Cahier pédagogique - Théâtre de La Guimbarde

Transcription

Cahier pédagogique - Théâtre de La Guimbarde
Stone !
Spectacle Jeune Public destiné aux jeunes à partir de 12 ans
Cahier pédagogique
1
Le désarroi adolescent mis en scène
Les médias nous font part quotidiennement de faits de violence (vols, incendies volontaires,
racket, vandalisme, humiliations,…) commis par des mineurs. L’ampleur de ces actes
destructeurs nous laisse parfois démunis.
« Stone ! » est adapté de la pièce « The Stones » (« Les pierres »), écrite par deux
comédiens australiens en 1998 à Melbourne suite à un fait divers tragique survenu dans leur
pays.
A travers cette histoire réelle - la mort accidentelle d’un automobiliste causée par
l’inconscience de deux adolescents -, notre objectif est de parler de façon dynamique et
contemporaine de ce qui est communément appelé la délinquance juvénile. De montrer sur
scène l’engrenage parfois ténu qui amène des jeunes à passer de la simple infraction à la
faute irréparable.
A l’instar de l’auteur et metteur en scène anglais Edward Bond, nous pensons que le théâtre
peut toucher la réalité et concerner directement les jeunes dans leur humanité.
« Il faut créer des situations extrêmes sur le plateau, pour que les gens
puissent voir ce qui leur arrive. Il faut qu’ils vivent cette extrémité, qu’ils se
demandent : « en tant qu’être humain, que dois-je faire ? » Edward Bond
La délinquance juvénile ne naît pas de nulle part. Elle est souvent la résultante d’une
situation sociale qui pousse les jeunes à l’agression des gens qui leur paraissent mieux
insérés qu’eux dans la société. « Stone! » traduit le malaise de ces jeunes en quête d’euxmêmes et dont le besoin de s’exprimer se traduit par la violence.
Construite comme une succession d’instants quotidiens et réalistes, comme une histoire de
vie, cette pièce permet au jeune spectateur de s’identifier et, nous l’espérons, de
s’interroger.
Notre intention n’est certainement pas de lui infliger une leçon de morale mais plutôt de
l’aider à garder vivante sa capacité à interroger sa conscience et son imaginaire.
C’est pourquoi nous vous suggérons de prévoir un moment de dialogue avec les jeunes
spectateurs à l’issue de chaque représentation pour entamer le dialogue. Ce moment pourra
éventuellement s’enrichir d’une rencontre avec les comédiens.
Ce dossier a été conçu comme un outil qui, nous l’espérons, vous permettra d’approfondir
les thèmes abordés dans le spectacle. N’hésitez pas à l’enrichir de vos expériences, votre
pratique et votre point de vue sur le spectacle.
2
L’histoire
Deux ados, Tim et Yaoo, s’enlisent et s’enferment dans une joute entre insouciance,
inconscience et délinquance. Déjouer les interdits, dépasser les limites, histoire d’y goûter
simplement et de s’enivrer toujours plus fort, toujours plus loin.
Jusqu’au trop loin: une pierre jetée du haut d’un pont, un pare-brise éclaté, une poitrine
explosée… Arrêt sur image. Remords. Prise de conscience d’un acte quasi-innocent et de ses
conséquences cruellement coupables. Comment respirer avec cette vision-là? Avouer? Se
dénoncer? Affronter le monde des adultes? Leur regard et leur justice?
Les personnages
Pour ouvrir le débat…
-
Comment décririez-vous Tim et Yaoo ?
En quoi vous semblent-ils proches/loin de vous ?
Pensez-vous que seuls, ils auraient agi de la même façon ?
Stone compte trois acteurs et cinq personnages :
Le narrateur-musicien, sorte de coryphée qui garde un regard extérieur sur le spectacle et
représente en quelque sorte la conscience des protagonistes.
Deux adolescents et deux détectives, joués par les mêmes acteurs.
Tim est âgé de 13 ans. Plutôt timide et introverti, il va, pour plaire à son ami et cesser d’être
considéré comme le petit ou le dégonflé, faire preuve de « courage ».
Yaoo, âgé de 15 ans est un meneur, c’est une grande gueule. Il initie les faits et joue sur
l’intimidation. Mais ne serait-il pas surtout en perte de repères ?
