07-Le_principe_d_egalite mis à jour

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07-Le_principe_d_egalite mis à jour
Fiche à jour au 18 janvier 2010
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Diplôme : Licence en droit, 3ème semestre
Matière : Droit administratif
Web-tuteur : Augustine MPESSA,
Mise à jour : , Elise UNTERMAIER, Aurélie WATTECAMPS
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I.
LE TRAITEMENT NON DISCRIMINATOIRE ................................. 3
A.
LA VALEUR DU PRINCIPE D’EGALITE ___________________________________ 3
Art. 1er de la DDHC ...................................................................................................... 3
B.
LES APPLICATIONS DU PRINCIPE D’EGALITE _____________________________ 4
C.E., 9 mars 1951, Société des concerts du conservatoire ........................................... 4
C.E., 25 juin 1948, Sté Journal l’Aurore, GAJA .......................................................... 5
II.
A.
LE TRAITEMENT DIFFERENCIE .................................................. 7
L’EXISTENCE DE DIFFERENCES DE SITUATIONS ENTRE LES ADMINISTRES ______ 7
C.E.,10 mai 1974, Denoyes et Chorques ...................................................................... 7
Date de création : année universitaire 2003/04
2
C.E., 13 décembre 2002, Mme Duvignères .................................................................. 8
B. LA DIFFERENCIATION DES TARIFS D’ACCES AUX SERVICES PUBLICS
LOCAUX ______________________________________________________________
9
C.E., 5 octobre 1984, Commissaire de la République de l'Ariège ............................... 9
C.E., 29 décembre 1997, (2 espèces), Commune de Gennevilliers / Commune
de Nanterre ................................................................................................................. 10
3
Trois principes « classiques » ou « lois de Rolland » gouvernent
l’organisation du service public : la continuité du service public,
l’adaptation du service public et l’égalité devant le service public.
Le principe d’égalité devant le service public ou « principe d’égalité qui
régit le fonctionnement des services publics » signifie que toutes les
personnes se trouvant dans une situation identique vis à vis du service
public doivent bénéficier du même traitement (I). Mais cette égalité est
relative : les personnes qui sont dans une situation différente peuvent être
traitées différemment sans qu’il y ait inégalité (II).
I.
Le traitement non discriminatoire
A. La valeur du principe d’égalité
Le principe d’égalité figure à l’article 1er de la Déclaration des droits de
l’homme et du citoyen. Il s’impose à toutes les autorités dans le cadre de
leurs services publics.
Art. 1er de la DDHC
« Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les
distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune. »
Le principe d’égalité devant le service public ou, selon la formule
jurisprudentielle, « le principe d’égalité qui régit le fonctionnement du
service public » a été consacré par le Conseil d’Etat comme un principe
général du droit s’imposant, par conséquent, à l’administration
indépendamment de toute disposition textuelle :
C.E., 9 mars 1951, Société des concerts du conservatoire
http://www.hostonet.be/users/lafirme/fiches/deug-2/gaja/con-con.htm
« Cons. qu’en frappant la société requérante d’une mesure d’exclusion à
raison des incidents sus relatés sans qu’aucun motif tiré de l’intérêt général
pût justifier cette décision, l’administration de la Radiodiffusion française a
usé de ses pouvoirs pour un autre but que celui en vue duquel ils lui sont
conférés et a méconnu le principe d’égalité qui régit le fonctionnement des
services publics et qui donnait à la société requérante, traitée jusqu’alors
comme les autres grandes sociétés philharmoniques, vocation à être appelées,
le cas échéant, à prêter son concours aux émissions de la radiodiffusion ; que
cette faute engage la responsabilité de l’ Etat ;[…] »
Le principe d’égalité est également un principe constitutionnel : en
effet, le Conseil Constitutionnel l’a consacré en tant que principe à
valeur constitutionnelle :
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Décision n° 79-107 DC, 12 juillet 1979
http://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/1979/79107dc.htm
« 2. Considérant que, selon les auteurs de la saisine, ce texte porte atteinte à
deux principes fondamentaux de notre droit constitutionnel qui sont la liberté
d'aller et venir et l’égalité des citoyens devant la loi et devant les charges
publiques ; […]
4. Considérant, d'autre part, que si le principe d’égalité devant la loi implique
qu'à situations semblables il soit fait application de solutions semblables, il
n'en résulte pas que des situations différentes ne puissent faire l'objet de
solutions différentes ; qu'en précisant dans son article 4 que l'acte
administratif instituant une redevance sur un ouvrage d'art reliant des voies
départementales peut prévoir des tarifs différents ou la gratuité, selon les
diverses catégories d'usagers, pour tenir compte soit d'une nécessité d'intérêt
général en rapport avec les conditions d'exploitation de l'ouvrage d'art, soit
de la situation particulière de certains usagers, et notamment de ceux qui ont
leur domicile ou leur lieu de travail dans le ou les départements concernés, la
loi dont il s'agit a déterminé des critères qui ne sont contraires ni au principe
de l’égalité devant la loi ni à son corollaire, celui de l'égalité devant les
charges publiques ; […] ».
