AugustA - Patrice Boissonnas

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AugustA - Patrice Boissonnas
Masters 2012
journaldugolf.fr
avril 2012
Augusta,
à la poursuite du parcours idéal
Texte de patrice boissonnas - Photos dr
Bobby Jones rêvait d’un 18 trous parfait inspiré des meilleurs golfs britanniques. Inauguré en 1933, Augusta s’avéra
original et brillant, une vraie révolution dans le paysage golfique américain. Malgré de regrettables altérations, ce
parcours légendaire reste une référence incontournable. Le chef-d’œuvre n’a pourtant jamais été aussi menacé.
V
ibrant chaque printemps au rythme du Masters, l’Augusta National Golf
Club est un parcours hors du commun. Seul au monde à accueillir tous les
ans une épreuve du Grand Chelem, il est certainement le tracé le plus connu
de la planète, celui que tout le monde rêve de jouer un jour, un des principaux lieux de
mémoire de notre sport. Ses couleurs flamboyantes, son atmosphère feutrée, l’absence
de bannières publicitaires et une infinité de détails soigneusement contrôlés en font
un lieu à part, pratiquement inaccessible, une peinture si parfaite qu’elle peut sembler
artificielle. Sur le plan sportif, chaque édition du Masters produit une prestation 5
étoiles, rare tournoi à proposer un spectacle haletant du jeudi au dimanche. Devant
des millions d’yeux fascinés, le parcours exige le meilleur des joueurs et inspire des
coups prodigieux. Cette approche rentrée par Tiger Woods au 16 lors du dernier tour
du Masters 2005 est inscrite dans toutes les mémoires, elle n’aurait pu être réalisée
nulle part ailleurs et reste un des plus grands coups jamais joués par un champion en
marche vers une victoire majeure.
L’ŒUVRE DE DEUX GÉNIES
Augusta est né sous les meilleurs auspices : fruit d’une collaboration entre Bobby Jones
et Alister MacKenzie, tout simplement le meilleur golfeur et le meilleur architecte alors
en activité aux États-Unis, on ne pouvait rien attendre de moins que l’excellence. Âgé
de 28 ans en 1930, Jones venait de mettre fin à sa carrière. Il avait réalisé son fameux
« Grand Chelem » (les deux Open, américain et anglais, et les deux championnats
amateurs des mêmes pays) qui concluait en apothéose une décennie de domination
sur le golf amateur et professionnel. Quant à MacKenzie (1870-1934), il arrivait au
terme d’une carrière remarquable marquée par des réalisations incomparables
comme le Royal Melbourne ou Cypress Point. Augusta fut principalement dessiné
par MacKenzie mais la contribution de Jones s’est révélée considérable : son exigence
Le trou n°12 d'Augusta est devenu, à l'image d'une grande
partie de l'oeuvre co-dessinée par Alister MacKenzie et Bobby
Jones, un des grands classiques de l'architecture de golf.
Des trous souvent imités, jamais égalés.
perfectionniste, sa connaissance du jeu et son immense popularité ont porté le projet
vers les plus hauts sommets. Surtout, les deux hommes partageaient une même vision
du parcours idéal : un tracé pour tous, fait d’aventures et d’imprévus, un challenge
sans cesse renouvelé pour les meilleurs joueurs et une grande variété de situations
de jeu obtenues en exploitant au mieux chaque caractéristique du site. Tous deux
admiraient également l’Old Course de Saint Andrews, un golf simple et pur, formé
par le temps et le vent. Avec l’aide experte de MacKenzie, Bobby Jones allait réaliser
son rêve d’inaugurer un nouveau type de parcours dans son pays natal : une version
inland et à l’américaine des links britanniques.
