de qui tenir... - Bourgogne Aujourd`hui
Transcription
de qui tenir... - Bourgogne Aujourd`hui
Gastronomie - espoir Une impression de pureté bien dans l’air du temps Arnaud Lannuel DE QUI TENIR... La cuisine épurée d’Arnaud Lannuel, 28 ans, chef du Relais du Mâconnais à Berzé-la-Ville (71) conjugue à un excellent niveau raffinement et technicité. Il faut dire que le garçon a de qui tenir. D CONFORT/CADRE : 14,5/20 Une belle maison de pierres, sur la route de Mâcon à Cluny. Salle à manger classique, ornée de tableaux anciens, de tapisseries et de meubles cirés. Hôtel : 10 chambres 2 étoiles. LA CUISINE : 15,5/20 Tout ce que l’on aime : de la précision, de la technicité, de la pureté. Les produits sont de premier ordre, et les présentations très réussies. LA CAVE : 13,5/20 À étoffer (150 références). Mais les producteurs sont assez bien choisis et les prix dans la norme. Le Relais du Mâconnais - la Croix-Blanche - Berzé-la Ville (71). Tél. 03 85 36 60 72. Fermé dimanche soir et lundi. Menus à 26, 43, 50 et 69 € (dégustation). Hôtel : 10 chambres et suites 2 étoiles, de 59 à 90 € 70 • Bourgogne Aujourd’hui 56 ifficile de parler d’Arnaud sans évoquer Christian. Arnaud, le fils : 28 ans, calme et précis, une idée arrêtée de la cuisine, exprimée avec une identique clarté dans le discours et dans l’assiette. Christian, le père : 53 ans, vingt-cinq ans de gastronomie, jalonnés de remises en cause portées par un enthousiasme de jeune homme. En 2000, à l’aube de sa sixième décade, il briguait le titre de Meilleur ouvrier de France. Echec, de justesse. Mais il n’a pas dit son dernier mot... Arnaud Lannuel a donc grandi dans les casseroles. À bonne école. Gamin, il s’est imprégné des odeurs, il a touché les produits, il a connu l’excitation du coup de feu. Une enfance aux contours de promesse, vécue dans la chaleur de la maison familiale aux pierres blondes. Des moments précieux, irremplaçables. “Certains ont Ducasse pour modèle. Moi, mon modèle, celui qui m’inspire, c’est mon père. On s’entend bien, on a les mêmes idées, les mêmes goûts.” Arnaud a suivi le chemin balisé des chefs bien nés. Il a roulé sa bosse chez Orsi et Chavent à Lyon, chez Silva à Bouilland, au Chapon Fin à Thoissey. Il a aussi cuisiné pour le ministre des Finances (à l’époque Dominique StraussKahn) avant de rejoindre le cocon familial, à la fin des années quatre-vingt-dix. “Je revenais pour trois mois. Finalement, je suis resté...”. La vieille maison ocre n’a pas tremblé sur ses bases. La cuisine précise, évolutive, centrée sur les beaux produits de Christian Lannuel n’avait nul besoin de dépoussiérage. Arnaud l’a juste fait évoluer en douceur vers plus de fraîcheur et de technicité. Les présentations tirées au cordeau expriment une rigueur quasi géométrique ; chaque chose est à sa place, sans aucune confusion, sans aucun mélange possible. Dès lors, les constructions apparaissent évidentes, et l’ensemble dégage une impression de pureté bien dans l’air du temps. Arnaud Lannuel applique sa règle de trois à chacune des ses assiettes : trois produits, pas plus. Les légumes et les sauces (jus réduits, sauces légères et émulsionnées) sont les faire-valoir du poisson et de la viande choisis avec un soin maniaque. Au “Relais du Mâconnais”, la vraie vedette, c’est le produit. À l’image de cette pêche de ligne ou de petit bateau (sole, bar, saint-pierre, turbot) livrée directement de Bretagne le lendemain de la criée. Quant aux desserts, construits sur le même principe, ils sont à citer en exemple. Le jour de notre visite, nous nous sommes régalés d’un foie gras aux poires, gelée d’eau aux épices (foie gras onctueux, farci de morceaux de poire légèrement fermes, accompagné d’une poire naine rafraîchie par une gelée épicée), d’un bar de ligne pané aux mousserons, coquillages et noix, soutenu par une purée d’héliantis (un légume oublié, qui évoque le topinambour, en plus fin) et un jus au vin d’Arbois, et d’un merveilleux gâteau au chocolat (finition de concours), mousse de lait au gingembre, sorbet aux clémentines. La carte change tous les mois. MM. Lannuel, père et fils, ne travaillent que des produits de saison. La cuisine d’Arnaud Lannuel est marquée par la fraîcheur, la technicité et des présentations tirées au cordeau. Jean-Philippe Chapelon Photographies : Lionel Georgeot La cave À ce niveau de cuisine, on est plus habitué aux livres de cave encyclopédiques de 500 ou 600 références. La carte des vins du Relais du Mâconnais n’en comporte que 150. Elle se montre assez bien fournie dans sa région, mais elle fait l’impasse sur le nord de la Bourgogne (un seul chablis...). De belles adresses dans le Mâconnais (Verget, Merlin, Ferret, Saumaize, Auvigue, domaine des deux Roches) et dans la côte chalonnaise (Dureuil-Janthial, domaine du Meix-Foulot, Brintet, François Lumpp...). Ailleurs, la maison joue la sécurité, en s’appuyant sur le négoce de qualité (Jadot, Faiveley, Bouchard Père et Fils). Les prix sont dans la norme : mâcon la Roche-Vineuse vieilles vignes Olivier Merlin 2001 à 25 €, pouilly-fuissé prestige Lassarat 99 à 32 €, vosne-romanée 99 Michel Gros à 70 €, etc. Quelques bordeaux accessibles. Bourgogne Aujourd’hui 56 • 71