Ce principe s’impose, donc, tant au pouvoir réglementaire qu’au
législateur.
B. Les applications du principe d’égalité
Concrètement le principe d’égalité se traduit par le droit des usagers à un
traitement et à un accès égaux au service public :
C.E., 9 mars 1951, Société des concerts du
conservatoire
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de la sanction infligée
par le Comité de direction de la société des concerts du Conservatoire,
conformément aux statuts de celle-ci, à deux membres de cette association
qui, au lieu d'assurer leur service dans son orchestre, ont, malgré la défense
qui leur en avait été faite, prêté leur concours à un concert organisé à la
radiodiffusion française le 15 janvier 1947, l'administration de la
radiodiffusion française a décidé de suspendre toute retransmission
radiophonique des concerts de la société requérante jusqu'à ce que le ministre
chargé des Beaux-Arts se soit prononcé sur la demande de sanction qu'elle
formulait contre le secrétaire général de ladite société ;
Cons. qu'en frappant la société requérante d'une mesure d'exclusion à raison
des incidents susrelatés sans qu'aucun motif tiré de l'intérêt général pût
justifier cette décision, l'administration de la radiodiffusion française a usé de
ses pouvoirs pour un autre but que celui en vue duquel ils lui sont conférés et
a méconnu le principe d'égalité qui régit le fonctionnement des services
publics et qui donnait à la société requérante, traitée jusqu'alors comme les
autres grandes sociétés philharmoniques, vocation à être appelée le cas
échéant, à prêter son concours aux émissions de la radiodiffusion ; que cette
faute engage la responsabilité de l'Etat ; que, compte tenu des éléments de
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préjudice dont la justification est apportée par la société requérante, il sera
fait une juste appréciation des circonstances de la cause en condamnant l'Etat
à payer à la société des concerts du Conservatoire une indemnité de 50.000
francs avec intérêts au taux légal à compter du 24 février 1947, date de la
réception dé sa demande de dommages-intérêts par le président du Conseil
des ministres ;... (Décision en ce sens ; dépens à la charge de l'Etat).
