chapitre viii les actes unilateraux des organisations internationales

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chapitre viii les actes unilateraux des organisations internationales
Extrait de l'ouvrage :
Droit international - 11ème édition
de Dominique Carreau et Fabrizio Marrella
EAN : 978-2-233-00633-2
éditions A.Pedone 2012
CHAPITRE VIII
LES ACTES UNILATERAUX
DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES
Bibliographie sommaire : (J. CASTANEDA, « Valeur juridique des résolutions des
Nations unies », R.C.A.D.I., 1970-I, t.129, p.205 ; G. ARANGIO-RUIZ, « The
Normative role of the General Assembly of the United Nations and the Declaration
of Principles of Friendly Relations », R.C.A.D.I. 1972-III, t.137, p.419 ; R. J. DUPUY,
« Droit déclaratoire et droit programmatoire » de la coutume sauvage à la « soft
law », in L’élaboration du droit international public, Paris, Pedone, 1975, 132 ;
M. MERLE, « Le pouvoir réglementaire des institutions internationales », A.F.D.I.
1958.341 ; H. THIERRY, « Les résolutions des organes internationaux dans la
jurisprudence de la C.I.J. », R.C.A.D.I. 1980, vol. 167, p. 385 ; M. VIRALLY,
« La valeur juridique des recommandations des organisations internationales », A.F.D.I.
1956.66 et « L’élaboration du droit international économique », in Aspects du droit
international économique, Paris, Pedone, 1972.171, ainsi que Résolution et accord
international, Mélanges M. Lachs, 1984, p.299. V. aussi : MCWHINNEY, Les N.U. et la
formation du droit international, Paris, Pedone/U.N.E.S.C.O., 1986, ainsi que le
rapport de Skubiszewski à l’I.D.I, session du Caire 1987, Annuaire, 1985, v.61, t.I,
p. 29. J. ALVAREZ, International Organizations as Law Makers, Oxford, OUP, 2005.)
INTRODUCTION
i. – Place des actes unilatéraux
parmi les actes des organisations internationales
1. — Les actes unilatéraux ne sont pas, à l’évidence, les seuls actes passés par des
organisations internationales. On rappellera, pour mémoire, que les organisations
internationales ont compétence pour passer des traités entre elles et avec les autres
personnes morales de droit public international que sont les Etats ou les
« établissements publics » internationaux. On rappellera également que les
organisations internationales peuvent passer des accords avec les personnes privées
(voir supra, Chapitre V).
ii. – Des actes nombreux et diversifiés
2. — Les actes unilatéraux des organisations internationales présentent une très
grande variété.
Il est loisible de distinguer des actes judiciaires (ainsi des jugements ou avis
consultatifs de la Cour internationale de Justice ou des jugements des tribunaux
administratifs internationaux) ; des actes d’administration interne (comme, par
exemple, l’adoption de règles de procédure ou de règles budgétaires, ou encore la
nomination d’un fonctionnaire) ; des actes ayant trait au fonctionnement de
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LES NORMES ECRITES NON CONVENTIONNELLES
l’organisation elle-même (comme, par exemple, l’admission ou l’expulsion d’un
Etat, l’application de sanctions contre un pays, ou, au contraire, l’octroi d’une aide en
sa faveur – prêt, don ou assistance technique –). Enfin, il existe des actes relatifs aux
activités externes de ces organisations internationales : par exemple, les organisations
internationales peuvent prendre des « règlements » ou décisions portant sur les
domaines entrant dans leur compétence : ainsi, des règlements sanitaires ou aériens
internationaux ont été adoptés par des institutions telles que l’O.M.S. ou l’O.A.C.I. ;
également lorsque ces organisations sont en rapport avec des personnes privées qui
doivent effectuer des « travaux publics » internationaux, elles peuvent, comme la
Banque mondiale, émettre une réglementation commune pour la passation des
marchés sous la forme par exemple de cahiers de charges types.
iii. – Des formes très diverses : une terminologie imprécise
3. — Les actes unilatéraux de ces organisations internationales revêtent des formes
extrêmement diverses. Ces actes unilatéraux prennent la forme soit de résolutions ou
de recommandations soit de décisions. En théorie, les premières ne possèdent pas
(ou ne devraient pas posséder) de valeur obligatoire contrairement aux secondes.
La réalité se révèle beaucoup plus complexe de par son imprécision. C’est ainsi que
sous le vocable générique de « résolution », il est loisible de distinguer des actes qui ne
constituent que de simples « exhortations » (on les qualifiera alors de
« recommandations ») et ceux qui apparaissent comme de véritables « décisions ».
