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La presse écrite se met à la page… Internet Mehdi K. Benslimane L’Année marocaine 2012, n° 9 L'Année marocaine N° 9 – Avril 2013 (Rabat – Maroc) Centre Jacques Berque pour les études en sciences humaines et sociales – USR3136 CNRS 35, avenue Tariq Ibn Zyad – 10010 Rabat, Maroc - Tél : +212(0)5 37 76 96 91 - Fax : +212(0)5 37 76 96 85 – mail : [email protected] www.cjb.ma La presse écrite se met à la page… Internet Résumé Plusieurs journalistes de la presse écrite marocaine ont bifurqué, ces dernières années, vers la presse sur Internet en créant leurs propres sites d’information. L’année 2011 a vu le lancement de nombreux journaux électroniques ; lancement qui a coïncidé avec ce qu’on a appelé les « révolutions arabes ». Ce texte traite respectivement de Lakome.com, de Demainonline.com et de Goud.ma. Il est question de leurs fondateurs, de leur ligne éditoriale, de leur conception, des rubriques et du contenu offerts, de l’interactivité avec les lecteurs et, enfin, du modèle économique qui est le leur. Le CJB n'entend apporter aucune approbation, ni improbation quant au contenu du texte qui relève de la seule responsabilité de l'auteur. La presse écrite se met à la page… Internet L'Année marocaine 2012 La presse écrite se met à la page… Internet Mehdi K. Benslimane Doctorant en science politique Université de Grenoble (IEP/Pacte) [email protected] Plusieurs journalistes de la presse écrite marocaine ont bifurqué, ces dernières années, vers la presse sur Internet 1 en créant leurs propres sites d’information. L’année 2011 a vu le lancement de nombreux journaux électroniques ; lancement qui a coïncidé avec ce qu’on a appelé les « révolutions arabes ». Dans ce texte, je traiterai respectivement de Lakome.com, de Demainonline.com et de Goud.ma. Il est question ici de leurs fondateurs, de leur ligne éditoriale, de leur conception, des rubriques et du contenu offerts, de l’interactivité avec les lecteurs et, enfin, du modèle économique qui est le leur. Lakome.com2 Créé en novembre 2010 sous l’impulsion d’Ali Anouzl3, ancien actionnaire et chroniqueur du quotidien Al-massae, ce site en langue arabe 4 ambitionne d’être une « valeur ajoutée dans le paysage médiatique marocain en assumant ses responsabilités d’information et de sensibilisation », tout en proclamant veiller à respecter toute une série de principes 5 : défendre le droit à l’information, le droit à la vérité en toute 1 Ou presse électronique. Le « collectif marocain de presse électronique », fondé le 3 mai 2009, se fixe pour objectifs de défendre les droits des journalistes électroniques, d’organiser des séminaires de formation à leur profit, de renforcer la déontologie, etc. Mohamed Hafidi, « Presse électronique… pour ne pas rater le train », (en arabe) Al-massae, n° 1248, 25-26/09/2010. 2 Lakome.com signifie « pour vous ». 3 Outre A. Anouzla, responsable de la rédaction, l’équipe du site comprend un journaliste, deux responsables techniques et le caricaturiste Khalid Gueddar. Les photos sont de l’agence AIC Presse. 4 Dans ce qui suit, je fais moi-même la traduction des textes de l’arabe. 5 Les principes qui suivent reprennent ce qui est énoncé sur le site. objectivité et avec professionnalisme, en respectant la déontologie de la profession telle qu’elle est universellement établie ; défendre la liberté d’expression, les valeurs de citoyenneté et de droits de l’homme universellement reconnus ; dénoncer et critiquer toute violation de ces droits que ceci soit le fait de l’Etat, de partis politiques, de personnes ; appuyer la cause de la démocratie et les processus de transition démocratique, encourager la bonne gouvernance et le contrôle effectué par les médias sur ceux qui gèrent