Texte A Alfred de Musset : « La nuit de mai », Poésies nouvelles

Transcription

Texte A Alfred de Musset : « La nuit de mai », Poésies nouvelles
TexteAAlfreddeMusset:«Lanuitdemai»,Poésiesnouvelles(1835).
LAMUSE
Crois-tudoncquejesoiscommeleventd'automne,
Quisenourritdepleursjusquesuruntombeau,
Etpourquiladouleurn'estqu'unegoutted'eau?
Ôpoète!unbaiser,c'estmoiquiteledonne.
L'herbequejevoulaisarracherdecelieu,
C'esttonoisiveté;tadouleurestàDieu.
Quelquesoitlesouciquetajeunesseendure,
Laisse-las'élargir,cettesainteblessure
Quelesnoirsséraphins1t'ontfaiteaufondducœur:
Riennenousrendsigrandsqu'unegrandedouleur.
Mais,pourenêtreatteint2,necroispas,ôpoète,
Quetavoixici-basdoiverestermuette.
Lesplusdésespéréssontleschantslesplusbeaux,
Etj'ensaisd'immortelsquisontdepurssanglots.
Lorsquelepélican,lasséd'unlongvoyage,
Danslesbrouillardsdusoirretourneàsesroseaux,
Sespetitsaffaméscourentsurlerivage
Enlevoyantauloins'abattresurleseaux.
Déjà,croyantsaisiretpartagerleurproie,
Ilscourentàleurpèreavecdescrisdejoie
Ensecouantleursbecssurleursgoitres3hideux.
Lui,gagnantàpaslentsunerocheélevée,
Desonailependanteabritantsacouvée,
Pêcheurmélancolique,ilregardelescieux.
Lesangcouleàlongsflotsdesapoitrineouverte;
Envainiladesmersfouillélaprofondeur;
L'Océanétaitvideetlaplagedéserte;
Pourtoutenourritureilapportesoncœur.
Sombreetsilencieux,étendusurlapierre
Partageantàsesfilssesentraillesdepère,
Danssonamoursublimeilbercesadouleur,
Et,regardantcoulersasanglantemamelle,
Sursonfestindemortils'affaisseetchancelle,
Ivredevolupté,detendresseetd'horreur.
Maisparfois,aumilieududivinsacrifice4,
Fatiguédemourirdansuntroplongsupplice,
Ilcraintquesesenfantsnelelaissentvivant;
Alorsilsesoulève,ouvresonaileauvent,
Et,sefrappantlecœuravecuncrisauvage,
Ilpoussedanslanuitunsifunèbreadieu,
Quelesoiseauxdesmersdésertentlerivage,
Etquelevoyageurattardésurlaplage,
Sentantpasserlamort,serecommandeàDieu.
Poète,c'estainsiquefontlesgrandspoètes. Ilslaissents'égayerceuxquiviventuntemps;
Maislesfestinshumainsqu'ilsserventàleursfêtes
Ressemblentlaplupartàceuxdespélicans.
Quandilsparlentainsid'espérancestrompées,
Detristesseetd'oubli,d'amouretdemalheur,
Cen'estpasunconcertàdilaterlecœur.
Leursdéclamationssontcommedesépées:
Ellestracentdansl'airuncercleéblouissant,
Maisilypendtoujoursquelquegouttedesang..
1.Lesangesdeladouleur.2."Pourenêtreatteint":mêmesituen
es atteint. 3. Déformation du cou chez le pélican.4. Allusion au
sangduChrist,versésurlaCroixpoursauverleshommes.5.Vent
froidduNord.6.Instrumentdemusiqueàcordesfavoridespoètes.
TexteB.CharlesBaudelaire,L'héautontimorouménos,Fleursdumal,1857
Note:Lepoètes’adresseàlui-même.Letitregrecsignifie«lebourreaudesoimême»
Jetefrapperaisanscolère
GrâceàlavoraceIronie
Etsanshaine,commeunboucher,
Quimesecoueetquimemord?