UN PARCOURS RÉVOLUTIONNAIRE
Bien que le site choisi par Bobby Jones n’avait en soi rien d’exceptionnel, le parcours
achevé en 1932 ne connaissait aucun équivalent. Avec 6 700 yards (6 126 mètres), il
était l’un des plus longs des États-Unis, mais il se distinguait surtout par sa superficie
record, deux fois plus importante que la norme habituelle pour un 18 trous. De larges
fairways ondulés, de vastes greens mouvementés et l’absence de roughs n’offraient
rien de moins qu’un nouveau paysage golfique : un grand parc engazonné aux allures
de prairie où il semblait possible de jouer au golf d’un bout à l’autre de la propriété.
Cette architecture nouvelle contrastait diamétralement avec l’école « pénale » qui
dominait alors aux États-Unis. Ce style qui s’était développé depuis le début du siècle
visait à sanctionner chaque coup manqué et récompensait le jeu rectiligne. Son plus bel
exemple, Oakmont (Henry et William Fownes, 1904) affichait fièrement son statut
de golf le plus difficile d’Amérique, un parcours éprouvant où toute balle mal frappée
entraînait la perte d’au moins un point. Pour Augusta, Bobby Jones voulait un antiOakmont, un parcours ouvert valorisant la créativité.
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Masters 2012
journaldugolf.fr
Augusta, parcours parfait ? Évidemment non puisqu’il n’y a pas plus de parcours
parfait qu’il n’y a de partie parfaite : en d’autres termes, on peut toujours faire mieux.
À Augusta, on regrette une fin de parcours un peu en deçà de la réputation du lieu.
Après l’enchaînement des trous 10 à 16 (exception faite du 14), le 17 et le 18 font un peu
grise mine : malgré leur évidente difficulté, ils n’offrent que peu d’options de jeu et ne
proposent pas un spectacle au niveau des trous qui les précèdent. Si l’ordre des trous
actuels correspond bien à celui initialement imaginé par Jones et MacKenzie, rappelons
que pendant sa première année, Augusta s’est joué dans un ordre inversé, probablement
parce que nos deux compères estimèrent que le 8 et le 9 proposeraient un finish plus
excitant que les 17 et 18. L’ordre des trous fut finalement définitivement ré-inversé
l’année suivante pour des raisons techniques : les trous 11 à 13 situés tout en bas de la
propriété recevaient moins de soleil. Il était donc préférable de les jouer plus tard pour
leur donner le temps de se réchauffer. Aujourd’hui, les greens sont équipés d’un système
de climatisation garantissant leur parfaite homogénéité, mais plus personne ne souhaite
modifier l’ordre des deux boucles.
l’exception du 13 devenu malheureusement trop court, l’allongement des trous n’a
posé aucun problème puisque cette possibilité avait été prévue dès l’origine par Jones et
MacKenzie : pour le Masters 2011, le parcours mesurait 7 445 yards (6 808 mètres). Par
endroits, des arbres ont été plantés aux retombées de drives afin d’accroître la pression
sur les joueurs. Le trou 7 qui était un court par 4 sans bunker est devenu redoutable
et souvent dénoncé comme contraire à l’esprit du lieu. Mais l’essentiel des critiques
porte sur l’apparition de roughs, véritable viol des principes qui forgèrent la légende
d’Augusta. En effet, cette mesure rétrécissant les fairways et limitant les possibilités de
recoveries parvient à protéger le par mais déforme totalement la vision initiale d’un
parcours ouvert et roulant qui se jouerait librement, comme un links. Le 11 par exemple
a vraiment perdu en intérêt : autrefois, les joueurs cherchaient à driver soit l’extrémité
droite du fairway pour éviter l’eau au deuxième coup, soit à l’inverse ils visaient le côté
gauche pour transformer la mare en obstacle frontal, moins menaçant pour un pro
qu’un obstacle latéral. Aujourd’hui, le rough interdit ces deux options et force le jeu vers
un juste milieu moins savoureux.
UN CHEF-D’ŒUVRE MENACÉ
Aucun parcours n’est parfait, et des améliorations sont toujours souhaitables. À
Augusta, certains changements ont été voulus par Bobby Jones lui-même. Privé du
conseil de MacKenzie (décédé en 1934) et lui-même diminué par la maladie, il sollicita
divers architectes dans le but avoué de se rapprocher encore davantage de son rêve.
