LES ADOLESCANTS ET LA SEXUALITE : ENTRE DESIR ET PEUR
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LES ADOLESCANTS ET LA SEXUALITE : ENTRE DESIR ET PEUR
LES ADOLESCANTS ET LA SEXUALITE : ENTRE DESIR ET PEUR « Nous avons tous chrétiens ou non, des désirs sexuels, et besoin d’affection, de tendresse, de proximité » affirme Dominique, 18 ans. « Au lycée, entre copains et copines, beaucoup ne parlent que de çà ; d’autres l’évoquent moins, mais personne n’est indifférent ». Chaque jeune vit sa sexualité avec sa différence. A la fois, cela les rend impatients et leur fait peur. Garçons ou filles, ils n’ont pas les mêmes besoins, pulsions ou réactions, pas la même vulnérabilité. Il y a ceux dont la sensualité est plus développée que d’autres. Ceux qui recherchent avant tout la jouissance individuelle et les autres, pour qui la relation et les sentiments priment avant tout. Ceux qui ont déjà vécu une ou plusieurs expériences et qui ont sortent heureux ou meurtris. Et aussi ceux qui ont décidé d’attendre d’avoir rencontré l’homme ou la femme de leur vie. Enfin, il y a la société autour, qui banalise la sexualité, et ceux qui ont un pouvoir médiatique et portent en modèle le sexe sans relation personnelle, sans amour. De quoi brouiller les esprits ! Le plaisir n’est pas la seule voie d’accès au bonheur. Détrompez-vous ! « De nos jours, il n’y a qu’une minorité qui parle, celle que l’on voit à la télé, que l’on écoute à la radio et que l’on lit dans les journaux, les grandes gueules. Ils racontent l’histoire d’hommes et de femmes plus demandeurs de sexe que d’amour. Cela veut faire croire que tout le monde est dans ce cas-là. Ce qui est faux ! » explique le Dr Sylvain Mimoun, gynécologue et andrologue à l’hôpital Cochin (Paris). Plusieurs revues pour garçons ou filles se vendent avec des titres racoleurs : Sexe, prête pour le grand saut ? , Sexe, êtes-vous prêt à tout ? , Spécial sexotests, attirez-vous les bons coups ? Et à l’intérieur, tout est technicisé : on apprend à expérimenter le sexe comme à conduire une voiture, et le lecteur est conforté dans une recherche d’émotion personnelle. « C’est, ajoute Jacques Arènes, psychanalyste, comme si c’était le seul lieu possible d’épanouissement, comme si se perdre et se noyer dans le plaisir était la seule voie du bonheur. Mais ceux qui pensent ainsi s’exposer à beaucoup de souffrance, car la jouissance sexuelle est forcément fugace. » « Contrairement aux besoins – manger, boire – le désir, confirme le philosophe Dominique Folscheid, professeur à l’université de Marne-la-Vallée (77), est infini. C’est une énergie psychique impossible à combler. Décréter qu’il est un besoin légitime revient à créer une situation de frustration permanente. Surtout, ce point de vue ne peut débaucher sur une dévalorisation de l’autre, qui se retrouve réduit au rôle d’objet sexuel destiné à notre jouissance. » Les jeunes font de la résistance : ils ne cèdent pas à la norme sociale ! En bande ou sur les forums du Web, quand les jeunes parlent de sexualité, ils peuvent avoir tendance à utiliser un langage assez cru, provocateur, parfois à la limite de la pornographie. Avec des questions très techniques, souvent porteuses d’interrogations, plus profondes. Souvent c’est parce qu’ils n’ont pas les mots pour s’exprimer autrement et il y a loin de la parole à l’acte. Ainsi un garçon qui dit en voyant passer une fille « Je le baiserais bien ! », risque de partir en courant si celle-ci se retourne et lui répond : « On y va ! » « Le fait de répéter et de banaliser un mot, explique le Dr Mimoun, est une façon de se l’approprier et de l’apprivoiser. Parce que l’on est partagé entre le désir de tout savoir et de tout faire et la peur de ne pas être capable de la faire, face aux autres, on fanfaronne. » Mais quand le même type de discours est repris à leur compte par des adultes dans les médias, c’est grave, car cela devient un discours