du 7 au 14 septembre

Transcription

du 7 au 14 septembre
1
les carnets de la MC93
une publication ?
La représentation est le moment certes central mais pas
unique de la relation que l’on entretient avec le théâtre.
Elle est aussi précédée d’une attente, d’une préparation
que chacun vit à sa façon. Il y a ceux qui veulent lire la pièce
avant de l’entendre, ceux qui connaissent l’auteur ou le metteur
en scène, ceux qui sont attentifs aux interprètes et ceux qui sont
concernés par le sujet. Il y a ceux qui savent choisir le spectacle,
et ceux qui préfèrent attendre d’en avoir des échos ; il y a ceux
qui y iront seuls ou qui y entraîneront des amis…
Ensuite, la représentation est le déclencheur de désirs multiples :
celui de lire, de découvrir, de se lancer dans des associations
d’idées inédites, celui de penser.
Parfois, il est possible de converser, même de manière très
contradictoire, dès la sortie de la salle. D’autres fois, on a envie
de silence, presque de recueillement, et à l’intérieur de nous,
les mots, les images et des émotions entament ce chemin
mystérieux qui fait que nous serions très différents si nous
n’étions pas habités, plus ou moins régulièrement,
chacun à son rythme, par les spectacles.
Cette publication semestrielle vous accompagne donc avant
et après les spectacles. Elle se situe entre le programme
de saison et le programme de salle qui vous est remis à chaque
représentation. À l'instar de carnets de bord, de carnets de route
ou de voyage, elle est constituée de textes variés et d'images.
Sa construction est chronologique, mois par mois :
— elle reprend la présentation des spectacles du programme
de saison en donnant des informations complémentaires sur
les spectacles et en précisant ce que nous organisons en écho,
— elle enrichit la saison par nos propositions le plus souvent
gratuites de lectures, de rencontres et de participation
à des ateliers,
— elle témoigne à travers des grands angles de projets
de la Fabrique d’expériences* ou de résidences d’artistes
menés par la MC93,
— elle trace des fils rouges entre les spectacles et les différentes
propositions, propose des pistes de réflexion,
incite à la découverte.
Son objectif est de vous associer à la vie de la Maison,
de vous rendre compte de nos actions et de vous donner
envie de les partager.
Bonne lecture et bons spectacles
Hortense Archambault, directrice
Bobigny, août 2016
* La Fabrique d’expériences part du constat que le théâtre public doit se penser non plus uniquement comme
un lieu de programmation de spectacles mais aussi comme un lieu qui contribue à faire ensemble société,
un espace de mixité sociale et de métissage culturel.
Elle s’intéresse plus particulièrement aux questions d’accès à la culture avec une priorité donnée à la jeunesse
et s’inscrit sur notre territoire, la Seine-Saint-Denis, au nord-est du Grand Paris. Véritable laboratoire, la Fabrique
explore, pour ce faire, plusieurs modalités : ateliers de pratiques théâtrales, participation à des projets spécifiques,
rencontres régulières avec les artistes en résidence. Elle propose également aux spectateurs d’être les compagnons,
les ambassadeurs, en un mot, les acteurs des activités de la MC93.
C’est un espace de liberté où chacun est tour à tour participant et chercheur, où les projets émanent de tous,
artistes, enseignants, de groupes de spectateurs ou de personnes du champ social. Un espace qui est à la fois
un lieu de création et d’émancipation. Elle s’articule autour de trois axes : la jeunesse, le territoire de Bobigny
et de la Seine-Saint-Denis et l’hospitalité d’une institution publique.
2
3
calendrier
SEPTEMBRE
p.
mer7 17 h 30
Les Frères Karamazov Frank Castorf
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacle
6
jeu8 17 h 30
Les Frères Karamazov Frank Castorf
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacle
6
sam10 15 h 00
Les Frères Karamazov Frank Castorf
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacle
6
dim11 15 h 00
Les Frères Karamazov Frank Castorf
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacle
6
mar13 17 h 30
Les Frères Karamazov Frank Castorf
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacle
6
mer14 17 h 30
Les Frères Karamazov Frank Castorf
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacle
6
Primo Levi et Ferdinando Camon, Conversations ou le voyage d’Ulyssse Dominique Lurcel *
Ancienne Gare de déportation Bobigny
Spectacle
7
Chantier de cirque *
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacles
8
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Exposition
8
ven9
lun12
jeu15
ven16
sam17
dim18 16 h 30 lun 19
mar20
mer21
jeu22
ven23
sam24 14 h 00
14 h 00 > 18 h00 Les architextures *
15 h 00
Early Works Ouverture Portrait Lucinda Childs *
Centre national de la danse Pantin
Spectacle
7
18 h 00
Early Works Ouverture Portrait Lucinda Childs *
Centre national de la danse Pantin
Spectacle
7
20 h 30
Secret (temps 2) Johann Le Guillerm
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacle
8
dim25 12 h 30
Hortense Archambault et Wajdi Mouawad *
Culture au quai Paris
Rencontre
11 h 00 > 16 h 00 Les architextures *
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Exposition
15 h 00
Early Works Ouverture Portrait Lucinda Childs *
Centre national de la danse Pantin
Spectacle
7
17 h 00
Secret (temps 2) Johann Le Guillerm
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacle
8
18 h 00
Early Works Ouverture Portrait Lucinda Childs *
Centre national de la danse Pantin
Spectacle
7
7
8
lun26
mar27 19 h 00
Early Works Programme A Portrait Lucinda Childs
Centre national de la danse Pantin
Spectacle
20 h 30
Early Works Programme B Portrait Lucinda Childs
La Commune Aubervilliers
Spectacle
7
20 h 30
Secret (temps 2) Johann Le Guillerm
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacle
8
mer28 19 h 00
Early Works Programme A Portrait Lucinda Childs
Centre national de la danse Pantin
Spectacle
7
20 h 30
Early Works Programme B Portrait Lucinda Childs
La Commune Aubervilliers
Spectacle
7
20 h 30
Secret (temps 2) Johann Le Guillerm
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacle
8
jeu 29 19 h 00
Early Works Programme A Portrait Lucinda Childs
Centre national de la danse Pantin
Spectacle
7
20 h 30
Early Works Programme B Portrait Lucinda Childs
La Commune Aubervilliers
Spectacle
7
21 h 00
Early Works Programme A Portrait Lucinda Childs
Centre national de la danse Pantin
Spectacle
7
ven 30 19 h 00
Early Works Programme A Portrait Lucinda Childs
Centre national de la danse Pantin
Spectacle
7
20 h 30
Secret (temps 2) Johann Le Guillerm
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacle
8
20 h 30
Early Works Programme B Portrait Lucinda Childs
La Commune Aubervilliers
Spectacle
7
20 h 30Amphitryon Sébastien Derrey
La Commune Aubervilliers
Spectacle
9
21 h 00
Centre national de la danse Pantin
Spectacle
7
Early Works Programme A Portrait Lucinda Childs
* gratuit sur réservation
5
Frank Castorf
Fédor Dostoïevski
LA FRICHE
INDUSTRIELLE
BABCOCK
Pour sa saison 2016-2017, la MC93, actuellement en travaux, déploie sa programmation en
Seine-Saint-Denis et investit la Friche industrielle Babcock avec le soutien de La Courneuve
et Plaine Commune.
Le site Babcock et Wilcox s’est développé à
partir de la fin du xixe siècle. Sur cet immense
site de près de 18 ha, l’entreprise produisait
d’imposantes chaudières puis des installations
électriques, et comptait plus de 2 000 salariés.
L’entreprise a également été le berceau de
fortes luttes sociales.
Cette programmation est une préfiguration de la
rénovation de la partie Sud du site de Babcock.
Ces halles monumentales, fleuron de l’architecture industrielle nationale, seront reconverties
pour devenir un quartier mixte, ouvert à tous et
organisé autour du patrimoine, de la culture et
de la création. La partie Nord du terrain accueillera quant à elle le centre fiduciaire francilien de
la Banque de France.
Une exposition retraçant l’histoire de l’usine
Babcock organisée par La Courneuve et Plaine
Commune ainsi qu’un fascicule édité par les
Archives départementales de Seine-Saint-Denis
sont proposés au public pour découvrir la richesse
patrimoniale du bâtiment.
le 18
septembre
« Cela me paraissait
superflu, négatif
même, nocif
peut-être, de faire
de la rhétorique.
Il n’y avait pas besoin
de souligner l’horreur.
L’horreur était.
Il valait mieux laisser
les choses se raconter
d’elles-mêmes. »
Ferdinando Camon s’entretient pour la première fois avec Primo Levi en 1982. Leurs
conversations vont s’échelonner régulièrement, jusqu’en 1986. Ainsi, deux hommes se
parlent. Deux écrivains, deux « arpenteurs
de mémoire » : l’un est de culture chrétienne,
l’autre a vécu comme juif, quarante ans plus
tôt, l’expérience d’Auschwitz. Quel que soit le
sujet abordé (Auschwitz, évidemment, et l’Allemagne - celle de Hitler et celle d’aujourd’hui
- mais aussi le goulag de Soljenitsyne, l’acte
d’écrire, le métier de chimiste...) la tension de
la pensée naît entre les interlocuteurs du sentiment d’urgence qu’ils partagent l’un et l’autre.
Jamais complaisante, ni écrasante, la parole de
Primo Levi est une arme, tonique, pour appréhender le présent et prévenir des dangers à
venir…
D’après Ferdinando Camon, Conversations
avec Primo Levi (Éditions Gallimard, 1991)
Adaptation Éric Cénat, Gérard Cherqui
et Dominique Lurcel
Mise en scène Dominique Lurcel
Interprétation Éric Cénat et Gérard Cherqui
Lumières Philippe Lacombe
Costumes Élisabeth de Sauverzac
ou le Voyage d’Ulysse
Thomas Aurin
Babcock pratique
La Friche industrielle Babcock est située à 5 minutes à pied de la station
La Courneuve-Aubervilliers du RER B
et à 8 minutes à pied de la station
Hôtel-de-ville du tramway T1.
Ensuite, il vous suffit de suivre les totems
graphiques réalisés par Malte Martin ou le
marquage au sol « MC93-Babcock ».
Un parking est mis à disposition du public.
Une navette gratuite retour vers Paris
est proposée les soirs de semaine.
Un service de restauration street food
est proposé à l’intérieur et à l’extérieur
de la halle, avant et après les représentations.
Spectacle subventionné pour sa reprise par l’ONAC du Loiret,
la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, les régions Centre
– Val de Loire et Île-de-France, le conseil général du Loiret
et la Ville d’Orléans. Avec le soutien du Cercil – Musée Mémorial
des enfants du Vel d’Hiv, du Musée d’art et d’histoire du Judaïsme
(MahJ), du Centre culturel Italien de Paris et de la Ligue
des droits de l’homme (LdH).
À 16 h 30
Ancienne Gare de déportation, Bobigny
Gratuit sur réservation
Et aussi...
Des visites guidées de l’Ancienne Gare
de déportation sont proposées dans le cadre
des 33e journées européennes du patrimoine
Samedi 17 septembre — à 10 h et 14 h 30
Dimanche 18 septembre — à 11 h et 14 h 30
Visites gratuites, inscription auprès du comité
départemental du tourisme : tourisme93.com
Primo Levi
e
arly
works
du 24
au 30
septembre
Lucinda Childs
LUCINDA CHILDS
NOTHING PERSONAL
1963—1989
Lucinda Childs, Nothing Personal est le titre de
l’exposition présentant pour la première fois les
archives de la chorégraphe américaine. À l’occasion de la donation d’un fonds exceptionnel, le
CND s’associe à la Galerie Thaddaeus Ropac à
Pantin pour présenter cette exposition monographique de l’artiste, qui réunit le travail graphique
de Lucinda Childs (partitions chorégraphiques,
dessins, schémas), ainsi que des documents inédits réalisés par les artistes avec lesquels elle
a collaboré, notamment Sol LeWitt, Babette
Mangolte, Robert Mapplethorpe et Robert
Wilson.
L’ensemble des éléments exposés tente de faire
découvrir l’invention formelle d’une danse qui,
selon la chorégraphe, « n’a rien de personnel ».
Exposition
Commissariat Lou Forster
Scénographie David Dubois
Création sonore Sébastien Roux
Production et réalisation CND Centre national de la danse,
Galerie Thaddaeus Ropac, Le O. Avec le Festival d’Automne
à Paris. En partenariat avec France Inter.
CND Centre national de la danse — Pantin
Du 24 septembre au samedi 17 décembre
(sauf du 10 au 17 octobre)
Galerie Thaddaeus Ropac — Pantin
Du 24 septembre au 7 janvier
Du mardi au samedi de 10 h à 19 h
Entrée libre
Nathaniel Tileston
f
du 7
au 14
septembre
rères
Karamazov
Primo Levi
et Ferdinando Camon,
Conversations
Benoît Fougeirol
L
e
s
Spectacle
6
7
s
ecret
(temps 2)
a
du 24
au 30
septembre
Johann Le Guillerm
Sébastien Derrey
Heinrich von Kleist
JAt Paris
Thomas Mann
à propos de
L'Amphitryon
de Kleist*
LES
ARCHITEXTURES
DE JOHANN
LE GUILLERM
En écho au spectacle, trois Architextures L’Amu,
L’Indrique et Le Crisalide, sculptures monumentales, s’élèvent dans la halle.
Architectures par leur forme, textures par leur
maillage, les Architextures infiltrent les paysages de leurs structures de bois, autoportantes, sans clou, ni vis, ni colle.
Formes naturelles, autosuffisantes, sans affectation, ces Architextures migrantes, dissidentes
sont une utopie de construction. Elles s’exposent aux éléments, à l’érosion, à la mémoire
et au passé des sites qu’elles investissent, modifient le paysage autant qu’elles en sont transformées par lui. Ce dialogue invite à l’expérience
du monde réel, mais en trouant l’espace, les
Architextures en perturbent la perception,
ouvrent le champ à d’autres possibles.
CHANTIER
DE CIRQUE
Houdremont lance la saison culturelle de La
Courneuve et propose une programmation gratuite de spectacles de cirque(s) in situ le samedi
24 septembre.
du 30
septembre
au 13 octobre
mphitryon
« (...) C’est la pièce la plus ingénieuse et la
plus gracieuse, la plus spirituelle, la plus
profonde et la plus belle du monde.
(...) L’Amphitryon de Kleist est une création
originale, pour peu qu’on ne comprenne pas
stupidement sous ces termes faire et tirer
quelque chose du néant, mais la flamme
de l’esprit brûlant dans la matière. Comparés
au poème de Kleist, Plaute et les comédies
françaises sont simplement de la matière,
et Adam Müller, le premier éditeur de la
pièce, dont l’auteur était prisonnier en
France, dit dans sa préface judicieuse
et enthousiaste et tout homme sensé lui en
est reconnaissant : « Peu importe sans doute
que ce soit directement la nature ou l’œuvre
d’un prédécesseur qui ait incité l’auteur
à écrire sa pièce ; la poésie prospère de la
façon la plus superbe quand elle ne connaît
qu’une seule main qui lui tend le sujet
et l’instrument, quand elle sait recevoir
de Molière d’une manière tout aussi naïve,
pure et particulière, que de la nature
ou de son imagination. »
(...) c’est une traduction, au sens le plus hardi
du terme : c’est réellement la transposition
inouïe et la transformation magique d’une
œuvre transportée de sa sphère dans un
univers qui, à l’origine, lui était complètement
étranger, d’un siècle à l’autre, d’une
nationalité à l’autre, c’est la germanisation
radicale, la romantisation d’un chef-d’œuvre
du classicisme français.
(...) Voilà donc la pièce. Tandis que je
repassais ses lignes délicates, ma dilection
pour elle, qui jusqu’ici n’était qu’une
croyance, la fidélité que je lui ai gardée
ont connu le bonheur de savoir pourquoi
je l’aimais. Sa mystique sereine, sa ferveur
spirituelle sont incomparables. Si on la
jouait comme elle le mérite, ce serait un
divertissement, ce serait une fête pour
la sensibilité et la raison qui y trouveraient
également leur compte. Mais les représentations
d’Amphitryon n’ont rien de commun avec
les fêtes, si ce n’est la rareté : elles sont peu
fréquentes et ce qui les entoure,
c’est le train-train quotidien du théâtre. »
* 1927, traduction de Louise Servicen
et Jeanne Naujac.
14h — Totem(s) Parcours graphique
par Malte Martin
18h — Variations par le Groupe Acrobatique
de Tanger
19h — La Cosa en éclats par Claudio Stellato
avec la Maison des Jonglages
Entrée libre
Plus d’informations :
Houdremont-la-courneuve.info
01 49 92 61 61
maisondesjonglages.fr
UN PEUPLE
SPECTATEUR
VISITES
Des visites guidées des Architextures et de la
Friche industrielle Babcock sont organisées
samedi 24 septembre de 14 h à 18 h et dimanche
25 septembre de 12 h à 16 h.
Entrée libre
Plus d’informations :
Houdremont-la-courneuve.info
01 49 92 61 61
maisondesjonglages.fr
Philippe Cibille
Pour les groupes, d'autres dates sont possibles.
« Je ne fais plus
de nouveaux
spectacles,
je continue... »
En mai 2016, Sébastien Derrey a associé à sa
recherche pour la mise en scène d’Amphitryon
une quinzaine de spectateurs pratiquant le
théâtre en amateurs et ayant répondu à l’appel lancé par la MC93. Il s’agissait de trouver
la meilleure manière de figurer le peuple dans
la dernière scène de la pièce. Après quelques
jours de répétitions au théâtre l’Échangeur à
Bagnolet, il décide de faire jouer chaque soir
une personne différente, volontairement pas un
acteur. Cette contribution des spectateurs parfois au processus de la création est précieuse.
C’est l’une des raisons de la mise en place des
spectateurs compagnons, qui acceptent d’être
sollicités régulièrement comme des amateurs
passionnés depuis le plateau ou la salle.
DR
Johann Le Guillerm
8
9
Hortense Archambault
GRAND
Stéphanie Aubin aime les gens, « tout simplement » et le mouvement « passionnément ». Elle
se satisferait volontiers de ces deux seuls motifs
pour expliquer Jeu de société/Bobigny, mouvement chorégraphique créé geste après geste
par 120 balbyniens et filmé image par image.
Si ce projet est d’une lumineuse justesse, c’est
parce qu’il se nourrit de l’expérience chorégraphique d’une artiste qui lie depuis toujours la
création et le public pour « prendre langue avec
le monde » comme elle dit. Elle n’a donc pas
attendu la mode supposée de ces projets dits
« participatifs » pour s’y engager.