l’argent public sur la base des principes de transparence et d’honnêteté, à partir d’informations vérifiées et de faits recoupés, en prenant en compte l’avis des concernés ; s’ouvrir à tous les acteurs, toutes tendances confondues, selon le principe du droit à la différence, lorsque leurs positions, bien entendu, ne contredisent pas les valeurs de Lakome.com ; être solidaire avec tous les confrères chaque fois qu’il y a violation de la liberté de presse ou quand ils sont victimes de violations du droit, etc. Les visiteurs ont l’embarras du choix en termes de rubriques : Politique, Economie, Culture, Sport, Régions, Opinion, Médias, Maghreb-Machrek, International, Société, Libertés publiques, Femme6 et Suppléments7. Pour s’en tenir aux pages Opinion, des journalistes de la presse écrite y contribuent : Ahmed Najim (ancien de Nichane qui passera à Goud.ma), Aboubakr et Khalid Jamaï, Driss Ksikes8, de même que 6 Plusieurs articles sont repris du site Majalatouki, http://www.majalatouki.com 7 Comprend les sous-rubriques : mouvement du 20 février, Wikileaks, arts, création, divertissement, courants, santé, nouvelles techniques, automobile et goûts. 8 « Demain… un nouveau Maroc », http://lakome.com/%D8%B1%D8%A3%D9%8A /49-%D9%83%D8%AA%D8%A7%D8%A8%D8%A7%D9%84%D8%B1%D8%A3%D9%8A/ 3 La presse écrite se met à la page… Internet Sanae Aji, Mohamed Hafid. Des hommes politiques également comme Mohamed Sassi et Lahcen Haddad 9 . Cette rubrique reprend des contributions d’intellectuels tels que le palestinien Azmi Bishara, les marocains Abdellah Hammoudi 10 , Abdelilah Belkziz 11 , les textes de chroniqueurs ou d’écrivains à l’image du libanais Fawaz Trabelsi 12 , de l’égyptien Alaa Aswani13 ou encore du syrien Michel Kilo 14 . Les contenus variés du site reçoivent des centaines de visiteurs par jour15. Le pendant en langue française 16 de Lakome.com est lancé en mars 2011 par Aboubakr Jamaï, ancien directeur de publication du Journal hebdomadaire. Paraphrasant Jean Cocteau, selon qui, il n’y aurait pas d’amour mais uniquement des preuves d’amour, Aboubakr Jamaï en déduit, dans son premier éditorial, qu’« il n’y a pas de 3623-2011-03-28-16-00-06.html (du 28/03/11, consulté le 12/04/12). 9 Respectivement membre du bureau politique du Parti socialiste unifié (PSU) et actuel ministre du Tourisme. 10 « Quel horizon après le discours royal ? », http://lakome.com/%D8%B1%D8%A3%D9%8A /49-%D9%83%D8%AA%D8%A7%D8%A8%D8%A7%D9%84%D8%B1%D8%A3%D9%8A/ 3249-2011-03-15-13-19-34.html (du 15/03/11, consulté le 14/05/12). 11 Repris au journal libanais Assafir. http://lakome.com/%D8%B1%D8%A3%D9%8A /49-%D9%83%D8%AA%D8%A7%D8%A8%D8%A7%D9%84%D8%B1%D8%A3%D9%8A/ 1520-2011-01-19-17-04-34.html (du 2/01/11, consulté le 14/05/12). 12 « Pas de liberté sans égalité », http://lakome.com/%D8%B1%D8%A3%D9%8A /50%D9%83%D8%AA%D8%A7%D8%A8%D8% A7%D9%84%D8%A3%D8%B9%D9%85%D8%A F%D8%A9/8500-2011-09-24.html (24/09/11, consulté le 14/03/12) 13 « La révolution aura un autre round », http://lakome.com/%D8%B1%D8%A3 %D9%8A/50%D9%83%D8%AA%D8%A7%D8% A8%D8%A7%D9%84%D8%A3%D8%B9%D9%8 5%D8%AF%D8%A9/8377-2011-09-20.html (20/09/11, consulté le 14/03/12). 14 « Voix de Syrie : qu’est-ce qui a changé ? » http://lakome.com/%D8%B1%D8%A3%D9%8A /50%D9%83%D8%AA%D8%A7%D8%A8%D8% A7%D9%84%D8%A3%D8%B9%D9%85%D8%A F%D8%A9/8498-2011-09-24.html (24/09/11, consulté le 14/03/12). 15 D’après le responsable technique du site, contacté par téléphone. 