Il se traduit aussi par le droit des usagers à des tarifs identiques :
C.E., 25 juin 1948, Sté Journal l’Aurore, GAJA
Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'Industrie et du
Commerce :
Considérant que le ministre de l'Industrie et du Commerce, se fondant sur les
stipulations de l'avenant n° 5, en date du 7 juin 1939, à la convention conclue
le 5 septembre 1907 entre la ville de Paris et la compagnie parisienne de
distribution d'électricité à laquelle est substituée, par l'effet de la loi du 8
avril 1946, l'Electricité de France, soutient que ledit avenant entraîne pour la
société requérante les mêmes obligations que l'arrêté attaqué et qu'ainsi ladite
société est sans intérêt à se pourvoir contre cet arrêté ;
Considérant que, comme il sera indiqué ci-après, la disposition critiquée par
la requête fait par elle-même grief à la société "l'Aurore", qui est, par suite,
recevable à en demander l'annulation ;
Sur la légalité de l'article 4 de l'arrêté du 30 décembre 1947 :
Considérant qu'aux termes de cet article les majorations du prix de vente de
l'énergie électrique "sont applicables pour l'ensemble des départements
métropolitains à toutes les consommations qui doivent normalement figurer
dans le premier relevé postérieur à la date de publication du présent arrêté
c'est-à-dire au 1er janvier 1948" ;
Considérant qu'il est constant qu'en raison de l'intervalle de temps qui sépare
deux relevés successifs de compteur le premier relevé postérieur au 1er
janvier 1948 comprend, pour une part plus ou moins importante selon la date
à laquelle il intervient, des consommations antérieures au 1er janvier ; qu'en
décidant que ces consommations seront facturées au tarif majoré, l'arrêté
attaqué viole tant le principe en vertu duquel les règlements ne disposent que
pour l'avenir que la règle posée dans les articles 29 et suivants de
l'ordonnance du 30 juin 1945 d'après laquelle le public doit être avisé, avant
même qu'ils soient applicables, des prix de tous produits et services arrêtés
par l'autorité publique ; qu'en outre la disposition contestée a pour
conséquence de faire payer à des tarifs différents le courant consommé
dans les dernières semaines de l'année 1947 par les usagers, selon que
leurs compteurs sont relevés avant ou après le 1er janvier 1948. Qu'il
méconnaît ainsi le principe de l'égalité entre les usagers du service
public ; qu'il était loisible aux auteurs de l'arrêté attaqué de soustraire
celui-ci à toute critique d'illégalité en prenant toutes mesures
appropriées en vue de distinguer, fût-ce même forfaitairement, les
consommations respectivement afférentes à la période antérieure au 1er
janvier 1948 et à la période postérieure à cette date, et en ne faisant
application qu'à ces dernières du tarif majoré ;
Considérant, il est vrai, que, pour affirmer la légalité de l'arrêté attaqué, le
ministre de l'Industrie et du Commerce tire d'une part argument de la date à
laquelle la vente du courant à l'abonné serait réalisée et oppose d'autre part à
la société requérante les stipulations de l'avenant n° 5 à la convention
susmentionnée du 5 septembre 1907 ;
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Considérant, sur le premier point, que le ministre allègue en vain que la vente
du courant ne serait parfaite qu'à la date du relevé du compteur et qu'ainsi le
nouveau tarif ne s'appliquerait, aux termes mêmes de la disposition critiquée,
qu'à des ventes postérieures au 1er janvier 1948 ; qu'en effet il résulte
clairement des stipulations des contrats d'abonnement que la vente de
l'électricité résulte de la fourniture même du courant à l'usager, qu'elle est
parfaite à la date où cette fourniture est faite et que le relevé du compteur qui
intervient ultérieurement constitue une simple opération matérielle destinée à
constater la quantité de courant consommée ;
Considérant, sur le second point, qu'aux termes de l'avenant n° 5 "pour la
basse tension il sera fait application de l'index économique pour les
consommations relevées à partir du premier jour du mois suivant la date
d'homologation dudit index"; que le ministre soutient que la société
requérante, usagère à Paris de l'énergie électrique à basse tension, se trouvait
ainsi obligée, par le contrat d'abonnement même qu'elle a souscrit et qui se
réfère au contrat de concession, de supporter l'application du nouveau tarif
aux consommations relevées après le 1er janvier 1948, c'est-à-dire dans des
conditions semblables à celles qu'elle critique ;
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 1er de l'ordonnance du
30 juin 1945 que les prix de tous produits et services sont fixés par voie
d'autorité, notamment par des arrêtés ministériels, et qu'aux termes de
l'article 19 de ladite ordonnance " sauf autorisation expresse accordée par des
arrêtés pris en application de l'article 1er ... est suspendue, nonobstant toutes
stipulations contraires, l'application des clauses contractuelles qui prévoient
la détermination d'un prix au moyen de formules à variation automatique";
Considérant que l'arrêté attaqué a été pris dans le cadre de l'ordonnance du 30
juin 1945 qu'il vise expressément, et n'autorise pas le maintien des clauses
contractuelles qui prévoient la détermination du prix du courant électrique au
moyen de formules à variation automatique ; que ledit arrêté consacre ainsi
un régime autonome de fixation du prix du courant électrique, conforme aux
principes de la législation nouvelle et différent du système de révision
automatique et périodique qui résulte du contrat ; que d'ailleurs il détermine
lui-même les conditions dans lesquelles il doit recevoir application, suivant
des modalités différentes de celles prévues au contrat de concession ; que dès
lors, et sans qu'il y ait lieu pour le juge de l'excès de pouvoir de rechercher si
le système contractuel pouvait encourir le reproche de rétroactivité, le
ministre n'est pas fondé à opposer à la société requérante une clause
contractuelle avec laquelle le nouveau mode de fixation du prix du courant
est inconciliable ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société "l'Aurore" est
recevable et fondée à demander l'annulation de la disposition contestée ;
Décide :
Article 1er - L'article 4 de l'arrêté susvisé du 30 décembre 1947 est annulé en
tant qu'il fait application aux consommations antérieures au 1er janvier 1948
des majorations de tarifs prévues aux deux premiers articles dudit arrêté.
