Devenez l`Eglise et aimez l`Eglise
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Devenez l`Eglise et aimez l`Eglise
Devenez l’Église et aimez l’Église Homélie du Père Grégoire Cieutat, sépulture de Jean Mayran de Chamisso, le 21/09/12 Frères et soeurs bien-aimés, en cette heure tragique de la sépulture de Jean, Dieu nous parle et je vous invite maintenant à demander à l'Esprit-Saint de venir en nos coeurs. Pour cela, je vous invite à vous décentrer de vous-mêmes, de vos questions, de vos incompréhensions, de vos jugements, de vos soucis et même de votre tristesse, pour accueillir cette prière à l'Esprit-Saint que je vais prononcer en votre nom: "Viens Esprit-Saint en nos coeurs, et envoie du haut du Ciel un rayon de ta lumière. Viens en nous, père des pauvres, viens dispensateur des dons, viens lumière de nos coeurs. Consolateur souverain, hôte très doux de nos âmes, adoucissante fraîcheur. O lumière bienheureuse, viens remplir jusqu'à l'intime le coeur de tous tes fidèles. Sans ta puissance divine, il n'est rien en aucun homme, rien qui ne soit perverti. A tous ceux qui ont la foi et qui en toi se confient donne tes sept dons sacrés, donne mérite et vertu, donne le salut final, donne la joie éternelle. Amen." Nous sommes donc là au pied de la croix avec Jésus, qui meurt cloué sur le bois entre ciel et terre, avec sa mère, qui ici n'a plus de nom, ou plutôt qui est appelée par Jésus: "Femme". Car, elle va recevoir une nouvelle mission, une nouvelle envergure. Elle va devenir la Femme universelle, la nouvelle Ève co-rédemptrice du genre humain avec le nouvel Adam, vrai Dieu et vrai Homme, JésusChrist. Jésus et sa mère, l'homme et la femme par excellence, sont ici associés pour offrir à l'homme pécheur la possibilité d'une vie nouvelle, la possibilité d'être libéré des griffes du mensonge et de la mort où il s'est lui-même enfermé. Dans cette scène, nous assistons donc à la mise à mort du Fils de l'homme pour que naisse en l'homme pécheur la vie nouvelle, la vie éternelle, la vraie vie. Comme l'avait prophétisé le grand-prêtre Caïphe pour justifier la condamnation à mort de Jésus: "Il est de votre intérêt qu'un seul homme meure pour le peuple et que la nation ne périsse pas toute entière" (Jn 11,50). A la croix, se produisent à la fois une mort et une naissance: mort du Fils éternel de Dieu le Père qui s'est fait homme pour offrir sa vie en partage à son disciple bien-aimé. "Jésus, donc, voyant sa mère et, se tenant près d'elle, le disciple qu'il aimait, dit à sa mère. "Femme, voici ton fils". Puis, il dit au disciple. "Voici ta mère"." Eh bien ! chers jeunes, chers frères et soeurs en Christ, c'est maintenant que cette parole s'accomplit pour chacun, si vous l'accueillez avec foi. Jésus n'avait-il pas déclaré, en effet, lorsqu'on lui apprenait que sa mère et ses frères étaient venus pour le voir; "Qui sont ma mère et mes frères ?" Et tendant la main vers ses disciples, il dit " Voici ma mère et mes frères. Car quiconque fait la volonté de mon Père qui est aux cieux, celui-là m'est un frère et une soeur et une mère" (Mt 12,50). Voilà la vérité qui se déploie par la foi, vérité extraordinaire et toute puissante de Dieu qui veut nous associer maintenant à son oeuvre d'enfantement de son disciple bien-aimé, de son Jean qu'il aime d'un amour éternel. Oui, vous avez bien compris, comme la mère de Jésus au pied de la croix, vous êtes invités à participer à l'enfantement de Jean à la vie nouvelle, à son "enciellement". Pour cela, il est nécessaire que vous acceptiez de vous laissez transpercer par le glaive de la Parole de Dieu comme le fit Marie au pied de la croix. Ainsi l'avait prophétisé le vieux Syméon, poussé par l'Esprit, en disant à sa