16 http://fr.lakome.com L'Année marocaine 2012 volonté de démocratisation, [mais uniquement] des preuves de volonté de démocratisation » 17 . La version francophone de Lakome.com offre à peu près les mêmes rubriques que celles de son confrère arabophone. En comparaison avec les opinions exprimées en arabe, la rubrique Opinion reprend sa « Lettre ouverte à Mohammed VI » 18 parue en 2005 dans les colonnes du Journal. Son éditorial, « Les FAR : armée ou milice ? », est sans doute le texte le plus lu et commenté19. Les points de vue d’hommes d’affaires, de chercheurs, de personnalités et d’intellectuels y paraissent à l’image de ceux de l’entrepreneur Karim Tazi 20 , du prince Moulay Hicham 21 et de Tariq Ramadan 22 . Après plusieurs mois d’activité, la version francophone du site est suspendue à cause de « l’absence, pour le moment, d’un modèle économique robuste [qui] empêche la production d’un journalisme de qualité qui ne se limite pas à l’éditorialisme et à la simple reprise d’informations parues ailleurs, mais privilégie l’enquête et l’analyse » 23 . Vu l’intérêt manifesté par les lecteurs et la « richesse de l’actualité », la rédaction souhaite donc s’arrêter « pour 17 A. Jamaï, « L’amour et les preuves d’amour », Lakome.com, 17 mars 2011 (consulté le 28/03/11) 18 http://fr.lakome.com/opinion/62-chroniquesdopinion/337-aboubakr-jamai.html (du 20/04/11, consulté le 23/05/11). 19 Le sujet y est pour quelque chose. Avec 111 commentaires, ce qui est un record pour ce site http://fr.lakome.com/opinion/57-edito/248aboubakr-jamai.html (du 28/03/11, consulté le 10/05/11) 20 http://fr.lakome.com/opinion/62-chroniquesdopinion/817-lettre-ouverte-a-monsieur-leministre-du-denigrement-de-la-jeunesse-et-de-la-lamarchandisation-du-sport.html (du 12/09/11, consulté le 20/09/11). 21 « Maroc : le roi face à la tentation sécuritaire », http://fr.lakome.com/opinion/62-chroniquesdopinion/478-hicham-ben-abdallah-el-alaoui.html (du 15/06/11, consulté le 11/05/12) 22 « Triste censure au Maroc ». Il s’agit de la censure de sa chronique sur le quotidien L’Economiste suite à laquelle T. Ramadan arrête sa collaboration avec ce support http://fr.lakome.com/opinion/62-chroniquesdopinion/746-tariq-ramadan.html (du 24/08/11, consulté le 29/08/11). 23 « Suspension du site à partir du 30 septembre 2011 », Lakome.com, 29 septembre 2011 (consulté le 15/01/12). 4 La presse écrite se met à la page… Internet mieux revenir » avec « plus d’exigence professionnelle » 24 . À cette expérience de Lakome.com en langue française s’ajoutera celle de Demainonline. Demainonline.com Lancé par une équipe rassemblée autour d’Ali Lmrabet25, « Demain renaît de ses cendres sous la forme d’un journal électronique indépendant et généraliste » 26 appelé Demainonline qui entame son « aventure » en mars 2011. Parce que, explique-t-on, « la presse au Maroc n’informe pas du tout par crainte de représailles ou de boycott publicitaire surtout quand il s’agit de dossiers sensibles »27 et parce que « le droit à l’information des citoyens marocains, dans la presse écrite, l’audiovisuel ou sur le Net, est bafoué et ignoré au nom d’intérêts pas toujours clairs », Demainonlin 28 se propose donc « d’informer simplement, de manière professionnelle et transparente des événements » qui se passent au Maroc. La règle suivie par le site est qu’« il n’y a pas de censure ni d’autocensure autre que celle qui touche à la dignité et à l’honneur des personnes. Nous informons de tout, parlons de tout et débattons de tout selon des règles professionnelles communément admises au niveau international. ». Le premier éditorial 24 Ibid. Journaliste ayant collaboré avec Le Journal avant de lancer en 2000 l’hebdomadaire Demain, magazine satirique qui a fait l’objet de plusieurs procès. A. Lmrabet sera définitivement interdit en 2005 par une décision de justice d’exercer le journalisme au Maroc durant dix ans ; interdiction qu’il qualifie de « moyenâgeuse et absurde ». En créant Demainonline, s’appliquerait à ce journaliste la formule de celui qu’on fait sortir par la porte et qui finit par revenir pour entrer par la fenêtre. Voir aussi « Morts par asphyxie… financière. Sur la disparition de Nichane et du Journal hebdomadaire », voir L’Année marocaine, 2011, sur le site du CJB (www.cjb.ma). 