Leurs rapports amicaux, faits de complicité, de mises à l’épreuve, d’injures, de rires
nerveux, sont porteurs d’ambiguïté et mus par le besoin mutuel de reconnaissance.
« A côté des tourments de l’amour, parfois recherchés pour eux-mêmes,
l’adolescence cultive aussi ceux de l’amitié. Celle-ci joue parfois dans
leur vie un rôle plus important que celui-là. On ne répétera pas la place
que prend le groupe de pairs dans la vie quotidienne des adolescents.
C’est au sein de ces groupes, avec leur morale de la transparence, de
l’honneur et du respect de la parole donnée, que les adolescents font
l’expérience d’une affectivité différente de celle qui se rapporte à la
famille, où elle apparaît toujours, d’une manière ou d’une autre, peu ou
prou forcée ». Claude Javeau, professeur de sociologie - ULB
Ces rapports humains ne sont pas uniquement le propre de l’adolescence: plus âgés, les
détectives Russon et René sont dans le même type de joute verbale.
Physiquement, adolescents et adultes sont donc confondus. Le jeu, les mouvements, les
attitudes marquent les scissions qui s’estompent au fur et à mesure que le dénouement se
fait sentir.
3
La musique
Pour ouvrir le débat…
-
Quel rôle la musique joue-t-elle dans ce spectacle ?
Est-il plus facile de dire en musique et/ou chanson ce que l’on ressent ?
Pensez-vous que la musique adoucit les mœurs ? Peut-elle rendre violent ?
Le monde de l’adolescence est davantage celui de l’émotion que celui de la raison,
davantage celui du cri et du souffle que celui du mot. C’est pourquoi la pièce est scandée par
des interventions chantées et/ou musicales, façon rock «garage», comme autant de
contrepoints ou d’éclairages possibles à l’action. Les ados sont aussi amateurs de musique
« dure » parce qu’elle synthétise bien un certain esprit de révolte.
« Je pensais au pouvoir trompeur de la musique, à cette sorte de
romantisme exacerbé qu’elle pouvait inspirer. Si on écoutait les Stones à
un volume élevé pendant assez longtemps, on finissait invariablement
par ressentir une sorte de sympathie pour le diable. Et il suffisait
d’entendre ce duo entre Bob Dylan et Johnny Cash pour avoir envie de
filer vers le Nord et chercher une fille dans une foire de campagne. (…)
Des millions de gens écoutent ces chansons, et à moins qu’ils ne soient
des débiles profonds, leur humeur en est certainement affectée. (…) Mais
souvent, il semble que la passion nous plonge dans l’excès et la musique
traduit si fidèlement la passion qu’on ne peut qu’être convaincu et qu’il
est impossible de lui résister. Merle Haggard me donnait toujours envie
de me saouler à mort. Les Cream ou les Who, ou les Grateful Dead me
donnaient envie d’être défoncé, tandis qu’avec Dolly Parton, j’avais envie
de tomber amoureux. June Carter semblait me faire signe depuis
Jackson, Mississippi, et Patsy Cline m’invitait à Nashville. Pas étonnant
que la plupart des gens préfèrent une musique insipide et faiblarde ».
Jim Harrison, « Un bon jour pour mourir ».
Jouée en live, la musique est aussi une échappée belle, une respiration créative et créatrice.
L’adolescence est l’âge où les goûts musicaux s’affirment, tantôt revendicatifs, tantôt mus
par un besoin d’appartenance à un groupe. C’est aussi une période où le besoin d’expression
est très grand. La musique et la culture au sens large peuvent servir d’exutoire positif à ce
besoin de s’exprimer. «Parole de l’âme », la musique permet souvent d’exprimer ce qu’il est
difficile de dire en mot.
« Par rapport aux autres âges, l’adolescence est une période vouée à
l’essai de statuts et rôles, et qui favoriserait la créativité autant que des
conduites qualifiées de déviantes » Hugues Delforge, collaborateur
scientifique au CNRS
La musique permet aussi à l’adolescent d’exprimer ses peurs fondamentales.
La première est celle de ne pas exister aux yeux des autres, de ne pas être vu, de ne pas
avoir sa place dans le monde : la peur de n’être personne. Une deuxième est celle de ne
pouvoir briser les liens qui l’empêchent de vivre ses rêves, de s’épanouir.