Formé à la Post Modern Dance chez Trisha
Brown, l’oiseau aurait dû nicher du côté des
minimalistes formels de son espèce. Mais en
1994, l’historien Jean Clair, l’académicien Marc
Fumaroli, contempteurs de l’art contemporain
sortent l’artillerie lourde. La dérive réac contamine toute une frange d’intellectuels prêts à affirmer à la suite de Jean Baudrillard dans Libé :
« l’art contemporain est nul. » Stéphanie Aubin
dit avoir compris à ce moment-là « la dimension politique de l’art ». Et avoir voulu prendre
ses responsabilités d’artiste et de citoyenne. La
même année, elle riposte en inventant à la Cité
internationale, le festival L’Art en scène dans
lequel elle invite des chorégraphes à prendre
artistiquement la parole sur leur parcours. Les
premières conférences dansées sont nées. Elles
signent une volonté de partager la danse avec
le public en l’inscrivant dans la vie. L’artiste
poursuit alors sa route à la croisée des arts et
des gens, danseurs ou non avec qui elle partage volontiers le plateau au nom d’un principe
aussi sain que fondé : « La création n’est pas
un acte hors sol. L’artiste n’est pas connecté
à Dieu, il vit, respire dans le monde, il subit
son influence. C’est en s’associant à d’autres,
en multipliant les points de vue, qu’on peut
tenter d’appréhender ce monde si compliqué. »
Elle déploie une activité artistique foisonnante
qui verra la création des Étonnistes en 2005 et
2015, de Légendes ou Amphithéâtre ≠ 2, des
formes entre enquête, performances visuelles
ou verbales et conférence.
Parallèlement à son activité dansée, Stéphanie
Aubin a dirigé pendant 14 ans Le Manège,
Scène nationale de Reims. Elle y a mené un
projet dans le droit fil de ses convictions, défendant l’acte artistique comme socle de la médiation avec les publics. C’est là qu’est né le cycle
Jeu de société en 2010, une création participative, qu’elle nomme « objet d’art relationnel »
pour en finir avec la divison archaïque mais
vivace que l’institution opère encore entre l’art
et l’action culturelle. « Le clivage est obsolète »
voudrait croire l’artiste.
ANGLE
Le concept participatif a le vent en poupe, il
n’a peut-être même jamais connu une telle fortune politique. Symptôme d’une démocratie en
mal de légitimité ou revendication citoyenne,
désir de commun aussi dans un monde globalisé et atomisé ? En tout cas, les artistes sont
de plus en plus nombreux à expérimenter cette
autre manière de faire art, réinterrogeant de
fait et d’un seul trait, le statut de l’œuvre, de
l’artiste et du spectateur. Le regardeur n’est
plus en face, mais immergé, acteur de l’œuvre à
laquelle il confère une singularité inédite par sa
présence même. De fait, il déplace la fonction
de l’artiste qui de créateur devient co-auteur
d’un acte partagé. Les œuvres participatives ne
sont pas si neuves, elles jalonnent l’histoire des
Avant-gardes depuis les années 50. Elles émanent d’artistes à la réputation parfois incontestée comme Thomas Hirschhorn ou Jeremy
Deller, mais restent difficiles à appréhender
sans doute parce que nous manquons encore
d’outils critiques spécifiques d’évaluation.
Stéphanie Aubin peut bien affirmer : « C’est une
réponse d’artistes sensibles à leur contexte (qui
nécessite de) renouveler le protocole relationnel avec l’art et l’artiste », l’affaire est loin d’être
entendue car elle demande un changement radical de paradigme des politiques culturelles à
l’œuvre. « Ces actions ont l’intérêt de lier l’ensemble des missions des théâtres, elles peuvent
apporter un nouveau souffle à nos manières de
faire. Mais elles ne sont pas adaptées à une économie financière et humaine encore fondée sur
le primat de la diffusion. » reconnaît Stéphanie
Aubin qui déplore le peu de moyens — les
maigres subsides de l’action culturelle — que les
théâtres y investissent. « Il faut cesser d’ignorer que le contexte dans lequel nous évoluons
a changé, soutient la battante. Il y a urgence à
favoriser la diversité sur les plateaux et dans
les salles. Les théâtres doivent être des lieux
de vie. Les habitants doivent pouvoir y faire la
fête, s’y impliquer, y manger... ». L’artiste ne
distingue jamais entre ses élans créateurs et son
expérience professionnelle, sa parole n’en est
que plus forte.
Mais les temps changent, une nouvelle génération a pris les rênes des lieux d’art et elle tente,
même à pas comptés, de refonder l’ancien pacte
culturel entre théâtres et populations, pour
qu’enfin s’y confondent accès à l’art, espoir et
dignité. Et si l’énergie déployée par Stéphanie
Aubin est teintée de colère, elle restera toujours
plus féconde que celle du désespoir...
Une chorégraphe
Stéphanie Aubin,
assistée de Miléna Gilabert
et Yan Giraldou
Un photographe
Arnaud Baumann,
assisté de Roméo Guilbert
120 balbyniens
et une musique de Frank II Louise
INTENTION
Constituer un mouvement commun,
à partir de présences aussi différentes
que solidaires dans l’action.
PROTOCOLE
Une invitation est lancée
à des habitants de tous les âges
sur le mode : « Vous pouvez aimer
le mouvement sans avoir aucune
affinité avec la danse ». Il est proposé
aux participants de se présenter
dans leur habit de travail ou tout autre
tenue d’usage qui marquerait
un temps particulier de leur vie.
Les interprètes alternent devant
l’objectif du photographe, chacun
partant de la position de son
prédécesseur pour imaginer la suite
de son élan. Le geste chorégraphique
créé est le résultat de l’ensemble des
mouvements de la chaîne humaine.
PROCESSUS
10 séances de 3 heures.
L’espace du film tourné au Manège
de Reims a été reconstitué à Bobigny :
il s’agissait du couloir qui mène
aux loges.
OBJET RELATIONNEL
Un stop motion (technique
d’animation image par image.
Des photos sont prises les unes
après les autres puis mises bout
à bout pour créer un film comme
dans un dessin animé).
DURÉE
Durée du film : 4 min. Jeu de société
est prolongé par une exposition
des photographies réalisées.
Chronique
de la projection
du 25 juin
Des balbyniens
à l’affiche !
Avant-première du film Jeu de société
Le film ? Eh bien c’est l’histoire de cent
vingt personnes qui entrent par la fenêtre
et ressortent par la porte. Certaines passent
à la trappe. Le tout en quatre minutes. Tout
le monde a des super pouvoirs : on se brandit
à bout de bras, on se métamorphose. Et on se
contorsionne, on essaye de tenir, on se faufile
dans une chorégraphie hallucinée. Quelques
gamins agrippent le giron d’une bonne fée
qui passe... Et au bout du conte, tout le monde
s’en sort.
C’est tellement incroyable que les spectateurs,
à l’unanimité, demandent à revoir le film.
Ovation à chaque fois.
Cette avant-première exclusive se déroule
au Magic cinéma le 25 juin à 18 h 30. Ambiance
croisette cool. Une soixantaine de stars locales
sont arrivées par la grande porte du cinéma
et ont descendu sans chichi les marches de
ce petit palace, pendant qu’un fauteuil roulant
empruntait la rampe d’accès dédiée. On ne le
savait pas encore mais tout à l’heure il y aura
des palmes ! On est venu constater comment ce
projet nous regarde. Faces à faces.
La directrice du Magic, Dominique Bax, ouvre
la séance en annonçant à tous les présents
la tenue d’un pot à l’issue du visionnage de
leurs exploits et y ajoute un cadeau maison :
tout le monde est invité à la projection à 20 h
de la Loi de la jungle, une comédie aux accents
politiques, sortie la semaine précédente,
avec notamment Vincent Macaigne, étoile
emblématique du crossover théâtre-cinéma.
Stéphanie Aubin, chorégraphe et
co-réalisatrice du film Jeu de société que
nous allons découvrir, remercie tout le monde
et prévient, pédagogue, vaguement inquiète :
« attention, ça va vite, forcément... ça doit
aller vite et donc c’est court ! ».
Enfin, Hortense Archambault souligne qu’il
s’agit de la première présentation publique
d’une œuvre produite par la Fabrique
d’expériences, le laboratoire protéiforme
conçu par la nouvelle équipe de la MC93.
Le noir s’établit dans la salle très attentive.
L’interface d’un ordinateur s’affiche sur l’écran
du Magic, la souris sélectionne le fichier
« jeu de société.avi » et c’est parti. Pour deux
visionnages successifs, très enthousiastes,
parsemés de rires, d’exclamations admiratives
ou attendries, de prénoms lancés par petits
groupes qui apostrophent leurs amis à l’écran,
de silences aussi et de murmures. Des timbres
de voix de tout âge. Et, comme le souligne
Stéphanie Aubin, pour une fois personne
ne perd une miette du générique !
Au passage, tout le monde a repéré
D’ de Kabal, quelques membres de l’équipe
de la MC93 dans des postures inédites...
et un nageur palmé !
Quelques commentaires saisis au vol dans
la salle : « Tu as pu le capter au portable ? »,
« C’est sympa de revoir les personnes avec
qui on était à la séance photo », « Tu as vu,
il y avait une surveillante du collège ! »...
Arnaud Baumann, co-réalisateur, précise aux
spectateurs que sur les quelques quatre mille
photos de rushes, seules six cents composent
le film. Et que les photos retenues au montage
du film ne sont pas forcément celles qui seront
sélectionnées pour l’exposition à venir.
Les contraintes étant la continuité du
mouvement pour le premier projet,
l’expressivité statique pour le second.
C’était donc un film d’animation - image par
image - et peut-être même, dans un contexte
culturel quelque peu désolé, on le constate
in vivo, un film de réanimation !
Mais comment en sommes-nous arrivés là ?
En décembre 2015, la MC93, pas frileuse,
ouvre une fenêtre : Stéphanie Aubin passe
la tête dehors et appelle les balbyniens à se
faire embobiner par son acolyte photographe
Arnaud Baumann. Les deux réalisateurs
renouvellent ainsi l’expérience, déjà appelée
Jeu de société, montée à Reims en 2010.
Deux projets en vue : d’une part, la réalisation
d’une nouvelle version du film Jeu de société
qui sera donc chorégraphié à partir d’images
fixes, d’autre part, le montage d’une exposition
qui sera constituée de portraits de balbyniens,
affichés sur de grandes bâches dans la ville.
De décembre 2015 à février 2016, Stéphanie
Aubin et Arnaud Baumann mettent en boîte
des volontaires de tout âge, toute couleur, tout
quartier. Les candidats rentrent dans la danse
au fur et à mesure de leur arrivée : dix séances
de prises de vue ont lieu dans l’atelier de
construction de décors de la MC93 à Noisy-leSec. Dans ce tournis de personnages, tournage
que seul l’objectif puisse capter à ce stade,
il s’agit de laisser du champ aux acteurs
puis de les faire disparaître : autant dire que
personne ne peut s’attendre au résultat !
Sans compter qu’une composition musicale
originale, Du bon côté de l’autre signée Frank
II Louise, a convoqué son propre tempo au
montage. Elle déploie sur ces images une joie
nostalgique aux accents manouches, un brin
balkaniques, scandée de beats électros qui
claquent comme des percus. C’est magique.
Comme l’apesanteur. Et ça swingue grave.
Le résultat évoque les films de Kusturica : un
melting-pot d’âges et de trombines déroulant
une joyeuse farandole... Des images cousues
avec la plus grande minutie pour un scénario,
lui, délicieusement décousu !
Hypothèse : la règle tacite de ce jeu sociétal
consisterait-elle à instaurer la fluidité pour
gagner la liberté ?
Ce même soir, au Magic, versant exposition,
les réalisateurs ont également conçu une
avant-première : nous sommes tous invités
à nous rendre dans une salle annexe à la salle
de projection. Tombés dans les panneaux,
on en compte sept : cycle de création originel !
Ici ont été dressées, sur des bâches de 1,80 m
par 1,20 m, sept premières photos qui préfigurent
la méga expo à venir. Grand enthousiasme
autour de ces tirages quasi à l’échelle réelle.
On pose devant son propre portrait pour
une nouvelle prise de vue, on échange
des souvenirs de tournage. « Je ne m’attendais
pas du tout à ça » confie un homme.
La Fabrique d’expériences est en marche !
Pendant que les plus petits organisent un
cache-cache mettant à profit les panneaux
d’affichage, le pot fournit aux adultes
l’occasion d’échanger des nouvelles entre
voisins ou partenaires de la vie sociale
balbynienne. Dans cette salle où se tiennent
d’habitude les débats et cérémonies du
Magic sont affichés, tout le long des murs,
des portraits de personnalités du cinéma.
On reconnaît entre autres Jean-Pierre Mocky,
Jeanne Balibar, Clotilde Hesme... Des portraits
de taille modeste. Ce soir, dans l’antre du
Magic, les people sont miniatures et les vrais
gens géants !
Cette mise en bouche a stimulé les
organisateurs : une petite équipe part
en repérage dans la ville pour envisager la
future exposition. Les deux réalisateurs et
des membres de la MC93 arpentent Bobigny
pour jauger les emplacements possibles
de cent vingt portraits à afficher sur
bâches juxtaposées. On toise, on évalue,
on polémique, on s’enthousiasme... et on
parie sur la bonne volonté des partenaires
potentiels : le centre commercial, la RATP...
Vernissage prévu le 17 octobre 2016 !
Jarnoul Doberd
Anne Quentin
L’exposition sera présentée
du 17 octobre au 7 novembre
dans la ville de Bobigny.
Découvrez le film sur notre
site internet dans la rubrique
Fabrique d'expériences.
10
Arnaud Baumann
Stéphanie Aubin
Jeu de société /
Bobigny
F
iche
du
projet
ANGLE
Connaissant le travail artistique de Stéphanie Aubin et ayant vu Jeu de société/Reims,
j’ai demandé à cette dernière et à Arnaud Baumann qui co-signe le projet de réaliser
un Jeu de société/Bobigny. C’est la première œuvre produite dans le cadre de ce
que nous avons nommé la Fabrique d’expériences. Elle nous a permis de rencontrer
nos voisins, d’impliquer les spectateurs assidus, les relais, d’aller à la rencontre de
ceux qui nous paraissaient parfois manquer pour réaliser ce portrait artistique de
Bobigny. L’équipe de la MC93 s’y est pleinement investie. Stéphanie Aubin et Arnaud
Baumann ont ainsi dessiné une image singulière et subjective, joyeuse et libre de
la ville où nous sommes. Les deux textes qui suivent témoignent de cette aventure.
GRAND
11
calendrier
OCTOBRE
p.
9
sam1er 18 h 00Amphitryon Sébastien Derrey
La Commune Aubervilliers
Spectacle
20 h 30
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacle
8
La Commune Aubervilliers
Spectacle
9
mar4 19 h 30Amphitryon Sébastien Derrey
La Commune Aubervilliers
Spectacle
9
mer5 19 h 30Amphitryon Sébastien Derrey
La Commune Aubervilliers
Spectacle
9
jeu6 19 h 30Amphitryon Sébastien Derrey
La Commune Aubervilliers
Spectacle
9
ven7 20 h 30
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacle
14
La Commune Aubervilliers
Spectacle
9
14
Secret (temps 2) Johann Le Guillerm
dim2 16 h 00Amphitryon Sébastien Derrey
lun3
Danse de nuit Boris Charmatz
20 h 30Amphitryon Sébastien Derrey
sam8 17 h 00
Danse de nuit, l’atelier *
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Atelier
18 h 00Amphitryon Sébastien Derrey
La Commune Aubervilliers
Spectacle
9
20 h 30
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacle
14
dim9 16 h 00Amphitryon Sébastien Derrey
La Commune Aubervilliers
Spectacle
9
19 h 00
Danse de nuit Boris Charmatz
Friche industrielle Babcock La Courneuve
Spectacle
14
lun1020 h 00
La Mort de Danton François Orsoni
Pablo Neruda Bobigny
Spectacle
15
mar11 19 h 30Amphitryon Sébastien Derrey
La Commune Aubervilliers
Spectacle
9
20 h 00
La Mort de Danton François Orsoni
Pablo Neruda Bobigny
Spectacle
15
mer12 19 h 00
Carte Blanche à François Orsoni 15
Danse de nuit Boris Charmatz
Magic cinéma Bobigny
Cinéma
19 h 30Amphitryon Sébastien Derrey
La Commune Aubervilliers
Spectacle
9
jeu1319 h 30
Nouveau Théâtre de Montreuil
Spectacle
16
19 h 30Amphitryon Sébastien Derrey
La Commune Aubervilliers
Spectacle
9
20 h 00
La Mort de Danton François Orsoni
Pablo Neruda Bobigny
Spectacle
15
ven14 19 h 30
Les Bienveillantes Guy Cassiers
Nouveau Théâtre de Montreuil
Spectacle
16
20 h 00
La Mort de Danton François Orsoni
Pablo Neruda Bobigny
Spectacle
15
sam15 14 h 00
Hamlet, variations
Magic cinéma Bobigny
Cinéma
15
Les Bienveillantes Guy Cassiers
18 h 00
La Mort de Danton François Orsoni
Pablo Neruda Bobigny
Spectacle
16
19 h 30
Les Bienveillantes Guy Cassiers
Nouveau Théâtre de Montreuil
Spectacle
16
dim16 16 h 00
Les Bienveillantes Guy Cassiers
Nouveau Théâtre de Montreuil
Spectacle
15
16 h 00
La Mort de Danton François Orsoni
Pablo Neruda Bobigny
Spectacle
10
lun 17
Jeu de société Stéphanie Aubin et Arnaud Baumann * Bobigny
Exposition
15
20 h 00
La Mort de Danton François Orsoni
Pablo Neruda Bobigny
Spectacle
15
mar18 15 h 00
La Mort de Danton François Orsoni
Pablo Neruda Bobigny
Spectacle
19
Banquet #2 Daniel Conrod Bibliothèque Émile-Aillaud Bobigny Rencontre
mer19
jeu2020 h 00
La Mort de Danton François Orsoni
Pablo Neruda Bobigny
Spectacle
15
20 h 00
Angleterre, Angleterre Olivier Martinaud *
La Dynamo de Banlieues Bleues Pantin
Lecture
17
ven21 20 h 00
La Mort de Danton François Orsoni
Pablo Neruda Bobigny
Spectacle
15
sam22 18 h 00
La Mort de Danton François Orsoni
Pablo Neruda Bobigny
Spectacle
15
dim23 16 h 00
La Mort de Danton François Orsoni
Pablo Neruda Bobigny
Spectacle
15
* gratuit sur réservation
Hamlet, variations
le 15
octobre
DU THÉÂTRE
AU CINÉMA
Magic cinéma une journée autour de la figure
d’Hamlet. Grand seigneur, fou, stratège, homme
révolté contre la routine et la médiocrité, Hamlet
donne lieu à mille interprétations qui ont fait de
grandes œuvres tant théâtrales que cinématographiques. Seront projetés la captation de la pièce
Hamlet, mis en scène par Thomas Ostermeier
dans la Cour d’Honneur du Palais des Papes au
Festival d’Avignon en 2008 et filmé par Hannes
À l’occasion du 400 anniversaire de la mort de
William Shakespeare et des 25 ans de la rétrospective William Shakespeare organisée par le
Festival Théâtres au cinéma s’organise avec le
e
L
a
Cinéma — Rencontre
m
ort de Danton
François Orsoni
Georg Büchner
Lettre
de Georg
Büchner
à sa fiancée
du 7
au 9
octobre
Boris Charmatz
ENTREZ
DANS LA DANSE
Dans la continuité du projet artistique et culturel qu’il mène au Musée de la danse de Rennes,
Boris Charmatz vous invite à vivre la danse
autrement et à investir la gigantesque halle de
la Friche industrielle Babcock pour deux activités inédites.