26 http://www.demainonline.com/a-propos (consulté le 17/02/12). 27 http://www.demainonline.com/a-propos (consulté le 17/02/12). 28 Il se présente à ses visiteurs comme « Le Journal de l’info, du débat et de l’humour ». 25 L'Année marocaine 2012 concernant « le retour de Demain »29 , rédigé par A. Lmrabet, fixe les grands traits du positionnement du site. Demainonline, écrit-il, revient « avec la volonté d’accompagner la "transition démocratique" (si c’est le cas !) ou de dénoncer cette royale et douteuse mascarade si le régime essaye de faire diversion en ordonnant un relookage cosmétique de la constitution ». L’objectif de l’équipe de Demainonline est de « faire de cette publication un étendard de la démocratie au Maroc, le porte-voix des sans-voix et la vigie qui scrute l’horizon, prête à sonner le tocsin pour dénoncer les atteintes aux droits de l’homme dans un pays où persistent la séquestration de citoyens, les détentions extrajudiciaires, le confinement dans des lieux secrets et la pratique de la torture ». Même s’il est engagé contre les abus du makhzen à la fois politique et économique, Demainonline ne se considère pas comme « un journal de combat », mais comme un journal d’information30. Quant aux référents professionnels du nouveau Demainonline, A. Lmrabet considère que « dans ce journal nous n’avons pas de référent ou de modèles professionnels. La presse américaine, autrefois exemple pour nous tous, s’est fourvoyée dans la guerre en Irak ; et la presse française, plus proche de nous par la langue, s’est depuis longtemps décrédibilisée pour cause de gargarisassions tremens des estomacs de ses « envoyés spéciaux » perdus dans les méandres des palaces et des riads marocains aux frais de l’autocrate alaouite, c’est-à-dire du contribuable marocain. » En conclusion de son éditorial, A. Lmrabet rappelle que « cette publication électronique se compromet à occuper le terrain de l’information déserté par les médias traditionnels qui ont changé leur agenda journalistique pour des intérêts 29 http://www.demainonline.com/2011/03/28/leretour-de-demain/ (consulté le 23/04/11) ; le premier édito de A. Lmrabet a fait réagir 148 commentateurs. Il s’agit principalement de commentaires de félicitations pour ce retour de la presse indépendante et audacieuse. Un lecteur dit même avoir eu la chair de poule en lisant son éditorial. Le deuxième édito a fait l’objet, quant à lui, de 34 commentaires. Les propos qui suivront, que je mets entre guillemets, sont extraits de ce premier éditorial. 30 Ibid. 5 La presse écrite se met à la page… Internet commerciaux, et se sont transformés en porteparole du régime ». Demainonline a comme héros et comme icône le tunisien Mohamed Bouazizi. En vérité, le site semble en avoir un second : Abdelkrim al-Khattabi, héros de la guerre du rif. Le visiteur du site est, en effet, interpellé de prime abord par les photos d’A. al-Khattabi et du roi Mohammed VI. A la formule : « Je vous offre une monarchie faite à ma mesure… » qui serait prononcée par Mohammed VI, A. al-Khattabi répondrait : « Mais moi, j’avais déjà ma petite république en 1922... ». Demainonline 31 propose neuf rubriques avec les déclinaisons suivantes : Accueil (A propos, Contact), Actualité, Opinions (Edito, Respublica), 32 M’Khizène (International, Médias, Qui c’est, celui-là ?), Demain TV (Le JT de la journée, Les désaxés du net), Politique, Photos, BD et enfin Culture et Médias (Vidéo online, Culture). L’humour, « élément indispensable de l’identité » de Demainonline, représente aussi la marque de fabrique de Goud.ma. Goud.ma33 C’est en février 2011 que débute l’expérience de Goud.ma. Le « qui sommesnous ? » 34 explique que « ce n’est pas une première qu’un groupe de personnes crée un site d’information. Bien des gens nous ont 31 La conception de Demainonline revient à Gabfire, spécialiste mondial de la création de sites web de presse. Se présentant comme Premium Wordpress Themes, ce studio de design fournit une large gamme de modèles de sites en ligne robustes, fonctionnels et faciles à gérer pour des éditeurs en ligne sérieux (http://www.gabfirethemes.com). 