CommeMoïselerocher!
Etjeferaidetapaupière,
Elleestdansmavoix,lacriarde!
C'esttoutmonsang,cepoisonnoir!
PourabreuvermonSaharah,
Jesuislesinistremiroir
Jaillirleseauxdelasouffrance.
Oùlamégèreseregarde.
Mondésirgonfléd'espérance
Surtespleurssalésnagera
Jesuislaplaieetlecouteau!
Jesuislesouffletetlajoue!
Commeunvaisseauquiprendlelarge,
Jesuislesmembresetlaroue,
Etdansmoncoeurqu'ilssoûleront
Etlavictimeetlebourreau!
Tescherssanglotsretentiront
Commeuntambourquibatlacharge!
Jesuisdemoncœurlevampire,
-Undecesgrandsabandonnés
Nesuis-jepasunfauxaccord
Aurireéternelcondamnés,
Dansladivinesymphonie,
Etquinepeuventplussourire!
TexteC.Rimbaud,lettreàP.Demeny,Charleville,15mai1871,extrait.
Lapremièreétudedel'hommequiveutêtrepoèteestsapropreconnaissance,entière.Ilcherchesonâme,
ill'inspecte,illatente,l'apprend.Dèsqu'illasait,illadoitcultiver:celasemblesimple:entoutcerveau
s'accomplitundéveloppementnaturel;tantd'égoïstesseproclamentauteurs;ilenestbiend'autresqui
s'attribuent leur progrès intellectuel! - Mais il s'agit de faire l'âme monstrueuse: à l'instar des
comprachicos (bohémiens qui achetaient des enfants en bas âge pour en faire des monstres ou des
mendiants en les mutilant), quoi! Imaginez un homme s'implantant et se cultivant des verrues sur le
visage.
Jedisqu'ilfautêtrevoyant,sefairevoyant.
Lepoètesefaitvoyantparunlong,immenseetraisonnédérèglementdetouslessens.Touteslesformes
d'amour,desouffrance,defolie;ilcherchelui-même,ilépuiseenluitouslespoisons,pourn'engarder
quelesquintessences.Ineffabletortureoùilabesoindetoutelafoi,detoutelaforcesurhumaine,oùil
devient entre tous le grand malade, le grand criminel, le grand maudit, - et le suprême Savant! - Car il
arriveàl'inconnu!-Puisqu'ilacultivésonâme,déjàriche,plusqu'aucun!Ilarriveàl'inconnu;etquand,
affolé,ilfiniraitparperdrel'intelligencedesesvisions,illesavues!Qu'ilcrêvedanssonbondissementpar
les choses inouïes et innommables: viendront d'autres horribles travailleurs; ils commenceront par les
horizonsoùl'autres'estaffaissé!
I-Vousrépondrezd'abordàlaquestionsuivante(4points)
Qu’estcequ’êtrepoètepourcestroisauteurs?
II.Voustraiterezensuite,auchoix,l'undessujetssuivants(16points):
CommentaireVousferez!ecommentairedel'extraitdeMusset(TexteA)suivant( ):"Riennenousrend
sigrandsqu'unegrandedouleur"jusqu'à:"Poète,c'estainsiquefontlesgrandspoètes."
Dissertation"Riennenousrendsigrandsqu'unegrandedouleur",déclarelaMuseauPoète.Pensez-vous
que la douleur soit la seule source d'inspiration pour le poète lyrique (qui exprime ses sentiments
personnels)?Vousrépondrezdansundéveloppementorganisé,envousappuyantsurletexteproposé,les
œuvresétudiéesenclasseetvoslecturespersonnelles.
Invention "Les plus désespérés sont les chants les plus beaux", déclare la Muse au Poète. En désaccord
avecMusset,unpoèteseproposed'écrireunhymneàlajoiequicélèbreraitlebonheurdevivre.Rédigez
enversouenproseletextedecetautrepoète.