News Letter n° 3 - Février 2003

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News Letter n° 3 - Février 2003
Février 2003
N° 3
De la légitimité de la guerre…
Je ressens une responsabilité particulière, voire égoïste à réfléchir sur ce sujet à
l’actualité brûlante, pourquoi ? Parce que l’acte I de ce drame a précisément pris
place le 2 août 1990 lorsque Saddam Hussein a envahi le Koweït ! Vous ne voyez
toujours pas ? C’était le jour de mon 29ème anniversaire… et depuis chaque année
cette date rime invariablement avec le souvenir du début de ce conflit déjà plus que
décennal.
Remplacer un jour de fête personnel par l’embrasement d’une des plus effrayantes
poudrières de ce tournant de millénaire était une initiative dont le monde et votre
serviteur se seraient bien passés.
Mais quelles sont les racines de ce conflit ? Comme sur les plages espagnoles et
françaises en ce moment, elles s’inscrivent en lettres noires et gluantes : le pétrole !
Au début des années 90, le régime irakien est en faillite virtuelle après son
affrontement terrible avec l’Iran. Qui se souvient d’ailleurs de ces centaines de
milliers de morts ? Il recherche désespérément des fonds. Il accuse alors le Koweït de
pomper illégalement dans sa nappe de Roumaila et exige plus de 2 milliards de
dollars de compensation.
Malgré la mobilisation des états de la région et leur volonté inquiète et légitime de
désamorcer la crise, le Koweït est attaqué le 2 août. L’Irak croit avoir fait main basse
sur le pétrole, l’argent et le territoire de son voisin. En d’autres termes, Saddam
Hussein pense désormais détenir près de 20% des réserves d’or noir mondial, plus de
100 milliards de dollars de cash et un véritable accès stratégique au Golfe persique
qui lui manque depuis toujours.
On connaît la suite de l’histoire, enfin ce que l’on a bien voulu nous en dire ou nous
en montrer…
Back in 2003, prenez les arguments développés ci-dessus et demandons-nous si le fait
d’avoir laissé le leader baasiste en place en mars 91, malgré l’écrasante victoire,
n’était pas une garantie de pouvoir y revenir quand on le voudrait et comme on le
voudrait ?
Comme si une police suspecte gardait les clés de l’appartement après un
cambriolage, des fois que… Ou le deuxième volet d’un billet d’avion aller et…
retour.
Alors qu’est-ce qui se cache derrière cet opaque rideau de fumée jamais dissipé
depuis l’incendie volontaire des puits koweitiens par des irakiens en fuite ?
La première intervention des 26 pays de la « coalition » a été payée dans sa plus
grande partie par les états de la région. Selon le Washington Post seulement 12% ont
été à la charge des contribuables américains. Le financement de l’acte II de la guerre
(Annoncée depuis des mois par les faucons d’outre-atlantique) par les voisins de
l’Irak (Qui n’ont rien demandé) serait plus problématique, à première vue.
A première vue seulement car si une guerre courte coûterait entre 30 et 50 milliards
de dollars et une intervention qui s’enliserait jusqu’à 200 milliards, la charge
financière induite représenterait un argument massue pour s’approprier au titre des
compensations le contrôle et les revenus du pétrole irakien pour des années !
Un investissement en résumé, à l’entame d’une année 2003 qui voit l’économie des
USA plus que stagner. Un fantastique coup de fouet au commerce extérieur.
A rapprocher de la polémique, (Oubliée depuis longtemps… le monde a la mémoire
courte), qui avait surgi après l’invasion du Koweït sur les déclarations ambiguës des
américains en juillet 1990 précisant que : « Il n’était pas dans leurs intentions de se mêler
des disputes territoriales entre l’Irak et le Koweït… ».
Si l’on se souvient que Washington avait massivement aidé Saddam Hussein lors du
conflit avec l’Iran, alors grand Satan de la région, beaucoup auraient pu prendre ces
déclarations comme un blanc-seing donné pour la prise de contrôle de leur si riche
voisin.
Quid de l’avenir ?
En référence à l’édito précédent, point de futurologie ou de marc de café dans ces
lignes qui ne se veulent qu’une modeste contribution à la réflexion ambiante. Je
terminerai donc par des questions que nous relirons avec intérêt dans quelques
semaines ou mois :
-
La France et l’Allemagne parviendront-elles à leurs fins (Sincères ?)
d’empêcher la guerre en exilant Saddam ?
Les Etats-Unis prendront-ils le risque de légitimer une radicalisation de leurs
ennemis en refusant à la « vieille Europe » le droit d’avoir un avis contraire ?
Le pétrole remplacera-t-il, une fois de plus, le sang au hit parade tragique des
valeurs humaines ?
L’Occident matérialiste comprendra-t-il que les valeurs transcendant
l’Homme ont toutes été inventées en Orient ?
Je rêve d’un entretien tête à tête entre Saddam Hussein et Georges W. Bush qui, après
une poignée de mains virile et une discussion franche, réaliseraient que la meilleure
manière de régler leur différent serait un duel à armes égales entre eux seuls.
Puis face à face, leur sabre fièrement dressé au bout du bras, se souviendraient de
leur famille, prendraient conscience qu’ils ont encore des choses à accomplir dans
cette vie et décideraient de la sauver…
La perception de la réalité n’est elle pas au fond qu’une question de lorgnette ? Pire,
de côté par lequel on tient cette dernière ? Installé dans un bunker à trente mètres
sous terre ou dans une forteresse des temps modernes, environné de guerriers
galonnés submergés de certitude, manipulant des plans, triturant des statistiques et
des scenarii à incidence incrémentale, peut-on encore avoir une vision humaine de la
vie du « dehors » ?
Je crains que la réponse déçoive ceux pour qui l’être humain est plus qu’une colonne
sous le titre « dommages collatéraux ».
A propos de titre, un bref rappel celui de cet édito est :
« De la légitimité d’une guerre… »
Manuel M. Martin
 www.manuelmartin.com
Dictionnaire personnel (Suite) :
Achat : Philosophie dominante du XXIème siècle.
J’achète donc je suis. Dis-moi ce que tu as, je te dirais ce que tu es. Nuance : ce Que tu
es et pas Qui tu es. Il y a longtemps que le Qui a été remplacé par le Quoi.
Quoi ? Mais qu’est-ce qu’il dit ? Achetez mes livres, vous le comprendrez…