Le samedi 8 octobre à 17 h, l’équipe artistique
du spectacle vous propose un atelier* pour traverser les matériaux chorégraphiques en lien
avec l’œuvre de Boris Charmatz, auteur d’une
vingtaine de pièces d’Aatt enen tionon (1996) à
Danse de nuit (2016).
Le dimanche 9 octobre à 17 h 30, Boris Charmatz
délivrera un échauffement ouvert à tous les
spectateurs munis d’un billet pour la représentation du soir.
Quels que soient votre condition physique,
votre âge ou votre niveau de pratique, entrez
dans la danse !
Dominique Appietto
* Gratuit sur réservation
LES ALLERSRETOURS IN SITU DE
FRANÇOIS ORSONI
François Orsoni a une double actualité avec la
MC93 cette saison : la création en octobre de
la Mort de Danton et une résidence In situ auprès
d’une classe de 5e du collège Henri-Sellier à
Bondy autour d'Allers-retours du dramaturge
allemand Ödön von Horvath.
Allers-retours raconte le parcours de Ferdinand
Havlicek, expulsé de son pays et condamné à
errer sur un pont qui sépare sa patrie d’un autre
pays. Un paysage trouble, une métaphore de
la tour de Babel, un monde où personne ne se
comprend, et un destin que le metteur en scène
explorera avec les élèves et auxquels il pourra
confronter ses propres recherches.
En compagnie du comédien et musicien Thomas
Landbo, de la réalisatrice et scénariste Marie
Garel-Weiss, de la dramaturge et journaliste
Olivia Barron et d’une équipe d’enseignants,
François Orsoni axera sa résidence sur le genre
du conte et sur la quête d’identité que traverse
tout adolescent. Les collégiens suivront le processus de création des artistes et participeront
parallèlement à des ateliers d’écriture, de pratique théâtrale, musicale et chorégraphique,
à des réflexions sur l’actualité du texte et à un
parcours culturel permettant d’enrichir leur
expérience.
L’aventure commencera par une analyse de leurs
propres allers-retours dans l’espace urbain. Elle
se poursuivra avec leurs camarades de classe et
leurs familles auprès desquels ils recueilleront
des témoignages.
In situ, artistes en résidence dans les collèges,
est un dispositif du Conseil départemental de
Seine-Saint-Denis.
Carte blanche à François Orsoni le mercredi
12 octobre au Magic cinéma de Bobigny
Plus d’infos prochainement sur notre site internet
14
du 10
au 23
octobre
Magic cinéma, Bobigny
De 14h à 23h en plusieurs programmes autonomes
Programme détaillé sur notre site prochainement
Louis Theillier
d
anse
de nuit
Rossacher, des films de Nicolas Klotz et Elisabeth
Perceval dont Jeunesse d’Hamlet, Clichy-sousBois et le film Un Hamlet de moins de Carmelo
Bene présenté au Festival de Cannes en 1973. La
journée comprendra aussi une rencontre autour
d’Hamlet, animée par Hortense Archambault,
qui confrontera les regards de différents artistes
dont Gérard Mordillat, écrivain et réalisateur,
Nicolas Klotz, réalisateur.
15
« Prouve-moi que tu m’aimes encore beaucoup
en me donnant bientôt des nouvelles... »
Et je t’ai fait attendre ! Depuis déjà quelques
jours, je prends la plume à chaque instant, mais
il m’était impossible d’écrire ne fut-ce qu’un
mot. J’étudiais l’histoire de la Révolution.
Je me suis senti comme anéanti sous l’atroce
fatalisme de l’histoire. Je trouve dans la nature
humaine une épouvantable égalité, dans
les conditions des hommes une inéluctable
violence, conférée à tous et à chacun.
L’individu n’est qu’écume sur la vague,
la grandeur un pur hasard, la souveraineté
du génie une pièce pour marionnettes,
une lutte dérisoire contre une loi d’airain,
la connaître est ce qu’il y a de plus haut,
la maîtriser impossible. L’idée ne me vient
plus de m’incliner devant les chevaux de parade
et les badauds de l’histoire. J’ai habitué mon
œil au sang. Mais je ne suis pas un couperet
de guillotine. Il faut est l’une des paroles
de condamnation avec lesquelles l’homme
a été baptisé. Le mot selon lequel il faut
certes que le scandale arrive, mais malheur
à celui par qui le scandale arrive — a de quoi
faire frémir. Qu’est-ce qui en nous ment,
assassine, vole ?
Je n’ai pas envie de suivre plus avant cette idée
Mais si je pouvais poser sur ton sein ce cœur
froid et martyrisé ! B(oecklet) t’aura rassuré
sur mon état, je lui ai écrit.
Je maudis ma santé. J’étais en feu, la fièvre
me couvrait de baisers et m’enlaçait comme
le bras d’une amante. Les ténèbres ondoyaient
au-dessus de moi, mon cœur se gonflait dans
une nostalgie infinie, des étoiles perçaient
l’obscurité, et des mains et des lèvres
s’inclinaient vers moi. Et maintenant ?
Et sinon ? Je n’ai pas même la volupté
de la douleur et du désir. Depuis que j’ai
franchi le pont sur le Rhin, c’est comme si
j’étais anéanti à l’intérieur de moi-même,
un sentiment distinct ne surgit pas en moi.
Je suis un automate ; l’âme m’a été ôtée (…)
Tu me demandes si j’ai le désir de te revoir.
Appelles-tu cela du désir, quand on ne peut
vivre qu’en un point, qu’on en est arraché,
et qu’on a plus alors que le sentiment
de sa misère ? Réponds-moi donc ! Mes lèvres
sont-elles si froides ? (…)
Cette lettre est un charivari : je t’en consolerai
par une autre.
Le 10 mars 1834
Guy Cassiers
Jonathan Littell
METTRE À JOUR
LES MÉCANISMES
DE VIOLENCE
ET D’EXCLUSION
PAR LE LANGAGE
En adaptant sur scène le célèbre livre de Jonathan
Littell, Guy Cassiers poursuit son exploration
des mécanismes de la violence politique, thème
récurrent de son œuvre, en se focalisant ici sur
la violence exercée par le langage. Soucieux de
la montée des partis d’extrême droite et xénophobes en Europe et de la remise en cause des
fondements du projet européen, le metteur en
scène et son équipe ont développé, en prolongement du spectacle, deux projets culturels.
LONG READ : TEST
OF CIVILISATION
INVISIBLE CITIES
Angleterre,
Angleterre
En écho à ce premier projet, Invisible Cities est
une plateforme numérique participative, alimentée par les équipes des théâtres qui accueillent
le spectacle afin de construire une collection de
portraits de personnes sujettes à une discrimination par le langage. Pour ce projet, la MC93
a choisi d’engager une collaboration avec des
étudiants en Master à l’Institut d’études politiques de Paris, afin d’accompagner des lycéens
de Seine-Saint-Denis à repérer puis à collecter autour d’eux le témoignage de personnes
marginalisées.
Découvrez le site : invisible-cities.eu
« Si nous ne pouvons pas prédire
l’avenir, nous pouvons au moins
permettre au passé de nous guider
et de nous mettre en garde contre
les dangers de l’utilisation
de cette rhétorique ».
Lecture
Texte Aiat Fayez
Mise en voix Olivier Martinaud
Avec Daniel Delabesse, Loïc Riewer,
Zeid Ra’ad Al Hussein, Haut-Commissaire des
Nations unies aux droits de l’homme, octobre 2015
Mohamed Rouabhi (distribution en cours)
Son Bastien Varigault
Construit à partir des grandes phases du régime
nazi, le projet du Long Read est pour chaque
citoyen un véritable « Test of Civilisation », en
référence à l’expression utilisée par le viceprésident des États-Unis de l’époque, Walter
Mondale — au sujet de la conférence d’Evian
de 1938, dont l’objectif de l’augmentation des
quotas d’immigration des pays européens,
pour accueillir les Juifs fuyant le IIIe Reich avait
échoué.
Le projet numérique « Long Read : Test of
Civilisation » montre comment des mécanismes
langagiers de discrimination opèrent aussi bien
dans des sociétés ségréguées (Rwanda, Afrique
du Sud, Bosnie) qu’au quotidien. Il attire ainsi
notre attention sur la façon dont se développe
ce processus de discrimination dans nos sociétés
contemporaines, sans toutefois que l’on y prenne
garde et nous alerte sur son degré d’avancement.
À 20 h
La Dynamo de Banlieues Bleues, Pantin
Gratuit, sur réservation
Découvrez le site : testofcivilisation.eu
16
le 20
octobre
Aiat Fayez décrit un passeur dans la « jungle »
de Calais, avec un humour et une distance
inattendus. Si le théâtre est bien impuissant
et dérisoire face aux drames qui se jouent en
Méditerranée, l’auteur choisit le rire provocateur en questionnant notre part d’humanité :
sommes-nous capables de regarder le mal ?
Angleterre, Angleterre pose des questions
brutales sur le cynisme et l’indifférence, l’impuissance de l’Europe, la misère exploitée au
nom du profit et la facilité déconcertante avec
laquelle les trafics prospèrent en toute impunité. En mettant en scène le visage du mal,
le texte questionne aussi notre propre humanité. Et si le théâtre nous permettait d’ouvrir
notre regard et d’assister au spectacle les yeux
ouverts jusqu’au bout ?
Une première mise en voix du texte a eu
lieu le 14 mai 2016 dans le cadre du Festival
ZOOM à Théâtre Ouvert — Z.TO#2, en présence de l’auteur. Le texte mis en scène par
Olivier Martinaud sera créé en 2017- 2018 et
sera publié chez L’Arche.
Kurt van der Elst
b
du 13
au 16
octobre
ienveillantes
Joseph Banderet
L
e
s
17
ANGLE
GRAND
Dramaturgie 1
des mutations
Aperçus d’une résidence d’écriture
à la MC93 (sept 2015/juin 2017)
Daniel Conrod est auteur
en résidence à la MC93 depuis
septembre 2015 et jusqu’en juin
2017. Les deux textes qui suivent
témoignent de cette aventure.
-1- Détournée de son contexte d’origine, une
phrase de Paul Celan inspire et soutient cette
résidence d’écriture, « Personne ne témoigne
pour le témoin. » 2 Cette phrase qui m’obsède
me revient incidemment à l’esprit lors d’une
rencontre hasardeuse que je fais avec deux
éducateurs de rue dans le centre commercial
de Bobigny 2 (centre-ville) un matin d’octobre
2015. Comme l’on se dit très souvent dans
l’après-coup, tout ou presque part de là.
Préciser cependant que ce qui précède et fonde
cette rencontre est l’invitation d’Hortense
Archambault à cheminer pour un temps
à ses côtés, sous la forme d’une résidence
d’écriture dont tout est à inventer, alors qu’elle
est sur le point de prendre ses fonctions de
directrice de la MC93 et que son projet vise
substantiellement à rapprocher celle-ci des
habitants de Bobigny et, plus généralement,
du 93. Autre chose sans doute m’est revenu
à l’esprit en même temps que la phrase
de Celan, autre chose qui vient d’ailleurs,
d’infiniment plus loin, d’un souci spécifique
et intime du soin d’autrui, du soin de l’autre,
de tout ce qui concourt non pas au bienêtre mais au plus être des individus. C’est en
quelque sorte le souci de soi appliqué à autrui.
Ce pourrait être une définition de la culture,
ce pourrait être l’une des missions, sinon la
mission, des lieux de culture. Ce pourrait être
une mission de la littérature et de tout travail
d’écriture. Chère pensée amie de Michel
Foucault dont les derniers séminaires sont tout
entiers traversés par cette question du souci
de soi (epimeleia). Ne pas oublier aussi, ombre
portée, la fresque de Piero Della Francesca
(Arezzo) représentant le songe de Constantin
où l’on voit que dorment ou somnolent
les veilleurs supposés protéger le repos de
l’empereur à la veille d’un combat décisif.
Ou encore... cette question du poète Juvénal,
« Quis custodiet ipsos custodes ? » , c’est-àdire, « Qui veillera sur ces gardiens ? » Les
rebonds sont infinis jusqu’à la métaphysique.
-2- Comme on le voit plus loin, ce soin d’autrui
et/ou des autres est embarqué dans le tohu-bohu
des mutations du temps présent et de leurs
imprévisibles conséquences. Je les cite
en vrac : utilitarisme, consumérisme, obligation
de résultats, mise en chiffres et statistiques
du réel, injonctions publiques contradictoires,
délégitimation de la notion de service public,
mise en crise des métiers de l’intermédiation,
fonctionnalisme, généralisation massive des
pratiques de/du marché, individualisme de
masse... Peut-être ici une première réponse lapidaire, expéditive - à la question de départ.
Qui veillera sur ces gardiens ? Personne
probablement ! Il va donc être aussi question
de savoir si et comment il est possible de tenir
debout, dignement, pleinement, au milieu
des tempêtes.
À mutations, j’ai plusieurs fois été tenté de préférer changements
qui me semblait plus simple, plus modeste, seulement mutations qui n’est
pas un mot particulièrement beau a l’immense avantage d’incorporer l’idée
organique de transformation substantielle et c’est ce qui m’importe dans
ce projet : essayer d’établir un récit de la transformation.
1
Reprise par l’écrivain Italien Antonio Tabucchi, cette phrase prend
sous sa plume la forme d’une interrogation régulièrement attribuée
à Celan, « Qui témoigne pour le témoin ? »
Vincent Muteau
2
-3- L’atmosphère de la rencontre avec les deux
éducateurs évoquée plus haut est enjouée,
naturelle. Rien de déprimé ni de déprimant.
Presque de la gaieté. Deux jeunes éducateurs
de rue en maraude. Ils font leur travail.
Ils semblent heureux d’être qui ils sont, d’être
ce qu’ils font. Gaëlle Brynhole est avec moi.
En charge de l’action culturelle à la MC93,
elle les a reconnus de loin. D’où la rencontre.
D’où que nous allons droit au but, tu es qui
tu fais quoi on devrait se parler... À leur
manière, ils sont des travailleurs du soin :
ce que les Anglo-Saxons appellent le care.
Comme les psychologues, comme les
conseillers familiaux, comme les orienteurs
de toute nature, comme les assistantes
sociales, comme nombre de professionnels de
l’animation et de la médiation, sinon de l’action
culturelle (il faudra vérifier ce que recouvre
exactement ce champ du care). C’est dans
ce mouvement de la pensée que la phrase
de Paul Celan me vient à l’esprit.
À côté de la plaque, complètement à côté de
la plaque, puisque Celan pensait en l’écrivant
aux témoins directs de la Shoah. Si ces
deux jeunes gens (rattachés à Vie et Cité,
une association de prévention spécialisée
opérant sur Bobigny notamment) encore
jeunes dans leur métier, s’occupent des
jeunes, d’autres jeunes qu’eux, du centre-ville
de Bobigny (quartier Karl-Marx), alors qui
s’occupe d’eux ? Je veux dire, qui s’intéresse
à eux aujourd’hui ? Étrangement je leur
demande s’ils ont des réunions de synthèse,
comme si cela me regardait. Je m’y vois déjà.
J’y suis déjà. Qui s’intéresse à leur geste,
geste physique et trivial, mais aussi geste
partiellement héroïque ? Une intuition se
faufile pour la suite. Un métier, n’importe
quel métier, a-t-il une consistance que l’on
pourrait décrire minutieusement comme un
objet scientifique, ou que l’on devrait célébrer ?
Me viennent à l’esprit, presque en même
temps que la question de Paul Celan, d’autres
rencontres balbyniennes récentes avec Fanta
Sangaré des Femmes-Relais du quartier de
l’Abreuvoir, avec Guylaine Allix de la Maison
des Parents du quartier de L’Étoile ou encore
les bibliothécaires de Émile-Aillaud. J’en
suis au tout début de l’histoire. Un voyage
a commencé. Bobigny, ce sont plusieurs
quartiers séparés les uns des autres, des
modes de vie, des identités peut-être, le Pont
de Pierre, l’Étoile, Karl-Marx, L’Abreuvoir,
Paul-Éluard... Autant de lieux, des lieux d’ici,
disponibles, accessibles, des lieux du réel, des
accroches, des ancrages possibles pour moi qui
suis un résident hors les murs, la MC93 étant
fermée pour cause de travaux et devant
le rester pour une longue période recouvrant
à peu près la durée de ma résidence. Lieux
aussi légitimes qu’un théâtre, eût-il le prestige
de la MC93. J’imagine un fil nouant ensemble,
sans ordre particulier ni hiérarchie, D’autres
vies que la mienne d’Emmanuel Carrère, Un
métier idéal de John Berger et de Jean Mohr,
Louons maintenant les grands hommes de
James Agee et de Walker Evans, ou encore
les séminaires de Michel Foucault au Collège
de France consacrés au gouvernement de
soi et des autres (particulièrement ceux des
années 1981, 1982, 1983). Ma liste de libres
associations ne s’arrête pas là. Sera-ce de
l’écriture documentaire avec le plateau de
théâtre pour cadre et horizon ? Ou de l’écriture
relevant à la fois d’une forme d’anthropologie
pratique et de l’écriture « littéraire » ?
Ou quelque chose parcourant le spectre
des possibles, y compris numériques ?
19
Il n’est pas temps de choisir ni même
de s’attarder sur ce point. Choisir le plus tard
possible. Vivre l’expérience d’abord et, autant
qu’il est possible, la vivre avec des gens,
au milieu des gens.
-4- Les deux éducateurs en maraude me font
entrevoir la possibilité, une fois assumée la
fermeture des locaux de la MC93, d’étendre
ma résidence sur l’ensemble du territoire de
la ville de Bobigny, en chacun de ses quartiers,
en accord avec celles et ceux en charge du soin
aux populations. Leur demander une forme
d’hospitalité en échange d’autre chose, de ce
que je sais faire : regarder, écouter, être là au
physique comme au moral, partager, respecter,
questionner, patienter, durer, absorber,
prendre des notes, écrire... Du potlatch
appliqué. Deux ou trois semaines plus tard,
je me risque au téléphone avec l’animateur
de l’équipe des éducateurs de rue de Vie et
Cité (quartier Karl-Marx), Tony Delabre. En
gros je lui dis ceci : « Je ne viens pas vous voir
pour que vous m’aidiez, moi le bobo emprunté,
l’intello/l’écrivain parisien forcément pas à son
aise en territoire hostile, forcément coupable,
à entrer en contact avec vos ressortissants
en vue de rencontrer de vrais habitants,
je viens vous voir pour vous. C’est vous qui
m’intéressez. Je voudrais comprendre qui vous
êtes et ce que vous faites à la condition que
vous acceptiez ce que je suis, d’où je viens,
que je ne sais pas encore ce que je vais faire
des matériaux accumulés grâce à vous… »
Que je vienne pour eux… L’approche lui plaît.
Il le répète. C’est déterminant à ses yeux.
Ce que je ne lui dis pas cependant, c’est le mot
qui m’est venu à l’esprit, le mot poème.
Il m’est venu un peu comme ça, poème, un air
de Barbara, « La vie est un vivant poème... »
Un poème pour plus tard. J’aimerais que le mot
poème colore cette résidence, qu’il lui donne
un ton, un air, un style, un mouvement, une
liberté, une utopie, un espace de déplacements,
de déterritorialisation. Foucault, encore lui,
parle quelque part de l’émancipation comme
une écriture de soi, et de l’écriture de soi
comme l’acte de sa propre transformation.