4
L’origine de la violence
Pour ouvrir le débat…
-
Quels sont les facteurs qui poussent Tim et Yaoo à un tel comportement ?
Quels sont les besoins qui, chez eux, ne sont pas satisfaits ?
Le choix qu’ils font apporte-t-il une réponse à leur attente ? Quelle autre possibilité
avaient-ils pour s’en sortir ?
En tout être humain peut germer une certaine forme de violence. Ce qui ne signifie pas que
tout le monde passe nécessairement à l’acte. Sommes-nous violents par nature ou dans des
contextes donnés ?
En comprenant les origines et les mécanismes du phénomène de violence, on peut être plus
apte à enrayer cette spirale parfois infernale.
Les psychologues humanistes considèrent que toute action, tout acte posé par un être vivant
n’a d’autre objectif que la satisfaction d’un (de) besoin(s).
- Besoins physiologiques: besoins vitaux de l’être humain tels que boire, manger,
dormir,…
- Besoins de sécurité: besoin de paix, de sécurité, de protection, de stabilité et
d’équilibre sur le plan matériel, dans la vie quotidienne comme dans les relations
interpersonnelles.
- Besoins sociaux : besoin d’amour, d’affection, d’appartenance à un groupe et à une
collectivité. Besoin de justice et d’équité.
- Besoins d’estime : besoin d’être reconnu, respecté et estimé, d’être fier de soi, de se
sentir compétent et maître de sa destinée (estime de soi, affirmation de soi).
- Besoins de réalisation : besoin de se réaliser, de s’épanouir, de développer ses
talents et de les mettre à profit de la manière la plus créative possible.
Tous ces besoins sont présents en chacun de nous. Aucun d’entre eux ne comporte
d’intention négative ou destructrice. Il est important de ne pas confondre ces besoins avec
les actes que nous pouvons poser pour les satisfaire. Par exemple, dire : « J’ai besoin de
vengeance », c’est confondre l’acte que l’on mettrait en place –la vengeance- pour satisfaire
un besoin – la justice par exemple.
Apprendre à nommer les besoins qui nous habitent, à découvrir que leur satisfaction dépend
parfois des autres, mais surtout de nous, est un premier pas que l’on peut tenter vers la
recherche de comportements non violents. Ensuite, examiner en quoi les actions que nous
menons sont à même de répondre, ou non, à nos besoins, permet de mesurer combien
certains actes sont parfois totalement inadéquats par rapport aux intentions qu’ils
poursuivaient.
C’est quand on n’exprime pas ses émotions ou quand on ne les comprend pas qu’on se met
à développer des intentions malveillantes. « Je n’ai pas les mots pour dire ma tristesse, ma
colère ou ma peur, alors je déprime, je me drogue ou je frappe ».
Une fois l’acte violent commis, il y a de fortes chances pour que la personne soit punie et
qu’une sanction soit imposée. Le cercle se boucle, enfermant la personne dans la détresse
de ne pas avoir été comprise et dans la souffrance d’avoir été sanctionnée sans que son
besoin fondamental n’ait été ni exprimé, ni satisfait.
Dans de nombreux cas, la délinquance vient s’inscrire dans une problématique de
dysfonctionnement familial important : les jeunes ont connu et souffrent toujours de
carences affectives, éducatives, relationnelles,… Leur délinquance en est la trace, le
symptôme.
5
Une société de droit
Pour ouvrir le débat…
-
Quels sont les droits et les devoirs des jeunes ?
Quels sont les facteurs qui poussent des jeunes vers des comportements
délinquants ?
A quoi et à qui servent les lois ?
Comment et quand, dans votre vie quotidienne, la loi vous concerne-t-elle ? Quand
respectez-vous la loi, quand êtes-vous hors la loi ?
La délinquance, c’est l’ensemble des comportements antisociaux sur le plan légal. Ceux-ci
dépendent donc des lois d’une société et des moyens qu’elle met en œuvre pour les faire
respecter. Elle implique une intervention policière (plainte, arrestation) et une procédure
judiciaire destinée à établir ou non la culpabilité de l’accusé.