normatif : « Ces adultes, s’irrite Jacques Arènes, veulent prendre le pouvoir sur les jeunes pour les forcer à aller dans un sens qui n’est pas le leur. » Pourtant, c’est moins simple qu’il n’y paraît car, au regard des enquêtes réalisées récemment et à l’écoute des spécialistes, les jeunes feraient de la résistance à cette norme sociale que l’on cherche à leur imposer. Une préoccupation nouvelle du côté des garçons : la question des sentiments En effet, depuis quinze années, en France, l’âge du premier rapport sexuel n’a pas baissé et reste en moyenne à 17,2 ans. Lors de leurs consultations ou de leurs rencontres avec des groupes, Jacques Arènes et le Dr Mimoun constatent que les jeunes se montrent maintenant surtout préoccupés par la relation, les sentiments. Pour les filles, ce n’est pas nouveau car, surtout la première fois, la question essentielle a toujours été : « Est-ce qu’il m’aime ? » Pour les garçons, si ! Car ils sont de plus en plus nombreux à ne pas vouloir se laisser emporter par leurs pulsions et à dire : « Si je ne suis pas amoureux, avoir des rapports sexuels ne m’intéresse pas ! » « Mais, constate Jacques Arènes, même si la majorité n’est pas dupe, auprès des plus fragiles, ces discours peuvent être destructeurs. Ceux qui ne sont pas bien dans leur peau, qui éprouvent le besoin de combler un manque d’amour, qui ont une faible estime d’eux-mêmes, qui subissent des rapports sexuels précoces... » N’en déplaise à ceux qui disent le contraire, corps et cœur sont étroitement liés. Impossible d’affecter l’un sans toucher profondément à l’autre ! Il y a aussi tous ceux que le poids du groupe social auxquels ils appartiennent (y compris certains parents), pousse à passer à l’acte : à un moment, ils se sentent hors normes s’ils n’ont pas encore fait l’amour. Alors ils se jettent à l’eau, même s’ils ne sont pas prêts, simplement pour faire comme tout le monde. Ou bien, ils se laissent influencer par leur partenaire, pour lui faire plaisir ou par peur de le perdre, sans être vraiment libre face à la demande. La première relation sexuelle, ce n’est pas quelque chose de banal, et quand elle ne se passe pas bien, cela laisse des traces négatives. La question du désir physique finit tôt ou tard par se poser Sur le forum « Corps et cœur » de www.phosphore.com, les jeunes sont nombreux à témoigner que l’acte sexuel se passe mieux quand il y a des sentiments et quand on connaît l’autre. Ne serait-ce que parce que l’on se sent plus en sécurité dans une relation de confiance. D’autant que dans un rapport sexuel, l’essentiel, c’est de lâcher prise, de s’abandonner... Si le jeune vit une histoire d’amour sérieuse et qu’il s’installe dans la durée, la question du désir physique finit tôt ou tard par se poser : Suis-je prêt(e) ? En ai-je envie maintenant ? Jusqu’où aller si je l’aime, mais que je ne veux pas m’engager tout de suite avec lui ou elle pour la vie ? La réponse, c’est chacun(e) qui la donne, en pleine liberté et dans le respect de l’autre. « Cela passe par le fait de parler à l’autre, témoigne François, un internaute d’inXL6.org, de chercher à savoir ce qu’il aime, ce qu’il veut, d’essayer d’exprimer ce que l’on ressent, d’écouter. » « Avant la relation sexuelle au sens strict du mot, avant de donner son corps à l’autre, il y a une grande place pour les caresses, le désir et l’émotion » ajoute Elise. « Si l’on va trop vite, ne courton pas le risque que le langage des corps occulte l’expression de la tendresse et une vraie communication ? », s’inquiète Arnaud. « La vie sexuelle ne crée t-elle pas un engagement, des liens qui, s’ils sont brisés, font naître une douleur profonde ? », s’interroge Pauline. « Face à tout cela, la Bible et les chrétiens donnent les « billes », répond Dominique sur le forum de www.inXL6.org. Elles peuvent nous aider, peu à peu, à ordonner tout ce que nous pouvons désigner dans le sens d’une plus grande vérité de l’amour. »