Aujourd’hui, les dirigeants du club ne sont pas moins animés par un désir de perfection
mais l’évolution incontrôlée du jeu moderne (toujours plus fort, toujours plus loin) les
oblige à viser un idéal différent de celui des fondateurs en rétrécissant les zones du jeu.
Chaque année, le parcours est réglé comme un moteur de Formule 1 pour éviter que le
Masters ne se gagne à 20 coups sous le par. Comment y parvenir sans quelques entorses
à la tradition ? Reste le miracle d’Augusta : malgré toutes les modifications dénaturant
l’esprit et le style de MacKenzie, le parcours reste hors du commun. Pourquoi ? Parce
que l’essentiel demeure : une succession de trous exceptionnels conservant une réelle
finesse et une dimension ludique grâce à des fairways (encore) raisonnablement larges
et surtout l’absence de rough autour des greens, dispositif essentiel pour permettre des
chips comme celui de Woods en 2005. Même amoindri, Augusta reste une exception
dans le paysage du golf professionnel. Tout n’est pas perdu et la magie opère encore,
mais pour combien de temps ? Elle n’a jamais semblé aussi menacée.
Aucun grand parcours américain n’a été autant modifié qu’Augusta. On peut louer la
faculté du club à se remettre en question mais on est en droit de s’inquiéter lorsque ces
« améliorations » portent atteinte aux caractéristiques essentielles du parcours. Jusqu’aux
années 1990, le vénérable tracé s’est transformé au ralenti, par petites touches successives,
à l’exception d’un changement plus brutal : la création d’un nouveau trou 16 en 1946.
Hélas, toutes ces évolutions ont totalement défiguré l’œuvre de MacKenzie et il n’en
restait déjà pratiquement plus rien il y a vingt ans : chaque green, chaque bunker avait
été modifié voire totalement transformé. Heureusement, l’enchaînement des trous et leur
disposition générale étaient restés inchangés. Aujourd’hui, Augusta compte 44 bunkers,
soit le double du parcours d’origine, mais cela reste encore modeste pour un parcours
de championnat. Un peu flétri, l’esprit minimaliste perdure donc malgré tout à l’image
du trou 14, large et sans obstacle. Le style des bunkers a en revanche considérablement
évolué : les formes très sophistiquées dont MacKenzie s’inspirait en regardant les nuages
ont laissé place à des géométries sans caractère. Seul le grand bunker de fairway du 10
a gardé un dessin fidèle à l’original. Suite à la victoire de Woods en 1997, les dirigeants
du club ont pris des mesures drastiques pour contrer les progrès du jeu moderne. À
Peu de parcours dans le monde proposent un tel
environnement et surtout un tel florilège de
situations périlleuses. À Augusta la raison doit
constamment lutter contre la tentation.
Le trou n°10 en est un parfait exemple.
Autre point marquant et révolutionnaire, Augusta ne comptait que 22 bunkers :
14 fairways et 8 greens n’en présentaient aucun et 4 trous en étaient même
intégralement dépourvus (les 5, 7, 15 et 17). Par comparaison, Oakmont comptait
plus de 100 bunkers à la même époque. Jones et MacKenzie démontraient ainsi
leur double credo : un seul bunker judicieusement placé suffit à défendre un
trou, et les meilleurs parcours peuvent être construits à un prix raisonnable.
Lancé en période de crise, Augusta ne disposait que d’un budget serré, mais
grâce à ce type d’économies, Jones put s’offrir un luxe rarissime pour l’époque :
l’arrosage automatique. Augusta devait servir de modèle à une révolution
architecturale sur le sol américain. Mais en gelant tout projet de construction, la
Grande Dépression des années trente mit fin à cet espoir. Lorsque les chantiers
reprirent après-guerre, une nouvelle génération d’architectes imposa un autre
style de parcours.
