Les banques centrales peuvent réaliser de gros profits grâce à leurs

Transcription

Les banques centrales peuvent réaliser de gros profits grâce à leurs
Dossier
Septembre
2013
Les banques centrales peuvent
réaliser de gros profits grâce à
leurs plans de sauvetage risqués
Combien coûtent réellement les plans de sauvetage
aux pays créditeurs ? Cette question est particulièrement d’actualité à la lumière du récent examen par
la Cour constitutionnelle allemande de la légalité du
programme d’opérations monétaires sur titres de la
Banque Centrale Européenne, allié à la possibilité que
la Grèce ait besoin d’une nouvelle aide financière.
Andreas E. F.
Utermann
CIO Monde d’Allianz
Global Investors
1
S ource : Sandal, K.
(2004), The Norwegian Banking Crisis,
Ch. 3 et calculs
internes (sur la base
du PIB de 1991)
2
S ource : United States
Department of the
Treasury, Troubled
Asset Relief Program
(TARP), rapport
mensuel au Congrès,
mai 2013
Les crises bancaires impliquent généralement des
transferts de risque du secteur privé vers le secteur
public, une crise de dette souveraine requiert également que des organismes supranationaux tels que le
Fonds monétaire international, ou la Banque Centrale
Européenne (BCE) dans le cas de la crise européenne
de la dette, assument une partie de ces risques. L’attention cependant a tendance à se concentrer sur le
total du montant considéré (le montant à risque) bien
plus que sur le coût net probable, voire ultime, pour
les pourvoyeurs du soutien financier.
Il est toutefois intéressant d’examiner ces coûts nets
en termes budgétaires parmi les pays de l’OCDE et,
ce faisant, d’établir une distinction entre d’une part
les interventions gouvernementales sous forme de
garanties, de prises de participations ou de nationalisations, et d’autre part les activités (telles qu’injections de liquidités, prêts ou rachats d’actifs) qui
constituent une partie du rôle d’une banque centrale
en tant que prêteur en dernier ressort.
Les éléments d’appréciation en ce qui concerne les
garanties et les prises de participations gouvernementales sont quelque peu mitigés, sachant toutefois que les coûts s’avèrent généralement inférieurs
aux prévisions initiales :
Finlande, Suède et Norvège
La crise bancaire nordique, qui a affecté la Finlande,
la Suède et la Norvège au début des années 1990, a
conduit les gouvernements concernés à accorder des
garanties à l’ensemble des déposants et à nationaliser
plusieurs établissements financiers. Le coût net dans
le cas de la Finlande, calculé en 1996 alors que la crise
était jugée terminée, s’est établi à environ 7 ou 8% de
son produit intérieur brut (PIB), contre un coût budgétaire brut estimé à 13%. S’agissant de la Suède et de
la Norvège, qui conservent à ce jour des participations
importantes dans Nordea et Den norkse Bank respectivement, le coût budgétaire net s’est révélé quasiment nul, un résultat là encore meilleur qu’escompté
au regard de la dépense initiale1.
Etats-Unis
Dans le cadre de son programme TARP (Troubled Asset
Relief Program) introduit dans le sillage de la crise financière internationale, le département du Trésor américain
a procédé à diverses prises de participations. A l’actif
du bilan, ses participations dans American International
Group (AIG) ont débouché sur une plus-value de 5 milliards USD2 et celles dans Citigroup et Bank of America
lui ont permis d’engranger 4,5 milliards USD supplémentaires3. Les actions en justice à l’encontre du Trésor américain intentées par les actionnaires laissent penser que
ce dernier a sans doute raflé la mise avec la mise sous
tutelle de Fannie Mae et Freddie Mac, alors qu’il semble
en revanche peu probable que ses investissements dans
l’automobile lui permettent de dégager des bénéfices4.
S ource : United States Department of the Treasury, Troubled Asset
Relief Program (TARP), rapport mensuel au Congrès, mai 2013
4
Source : United States Department of the Treasury, Troubled Asset
Relief Program (TARP), rapport mensuel au Congrès, mai 2013
3
Comprendre. Agir.
