les cowboys - Les Cinémas du Grütli

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les cowboys - Les Cinémas du Grütli
LES COWBOYS
de Thomas Bidegain
PREMIÈRE DÈS
LE 25 NOVEMBRE 2015
www.cinemas-du-grutli.ch
2015 - n°84
Réalisation Scénario
Image
Musique
Avec
Thomas Bidegain
Thomas Bidegain
Noé Debré
Arnaud Potier
Raphaël Haroche
François Damiens
Finnegan Oldfield
Agathe Dronne
Ellora Torchia
John C. Reilly
Le premier film réalisé par le scénariste d’Un
prophète est une belle réussite
Une famille se prépare à un festival country,
avec la totale : chapeau, santiags, bandanas,
bières, saucisses, guitares et square dance.
Les premières minutes des Cowboys
ressemblent à un film social-réaliste et
auraient pu nous emmener dans une espèce
d’épisode de Strip-tease sauce wild west
belge. Déjà, nous sommes en fait dans l’Ain,
et la scène d’ouverture des Cowboys s’étire
de plus en plus longuement sans qu’il ne s’y
passe grand-chose -à part Alian, le père fan
de culture western (François Damiens) qui
chante Tennessee Waltz. Et puis, sa femme
réalise que leur fille ado Kelly a disparu.
Alain part à sa recherche. A partir de ce
point de départ extrêmement balisé (le film
de disparition), Les Cowboys va prendre
des dimensions immenses, rares. Le film
commence en 1994 et s’achève vers 2005 :
un long voyage de onze ans où l’on va suivre
la quête d’Alain pour retrouver sa fille et qui
nous entraîne avec une ambition littéraire
(le métrage est chapitré par les noms des
personnages) dans un labyrinthe de fausses
istes.Le motif du cowboy n’est pas gratuit :
il illustre une fine dialectique entre le sujet
© 2015 Les Cinémas du Grütli
Rue du Général Dufour 16 | 1204 Genève
tél. +41 22 320 78 78 | www.cinemas-du-grutli.ch
LES COWBOYS
France - 2015 - vof - 104 ’
Une grande prairie, un rassemblement country western quelque part dans l’est de la
France. Alain est l’un des piliers de cette communauté. Il danse avec Kelly, sa fille de
16 ans, sous l’œil attendri de sa femme et de leur jeune fils Kid. Mais ce jour là Kelly
disparaît. La vie de la famille s’effondre. Alain n’aura alors de cesse de chercher sa fille,
au prix de l’amour des siens et de tout ce qu’il possédait. Le voilà projeté dans le fracas
du monde. Un monde en plein bouleversement où son seul soutien sera désormais Kid,
son fils, qui lui a sacrifié sa jeunesse, et qu’il traîne avec lui dans cette quête sans fin.
du film et la mythologie du western donc
du cinéma, le film rappelant évidemment La
Prisonnière du désert mais qui se déroulerait
au tournant du 21ème siècle, autour de
la radicalisation et du terrorisme. C’est le
choc impulsif du film, très vite révélé : Les
Cowboys s’attaque au sujet casse-gueule du
terrorisme contemporain. C’est son genre.
Mais le réalisateur Thomas Bidegain et son
scénariste Noé Debré, aux CV glorieux
forgés chez Jacques Audiard (Un prophète,
De rouille et d’os) ne livrent pas un thriller
classique ou vulgos où un provincial amateur
de country se transformerait en vigilante
ou en super-espion. Le film cultive l’ellipse,
étudie la transmission, la paternité et c’est
en creux son véritable sujet grâce au duo
formé par le père (Damiens est fabuleux)
et son fils surnommé Kid (clin d’oeil fordien,
encore), vrai personnage principal et joué
par le jeune (et incroyablement doué et
dirigé) Finnegan Oldfield. Les Cowboys
est mélancolique, mutique, flippant, un peu
comme une variation française et étouffée
de Zero Dark Thirty -autre quête terrifiante
et impossible de dix ans- évidemment sans
les Navy SEAL. C’est d’autant plus brillant
qu’on ne sait pas où l’on nous entraîne, à
l’image des héros de l’histoire : Les Cowboys
Salle
associée de la
Salle associée de la
nous embarque dans des territoires
angoissants et inquiets (au son de la BO
remarquable de Raphaël, comme quoi tout
arrive) et malgré ses jolis plans d’autoroutes
belges nocturnes et de corps menaçants,
il ne sacrifie jamais au look post-Carpenter
(plutôt post-Refn, en fait) synthétique
qui empoisonne tant de films de genre
français, ni à la surécriture bordélique qui
peut menacer un premier film de scénariste.
C’est lent, c’est dense et exigeant mais ça
colle facile une bastos dans le bide des
polars rutilants Europa Corp auxquels on
pensait être condamnés. En cela, même s’il a
évidemment été conçu avant, Les Cowboys
pourrait être un marqueur, devenir, malgré
lui, le premier polar post-Charlie, un film
de genre qui se saisit du réel et qui tente
intelligemment de prendre en compte les
bouleversements esthétiques et mentaux
induits par une société qui a accouché de
la tuerie du 7 janvier. Et à Cannes 2015, le
film présenté à la Quinzaine des réalisateurs
risque de dialoguer avec Dheepan d’Audiard
(en compétition pour la Palme), et peutêtre Fatima de Philippe Faucon (aussi à la
Quinzaine), (…)
Sylvestre Picard, Première