Du coup, par « poème », j’entends
progressivement aussi, être toujours dans
le temps d’après, le contraire du ressassement,
du regret, de la misère en soi, de la tristesse.
Ce qui vient après, c’est ce qui me redonne
la main sur ma propre existence, le temps
d’après, c’est le texte d’après, qu’il soit livre
ou ne le soit pas. Le temps d’ici et maintenant,
c’est l’expérience loyalement vécue.
Loyalement signifiant : ne rien prendre aux
gens, ne rien leur dérober qu’ils n’aient voulu
me donner. Assez vite, en même temps que
se précise l’objet de la commande de la MC93,
j’appelle le livre à venir, puisqu’il est question
d’un livre, grand poème social et littéraire.
Hortense Archambault et moi sommes d’accord
là-dessus, que de mon périple balbynien
émerge d’une manière et par des chemins
que nous ne connaissons pas un grand
« poème » social et littéraire : il me semble
dans l’après-coup que les attentats terroristes
du 13 novembre 2015 ont élargi le spectre
de nos ambitions. Il se trouve qu’à l’initiative
du metteur en scène Lazare et de la MC93
se constitue après les attentats un groupe
de réflexion post 13 novembre et que je suis
invité à y participer.
ANGLE
GRAND
-5- Des entretiens reprennent ou commencent
sur cette base, la plupart du temps, ils sont
productifs. Mes interlocuteurs sont sensibles
à l’idée d’un bout de chemin fait ensemble,
(compagnonnage, échange, paroles partagées),
à mes interrogations/intuitions autour de la
question du soin, au désir d’utopie partielle
que je leur présente. Par utopie, j’entends que
nous pourrions déspécialiser nos pratiques,
mettre en commun ce qui nous est réellement
commun. Je pense notamment à tout ce qui
rapproche organiquement et politiquement
le care et la culture, champ très peu exploré
en France, la culture ayant depuis longtemps
consommé sa rupture avec le « social réel »
au nom de l’excellence, s’agissant de la
culture subventionnée, ou au nom du marché,
s’agissant de la culture industrielle.
Plusieurs mois plus tard, au cours d’un échange
informel avec l’historien Patrick Boucheron
auquel je décris ma démarche empirique,
celui-ci me parle de l’École de Chicago et de
la pratique de l’observation participante par
quoi elle se distingue. Je tombe des nues. Mon
idée de départ de minirésidences avec chaque
fois dans le viseur une thématique spécifique
propre aux finalités de chacune des structures
approchées (parentalité, alphabétisation,
élaboration d’un projet social, réflexion sur
le métier d’éducateur...) évolue au fil des
mois. Beaucoup de mes petites planifications
internes tournent court. Peuvent l’expliquer
le manque de temps, la difficulté d’entrer
dans l’espace-temps des uns et des autres,
les réflexes de protection légitimes des
structures ou de leurs personnels, l’incongruité
de ma présence ou de ma pratique faite
de non directivité et de passivité apparente,
le sentiment que peut-être tout ça est
du blabla au regard des urgences et
de la nécessaire efficacité du travail...
Je réalise que nombre des métiers concernés
sont des métiers du faire et que ce faire
comporte une part importante de procédure.
Il n’y a rien là qui empêche vraiment, il me
faut juste prendre acte que le temps des autres
n’est pas le mien. Patience dans l’azur...
À la fin du mois de juin 2016, sont entrés d’une
manière ou d’une autre dans la dramaturgie
des mutations la Maison des Parents (Étoile
principalement), l’association d’éducateurs
de rue Vie et Cité (Karl-Marx et SalvadorAllende principalement), le centre social CAF
Le Village (Pont de Pierre), les Femmes-Relais
(L’Abreuvoir), la bibliothèque municipale
de Bobigny (bibliothèque de quartier
Émile-Aillaud principalement), la MIRE
(Mission locale, antenne de Bobigny),
un regroupement informel d’assistantes
sociales scolaires relevant de divers
établissements. Naturellement approchée à
plusieurs reprises, la maison des adolescents
de l’Hôpital Avicenne, dite la Casita, n’a pas
souhaité donner suite à ma proposition.
Entre autres structures/associations devant être
approchées en septembre 2016, l’association
Sauvegarde 93, le Temple Sikh de Bobigny,
le Rugby-club de Bobigny (section filles),
l’UEAJ (Unité éducative d’activités de jour)
de Pantin dans le cadre d’un projet co-produit
avec Canal 93 (Bobigny). Cette mise en place
un peu sinueuse des choses n’a de sens qu’en
raison de la durée de cette résidence. Elle n’est
pas exclusive des rencontres hasardeuses ou
de nécessité ni des compagnonnages de fait.
Il y en a pas mal, il y en aura d’autres.
Je pense à une écrivaine publique de la ville
croisée au tout départ et dont le contrat
de travail n’a pas été renouvelé, à la directrice
de l’école primaire Marie-Curie, à une famille
en passe de devenir famille d’accueil, à un
gardien d’immeubles, à l’équipe de Canal 93,
à la Librairie de Bobigny...
Au cours de mes différents échanges,
reviennent (mais pas toujours, j’insiste
sur la nuance) sur le tapis d’une manière
ou d’une autre, à un moment ou à un autre,
un sentiment de fragilisation, l’expérience
d’une délégitimation, de l’inquiétude face à
l’avenir, la peur plus ou moins raisonnée de
disparaître, le déconventionnement, les coupes
budgétaires, la réduction des moyens et
des effectifs, la précarisation des emplois,
la lassitude de devoir répondre à des
injonctions paradoxales de la part des tutelles,
la sensation de n’être plus toujours soutenus
par des usagers devenus consommateurs
de services, des changements importants
dans leurs comportements... J’observe que
ces ressentis sont, sauf exception, davantage
exprimés par des responsables que par des
employés. Je note également la difficulté
qu’il peut y avoir pour un travailleur social
à se plaindre de sa propre situation par
comparaison aux situations que vivent
les usagers qu’il reçoit. D’un côté, être
en première et souvent dernière lignes, tout
en constatant son impuissance, de l’autre
exercer ses missions dans un angle mort de
la société, sans que cela se voie, le travailleur
social étant peu ou prou devenu la voiture-balai
de l’hypermodernité libérale.
-6- Cette résidence porte un titre :
dramaturgie des mutations. Ce titre manifeste
une intention : tenter d’y voir clair dans
le contemporain à travers des formes écrites.
Dramaturgie doit s’entendre ici comme
nécessité de dire, d’élaborer, de figurer,
de produire, de construire, d’écrire avec
le souci ou le désir d’inventer des formes
propres à rendre compte d’une réalité jugée
digne a priori d’être rapportée ou racontée
ou magnifiée ou chantée ou pleurée ou
déplorée ou exaltée ou ou ou... Il entre dans
le mot dramaturgie quelque chose de plus :
un impératif d’ordres politique et artistique.
L’artiste est avec les gens, du côté des gens,
là où ils sont. Ce n’est pas qu’il ait à les
évangéliser, ni à les éclairer sur ce qu’ils vivent
(ils le savent mieux que quiconque), ni non
plus qu’il soit à part (il est par bien des aspects
lui aussi menacé d’effacement). C’est que
sa place est à cet endroit. Point.
Quant au terme « mutations », il recouvre
indifféremment le changement récent de
direction à la MC93, les importants travaux
de rénovation en cours, les réflexions engagées
par Hortense Archambault quant au devenir
d’un théâtre public sur ce territoire-là,
le changement de municipalité en 2014,
la presque disparition (pour l’instant) du parti
communiste sur Bobigny, l’effacement, sinon
l’arasement, inéluctable en apparence d’un
progressisme de type « ceinture rouge » tel qu’il
s’est construit par étapes (entre-deux guerres/
l’après Seconde Guerre mondiale/les Trente
Glorieuses), mais aussi de toute perspective
pour l’instant néo-progressiste, le tout récent
basculement à droite de la région Ile-deFrance, le renforcement de l’implantation
d’un Islam revendiqué dans un contexte
marqué par les attaques terroristes de janvier
et de novembre 2015, un communautarisme
ethnico-culturo-religieux en passe de devenir
une norme sociale pour longtemps rédhibitoire,
un éloignement des populations vis-à-vis de
la chose culturelle publique telle que pensée
par un Georges Valbon (maire bâtisseur de
Bobigny de 1965 à 1996), cet éloignement allant
de pair avec un dépérissement symbolique
progressif des politiques culturelles publiques,
tant aux niveaux local que national...
À ces changements spécifiquement balbyniens
ou franciliens s’ajoutent les mutations propres
à la société française et peu ou prou aux
sociétés occidentales : crise à peu près générale
des progressismes, montée en puissance de
la question des identités et des nationalismes,
impuissance revendiquée ou consentie
de l’action publique, effets sur les pratiques
culturelles de la révolution numérique ou
de la globalisation néo-libérale, amplification
de l’individualisme de masse, persistance
d’un chômage de masse des jeunes, mise en
échec du modèle d’intégration à la française,
polarisation du débat intégration/assimilation,
conflictualisation des rapports entre
les classes moyennes et les classes pauvres,
pétrification des positions sociales (que je
préfère à la notion de panne de l’ascenseur
social), accroissement inédit des inégalités,
contestation des élites, autonomisation des
individus et des groupes sociaux, radicalisation
du processus de digitalisation du monde
et des individus (ou ubérisation) poussant
à leur disparition toutes sortes de métiers
et menaçant la socialisation des gens...
La liste est extensible. Le chantier est infini.
-7- Le 18 février 2016, a lieu à la bibliothèque
municipale Elsa-Triolet de Bobigny une
soirée de lecture publique. Elle est organisée
conjointement par la bibliothèque et la
MC93. J’en suis l’auteur invité. Cette soirée
marque l’officialisation de ma résidence.
Elle matérialise obscurément la réflexion
très embrouillée que j’ai engagée dès le
mois d’octobre autour de l’idée de temps
de restitution ponctuant rituellement et
organiquement cette résidence, lui donnant
son rythme et sa visibilité, permettant de
dessiner des contours de plus en plus précis,
de présenter ou d’affiner des hypothèses
d’écriture, d’élargir la problématique du soin
au culturel et, pourquoi pas, de nous
rapprocher du plateau d’un théâtre3.
Cette réflexion procède également du postulat
selon lequel l’artiste résident doit donner
quelque chose en échange de ce qu’il reçoit de
son commanditaire, en l’espèce, la MC93, mais
aussi de ce qu’il reçoit des gens qu’il rencontre.
Jusque là, ce ne sont que des mots. Du coup,
la soirée du 18 février à laquelle assistent
quelque quatre-vingts personnes devient
de facto le premier de ces temps de restitution.
Comme d’habitude, au fil de ce voyage,
je m’aventure, j’improvise. Tout me semble
neuf. Inédit. Mobile. Agréablement instable.
Parfois vertigineux.
Très présente les premiers mois de ma résidence, cette perspective
du plateau de théâtre comme horizon s’est progressivement éloignée
(mais non effacée) de ma pensée. En réalité, elle s’est déplacée. Elle a muté.
Je ne sais pas en dire plus pour l’instant, sinon que j’expérimente au fil
de la résidence la nécessité pratique d’une scénographie minimale lors
de chacune de mes prises de parole en tant qu’auteur.
C’est la première fois que je lis publiquement
à Bobigny des extraits de deux de mes
livres, les derniers parus, celui consacré
à l’histoire des Pronomades4 et L’Atelier
des morts5. Je combine à la hâte un petit
programme d’extraits de l’un et de l’autre.
Bien que différents, les deux livres se parlent.
Presque une découverte. Grâce à une
scénographie minimale mais très efficace,
les techniciens de la MC93 contribuent
grandement, et à ma grande surprise, à ce
que cette lecture revête un caractère un peu
exceptionnel. C’est une première absolue
pour moi. Au cours de cette soirée, sont
aussi présentés par Hortense Archambault
et moi-même les enjeux et les axes de la
dramaturgie des mutations. Quelque chose
fait écho. Les gens sont émus. Je flotte.
Je pourrais prendre peur.
D’abord appelés Potlatchs dans mes notes
à la MC93, ces temps de restitution mutent
à leur tour. Bientôt, je les appelle banquets.
Banquet, c’est beau, c’est net, c’est franc,
c’est multiple, repas de noces, tablées, cinéma
italien, familles et cousinages, nappes blanches,
chansons, danser, voler sur les parquets de bal,
Cimino, Platon et sa caverne, dire à n’en plus
finir, jusqu’à perdre haleine, ne pas être seuls,
combattre l’air du temps, penser, partager,
être vivants… Il y en aura quatre, un par saison,
quatre poèmes vivants, chacun aura
sa forme, son esprit, ses enjeux spécifiques,
son lieu particulier, jamais le même, là où
je suis accueilli et où je rencontre les gens.
Il y aura chaque fois de la nourriture et autre
chose, comme des lectures publiques, peut-être
des débats, peut-être des chercheurs, peut-être
des questionnements apportés par les acteurs
sociaux de Bobigny ou d’ailleurs, de la danse
peut-être, de la musique peut-être... Chaque
fois, la MC93 s’associera à d’autres structures
de quartier, égalité des droits et des devoirs.
Comment on fait tout ça ? Premières réponses
avec le centre social de la CAF du Pont de
Pierre, Le Village, où je passe deux semaines
full time au printemps. Le premier des quatre
banquets a lieu ici, le 4 juin, c’est l’aprèsmidi, impossible d’organiser le dîner prévu
initialement en raison des dates du ramadan,
on a donc appelé cela : grand goûter sous les
arbres. Autour de la MC93 et du Village, se
sont agrégés la Maison des parents de L’Étoile,
la compagnie Sirènes, les associations de
quartier Bouquet de loisirs et Tout azimut
et le Bibliobus. Tous âges confondus,
sont présentes environ cent personnes,
majoritairement des femmes et leurs enfants.
Dans le petit square situé devant le centre
social, je lis le « Discours aux habitants » que
j’ai écrit pour la circonstance. Il m’en a coûté.
Je me présente à ces gens comme écrivain, je
leur dis d’où je viens, je leur explique pourquoi
je suis là et ce qui m’anime. Me placer ainsi
au centre du jeu n’est pas du tout ce que
j’avais imaginé. J’y suis poussé, l’épée dans
les reins, par plusieurs de mes partenaires,
dont le directeur du centre social. Jamais fait
ça de ma vie. Jamais dit ça comme ça, devant
des gens que je ne connais pas, et même devant
des gens que je connais, salut, me voilà, je suis
écrivain. Or c’est justement ce qu’il fallait faire
ici, tête et voix hautes. Certitude immédiate
et partagée par nombre des présents. Preuve
en est qu’après mon adresse aux habitants,
des voix se lèvent dans l’assistance.
Des femmes surtout se jettent à l’eau, quelques
hommes finissent par les suivre. Des voix,
des pensées, des corps qui se disent, disent
qui ils sont, d’où ils viennent, pourquoi ils
sont là. De quoi trembler. C’est ce qui restera.
Après le discours et les prises de parole,
le grand goûter. À l’intérieur du centre social,
un somptueux buffet de pâtisseries fabriquées
par des femmes du quartier lors de trois
ateliers d’anthologie animés par Emmanuelle
Augereau de la MC93, un atelier de peinture
pour les enfants qui ne désemplit pas. Dehors,
le Bibliobus tourne à plein régime, les tables
de kermesse ont été alignées, des bancs de part
et d’autre. On bavarde. On se gave de sucreries.
Une femme me dit en riant, « Je n’ai pas
envie de rentrer chez moi ! » Ses compagnes
approuvent.
Dans mon esprit, il s’agit, le disant ou ne le
disant pas, de construire une communauté
d’intérêts par coalescence dont la MC93 serait
le catalyseur et/ou le principe unificateur,
ou encore la tête de réseau, mon intuition
étant qu’elle (la MC93) ne pourra plus jamais
n’être que lieu de monstration d’une excellence
artistique auto-limitante, mais lieu de vie,
lieu d’échange et de partage des connaissances
et des expériences, lieu d’élaboration d’une
pensée concrète, université informelle du
contemporain. Peut-être irons-nous jusqu’à
refonder dans et pour le contexte d’aujourd’hui
les principes et les pratiques de l’action
culturelle placée au cœur — et non plus à la
marge — du réacteur. En même temps qu’il est
une expérience, le banquet est aussi une boîte
à outils mise à la disposition de la MC93 et des
partenaires de la dramaturgie des mutations.
Prochain banquet en octobre sur le quartier
de L’Abreuvoir. Il associe les Femmes-Relais,
la bibliothèque de quartier Émile-Aillaud
et la MC93. Il est question cette fois d’un
dîner de travail réunissant principalement
les professionnels du soin impliqués d’une
manière ou d’une autre dans le projet.
Pronomade(s) ou la petite fabrique
d’humanité – Pronomade, Centre national
des arts de la rue Haute-Garonne
6
-8- Implicite au départ, comme une possibilité
encore vague, le recours à l’image6 dans
le développement de la dramaturgie
des mutations est d’abord laissé de côté.
Il surgit en force en même temps que se
réalise concrètement quelque chose du projet
et qu’apparaissent concomitamment mes
vraies grandes premières interrogations.
Elles concernent le réel des institutions
ou structures partenaires, le possible et
le moins possible, les résistances, le choc
des temporalités, les crises internes, la mise
à l’épreuve de ma patience... Je pourrais
m’obstiner, vouloir précipiter les choses alors
qu’il faut ouvrir encore et encore, agrandir,
élargir, contourner, risquer d’autres intuitions,
inventer d’autres gestes. Épouser les formes
du réel, sinon le magnifier, plutôt que
le brutaliser. Il me semble qu’un matin, à peu
près dans la même période, je me réveille
avec la sensation aussi tranchante qu’une lame
qu’être seul à mener cette aventure ne peut
pas être un but en soi. Il n’y a pas d’artiste
omnipotent... L’image, car c’est à elle que
je commence à penser sérieusement, est tout
autant un élargissement naturel du projet,
son expansion physique, qu’une riposte à mes
impatiences ou à ma peur de l’impuissance.
Un dépassement autant qu’un antidote.
GRAND
3
ANGLE
20
4
5
L’Atelier des morts, Éditions Buchet/Chastel
On peut tout autant se dire que le son (recueil de paroles,
récits de vie…) devrait logiquement trouver sa place à l’intérieur
de la dramaturgie des mutations.
7
Les passagers du Roissy-Express, Éditions Point
8
Les Autonautes de la cosmoroute, Éditions Gallimard
21
C’est un acte qui change la donne. Les Grecs
anciens avaient un concept magnifique pour
désigner ce mouvement paradoxal de la
réflexion humaine : la mètis ou l’intelligence
rusée (celle d’Ulysse ou d’Hermès par
exemple). Fin de l’hiver 2015-2016, j’en viens
à me dire qu’il faut ouvrir un nouvel espace
dans le projet, inventer une libre échappée,
une ligne de fuite, un espace de jeu, un autre
récit, quelque chose aussi qui permette
d’échapper au face-à-face ou à une trop grande
personnalisation du projet. Complice et ami,
co-show-runner de « La Vérité » (festival
d’Aurillac 2015), le photographe et vidéaste
Vincent Muteau entre alors en scène. Il est
le chevalier blanc de l’histoire, le joker. Je lui
raconte tout ça. Il s’en amuse. Il entre dans
la danse. Avec le recul, notre idée du Grand
Saut, d’un grand saut, vient de là. Il n’y a pas
que les mots qui pensent. Il ne peut jamais
n’y avoir que les mots qui pensent.