Toute société, tout groupe a besoin de règles de base, de lois pour organiser la vie en
commun et vivre en harmonie. Sans le respect des lois humaines universelles (l’interdit de
l’inceste, l’interdiction de tuer), les relations entre les gens dégénèrent en chaos. On ne peut
pas faire n’importe quoi, on n’a pas tous les droits. Un monde non balisé d’interdits
ressemblerait à une jungle.
Les familles posent leurs limites, l’école impose son règlement, les pays édictent des lois.
Cela paraît sans doute contraignant mais c’est sans doute indispensable. Souvent rejetée, la
contrainte a son utilité dans l’éducation et la construction d’un individu.
Livré à lui-même, le petit enfant n’a d’autre guide que sa satisfaction immédiate, il vit dans
l’illusion de la toute-puissance. Les « non », les interdits, les sanctions lui apprennent à
mettre des limites à ses pulsions, à se contrôler, à dépasser le plaisir immédiat, à respecter
les autres. Ils lui permettent de s’humaniser: il n’est pas un animal qui règle ses problèmes
à coups de dents. Ils lui font réaliser ce qu’est la loi.
La loi est le tiers auquel on fait appel pour régler les conflits sans recourir à la violence.
Elle est ce que tout le monde respecte, même en cas d’absence de « gardien de l’ordre ».
Les comportements jugés antisociaux sont sanctionnés par la Justice. En Belgique, c’est le
Tribunal de la Jeunesse qui juge les mineurs de moins de 18 ans qui ont commis des
infractions.
Certains jeunes n’acceptent plus aucune règle ou ne prennent pas conscience des
conséquences possibles de leurs actes. Certains préfèrent, pour être reconnus par leurs
pairs, se mettre en avant en « déconnant ».
Si la Justice semble efficace en Belgique face à la délinquance de jeunes en crise
d’adolescence et en recherche de limites, elle semble avoir moins de réponses face aux
jeunes qui commettent des délits parce qu’ils n’ont intégré aucune règle (banalisation de
l’acte commis) ou qui se révoltent contre une société qui ne leur laisse pas de place ou
d’avenir.
6
Le système belge
Pour ouvrir le débat…
-
Comment pensez-vous que des jeunes seraient jugés chez nous ? Comme des
adultes ?
Quelles seraient selon vous les meilleures façons de sanctionner les
comportements délinquants ?
Comment réagiriez-vous si Tim et Yaoo étaient proches de vous (amis, frères)?
S’ils vous étaient inconnus ?
Comment réagiriez-vous si la victime était proche de vous ?
« La délinquance des jeunes est un sujet chaud. Depuis toujours. Et plus encore
avec la création d’Everberg. Sans cesse, il met et remet sur le tapis les mêmes
questions, les mêmes divergences, les mêmes appels à faire mieux comme si la
société était incapable de trouver le juste équilibre entre sanction et éducation car
les deux sont évidemment complètement nécessaires et nécessairement
complémentaires pour construire une réponse cohérente ». Colette Leclercq
En Belgique, le législateur a longtemps insisté sur la protection du jeune mineur. La loi de
1965 sur la protection de la jeunesse repose sur l’idée que la délinquance de certains
jeunes, l’absentéisme scolaire, le non respect de l’autorité (parentale ou autre) sont autant
de signes de l’inadaptation de ces mineurs. Le modèle protectionnel proposé par le
législateur se présente donc comme un modèle « thérapeutique » dans lequel le juge
appliquera, avec un certain paternalisme, des « remèdes » à ces jeunes ou aux parents qui
mettent en danger leurs enfants.
Puis l’évolution de la délinquance a incité le gouvernement à mettre en place un modèle plus
sanctionnel (ouverture en 2002 du centre Everberg, prison pour mineurs). La loi du 1er mars
2002 relative au placement provisoire de mineurs ayant commis un fait qualifié infraction
marque un glissement : la protection du mineur cède la place à la protection de la société
qui justifie l’enfermement du jeune délinquant.
Actuellement, les discussions s’orientent vers un modèle qui allierait protection et sanction
dans une optique réparatrice. Cette justice réparatrice ne cherche pas à infliger une peine ou
à rééduquer ou à appliquer un traitement par le biais de mesures mais bien à réparer les
dommages subis par la victime.
Le déroulement d’une procédure
De manière concrète, lorsqu’un jeune est appréhendé pour un délit par la police, le
Procureur du Roi peut saisir le tribunal de la jeunesse.