Article 2 - Les frais de timbre exposés par la société requérante, s'élevant à
120 frs, ainsi que les frais de timbre de la présente décision lui seront
remboursés par l'Electricité de France.
Article 3 - Expédition de la présente décision sera transmise au ministre de
l'Industrie et du Commerce et au ministre des Finances et des affaires
économiques [sous-secrétariat d'Etat des affaires économiques].
Par ailleurs le principe d’égalité permet aux usagers d’obtenir
l’annulation des mesures discriminatoires adoptées dans le cadre du
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service public. Tel est le cas de l’annulation du règlement sportif limitant
l’accès aux compétitions des joueurs naturalisés français (C.E., ass., 23
juin 1989, Bunoz) ou de l’annulation de la décision de la ville de Paris de
réserver une allocation d’aide sociale aux français, à l’exclusion des
étrangers, même en situation régulière (C.E., 30 juin 1989, Ville de
Paris).
Enfin le principe d’égalité a d’autres conséquences : il impose
notamment l’égalité d’accès aux emplois publics sans discrimination en
raison des opinions politiques des candidats (CE Ass., 28 mai 1954, Bare
et autresl), l’égalité de traitement des fonctionnaires membres du même
corps (CC, 15 juillet 1976, Statut général des fonctionnaires).
II. Le traitement différencié
Si le principe d’égalité devant le service public signifie que toutes les
personnes se trouvant dans une situation identique doivent bénéficier du
même traitement, il implique également le respect des « différences de
situation appréciables », c'est-à-dire que des « situations différentes
soient réglées de façon différente » (A). La question de la différenciation
des tarifs pour l’accès aux services publics locaux a donné lieu à une
importante jurisprudence (B).