32 Fidèle en cela à son humour, mkhizène serait le diminutif du makhzen, à la fois système et organisation du pouvoir au Maroc. 33 Le slogan du site est « dima nichane ». Les mots Goud et Nichane renvoient, dans le dialecte et dans le contexte marocains, à la droiture et au sérieux. Ses articles sont un mélange d’arabe classique et de dialectal. 34 Il a donné lieu à 74 commentaires de félicitations et d’encouragement pour la plupart. Par ailleurs, certains commentateurs estiment que le succès du site dépendra de la non-reproduction du modèle de Nichane qui, selon eux, a échoué lamentablement car il représentait un contrecourant aux valeurs ancestrales de la société marocaine. L'Année marocaine 2012 précédés dans ce domaine ; le Maroc disposant de quelques expériences qui ont eu l’audace de commencer afin de fonder ce qu’on appelle aujourd’hui la presse électronique ». Et d’ajouter : « Nous essaierons simplement d’être une nouvelle fenêtre à laquelle accéderont les surfeurs sur le Net pour savoir ce qui se passe [au Maroc]. Nous ne dirons pas que nous sommes arrivés tardivement. Sans fausse modestie, nous cherchons à se distinguer, aidés en cela par l’expérience accumulée dans la presse écrite ». Sur l’origine des journalistes et les ouvertures que permet le Web, Goud.ma informe que « la plupart des plumes que vous allez rencontrer sur ce site sont les "enfants" de la presse marocaine. Nous disons donc à nos lecteurs que nous ne sommes pas des intrus, ni des amateurs de plume… mais nous sommes ouverts, sans arrogance, sur ce qu’on appelle communément la "presse citoyenne", sur les blogs et sur les réseaux sociaux qui ont aujourd’hui de l’influence et qui font de la concurrence aux médias traditionnels en les dépassant parfois ». Quant à la conception de la démocratie, pour Goud.ma « [c’est] quelque chose de plus profond que les concepts de majorité, de minorité et d’élections alternées. C’est des valeurs philosophiques ayant pour bases la relativité, la rationalité et la liberté. La laïcité constitue la condition sine qua non de la démocratie, la justice sociale, sa base. La construction et la destruction de la démocratie est une responsabilité que partagent la société et l’Etat ». Et d’expliciter encore à ce sujet « nous ne sommes donc pas neutres quant à notre conception de la démocratie… nous ne serons pas neutres dans ce qui vous sera proposé sur ce site. En revanche, nous veillerons à être objectifs autant que faire se peut. Nous ferons de l’investigation, du travail sérieux et serein des valeurs de travail ainsi qu’une méthode pour affirmer notre crédibilité. Nous essaierons, autant que faire se peut, de respecter la déontologie telle qu’elle est reconnue aux niveaux national et international ». S’agissant du rapport aux lecteurs potentiels de Goud.ma, il est ajouté : « nous ne prétendons pas être la voix de Tous les Marocains et nous n’allons pas caresser dans le sens du poil pour que les visiteurs de notre site y restent en permanence. La majorité n’a pas toujours raison ! Nous serons du côté des 6 La presse écrite se met à la page… Internet valeurs auxquelles nous croyons, même si celles-ci s’opposent à celles de la majorité ». Et de conclure : « notre site sera un farouche défenseur des valeurs universelles et sera contre les fondamentalismes quels qu’ils soient. Il sera avec l’ouverture, la liberté, l’audace et la beauté et contre la fermeture, l’interdiction, sans populisme et d’une manière toujours Goud.ma ». Le site propose les rubriques suivantes : Page d’accueil, Qu’est-ce qui se passe ?, Faits divers, Culture, Médias, Reportage, Sport, « Azzine wal hdagua »35, « Tbarguig »36, Entretien, Opinions (en langues arabe et française). Les pages Opinion en langue arabe sont ouvertes à différents courants : Mokhtar Laghzioui, chroniqueur au quotidien Al ahdath almaghribia, Abderrahim Ariri et Noureddine Miftah, directeurs respectifs des hebdomadaires Al watan al-ane et Al-ayyam ; en français, on y trouve des articles du publicitaire et chroniqueur Mohamed Laaroussi, de Karim Boukhari 37 , d’Ali Bouabid, etc. Outre Ahmed Najim, directeur du site, l’équipe de Goud.ma est constituée d’anciens de Nichane 38 , soit huit journalistes au total39. Dans l’ensemble de ces sites, les visiteurs ont accès à différentes possibilités. Sur Goud.ma, il est possible d’envoyer des vidéos, de participer aux forums de discussion, de s’inscrire à la Newsletter, de lancer des requêtes sur le moteur de recherche, de contacter les responsables concernés pour diverses raisons (demande d’information, soumission d’article, publicité). Le « modèle économique » de ces nouveaux sites s’articule principalement autour de la publicité 40 . Le célèbre site d’annonces www.bikhir.ma 35 Cette expression, en dialectal, est utilisée pour parler d’une femme belle et soigneuse. 36 Qui serait de la curiosité malsaine. 37 Directeur de publication de Telquel (www.telquel-online.com). 38 « Morts par asphyxie… », op. cit. 39 http://www.goud.ma/%D9%81%D8%B1%D9 %8A%D9%82%D9%83%D9%88%D8%AF_a4432 .html 40 À la différence, par exemple, du journal français Mediapart qui s’appuie sur un « modèle économique différent », celui de l’adhésion payante. Cf. son projet (http://presite.mediapart.fr/contenu/leprojet.html) consulté le 27/05/12. L'Année marocaine 2012 dispose d’une bannière assez importante sur les pages d’accueil de Goud.ma et de Lakome.com. Sur ce dernier, Richbond 41 , entreprise d’ameublement, y insère ses publicités. Les annonces du moteur de recherche Google y occupent également une bonne place42. Mais le site d’information qui reçoit le plus de visiteurs et, ainsi, la part la plus conséquente en termes de publicité reste incontestablement Hespress.com43 . Depuis son lancement en 2007, de nombreux journaux électroniques lui ont succédé. Parmi les derniers nés de la presse électronique, l’on repère aujourd’hui Febrayer.com lancé en janvier 2012, par Maria Moukrim 44 , autant que des sites régionaux comme Tazacity.info et Micronews.ma. 41 Appartenant à l’homme d’affaires Karim Tazi, dont les chroniques sont publiées sur le site. 42 Annonces relatives à différents intérêts : tourisme, téléphonie, location de voitures, cours de langues, appartements à vendre, etc. 43 Lancé en 2007 par un certain Haddouchi, il est le plus visité aujourd’hui, avec plus de 700 000 visiteurs par jour. Chiffres présentés lors de la journée « Presse électronique au Maroc », ISIC, Rabat, 10 mars 2012. 44 Ancienne journaliste de l’hebdomadaire AlAyyam fondé par Nourredine Miftah. Lors du séminaire « Médias : entre liberté et responsabilité éthique » organisé par Media Diversity, le 2 mai 2012 à Rabat, M. Moukrim « révèle » qu’elle y est coactionnaire avec Tawfik Bouachrine ; ce dernier, fondateur du quotidien Al-massae avec Rachid Niny et Ali Anouzla, est aujourd’hui directeur de publication du quotidien Akhbar Al-yawm. En conséquence, il est à la fois dans les presses écrite et électronique. 7