THÈME 5 LES FRANÇAIS ET LA RÉPUBLIQUE

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THÈME 5 LES FRANÇAIS ET LA RÉPUBLIQUE
THÈME 5
LES FRANÇAIS ET LA RÉPUBLIQUE
QUESTION 1
LA RÉPUBLIQUE, TROIS RÉPUBLIQUES
Chapitre 3
1958-1962:
UNE NOUVELLE RÉPUBLIQUE
INTRODUCTION
Avant même sa ratification en 1946, la constitution de la IVème République
avait suscité l’opposition du général de Gaulle, hostile à la mise ne place d’un
régime parlementaire. En effet, la Constitution de 1946 donnait à
l’Assemblée nationale le pouvoir d’investir le président du Conseil et de
renverser le gouvernement. De Gaulle craignait une instabilité
gouvernementale. De fait, la puissance de l’Assemblée où les partis formaient
des coalitions éphémères, entraina une instabilité ministérielle chronique et
inhérente au régime de la IVème République.
En 1958, en pleine guerre d’Algérie, donc dans un contexte de crise coloniale
doublée d’une crise politique, le général de Gaulle revient au pouvoir. Avant
même de trouver une solution à la « question algérienne », celui-ci met fin à
la IVème République et soumet au vote des Français une nouvelle
Constitution qui marque dès lors l’entrée de la France dans la Vème
République. Avec cette nouvelle constitution, de Gaulle change
fondamentalement la configuration institutionnelle du pays, ce qui conduit à
s’interroger sur la singularité de la Vème République dans l’histoire
républicaine de la France. Elu président de la République aux élections de
décembre 1958, de Gaulle met alors en œuvre sa lecture de la nouvelle
Constitution.
PROBLÉMATIQUE
En quoi la Vème République fondée par de Gaulle et ratifiée par la majorité
des Français rompt-elle avec les précédentes?
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PLAN DE LA LEÇON
1. Mise en place de la Vème République dans le contexte de la Guerre
d’Algérie : une rupture institutionnelle.
2. La pratique des institutions : de Gaulle présidentialise le régime
républicain.
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1. Mise en place de la Vème République dans le contexte de la
Guerre d’Algérie : une rupture institutionnelle.
A- Des institutions nées dans un contexte de crise.
La Guerre d’Algérie et l’impossibilité d’y mettre fin renforce les adversaires
de la IVème République. De nombreux gouvernements doivent se succéder
et affronter l’opposition poujadiste, gaulliste et des partisans de l’Algérie
française. A cela s’ajoute la défaite française de Dien-Bien-Phu en Indochine
qui continue de rendre le gouvernement de Guy Mollet impopulaire. Celui-ci
est renversé en 1957, mais ses successeurs ne sont pas capables de contrôler
la situation. Du même coup, c’est tout le régime de la IVème République qui
perd sa crédibilité.
CRISE DU 13 MAI 1958 :
Le 13 mai 1958, une émeute éclate à Alger après l’annonce de la nomination
d’un nouveau président du Conseil, Pierre Pfimlin favorable à des
négociations avec les indépendantistes algériens. Des généraux français
constituent un Comité de salut public à Alger et demandent le retour de de
Gaulle au pouvoir. Le 29 mai, Pfimlin démissionne et le président de la
République René Coty, fait appel à de Gaulle qui devient alors président du
Conseil le 1er juin 1958. L’Assemblée lui accorde le pouvoir constituant, c’està-dire qu’elle le charge de rédiger une nouvelle constitution. C’est la fin de la
IVème République. En moins de 3 mois, le général de Gaulle et Michel Debré,
ministre de la Justice rédigent une nouvelle constitution.
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Le projet de constitution reprend les principes souhaités par de Gaulle en
1946 dans son discours de Bayeux, à savoir, la réduction des pouvoirs du
Parlement face à un exécutif renforcé au sein duquel le président de la
République occupe une place privilégiée.
Ce projet est soumis aux Français par referendum le 28 septembre 1958 et il
est très largement accepté par 80% des suffrages exprimés avec un taux de
participation de 85%, ce qui donne à la nouvelle constitution une légitimité
incontestable. La plupart des partis accueillent favorablement la nouvelle
constitution, à l’exception notable du Parti Communiste. Le 21 décembre
1958, de Gaulle, élu par 77% des grands électeurs, devient le premier
président de la Vème République.
B- Un nouvel équilibre des pouvoirs.
a- Un pouvoir exécutif renforcé.
