten Fremdsprachenunterricht. Lernende sollen in schulischen Lehr-/Lernsituationen in die zweite Sprache eintauchen, permanent von ihr umgeben sein und sich in ihr sprachlich bewegen. Dies führt dazu, die Zweitsprache als Unterrichtssprache zu verwenden. Anders als bei der Submersion wird die Erstsprache in diesem Konzept nicht vernachlässigt. (Fäcke 2010: 89) Par contraste, le terme bilinguisme désigne un mode d’enseignement différent: Bilingual education is instruction in two languages and the use of those two languages as mediums of instruction for any part, or all, of the school curriculum. (Andersson/Boyer : 1970) Il est à constater que le terme ‘immersion’ désigne le fait que les élèves se plongent dans une langue étrangère sans négliger leur langue maternelle. La deuxième langue n’est pas l’objet, mais le médium de l’instruction scolaire. Les matières sont enseignées dans la langue cible, qui est aussi la langue maternelle des professeurs qui donnent ces cours. La notion de ‘bilinguisme’, par contre, signifie l’usage permanent de deux langues dans l’enseignement scolaire. Ainsi, l’immersion linguistique ne doit pas forcément être bilingue. 2.2 Exemple Canada Le Canada est comme la Belgique un pays bilingue, mais l’immersion linguistique y a été déjà pratiquée dans plusieurs écoles québécoises dès les années 1960 pour enseigner les élèves anglophones en français. Entretemps, des programmes pour des enfants francophones ont été aussi mis en place. Au Canada, on distingue trois approches différentes : transitional, c’est-à-dire que les enfants francophones sont d’abord enseignés dans leur langue maternelle et en anglais, puis complètement en anglais; maintenance, c’est-à-dire que quelques matières sont enseignées en français, d’autres en anglais et enrichement, c’est-à-dire que seulement une petite partie des matières est enseignée dans la langue étrangère (voir Fäcke 2010). 2.3 Résultats de la recherche 4 Beaucoup de parents, mais aussi un nombre d’experts craignent que l’immersion constitue non seulement un danger pour la langue maternelle, mais aussi pour les autres matières scolaires. Cependant, beaucoup d’études empiriques ont démontré le succès de ce concept. Des programmes avec early immersion favorisent fluency et literacy et constituent un apport à l’épanouissement linguistique, cognitif et intellectuel des enfants. En ce sens, l’immersion linguistique promeut les capacités métalinguistiques, académiques et intellectuelles des élèves ainsi que leur prise de conscience linguistique, à savoir leur language awareness (voir Fäcke 2010). 3 Corpus Nous avons analysé un corpus de sept articles parus sur le site web du quotidien belge Le Soir dont les auteurs sont des journalistes et pas des linguistes ou des didacticiens de langues étrangères. Malheureusement, il n’était pas possible d’apprendre plus sur les auteurs. En outre, mentionnons que les articles ne sont pas parus dans le cadre d’une chronique ou d’une série. Cependant, il est possible d’observer que les auteurs ont parfois écrit plus qu’un article sur l’immersion linguistique, ce qui signifie qu’ils peuvent être considérés comme des experts. Une liste de l’ensemble des articles examinés se trouve dans l’annexe de ce travail (annexe 2). 4 Questionnement, méthode et objectif scientifiques Nous avons choisi une démarche qualitative, car notre intérêt se concentre sur le contenu des articles. L’analyse se base sur la théorie du discours de Michel Foucault, c’est-à-dire que le contenu des textes est considéré comme étant l’opinion des auteurs. Compte tenu du fait que les Belges vivent dans une situation linguistique complexe, la question de l’immersion linguistique reste un domaine d’analyse très intéressante. Nous nous efforçons d’examiner la manière comment la presse quotidienne traite ce sujet et quelles positions elle présente, ou voire défend. Le travail suivant vise à identifier les idéologies linguistiques dans les textes assemblés. Notre conception du terme ‘idéologie linguistique’ s’appuie sur les définitions suivantes : [Language ideologies are] sets of believes about language articulated by users as a rationalisation or justification of perceived language structure and use (Silverstein 1979, p. 193). [Language ideologies are] a set of cultural notions in the anthropological sense: a frame, not always conscious or within awareness, through which we understand linguistic practices (Gal 2006, p. 15). 5 Linguistic ideologies are the culturally specific notions which participants and observers bring to language, the ideas they have about what language is good for, what linguistic differences mean about the speakers who use them, why there are linguistic differences at all. Both ordinary people and social scientists – linguists, sociologists, anthropologists – hold language ideologies (Gal 2002, p. 197). En ce sens, le pluralisme linguistique, c’est-à-dire la conviction que la coexistence de plusieurs langues représente un enrichissement social et pas un problème, peut être considérée comme une idéologie linguistique. Dans l’annexe 1, nous avons assemblé toutes les idéologies linguistiques qui nous ont servi de point de départ. Les idéologies linguistiques peuvent être explicitées, c'est-à-dire codifiées, dans un texte, mais elles peuvent y exister aussi sous forme d'assertions implicites. Il est important de constater que ces dernières ne peuvent être démasquées qu’à l’aide d’une analyse qualitative du discours. Dans un premier temps, nous résumons le contenu des articles introduits pour pouvoir analyser ensuite les parties essentielles à l’analyse des idéologies linguistiques. De plus, les articles examinés sont classés en fonction des auteurs et de leur date de publication. À la fin de ce travail se trouve un résumé de toutes les idéologies linguistiques identifiées dans les articles recueillis pour y déceler des différences et des similitudes. 5 Analyse 5.1 Articles de Pierre Bouillon (1) « A l’école des langues, 32 pages d’immersion » (26 mai 2005) Bouillon se rapporte à la nécessité de maitriser une deuxième, ou voire une troisième langue : La maîtrise d’une deuxième langue moderne voire une troisième, est devenue une condition pour trouver un emploi. (Texte 1, ligne 6-7). Dans le cadre d’un « supplément enseignement » (Article 1, ligne 8), Bouillon envisage d’examiner si les institutions scolaires ont déjà relevé le défi de réaliser la thèse du début. Pour cela, son équipe a visité des « écoles francophones pratiquant de l’immersion linguistique » (Article 1, ligne 9). Étant donné que l’article a paru en 2005, il parle d’une « soixantaine d’établissements primaires et secondaires » (Article 1, ligne 13). Les deux dernières phrases de l’article dissipent des doutes qui craignent les effets négatifs de l’immersion linguistique : 6 Il est souvent dit, notamment, qu’elle [l’immersion linguistique] affecte l’apprentissage de la langue maternelle. Des études signalent qu’il n’en est rien, pourvu que le système soit pratiqué dans de bonnes conditions (Article 1, ligne 1416). L’article est très court et ne donne que des informations de base. L’auteur ne juge pas le concept de l’immersion linguistique, mais il souligne que le modèle n’a pas de conséquences négatives. Ainsi, l’on décèle un soutien implicite pour l’immersion, l’auteur la présente d’une manière favorable. (2) « Auderghem passe en immersion » (18 juillet 2005) Le deuxième article que nous examinons a paru peu après le premier. Cet article est plus long et présente l’exemple d’une école primaire en Auderghem, une commune dans la Région de Bruxelles-Capitale, qui a mis en place l’immersion linguistique. L’auteur explique le modèle d’Auderghem qui contient deux filières, une avec l’immersion et l’autre sans immersion. L’année scolaire 2005/2006 était une année d’essai. L’article détaille les difficultés, notamment sur le plan politique, qui ont compliqué l’implémentation de l’immersion linguistique dans cette école: Se battre contre cette Flandre qui se ferme comme une huître, ça, c’est le travail politique. Qu’on se le dise, le FDF a le plus grand respect pour la culture flamande.1 (Article 2, ligne 51-52). Cet article ne décrit pas l’opinion de Bouillon, mais présente les convictions du maire d’Auderghem. Puisque l’article aborde les difficultés politiques, il est possible de prendre conscience la dimension globale du conflit linguistique entre la Flandre et la Wallonie qui concerne aussi l’enseignement, et plus particulièrement l’apprentissage de langues. (3) « Arena va toiletter l’école en immersion » (19 décembre 2005) L’article prochain de Bouillon a paru la même année, à savoir cinq mois après le deuxième. Ce texte est très détaillé et divisé en six parties : la première partie présente Marie Arena, ministre de l’Éducation à l’époque. Elle a mis en place une « inspection de faire le point sur l’immersion linguistique » (Article 3, ligne 7-8). L’article contient plusieurs informations de base sur l’immersion linguistique, sur le fait que les modèles existants sont très divers et sur les mesures qu’Arena voulait 1 Citation de Didier Gosuin, le bourgmestre 7 prendre pour soutenir l’implémentation de l’immersion linguistique dans les écoles francophones. Le deuxième paragraphe présente les résultats de l’enquête effectuée. Cette étude relève un panorama mitigé, c’est-à-dire qu’il y a des exemples d’une immersion réussie, mais aussi ceux qui ne fonctionnent pas très bien. L’enquête critique surtout l’instabilité de la situation qui résulte du fait que beaucoup d’enseignants néerlandophones ne restent pas dans les écoles francophones compte tenu du fait que « la Flandre paie mieux ses profs » (Article 3, ligne 40). Un autre obstacle constitue le choix libre qui est garanti aux parents : La Constitution garantit aux parents le choix libre entre les divers types d’école. Pour l’inspection, le libre choix est désormais parfois faussé, C’est le cas quand la seule école à proximité est en immersion (Article 3, ligne 58-60). La troisième partie contient un entretien avec Arena dans lequel elle annonce un décret qui est censé promouvoir l’immersion linguistique. Le paragraphe suivant se rapporte à l’exemple canadien pour présenter d’une manière contrastive le développement et les conditions de l’immersion linguistique en Belgique : Peuvent être donnés en langue étrangère tous les cours sauf les cours de religion/morale et éducation physique. Pour basculer en immersion, l’école doit avoir l’aval des parents consultés via le Conseil de participation de l’établissement. A Bruxelles, la langue-cible est obligatoirement le flamand. En Wallonie, on a le choix entre flamand, anglais et allemand. Sauf exception, les cours en immersion doivent être données par un « native speaker », personne dont la langue-cible est la langue maternelle. Selon le décret de 1998, ce prof devait prouver devant jury une « connaissance suffisante » du français […] Notons que le décret de 2003 permet à un professeur francophone d’enseigner en langue-cible s’il est licencié en langues germaniques, traducteur/interprète. Ou s’il prouve une connaissance parfaite de la langue à enseigner (Article 3, ligne 151-162). Le cinquième paragraphe fait le point sur l’inquiétude que l’immersion pourrait nuire à l’acquisition de la langue maternelle, ce qui est toutefois réfuté par les résultats scientifiques : En octobre dernier, les inspecteurs ont testé 346 élèves d’écoles en immersion. Ces élèves étaient alors en 3e primaire. Ils ont été soumis à des tests qui avaient été présents, en juin de cette année, à des enfants de 2e primaire d’écoles ne pratiquant pas l’immersion. Les tests portaient sur la lecture mentale, la lecture orale et la compréhension à la lecture. Dans ces trois domaines, les élèves de l’immersion obtiennent des résultats légèrement supérieurs aux autres […] (Article 3, ligne 168172). 