S’ouvre alors une phase préparatoire de six mois pendant laquelle le juge de la jeunesse
pourra :
- « réprimander » le jeune (le rappeler à l’ordre)
- faire procéder à des investigations sur le milieu de vie du jeune
- prendre des mesures provisoires (soit un placement provisoire dans une institution de
l’aide à la jeunesse, soit une mesure de surveillance ou de guidance du jeune dans sa
famille)
Pour des faits graves ou répétés, le juge de la jeunesse pourra placer le jeune dans un
centre fermé et, exceptionnellement, dans un centre carcéral (Centre Everberg) pour une
période limitée.
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A la fin de cette période préparatoire, le dossier du mineur est fixé en audience publique.
Lors de cette audience, après un débat contradictoire où sont convoqués le jeune de plus de
12 ans, ses parents, son avocat et la Procureur du Roi, le tribunal de la jeunesse statue sur
les faits mis à charge du jeune et éventuellement sur les montants réclamés par les parties
civiles. Le juge prononce alors une mesure de garde ou d’éducation.
Celles-ci sont presque identiques à celles prévues lors de la phase préparatoire :
- la surveillance par le Centre d’orientation éducative (C.O.E.) ou par le service
d’aide et d’intervention éducative (S.A.I.E.) ;
- la guidance du jeune en famille effectuée par le délégué au service de protection
judicaire
- la prestation d’intérêt général qui consiste en un certain nombre d’heures à prester
gratuitement par la collectivité (x heures de déménagement gratuit, l’aide aux
personnes âgées, l’aide en milieu hospitalier, etc.) ;
- le placement du mineur dans une famille d’accueil ou dans une institution d’aide à la
jeunesse ;
- le placement du jeune en I.P.P.J. (Institution publique de protection de le jeunesse)
à régime ouvert (Wautier Braine et Jumet pour les garçons ou St Servais pour les
filles) ou fermé (Braine le Château et Fraipont) ;
- enfin, si le juge estime que les mesures protectionnelles sont devenues inadéquates
pour un mineur qui a commis un ou des délits après ses 16 ans, il peut se déssaisir
du dossier et le renvoyer vers le tribunal correctionnel.
De la subjectivité des lois
Edictées par des régimes politiques (de la démocratie à la dictature) et des hommes
différents, les lois varient d’un état à l’autre. En Belgique, Yaoo et Tim seraient sanctionnés
comme dans le spectacle. En Australie, ils ont été mis en liberté provisoire sous payement
d’une caution et lors du jugement, un jury populaire les a acquittés.
Ceci dit, les pays ne peuvent normalement pas faire ce qu’ils veulent. La Belgique a conclu
des engagements au niveau européen et international qui engendrent certains droits et
obligations pour les citoyens de notre pays. Il existe notamment la Convention
Internationale des Droits de l’Enfant.
Celle-ci interdit la peine de mort aux mineurs délinquants âgés de mois de 18 ans au
moment des faits. Amnesty International a néanmoins recensé depuis 1990 des exécutions
de mineurs dans sept pays. C’est aux Etats-Unis que le plus grand nombre d’exécutions
(chaise électrique ou injection létale) connues ont eu lieu.
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La notion de responsabilité
Pour ouvrir le débat…
-
Qui sont selon vous les vrais coupables ? Tim et Yaoo ? Le quotidien qui a permis qu’ils
en arrivent là ?
Qu’est-ce qu’être responsable ? Y-a t-il un âge pour être responsable ?
Pensez-vous que Tim et Yaoo étaient conscients de ce qu’ils faisaient ?
Quand pensez-vous être un citoyen responsable ?
Tout le monde est appelé dans sa vie, à un moment ou à un autre, à prendre des risques.
L’adolescence est une période de vie où l’on interpelle, provoque, bouscule les normes, les
limites et les principes avec d’autant plus de violence qu’elles paraissent étroites et rigides.
Responsabiliser n’est pas faire rentrer les jeunes dans des catégories bien nettes mais plutôt
les amener à réguler leurs propres prises de risque de manière à éviter l’escalade. Un jeune,
quelque soit son âge, doit prendre conscience de ses actes et doit, également selon son âge,
faire l’apprentissage des règles de vie en société et des responsabilités qu’il est amené à
prendre.
