30/04/2012 Réponses de François BAYROU au SNN

Transcription

30/04/2012 Réponses de François BAYROU au SNN
Syndicat National des Notaires
Réponses de François Bayrou
13 avril 2012
En préambule aux réponses à vos questions, je souhaite, comme je l’ai fait à l’endroit du
Conseil Supérieur du Notariat qui m’a aussi interrogé, que sur les principes, je fais miens
ceux posés par le Conseiller Réal dans le discours prononcé devant le corps législatif
lors des débats sur la loi de Ventôse. Nos contemporains ont tout autant besoin qu’il y a deux
siècles de « conseils désintéressés », de « rédacteurs impartiaux », de « juges volontaires »,
de « tempéraments sûrs et judicieux pour concilier également les intérêts de chacun » !
Je suis de ceux qui croient à la valeur universelle de la foi publique, de l’authenticité, de l’Etat
régulateur qui nomme des Officiers, placés sous son contrôle, à qui il confère ses prérogatives
de puissance publique, auxquels il impose les exigences du service public, comme la lutte
contre la criminalité et le blanchiment. Au regard de ces deux dernières exigences, je ne crois
franchement pas que le sceau de France puisse être distribué entre toutes les mains.
1/ Selon vous, l'activité d'authentification par les notaires comporte-t-elle une
participation directe et spécifique à l'exercice de l'autorité publique ?
Comme vous le savez la définition de l’exercice de l'autorité publique diverge selon
qu'elle émane des Etats membres ou de la CJUE. Cette dernière estime que le dépositaire doit
trancher un conflit pour relever des dispositions de l'article 45 du traité UE. La France en a
pris acte. Mais cela n’interdit en rien à notre pays de décider à qui il confère l’autorité
publique dont il est seul détenteur. Il est parfaitement dans son droit en instituant
des notaires à qui il confère l’autorité publique dans le cadre des missions définies ci-dessus.
A ce titre leurs actes, quand ils contiennent une obligation, bénéficient de la force
exécutoire au non de la République française et au nom du Peuple français, selon l’expression
consacrée.
2/ Afin de maintenir le maillage territorial des notaires, élément essentiel de l'accès au
droit seriez-vous favorable à l'instauration d'un système organisant la solidarité entre
les offices ?
La solidarité entre les offices est consubstantielle au Notariat puisqu’il est un service public.
Les modalités de cette solidarité doivent être définies au sein de la profession et, à défaut
d’accord, le pouvoir réglementaire y pourvoira. S’agissant du maillage territorial, il est un
élément constitutif du service public et doit donc être garanti dans la durée tout en tenant
compte de la nécessité d’équilibre économique propre à chaque office.
3/ Le notariat, en raison de son statut, a permis d'éviter à la France certains errements
du système financier par son rôle de régulation dans la mondialisation. La deuxième loi
de finances rectificative pour 2011, prévoit, dans un but de transparence, que lorsque les
cessions sont réalisées à l'étranger, elles doivent être constatées dans le délai de 1 mois
par un acte reçu en la forme authentique par un notaire exerçant en France. Pour ces
raisons, et pour d'autres, jugez vous utile, voire nécessaire d'élargir le champ de
l'authenticité ?
Les gouvernements successifs ont souvent utilement déjà élargi le champ de l'authenticité.
Ce mouvement devrait se poursuivre dans la mesure où l'endettement de l'Etat l'oblige à
rechercher des solutions innovantes pour
répondre
aux
besoins sans
cesse
croissants du service public juridique des citoyens. Or le notaire est un Officier public qu'il
nomme et contrôle et qui ne pèse pas sur les charges de l'Etat.
De nouvelles missions pourraient donc lui être confiées dans l’intérêt général. Un échange de
point de vue entre le Notariat et l’Etat sera organisé pour en examiner le champ.
4/ Le droit est de plus en plus souvent d'origine communautaire. Souhaitez-vous plus ou
moins d'Europe ?
Ce n’est pas parce que le droit communautaire est, comme le droit français, trop bavard,
inconstant, qu’il faut moins d’Europe. Il faut au contraire plus d'Europe pour voir émerger
une délégation d'autorité publique à l'échelle européenne. C'est de cela dont le notariat a
besoin pour assurer sur tout le territoire de l'Union européenne le service public de la
preuve. Il demeure qu’une attention renforcée doit être portée pour que le principe de
subsidiarité soit respecté et éviter que le droit communautaire envahisse, par le menu détail, la
vie des citoyens européens qui doivent au surplus subir un droit national souvent dégradé.
5/ Les règles juridiques et fiscales relatives au PACS doivent-elles se rapprocher plus
encore de celles relatives au mariage ? Êtes-vous favorable au mariage homosexuel ?
Vos deux questions sont de nature différente : s’agissant du PACS, il semble inutile
de le rapprocher davantage du mariage sauf à vouloir confondre les deux statuts ce qui n’est
pas mon idée.
Je suis pour l’égalité des droits, je suis pour la reconnaissance de cette déclaration par le
maire, à l’Etat civil, par une dissolution, par un divorce. Je ne suis pas pour le terme mariage
mais pour le terme union. Car je pense qu’il y a aussi d’autres dizaines de millions de
français qui considèrent que le mariage vient de loin dans leur culture et leur sensibilité qui
existent et qu’un mariage c’est entre les hommes et les femmes. En revanche, il y doit y avoir
une égalité des droits.
6/ Entendez vous mettre en place un véritable statut juridique du beau-parent ? vous
paraît-il juste, au plan fiscal, de favoriser la transmission du beau parent à ses beauxenfants ?
Je crois savoir que le notariat a déjà réfléchi sur ces questions et qu’il a fait des propositions
en ce sens. Il faut à l’évidence trouver un équilibre pour respecter la réserve à laquelle les
Français restent attachés, et savoir aussi évoluer en fonction de la réalité sociale. Un enfant
qui se consacre plus que ses frères et sœurs à ses parents âgés doit pouvoir recueillir une juste
récompense. Ce qui est vrai également pour un beau père ou une belle mère qui aura élevé
l'enfant de son conjoint dès le plus jeune âge. A dire vrai, je pense que le législateur sera
d’autant mieux inspiré sur ces sujets que les praticiens comme vous, connaissant si
profondément la vie des familles, auront ouvert des pistes sages susceptibles d’aboutir
à des solutions raisonnables.
7/ L'assistance apportée par des enfants à un ascendant justifie-t-elle une atteinte
partielle à la réforme successorale justifiant, par exemple, une quotité disponible
spéciale élargie ?
Cette question appelle la même réponse que celle précédente.
8/ Le don d'organe, malgré la présomption légale de consentement, souffre d'une
insuffisance à raison de la réserve des familles interrogées sur l'expression d'un refus.
Pour résoudre cette difficulté, ne serait-il pas opportun de créer un fichier d'opposition
à la possible censure familiale ?
Le don d'organe, malgré la présomption légale de consentement, souffre d'une insuffisance à
raison de la réserve des familles interrogées sur l'expression d'un refus. Pour résoudre cette
difficulté, ne serait-il pas opportun de créer un fichier d'opposition à la possible censure
familiale ? Si les notaires étaient intéressés par une initiative de ce type, je l’examinerais avec
la plus grande attention.