8 Le dernier paragraphe présente des informations pratiques, c’est-à-dire les écoles qui offrent des programmes d’immersion linguistique, les réseaux rattachés, les participants, les langues choisies, les projets scolaires et les établissements concernés. Par rapport au sujet des langues choisies, l’auteur écrit : Le néerlandais est la langue majoritairement choisie par les écoles en immersion (39 cas), bien devant l’anglais (9) et l’allemand (1) (Article 3, ligne 198-199). 5.2 Article de Fréderic Soumois (1) « L’immersion linguistique ne nuit pas à l’apprentissage de la langue française » (24 avril 2008) L’article de Fréderic Soumois est relativement court comparé à celui de Bouillon publié en décembre 2005. Dans la première partie, Soumois fait référence aux craints que l’immersion linguistique avait des effets négatifs. Dans ce contexte, il se rapporte à une étude de longue durée effectuée par Katia Lecocq de l’Université libre de Bruxelles qui a observé des enfants francophones et néerlandophones pendant six ans. Soumois présente les résultats de Lecocq : Dès la troisième primaire, les enfants du groupe d’immersion ayant débuté la lecture en néerlandais lisaient en français aussi bien que les monolingues francophones et que l’autre groupe d’immersion, bien qu’ils présentassent des temps de lecture légèrement plus élevés. Leurs stratégies de lecture en français apparaissaient tout à fait similaires à celles des deux autres groupes francophones et on n’observait pas davantage de difficultés chez les enfants de ce groupe à lire les mots irréguliers du français. De plus, la comparaison des performances en 3e et en 6e primaire a mis en évidence qu’il présentait des performances relativement similaires en français et en néerlandais et comparables à celles de monolingues francophones et néerlandophones. (Article 4, ligne 31-38) Compte tenu du fait que le journaliste adopte entièrement les résultats de cette étude, Soumois peut être considéré comme étant un représentant d’un soi-disant ‘expertisme linguistique’ (sprachlicher Expertismus). De plus, il utilise des expressions linguistiques, comme « graphèmes » et « phonèmes » (Article 4, ligne 40), ce qui confirme cette évaluation. Par ailleurs, il défend la thèse que l’immersion du français au néerlandais ne représente pas un problème, contrairement à l’immersion du français à l’anglais. Ainsi, l’auteur est le représentant d’un nationalisme linguistique (sprachlicher Nationalismus) compte tenu du fait qu’il 9 revendique l’immersion scolaire devrait se dérouler dans l’autre langue officielle et non pas dans l’anglais. 5.3 Article de Philippe de Boeck (1) « Faut-il interdire l’usage d’autres langues à l’école ? ‘La punition, ce n’est pas ce qu’il y a de mieux’ » (5 décembre 2012) De Boeck a publié un texte d’une longueur moyenne qui est divisé en deux parties. Dans la première partie, il constate que dans quelques écoles néerlandophones, les élèves sont punis s’ils ne parlent pas exclusivement en français : « L’étude flamande révèle que beaucoup d’enfants sont punis quand ils parlent une autre langue que le néerlandais » (Article 5, ligne 17). De Boeck critique cette pratique. À ce sujet, il écrit : […] nous ne pensons pas qu’une punition, telle que décrite dans le dossier de paru dans le Standaard de ce mardi 4 décembre, soit justifiable (Article 5, ligne 40-41). Il devient clair que De Boeck opte pour un ‘pluralisme linguistique’ (sprachlicher Pluralismus) qui va de pair avec un ‘libéralisme linguistique’ (sprachlicher Liberalismus) et avec un soi-disant ‘internationalisme et démocratisme linguistique’ (sprachlicher Internationalismus und Demokratismus). 5.4 Article de Michelle Lamensch (1) « Le néerlandais dès la maternelle Enseignement, Le rapport Braun sur l’apprentissage des langues soumis aujourd’hui au débat parlementaire, Apprendre ‘en’ néerlandais ‘Eveiller aux langues, en maternelle’ » (8 janvier 2003) Cet article est d’une longueur moyenne. Il se réfère au professeur Braun, spécialiste de didactique des langues à l’Université de Mons-Hainaut, ce qui est déjà indiqué dans le titre. Le texte traite d’une étude qui démontre qu’en « Communauté française, l’apprentissage des langues étrangères [soit] inefficace » (Article 6, ligne 8). Lamensch critique le système scolaire et identifie les raisons pour lesquels l’apprentissage des langues se trouve dans une situation lamentable : 10 Pourquoi nos jeunes sont-ils si peu bilingues, si rarement multilingues ? La question taraude les politiques francophones depuis des années. Dans ce pays où la communautarisation de l’enseignement a mené à une séparation physique des apprentissages et des apprentis poussée jusqu’à l’absurde, des chercheurs des deux Régions proposent des pistes éducatives convergentes. (Article 6, ligne 13-17). L’article introduit les conseils du professeur Braun qui recommande l’acquisition du néerlandais d’abord, de l’anglais ou d’une autre langue ensuite, par le biais de l’‘immersion’ (Article 6, ligne 23-24). En outre, Lamensch explique que [s]elon Alain Braun, l’apprentissage des langues développe l’intelligence et [que] le plurilinguisme est l’issue la plus favorable pour le maintien de la diffusion du français (Article 6, ligne 57-58). Ainsi, le professeur Braun peut être considéré comme étant non seulement un défendeur du ‘plurilinguisme linguistique’ (sprachlicher Pluralismus), mais aussi un adhérent du ‘nationalisme linguistique’ (sprachlicher Nationalismus). Il exige que le néerlandais soit la première langue étrangère que les élèves francophones devraient apprendre en Wallonie. À ce sujet, l’article se rapporte aussi à Jean-Marc Nollet, le ministre Ecole de l’Enseignement fondamental à l’époque, qui soutenait les conseils du professeur Braun : Le choix entre le néerlandais et l’anglais est de 50/50. Cette possibilité de choix nous coûte cher en professeurs. Nous devons réagir. Je prône l’apprentissage de la langue du voisin plutôt que l’anglais, mais, à cause du décret de 1998, on ne pourra pas aller vers une généralisation du néerlandais (Article 6, ligne 87-90). De plus, Nollet estime, par ailleurs, indispensable de reconnaître comme certificatives d’autres langues que le néerlandais : l’arabe ou le turc, par exemple. Idiomes qui seraient laissés au libre choix des écoles (Article 6, ligne 103-104). Il est à noter que Nollet est aussi le représentant d’un ‘pluralisme linguistique’ (sprachlicher Pluralismus). Puisque Lamensch se réfère aux experts en matière de 11 langue, le journaliste s’inscrit dans le courant d’un ‘expertisme linguistique’ (sprachlicher Expertismus). 5.5 Article de Catherine Pleeck (1) « L’immersion linguistique, un système démocratique Déjà 39 écoles ont entamé un programme d’immersion linguistique. Et elles seront dix de plus à la rentrée. Focus sur ce système d’enseignement particulier avec Alain Braun » (24 août 2004) Comme le montre le titre, Pleeck compare l’immersion linguistique avec « un système démocratique » (Article 7, ligne 1 & ligne 4). L’article s’appuie sur une entrevue du Soir avec le professeur Braun. Dans l’introduction, Pleeck souligne la compétence du professeur Braun : Chargé de cours en didactique des langues à l’Université de Mons-Hainaut, Alain Braun s’intéresse notamment à l’apprentissage des langues par immersion. Il a ainsi suivi, depuis leur naissance, les différentes expériences d’immersion linguistique dans notre pays. De quoi lui permettre de dresser le portrait de cette méthode d’apprentissage des langue étrangères (Article 7, ligne 12-15). Comme l’on a déjà constaté ci-dessus pour ce qui est d’article de Lamensch, Pleeck fait aussi preuve d’un certain ‘expertisme linguistique’ (sprachlicher Expertismus). L’entrevue traite non seulement du fonctionnement de l’immersion linguistique et des avantages qu’elle entraine, mais aussi des limites qu’il faut prendre en considération : « Mais il faut reconnaitre que l’immersion n’est pas une méthode qui convient à tous les enfants » (Article 7, ligne 88). On constate que cet article aborde l’immersion linguistique d’une manière générale comme un système d’enseignement. L’auteur ne se rapporte pas à la situation belge, c’est-à-dire qu’il ne donne pas de recommandations pour ce qui est du choix des langues. Ainsi, le lecteur n’est pas confronté à des jugements de valeur, ce qui nous incite à constater un certain ‘neutralisme linguistique’ (sprachlicher Neutralismus). En outre, Braun souligne les avantages de l’immersion, ce qui donne lieu d’un ‘pluralisme linguistique’ (sprachlicher Pluralismus) qu’on a déjà constaté dans l’article de Lamensch. 6 Présentation et interprétation des résultats La vue d’ensemble des articles analysé relève un nombre de convergences : 12 Tous les articles sont relativement neutres et objectifs. Presque tous les articles se rapportent sur des décrets ou sur des expertises de professeurs, ce qui souligne l’idéologie d’un ‘expertisme linguistique’ (sprachlicher Expertismus) qui est défendue par les auteurs. Tous les auteurs semblent favorables à l’immersion linguistique et revendiquent l’exercice d’un plurilinguisme dans les écoles belges, ce qui implique un ‘internationalisme’ et un ‘libéralisme linguistique’ (sprachlicher Liberalismus). Cependant, il existe des différences qui se manifestent surtout dans les buts que les auteurs poursuivent. Ainsi, Bouillon vise à présenter des faits et donner une vue globale, notamment sur le plan politique. Il présente les règlements et les difficultés auxquels la mise en place d’un système d’immersion linguistique homogène est confrontée. Même s’il répète les effets positifs de l’immersion linguistique sur l’acquisition de la langue maternelle et sur les autres matières scolaires, ceci ne constitue pas l’intérêt principal de l’auteur. On constate que Bouillon est un représentant d’un ‘expertisme linguistique’ (sprachlicher Expertismus), étant donné qu’il se réfère souvent à des résultats de recherches effectuées. Par contraste, Soumois se concentre sur les effets positifs de l’immersion en se rapportant sur des études scientifiques. Le titre « L’immersion ne nuit pas à l’apprentissage de la langue française. Langues : l’immersion ne nuit pas aux enfants » explicite l’attitude et l’objectif de l’auteur. Il communique les recommandations de Lecocq de l’Université libre du Bruxelles. La référence à des experts démontre que l’expertisme linguistique soit l’idéologie dominante dans les articles de Soumois. De Boeck, à l’inverse, ne se penche pas exclusivement sur l’immersion linguistique dans les écoles francophones. Il donne un aperçu de toute la Belgique. Il examine aussi le choix de langues des enfants dont le français n’est pas la langue maternelle. Il donne clairement son opinion (« Non, nous ne pensons pas… ») et il est moins objectif que tous les autres auteurs. Il défend l’idée que l’enseignement scolaire doit non seulement favoriser les langues officielles de la Belgique, mais aussi toutes les langues maternelles des enfants qui vont à l’école en Belgique. Il en ressort que De Boeck peut être non seulement considéré comme étant le représentant d’un ‘internationalisme linguistique’ (sprachlicher Internationalismus), mais aussi d’un ‘libéralisme’ ainsi qu’un ‘démocratisme linguistique’ (sprachlicher Liberalismus und Demokratismus). Lamensch et Pleeck sont les autrices qui semblent le plus en faveur de l’immersion linguistique. Ceci devient clair si on prendre en considération le titre de l’article de Pleeck. Elle compare l’immersion linguistique à « un système démocratique », ce qui suscite surement des connotations positives. En outre, Lamensch et Pleeck se réfèrent au professeur Braun de l’Université de Mons-Hainaut qui témoigne d’un 13 ‘expertisme’ et d’un ‘démocratisme linguistique’ (sprachlicher Expertismus und Demokratismus). Il est à noter que le titre de l’article de Pleeck fait aussi allusion à ces idéologies linguistiques. 