Partir à la recherche des responsabilités, c’est aussi partir à la découverte des différents
protagonistes, actifs ou passifs, présents ou absents. C’est pointer les droits et les devoirs
de chacun, c’est envisager des responsables plus abstraits comme le groupe, la
communauté, les institutions, la justice d’un pays,…
« Les parents et les enseignants ne peuvent abandonner au nom du principe
de liberté individuelle les limitations éducatives qui s’imposent. Ce rapport
égalitaire, cette symétrie dans les relations adultes-enfants peut effacer la
perception des besoins de l’enfant. Pour se développer, celui-ci a besoin de
structures qui vont contenir ses pulsions et l’anxiété qui en découle. La
relation entre jeunes et adultes ne peut que se fonder sur un rapport de force
sans quoi la violence risque fort de se développer. En d’autres termes,
privilégier l’orientation communicationnelle doit impérativement s’associer à la
mise en place de structures éducationnelles ». J.-P. Pourtois & H.Desmet,
Université de Mons-Hainaut.
« Une société a les délinquants qu’elle mérite. Ce n’est pas en adoptant des
attitudes d’intolérance, d’exclusion et d’appauvrissement progressif que l’on
parviendra à réduire les phénomènes de délinquance, bien au contraire.
Chacun à son niveau, avec sa spécificité, ferait bien d’y réfléchir. » M.C.
Crollen, directrice ff Ippj de Braine-le-Château.
« Mais l’adolescence est aussi charnière, étape intermédiaire, incessant va-et-vient entre ce
qui est et ce qui reste à inventer ; et elle l’est sans doute plus encore aujourd’hui car
ballottée, elle aussi, par les doutes et les interrogations qui traversent toute notre société ».
« On a les adolescents qu’on mérite. N’ayant plus en face d’eux des adultes
fermes et cohérents qui, dès la petite enfance, leur ont donné des repères
flous et parfois pas de repères du tout, les adolescents ne font plus leur crise
d’adolescence mais sont plongés dans la nôtre. La crise d’adolescence au sens
classique du terme est pourtant structurante, nécessaire et salutaire. Elle fait
souffrir et nous sommes là, les adultes pour les aider à faire ce deuil de
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l’enfance. Pour ce faire, ils ont besoin d’avoir face à eux des adultes
protecteurs mais pas trop, fermes sur les interdits inhérents au vivre
ensemble. Mais surtout des adultes qui sont eux-mêmes solidaires entre eux
et qui ne font pas avec les adolescents des alliances qui alimentent la
confusion des places. Ce n’est pas le rôle des adolescents de protéger les
adultes parce qu’ils les sentent fragiles ». Philippe Béague, Fondation
Françoise Dolto.
« J'ai récemment accepté de me rendre dans une classe d'un lycée de Mons
pour y tenir une petite conférence à des élèves de rhétorique qui avaient
assisté, durant une journée, à un procès d'assises. Le but était de répondre à
leurs questions sur la Justice et, par là, de les sensibiliser à la citoyenneté.
Le contact a d'abord été difficile, les jeunes étant sans confiance, ni espoir
envers l'institution judiciaire.
Ces jeunes étaient prêts à envoyer l'accusé à la potence sans même
s'interroger sur les raisons de son acte, sa vie, son histoire, ses problèmes, le
comment et le pourquoi.
Et me voilà en train de plaider pour la défense de mes convictions. La
discussion fut vive mais, apparemment, efficace. Ils reconnaissaient enfin la
nécessité de ne pas juger un fait mais bien un homme, d'où l'importance,
même pour un coupable, de faire un procès, de creuser et de chercher à
comprendre, pour sanctionner adéquatement. Dans les semaines qui ont suivi,
les étudiants ont dû rédiger, deux par deux, de petits textes, dont certains ont
été publiés dans un journal régional.
Cela a été une grande satisfaction de constater à quel point leurs idées avaient
pu évoluer sur quelques heures. Le résultat était favorable à mes convictions,
la plus belle cause à mes yeux. De nombreux avocats donnent ainsi de leur
temps afin de rendre confiance en la Justice et éviter les jugements hasardeux
et catégoriques, cultiver l'esprit critique nécessaire à chacun ».