Entre temps, sur les conseils de Catherine
Boskowitz, toute nouvelle camarade et
complice dans cette cartographie balbynienne
encore largement en devenir, je lis Les
passagers du Roissy-Express de François
Maspéro, photographies d’Anaïk Frantz.
Outre qu’elle est un éblouissement, cette
lecture réactive en moi l’incroyable force
de vivre que je me rappelle avoir trouvée au
début des années quatre-vingt dans la lecture
d’un autre livre encore plus féerique,
les Autonautes de la cosmoroute de Julio
Cortazar et Carol Dunlop. Voyager, bouger,
élargir l’angle de vue des paysages contre
les paysages eux-mêmes.
Une chose sort de là : que la fable ne soit
pas absente du livre auquel je songe.
Très vite, le Grand Saut est avec les banquets
et le grand poème social et littéraire à venir,
la partie la plus visible de la dramaturgie
des mutations. Il a pour objet de réaliser
une série de photographies des professionnels
du soin sollicités dans le cadre du projet
depuis le commencement et une trentaine
de petits films vidéo représentant un saut filmé au ralenti/exécuté par les mêmes,
cette fois en petits groupes et manipulant
un accessoire de théâtre ou utilisant/
détournant un élément de costume, l’un et
l’autre prélevés dans les réserves de la MC93.
Nombre de lecteurs l’auront compris, les
grandes ailes du photographe américain
Philippe Halsman, père et maître s’il en est
de la jumpologie, planent au-dessus de nos
têtes. J’étais seul à bord. Nous sommes devenus
deux. Avec ces photographies et ces objets
filmés, nous voulons garder trace de toutes
les personnes rencontrées au fil de l’avancement
du projet. C’est extrêmement important.
Nous voulons aussi constituer l’amorce
d’une collection d’images pour la MC93
(libre à elle de poursuivre cette démarche
avec d’autres catégories d’habitants et d’acteurs
locaux). Enfin, nous voulons faire entrer
symboliquement dans la maison MC93, lors
de sa ré-ouverture, via une exposition encore
à définir, tous les professionnels du champ
social ayant participé à la dramaturgie
des mutations. Ainsi, seront manifestés
solennellement l’enjeu et le sens de ce projet,
à savoir œuvrer loyalement et sans orgueil
au rapprochement de la MC93 et des habitants
de Bobigny par inclusions successives.
Daniel Conrod, juillet 2016
Fouzia El Madkour, référente famille au centre social Le Village
ANGLE
GRAND
GRAND
L’un des plus anciens poèmes écrits par un être humain raconte
l’errance d’un homme de retour de la guerre, cela se passe sur les mers
déchaînées quelque part entre la Turquie et la Grèce au viiie siècle avant
notre ère, cet homme s’appelle Ulysse, son voyage est chargé d’épreuves
et de malheurs, il dure dix ans, dix ans durant lesquels Ulysse ne cesse
de perdre son chemin jusqu’à ce que les dieux, maîtres des cieux infinis
et de la destinée des hommes, acceptent qu’il rentre enfin chez lui
et retrouve son épouse, son père et son fils. Trois questions reviennent
en boucle au cours de l’exil d’Ulysse sur les mers, trois questions
toujours posées ensemble, trois questions parmi les plus courantes,
les plus importantes aussi, auxquelles un être humain ait à répondre
au cours de son existence, quel est ton nom, qui sont tes parents,
quelle est ta ville (ville désignant à la fois le lieu et ceux qui l’occupent,
les habitants, la famille élargie, les voisins...) ? Le poème s’appelle
l’Odyssée, on dit qu’il a été écrit par un certain Homère, il raconte
à travers des récits imagés la traversée de la vie humaine, celle
des anciens comme la nôtre aujourd’hui, les poètes et leurs poèmes
servent d’abord à ça, raconter la vie humaine.
Au départ, il y a Marie ma mère et Léon mon père, Marie est morte
en 1955, elle avait 47 ans, Léon, en 1988, il en avait 80, Marie était
comme on dit femme à la maison, Léon, employé de bureau à l’EDF,
je suis le dernier de leurs enfants, le dixième, à l’époque, dans le Jura,
il y a encore beaucoup de familles nombreuses, c’était une fierté pour
les gens, une bénédiction, mes parents étaient très pieux, la religion
comptait dans leur vie, comme dans la vie de leurs parents et des
parents de leurs parents, il n’y avait pas de richesse dans notre famille,
il n’y en a jamais eu, si je remonte un peu dans le temps, je vois se
dessiner un peuple d’employés, de concierges, de gardes-champêtres,
de paysans, de marchands ambulants, d’épiciers de village, de gens
modestes, pour ce que j’en sais, ils étaient simples, rudes, travailleurs,
la guerre de 14-18 a fait des ravages parmi eux, comme dans la plupart
des familles, je vois sur les photos anciennes des gens habillés en noir,
ils ont le visage triste, ça vient de là, ça vient aussi de la fatigue du
travail, des corps trop tôt lessivés, de la difficulté qu’il y avait à gagner
sa vie, à nourrir sa famille, de ma ville natale, je me rappelle l’école
primaire, la sciure de bois sur les planchers, la période des vendanges,
les jours de neige, les soirs d’été qui n’en finissent pas, les feuilles
d’automne dans lesquelles j’enfonce mes pas, les cérémonies civiles
et religieuses, durant toute mon enfance, j’ai entendu parlé de la guerre,
la Seconde Guerre mondiale, un de mes oncles avait collaboré avec
les Allemands, la guerre d’Algérie, deux de mes frères ont été appelés
là-bas, ils n’en ont plus jamais reparlé, durant toute mon enfance,
j’ai entendu parler de la guerre, sous la table ou derrière les portes,
j’écoutais les adultes chuchoter, la guerre revenait très souvent dans
leurs conversations, il y a eu trois guerres en moins de cinquante ans,
la Première Guerre mondiale commence en août 1914, la guerre d’Algérie
se termine avec les accords d’Evian signés le 18 mars 1962, ce sont toutes
ces choses mélangées qui finissent par fabriquer un écrivain, c’est-à-dire
quelqu’un pour qui les mots, le langage sont capables de raconter
les choses de la vie, les plus simples comme les plus compliquées,
les belles autant que les laides, celles du dedans, ce qui se passe
à l’intérieur des maisons, comme celles du dehors, ce qui se passe
au dehors des maisons.
Je suis un boiteux, c’est une manière de m’exprimer pour dire que
j’ai grandi de travers, comme j’ai pu, ne pas connaître sa mère, c’est
avancer dans la vie avec une seule jambe, ce sont des choses qui
comptent, j’ai haï mon père durant toute mon enfance, mon adolescence
et ma vie de jeune adulte, j’étais en révolte contre lui, une autre sorte
de guerre, j’ai même écrit plus tard un roman pour la raconter, cette
guerre, c’est un livre en grande partie raté, mais il existe, c’est déjà ça,
aujourd’hui, je suis en repos avec mon père, j’ai compris le chagrin qui
a été le sien, nous avons signé la paix des braves, par-dessus le silence
de la mort, la paix, c’est ce qui permet à l’écrivain de consoler les vivants
et les morts, ça sert aussi à ça, un écrivain, à trouver les mots
de la consolation, à les dire au nom de tous, surtout de ceux qui ne
les ont pas, ces mots-là, l’une de mes sœurs, celle à laquelle je suis
le plus attaché parce qu’elle s’est occupée de moi après la mort de notre
mère, me dit souvent ceci, elle a 81 ans, c’est une femme qui réfléchit
beaucoup, « en écrivant tes livres, tu t’occupes de ce que nous ne
pouvons pas faire, même si je n’aime pas tout ce que tu écris, même
si nous avons des désaccords, pour moi, c’est important que quelqu’un
le fasse, que tu le fasses, j’ai toujours pensé au fond de moi que
c’est ce que tu ferais de mieux dans ta vie, alors continue », un écrivain
est souvent quelqu’un qui fait quelque chose que les autres ne peuvent
pas faire, ou ne veulent pas faire, parce que le chemin pour le faire
est difficile, parfois aride, mais attention, cela ne fait pas de lui un être
supérieur, au-dessus des autres, bien au contraire, cela lui donne
des responsabilités particulières.
Comme tout le monde ou presque, j’ai travaillé pour gagner ma vie,
j’écrivais des livres quand je pouvais, aucun de ces livres ne m’a
permis de gagner de l’argent, en près de quarante-deux ans d’activité
professionnelle, j’ai exercé cinq métiers différents, j’ai été deux fois
au chômage, je suis un produit de la formation permanente en
entreprise, les quinze dernières années de ma vie professionnelle,
j’ai été journaliste dans un magazine culturel, durant cette période,
j’ai beaucoup écrit sur les relations entre le culturel et le social,
la culture et les gens, la culture populaire sous toutes ses formes,
la culture des banlieues, l’éducation populaire, l’histoire de l’immigration,
les initiatives de toutes sortes dans les quartiers, j’ai fait beaucoup
de reportages en Afrique sur ces questions, Guinée-Conakry, Rwanda,
Afrique du Sud, Mozambique, Madagascar, Algérie, Angola, Bénin,
Cameroun..., je fais partie d’une histoire qui remonte loin dans le temps,
j’appartiens à une génération de militants culturels qui s’est battue
pour l’accès de tous à la connaissance, au savoir, aux arts, à la lecture,
Bonjour à chacune et à chacun d’entre vous et sincèrement merci d’être
venus en nombre, vous n’y étiez pas obligés, vous ne me connaissez pas,
vous avez vos propres occupations.
Je m’appelle Daniel Conrod, je me présente à vous comme écrivain,
je n’ai jamais fait ça devant autant de gens, j’ai toujours utilisé d’autres
mots que le mot écrivain pour dire ce que je suis, ce que je fais, j’avais
honte, j’avais l’impression de trahir les miens, je viens d’une famille
où l’on ne se met pas en avant, où l’on doit rester à sa place, j’ai le trac,
c’est pourquoi vous voyez derrière moi cinq silhouettes en contreplaqué,
elles représentent de vrais habitants de Pantin, elles ont été réalisées par
les artistes de la compagnie Sirènes dans le cadre de son nouveau projet,
Passerelles, j’ai voulu qu’elles soient derrière moi pour être un peu moins
seul tandis que je vous parle, il faut toujours avoir des alliés, dans toutes
les circonstances de la vie, si je suis là, face à vous un samedi après-midi
de juin, ce n’est pas pour faire le beau, ça me coûte d’occuper la place
centrale, d’être regardé par autant de personnes, en général, un écrivain
est plus à l’aise à sa table de travail, à l’abri des regards, si je suis là,
c’est parce que j’ai besoin de rencontrer votre cœur et votre pensée,
de vous parler, de vous convaincre, d’être parmi vous, beaucoup de
choses nous séparent certainement, nos vies sont très différentes,
beaucoup de choses nous rapprochent aussi, tous nous avons des
parents, tous nous sommes nés quelque part d’une mère et d’un père,
tous nous désirons avoir une vie meilleure, digne, belle, heureuse, tous
nous appartenons à un peuple, tous, femmes, hommes, enfants, jeunes
ou vieux, valides ou malades, nous voulons être entendus, considérés
et aimés.
Vous dire ce que je fais là n’est pas simple, je vais donc vous proposer
de remonter le temps avec moi.
J’habite à Paris dans le xviiie arrondissement, entre Marx Dormoy et
la Porte de La Chapelle, vous êtes nombreux à connaître ce quartier
de Paris, c’est l’une des principales portes d’entrée de ce pays appelé
France, je suis arrivé à Paris en 1973, sans travail ni qualification ni
logement, j’avais 21 ans, je voulais faire ma vie, dans la même journée,
j’ai trouvé un emploi non qualifié dans un bureau et une chambre de
bonne dans les beaux quartiers, non pas parce que j’étais plus malin
qu’un autre, loin de là, j’étais un jeune homme timide, je ne savais rien
faire, septembre 1973, beaucoup parmi vous n’étaient pas nés, c’est la
fin de ce qu’on a appelé les Trente Glorieuses, il y avait encore du travail
pour à peu près tout le monde, de la croissance économique, un jeune
avait des opportunités, on avait en tête de changer la vie et la société,
1968 était encore proche, on avait la certitude qu’on y parviendrait,
on n’y est pas arrivé.
Je suis né dans le Jura, en Franche-Comté le 9 juin 1952, j’aurai 64 ans
dans quelques jours, ma ville natale s’appelle Arbois, c’est la campagne,
pas très loin de là, la Suisse, l’Allemagne. Arbois compte un peu plus
de 3 700 habitants, on y cultive la vigne, on y fabrique du vin, c’est
encore un beau et vrai et noble pays, les gens y sont droits et rugueux,
lorsque j’étais enfant, il y avait des usines dans cette ville, surtout
familiales (menuiserie, tournerie, mécanique, scieries...), il n’y en
a plus aucune, plus d’ouvriers non plus, il y avait aussi des paysans,
des fermes, des animaux un peu partout, tout ça a disparu, il n’y a plus
que le commerce du vin et le tourisme, beaucoup de gens là-bas ont
le sentiment qu’ils sont condamnés à disparaître à petit feu, comme
ont disparu les usines et les fermes, les gens de la campagne souffrent
comme souffrent les gens de la ville, un écrivain, ça sert aussi à ça,
comprendre la souffrance des gens, l’espoir qu’ils ont perdu, leurs
défaites, leurs peines.
ANGLE
24
à la beauté, à l’exercice de la pensée libre, à la formation permanente
tout au long de la vie, avant nous, beaucoup d’autres s’étaient battus
pour les mêmes causes, plus que nous, souvent au péril de leur vie,
je pense notamment aux mouvements de résistance durant la Seconde
Guerre mondiale qui avaient placé la culture et l’éducation tout
en haut des enjeux de la reconstruction de ce pays, dans les années
70 - 80 quelque chose s’est progressivement désarticulé à l’intérieur
de la société, cette façon de voir les choses telle que je l’ai décrite
a perdu du terrain, il y a eu les bouleversements économiques et
technologiques, le recul des idées de progrès, le chômage de masse,
particulièrement le chômage des jeunes qui est la honte de ce pays,
le développement de la précarité sous toutes ses formes, la panne de
l’ascenseur social, l’individualisme, le culte de l’argent, de la puissance,
de la brutalité, du « moi je », le repli des communautés sur elles-mêmes,
la peur de l’autre sous toutes ses formes s’est insinuée dans nos cœurs
et nos pensées comme un poison, le monde a changé, il continue de
changer, ces changements nous transforment en profondeur, que nous
le voulions ou non, le meilleur et le pire se mélangent, nous sommes
un peu perdus, et pourtant, je continue de penser que l’accès à la
culture, aux arts et à la connaissance est une porte d’entrée universelle,
qu’elle l’est encore plus pour ceux qui n’ont rien ou pas grand-chose,
d’une certaine manière, c’est ce qui explique ma présence aujourd’hui
parmi vous et ces dernières semaines au centre social Le Village,
que je remercie pour son hospitalité.
Depuis le mois d’octobre dernier, à l’invitation de la Maison de la
Culture (MC93) à Bobigny et de sa nouvelle directrice Hortense
Archambault, j’ai entrepris une grande enquête de terrain sur ce que
j’appelle les métiers du soin, c’est-à-dire les métiers dont l’objet est de
s’occuper d’une manière ou d’une autre des gens, de nous, ces métiers
du travail social regroupent les éducateurs et éducatrices de rue, les
éducateurs et éducatrices spécialisés, les assistantes sociales, les
médiateurs et médiatrices interculturels, les conseillères en parentalité,
les animateurs et animatrices sociaux, les conseillers et conseillères
d’orientation professionnelle..., la liste n’est pas close, j’y ai même ajouté
des bibliothécaires, une écrivaine publique, un gardien d’immeubles
et une famille d’accueil, arrêtons-nous un instant, que deviendrionsnous sans eux, sans eux, quel serait le visage de la société ?
Pourquoi je me suis intéressé à ces métiers ? Pourquoi m’être engagé
dans cette vaste enquête que personne ne m’a demandée ? D’abord
tous ces métiers sont de beaux métiers, grâce auxquels notre vie à tous
au jour le jour, votre vie sur ce quartier, sont rendues moins difficiles,
souvent plus heureuses, ce sont les métiers les plus au contact des
populations les plus fragiles, les plus exposées aux violences de notre
temps, ce sont des métiers mal connus, mal considérés, mal payés,
alors qu’ils nous permettent de continuer de vivre ensemble dans une
même société, sans nous battre ni nous tuer, de résoudre nos difficultés,
de sortir de notre isolement, de rencontrer les autres, voilà pour mes
raisons principales, j’ai quelques raisons plus intimes, mais il n’est pas
encore temps de les dire publiquement, alors depuis le mois d’octobre
dernier, je suis allé à la rencontre de toutes sortes de gens dans
les différents quartiers de Bobigny, les médiatrices interculturelles
des Femmes-Relais de l’Abreuvoir, les éducateurs et éducatrices de rue
de Vie et Cité à Karl-Marx et à l’Étoile, les conseillères en parentalité
et les éducatrices de la Maison des parents à Berlioz et à l’Étoile,
les bibliothécaires de la bibliothèque de quartier Émile-Aillaud,
les conseillers et conseillères professionnels de la Mission locale,
les assistantes sociales scolaires des établissements scolaires
de Bobigny..., d’autres lieux, d’autres métiers ont été ou seront
approchés, ma démarche auprès de ces gens est toujours la même,
je frappe à leur porte, je leur dis qui je suis, comme je le fais avec
vous aujourd’hui, et pourquoi je viens les voir, je leur demande
de me donner un peu ou beaucoup de leur temps, alors mon travail
commence, à partir d’entretiens, d’observations de terrain, de rencontres
informelles, de recherches, de lectures, comme je l’ai fait ces dernières
semaines et vais continuer à le faire avec les travailleurs sociaux du
Village, mes interrogations sont un peu toujours les mêmes, dis-moi
ce que tu fais, dis-moi comment tu le fais, dis-moi pourquoi tu le fais,
plus tard, un livre racontera ce voyage, car il s’agit d’un voyage, ce livre,
je voudrais qu’il soit beau, qu’il soit honnête, qu’il donne de la force
et de la fierté, mon rêve, car j’ai un rêve, que ce livre raconte une autre
ville que le Bobigny des médias et des faits divers, quelque chose qui
fasse qu’on se dise, tiens, j’aurais jamais imaginé ça, tiens, je n’y avais
pas pensé.
Quel rapport entre tous ces métiers et une maison de la culture ?
