Le marégraphe de Marseille Histoire des sciences

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Le marégraphe de Marseille Histoire des sciences
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Le marégraphe de Marseille
par Gérard SERRA
Professeur retraité
13007 Marseille
[email protected]
RÉSUMÉ
Les altitudes du territoire national et des pays européens sont mesurées à partir
d’un point zéro qui est le niveau de la mer. Encore faut-il se mettre d’accord sur ce point
zéro… Le marégraphe situé à Marseille, répond à cette nécessité… depuis 1884, mais
avec des modernisations.
LE CHOIX DU SITE
L’océan Atlantique par ses marées dont l’amplitude varie au cours des saisons, se
prête mal au repérage du zéro. La Méditerranée qui ne connaît que des marées barométriques et des fluctuations dues à la houle est un meilleur candidat. À Marseille, sur la
corniche J.-F. Kennedy, à la pointe la plus occidentale, se trouve le bâtiment qui abrite
le dispositif.
Vue d’ensemble du marégraphe.
Vol. 99 - Octobre / Novembre 2005
Entrée du marégraphe.
Gérard SERRA
Histoire des sciences
HISTOIRE DES SCIENCES
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UNION DES PROFESSEURS DE PHYSIQUE ET DE CHIMIE
LE DISPOSITIF
Il comporte un flotteur qui, par un puits, communique avec la mer. Ses fluctuations
verticales sont communiquées par un câble et une poulie à un enregistreur constitué d’un
cylindre d’axe horizontal sur lequel un papier noirci est entraîné et gravé par un stylet.
La moyenne sur les années 1884 à 1897 a déterminé le niveau zéro. L’ordre de grandeur
de ces fluctuations, essentiellement dues à des marées barométriques est de vingt centimètres.
Historique.
Plans du marégraphe.
Depuis 1884, (première mise en service), le marégraphe archive les enregistrements
dont la consultation peut se faire en prenant contact avec le service de l’IGN (Institut
géographie national) à Aix-en-Provence.
Le puits et son flotteur.
Le marégraphe de Marseille
Détail de l’enregistreur.
Le Bup no 877-878
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Histoire des sciences
Régulièrement, un ingénieur vient vérifier le bon état du mécanisme.
Enregistrement.
Archivage des enregistrements.
En comparant cette moyenne avec les mesures plus récentes, on constate une augmentation du niveau de la mer de dix centimètres en un siècle.
LA MODERNISATION DU MARÉGRAPHE
Si le dispositif d’origine est toujours opérationnel, il est couplé à un sonar qui
mesure la hauteur du flotteur (cf. tube gris foncé en haut de la photo du puits et son flotteur). De plus, un GPS (Global position system) détermine le niveau du sol, car depuis
que l’on dispose de la précision altimétrique de ces appareils, il faut tenir compte des
marées terrestres ! Ces résultats sont consultables à distance et cependant la visite régulière de l’ingénieur IGN a pour but de contrôler le bon fonctionnement du sonar… en
comparant ses résultats avec ceux du dispositif d’origine !
L’IRONIE DE L’HISTOIRE ET DE LA GÉOGRAPHIE
Pythéas, astronome, mathématicien, explorateur, et ethnologue avant l’heure, vivait
à Massalia, nom grec de Marseille. Il y avait mesuré la latitude, en détournant le gnomon
de sa fonction première de calendrier et d’horloge solaire. Renouvelant ses mesures aux
solstices et aux équinoxes, il avait mesuré par la même occasion, l’angle des saisons. Au
cours de son périple, dans les contrées septentrionales, 330 ans avant notre ère, après
avoir franchi le détroit de Gibraltar, il découvrit la marée océanique. Fin observateur, il
constata que chaque soir la marée prenait cinquante minutes de retard sur celle de la
veille. La position de la Lune prenait dans le même temps, le même retard pour retrouver
sa position dans le ciel. Il en conclut la corrélation entre les lunaisons et les marées. C’est
donc à un Massaliote que revient cette découverte, deux mille ans avant la théorie de la
gravitation de Newton.
Et c’est à Marseille que l’on mesure le niveau moyen des marées… justement parce
qu’elles sont très faibles ! Et ce n’est pas une galéjade !
Vol. 99 - Octobre / Novembre 2005
Gérard SERRA