Céline Parisse, avocate, in La Libre Belgique – 29 juillet 2005
La notion de valeurs
Pour ouvrir le débat…
-
Quelles sont les valeurs qui vous parlent aujourd’hui ?
Que mettez-vous derrière les mots loyauté, honnêteté ?
Pensez-vous qu’une réhabilitation ait encore du sens ?
On parle de plus en plus d’Education à la citoyenneté, à ces valeurs qui fondent notre vie en
commun et au nom desquelles nous accueillons la différence.
Cet enseignement a pour finalité de préparer tous les élèves à être des citoyens et êtres
humains responsables, capables de contribuer au développement d’une société
démocratique, solidaire, pluraliste et ouverte aux autres cultures.
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Quand le monde explose
Quand le monde explose
Tout part en névrose
Y a des jeunes qui se soignent
A coups de grosses doses
Ils perdent les pédales
Et ça fait des drames
Ils perdent la raison
Et ils font les cons
Puis une bagarre
Et il y a un mort
On aurait aimé
Que les jeunes des cités
ces désespérés
Soient considérés
Et qu’ils puissent trouver,
Un boulot, l’espoir,
La possibilité de sortir du noir.
Vous qui êtes dehors
Ecoutez nos cris,
Nous sommes comme morts
Et pourtant en vie…
NB: Cette chanson est issue d’un travail effectué au sein de différents ateliers théâtraux menés avec
des élèves (14-18 ans) de l’enseignement technique et professionnel des régions de Charleroi et de
Thuin.
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WHERE IS MY MIND, The Pixies (1987)
With your feet in the air and your head on the
ground
Try this trick and spin it, yeah
Your head will collapse
But there's nothing in it
And you'll ask yourself
Avec tes pieds en l'air et ta tête en bas
Where is my mind [3x]
Où est mon esprit [3x]
Way out in the water
See it swimmin'
Sorti dans l'eau
Regarde-le nager
I was swimmin' in the Carribean
Animals were hiding behind the rocks
Except the little fish
But they told me, he swears
Tryin' to talk to me to me to me
Je nageais dans les mers caraïbes,
Des animaux se cachaient derrière les rochers
À part le petit poisson,
Mais ils m'ont dit, il jure
qu'il essayait de me parler, à moi, à moi
Where is my mind [3x]
Où est mon esprit [3x]
Way out in the water
See it swimmin' ?
Sorti dans l'eau
Regarde-le nager
With your feet in the air and your head on the
ground
Try this trick and spin it, yeah
Your head will collapse
If there's nothing in it
And you'll ask yourself
Avec tes pieds en l'air et ta tête en bas
Where is my mind [3x]
Où est mon esprit [3x]
With your feet in the air and your head on the
ground
Try this trick and spin it, yeah
Avec tes pieds en l'air et ta tête en bas
Essaye ce tour et tourne, yeah
Ta tête va se sentir mal
Mais il n'y a rien dedans
Et tu te demanderas.
Essaye ce tour et tourne, yeah
Ta tête va se sentir mal
Mais il n'y a rien dedans
Et tu te demanderas
Essaye ce tour et tourne, yeah
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We are the nobodies, Marilyn Manson
Today i am dirty, i want to be pretty
Tomorrow, i know i'm just dirt
Today i am dirty, i want to be pretty
Tomorrow, i know i'm just dirt
Aujourd’hui, je suis sale, je veux être beau
Demain, je sais que je suis juste de la merde
We are the nobodies, we wanna be somebodies
When we're dead they'll know just who we are
We are the nobodies, we wanna be somebodies
When we're dead they'll know just who we are
Nous ne sommes rien, nous voulons être quelqu’un
Quand nous serons morts, ils sauront qui nous
sommes
Yesterday i was dirty, wanted to be pretty,
I know now that i'm forever dirt
Yesterday i was dirty, wanted to be pretty,
I know now that i'm forever dirt
Hier j’étais sale, je voulais être beau
Je sais maintenant que je suis de la merde pour
toujours
We are the nobodies, we wanna be somebodies
When we're dead they'll know just who we are
We are the nobodies, we wanna be somebodies
When we're dead they'll know just who we are
Some children died the other day, we fed
machines and then we prayed
Puked up and down in morbid faith, you should
have seen the ratings that day
Some children died the other day, we fed
machines and then we prayed
Puked up and down in morbid faith, you should
have seen the ratings that day
Des enfants sont morts l’autre jour, nous avons
alimenté les machines et après, nous avons prié.