7 Conclusion La vue d’ensemble des résultats présentés dans le paragraphe précédent indique qu’on a décelé les idéologies suivantes : Pluralisme linguistique (sprachlicher Pluralismus) Démocratisme linguistique (sprachlicher Demokratismus) Internationalisme linguistique (sprachlicher Internationalismus) Libéralisme linguistique (sprachlicher Liberalismus) Expertisme linguistique (sprachlicher Expertismus) Nationalisme linguistique (sprachlicher Nationlismus) Promotion d’un multilinguisme et d’un plurilinguisme On a démontré que les journalistes du Soir s’inscrivent dans un certain libéralisme linguistique et revendiquent un plurilinguisme. De plus, la plupart des articles analysés soulignent que l’immersion linguistique ne suscite pas, ou presque pas, d’effets négatifs. Par ailleurs, plusieurs articles revendiquent que la première langue d’immersion dans les écoles francophones devrait être le néerlandais, ce qui implique un certain nationalisme, mais aussi un libéralisme, étant donné qu’on vise à surmonter les conflits linguistiques et promouvoir un bilinguisme, ou voire multilinguisme, vivant. Pour ce qui est de la fonction et du style des textes, les auteurs envisagent d’informer les lecteurs. Cependant, les textes contiennent aussi des parties argumentatives qui plaident en faveur de l’immersion linguistique. Ainsi, on constate une certaine fonction d’appel : les auteurs essaient de convaincre les lecteurs que l’immersion est efficace, ce dont les parents ne doivent pas douter. Cette argumentation est particulièrement évidente parmi les auteurs qui se réfèrent aux experts universitaires. 14 8 Annexe 1. Des idéologies linguistiques Sprachlicher Belletrismus: Die von Schriftstellern benutzen sprachlichen Formen sind von vornherein besser als die von Sprechern mit anderen Berufen. Sprachlicher Brevismus: Kürzere sprachliche Formen sind von vornherein besser als längere. Sprachlicher Defektivismus: In der Sprache bzw. in ihren Varietäten kann es schlechte/schädliche Formen geben. Diese gelten unabhängig vom Äußerungskontext als falsch. Sprachlicher Defizitismus: Nonstandardvarietäten sind aus linguistischen Gründen ungeeignet, bestimmte sprachliche Funktionen zu erfüllen. Sie sind also nicht nur in sozialer, sondern auch in linguistischer Hinsicht minderwertiger als die Standardsprache. Sprachlicher Dekadentismus: Die Sprache verändert sich nicht nur, sondern sie verfällt auch mit der Zeit, die Sprachwandelerscheinungen sind also in ihrer Gesamtheit destruktiver Art. In gemäßigter Form: Die Sprache kann mit der Zeit verfallen, dieser Verfall ist aber nicht notwendig, er kann z. B. durch sprachpflegerische Aktivitäten verhindert werden. Sprachlicher Demokratismus: Im Sprachgebrauch müssen die demokratischen Werte zur Geltung kommen. In diesem Sinne hat jeder Sprecher das Recht, diejenige Sprache/Varietät zu verwenden, die er möchte. Sprachlicher Despotismus: Der Status und das gegenseitige Verhältnis von Sprachen zueinander muss – im Interesse der Stabilität des Staates – durch legislative Mittel geregelt werden. Alle Staatsbürger haben die Pflicht, die durch die Staatsmacht hergestellte sprachliche Ordnung zu achten und sich an diese Ordnung zu halten. Sprachlicher Destruktivismus: Der (nicht standardkonforme) Sprachgebrauch kann für die Sprache gefährlich/destruktiv sein. Wenn also die Sprecher bestimmte als schädlich geltende Formen zu häufig verwenden oder an sich harmlose sprachliche Formen auf unangemessene Weise verwenden, so fügen sie der Sprache Schäden zu. Sprachlicher Egalitarismus: Der linguistische Wert von sprachlichen Varietäten/ Formen ist unabhängig davon, von welchen Schichten sie verwendet werden. Alle sind gleichwertig. Sprachlicher Elitismus: Der Sprachgebrauch der gebildeten Schichten ist von vornherein besser/richtiger/wertvoller als der der weniger gebildeten Schichten. Sprachlicher Expertismus: Professionelle Linguisten bzw. Sprachpfleger wissen aufgrund ihrer Fachkompetenz besser als linguistische Laien, welche Sprachen/Varietäten/Normen die Sprachgemeinschaft braucht, und sie sollen auch darüber entscheiden, welche sprachlichen Formen richtig oder falsch sind. Sprachlicher Hannoverismus: Das in Norddeutschland (besonders um Hannover) gesprochene Hochdeutsch ist von vornherein besser/richtiger als das anderswo gesprochene Hochdeutsch. Sprachlicher Homogenismus: (a) Sprachliche Vielfalt ist ein negatives/abnormales Phänomen. Sprachliche Einheit/die Einheitssprache soll zu Lasten der Variabilität gefördert werden. (b) Der linguistisch homogene Sprachgebrauch ist von vornherein besser/korrekter als der Sprachgebrauch, bei dem verschiedene Sprachen/Varietäten gemischt werden. In 15 ähnlicher Weise sind auch homogenere Varietäten besser/wertvoller als in irgendeiner Hinsicht heterogene Varietäten. In ähnlicher Weise sind auch homogene sprachliche Formen besser/wertvoller als gemischte (hybride, Elemente aus unterschiedlichen Varietäten/Sprachen vereinende) Formen. Sprachlicher Idiomismus: Sprachen/Varietäten mit mehr sprachenspezifischen Merkmalen sind von vornherein besser als die mit weniger solchen Eigenschaften. In ähnlicher Weise sind auch die sprachenspezifischen Formen von Sprachen/Varietäten von vornherein besser/wertvoller als solche, die auch in anderen Sprachen nachweisbar oder auf fremden Einfluss zurückzuführen sind. Sprachlicher Internationalismus: Die Internationalisierung von Sprachen, d. h. deren Konvergenz, ist aus der Perspektive der internationalen Kommunikation ein begrüßenswertes Phänomen und soll gefördert werden. In diesem Sinne sind auch sprachliche Formen besser, die in vielen Sprachen, besonders in den Weltsprachen, zu finden sind. In ähnlicher Weise sind auch Sprachen von besonderer Bedeutung, die global verbreitet sind und/oder als lingua franca dienen. Sprachlicher Kommunikationismus: Die Sprache hat (lediglich) die Funktion, Inhalte mitzuteilen (wobei andere Funktionen wie Identitätsmarkierung oder ästhetische Funktionen außer Acht gelassen werden). Sprachlicher Konservatismus: Alte/ältere/traditionelle Sprachen/Varietäten/Formen sind wertvoller als jüngere/neuere. Ihr Schutz/Erhalt stellt daher ein gesellschaftliches/kulturelles/nationales Interesse dar. Aus diesem Grund soll der Sprachwandel verlangsamt und/oder umgekehrt werden. Sprachlicher Liberalismus: Die Sprach-/Varietätenwahl ist eine private Angelegenheit, eines jeden Sprechers, deren äußere Regelung daher nicht notwendig/erwünscht ist. Sprachlicher Logizismus: „Logische“, den Gesetzmäßigkeiten des Denkens entsprechende sprachliche Formen sind von vornherein besser als „nicht logische“. Sprachlicher Majoritismus: Der sprachlichen Mehrheit stehen mehr Rechte zu als den Minderheiten und diese Rechte sollen auch mit legislativen Mitteln gesichert werden. Sprachlicher Mentalismus: Zwischen dem Gebrauch von schlechten sprachlichen Formen und den mentalen Fähigkeiten der Sprecher besteht ein direkter Zusammenhang. Der Gebrauch schlechter Formen zeugt von geringerer Intelligenz. Sprachlicher Minoritismus: Sprachliche Minderheiten sollen positiv diskriminiert werden, damit ihre nachteilige Situation zumindest zum Teil kompensiert werden kann. Sprachlicher Modernismus: Sprachliche Neuerungen sind positiv zu sehen, da sie aus aktuellen Bedürfnissen der Sprecher heraus entstehen. Neuere sprachliche Varietäten/Formen sind daher genauso richtig/wertvoll wie traditionelle/ältere Varietäten/Formen. Sprachlicher Moralismus: (a) Zwischen Sprachgebrauch und Moral besteht ein direkter Zusammenhang. Die Verwendung von als schlecht abgestempelten sprachlichen Formen ist eine moralisch verwerfliche Tat. (b) Der Sprachgebrauch von negativ bewerteten Personen/Gruppen/Schichten ist von vornherein schlechter/wertloser als der von positiv bewerteten/angesehenen Sprechern. Sprachlicher Nationalismus (Sprachnationalismus): Die an die eigene (nationale) Identität gebundene Sprache ist wertvoller/hochwertiger/schöner/besser als andere Sprachen. Sprachlicher Necessismus: In der Sprache gibt es überflüssige und somit schlechte/falsche sprachliche Formen. Von sprachlichen Formen mit gleicher denotativer Bedeutung sind nicht alle notwendig, eine oder mehrere können überflüssig sein. Sprachlicher Neutralismus: Sprachwandelprozesse können im Allgemeinen nicht als positiv oder negativ bewertet werden. Daher sind auch Eingriffe in laufende Sprachwandelprozesse unnötig/unerwünscht. Sprachlicher Originalismus: Aus etymologischer Sicht primäre/ältere sprachliche Formen/Bedeutungen sind von vornherein besser/korrekter als sekundäre/jüngere. 