Une maison de la culture s’occupe des habitants d’une ville, c’est
la première de ses responsabilités, prendre soin de la population,
si la Maison de la Culture à Bobigny a été loin de ses habitants,
elle souhaite aujourd’hui se rapprocher d’eux, entrer en dialogue,
c’est le désir de sa nouvelle directrice et de son équipe, c’est un long
chemin qui commence, comme à l’intérieur d’une famille éclatée, durant
des années, on a vécu séparément, chacun de son côté, on se rend
compte que ça n’est pas bon d’être aussi loin les uns des autres, alors
il faut réapprendre à vivre ensemble, à se comprendre, à se taper sur
l’épaule, à prendre des nouvelles les uns des autres, à savoir ce qui s’est
passé dans la vie de chacun depuis le temps qu’on ne s’est pas vu, c’est
un peu ce que je fais, je prends des nouvelles et je les colporte, j’ai dit
plus haut que la culture et le social doivent rester attachés ensemble,
sinon c’est le tissu humain de la société qui se déchire, comme un corps
qui serait divisé en deux, une maison de la culture, ce ne sont pas que
des spectacles sur une scène de théâtre, ce sont aussi des gens qui
travaillent là, qui habitent là ou pas loin de là, ce sont des expériences
communes, des envies d’artistes de faire autre chose que des spectacles,
ou de les faire autrement, ailleurs, plus près des habitants.
Pourquoi ce goûter sous les arbres ? Parce qu’un goûter sous les arbres,
c’est beau, rien que l’idée fait rêver, pour que vous sachiez ce qui se fait
sur votre ville et dans votre quartier, pour vous permettre de connaître
et de rencontrer d’autres acteurs de la ville de Bobigny que ceux
auxquels vous êtes habitués, pour que vous ne soyez pas surpris
de voir circuler ici ou là un écrivain ou tout autre espèce d’individu
un peu bizarre, pour que vous puissiez devenir à votre tour acteurs
d’une histoire commune, pour que vous puissiez vous dire, oui, après
tout, pourquoi pas ?
Voilà, j’ai commencé avec l’exil, j’ai parlé de la guerre, de mes
parents, de ma ville, de mon enfance, du monde actuel, des mots
de la consolation, j’ai parlé de mon travail, de l’amour des mots, j’ai
parlé de la poésie : poésie vient d’un mot grec qui veut dire faire, écrire,
c’est faire, comme cuisiner, comme faire des gâteaux, comme organiser
un grand goûter sous les arbres, comme s’adapter à faire autre chose
que ce qui a été prévu à cause d’une météorologie défavorable, écrire
cuisiner, c’est un peu la même chose, nourrir les autres, mon regard droit
dans vos yeux, je voudrais vous dire encore cela qui est la vérité, que
l’écriture m’a plusieurs fois sauvé la vie, que sans cet amour de la langue
qui me porte, je ne me sens pas capable d’être un homme debout.
Avant de conclure, je veux adresser un salut très spécial, très chaleureux
aux deux groupes de dames qui apprennent ou perfectionnent le
français, la langue encore, dans le cadre des activités d’alphabétisation
et de conversation organisées par le centre social Le Village, avec l’aide
de Anne-Marie, de Dala, de Fatima, de Yasmine et de quelques autres
encore, à elles toutes, j’adresse mon respect et mon admiration, à tous
ceux présents ici, dont je suis, qui n’ont pas eu à changer de pays,
je dis, le feriez-vous, le ferions-nous, je salue également les femmes
qui ont accepté de participer à un atelier pâtisseries sous la houlette
de Emmanuelle Augereau de la Maison de la Culture, toutes, elles sont
mes sœurs en poésie, au moment de conclure, je voudrais vous inviter
à vous occuper sans relâche, avec le plus grand soin, la plus grande
vigilance, des lieux publics, des maisons sociales, des espaces communs,
des maisons des adolescents, des maisons des parents, des maisons des
femmes seules, de toutes les maisons ouvertes, maisons offertes, maisons
de l’hospitalité, maisons de la réparation, maisons de la parole libre,
maisons de la générosité, maisons du respect, maisons du rire, maisons
de théâtre, maisons de la pensée, maisons de la république, toutes
ces maisons qui nous rattachent à notre propre maison, comme s’il
s’agissait d’un seul et même corps, et font que notre propre maison peut
regarder le monde alentour, avec un peu moins de crainte, avec, face
à elle, un paysage beaucoup plus vaste, car ces lieux peuvent disparaître,
à force d’être méprisés ou maltraités par les politiques publiques ou
négligés par leurs usagers, c’est-à-dire chacun d’entre nous, alors nous
autres, ceux que j’appelle avec fierté les gens du commun, les gens
de la communauté humaine, n’aurons plus rien, sinon nos toutes petites
maisons individuelles et rabougries pour pleurer, ou ronger le sel de
notre colère, alors prenons soin de ces maisons, prenons soin de nous,
aimons ce que nous avons entre les mains, veillons, occupons-nous
avec nos propres forces de ce dont nous avons à nous occuper,
inventons, tenons-nous debout, droits et dignes, faisons ensemble
le plus qu’il est possible,
merci à vous...
Daniel Conrod
Ce texte a été lu par Daniel Conrod à l'occasion du premier banquet le 4 juin 2016 au centre social Le Village de Bobigny.
25
calendrier
NOVEMBRE
sam5 18 h 00
p.
Je suis fait du bruit des autres Théâtre du Fil de l’Eau PantinRéunion
39
Sylvain Bouillet, Mathieu Desseigne et Lucien Reynès * participants
dim6
lun7
mar8
mer9 20 h 00Nkenguegi Dieudonné Niangouna
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
28
jeu1020 h 00Nkenguegi Dieudonné Niangouna
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
28
ven11 20 h 00Nkenguegi Dieudonné Niangouna
Théâtre Gérard Philipe, Saint-Denis
Spectacle
28
sam12 20 h 00Nkenguegi Dieudonné Niangouna
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
28
dim13 15 h 30Nkenguegi Dieudonné Niangouna
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
28
lun1420 h 00Nkenguegi Dieudonné Niangouna
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
28
mer16 20 h 00Nkenguegi Dieudonné Niangouna
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
28
jeu1720 h 00Nkenguegi Dieudonné Niangouna
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
28
ven18 20 h 00Nkenguegi Dieudonné Niangouna
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
28
20 h 30
Du désir d’horizons Salia Sanou
Théâtre Louis Aragon Tremblay-en-France Spectacle
30
sam19 19 h 00
Du désir d’horizons Salia Sanou
Théâtre Louis Aragon Tremblay-en-France Spectacle
30
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
28
dim2015 h 30Nkenguegi Dieudonné Niangouna
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
28
16 h 00
Théâtre Louis Aragon Tremblay-en-France Spectacle
30
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
28
mer23 20 h 00Nkenguegi Dieudonné Niangouna
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
28
jeu2420 h 00Nkenguegi Dieudonné Niangouna
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
28
ven2520 h 00Nkenguegi Dieudonné Niangouna
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
28
20 h 30
Canal 93 Bobigny
Concert
32
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
28
mar15
20 h 00Nkenguegi Dieudonné Niangouna
Du désir d’horizons Salia Sanou
lun2120 h 00Nkenguegi Dieudonné Niangouna
mar22
Love and Revenge Rayess Bek et La Mirza
sam26 20 h 00Nkenguegi Dieudonné Niangouna
dim27
lun2815 h 00
Nous sommes de ceux qui disent non à l’ombre * Margaux Eskenazi
* gratuit sur réservation
Établissement Ville-Évrard Neuilly-sur-Marne Lecture
33
n
du 9
au 26
novembre
kenguegi
Dieudonné Niangouna
ENTRETIEN
AVEC DIEUDONNÉ
NIANGOUNA
Vous présentez Nkenguegi comme
la dernière partie d’une trilogie, après
le Socle des vertiges et Sheda. Aviez-vous
dès le début de l’aventure un projet de trois
pièces ou la trilogie s’est-elle construite
au fur et à mesure des projets ?
Dieudonné Niangouna : Quand j’ai écrit
le Socle des vertiges, je n’avais pas le projet
d’une trilogie. Mais quand j’ai écrit Sheda,
je me suis aperçu très vite que cette pièce était
née parce qu’il y avait eu le Socle des vertiges
avant, c’est-à-dire que la première appelait
la seconde, comme la seconde a appelé
naturellement la troisième : Nkenguegi.
Les trois pièces sont très différentes…
D.N. : En effet, il ne s’agit pas de trois versions
d’une même pièce, ou de trois parties d’une
même pièce. Par contre, il y a une thématique
qui traverse les trois textes. J’avais besoin
de cette troisième pièce pour finir cette
parenthèse dans mon œuvre que j’avais ouverte
avec le Socle des vertiges mais sans savoir
que cette parenthèse allait être si longue
dans ma vie d’auteur.
Quand vous parlez de cette trilogie, vous
donnez l’image d’une famille de trois frères...
D.N. : Oui... La troisième pièce serait comme
le petit frère, le dernier, le cadet de cette
fratrie. Quand je pense à cette aventure,
je m’aperçois qu’il y a des éléments communs
aux trois pièces, comme des gènes communs.
Certains personnages, avec des noms
différents, pris dans des histoires différentes,
ont des traits de caractère très proches.
Le personnage, par exemple, que je jouais
dans le Socle des vertiges qui arrivait de la salle
pour monter sur scène est très proche
du voyageur dans Sheda et du personnage
de De Lafuenté dans Nkenguegi. Mais ce n’est
qu’une fois les pièces terminées que j’ai pu faire
ces rapprochements tout à fait involontaires.
Certains thèmes traversent aussi
les trois pièces ?
D.N. : Oui, comme les allers-retours entre
le passé, souvent inscrit dans une réalité
historique ou politique, et le présent qui
est plutôt une fiction. Les personnages de
ce présent veulent toujours projeter quelque
chose pour l’avenir tout en portant un poids
sur les épaules, celui du passé. Ils sont pris
dans une sorte de vertige entre un trop lourd
passé, un présent fatal et ils sont « dingues »
d’un futur dont ils rêvent. C’est quelque chose
que j’inscris très consciemment dans toutes
mes pièces.
Un de vos personnages dans Nkenguegi
se demande pourquoi il devrait « faire de la
géopolitique au théâtre ». N’est-ce pas aussi
un de vos thèmes récurrents que de faire
de la géopolitique dans vos pièces ?
D.N. : Je veux plutôt faire la critique de la
géopolitique ou tout au moins l’interroger.
Plus particulièrement dans Nkenguegi qui
s’inscrit vraiment, et très volontairement,
dans le présent car je voulais clore la trilogie
en l’inscrivant dans le monde d’aujourd’hui.
Armel Louzala
Ce qui est nouveau dans Nkenguegi c’est
d’inscrire le théâtre dans le théâtre, avec
une troupe de comédiens qui joue une version
contemporaine du Radeau de la Méduse…
D.N. : Quand j’ai fini d’écrire le premier
monologue de la pièce, celui d’un homme
perdu en mer, d’un point de vue poétique
je n’avais plus rien à dire. Ce petit homme
dans son bateau était devenu le symbole
de tous les autres personnages et de tout
ce qui devait arriver dans la pièce. Ensuite,
il fallait donc que je construise la pièce,
scène par scène, en faisant des croquis sur
des feuilles vierges. J’ai choisi les grands
thèmes, les sous-thèmes, tout ce qui allait
composer ce puzzle qui s’appellerait
Nkenguegi. Immédiatement, j’ai compris
que certaines situations ne pouvaient se
résoudre que si elles se passaient dans
un théâtre, que si j’écrivais une pièce dans
la pièce qui permettait de mettre à nu
les questionnements et pas seulement
de les faire entendre. Cela me permet aussi de
mettre en abyme ma propre écriture théâtrale.
28
Votre écriture alterne les monologues
et les scènes très dialoguées. Pourquoi ?
D.N. : Le monologue d’un personnage,
c’est ma façon de faire comprendre au
lecteur ou au spectateur ce que j’entends
dans ma tête quand j’écris, c’est comme si
je parlais à haute voix. Le dialogue permet
de poser ou de résoudre un ou des conflits
en faisant entendre des opinions différentes.
Le monologue permet de ne pas être dans
le jugement, dans la nécessité de choisir
une ou l’autre des propositions que peuvent
faire les personnages dans le dialogue.
Dans le monologue, le personnage « prend
la route » et peut se permettre d’errer dans
sa tête, d’enchaîner en passant du coq-à-l’âne,
prendre un exemple puis un exemple contraire
en étant toujours dans la problématique qui
le nourrit au moment de sa prise de parole.
Je me permets aussi dans le monologue
de traiter des sujets que je ne peux pas
traiter de manière directe dans le dialogue,
en faisant « délirer » le personnage sans que
celui-ci soit obligé de structurer sa pensée.
Ce déploiement de soi, cette volonté de se
débarrasser de la pierre que l’on peut porter
sur le cœur n’est possible, pour moi,
que dans le monologue.
Votre pensée personnelle serait plus présente
dans les monologues ?
D.N. : Certainement. Mais j’aime écrire des
dialogues, j’aime trouver le petit détail à partir
duquel il va y avoir échange de paroles, j’aime
le jeu qui s’installe entre deux personnages
à travers leurs répliques. Je peux déplacer un
mot dans une phrase très volontairement pour
qu’un débat se développe sur le déplacement
de la langue. Ce sont de faux quiproquos,
des pseudo-situations qui m’amusent.
Très souvent, cela se passe entre des couples
de personnages, genre Laurel et Hardy,
genre personnages de Beckett.
Les didascalies sont très présentes, un peu
folles quant aux possibilités de réalisation sur
un plateau de théâtre. À quoi servent-elles ?
D.N. : Je suis très fier de les avoir écrites car,
à la lecture, elles dégagent un certain comique
dû sans doute à leur folie. Elles appartiennent
à l’histoire, elles rajoutent de la beauté
aux scènes qui précèdent ou qui suivent.
Elles poussent à l’extrême les situations.
Je me suis demandé si je devais les conserver
dans le texte car elles m’avaient surtout permis
d’imaginer des paysages, des lieux, sans
aucune limite « technique », sans penser
à la réalisation pratique sur le plateau, donc
très librement. Il y a une scène au Congo
avec le pont du Djoué, un commissariat
de police au loin, etc. etc. etc.
Quelle solution avez-vous trouvée pour
les conserver dans le spectacle ?
D.N. : Comme je vais avoir la chance de
pouvoir utiliser des images vidéo, je peux
tourner en filmant les vrais paysages devant
lesquels les comédiens joueront, « comme si »
ils étaient au Congo. L’idée étant que c’est
le personnage qui crée dans sa tête le paysage
que l’on voit sur l’écran. Mais j’aime bien
aussi l’idée de les faire entendre par la voix
des comédiens.
Elles sont d’une grande qualité littéraire…
D.N. : Oui parce qu’elles participent de
l’histoire, parce que ce sont des scènes à l’égal
des scènes avec les comédiens. Elles précisent
les lieux très divers que traversent mes
personnages, un loft du vie arrondissement
de Paris, un théâtre où les comédiens répètent
leur pièce autour du Radeau de la Méduse,
des lieux publics à Brazzaville. Elles doivent
donc être présentes puisque notre décor sera
quasiment nu, avec quelques accessoires.
et en douceur sur son radeau et il faut
donc faire entendre un corps qui se brise,
qui se noie, qui va sans doute être englouti.
Mais il n’y a pas que le corps du naufragé
qui supporte la violence.
Tous les corps de ceux qui sont dévorés
par des systèmes politiques ou économiques,
qui explosent à la suite des actions violentes,
doivent être présents aussi. La musique sera
là pour faire entendre cette violence faite
au corps.
C’est le tableau de Géricault qui vous semble
l’image la plus forte pour parler de ce qui
se passe aujourd’hui en Méditerranée ?
D.N. : La situation est tellement grave et
tellement violente que le tableau est, en effet,
l’image la plus immédiate qui m’est venue.
Ce qui est bizarre, c’est que nous avons été
surpris par l’ampleur de ce mouvement de
migration alors qu’on aurait pu s’en douter
compte tenu de la violence qui règne dans
ces pays du Proche ou Moyen-Orient.
Il est vrai que, pendant longtemps, les
migrants pouvaient prendre des moyens de
transport plus sécures, plus organisés mais
qu’aujourd’hui l’insécurité est permanente
d’autant que ces gens ne peuvent pas attendre
d’avoir des visas. Ils risquent leurs vies jour
après jour et la fuite devient un moyen de
survie, même dans ces pires situations de
danger. Sans doute ont-ils le sentiment qu’en
restant là où ils sont, ils sont voués à une
mort rapide... Donc mourir pour mourir,
il vaut mieux le faire en tentant quelque
chose pour survivre.
Vous êtes auteur, metteur en scène
et interprète de ce texte…
D.N. : Oui, j’ai voulu rester présent dans cette
dernière étape de l’aventure au milieu de ceux
que j’ai invités à la partager. Jouer c’est aussi
assumer complètement mon premier geste
artistique qui est d’écrire. Je suis un être têtu
et je vais de l’alpha à l’oméga des aventures
que j’initie en remplissant la première feuille
blanche.
Le théâtre a-t-il une force particulière
pour parler de cette violence qui s’étale
sur les écrans jour après jour ?
D.N. : Ce qui est important, c’est la force
de « complexité » qu’il possède. Il n’a pas
peur d’exprimer des points de vue différents,
de confronter les idées. Au théâtre nous
ne sommes pas au catéchisme, on ne peut pas
dire simplement : « Dieu est bon. Aimez-le. »
On peut poser la question de Satan.
Au théâtre, il faut assumer toutes les
contradictions des positions, parfois très
fermes, que l’on propose. C’est la richesse
du théâtre de ne pas endoctriner mais de faire
réfléchir, et surtout de prendre le temps
de cette réflexion. J’appelle ça le temps
de l’autopsie, le temps de la réparation,
le temps de la sorcellerie. Le public vit en
temps réel ce parcours complexe que des
êtres vivants font devant lui et il partage
l’insécurité de ce parcours. Des êtres de chair
et d’esprit dans lesquels le spectateur peut
se reconnaître. Le théâtre crée un temps
pendant lequel ce partage est possible,
c’est un espace poétique de liberté.
Comme dans les deux premières parties
de votre trilogie vous donnez encore
une place importante à la musique ?
D.N. : Il y aura beaucoup de musique avec pas
mal de percussions. Mais compte tenu de la
présence manifeste d’un personnage dérivant
sur son radeau qui revient régulièrement dans
le cours de l’histoire, je voulais qu’on puisse
entendre la violence de cette situation avec
une musique qui soit forte, cassante.
Le personnage ne dérive pas gentiment
29
Propos recueillis par Jean-François Perrier
Avril 2016
« C’est
la richesse
du théâtre
de ne pas
endoctriner
mais de faire
réfléchir,
et surtout
de prendre
le temps
de cette
réflexion. »
Dieudonné Niangouna
Nkenguegi sera publié aux Éditions les Solitaires
Intempestifs mi octobre, ainsi que Un rêve au-delà
et Et Dieu ne pesait pas lourd, (deux monologues
qui ont été lus dans le cycle de lectures de la MC93
au cours de la saison 2015-2016).
du 18
au 20
novembre
Salia Sanou
ENTRETIEN
AVEC SALIA SANOU
Quel est le point de départ du projet ?
À l’automne 2013, je suis rentré d’une
mission au Burundi pour African Artists for
Development (AAD) où, pendant une semaine,
j’ai travaillé dans un camp de réfugiés avec
les artistes qui interviennent au sein
du programme « Refugees on the Move ».
De nombreuses images et impressions me
sont revenues : alignement des cabanes et
des toits de tôle, enfants qui courent, leurs cris,
leurs sourires, les regards des adultes dans
lesquels tant de questions sont suspendues.