Les banques centrales peuvent réaliser de gros profits grâce à leurs plans de sauvetage risqués
Royaume-Uni
Banque d’Angleterre
L’investissement du gouvernement britannique
dans Lloyds Banking Group (LBG) est désormais
très proche d’atteindre le seuil de rentabilité, mais
sa participation dans Royal Bank of Scotland (RBS)
continue d’accuser une perte latente. Notons
toutefois que le gouvernement a engrangé 5
milliards GBP grâce à la participation de RBS au
programme APS (Asset Protection Scheme) et à la
sortie de LBG de ce même dispositif.5
Le dispositif SLS (Special Liquidity Scheme) de la
Banque d’Angleterre, qui permettait aux établissements financiers d’échanger leurs actifs non liquides
contre des emprunts d’Etat britanniques pour une
période de trois ans au maximum, a généré un profit
de 2,3 milliards GBP lors de sa clôture en janvier
20129. De même, son dispositif APF (Asset Purchase
Facility), introduit en janvier 2009 afin d’acheter des
actifs du secteur privé et qui constitue aujourd’hui le
pilier du programme d’assouplissement quantitatif
de la Banque, a accumulé à ce jour plus de 31 milliards GBP, montant désormais distribué au Trésor
britannique à intervalles réguliers. Il est probable
que ces flux de paiements s’inverseront à terme,
mais d’après les scénarii publiés par la Banque
d’Angleterre, tous laissent entrevoir un gain net à
une exception près (voir Graphique 1)10.
Il est encore trop tôt pour se prononcer sur les nationalisations de Northern Rock et Bradford & Bingley :
la cession de Northern Rock suite à sa restructuration
s’est soldée par une perte latente, mais les prêts du
gouvernement portant intérêts devraient être intégralement remboursés grâce à la liquidation progressive du portefeuille restant d’actifs toxiques.6
En revanche, les banques centrales ont connu une
plus grande réussite dans leur rôle de prêteurs en
dernier ressort, leurs opérations de renflouement se
révélant souvent rentables au bout du compte pour
ceux qui ont assumé les risques.
Graphique 1 : Total des transferts nets vers HMT*
selon différentes hypothèses concernant l’effet
des cessions annoncées
5
S ource : HM Treasury
Report & Accounts
2011-12 et HM
Treasury Report &
Accounts 2012-13
6
S ource : UKFI, rapport
annuel 2013
7
S ource : Autorité
monétaire de
Hong Kong,
septembre 2002
8
S ource : Federal
Reserve Bank of New
York, avril 2013
9
S ource : HM Treasury
Report & Accounts
2011-12
10
S ource : Banque
d’Angleterre, Bulletin
trimestriel T1 2013
Milliards GBP
80
Par exemple, en réaction à la crise financière
asiatique, l’Autorité monétaire de Hong Kong avait
acquis 118 milliards HKD d’actifs lors d’une opération
de marché en 1998, débouchant sur un portefeuille
qui comprenait notamment une participation de
10% dans HSBC. La banque centrale a finalement
récupéré 208 milliards HKD, engrangeant au passage
un profit de 90 milliards HKD.7
60
40
20
+
0
–
20
Réserve fédérale
2013
Le rachat de plus de 70 milliards USD d’actifs auprès
d’AIG et Bear Stearns par la Réserve fédérale américaine au printemps 2008 lui a permis de réaliser un
profit d’environ 10 milliards USD, représentant un
rendement équivalent à environ 14%.8
2015
2017
+ 0 point de base
+ 100 points de base
+ 200 points de base
2019
2021
+ 300 points de base
+ 400 points de base
* HMT: Her Majesty’s Treasury
Source : Banque d’Angleterre, Bulletin trimestriel T1 2013
Graphique 2 : Évolution et montants des programmes de la BCE (Mrd EUR)
Mrd EUR
250
200
150
100
50
Programme SMP
Programme Covered Bond I
01.05.2013
01.03.2013
01.01.2013