16 Sprachlicher Orthographismus: Die Befolgung der orthographischen Regeln ist eine notwendige Grundbedingung der schriftlichen Kommunikation und daher für alle Sprecher und immer verbindlich. Im Zusammenhang damit sind den orthographischen Regeln entsprechende sprachliche Formen von vornherein besser/korrekter als die mit Regelverstößen. Sprachlicher Patriotismus: Der Sprachgebrauch kann unabhängig vom Inhalt der Mitteilung, allein schon durch die Wortwahl/die Wahl bestimmter sprachlicher Formen, ein patriotischer Akt sein. Sprachlicher Perfektionismus: Die anspruchsvolle Wortwahl, die gepflegte, kultivierte Ausdrucksweise und die Befolgung von Sprachrichtigkeitsregeln sind von vornherein natürliche, unerlässliche Grundbedingungen des Sprachgebrauchs. Sprachlicher Platonismus: Die Sprache hat eine ideale, vom tatsächlichen Usus ganz und gar unabhängige Existenzform. Die Richtigkeit einer sprachlichen Form ist also unabhängig davon, von wem und wie häufig sie verwendet wird. Sprachlicher Pluralismus: Vielfalt gehört zu den essenziellen Eigenschaften der Sprache und soll daher erhalten und gefördert werden. Sprachlicher Purismus: Sprachliche Formen ohne fremde Herkunft und Sprachgebrauchsweisen ohne fremden Einfluss sind von vornherein richtiger/wertvoller/ schöner als solche mit fremden Einflüssen. Sprachlicher Ruralismus: Die weniger gebildete dörfliche Bevölkerung hat eine unverdorbene/schönere/bessere Sprache bewahrt. Dialekte sind in diesem Sinne wertvoller als andere (z. B. künstlich erzeugte, von anderen Sprachen beeinflusste) Varietäten. Sprachlicher Standardismus (Standardideologie): (a) Die Standardsprache hat besondere Bedeutung, ist das unerlässliche Mittel der Bildung, die wichtigste Varietät der Sprache, der Maßstab der Sprachrichtigkeit und die Grundbedingung des gesellschaftlichen Fortschritts. Daher ist es das elementare Interesse eines jeden Sprechers, sie zu erlernen und zu verwenden. (b) Die Standardvarietät/Standardvarianten sind von vornherein hochwertiger/besser/korrekter als nicht standardkonforme Sprachgebrauchsformen. Sprachlicher Simplizismus: Die Einfachheit der Mitteilung ist ein absoluter Wert. Einfache Formen sind daher von vornherein besser als komplexere. Sprachlicher Situationismus: Die Richtigkeit/Angemessenheit von sprachlichen Formen kann nur im gegebenen Äußerungskontext adäquat beurteilt werden. Sprachlicher Usualismus: Die häufiger verwendeten Sprachen/Varietäten/sprachlichen Formen sind von vornherein wertvoller/besser/korrekter als die weniger verbreiteten. Sprachlicher Vernakularismus: Die autochthonen, die lokale/regionale Identität tragenden Sprachen/Varietäten und sprachlichen Formen sind besser/förderungswürdiger als Sprachen/Varietäten/sprachliche Formen mit größerer Reichweite. 17 2. Les textes analysés A l'école des langues, 32 pages d'immersion BOUILLON,PIERRE Page 1 Jeudi 26 mai 2005 PIERRE BOUILLON La maîtrise d'une deuxième langue moderne, voire d'une troisième, est devenue une condition pour trouver un emploi. Notre enseignement des langues est-il à la hauteur de ce défi ? Nous avons voulu faire le point, à l'occasion de notre traditionnel « supplément enseignement ». Nous avons profité de l'occasion pour nous pencher sur les écoles francophones pratiquant l'immersion linguistique - système où une partie des cours (calcul, géographie, etc.) est donnée en néerlandais, anglais ou allemand, par des enseignants dont la « langue-cible » est la langue maternelle. Lancé à titre expérimental en 1989 du côté de Liège, le système a fait contagion - l'effet de mode est réel et la demande des parents est forte. Pour l'heure, il a convaincu une soixantaine d'établissements primaires et secondaires. Un bilan commence à être possible sur l'immersion. Il est souvent dit, notamment, qu'elle affecte l'apprentissage de la langue maternelle. Des études signalent qu'il n'en est rien, pourvu que le système soit pratiqué dans de bonnes conditions. Notre supplément spécial Page 19 18 Auderghem passe en immersion BOUILLON,PIERRE Page 14 Lundi 18 juillet 2005 Enseignement Le centre scolaire du Pré des Agneaux, place Pinoy, testera la formule l'année prochaine Auderghem engage l'une de ses écoles primaires dans l'immersion linguistique. Une révolution en douceur : parents et enfants auront une année pour se tester et faire leur choix. PIERRE BOUILLON A la rentrée de septembre, le Centre scolaire du Pré des Agneaux, situé place Pinoy à Auderghem (réseau communal), va basculer dans le système de l'immersion linguistique. La formule est connue. En Communauté française, elle a déjà convaincu une soixantaine d'écoles (primaires, pour l'essentiel). Mais, comme nous l'explique le bourgmestre Didier Gosuin (MR-FDF), Auderghem va innover dans l'innovation. Qu'impose le décret de la Communauté française aux écoles qui veulent être reconnues comme étant en immersion ? Celle-ci doit commencer en 3e maternelle. De la 3e maternelle à la 2e primaire, la deuxième langue (à Bruxelles, c'est obligatoirement le néerlandais) doit être pratiquée pour la moitié des activités (3/4 au plus). De la 3e à la 6e année primaires, la deuxième langue doit être pratiquée pendant un quart de l'horaire (2/3 au maximum). Ceci rappelé, qu'est-ce qui fera l'originalité de l'expérience auderghemoise ? Si l'école du Pré des Agneaux a été choisie par le collège auderghemois, c'est parce qu'il y a deux classes pour chaque année scolaire. Et l'immersion ne se généralisera pas à toute l'école. Elle s'appliquera à une classe sur deux. Tous les enfants ne sont pas à l'aise dans l'immersion, argumente Didier Gosuin. Certains n'adhèrent pas au système. Généraliser l'immersion reviendrait à obliger ces enfants à changer d'école. Nous ne le voulons pas. Il y aura donc, au Pré des Agneaux, une « filière » immersion et une « filière » ordinaire. Deuxième particularité : l'année scolaire prochaine servira d'échauffement, de préparation. Une jeune institutrice d'origine flamande (une native speaker, comme l'impose le système) va faire son apparition dans l'école, non pas en 3e maternelle, mais en 2e maternelle. Pendant un an, elle va donner des activités en néerlandais dans cette classe - en douceur, bien sûr : des jeux, des chansons, etc. Ce sera une année test. Il s'agira pour l'équipe enseignante de repérer les enfants qui adhèrent à l'immersion et ceux que le système met en difficulté. D'autre part, cette année permettra aux parents de se rendre compte des implications du système. Elle les aidera à faire leur choix et à décider à la fin de l'année scolaire s'ils mettent leurs enfants dans la 3e maternelle en immersion ou dans la 3e maternelle classique. Etant dit bien sûr que le système de l'immersion progressera dans l'école au même rythme que les élèves et qu'elle atteindra donc la 6e primaire en 2012. 19 Didier Gosuin poursuit : On ne veut donc rien brusquer. Les parents ont déjà été avertis du projet - et l'accueil est bon. Mais l'année prochaine, ils verront ce qu'implique concrètement l'immersion. Et on les rencontrera beaucoup. On les accompagnera dans leur choix. Parce que le projet auderghemois dérogera pendant un an au décret sur l'immersion (puisque la commune lance le système dès la 2e maternelle), il ne sera pas couvert par la Communauté. L'institutrice flamande qui rejoindra le Pré des Agneaux en septembre sera donc financée par le budget communal. L'enseignante ne sera reconnue par la Communauté qu'à partir de l'année suivante, quand la pratique auderghemoise rentrera réellement dans les clous du décret. Le Pré des Agneaux sera, à Bruxelles, le deuxième établissement communal primaire en immersion - l'autre étant l'école communale Van Meyel, à Woluwe-Saint-Lambert. Deux communes FDF, se plaît à signaler le maïeur d'Auderghem. C'est piquant, non ? On décrit parfois les mandataires FDF comme mangeant du Flamand du matin au soir. Cette initiative montre bien que combattre certains projets politiques flamands n'empêche pas d'avoir du respect pour la culture flamande. Que combattre une certaine Flandre politique arrogante et nationaliste n'empêche pas le réalisme : le bilinguisme est un atout à Bruxelles même si, contrairement à ce que tout le monde dit, beaucoup d'offres d'emploi dans la capitale - 61 % d'après les chiffres 2004 de l'Orbem... n'exigent pas le bilinguisme. Le FDF est l'objet d'amalgames - et j'en ai souffert. Se battre contre cette Flandre qui se ferme comme une huître, ça, c'est le travail politique. Qu'on se le dise, le FDF a le plus grand respect pour la culture flamande. Gosuin clôt son propos en notant que, lors de son installation à l'été 2004, le nouvel exécutif bruxellois (PS-CDHEcolo-SP.A-CD&V) s'est engagé à prendre contact avec la Flandre pour faciliter l'échange d'enseignants et ainsi activer les expériences d'immersion. A ce jour, qu'est-ce qui a été fait ? Rien. Le résultat, c'est que, pour les écoles francophones qui veulent passer en immersion, chercher un enseignant néerlandophone relève du cassetête. Singulièrement parce qu'en venant travailler dans l'enseignement francophone, cet enseignant est bien moins payé. Quand donc se parlera-t-on pour lever ces obstacles ? 20 Arena va toiletter l'école en immersion BOUILLON,PIERRE Page 3 Lundi 19 décembre 2005 n'est parfois qu'un argument publicitaire. La ministre Arena va corriger le tir. P.2 & 3L'immersion linguistique L'an dernier, Marie Arena (PS), ministre de l'Education, chargeait l'inspection de faire le point sur l'immersion linguistique. Ce type d'enseignement suppose qu'une partie des cours (calcul, lecture, géo...) est dispensée en flamand, anglais ou allemand. L'inspection a livré son avis. Il est salé. Il signale notamment que le « label immersion » recouvre des pratiques trop diverses. Arena nous signale qu'elle va rédiger un décret pour unifier les choses. Aujourd'hui, est réputée en immersion une école qui donne de 25 à 75 % de ses cours en langue étrangère. Pour Arena, « la fourchette est trop large » et trompe les parents sur la marchandise. Pour elle, l'école en immersion devrait, en début de scolarité, donner 75 % de ses cours en langue-cible pour arriver à 50 % en fin de primaire. Autre projet : permettre aux écoles techniques et professionnelles de pratiquer l'immersion. L'immersion linguistique ? « Le meilleur côtoie le pire » Pour l'inspection, ce système a souvent pour (seul) but d'attirer des élèves Ecole a mené l'enquête. L'enseignement des langues en immersion est-il réservé à une élite scolaire ? C'est son avis. L'inspection En Communauté française, une septantaine d'écoles primaires (surtout) et secondaires (un peu) ont choisi de s'engager dans le système de l'immersion linguistique. Ce type d'enseignement suppose qu'une partie des cours (jusqu'à 75 % de l'horaire, dans certains cas) est donnée en néerlandais, anglais ou allemand. L'apprentissage d'une 2e langue n'est plus une activité isolée, à part. Calcul, histoire, ou même l'apprentissage de la lecture ou l'écriture peuvent être dispensés dans la langue cible. Le professeur est généralement un « native speaker » - une personne dont la langue maternelle est celle à enseigner. Que donnent ces expériences ? Les écoles se disant en immersion jouent-elles réellement le jeu ? Le système affecte-t-il, oui ou non, l'apprentissage de la langue maternelle ? 21 L'an dernier Marie Arena (PS), ministre de l'Education, a chargé l'inspection de mener l'enquête. Elle vient de déposer son rapport. Il est critique. En tant que tel, le système n'est pas mis en accusation. Mais on note une grande anarchie dans les pratiques (« Le meilleur côtoie le pire, dans l'organisation de l'immersion comme dans ses contenus »). On juge aussi que le système est réservé à une certaine élite scolaire. 1Renoncements. Signalons d'emblée que l'arrêté de la Communauté qui, chaque année, dresse la liste des écoles pouvant pratiquer l'immersion, compte 55 établissements au fondamental. L'enquête n'a été menée que dans 49 implantations (certaines ont en effet arrêté l'expérience, d'autres ont renoncé par manque d'engouement des parents. etc.). 2Instabilité. L'enseignant flamand recruté par une école francophone s'y attarderait peu. Pourquoi ? Parce que la Flandre paie mieux ses profs. Le rapport dit : « Les enseignants néerlandophones rentrent dans leur communauté dès qu'ils le peuvent, vu qu'ils sont mieux payés par la Vlaamse gemeenschap. » Il en résulte un « manque de stabilité » dans les écoles en immersion. 