Dignité et attente d’un horizon qui s’ouvre.
La peur aussi, celle de mourir là, de ne pas
pouvoir construire un avenir. Dans ce lieu hors
du temps, où l’histoire semble s’être arrêtée, les
liens aux autres et au monde semblent perdus.
Depuis l’automne 2014, je conduis des ateliers
dans le camp de Saag-Nioniogo au Burkina
Faso, dans le cadre de ce même programme.
C’est l’un des trois camps au Burkina qui
rassemblent plus de 35 000 réfugiés maliens
qui ont fui la guerre. Plusieurs danseurs
m’accompagnent dans cette aventure,
mais aussi des comédiens, des musiciens
et un photographe cameraman. C’est de cette
vie et de cette intensité que je veux témoigner,
elle évoque pour moi le lien fort qui peut
se tisser du côté du vivant dans une situation
de désespoir.
La création repose également sur
une matière littéraire...
Au départ, il y a mon engagement dans
les camps de réfugiés, puis la lecture
bouleversante de Cap au pire de Samuel
Beckett. Ces deux axes sont indissociables
dans ma nouvelle création.
S’il s’agit de ce que j’ai éprouvé en tant
qu’artiste dans les camps de réfugiés, je crois
encore que les mots me manquent pour arriver
à décrire la violence et les conditions de vie
indignes et insupportables dans les camps.
Très vite, j’ai compris que c’est par et
seulement avec la danse que je pourrais
témoigner et partager cette expérience.
Ne pouvant utiliser l'ouvrage de Beckett
pour des raisons de droits, j’ai découvert
Limbes/Limbo, Un hommage à Samuel Beckett
de Nancy Huston qui faisait clairement écho au
texte de Beckett. Cette œuvre résonne en moi
comme une partition absolument indissociable
de la danse et de l’espace chorégraphique que
j’imagine. Elle s’inscrit de façon universelle
et totalement contemporaine dans un espace
où la dimension de solitude comme celle de
l’altérité se croisent sans arrêt pour illustrer
à la fois l’obscur et la lumière.
Quel a été le processus de création ?
Je peux dire que Du désir d'horizons n’est
pas un spectacle sur les camps de réfugiés
à proprement parler ; mon propos n’a rien
du documentaire ni du témoignage. Je laisse
ce travail à la presse et aux réseaux sociaux
qui relatent quotidiennement les horreurs
des personnes déplacées et violentées.
Il s’agit d’une composition où le vocabulaire
chorégraphique laisse place au sens et à la
réflexion sur la situation des réfugiés et sa
résonance en chacun de nous. Le découpage
que j’ai opéré dans le texte se veut comme
une infime partition posant ainsi des mots
sur mon indicible...
Pour cette création, je me suis entouré de huit
interprètes, quatre femmes et quatre hommes.
J’ai à nouveau confié la scénographie à Mathieu
Lorry Dupuy qui est, d’une création à l’autre,
à l’écoute des espaces, des volumes, de la
couleur mais aussi des matériaux qui vont
au plus près servir le sens de mon travail.
La lumière a été créée par Marie-Christine
Soma et la musique par Amine Bouhafa.
L’horizon c’est le futur, c’est l’espoir ; dès lors
je m’autorise à rêver un monde meilleur sans
en gommer la cruauté et l’absurdité.
Pourquoi « Du désir » dans le titre
de la création ?
« Du » signifie qu’il ne s’agit pas de mon seul
désir et de celui de l’équipe artistique ; en effet
pour moi l’article contracté ouvre à la volonté
de partage avec les spectateurs. Dès lors,
il s’agit de proposer une lecture ouverte, voire
universelle de notre travail. C’est aujourd'hui,
me semble-t-il, la place de l’art et la nécessité
de l’artiste, du moins c’est la mienne, avec
une invitation autour « Du désir d’horizons »
de se saisir ensemble d’un espace ouvert
sur le monde et l’humanité.
Stéphane Maisonneuve
Juin 2016
Toujours aller
à la rencontre
« L’enfer c’est les autres »... Jean-Paul Sartre
en 1943 ne pouvait imaginer que cette phrase
deviendrait aujourd’hui comme un raccourci caractérisant les fantasmes d’une bonne partie des
populations européennes face à ce qui est considéré comme une invasion dangereuse menaçant
les fondements mêmes d’une civilisation plus
ou moins mythique, d’un art de vivre plus ou
moins imaginaire. Réveillant les pires traditions
d’un nationalisme nauséabond, un discours de
haine et de rejet s’est insinué, détruisant les barrières qui depuis la fin de la Seconde Guerre
mondiale semblaient protéger contre un retour
des démons, justifiant a posteriori la prédiction
brechtienne d’Arturo Ui : « Le ventre est encore
fécond, d’où a surgi la bête immonde. »
Dans le déferlement d’images et de mots plus ou
moins incontrôlés et incontrôlables qui inondent
tous les écrans médiatiques, le théâtre apparaît
comme le lieu d’un possible et souhaitable moment d’arrêt, de pause, de réflexion, de partage.
C’est ce moment que propose Guy Cassiers dans
son adaptation du roman de Jonathan Littell,
les Bienveillantes 1, pour tenter de comprendre
le cheminement intérieur qui amène un homme
banal à devenir le complice actif d’un génocide
sans commune mesure. Comment est-il possible
à un homme, que rien ne prédisposait à partager la monstruosité de l’extermination, d’entrer
dans un système de déshumanisation permettant
de ne plus avoir de jugement moral ? Question
essentielle, à réponses multiples sans doute, que
pose aussi Primo Levi dans ses entretiens avec
Ferdinando Camon 2 en l’élargissant à presque
tout un peuple qui s’est aveuglé plus ou moins
volontairement : « Pourquoi les Allemands ontils accepté Hitler ? J’ai beaucoup lu de livres,
dont certains dus à des historiens illustres, et
je trouve que tous ont baissé les bras devant
ce problème, celui du consentement massif de
l’Allemagne ». Pourquoi encore, plus généralement, les peuples européens ont laissé passer
ces trains de wagons à bestiaux où s’entassaient
les millions de migrants forcés, de déracinés qui
ont parcouru des milliers de kilomètres, traversant gares, villes et campagnes ?
Cette violence du déracinement, de l’exil, du
massacre, nous la vivons au quotidien dans
notre Europe du xxie siècle. Nous les croisons
jour après jour dans les rues, nous croisons
les regards de ces enfants, de ces femmes, de
ces hommes anonymes, nous les regardons en
images sur nos écrans mais les entendons-nous ?
Une fois encore, c’est la force du théâtre de nous
obliger à les écouter car en leur redonnant leurs
caractéristiques d’hommes doués de pensées, de
paroles et d’actions, en les faisant redevenir des
individus et non plus un petit élément au milieu
d’une masse informe ou uniforme, il permet la
prise de conscience et le partage.
Humains au riche vocabulaire. C’est ainsi
qu’ils apparaissent dans l’écriture démesurée
de Dieudonné Niangouna qui propose avec
Nkenguegi 3 de parcourir le chemin de ces migrants qui ont envahi la Méditerranée sur des
radeaux de fortune, cette Méditerranée qui
depuis les temps les plus anciens a connu les
traversées dangereuses, les épopées tragiques
pour tous ceux qui fuyaient les guerres, les persécutions ou la misère. Depuis Euripide et ses
Héraclides, ces enfants d’Héraclès poursuivis
par la haine de Sparte, le théâtre a su témoigner de ces tragédies, redonnant une parole à
ceux que l’on voudrait muets et suppliants, éternelles victimes quémandant une aumône. Pour
les Grecs du monde ancien, ils étaient de véritables héros luttant contre l’adversité à l’égal
d’Ulysse retournant dans sa patrie au prix de
mille et une épreuves. Les mots de Dieudonné
Niangouna provoquent l’émotion, empêchent
l’oubli, obligent à entendre pour refuser la complicité ou l’impuissance.
Stéphane Maisonneuve
d
ésir
d’horizons
ANGLE
D
u
GRAND
Paroles aussi de ceux qui ont survécu et s’entassent dans les camps d’hébergement, dans les
camps improvisés en attendant de pouvoir rejoindre ce qui leur apparaît comme un monde de
liberté possible. Rendre une parole qui n’est pas
que de plainte et de sanglots contenus, comme
celle d’Aiat Fayez dans son texte Angleterre,
Angleterre 4 qui convoque l’humour en nous
confrontant à ces passeurs qui exploitent plus
miséreux qu’eux. Rire parce que l’homme est
aussi fait de ça, même dans les moments les
plus tragiques. Rire comme les enfants des
camps qui résistent en jouant, qui rient même
avec des yeux remplis de tristesse. Toujours
cette volonté de rendre humains et proches ces
femmes et ces hommes à qui l’on refuse une
identité individuelle.
L’ignorance est aussi une violence. C’est ce que
semble dire tous ces artistes qui refusent de
regarder ailleurs pour ne pas voir, qui, chacun à
leur façon, en fonction de leur propre histoire et
de l’endroit d’où ils parlent, donnent des corps
et des voix à ces proscrits qui risquent l’oubli,
perdus en mer, perdus sur terre, devenus de
simples images qui s’effacent les unes les autres
au gré des événements.
Le théâtre, c’est le passé au présent bien sûr,
mais c’est aussi le présent plus présent grâce
à la fiction. Une manière unique de traverser
les temps mais aussi une manière unique de
s’arrêter dans notre Aujourd’hui pour quelques
minutes ou quelques heures. Une manière
unique de raconter, de donner vie, de faire un
focus, comme celui de Salia Sanou circulant
dans un camp de réfugiés au Burkina Faso où
résident 35 000 maliens, travaillant avec eux,
en leur donnant le plaisir de prendre la parole
en se mouvant, en reprenant possession de leurs
corps, provoquant un choc salutaire, une sorte
de réanimation. Quand, à partir de cette expérience, il construit un spectacle, Du désir d’horizons 5, il nous permet de ressentir violemment la
frustration de ces corps qui voudraient se jeter
dans le monde, de ces corps empêchés, brimés
qui expriment l’envie de cet ailleurs auquel ils
aspirent. Nous ne sommes plus au Burkina Faso,
nous sommes partout où, comme l’écrit Nancy
Huston il y a : « Les gens à peine gens, tous
frappés d’immobilité, de stupeur, d’irréalité,
plongés dans le noir et le silence, incapables de
bouger parler voir... ».
Tous ces artistes réunis pour la saison de la MC93
prouvent qu’il suffit parfois d’un geste, d’un mot
pour redonner vie et humanité aux oubliés d’hier
et d’aujourd’hui. Tous pourraient reprendre à
leur compte l’ultime phrase prononcée par le personnage de Nova dans la pièce de Peter Handke,
Par les villages : « Allez éternellement à la
rencontre ».
Jean-François Perrier
30
31
1
Les Bienveillantes
Du 13 au 16 octobre
Nouveau Théâtre de Montreuil,
Payant, sur réservation
Primo Levi
et Ferdinando Camon,
Conversations
ou le Voyage d’Ulysse
2
Le 18 septembre à 16 h 30
Ancienne Gare de déportation,
Bobigny
Gratuit, sur réservation
3
Nkenguegi
Dieudonné Niangouna
Du 9 au 26 novembre
Théâtre Gérard Philipe,
Saint-Denis
Payant, sur réservation
4
Angleterre, Angleterre
Le 20 octobre 2016 à 20 h
La Dynamo de Banlieues
Bleues, Pantin
Gratuit, sur réservation
5
Du désir d’horizons
Salia Sanou
Du 18 au 20 novembre
Théâtre Louis Aragon,
Tremblay-en-France
Payant, sur réservation
le 25
novembre
le 28
novembre
La Mirza & Rayess Bek
Idoles qui se retourneraient sans doute dans
leurs tombes à la vue de ce revival très distancé !
Hommage filial adulte, émancipé, ludique, festif et affectueux d’artistes contemporains aux
pères fondateurs — et mères fondatrices ! Les
remix de vieux tubes par Rayess Bek et d’extraits de films par La Mirza sont soutenus par
les basses et nappes hypnotiques de Julien
Perraudeau et par le oud électrique de Mehdi
Haddab qui invoque sur des gammes orientales
l’esprit de Jimi Hendrix ! Une cérémonie chamanique qui appelle de ses stances la résurgence
d’une époque évanouie.
Production La Compagnie Nova. En partenariat avec le collectif
CORPUS opérateur de la Fabrique Artistique de l’hôpital
Ville-Evrard.
Traversée poétique, politique et musicale des
auteurs de la négritude (Césaire, Senghor,
Damas) au Tout-Monde (Glissant), du negrospiritual au début du hip-hop, la proposition
de Margaux Eskenazi rend hommage à l’héritage des pensées pour réinvestir le présent.
Spectacle matériau où les improvisations, les
lectures poétiques et les interviews politiques
s’enchaînent et traversent deux histoires intimement mêlées : celle de la pensée et celle de
la musique des années 1930 à aujourd’hui. Ce
chaos-opéra porté par quatre comédiens et
un musicien, constitue un véritable manifeste
des poétiques, un refus de la langue unique et
esquisse peu à peu notre créolité commune.
À 15 h
Pavillon Chaplin – Hôpital de Ville-Evrard
Gratuit, sur réservation
Édouard Glissant
SILEKS
Love and Revenge, c'est la figure d’une femme
sulfureuse, la chanteuse Asmahan (1912-1944),
qui fournit l’argument du spectacle : un hommage au glamour arabe à travers ses icônes
du siècle dernier. Particulièrement dédié aux
femmes et à cette époque où leur liberté notoire
n’entamait pas leur grande popularité.
Un procès loufoque et surréaliste, suite à la disparition énigmatique d’Asmahan, est reconstitué : il est le prétexte à un voyage débridé dans
l’immense corpus de la comédie musicale égyptienne et dans les standards de la chanson populaire arabe.
On retrouve (ou on découvre) Oum Kalthoum,
Abdel Halim Hafez, Samia Gamal ou Sabah...
« Et si nous voulions
partager la beauté
du monde,
si nous voulons
être solidaires
de ses souffrances,
nous devons
apprendre
à nous souvenir
ensemble. »
D’après Aimé et Suzanne Césaire, Léopold Sédar
Senghor, Léon-Gontran Damas,
Patrick Chamoiseau, les sœurs Nardal,
Édouard Glissant.
Écriture et mise en scène Margaux Eskenazi
Dramaturgie Alice Carré
Lumières Mariam Rency
Costumes Sarah Lazaro
Avec Nelson-Rafaell Madel, Yannick Morzelle,
Raphaël Naasz, Eva Rami, (distribution en cours)
Médée poème enragé, produit et créé à la MC93
en mars 2014, part en tournée cet automne :
Alain Richard
Le 18 novembre à Chateauvallon, Scène nationale
Du 23 au 3 décembre au Théâtre national
de Strasbourg
Faire d’elle une étrangère à son pays, fuyant
l’asphyxie familiale dans la fusion charnelle
avec le frère, puis dans l’éblouissement physique de la rencontre avec Jason, le ravisseur,
instrument du meurtre du père.
Dire la béance du voyage, le fantasme de
désintégration ; puis d’intégration au nouveau
Monde. Raconter l’amour sans morale, sans
bornes, rédempteur, mortifère, désespéré.
Raconter le désenchantement, l’abandon, la
solitude, le lieu commun, inhumain de l’exotisme ; le refus de se soumettre à l’injonction
de la place assignée, à la fatalité de la trahison.
Raconter le soulèvement et les meurtres (qui
ne sont ici que la forme inversée de la passion).
Ramener Médée, vidée de son amour, orpheline de ses enfants, à la terre originelle où,
étrangère à perpétuité, elle rejoint l’ombre
des parents.
Texte et mise en scène Jean-René Lemoine
Avec Jean-René Lemoine, Romain Kronenberg Création musicale et sonore Romain Kronenberg
Collaboration artistique Damien Manivel
Dispositif scénique Christophe Ouvrard
Costumes Bouchra Jarrar
Lumière Dominique Bruguière
Assistanat lumière François Menou
Assistanat à la mise en scène Zelda Soussan
DR
l
ove and
Revenge
Lecture
Nous sommes
de ceux qui disent
non à l’ombre
32
33
calendrier
DÉCEMBRE
p.
sam3 20 h 00
Ludwig, un roi sur la lune Madeleine Louarn
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
36
dim4 15 h 30
Ludwig, un roi sur la lune Madeleine Louarn
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
36
lun5 20 h 00
Ludwig, un roi sur la lune Madeleine Louarn
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
36
mer7 20 h 00
Ludwig, un roi sur la lune Madeleine Louarn
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
36
jeu8 19 h 30
Les récits manquants *
Théâtre Ouvert Paris
Rencontre
38
jeu8 20 h 00
Ludwig, un roi sur la lune Madeleine Louarn
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
36
ven9 20 h 00
Ludwig, un roi sur la lune Madeleine Louarn
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
36
sam10 20 h 00
Ludwig, un roi sur la lune Madeleine Louarn
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
36
dim11 15 h 30
Ludwig, un roi sur la lune Madeleine Louarn
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Spectacle
36
Réunion participants
39
Spectacle
36
mar13 19 h 00
Les Derniers Jours de l’humanité Nicolas Bigards *
Canal 93 Bobigny Réunion
participants
39
mer14 19 h 30 Concert
38
mar6
lun1216 h 00Nova Claire ingrid Cottanceau et Olivier Mellano * Théâtre du Garde-Chasse Les Lilas
20 h 00 Ludwig, un roi sur la lune, Madeleine Louarn
Le Bal masqué, Centre de musique de chambre
de Paris *
* gratuit sur réservation
35
Théâtre Gérard Philipe Saint-Denis
Conservatoire Nina Simone Romainville
l
udwig, un roi
sur la lune
du 3
au 12
décembre
Madeleine Louarn
Qu'est-ce
qu'un roi ?
Un homme qui doit vivre dans la Lumière
et la Gloire, le Pouvoir et l’Acclamation.
Un homme qui est dans la lumière de l’Ordre
du Jour. Qui jouit de la bénédiction du Grand
Jour où se déroulent liturgies et cérémonies.
Un homme qui gouverne, décide et agit.
Le Roi est Acteur. Responsable d’un peuple.
Or, Louis II de Bavière est un roi handicapé.
Il est allergique au Jour, aux Femmes et au
Pouvoir. Il fuit l’État, l’Administration et
les courriers des Ministres. Il aime la Nuit,
les Images, l’Art, la Solitude et les Forêts.
Il aime se cacher. Il aime se réfugier dans
les souterrains obscurs de son âme perdue.
Il se perd dans le désordre de la nuit,
la construction de ses châteaux, l’étendue
de ses forêts, la présence des jeunes paysans,
le labyrinthe de ses grottes, la dévoration
du chocolat, la musique de Wagner et le chant
des comédiens. C’est un Spectateur enfoui
et déchiré. Il glisse dans l’irresponsabilité
des transes. C’est un homme en transe.
Ce n’est pas seulement un Roi dans la lune.
Il vit vraiment sur la lune. Et il danse, là,
très haut. Inaccessible. La Lune est le refuge
de ses transes. Là où le réel s’enfiest évaporé.
Frédéric Vossier
Ludwig, un roi sur la lune est publié
aux Éditions les Solitaires intempestifs.
Rodolphe Burger présentera
avec Rachid Taha, Couscous Clan
le 27 janvier à Canal 93.