A. L’existence de différences de situations entre les
administrés
Le principe du droit à la différence résulte d’un arrêt de 1974 :
C.E.,10 mai 1974, Denoyes et Chorques
Considérant que les requêtes susvisées du sieur Denoyez et du sieur
Chorques présentent à juger la même question ; qu'il y a lieu de les joindre
pour y être statué par une seule décision ;
Sur les conclusions des requêtes tendant à l'annulation des décisions du
préfet de la Charente-Maritime :
Cons. que les sieurs Denoyez et Chorques, tous deux propriétaires dans l'île
de Ré de résidences de vacances, ont demandé au préfet de la CharenteMaritime de prendre toutes dispositions pour que la régie départementale des
passages d'eau, qui exploite le service de bacs reliant La Pallice à
Sablanceaux (île de Ré), leur applique dorénavant non plus le tarif général
mais soit le tarif réduit réservé aux habitants de l'île de Ré, soit, à défaut, le
tarif consenti aux habitants de la Charente-Maritime ; que, par deux
décisions, respectivement en date des 3 juin et 27 octobre 1971, le préfet a
refusé de donner satisfaction à ces demandes ; que, par les jugements
attaqués, le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté les requêtes introduites
contre ces décisions par les sieurs Denoyez et Chorques ;
8
Cons. que le mérite des conclusions des requêtes est subordonné à la légalité
des trois tarifs distincts institués, sur la liaison entre La Pallice et l'île de Ré,
par le Conseil général de la Charente-Maritime et mis en vigueur par un
arrêté préfectoral du 22 mai 1970 ;
Cons. que la fixation de tarifs différents applicables, pour un même
service rendu, à diverses catégories d'usagers d'un service ou d'un
ouvrage public implique, à moins qu'elle ne soit la conséquence
nécessaire d'une loi, soit qu'il existe entre les usagers des différences de
situation appréciables, soit qu'une nécessité d'intérêt général en rapport
avec les conditions d'exploitation du service ou de l'ouvrage commande
cette mesure ;
Cons., d'une part, qu'il existe, entre les personnes résidant de manière
permanente à l'île de Ré et les habitants du continent dans son ensemble, une
différence de situation de nature à justifier les tarifs de passage réduits
applicables aux habitant de l'île ; qu'en revanche, les personnes qui possèdent
dans l'île de Ré une simple résidence d'agrément ne sauraient être regardées
comme remplissant les conditions justifiant que leur soit appliqué un régime
préférentiel ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à revendiquer
le bénéfice de ce régime ;
Cons. d'autre part, qu'il n'existe aucune nécessité d'intérêt général, ni aucune
différence de situation justifiant qu'un traitement particulier soit accordé aux
habitants de la Charente-Maritime autres que ceux de l'île de Ré ; que les
charges financières supportées par le département pour l'aménagement de
l'île et l'équipement du service des bacs ne sauraient, en tout état de cause,
donner une base légale à l'application aux habitants de la Charente-Maritime
d'un tarif de passage différent de celui applicable aux usagers qui résident
hors de ce département ; que, par suite, le Conseil Général ne pouvait pas
légalement édicter un tarif particulier pour les habitants de la CharenteMaritime utilisant le service de bacs pour se rendre à l'île de Ré ; que, par
voie de conséquence, les sieurs Denoyez et Chorques ne sauraient utilement
se prévaloir des dispositions illégales du tarif des passages pour en demander
le bénéfice ; qu'ils ne sont, dès lors pas, sur ce point, fondés à se plaindre
que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté
leurs requêtes ;
Sur les autres conclusions de la requête du sieur Denoyez :
Cons., d'une part, que les conclusions en indemnité et les conclusions tendant
au remboursement du trop-perçu que le sieur Denoyez impute à l'application
qui lui a été faite des tarifs en vigueur ne sauraient, en conséquence de ce qui
a été dit ci-dessus, être accueillies ;
Cons., d'autre part, que les conclusions tendant à l'annulation des tarifs
d'abonnement établis pour l'année 1972 ont été présentées pour la première
fois en appel ; qu'elles sont, par suite, irrecevables ;... (Rejet avec dépens).
La différence de traitement doit tout d’abord, répondre à une différence
de situation objective et rationnelle, être en rapport avec l’objet ou le but
du service, et enfin, la différence de situation doit être suffisamment
nette pour justifier une différence de traitement.
La différence de traitement doit, aussi, être proportionnée à la différence
de situation :
C.E., 13 décembre 2002, Mme Duvignères
http://www.conseil-etat.fr/ce/jurispd/index_ac_ld0251.shtml
« Considérant que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité
investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations
9
différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général,
pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit, dans l'un comme
l'autre cas, en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas
manifestement disproportionnée au regard des différences de situation
susceptibles de la justifier ; […]
Considérant, toutefois, que l'aide personnalisée au logement et l'allocation de
logement familiale, qui sont exclusives l'une de l'autre, poursuivent des
finalités sociales similaires ; qu'en outre, l'attribution à une famille de la
première ou de la seconde dépend essentiellement du régime de propriété du
logement occupé et de l'existence ou non d'une convention entre le bailleur et
l'Etat ; que, par suite, le décret contesté ne pouvait, sans créer une différence
de traitement manifestement disproportionnée par rapport aux différences de
situation séparant les demandeurs d'aide juridictionnelle suivant qu'ils sont
titulaires de l'une ou de l'autre de ces prestations, inclure l'intégralité de l'aide
personnalisée au logement dans les ressources à prendre en compte pour
apprécier leur droit à l'aide juridictionnelle ; qu'ainsi, le décret du 19
décembre 1991 méconnaît, sur ce point, le principe d'égalité ; que, dès lors,
Mme DUVIGNERES est fondée à demander l'annulation de la décision
contenue dans la lettre du 23 février 2001 par laquelle le garde des sceaux a
refusé de proposer l'abrogation partielle de ce décret ; […].»