UN HOMMAGE AUX GRANDS PARCOURS
BRITANNIQUES
Conformément au souhait de ses auteurs, Augusta proposait la quintessence
du design stratégique dont on pouvait faire l’expérience dans les meilleurs golfs
britanniques. Cette architecture appréciée des puristes exige de penser plusieurs
coups en avance, comme aux échecs : les grands greens roulants requièrent
des approches précises, lesquelles ne pourront être confortablement exécutées
que depuis certaines zones du fairway, suite à des drives précis. La place ne
manque pas à Augusta, mais pour chaque coup il n’y a qu’un endroit idéal,
lequel dépend de l’emplacement du drapeau et des conditions de jeu. Ainsi que
l’expliquait Jones, « le design parfait privilégie le jugement juste et la qualité de la
frappe de balle en récompensant le bon placement à chaque coup ». Un tel tracé
exige talent et intelligence de la part des bons joueurs mais ne pénalise jamais
les hauts handicaps. Dans cet esprit, MacKenzie a toujours eu soin de placer les
bunkers de fairways loin des départs pour ne gêner que les meilleurs joueurs.
De la même manière, l’absence de rough permet de ne jamais chercher sa balle
et contribue à faire de chaque partie un moment de plaisir.
Dans son plan d’origine, Augusta abondait de références à des célèbres trous
d’outre-Atlantique : le green du 7 était protégé par une dépression semblable
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PRÉSENTE
C H R I S T I A N C É VA Ë R
à la Valley of Sin du 18 de Saint Andrews ; le 4 reproduisait une stratégie
similaire au 11 du Old Course ; les monticules gardant le green du 8 imitaient la
configuration du 17 de Muirfield, etc. Toutefois MacKenzie se défendait d’avoir
cherché à copier ces trous prestigieux : « Nous avons essayé de produire dixhuit trous idéaux, non pas en copiant des trous classiques, mais en articulant
leurs meilleurs éléments avec d’autres caractéristiques suggérées par la nature
du terrain. » De fait, Jones et MacKenzie sont parvenus à créer sur un même
parcours un nombre inégalé de très grands trous de golf, eux-mêmes devenus
des classiques très imités, à l’image du 12 dont il existe des dizaines de versions à
travers le monde. Le trou n° 13, court par 5, illustre à merveille le génie du lieu.
Souvent considéré comme le fleuron d’Augusta, il fait partie des meilleurs trous
de la planète. Usant à merveille du ruisseau sur sa gauche et du dénivelé sur la
partie droite du fairway, MacKenzie en a fait un concentré de golf stratégique,
un trou aux multiples options en apparence tranquille mais où chaque coup
imparfait risque un châtiment sévère.
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La plus grande originalité d’Augusta, ce qui en fait un lieu si rare et inspirant,
reste l’incroyable pression psychologique que le parcours exerce sur les joueurs.
Peu de golfs proposent un tel florilège de situations périlleuses où la raison doit
lutter contre la tentation. Pratiquement tous les trous offrent une voie héroïque
menant au birdie (voire à l’eagle) et une voie de la prudence tenant la balle loin
du danger. Comme l’expliquait Cary Middelcoff, veste verte en 1955 : « Vous
aurez des occasions de birdie si vous êtes patient, mais si vous cherchez le
birdie vous pouvez faire bogey à chaque trou. » Dans le chaudron du Masters,
le parcours met les joueurs face à eux-mêmes, seuls avec leurs peurs, libres de
choisir leurs risques et conscients des peines auxquelles ils s’exposent. Là où
de nombreux tracés exercent une pression physique (fairways étroits, greens
petits…), Augusta produit des pièges mentaux et élève le jeu vers ce qu’il a de
plus noble et de plus humain. On comprend dès lors pourquoi plus que tout
autre tournoi majeur le Masters confère à ses champions un statut de demi-dieu
du golf. La cérémonie de la veste verte et l’invitation à rejouer le tournoi à vie
nourrissent très habilement cette mythologie. Assurément, Augusta était destiné
à accueillir le tournoi des Maîtres.
avril 2012
#2
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