MADELEINE
LOUARN
ET LES COMÉDIENS
DE L’ATELIER
CATALYSE
« Ces acteurs, hommes et femmes vivant à
l’ESAT (Établissement et Service d’Aide par
le Travail) des Genêts d’Or à Morlaix sont les
principales raisons de mon choix d’installation
à Morlaix. Avec eux, je suis venue au théâtre,
avec eux, je poursuis l’histoire. Ils ont alimenté
une grande partie de mes questions et sont
aujourd’hui des acteurs exemplaires et uniques.
Leur présence, leurs corps opaques portant
traces de blessures témoignent de la réactivation incessante de leurs propres limites. Chaque
pas, chaque mot, chaque geste est marqué
par le sceau de la non-évidence. De même, la
conscience incertaine donne une perception
du temps très instinctive et concrète qui est un
atout remarquable pour un acteur.
L’imperfection même du jeu, l’aspect râpeux de
leur présence, l’incertitude de la faible mémoire,
restitue le danger, le risque qu’un acteur prend
lorsqu’il s’expose au public. Il permet de donner
à voir un théâtre où la question du temps, de ce
temps unique qu’est l’événement de la représentation, se perçoit dans sa pleine dimension.
Il traduit aussi un théâtre où l’objet narratif s’efface au profit de la présence. L’instant théâtral
est celui de l’acteur plus que celui du personnage. Cette impossible identification fait que
l’on voit l’être, l’acteur plus que celui qu’il est
censé représenter. On voit l’acteur aux prises
avec ses avatars, on voit aussi les ficelles du
jeu. Il y a une sorte de genèse du théâtre, une
éternelle et constitutive joie de jouer, de créer
des artifices pour entrevoir quelque chose de la
vérité de l’être et de l’existence. Cette mise en
jeu des multiplicités, des facettes variées de nos
existences donne sans conteste une idée de la
liberté. N’est-ce pas dans la mise en action de la
limite, dans son dépassement utopique, comme
un saut dans le vide, que se situe la beauté de
l’être ? Mieux que tout autre, l’acteur handicapé
ramène les creux et les incertitudes de la représentation et de ses codes.
Le choix des pièces, notre répertoire, est intimement lié à ces questions. On y voit l’acteur
se débattre avec la représentation, jusqu’à l’impuissance de vivre. On y voit la réalité se dissoudre, aux prises avec un rêve, un cauchemar. »
Madeleine Louarn
Les portraits de la Compagnie
Catalyse ont été réalisés par
Myriam Richard pour le Théâtre
de l'Entresort à Morlaix en 2011.
36
Rencontres
initiées par Lazare :
Les récits manquants
Plusieurs questions ont émergé lors de discussions entre artistes et acteurs culturels qui se
sont déroulées dans les bureaux de la MC93,
lancées à l’initiative de l’auteur et metteur en
scène Lazare, après les attentats de novembre
2015. Pour poursuivre et ouvrir la réflexion, ces
questions font l’objet de rencontres publiques,
permettant de partager des témoignages, des
expériences et des projets.
Rencontre
le 8
décembre
À 19h30
Théâtre Ouvert, Paris
Gratuit, sur réservation
Programme détaillé avec les différents intervenants
communiqué prochainement sur notre site.
Après une première rencontre autour des liens
des artistes aux territoires et à leurs acteurs qui
s’est déroulée le 9 juin au théâtre Louis-Aragon
à Tremblay-en-France, Théâtre Ouvert accueillera l’organisation d’une deuxième rencontre
autour de l’idée des « récits manquants ». Il
s’agira d’échanger sur les récits contemporains
qui représentent la communauté nationale dans
son ensemble et de voir pourquoi certaines histoires sont peu ou pas racontées.
c
entre de musique
de chambre de Paris
le 14
décembre
appels
à participation
ENTREZ
DANS LA DANSE/
BORIS CHARMATZ
Dans la continuité du projet artistique et culturel qu’il mène au Musée de la danse de Rennes,
Boris Charmatz vous invite à vivre la danse
autrement et à investir la gigantesque halle de
la Friche industrielle Babcock pour un atelier.
Jérôme Pernoo
LE BAL MASQUÉ
Le Bal masqué de Francis Poulenc, est un pur
moment d’irrévérence poétique et fantasque,
pour nous rappeler que le port de la cravate
n’est pas obligatoire quand on va au concert.
Car c’est le fantaisiste Max Jacob qui s’est fait le
complice du musicien pour cette création éclatante de musique de chambre avec voix, trompette et percussions.
À leur tour, encouragés par de si bons modèles,
du Bal des vampires de Polanski aux Masques de
Beffa, les musiciens de la troupe n’hésitent pas
à rajouter à l’irrévérence de ce moment musical
avec des compositions d’aujourd’hui tout aussi
alertement troussées afin que, selon le vœu de
Poulenc, le public sorte du concert : « stupéfait
et diverti comme les gens qui descendent d’un
manège de la Foire du Trône ».
À 19 h 30
Conservatoire Nina-Simone, Romainville
Gratuit, sur réservation
Le samedi 8 octobre à 17 h
Atelier avec l’équipe artistique de Danse de nuit
pour traverser les matériaux chorégraphiques
en lien avec l’œuvre de Boris Charmatz,
auteur d’une vingtaine de pièces
d’Aatt enen tionon (1996) à Danse de nuit (2016).
Quels que soient votre condition physique,
votre âge ou votre niveau de pratique,
entrez dans la danse !
L’atelier est gratuit
Pour participer inscrivez-vous
sur www.mc93.com
ou par mail [email protected]
et téléphone 01 41 60 72 72
LES DERNIERS
JOURS DE
L’HUMANITÉ/
KARL KRAUS
NICOLAS BIGARDS
Les Derniers Jours de l’humanité, c’est une
œuvre démesurée, monumentale, comportant
plus de 209 scènes, 500 personnages, d’innombrables changements de décors et de lieux,
écrit par Karl Kraus pendant la Première Guerre
mondiale.
Et ce sont aussi des voix, toutes les voix que
Karl Kraus a pu entendre, capter, dans la rue, les
cafés, les salles de théâtre, à la radio, ces voix
qui reflétaient l’état d’esprit de son époque. Ce
sont des milliers de citations, de discours, de
rumeurs, de titres, de manchettes.
En vue de sa création en 2018, Nicolas Bigards
souhaiterait faire entendre cette multitude, cette
diversité de points de vue, en créant un chœur
d’amateurs qui réunirait comédiens, chanteurs
et musiciens.
CMCP Nico Luz
JE SUIS FAIT DU
BRUIT DES AUTRES/
SYLVAIN BOUILLET,
MATHIEU
DESSEIGNE
ET LUCIEN REYNÈS
Pour la présentation du spectacle chorégrahique Je suis fait du bruit des autres, le collectif Naïf Production en partenariat avec la
saison culturelle de la Ville de Pantin et la MC93
recherche une vingtaine de volontaires pour participer au processus de création et se produire
sur scène à l’occasion d’une représentation. Sylvain Bouillet, Mathieu Desseigne et Lucien
Reynès imaginent une proposition autour d’une
silhouette masquée et invitent un groupe d’amateurs au plateau pour travailler la notion de
foule et d’anonymat. Le projet se concentre sur
des gestes simples qui ne nécessitent aucune
compétence particulière. Seules la volonté et la
disponibilité sont nécessaires. Toutes les personnes non professionnelles à partir de 18 ans
sont les bienvenues.
Réunion d'information
Samedi 5 novembre à 18 h au Théâtre du Fil de
l'eau de Pantin, en présence de l'équipe artistique
Calendrier du projet
Ce projet nécessite une disponibilité entre
janvier et mars pour les répétitions à Pantin
et Bobigny (10 soirées et deux week-ends)
et le samedi 18 mars toute la journée jusqu’à
la représentation publique du soir
Inscription avant le 20 octobre Claire ingrid Cottanceau, artiste plasticienne et
actrice, Olivier Mellano compositeur et interprète se réunissent pour composer un objet
dans une forme à la lisière du concert et de la
performance. Passionnée l’un et l’autre depuis
longtemps par la parole de Nova, extraite de
Par les Villages de Peter Handke, et après l’avoir
interprétés dans la mise en scène de Stanislas
Nordey en 2013/2014, ils décident de poursuivre
un chemin avec Nova dans un côte à côte hors
norme. Un chœur constitué d’amateurs séniors
accompagnera le projet.
Ce chœur sera présent pour parler du vivant, de
la grâce des corps qui portent en eux le temps.
Ce chœur composera des images fortes, des
tableaux, à l'aide d'actions simples qui dessineront l'espace. Pour constituer cet ensemble,
l’équipe artistique recherche 20 seniors de plus
de 70 ans. De la diversité de ce chœur naîtra
la fragilité des mouvements et des murmures
musicaux. Composée pour eux, la musique aura
une place singulière.
Réunion d’information
Lundi 12 décembre à 16 h
au Théâtre du Garde-Chasse des Lilas
en présence de l’équipe artistique
Calendrier du projet
Répétitions : 45 h sur 3 semaines
entre février et mars 2017
Représentations : les 2 et 3 mars 2017
au Théâtre du Garde-Chasse aux Lilas
Inscription avant le 15 novembre
Pour tout renseignement concernant
les appels à participation
et les spectateurs compagnons :
Gaëlle Brynhole, responsable
des relations avec les publics
01 41 60 72 74
[email protected]
Les spectateurs compagnons
En dehors des spectacles, la MC93 vous propose
de l’accompagner tout au long de l’année en devenant
des « spectateurs compagnons » de son nouveau
projet. Des rencontres trimestrielles sont organisées
pour entendre vos attentes, critiques et propositions
sur la vie de la Maison ; des rencontres avec les artistes,
des ouvertures de leurs répétitions vous sont proposées
pour vous associer au processus de création.
Réunion d’information
Mardi 13 décembre à 19 h à Canal 93
en présence de l’équipe artistique
Calendrier du projet
Répétitions : 1 samedi par mois de janvier 2017
à juin 2017
Représentations : en janvier 2018
sur le grand plateau de la salle Oleg Efremov
Inscription avant le 15 novembre
38
NOVA/
CLAIRE INGRID
COTTANCEAU
ET OLIVIER
MELLANO
39
septembre,
octobre,
novembre,
décembre...
Saint-Denis
Théâtre
Gérard Philipe
accès
Tremblayen-France
Théâtre
Louis Aragon
La Courneuve
Friche
industrielle
Babcock
Aubervilliers
Canal 93
Bobigny
La Commune
Ancienne gare
de déportation
Pantin
Banlieues Bleues
La Dynamo
Paris 18
e
Théâtre Ouvert
Centre
national
de la Danse
Hamlet, variations
Carte blanche
Du désir d’horizons
Friche industrielle Babcock
Magic cinéma
2, rue du Chemin Vert
93000 Bobigny
24, bd de l’Hôtel-de-Ville
93290 Tremblay-en-France
80, rue Émile-Zola
93120 La Courneuve
> RER B — Station La Courneuve-Aubervilliers 10 min depuis Gare du Nord, 15 min depuis Châtelet
puis 5 min à pied (parcours fléché)
> Tramway T1 — Station Hôtel-de-Ville
puis 8 min à pied
> Un parking est mis à disposition du public
> Une navette gratuite retour vers Paris
est proposée les soirs de semaine
> Restauration possible sur place
Magic
cinéma
Salle
Pablo Neruda
Primo Levi et Ferdinando Camon,
Conversations
Ancienne Gare de déportation
151, avenue Henri-Barbusse
93000 Bobigny
Romainville
Conservatoire
Nina Simone
Montreuil
Nouveau
Théâtre
de Montreuil
Les Frères Karamazov
Secret (temps 2)
Danse de nuit
> Métro Ligne 5 — Station Bobigny Pablo-Picasso
puis tramway T1 — Arrêt Escadrille-NormandieNiemen, puis remonter l'avenue Henri-Barbusse
sur environ 500 mêtres.
> Bus 151 — Arrêt Gare (grande ceinture)
> Un parking est mis à disposition du public
Early Works, Lucinda Childs
(Programme A et Ouverture)
Centre national de la danse
1, rue Victor Hugo
93500 Pantin
Neuillysur-Marne
Établissement
Ville Évrard
> Métro Ligne 5 — Station Hoche
> RER E — Station Pantin
> Bus 170 et 151 — Station Centre national
de la danse
> Tram T3b — Stations Delphine-Seyrig
ou Ella-Fitzgerald - Grands Moulins de Pantin
> Autolib' — Station 44, Place de l'Église
> Restauration possible sur place
Théâtre Louis Aragon
> Métro Ligne 5 — Station Bobigny Pablo-Picasso
> Tramway T1 — Station Bobigny Pablo-Picasso
> Bus — Arrêt Bobigny Pablo-Picasso
> Un parking gratuit est mis à disposition
du public au centre commercial Bobigny II,
niveau 0
La Commune
Centre dramatique national
2, rue Édouard Poisson
93300 Aubervilliers
> Métro Ligne 7 — Station Aubervilliers-PantinQuatre Chemins puis 15 min à pied ou en bus
— Arrêt André-Karman
> Bus 35 Gare de l’Est — Arrêt Villebois-Mareuil
> Bus 150 — Arrêt André-Karman
> Bus 170 — Arrêt André-Karman
> Bus 173 — Arrêt Mairie d’Aubervilliers
> Vélib’ — 143, rue André-Karman
et 161, avenue Victor Hugo
> Un parking payant est situé face à l'entrée
du théâtre
> Une navette gratuite retour vers Paris
est proposée les soirs de semaine
> Restauration possible sur place
Love and Revenge
Bobigny-Musique
63, avenue Jean-Jaurès
93000 Bobigny
Salle Pablo Neruda
Salle municipale
31, avenue du président Salvador-Allende
93000 Bobigny
> Tramway T1 — Arrêt Hôtel-de-Ville - MC93
> Métro Ligne 5 — Bobigny Pablo-Picasso
> Bus 134, 234, 251, 301, 322 — Arrêt Centre
Commercial - Hôtel-de-Ville
> Métro Ligne 5 — Station Bobigny Pablo-Picasso
10 min à pied
> Tramway T1 — Station Libération
> Bus 301 — Arrêt Louise-Michel
Bus 322 — Arrêt Jean-Jaurès
Bus 147 — Arrêt La Folie
> Un parking gratuit en face de Canal 93
est mis à disposition du public
> Restauration possible sur place
Les Bienveillantes
Nouveau théâtre de Montreuil
Nous sommes de ceux
qui disent non à l’ombre
Centre dramatique national
10, place Jean-Jaurès
93100 Montreuil
Établissement Ville-Évrard — Site principal
> Métro Ligne 9 — Station Mairie de Montreuil
> Bus 102, 115, 121, 129, 322 — Arrêt Mairie
de Montreuil
> Vélib’ — Station 27, rue Stalingrad
> Autolib’ — 18, rue Franklin ou 62, rue Victor Bausse
> En voiture, un parking payant au 5 bis, rue Franklin
> Rer A — Station Neuilly-Plaisance
puis bus 113 — Arrêt Ville Évrard
> Un parking accessible à tous est situé
dans l’enceinte de l’hôpital
> Restauration possible sur place
202, avenue Jean-Jaurès
93330 Neuilly-sur-Marne
Les récits manquants
Angleterre, Angleterre
Théâtre Ouvert — Centre national
des dramaturgies contemporaines
La Dynamo de Banlieues Bleues
4, bis cité Véron
75018 Paris
> Métro Ligne 7 — Station Aubervilliers-PantinQuatre Chemins
> RER E — Station Pantin puis 12 min à pied
rue Édouard-Vaillant ou bus 170 et 249
> Bus 170, 249 — Arrêt Quatre CheminsÉdouard-Vaillant
> Métro 2 — Station Blanche
> Métro 12 — Station Pigalle
> Métro 13 — Station Place de Clichy
> Bus 30, 54, 74 — Arrêt Blanche
Bus 68, 80, 81, 95 — Arrêt Place de Clichy
> Restauration possible sur place
Nkenguegi
Ludwig, un roi sur la lune
Le Bal masqué
Théâtre Gérard Philipe
79, avenue du Président Wilson
93230 Romainville
Centre dramatique national de Saint-Denis
59, bd Jules-Guesde
93200 Saint-Denis
> RER D — Station Saint-Denis puis 5 min à pied
(dos à la gare, suivre les rails du tramway)
> Transilien Ligne H — Station Saint-Denis puis 5 min
à pied (dos à la gare, suivre les rails du tramway)
> Métro Ligne 13 — Station Saint-Denis Basilique,
puis 8 min à pied
> Tramway T1 — Station Théâtre Gérard Philipe Tramway T5 — Station Marché de Saint-Denis
Tramway T8 — Station Gare de Saint-Denis
> Bus 255, 256, 168
— Arrêt Eglise — Théâtre Gérard Philipe
> Un parking payant est situé 6, rue des Chaumettes
> Une navette gratuite retour vers Paris
est proposée les soirs de semaine
> Restauration possible sur place
40
> Restauration possible sur place
Canal 93
La Mort de Danton
9, rue Gabrielle Josserand
93500 Pantin
Amphitryon
et Early Works (Programme B)
> RER B — Station Vert-Galant, puis 10 min à pied
> Un parking gratuit est mis à disposition du public
41
Conservatoire Nina Simone — Romainville
> Métro Ligne 11 — Station — Mairie des Lilas
puis bus 105 — Arrêt place du 19 mars 1962
À retrouver dans les carnets de janvier
les prochains
spectacles
Le centre de musique
de chambre de Paris
Direction Jérôme Pernoo
Le 22 janvier et le 7 mars
Ce qui nous regarde
Mise en scène Myriam Marzouki
Du 24 janvier au 9 février
Couscous Clan
Conception Rodolphe Burger et Rachid Taha
Le 27 janvier
Nova
Conception Claire ingrid Cottanceau
et Olivier Mellano
D’après Peter Handke
Les 2 et 3 mars
Providence
Mise en scène Ludovic Lagarde
Texte Olivier Cadiot
Du 2 au 12 mars
Je suis fait du bruit des autres
La Mécanique des ombres
Conception Sylvain Bouillet, Mathieu Desseigne
et Lucien Reynès
Les 18 et 21 mars
La neuvième nuit,
nous passerons la frontière
Mise en scène Marcel Bozonnet
Mars — Avril
Sombre rivière
Nicht Schlafen
Chorégraphie Alain Platel
Du 23 au 27 mai
Interview
Conception Nicolas Truong
Du 29 mai au 17 juin
Rencontres chorégraphiques
internationales
de Seine-Saint-Denis
Les 8 et 9 juin
Danse HipHop Tanz
Moov’n Aktion
Mi-juin
Festival ManiFeste-2017
Ircam
Les 23, 24 et 25 juin
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La Maison de la Culture de Seine-Saint-Denis est subventionnée
par la Direction régionale des affaires culturelles d’Île-de-France
— ministère de la Culture et de la Communication, le conseil
départemental de la Seine-Saint-Denis et la ville de Bobigny.
La Fondation d’entreprise Hermès est partenaire de la Master
Class 93, classe préparatoire théâtre Égalité des chances
et soutient la rénovation du hall.
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Texte et mise en scène Lazare
Du 29 mars au 6 avril
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avant le 31 octobre

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