B. La différenciation des tarifs d’accès aux
services publics locaux
En ce qui concerne la différenciation de tarifs pour l’accès aux services
publics locaux, le juge admet des différenciations tarifaires à raison de
l’origine communale ou non des usagers si pour aucun usager le tarif ne
dépasse le prix de revient du service. Ainsi en est-il du prix de revient
des repas d’une cantine scolaire :
C.E., 5 octobre 1984, Commissaire de la République
de l'Ariège
Requête du préfet, commissaire de la République du département de l'Ariège
tendant à :
1° l'annulation du jugement du 17 novembre 1982 du tribunal administratif
de Toulouse rejetant sa demande dirigée contre les délibérations des 20 et 28
juillet 1982 en tant que le conseil municipal a fixé à 20 F le prix du repas à la
cantine scolaire pour les enfants des écoles primaires et maternelles
domiciliés hors de la commune ;
2° l'annulation de ces décisions en tant qu'elles ont modifié le prix des repas
par le moyen qu'elles portent une atteinte injustifiée au principe de l'égalité
des usagers devant le service public ;
Vu le code des tribunaux administratifs ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le
décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant que le commissaire de la République du département de l'Ariège
a déféré au tribunal administratif de Toulouse une délibération du conseil
municipal de la commune de Lavelanet en date du 20 juillet 1982, confirmée
le 28 juillet suivant, en tant qu'elle porte à vingt francs le prix du repas à la
cantine scolaire pour les élèves domiciliés hors de la commune alors qu'un
tarif réduit de huit francs est maintenu pour les élèves de la commune ;
10
Cons. que la création d'une cantine scolaire présente pour la commune de
Lavelanet un caractère facultatif et qu'elle n'est pas au nombre des
obligations incombant à cette commune pour le fonctionnement du service
public de l'enseignement ; qu'il n'est pas contesté que le plus élevé des
deux prix fixés par le conseil municipal n'excède pas le prix de revient
du repas ; que le conseil a pu sans commettre d'illégalité, et notamment
sans méconnaître au profit des élèves domiciliés dans la commune le
principe d'égalité devant les charges publiques, réserver à ces élèves
l'application d'un tarif réduit grâce à la prise en charge partielle du prix
du repas par le budget communal ; que le commissaire de la République
n'est par suite pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal
administratif a rejeté sa requête...( rejet).
Le juge admet également que la différenciation de tarifs pour l’accès aux
services publics locaux soit justifiée par le niveau de ressources et des
charges familiales de l’usager. Tel est le cas pour l’inscription à un
conservatoire de musique municipal :
C.E., 29 décembre 1997, (2 espèces), Commune de
Gennevilliers / Commune de Nanterre
« Considérant […] qu’eu égard à l’intérêt général qui s’attache à ce que le
conservatoire de musique puisse être fréquenté par les élèves qui le
souhaitent, sans distinction selon leurs possibilités financières, le conseil
municipal […] a pu, sans méconnaître le principe d’égalité entre les usagers
du service public, fixer des droits d’inscriptions différents selon les
ressources des familles, dès lors notamment que les droits les plus élevés
restent inférieurs au coût par élève du fonctionnement de l’école […] »
En revanche, l’établissement d’une différence de droits d’inscription
entre les « anciens » et les « nouveaux » élèves d’une école de musique
est jugée discriminatoire et contraire au principe d’égalité (CE, 2
décembre 1987, Commune de Romainville).