mère: "Vois ! cet enfant doit amener la chute et le relèvement d'un grand nombre en Israël; il doit être un signe en butte à la contradiction - et toi-même, un glaive te transpercera l'âme ! - afin que se révèle les pensées intimes de bien des coeurs" (Lc 2,34-35). Ainsi Dieu a résolu, par l'incarnation de son Fils, par sa mort et sa résurrection, de nous associer à son oeuvre de salut du monde. Voilà notre vocation; appelés à donner la vie, à enfanter spirituellement en nous soumettant humblement, comme Marie, à la Parole de Dieu, à nous laisser transpercer l'âme pour nous ouvrir à la vie de l'autre. Dans cette perspective, nous participons donc à la fois à l'enterrement de Jean, mais aussi à son "enciellement". Il y a un deuxième point de vue dans cette scène, au pied de la croix de Jésus. Il s'agit du disciple bien-aimé. Car, si la mère de Jésus a acceptée douloureusement la parole qui lui transperça l'âme, encore fallait-il que le disciple bien-aimé accepte, lui aussi, la parole de son Sauveur: "Voici ta mère". Que se passe-t-il à ce moment-là ? A quel choix est confronté le disciple bien-aimé ? Au choix d'accepter, en recevant cette seconde mère, que sa vie ne lui appartienne plus, que sa vie vienne d'un autre, que sa vie vienne de Dieu. A ce moment-là, il a dû renoncer définitivement à la tentation de croire qu'il pouvait prendre sa vie en main. Il a dû renoncer de croire qu'il pouvait encore faire ce qu'il voulait de sa vie. Cette tentation, nous y sommes tous confrontés un jour ou l'autre. Car, à vrai dire, c'est le péché originel qui nous a tous marqué. C'est croire qu'on peut saisir sa vie de soi-même pour soi-même, au lieu de la recevoir d'un autre pour les autres. Dans le premier cas, c'est le mensonge originel qui produit précisément le contraire de ce qu'il annonce. Car il m'enferme sur moi-même, sur mon propre néant; c'est la mort. Dans le deuxième cas, c'est la vérité qui me fait participer pleinement à la vie. Vie qui est précisément un mouvement éternel d'amour entre Dieu le père et Dieu le fils par l'Esprit qui relie l'un à l'autre. En me proposant sa mère au pied de la croix, Dieu, par le Fils, m'invite à entrer dans ce mouvement éternel d'amour, dans cet échange réciproque toujours nouveau de don et de réception. Je me donne à toi, et je te reçois, pour toujours. Nous sommes ainsi introduits dans le mystère du mariage que Dieu a voulu de toute éternité entre Lui et l'homme. Voilà la troisième composante que nous sommes invités à vivre dans cette célébration. Après l'enterrement, puis l'enciellement, il s'agit du mariage. Avec ces trois composantes, nous touchons à la synthèse du mystère de la foi qui sera proclamée dans l'eucharistie à suivre: "nous rappelons ta mort, Seigneur Jésus, nous proclamons ta résurrection, nous attendons ta venue dans la gloire." Tout cela peut se réaliser pour nous, si nous faisons comme le disciple bien-aimé qui "dès cette heure-là, accueillit la mère de Jésus chez lui." Pour conclure, nous pouvons maintenant mieux vivre ce mystère de la Foi grâce à l’Église, dont Marie est la personnification. Nous pouvons comprendre que Jésus ne nous a pas laissé seuls, mais nous a donné l’Église pour cheminer avec nous, pour nous ouvrir le chemin, pour nous communiquer la vie éternelle par le baptême, l'eucharistie, la confirmation, la confession, le mariage. Chers jeunes, chers frères et soeurs, aimez l’Église ! Aimez-la comme votre mère, comme votre mère du ciel. Aimez les pécheurs qui la composent sur la terre, en acceptant d'être l'un de ces pécheurs appelé à la composer. Oui, aimez l’Église et devenez l’Église en répondant à l'appel de Jésus et devenir ainsi à la fois sa mère et son disciple bien-aimé. Amen.