3Discrimination. Pour retenir l'enseignant flamand, des pouvoirs organisateurs (PO) lui « consentent un supplément de traitement ». Ceci est lu comme une « discrimination » par ses collègues francophones. L'inspection ajoute que cette pratique « renforce le phénomène de l'école dite à deux vitesses car tous les PO n'ont pas les moyens de donner ces suppléments ». 4Tensions. Autre motif de tension : « Comme le phénomène de l'immersion est à la mode, les écoles en immersion drainent une population de plus en plus importante, ce qui entraîne des tensions au sein des écoles d'une même région, voire d'un même réseau ou d'un même PO. » 5Favoritisme. Souvent, un même PO organise dans la même école de l'immersion tout en maintenant une filière ordinaire. Le rapport note que l'immersion bénéficie souvent des faveurs du PO, qui y concentre un maximum de moyens humains. Il parle d'un « élitisme au sein de l'école où l'encadrement dans la filière d'immersion est tel qu'il provoque un degré bien plus favorable d'efficacité pédagogique que dans la filière ordinaire ». 6Elitisme. On lira en page 3 (sous le titre « Repères ») que les écoles en immersion ne trient pas leur public. Mais pour l'inspection, il y a une sélection de fait. Son raisonnement : vu la rareté de l'offre d'écoles en immersion, y scolariser son enfant force à des déplacements qui coûtent temps et argent. « Tous les parents n'ont pas les moyens d'assurer le trajet de leurs enfants vers une école en immersion. » 7Libre choix affecté. La Constitution garantit aux parents le choix entre les divers types d'école. Pour l'inspection, le libre choix est désormais parfois faussé. C'est le cas quand la seule école à proximité est en immersion - l'école n'ayant pas maintenu de filière ordinaire, ou pas pu la maintenir parce qu'une majorité de ses élèves a filé en immersion. 8Dérive. Pour l'inspection, les écoles « pionnières » de l'immersion « avaient un projet de développement vraiment linguistique ». Aujourd'hui ? Vu l'engouement pour le système, « les écoles entrent en immersion soit pour sauver une implantation en augmentant la population scolaire, soit pour changer le type de population de l'école ». 9Remédiation ?Le rapport dit « souvent constater une absence de planification de passerelles ou de mesures de différenciation pour l'enfant en difficulté au sein des classes en immersion ». 10Personnel compétent ? L'inspection note « qu'il est difficile de trouver des enseignants qui aient à la fois les compétences langagières et didactiques nécessaires pour mener à bien les apprentissages en immersion. » Ils disent avoir noté la présence de profs de langue dépourvus des titres requis, « ne disposant pas des compétences pédagogiques nécessaires » ou ne maîtrisant pas assez le français (« Ceci entraîne une incapacité de compréhension et de mise en application de nos textes décrétaux »). 11Acculturation ? Si l'élève en immersion n'est pas handicapé dans l'apprentissage du français (lire en page 3), l'inspection s'interroge : « On ne connaît pas les conséquences que peut avoir l'immersion sur les enfants dans différents domaines : dans quelle langue l'enfant pensera-t-il ? Y gagnera-t-il en stratégie de compréhension ? Quelles seront les capacités d'exprimer l'abstraction, l'émotion ? » On relève en tout cas que « les ouvrages de référence dans la langue cible (un livre d'histoire en flamand, 22 par exemple, NDLR) véhiculent des contextes culturels différents du nôtre. N'y a-t-il pas risque d'acculturation ? » 12Secondaire. A noter que l'inspection s'est aussi intéressée au secondaire, où le label « immersion » recouvre des situations très diverses. Cela va de 2 à 8 heures/semaine de cours en immersion, selon les cas. Arena prépare un décret pour améliorer la pratique ENTRETIEN Marie Arena (PS) a pris connaissance du rapport de l'inspection sur l'immersion linguistique. La ministre de l'Education nous dévoile ses idées pour améliorer le système. Quelles leçons tirez-vous du rapport de l'inspection ? Que l'immersion relève de la bonne pédagogie - quand elle est bien pratiquée. Mais elle n'est pas généralisable. Faute de moyens ? Oui, d'abord. Selon le décret de 1998, en maternelle et au début du primaire, par exemple, il faudrait que 75 % des cours soient donnés dans la langue immersive. Cela veut dire que 75 % des enseignants, toujours selon le décret, devraient être des « native speakers ». Imagine-t-on, si on généralise l'immersion, que je vais pouvoir remplacer 75 % des enseignants de maternelle par des professeurs néerlandophones ou anglophones ? L'immersion est un système à promouvoir. Mais il a cette contrainte-là. L'autre contrainte, et l'inspection le signale, c'est le fait que l'immersion ne convient pas à tous. Des enfants ne se sentent pas bien dans ce système - par exemple parce qu'ils ont déjà des problèmes avec la langue maternelle. Vous dites que l'immersion est un système « à promouvoir ». Il y aurait donc trop peu d'écoles en immersion, selon vous ? On doit « davantage » d'immersion, en tenant évidemment compte des contraintes que je viens d'indiquer. Il faut surtout « mieux » d'immersion. Le système est actuellement réglé par le décret de 1998. Ce mardi, en commission du parlement, nous débattrons de l'immersion. Je m'y rendrai l'esprit ouvert. Mais il faut un nouveau décret. Celui de 1998 dit que, pour être reconnue comme étant en immersion, l'école doit proposer des cours en langue étrangère entre 25 % et 75 % du temps scolaire. Cette fourchette est trop large. L'école qui fait 25 % est mise sur le même pied que celle à 75 %. Et puis, ce 25 %, c'est trop peu. Un nouveau décret va resserrer la fourchette. Quand les parents choisiront une école en immersion, ils ne seront plus leurrés - c'est trop le cas aujourd'hui. Il faut cesser d'utiliser l'immersion comme moyen de propagande publicitaire. Si on choisit l'immersion, il faut que ce soit sérieux. Où fixer la barre ? Quelle part du temps scolaire doit être donnée en langue étrangère ? On va discuter. Si on me prouve qu'avec 30 %, on peut pratiquer une immersion valable, soit. A priori, je dirais qu'il ne faut pas descendre sous 50 % du temps scolaire. L'immersion, c'est dégressif comme le prévoit le décret de 1998. On commence haut, avec une grande part de cours dans la langue étrangère. Et puis, progressivement, l'enseignement en langue maternelle prend le dessus. On pourrait fixer la barre, au début, en maternelle, à 75 % des cours en langue étrangère. Et faire en sorte qu'en fin de primaire, on ne puisse être à moins de 50 %. Mais tout reste à discuter. Autre projet : actuellement, l'immersion est interdite dans le secondaire qualifiant (technique et professionnel). Elle n'est permise que dans le général. Aucun sens ! Le qualifiant forme par exemple du personnel d'hôtellerie. N'a-t-il pas besoin de langues ? Autre piste encore : aujourd'hui, une école primaire en immersion n'est visitée que par l'inspecteur du fondamental. Elle doit aussi être visitée par un inspecteur en langues modernes. 23 Un problème, c'est le recrutement du « native speaker ». La Communauté française discute- telle avec la Flandre pour tenter de faciliter l'échange de profs ? Un dialogue a été lancé avec mon homologue flamand. Mais ce n'est pas simple à mettre en pratique : je ne peux pas obliger un professeur francophone à aller faire de l'immersion en Flandre. Et l'inverse est vrai. Et un incitant salarial, ça ne faciliterait pas les choses ? Non ! Je suis opposée à l'idée de créer une discrimination salariale. Et puis, demain, quoi ? On va demander un incitant salarial pour travailler dans les écoles en discrimination positive ? Non ! Dans le décret, on cherchera à apporter aussi des souplesses sur le plan administratif - on a actuellement des problèmes en termes d'équivalence des diplômes. Enfin, nous chercherons à lever des freins à l'embauche du « native speaker » dans nos écoles. Selon le décret, il démontre une « connaissance fonctionnelle » du français. C'est un frein. On place la barre trop haut. Il faut être plus souple. Mais l'inspection signale que le « native speaker » qui ne maîtrise pas bien le français, pose des difficultés à l'école - il ne comprend pas toujours les consignes, le projet de l'école... C'est le travail de la direction ! Si une école fait la démarche de s'inscrire dans l'immersion, à elle de faire en sorte que le « native speaker » soit intégré dans l'école. Selon l'inspection, l'immersion est réservée à une certaine élite. Le rapport signale qu'il n'y a pas de sélection à l'entrée. Les écoles en immersion sont ouvertes, libres d'accès à tous. Ce qu'on voit, c'est que l'immersion fait l'objet d'un choix de parents plutôt aisés. Il y a donc un problème de mixité sociale. Mais le problème de la mixité sociale est général à l'enseignement - le Contrat pour l'école tente de répondre au problème. Pour l'immersion, l'attention devra être portée sur les remédiations. Il faut une remédiation forte. Sinon, quand un élève est en difficulté, on se borne à l'évacuer dans une filière normale. N'est pas école en immersion qui veut Inspirée du Canada (où le système est pratiqué depuis 1965), l'immersion linguistique est apparue en Communauté française en 1989, à l'école primaire liégeoise Léonie de Waha. Faisant peu à peu contagion, l'immersion a fait l'objet d'un décret en 1998, affiné en 2003. Le décret de 1998 établit les conditions permettant de se faire reconnaître comme école en immersion - étant dit qu'il faut l'autorisation du gouvernement de la Communauté française. Quelles sont ces conditions ? De la 3e maternelle à la 2e primaire, les cours en langue étrangère doivent couvrir entre 1/2 et 3/4 de l'horaire (on ne peut donc faire moins que 1/2 et on ne peut faire davantage que 3 /4). De la 3e à la 6e primaire, les cours dans la langue-cible doivent couvrir entre 1/4 à 2/3 de l'horaire. En secondaire, l'immersion peut porter sur un quart de l'horaire (8 heures de cours/semaine). Peuvent être donnés en langue étrangère tous les cours sauf les cours de religion/morale et éducation physique. Pour basculer en immersion, l'école doit avoir l'aval des parents consultés via le Conseil de participation de l'établissement. A Bruxelles, la langue-cible est obligatoirement le flamand. En Wallonie, on a le choix entre flamand, anglais et allemand. 