01.11.2012
01.09.2012
01.07.2012
01.05.2012
01.03.2012
01.01.2012
01.11.2011
01.09.2011
01.07.2011
01.05.2011
01.03.2011
01.01.2011
01.11.2010
01.09.2010
01.07.2010
01.05.2010
01.03.2010
01.01.2010
01.11.2009
01.09.2009
01.07.2009
0
Programme Covered Bond II
Source : Bloomberg, Allianz Global Investors Economics & Strategy, calculs internes, juillet 2013
2
Banque Centrale Européenne
Les programmes SMP (Securities Market Programme)
et ceux portant sur le rachat d’obligations sécurisées
(« covered bonds ») ont permis à la Banque Centrale
Européenne d’acquérir près de 300 milliards EUR
d’actifs entre 2009 et 2012 (voir Graphique 2). Ce
chiffre inclut un montant considérable de dette
souveraine de pays européens périphériques
(plus de 50% de la dette grecque en circulation
et un quart de la dette portugaise) ainsi que des
billets de trésorerie11. Sachant que ces actifs seront
Graphique 3 : Estimation des profits réalisés par
la BCE sur ses rachats d’obligations (Mrd EUR)
Mrd EUR
90
66,5
80
70
53,2
60
50
40
généralement détenus jusqu’à l’échéance, ce sont
les coupons qui représentent la principale source de
gains et non pas l’appréciation du capital. Hormis
de nouveaux défauts, ces programmes devraient
générer un gain net compris entre environ 70 et
80 milliards EUR (voir Graphique 3), dont 9 milliards
EUR sur la dette grecque.
11
S ource : J.P.Morgan,
juillet 2013
Vu sous cet angle, le prêteur en dernier ressort joue
un rôle critique mais en fin de compte rentable
dans le cadre de crises bancaires ou de la dette
souveraine.
S’il devait s’avérer que la Grèce requière une
nouvelle aide financière impliquant pour la première
fois la participation du secteur public, une partie
des coûts à tout le moins serait amortie grâce
aux produits issus des précédents programmes
de la BCE. S’il était mieux compris, cet état de fait
permettrait sans doute de modérer l’opposition
populaire et le débat public s’agissant des plans de
sauvetage.
30
20
10
0
13,3
9,5
11,0
Programme
SMP
Total
1,5
Programmes
Covered Bonds I + II
Plus-value
Coupons perçus
Source : Allianz Global Investors Economics & Strategy, calculs
internes basés sur les chiffres de la BCE, juillet 2013
Publication
Allianz Global Investors Europe GmbH
Bockenheimer Landstr. 42 – 44
60323 Frankfurt am Main
Global Capital Markets & Thematic Research
Hans-Jörg Naumer (hjn), Dennis Nacken (dn),
Stefan Scheurer (st)
Source des données – Sauf indication contraire :
Thomson Financial Datastream.
Date des données – Sauf indication contraire :
Août 2013
Les performances passées ne sont pas un indicateur fiable des performances futures.
Ce document a été communiqué par Allianz Global Investors France : Société Anonyme au capital de 10 159 600 euros – 352 820 252 RCS Paris dont le siège social
se situe au 3, boulevard des Italiens – 75113 Paris Cedex 02. Allianz Global Investors France est une société de gestion de portefeuille agréée par la Commission des
Opérations de Bourse le 30 juin 1997 sous le numéro GP-97-063. Allianz Global Investors France décline toute responsabilité dans l’utilisation qui pourrait être faite de
ces informations et des conséquences qui pourraient en découler.
Ce document réalisé à titre d’information ne saurait constituer ni une offre d’achat, de vente, ou de souscription d’instruments financiers.
Toute reproduction, copie, duplication, transfert, sous quelque forme que ce soit, concernant tout ou partie des informations, données financières et recommandations
préconisées par Allianz Global Investors France sont strictement interdites.