Vomissant d’une foi morbide, les scores ont
explosé ce jour-là
We are the nobodies, we wanna be somebodies
When we're dead they'll know just who we are
We are the nobodies, we wanna be somebodies
When we're dead they'll know just who we are
We are the nobodies, we wanna be somebodies
When we're dead they'll know just who we are
We are the nobodies, we wanna be somebodies
When we're dead they'll know just who we are
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LOST, Noir Désir (2001)
Et entre chien et loup
Au maximum du voltage
A peine est passé le message
Au fil du rasoir
Pourras-tu le faire I'M LOST
Pourras-tu le dire I'M LOST
Tu dois tout essayer I'M LOST
Tu dois revenir I'M LOST
Encore une fois c'est la vie qui s'entête
Acharnée au-delà des images qu'on reflète
Chacal, charogne, chaman, sachem
Magie noire ou blanche inscrite à la Sacem
Tu dois voir plus loin I'M LOST
Tu dois revenir I'M LOST
Egaré en chemin I'M LOST
Tu verras le pire I'M LOST
Des poumons d'or
Belphégor
Ici, maintenant, à la vie, à la mort
N'oublie pas ton sourire pour ce soir si tu sors
Un jury t'attend n'injurie pas le sort
Pour trouver le sud I'M LOST
Sans perdre le nord I'M LOST
Après les certitudes I'M LOST
Au-delà des bords I'M LOST
Entre les dérapages
Entre les lignes d'orages
Entre temps entre nous
Et entre chien et loup
Au maximum du voltage
A peine est passé le message
Au fil du rasoir
I'm lost but I'm not stranded yet {x2}
(Je suis perdu mais je ne renonce pas encore)
Dans les yeux des femmes I'M LOST
Dans la marie-jeanne I'M LOST
Dans la techno-cité I'M LOST
Pour manipulés I'M LOST
Dans les corridors I'M LOST
Sur les baies vitrées I'M LOST
Des insectes écrasés I'M LOST
Qui cherchaient de l'or I'M LOST
Grand combat de chairs I'M LOST
Colline enflammée I'M LOST
Dans l'ombre ou la lumière I'M LOST
Pôle halluciné I'M LOST
Dans les ministères I'M LOST
Dans les monastères I'M LOST
Dans les avalanches I'M LOST
Au bout de la planche I'M LOST
Pour courir ventre à terre I'M LOST
Brouillard et fumée I'M LOST
Consommer consumer I'M LOST
Recracher de l'air I'M LOST
Des combats d'autorité I'M LOST
Des conflits d'intérêts I'M LOST
Des types ignifugés I'M LOST
Veulent ma fusée I'M LOST
Dans le dérisoire I'M LOST
Dans les accessoires I'M LOST
Dans le feu des possibles I'M LOST
Au cœur de la cible I'M LOST
Des désenchanteurs I'M LOST
Un train à quelle heure I'M LOST
Des pirates des corsaires I'M LOST
Sans aucun repaire I'M LOST
Dans la paranoïa I'M LOST
Dans la schizophrénia I'M LOST
Un maniacopéra I'M LOST
Pharmacopérave I'M LOST
Tu dois voir plus loin I'M LOST
Tu dois revenir I'M LOST
Tu dois tout essayer I'M LOST
Tu dois devenir I'M LOST
I'm lost but I'm not stranded yet {x2}
Entre les dérapages
Entre les lignes d'orages
Entre temps entre nous
I'm lost but I'm not stranded yet {x2}
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Ce dossier pédagogique a été réalisé par Gaëtane Reginster, avec l’aide de Jean-Michel Van
Den Eeyden.
Recherche bibliographique : Elodie Wathelet et Gaëtane Reginster.
Bibliographie :
L’Observatoire, revue d’action sociale et médico-sociale, Trimestriel.
N° 37 : Entre sanction et éducation, quelles réponses à la délinquance des jeunes
(2002/2003)
N° 42 : Dossier Adolescence (1) repères et visibilité (2004)
N° 43 : Dossier Adolescence (2) repères et visibilité (2004)
Revue Actual Quarto, dossier violence à l’école, éditions Averbode, janvier 2003
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