24 Sauf exception, les cours en immersion doivent être donnés par un « native speaker », personne dont la langue-cible est la langue maternelle. Selon le décret de 1998, ce prof devait prouver devant jury une « connaissance suffisante » du français. Parce que l'examen (sa partie écrite surtout) éliminait trop de candidats, le décret a été corrigé en 2003. Il n'est plus demandé qu'une « connaissance fonctionnelle » du français et l'examen a été réduit à un oral. Comme on le lira ci-dessous, la ministre Marie Arena juge cette condition encore trop sélective. Notons que le décret de 2003 permet à un professeur francophone d'enseigner en langue- cible s'il est licencié en langues germaniques, traducteur/interprète. Ou s'il prouve une connaissance parfaite de la langue à enseigner. La langue maternelle ne paie pas l'addition On a longtemps pensé qu'immerger un enfant dans une langue étrangère pendant le temps scolaire pouvait affecter la maîtrise de la langue maternelle. Les écoles pratiquant l'immersion font valoir que cette inquiétude n'est pas fondée. Des chercheurs de l'ULB leur ont donné raison. L'inspection a voulu en avoir le coeur net. En octobre dernier, les inspecteurs ont testé 346 élèves d'écoles en immersion. Ces élèves étaient alors en 3eprimaire. Ils ont été soumis à des tests qui avaient été présentés, en juin de cette année, à des enfants de 2eprimaire d'écoles ne pratiquant pas l'immersion. Les tests portaient sur la lecture mentale, la lecture orale et la compréhension à la lecture. Dans ces trois domaines, les élèves de l'immersion obtiennent des résultats légèrement supérieurs aux autres (en lecture orale, par exemple, la moyenne de mots identifiés par les enfants de l'ordinaire était de 24 pour 25 chez les élèves en immersion). Les inspecteurs concluent : « Les résultats sont globalement (...) meilleurs dans les classes d'immersion que dans les classes ordinaires. » Ils émettent deux bémols, cependant. Le premier est dû à l'organisation du test. Les élèves de l'enseignement ordinaire ont été examinés en juin alors que les autres, testés au mois d'octobre suivant, ont bénéficié « d'apprentissages supplémentaires ». L'autre bémol est lié à ce que l'inspection a observé d'une façon générale (lire en page 2) : le public des écoles en immersion serait, selon elle, un public aisé. A l'addition, l'inspection se refuse à poser que l'immersion favorise la maîtrise du français. Ils se bornent à émettre que « l'apprentissage en immersion n'a pas d'influence négative sur les autres apprentissages, notamment sur la langue maternelle ». REPÈRES REPÈRES Le rapport de l'inspection a pour vertu d'offrir une photographie assez fine des écoles pratiquant l'immersion. Voici ce qui se dégage de l'enquête menée dans les 49 établissements du niveau fondamental (classes maternelles et primaires). Pour mesurer l'ampleur du système de l'immersion, rappelons que la Communauté française compte quelque 3.170 implantations maternelles et/ou primaires. Où ? Les écoles en immersion sont surtout situées dans le Hainaut (17). Suivent la province de Liège (12), Brabant wallon (8), Namur (5), Luxembourg (4) et Bruxelles (3). Pour le Hainaut, le rapport précise que les écoles en immersion sont principalement situées à l'ouest de la province - la région de Charleroi n'en compte qu'une, tout comme la région du Centre. 25 Réseau ? Sur les 49 écoles subventionnées visitées, 35 sont du réseau communal et 14 du libre. Cinq bénéficient de discriminations positives (écoles accueillant un public difficile, bénéficiant de moyens accrus). Population. En tout, 4.527 élèves du fondamental sont en immersion (1.063 en maternelle, 3.464 en primaire). On souligne que l'école offre généralement le choix entre l'immersion et des classes ordinaires. Quelle langue ? Le néerlandais est la langue majoritairement choisie par les écoles en immersion (39 cas), bien devant l'anglais (9) et l'allemand (1). Sur les neuf implantations ayant choisi l'anglais, quatre sont situées dans la province de Liège. Projet. Selon le rapport, 33 des écoles ont mis leur projet pédagogique d'immersion par écrit ; 14 implantations ne disposent pas d'un tel document. Tri ? Dans la plupart des cas, l'accès à l'école en immersion est libre. Dans sept implantations, un test préalable, à l'entrée, vérifie l'état de maîtrise de la langue maternelle. Mais le rapport signale que, même dans ces écoles, « l'avis des parents reste en définitive le seul élément pris en compte ». L’immersion linguistique ne nuit l’apprentissage de la langue française pas à SOUMOIS,FREDERIC Page 1 Jeudi 24 avril 2008 La controverse inquiète toujours certains parents : l’immersion linguistique dès les premières années du parcours scolaire est-elle susceptible de faire des dégâts dans la maîtrise de la langue maternelle ? Une chercheuse de l’ULB a mené un travail sur six années auprès de quatre groupes d’enfants en immersion ou en apprentissage monolingue, francophone ou néerlandophone. Les résultats sont rassurants, en tout cas lorsqu’un petit francophone suit des cours en néerlandais : les performances scolaires des enfants restent globalement dans la norme. C’est heureux car tout indique qu’il n’en va pas systématiquement de même dans d’autres cas de figure : l’innocuité de l’immersion n’est pas universelle. De l’anglais au français, par exemple, cela pose problème. P.19 l’étude de l’ulb Langues : l’immersion ne nuit pas aux enfants Pédagogie L’ULB a comparé 4 groupes d’enfants 26 Une étude menée sur six ans prouve qu’apprendre à lire en flamand n’empêche pas de bien maîtriser le français. L’immersion linguistique, c’est-à-dire proposer une partie de l’enseignement dans une langue différente de la langue première (ou maternelle) afin d’acquérir une maîtrise plus approfondie de cette langue seconde, a toujours fait débat sur le danger potentiel d’affecter la maîtrise de la langue première. Pour simplifier, certains suspectent cette méthode d’entraîner tout ou partie des enfants vers un bilinguisme imparfait, sans maîtrise d’aucune langue. Différentes études ont conclu en sens divers. C’est dire l’intérêt de l’étude menée, pendant six ans par Katia Lecocq, du labo « Cognition, langage et développement » de l’Université libre de Bruxelles. D’abord par la durée de l’observation, qui a évalué les résultats des enfants entre le début de l’apprentissage et à douze ans. Ensuite par les comparaisons, menées sur quatre groupes différents : deux d’enfants francophones scolarisés en immersion partielle précoce en néerlandais, dont l’un débutait l’apprentissage de l’écrit dans la langue maternelle et l’autre dans la langue seconde ainsi que deux groupes monolingues (francophones et néerlandophones). Temps de lecture plus élevés Conclusion majeure de la chercheuse ? On peut être rassuré : « Dès la troisième primaire, les enfants du groupe d’immersion ayant débuté la lecture en néerlandais lisaient en français aussi bien que les monolingues francophones et que l’autre groupe d’immersion, bien qu’ils présentassent des temps de lecture légèrement plus élevés. Leurs stratégies de lecture en français apparaissaient tout à fait similaires à celles des deux autres groupes francophones et on n’observait pas davantage de difficultés chez les enfants de ce groupe à lire les mots irréguliers du français. De plus, la comparaison des performances en 3e et en 6e primaire a mis en évidence qu’il présentait des performances relativement similaires en français et en néerlandais et comparables à celles de monolingues francophones et néerlandophones. » La complexité des tests employés par la chercheuse, distinguant par exemple l’apprentissage syntaxique de l’établissement progressif de l’assemblage entre graphèmes (écrits) et phonèmes (sons) permet toutefois de montrer que les enfants apprenant à lire d’abord en français ou en néerlandais ne vont emprunter ni les mêmes chemins ni les mêmes rythmes pour aboutir aux mêmes compétences. Le « zapping » des méthodes pourrait alors être déconseillé. Il montre aussi que cette « innocuité » de l’immersion, si elle est valable pour le français langue première et le néerlandais langue seconde, ne serait pas universelle, mais serait limitée aux cas où la langue seconde présente un système orthographique transparent. Du néerlandais vers le français ou de l’hébreu vers l’anglais. Mais pas de l’anglais vers le français, par exemple. Recommandation ? « Un programme d’immersion où le nombre d’heures dispensées en langue seconde est important en début d’apprentissage (75 % de la plage horaire), où l’apprentissage de l’écrit est dispensé de façon formelle dans les deux langues et débute dans la langue seconde ». Faut-il interdire l’usage d’autres langues à l’école ? « La punition, ce n’est pas ce qu’il y a de mieux » DE BOECK,PHILIPPE Page 13 Mercredi 5 décembre 2012 27 L’usage des langues, ça fonctionne comment dans votre établissement ? Durant le temps d’activités scolaires, c’est le français qui est d’usage. Avec un primo arrivant dont la langue maternelle n’est pas le français, cela passe parfois par un peu d’interprétariat pour qu’il évolue. Pour aider un enfant polonais qui arrive en droite ligne de Pologne, on demandera à un autre enfant polonais de traduire. Dans le maternel c’est légèrement différent puisque l’apprentissage est beaucoup plus implicite tandis qu’on est davantage dans l’explicite en primaire. Dans les relations avec les membres de l’équipe éducative, on parle le français. En général, ça se passe bien ? Tout à fait, l’avantage de cela c’est que ça sécurise. Entendons-nous bien, la meilleure manière pour qu’il progresse dans la langue française, c’est l’immersion la plus complète. Nous n’avons jamais vraiment eu le cas, mais il y a parfois des langues avec lesquelles cela doit être impossible. Chez nous, globalement, la majorité comprend le français. Ceux qui ne le comprennent pas viennent en général des pays de l’Est. L’étude flamande révèle que beaucoup d’enfants sont punis quand ils parlent une autre langue que le néerlandais… Pour les écoles néerlandophones de Bruxelles, par exemple, et il y en a une sur notre site, elles ne sont pas loin des deux tiers des élèves qui ne sont pas néerlandophones d’origine. Ce que je constate avec les primo arrivants chez nous doit être un peu plus difficile chez mes collègues néerlandophones ; parce que le bain linguistique est évidemment bien plus difficile… Quant à les punir s’ils parlent une autre langue dans la cour de récréation, c’est un peu dur. L’étude dit que punir n’est peut-être pas la bonne solution parce que c’est de nature à agrandir le fossé entre l’école et la maison… Tout à fait, je pense que si on veut progresser dans l’apprentissage, il faut un minimum de sécurité. Quand vous avez des enfants qui ne connaissent pas un mot de français ou de néerlandais, il faut qu’ils se sentent bien sinon ils n’apprendront rien. La récréation sert surtout à se libérer un petit peu entre les cours. Un accompagnement scolaire spécifique pour certains ? C’est une question de moyens, et puis il faut aussi veiller à ce que les autres puissent progresser. A Bruxelles, il y a des quartiers qui sont vraiment ghettoïsés ; ce qui ne fait pas progresser les enfants. Les familles elles-mêmes ne deviennent plus bilingues. Chez nous, à Jette, la plupart des familles sont bilingues. Ils parlent peut-être l’arabe ou le polonais à la maison, mais à l’école c’est le français et les parents parlent et comprennent également le français. Et les parents justement, leur implication est déterminante ? C’est plutôt au niveau culturel que cela se situe. Des parents qui ne parlent pas très bien le français utiliseront les moyens à disposition pour que leurs enfants progressent : aller chez le voisin, les laisser à l’étude pour faire leurs devoirs, etc. Hormis l’aspect linguistique, c’est plutôt le degré de scolarité et le niveau d’instruction des parents qui comptent. Chez nous, les tâches à domicile ne sont sanctionnantes. « Certains élèves ont besoin d’un soutien ciblé » Punir des élèves parce qu’ils ne parlent pas suffisamment la langue du pays (ou de la région dans ce cas-ci) dans lequel ils suivent les cours, est-ce justifiable ou non au niveau strictement pédagogique ? Non, nous ne pensons pas qu’une punition, telle que décrite dans le dossier paru dans le Standaard