D’où la nécessité de percer le voile de ces résolutions afin de déterminer au cas par cas
si l’on est en présence d’un simple vœu pieux ou, au contraire, d’un acte unilatéral à
portée obligatoire. Sans doute une bonne et claire terminologie exigerait-elle de
réserver le caractère obligatoire de la règle à celles posées par des « décisions »,
« directives » ou autres « règlements » tandis que les résolutions ou recommandations
relèveraient de l’invitation ou de l’optionnel. Or seul le droit européen (calqué ici sur
l’ordre interne) suit ici une telle approche logique ; en droit international commun,
l’imprécision demeure la règle de sorte que, une fois encore, c’est une analyse au cas
par cas de type « phénoménologique » qui devra être entreprise afin de déterminer la
portée juridique exacte d’un acte unilatéral d’une organisation internationale.
4. — On citera comme exemple de cette terminologie imprécise l’avis consultatif de la
Cour internationale de Justice de 1971 sur la Namibie : « Il serait inexact, dit la Cour,
de supposer que, parce qu’elle possède, en principe, le pouvoir de faire des
recommandations, l’Assemblée générale (des Nations unies) est empêchée d’adopter,
dans des cas déterminés relevant de sa compétence, des résolutions ayant le caractère
de décision ou procédant d’une intention d’exécution » (Rec., p. 50). Il faut
remarquer – et cela est regrettable – que la Cour elle-même reconnaît cette imprécision
terminologique et y contribue puisqu’elle parle à la fois de recommandations dont elle
semble penser qu’elles ne produisent pas d’effets de droit et de résolutions « ayant le
caractère de décision procédant d’une intention d’exécution » qui se rapprocheraient
alors des décisions et produiraient un effet de droit à l’égard de leurs destinataires.
Une telle confusion terminologique se doit d’être évitée.
En bref et en principe, à l’inverse des décisions, les résolutions ou recommandations
ne lient pas, ne produisent pas d’effets de droit obligatoires à l’encontre de ceux
auxquels elles sont destinées.
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CHAP. VIII. LES ACTES UNILATERAUX DES O.I.
iv. – Leurs points communs
5. — Au-delà de cette diversité, ces actes unilatéraux des organisations
internationales présentent un certain nombre de points communs notables.
Tout d’abord, en ce qui concerne les conditions de forme, tous ces actes unilatéraux
font l’objet d’une certaine publicité, et même d’une publicité certaine. Ces actes sont
publiés dans des recueils ou dans les revues spécialisées des organisations
internationales concernées. Ainsi, dans le cadre des Communautés Européennes
(maintenant de l’Union Européenne), il y a publication systématique de tous les
actes des Communautés dans le Journal Officiel des Communautés Européennes
(maintenant de l’Union Européenne). Certes, toutes les organisations ne procèdent
pas à des publications de manière aussi systématique ; mais elles ont toutes des
moyens suffisants pour faire connaître les actes qu’elles adoptent.
En ce qui concerne les conditions de fond, il faut remarquer que tous ces actes
constituent le moyen juridique privilégié permettant à ces organisations
internationales de remplir leurs buts et missions. Toutes les organisations
internationales (à l’exception notable de l’O.M.C.) ont ainsi le pouvoir d’adopter des
actes unilatéraux, mais, bien entendu dans les seules limites de leurs compétences :
de tels actes unilatéraux doivent respecter les termes de la charte constitutive de
l’organisation en cause. En bref, ils doivent être adoptés dans un but légitime par les
organes compétents statuant aux majorités requises et ils produiront des effets en
vertu des dispositions de la charte constitutive de l’institution concernée.
v. – Position des Etats quant à leur force obligatoire
6. — La stratégie des Etats en ce qui concerne la valeur juridique des actes des
organisations internationales se révèle bien souvent antinomique (voir en général,
G. de Lacharrière, La politique juridique extérieure, op. cit., pp. 48.58). Les Etats
minoritaires tendent à avoir une vision très restrictive quant à la portée obligatoire
de tels actes ; telle est en général la position des pays développés au sein des
institutions universelles qu’ils ne contrôlent pas. En revanche, les Etats majoritaires
adoptent la position inverse dans la mesure où, grâce à leur nombre, ils sont en
mesure d’imposer la formulation de telles normes ainsi que leur interprétation –
à défaut de leur application ; telle est, en général l’optique des pays en
développement qui dominent certaines institutions universelles – à commencer par
l’O.N.U. – en raison du simple poids dû à leur nombre.
7. Plan — Ces remarques générales étant présentées, l’élément important du régime
juridique des actes unilatéraux des organisations internationales consiste dans les
effets qu’ils peuvent produire. Ces actes peuvent constituer parfois – mais c’est
l’exception – une source directe du droit international (Section I). Toutefois – et cela
est le plus fréquent –, les actes unilatéraux des organisations internationales ne
constituent encore qu’une source indirecte du droit international (Section II).
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