Le président de la République, élu pour 7 ans, voit son pouvoir renforcé. Il
veille au respect de la Constitution, il est le garant de l’indépendance
nationale et de l’intégrité du territoire. En outre, il préside le Conseil des
ministres, promulgue les lois et nomme aux emplois civils et militaires de
l’Etat.
Il n’est plus élu par le Parlement, mais par un collège électoral de 80.000
personnes, ce qui réduit sa dépendance vis-à-vis du Parlement. Il nomme le
Premier ministre et les ministres.
Il a le pouvoir de dissoudre l’Assemblée nationale et peut consulter
directement les Français par voie de referendum. Il est aussi chef des armées
et l’article 16 de la Constitution lui accorde des pouvoirs exceptionnels si le
pays est menacé.
Le Premier ministre dirige le gouvernement. Il n’a plus l’obligation de se
présenter devant l’Assemblée pour son investiture. Il peut cependant
engager devant celle-ci la responsabilité de son gouvernement.
Le gouvernement, selon l’article 20 de la constitution, « détermine et conduit
la politique de la Nation ». Il est responsable devant le président, mais celui3
ci ne peut le démettre. L’Assemblée nationale peut le renverser (c’est la
motion de censure), mais beaucoup moins facile que sous la IVème
République car elle doit être présentée par au moins 1/10 des députés et
n’est adoptée qu’à la majorité absolue de la totalité de l’effectif de
l’Assemblée nationale. Afin de mieux séparer le gouvernement du Parlement,
il devient impossible d’être à la fois ministre et parlementaire.
b- Un pouvoir législatif sous contrôle
Le Parlement est composé de 2 assemblées : l’Assemblée Nationale et le
Sénat. L’Assemblée nationale est élue au suffrage universel direct pour 5 ans.
Ses pouvoirs sont limités par rapport à la 4eme République. Elle vote ou
rejette et peut amender les projets et propositions de lois. Elle cesse
toutefois d’être permanente et ne siège que 2 fois par an. Son ordre du jour
est fixé par le gouvernement, avec lequel elle partage l’initiative des lois.
Le Sénat est élu au suffrage universel indirect. Les sénateurs, élus pour 9 ans
(renouvelables par tiers) examinent et votent les lois. Toutefois, en cas de
désaccord entre le Sénat et l’Assemblée Nationale, c’est toujours cette
dernière qui l’emporte. En cas de vacance du pouvoir présidentiel, le
président du Sénat assure l’intérim de la présidence de la République.
Une nouvelle institution est créée : le Conseil Constitutionnel. Il est composé
de 9 membres, désignés par le président de la Républiques et les présidents
des 2 assemblées. Il veille que les lois soient conformes à la constitution et
contrôle la conformité des élections.
En renforçant le pouvoir exécutif et limitant le législatif, la constitution de la
Vème République met un terme à l’instabilité gouvernementale des
Républiques précédentes.
CONCLUSION PARTIELLE ET TRANSITION
La Constitution de la Vème République met fin à une longue tradition de
domination du législatif qui avait été motivée par la crainte d’un pouvoir trop
autoritaire. C’est toutefois la mise en œuvre des institutions qui déterminera
peu à peu la véritable nature du régime.
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2. La pratique des institutions : de Gaulle présidentialise le
régime républicain.
A- La personnalisation de l’exécutif
Des élections législatives sont d’abord organisées en novembre 1958. Le parti
gaulliste, l’Union pour la Nouvelle République (UNR) en sort victorieux, de
sorte que le chef de l’Etat peut s’appuyer sur une majorité stable et
confortable pour résoudre le conflit algérien.
Puis, aux élections présidentielles du 21 décembre 1958, de Gaulle est élu 1er
président de la Vème République avec 77% des voix. Le 9 janvier, il nomme
Michel Debré Premier ministre.
Dans sa pratique du pouvoir, de Gaulle renforce le caractère présidentialiste
du régime républicain. Pour cela, il exploite le charisme dont il jouit dans la
population française depuis le rôle qu’il a joué dans la Résistance et la
Libération de la France.
Après son arrivée au pouvoir, de Gaulle subordonne le Premier ministre.
Ainsi, lorsqu’en 1962, un conflit éclate entre de Gaulle et son Premier
Ministre Michel Debré, le chef de l’Etat exige la démission de son Premier
ministre et de son gouvernement alors que la constitution ne lui donne pas
ce pouvoir. Avec le règlement de cette rivalité, de Gaulle montre que dans les
faits, le gouvernement ne dépend plus de l’Assemblée, mais du président. Au
moment de la tentative de putsch des généraux en avril 1961, de Gaulle
assume les pouvoirs exceptionnels comme le prévoit l’article 16 de la
Constitution en cas de mise en danger de la République.