de ce mardi 4 décembre, soit justifiable. Le motif d’une sanction ne peut se baser sur l’unique utilisation, par les enfants et adolescents issus de l’immigration, d’une caractéristique qui leur est fondamentale, à savoir l’utilisation de leur langue maternelle, langue de leurs affects et dans laquelle ils ont baigné depuis leur tendre enfance. C’est-à-dire… Dans le cadre de cette étude, il conviendrait de se pencher sur la question même de la notion de punition afin de tenter de discerner le type de situation qui est à l’origine de la sanction qui est administrée. En effet, il est 28 important de garder à l’esprit le fait que la façon la plus fructueuse d’apprendre une langue étrangère est d’être confronté le plus souvent possible avec cette langue, la finalité communicative étant probablement l’élément le plus central dans l’apprentissage d’une langue étrangère. Si des adolescents utilisent entre eux leur langue maternelle afin d’éclaircir un élément d’une matière abordée en classe et qui n’a pas été correctement compris, cela nous semble tout à fait justifié et ne devrait pas être à l’origine d’une sanction. Si, au contraire, l’enseignant est amené à devoir intervenir de façon répétitive auprès d’adolescents bavardant intentionnellement et dérangeant de façon redondante le bon déroulement des cours, nous pensons qu’il serait alors nécessaire d’envisager prioritairement un dialogue interculturel constructif au sein de la classe afin de resituer le rôle de l’enseignant et de l’élève, ceci dans un souci de respect mutuel. Quelle est ou serait la bonne approche avec des primo-arrivants qui ne parlent pas le français dans le cas d’une école francophone ou le néerlandais si c’est dans un établissement scolaire situé en Flandre ? Sur le territoire de la Fédération Wallonie-Bruxelles, certaines écoles accueillent davantage d’élèves originaires de pays étrangers qui ne connaissent pas la langue française à leur arrivée. Ces élèves « primo-arrivants » ont besoin d’un soutien ciblé afin de leur assurer, comme aux autres élèves, des chances égales d’accès à l’éducation à des fins d’émancipation. Les élèves sont alors accueillis dans des classes-passerelles, actuellement intégrées dans le dispositif Daspa (Dispositif d’accueil et de scolarisation des élèves primo-arrivants), à tout moment de l’année durant une période variant d’une semaine à six mois, avec un maximum d’un an. Quel est l’objectif de ce dispositif ? La fréquentation de la classe-passerelle par les enfants primo-arrivants a un double objectif. Primo : placer les enfants en situation d’apprentissage intensif du français, langue d’enseignement sur le territoire de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Secundo : permettre à l’enfant primo-arrivant de se remettre à niveau dans les matières scolaires afin qu’il puisse intégrer une classe ordinaire. Le néerlandais dès la maternelle Enseignement Le rapport Braun sur l'apprentissage des langues soumis aujourd'hui au débat parlementaire Apprendre « en » néerlandais « Eveiller aux langues, en maternelle » LAMENSCH,MICHELLE Page 1;4 Mercredi 8 janvier 2003 Une étude le montre : en Communauté française, l'apprentissage des langues étrangères est inefficace. Le parlement francophone débat ce mercredi sur les solutions à trouver. Le néerlandais dès la maternelle MICHELLE LAMENSCH 29 Que de temps et d'argent consacré à l'apprentissage des langues avec, en fin de scolarité, des performances linguistiques jugées insuffisantes par nombre de parents et d'employeurs. Pourquoi nos jeunes sont-ils si peu bilingues, si rarement multilingues ? La question taraude les politiques francophones depuis des années. Dans ce pays où la communautarisation de l'enseignement a mené à une séparation physique des apprentissages et des apprentis poussée jusqu'à l'absurde, des chercheurs des deux Régions proposent des pistes éducatives convergentes. Dans un rapport qui sera débattu, ce mercredi, au parlement de la Communauté française, le professeur Alain Braun, de l'Université de Mons-Hainaut, constate la « faillite de l'enseignement traditionnel des langues, héritier de l'enseignement des langues mortes ». Cet universitaire suggère un éveil précoce au multilinguisme, dès la maternelle. C'est la piste privilégiée par le ministre Ecolo de l'Enseignement fondamental, Jean-Marc Nollet. Dès que l'enseignement des langues étrangères est devenu obligatoire (en 5e primaire en Wallonie, en 3e à Bruxelles), le professeur Braun recommande l'acquisition du néerlandais d'abord, de l'anglais ou d'une autre langue ensuite, par le biais de l'« immersion ». Au sein de l'école francophone, certaines matières (géographie, etc.) seraient enseignées en néerlandais. Une expérience qui a séduit 2 % des écoles en communauté française... Et qu'il s'agirait d'encourager par des renforts de formation et un assouplissement de la législation scolaire. Le professeur Braun accorde, en effet, la priorité à la langue maternelle. Il relève « les graves retards en langue maternelle des apprenants francophones plongés dans le système scolaire néerlandophone ». Le débat est ouvert...· Page 4 Non à la « submersion » dans une école flamande. Oui à l'acquisition du néerlandais via certaines matières. Nollet prône, lui, l'« éveil » dès la maternelle. Enseignement Le rapport Braun sur l'apprentissage des langues soumis aujourd'hui au débat parlementaire Apprendre « en » néerlandais MICHELLE LAMENSCH Les performances en langues étrangères en Communauté française sont assez éloignées de celles que l'on pourrait espérer pour des citoyens dans un Etat moderne, en ce début de XXIe siècle, dans la situation géolinguistique actuelle. L'investissement consenti pour y parvenir est pourtant énorme en temps et en argent, et nos professeurs de langues étrangères sont de qualité. Mais la recherche montre la faillite d'un enseignement traditionnel des langues mettant l'accent sur une méthode frontale et héritier de l'enseignement des langues mortes. Ces constats traversent le rapport d'Alain Braun, professeur de didactique des langues à l'université de Mons-Hainaut, établi à la demande de la présidente du parlement de la Communauté française, Françoise Schepmans (MR). Les députés sont invités à en débattre aujourd'hui. Se basant sur une série de contributions scientifiques, belges et étrangères, le professeur suggère aussi des solutions. Il prône l'immersion linguistique, consistant à enseigner certaines disciplines scolaires en langues étrangères. Mais l'éveil aux langues, estime-t-il aussi, doit se produire dès la maternelle, de manière à développer idéalement, très tôt, une compétence communicative dans une langue étrangère. C'est cette piste-là, axée sur le développement précoce d'une culture linguistique, que privilégie le ministre Ecolo de l'Enseignement fondamental, Jean-Marc Nollet (lire ci-dessous). Piste qu'il se dit prêt à mettre en oeuvre s'il reçoit le soutien du parlement. Le Livre blanc de la Commission européenne recommande la maîtrise de trois langues communautaires pour tout citoyen européen. Au sein de l'Union, l'allemand est la langue maternelle la plus parlée (24 %). Le français, comme l'anglais, est la langue maternelle de 16 % des Européens, et le néerlandais de 6 %. C'est l'anglais qui est la première langue étrangère pratiquée (32,6 %). Selon Alain Braun, l'apprentissage des langues développe l'intelligence et le plurilinguisme est l'issue la plus favorable pour le maintien de la diffusion du français. 30 Mais quelles langues étrangères choisir ? Laisser aux parents le libre choix paraît impossible au professeur montois qui suggère alors de retenir comme première langue étrangère la « langue du voisin ». En privilégiant toutefois le voisin néerlandophone par rapport à l'allemand. Comme deuxième langue étrangère, rendue obligatoire dès le début du secondaire, Alain Braun propose une langue internationale (anglais, espagnol, etc.). Et il lui paraît indiqué de permettre aux élèves l'accès à d'autres langues, comme le russe, l'italien, le portugais ou l'arabe, présentes dans notre pays. Le constat peut sembler banal : les jeunes enfants apprennent plus facilement que les adultes les langues étrangères. Selon le professeur Braun, l'éveil aux langues, dès la maternelle, éveillerait le sens des élèves pour la perception des langues étrangères. Il stimulerait leur motivation pour les apprendre quand leur enseignement devient obligatoire (3e primaire à Bruxelles, 5e en Wallonie). Pour ce qui est de l'enseignement obligatoire des langues étrangères, Braun privilégie l'acquisition à côté du simple apprentissage, privilégié dans notre système éducatif et qui ne consiste qu'à rendre l'apprenant capable d'émettre des messages oraux et écrits utilitaires. Pour favoriser cette acquisition, l'universitaire prône l'immersion et non la submersion. C'est-à-dire la dispensation de certaines matières (géographie, etc.) en néerlandais dans un système scolaire francophone - en maintenant donc l'apprentissage de la langue maternelle - plutôt que la fréquentation d'une école néerlandophone où tout l'environnement socioculturel serait, de surcroît, étranger à l'élève francophone. Braun rapporte, à cet égard, les graves retards en langue maternelle des apprenants francophones plongés dans le système scolaire néerlandophone. Mais il reconnaît que l'immersion est difficilement généralisable, tout au plus extensible, grâce à l'appui potentiel de formation des universités et au prix d'un assouplissement de la législation scolaire. En effet, les maîtres doivent être natifs de la langue cible ou capables d'une performance similaire, réussir un examen de français de très haut niveau et être en mesure d'occuper un emploi d'instituteur. A ce jour, 34 écoles primaires sur 1.800 ont choisi la voie de l'immersion linguistique...· «Eveiller aux langues, en maternelle» Tous bilingues en l'an 2000 ! Le slogan lancé en 1998 par la ministre de l'Education de l'époque, Laurette Onkelinx, est loin d'être réalisé. Cette année-là, un décret a généralisé l'apprentissage d'une deuxième langue à partir de la 5e primaire en Wallonie (3e à Bruxelles), en laissant le choix, en Wallonie, entre l'anglais et le néerlandais. Une situation de fait s'est installée et nous est imposée, estime l'actuel ministre Ecolo de l'Enseignement fondamental, Jean-Marc Nollet. Le choix entre le néerlandais et l'anglais est de 50/50. Cette possibilité de choix nous coûte cher en professeurs. Nous devons réagir. Je prône l'apprentissage de la langue du voisin plutôt que l'anglais mais, à cause du décret de 1998, on ne pourra pas aller vers une généralisation du néerlandais. Si le parlement me suit, poursuit le ministre, je proposerai que le néerlandais soit au moins obligatoire comme seconde langue étrangère. Bien qu'intéressante, l'immersion linguistique généralisée en néerlandais paraît aussi irréalisable à Nollet en raison de la pénurie d'instituteurs capables d'enseigner à la fois le néerlandais et d'autres matières. Chaque année, argumente-t-il, 30 % des temporaires que je désigne pour des cours de langue ne disposent pas du titre requis... Séduit par une expérience suisse, le ministre expose, dès lors, un autre projet : Avant 2010, je veux généraliser l'éveil aux langues, de la 3e maternelle à l'année où l'enseignement d'une première langue étrangère devient obligatoire (5e primaire en Wallonie, 3e à Bruxelles). Il ne s'agirait pas de proposer un apprentissage, poursuit Nollet, mais, pour ne pas partir de rien lorsque l'enseignement des langues devient obligatoire, de développer très tôt une attitude favorable au multilinguisme et une aptitude à apprendre les langues. Concrètement, reprend Nollet, on créerait une ouverture aux langues étrangères en exploitant les connaissances linguistiques de toutes les nationalités de la classe, par des jeux et la mémorisation de petits textes. Nollet estime, par ailleurs, indispensable de reconnaître comme certificatives d'autres langues que le néerlandais : l'arabe ou le turc, par exemple. Idiomes qui seraient laissés au libre choix des écoles. 