La présidentialisation du régime républicain se manifeste également par le
recours aux referendums qui permettent au chef de l’Etat d’établir une
relation directe avec les citoyens sans passer par le pouvoir législatif et les
partis politiques. En effet, entre 1958 et 1962, de Gaulle a eu recours 4 fois
au referendum. Cet instrument lui permet ainsi de légitimer son pouvoir en
faisant appel à la confiance des Français.
La personnalisation de l’exécutif est également visible dans l’utilisation que
fait de Gaulle des media de masse. Ce phénomène est rendu possible par le
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développement au début des années 1960 de la société de consommation
dans laquelle les moyens de communication de masse tiennent une place
privilégiée. Ainsi, de Gaulle participe à de nombreuses conférences de presse
et émissions de télévision et se complait dans les bains de foule. Il perçoit
vite que dans cette société de masse, il est devenu essentiel d’être présent
dans les medias. Entre 1958 et 1969, il participe à 81 interventions
radiotélévisées, dont la moitié a lieu avant 1962, c’est-à-dire pendant la crise
algérienne.
B- La réforme de 1962 renforce la présidentialisation du régime.
L’année 1962 est marquée par la signature des Accords d’Evian avec le FLN,
c’est-à-dire la fin de la guerre d’Algérie. Tandis que la période de crise
s’achève, les parlementaires manifestent leur lassitude face au rôle jugé trop
envahissant du chef de l’Etat, c’est pourquoi lorsque George Pompidou
succède à Michel Debré à la direction du gouvernement, le nouveau Premier
ministre n’obtient qu’une faible majorité lors du vote de confiance qui suit
son discours d’investiture.
Toutefois, face à cette hostilité du pouvoir législatif, de Gaulle n’hésite pas à
renforcer davantage le caractère présidentialiste du régime. En outre, de
Gaulle échappe à un attentat perpétré par des partisans de l’Algérie
française, ce qui crée une grande émotion dans la population française qui
soutient de Gaulle. Le climat est alors politiquement favorable au projet du
chef de l’Etat de renforcement de l’exécutif. Ainsi, c’est dans ce contexte qu’il
propose dans une conférence de presse l’élection du président de la
République au suffrage universel direct, pour selon lui consolider la
légitimité du chef de l’Etat. Les partis politiques sont opposés à cette
proposition. Une motion de censure est déposée et obtient une large
majorité à l’Assemblée. De Gaulle dissout l’Assemblée et décider de
convoquer des élections afin d’appeler le peuple à arbitrer ce conflit.
Un referendum est d’abord convoqué au sujet de la proposition de de Gaulle
qui est approuvée à 62% des suffrages. Lors des élections législatives, les
Français accordent une majorité absolue au parti gaulliste. Ces deux
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convocations électorales renforcent la légitimité de Gaulle ainsi que son
interprétation des institutions de la Vème République.
C- L’héritage à long terme des pratiques de de Gaulle et de la réforme
de 1962.
La réforme de 1962 transforme durablement la vie politique française. Si la
constitution de 1958 a rompu avec la tradition parlementariste de la vie
politique française, la réforme de 1962 conforte définitivement la position
dominante du président de la République. En outre, la place de plus en plus
centrale des medias de masse dans la vie politique renforce d’autant plus la
personnalisation du pouvoir présidentiel.
Le Parlement, quant à lui, se trouve cantonné à un rôle technique de vote ou
de rejet des lois et du budget, mais perd le rôle politique qu’il avait eu sous la
IIIème et la IVème République. Les partis politiques n’orientent plus la
politique du pays. La présidentialisation du régime entra conduit à une
bipolarisation de la vie politique dans la mesure où le rôle essentiel des
partis politiques se concentre autour du soutien ou de l’opposition à la
politique présidentielle.
CONCLUSION
Tandis que les institutions de la IVème République ne semblaient pas
adaptées aux conditions nouvelles de la vie politique ni capables de
surmonter les crises graves comme celle de la Guerre d’Algérie. C’est dans ce
contexte de le général de Gaulle réforma les institutions françaises et donna
naissance à la Vème République. Celle-ci marque la présidentialisation du
régime républicain, encore renforcée par la réforme de 1962 qui contribua à
renforcer la personnalisation du pouvoir présidentiel.
Le passage à la Vème République a donc constitué un tournant majeur de la
vie politique française, rompant avec la tradition parlementariste
républicaine. La vie politique actuelle est encore largement influencée par
ces réformes institutionnelles.
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