31 Enfin, pour permettre aux migrants allophones d'améliorer leur connaissance du français, le ministre suggère de leur accorder les dérogations linguistiques déjà consenties aux enfants de diplomates et de représentants d'ONG.· M. L. L'immersion linguistique, un système démocratique Déjà 39 écoles ont entamé un programme d'immersion linguistique. Et elles seront dix de plus à la rentrée. Focus sur ce système d'enseignement particulier avec Alain Braun. PLEECK,CATHERINE Page 27-28 Mardi 24 août 2004 L'immersion linguistique, un système démocratique Déjà 39 écoles ont entamé un programme d'immersion linguistique. Et elles seront dix de plus à la rentrée. Focus sur ce système d'enseignement particulier avec Alain Braun. Chargé de cours en didactique des langues à l'Université de Mons-Hainaut, Alain Braun s'intéresse notamment à l'apprentissage des langues par immersion. Il a ainsi suivi, depuis leur naissance, les différentes expériences d'immersion linguistique dans notre pays. De quoi lui permettre de dresser le portrait de cette méthode d'apprentissage des langues étrangères. L'extra du Soir - Peut-on parler d'effet de mode quand on voit l'accroissement du nombre d'écoles qui décident d'organiser des cours en immersion linguistique ? Alain Braun - Je ne pense pas que ce soit un effet de mode. Il y a, depuis longtemps déjà, une préoccupation des parents pour que leur enfant soit le mieux doté en compétences linguistiques. Certaines personnes, habitant à la frontière linguistique ou en Région bruxelloise, ont notamment fait le choix d'inscrire leur enfant dans une école flamande, ce qui à mon sens n'est pas la meilleure des solutions. On se trouve dans un système, appelé la submersion, où existent très peu de préoccupations vis-à-vis de l'enseignement de la langue maternelle, ce qui peut être dommageable. L'intérêt de l'immersion est pour le moins une alternative beaucoup plus efficace et beaucoup moins périlleuse. - En quoi consiste exactement l'immersion linguistique ? - L'immersion n'est pas une méthodologie des langues, c'est un système d'enseignement. Ce dernier repose sur un principe assez simple : l'exemple selon lequel on a appris soi-même sa langue maternelle. Davantage par acquisition que par enseignement ou apprentissage. En fait, la plupart des 32 gens parlent leur langue maternelle avant même qu'ils ne l'apprennent à l'école. Le fait d'être immergé dans une langue si possible précocement - vers cinq ans, une fois que la langue maternelle est suffisamment installée -, permet d'entrer dans une deuxième langue de la même manière que l'on est entré dans la première, c'est-à-dire en ayant une connaissance beaucoup plus ancrée, plus intériorisée que dans des processus d'enseignement traditionnel. - La technique consiste, au départ, à baigner l'enfant le plus possible dans la seconde langue... - Entre les écoles, il y a pas mal de variances. Disons que le système que je préconise est de proposer à peu près 75 % des cours dans la langue 2 (NDLR : le néerlandais ou l'anglais, par exemple) durant les trois premières années, 50-50 les deux années suivantes, et enfin 25 % les deux dernières années. Cette solution permet de profiter de la précocité pour ancrer la deuxième langue chez l'enfant. - En immersion linguistique, on n'apprend pas le néerlandais, mais on apprend en néerlandais... - Le principe de l'immersion, c'est que la langue n'est pas objet d'enseignement. La langue est média d'enseignement. Dès le départ, cela donne à l'enfant une utilité à l'apprentissage de cette langue. Pour lui, la langue est d'évidence un objet de communication qui a des utilités scolaires, évidemment, mais aussi sociales. - Quels sont les autres avantages de l'immersion ? - De nombreuses recherches montrent que la compétence dans la langue 2 est bien supérieure à celle normalement attendue avec un système d'apprentissage ordinaire. Par ailleurs, il n'y a pas d'inconvénients par rapport à la langue maternelle, c'est-à-dire de perte de compétences. Mieux, nombreuses sont les recherches qui montrent que le fait d'apprendre précocement une deuxième langue a des effets positifs sur la maîtrise de sa langue maternelle. Le fait d'entrer dans deux systèmes linguistiques de manière précoce développe une compétence à la compréhension de ce qu'est un système linguistique et de la manière dont il fonctionne. À côté de cela, il y a d'autres avantages découverts en cours de route : une plasticité mentale beaucoup plus grande, une pensée divergente meilleure, c'est-à-dire une créativité bien plus développée, un comportement social beaucoup plus tolérant et ouvert, et même une influence positive au niveau du raisonnement logique. - Beaucoup de parents peuvent s'interroger si, finalement, au terme d'un cursus, l'enfant aura acquis le même socle de compétences qu'un élève qui a suivi un parcours traditionnel. - Cela fait partie du contrat. Il ne faut bien entendu pas faire la comparaison de ces types d'enseignement en début de cursus, car l'enfant en immersion semblera alors avoir des lacunes. Il ne faut pas s'attendre à voir les effets induits avant minimum trois ans, temps de maturation. Mais, à la fin du système, l'élève en immersion aura atteint le même niveau qu'un enfant dans un système ordinaire, avec, en plus, tous les avantages cités précédemment et une maîtrise fonctionnelle de la langue 2. Il n'y a donc pas d'inquiétude à avoir, à condition que l'immersion soit bien faite. - Justement, quelles sont les précautions à prendre par une école qui veut réussir l'immersion ? - D'abord, il faut que ce soit un vrai projet en soi. Que ce ne soit pas mis en place uniquement pour attirer des élèves. Ensuite, il faut recourir à des locuteurs natifs. Par ailleurs, il faut que ces gens soient formés au système immersif. Que les gens apprennent à travailler en équipe, c'est-à-dire que le professeur en langue 2 et le professeur en langue 1 prennent l'habitude de travailler à deux, de se partager des socles de compétence : savoir qui fait quoi, quand, comment, dans quelle langue... Il faut aussi, vu que l'on travaille dans un processus qui va de cinq ans à douze ans, que les instituteurs apprennent à travailler de manière longitudinale : que le professeur de maternelle travaille avec celui de première primaire... Il y a tout un travail de coordination et un travail en équipe à mettre en place. - Il est aussi recommandé que l'apprentissage soit centré dans un premier temps sur l'oral... - Aujourd'hui, tous les didacticiens sont plus ou moins d'accord pour dire que l'oral est premier. Qu'avant d'apprendre à lire ou à écrire une langue étrangère, il faut arriver à un seuil de maîtrise minimal à l'oral dans cette langue. 33 - Cela passe par des phases de silence, où l'enfant écoute l'instituteur. - Si on prend le modèle du bébé, un enfant de six à huit mois ne parle pas mais comprend déjà beaucoup de choses. À un moment donné, il produit lui-même du langage. C'est un peu le même processus qui peut se retrouver en immersion. Pourquoi ? Parce que, dans cette phase de silence, l'enfant émet des hypothèses sur le fonctionnement de cette langue, développe une grammaire implicite sur l'ordre des mots, sur le sens des mots, sur la manière de dire les choses dans cette langue... Une fois qu'il se sent prêt, mûr, il commence à émettre. - Quel rôle doivent jouer les parents lorsqu'ils mettent leur enfant en immersion linguistique ? - Surtout qu'ils ne s'occupent pas de la langue 2. Il va déjà tellement travailler cette langue à l'école qu'il ne faut pas non plus arriver à le dégoûter. En plus, il faut être certain que les parents soient compétents dans cette langue 2, ce qui n'est malheureusement pas toujours le cas. Là où ils ont vraiment un rôle à jouer, c'est en se centrant sur la langue maternelle. Ils peuvent leur raconter des histoires en français, être attentifs à la manière dont il s'exprime... On oublie trop souvent que la qualité de production orale est liée à la qualité de la production et de la réception écrite. Et puis, il faut pouvoir entretenir la motivation. On ne peut pas dire que les enfants qui vont en immersion fassent le choix de ce type d'apprentissage. Il faut donc soutenir cette décision par un appui à la motivation des enfants, par une valorisation de son effort... - Mais il faut reconnaître que l'immersion n'est pas une méthode qui convient à tous les enfants... - Effectivement. Par rapport à la phase de silence, il y a des enfants qui restent silencieux trop longtemps, ce qui veut dire qu'ils ne rentrent pas dans le système. Ces enfants-là, surtout, il ne faut pas insister. On dit que « le monolingue d'aujourd'hui sera l'analphabète de demain » ; j'ai un deuxième proverbe : « il vaut mieux être monolingue heureux que bilingue malheureux ». Il ne faut pas non plus que cela devienne une torture pour ces enfants. Si, à la fin de la troisième maternelle, l'enfant n'entre manifestement pas dans la dynamique, il n'est pas nécessaire d'insister et il vaut mieux alors le mettre dans une première primaire classique. - Même si l'immersion ne peut être appliquée à tous les enfants, elle représente pour vous la meilleure méthode d'apprentissage d'une langue ? - Je pense que ce serait un abus de langage que de dire cela. On peut avancer que c'est une méthode qui a de très bons effets sur les personnes ayant la possibilité matérielle et intellectuelle d'y entrer. Honnêtement, l'enseignement traditionnel donne aussi de très bons résultats, mais cela nécessite une motivation beaucoup plus grande de l'apprenant, cela nécessite aussi de revisiter les méthodologies actuellement utilisées, d'aller plus vers un enseignement de type communicationnel. - Et les séjours linguistiques ? - Les immersions courtes comme les séjours linguistiques sont fort utiles mais présentent un coût pour les parents. Tandis que l'immersion scolaire est aujourd'hui un système démocratique, quoi qu'en disent certains. On parle beaucoup d'élitisme quand on pense à immersion. Ce n'est pas le cas. Moins il y aura d'écoles en immersion, plus on risque de tendre à l'élitisme, puisque les premiers parents intéressés sont généralement les plus favorisés... Propos recueillis par CATHERINE PLEECK 34 9 Bibliographie Andersson, Boyer, & Southwest Educational Development Laboratory, 1970. Dirven, R. et al. (2003): Cognitive Models in Language and Thought. 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