Patrimoine foyalais, patrimoine d`avenir
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Patrimoine foyalais, patrimoine d`avenir
enir v ’a d e in o im r t a alais, p y o f e in o im r t a P Chaque pays, chaque culture possède sa propre histoire de la découverte de son patrimoine. Le succès est aujourd’hui planétaire et les journées du patrimoine en sont un exemple par la fréquentation des publics toujours plus nombreux et avides de connaître ce qui fait la richesse de sa culture et de son histoire. Depuis 1983, Aimé Césaire et Camille Darsières en visionnaires avertis, avaient initié cette vaste recollation des différents aspects de notre patrimoine, matériel et immatériel. La mise en œuvre de ces premiers balbutiements d’une aventure s’est révélée féconde et a donné naissance aujourd’hui à une profusion d’associations, de revues, de débats, de manifestations, de pratiques, etc., qui toutes ont une vertu pédagogique, celle d’initier le public à la notion de culture patrimoniale, de préservation et de conservation patrimoniale. Mais l’intérêt pour le patrimoine n’est pas un culte passéiste de la nostalgie d’un âge d’or perdu. Il n’est pas ressassement et fétichisme du passé. Il est en prise directe avec la vie au présent et ses impératifs économiques, sociaux et culturels. Il est un formidable levier pour faire de la mémoire un tremplin pour l’édification, une compétence retrouvée. Cette année, les samedi 19 et dimanche 20 septembre, le Député Maire de Fort-de-France, Serge Letchimy, vous propose une promenade à la découverte de sites prestigieux mais aussi la re-visitation de pratiques ancestrales qui tissent les liens d’une communauté, d’une ville dans son environnement entre la mer et les mornes. De la ceinture des forts à l’emblématique fort Saint-Louis pour comprendre le système défensif d’une baie et d’une ville à l’aune d’un patrimoine caribéen, depuis Carthagène des Indes en Colombie jusqu’à Saint-Kitts, l’ouverture est exceptionnelle à des voies nouvelles pour le grand public. Le patrimoine industriel n’est pas en reste puisque le bassin de Direction Régionale des Affaires Culturelles Martinique radoub est à nouveau proposé à la connaissance. Outil rare et unique dans cette partie de la Caraïbe, daté de 1868, il demeure le signe de la performance de la ville tant sur le tracé des routes stratégiques que sur la modernité d’un site, bien avant la catastrophe de St-Pierre. Une nouveauté est proposée autour du patrimoine funéraire. L’art de bien mourir se conjugue avec l’art de bien vivre et les cimetières nous indiquent par leurs différentes strates « architecturales » des tombes, comment cette interrogation et ce rapport à la mort se sont incarnés dans des modes d’habiter pour l’au-delà. Pour commencer, les deux cimetières du centre-ville (La Levée et le Trabaud) feront l’objet de visites commentées ; nous espérons par la suite continuer cette démarche dans les autres cimetières de la ville. Enfin, une matinée est consacrée aux « Plantes Médicinales : un Patrimoine d’Avenir » depuis la tradition des plantes médicinales et des rimèd razié jusqu’aux recherches sur la pharmacopée et la production de phytomédicaments. Dans les jardins de la place « Légitime Défense », devant l’ancien Palais de justice, vous pourrez rencontrer les producteurs de plantes, ceux qui les transforment et qui font des recherches ici et dans la Caraïbe, assister à des conférences-débats, apprendre à planter votre propre jardin de plantes médicinales, avoir des conseils judicieux, devenir des éco-citoyens défenseurs de la biodiversité et de notre patrimoine botanique. Je vous souhaite d’excellentes journées du patrimoine à Foyal. Elisabeth Landi Conseillère municipale, Présidente de la Commission Mémoire, Patrimoine, Urbanité Publication : Ville de Fort de France Service Culture, Patrimoine, Relations Internationales site : www.fortdefrance.fr - Tél. : 0596 72 84 27 LE SY STEME DEFENSIF DE FORT-DE-FRANCE Le système de fortifications militaires de la baie de Fort-de-France contribue à faire de celle-ci l’une des plus richement dotées aux Antilles sur le plan du patrimoine architectural militaire. Outre les édifices militaires mentionnés ci-dessous, ce système défensif comprend également la batterie de la Pointe des Sables, située au sud-est du territoire foyalais ainsi que le fortin de la Pointe du bout et le fort de l’îlet à Ramiers. Le Fort Saint-Louis La construction du Fort Royal, selon les principes de Vauban, débute en 1640 et se poursuivra notamment durant la seconde moitié du XVIIe siècle et au cours duXVIIIe siècle. Le fort SaintLouis a été dénommé successivement Fort de la République à compter de 1793, Fort Edward sous l’occupation anglaise, Fort Saint-Louis sous la Restauration, Fort de la République sous la IIe République et enfin Fort Saint-Louis sous le Second Empire. Il fut l’objet de plusieurs batailles. N.B : En raison de l’emplacement stratégique du Fort Royal et de la baie, la ville de Fort-deFrance est devenue dès 1692, sous son ancienne appellation, le chef-lieu de la Martinique (et non en 1902 comme beaucoup le croient). Le fort Saint-Louis est aujourd’hui le siège de la marine Fort Saint-Louis (Photo : L’atelier Jean-François Pradal / © GIP-GPV de FDF, avril 2008) La Caserne de Gerbault La caserne militaire de Gerbault fut édifiée à la fin du XIXe siècle. Elle se situe à flanc de colline sur la route dite de la folie menant du fort Saint-Louis au fort Desaix. Le nom de Gerbault lui fut donné en hommage au directeur de l’artillerie, le lieutenant colonel Gerbault, mort le 8 mai 1902 lors de l’éruption de la montagne Pelée. Durant plusieurs décennies, des milliers de jeunes martiniquais y ont été recensés ou y ont effectué leur service militaire (obligatoire à l’époque). De nouveaux casernements y ont été édifiés pour les militaires au début du XIXe siècle. Camp militaire de Gerbault (Photo : ComSup Antilles, 2006) Le Fort Desaix et la lunette Bouillé La construction de ce fort fut décidée suite à la victoire anglaise de 1762 (où les Britanniques après s’être emparés du morne Tartenson et du morne Garnier, à l’actuel emplacement du fort Desaix, obtinrent, après l’avoir bombardé depuis ces positions, la capitulation du Fort Royal, actuel Fort Saint-Louis). La construction du fort Bourbon s’acheva en 1774 et celle de la lunette Bouillé (reliée au fort par un tunnel de 400 m de long), rajoutée ultérieurement, en 1780. son baptême du feu en février et mars 1794. Il reçut l’appellation de Fort Desaix en 1802. En partie détruit par les Anglais en 1815 avant sa restitution aux Français, il fut reconstruit à compter du milieu du XIXe siècle (en 1848, puis en 1851, 1870 et de 1884 à 1886). Durant la seconde guerre mondiale, une partie du stock d’or (environ la moitié soit 300 tonnes de lingots d’or) de la banque de France fut entreposée au fort Desaix. N.B : Louis Charles Antoine Des Aix dit Desaix (1768-1800) fut général de l’armée du Rhin en 1796, général et administrateur en Egypte en 1798. Il mourut le 14 juin 1800 lors de la bataille de Marengo remportée sur les Autrichiens. (Source : S. Audoin-Rouzeau, Les grandes batailles de l’histoire, Paris : Hachette, 2003) A l’origine, dénommé fort Bourbon, il prit le nom de Fort-de-la-Convention sous la Révolution. Ce fut sous cette appellation qu’il connut Fort Desaix et lunette Bouillé depuis le sud-ouest (Photo : ComSup Antilles, 2006) Lunette Bouillé (Photo : ComSup Antilles, 2006) Le camp de Balata Tourtet Situé sur la route nationale n°3 dite route de la Trace à une dizaine de Km du centre-ville, l’ancien Camp militaire de Balata culmine à environ 300 m d’altitude. Il s’agit d’un ancien camp militaire, aujourd’hui désaffecté, dont la fondation remonte au milieu du XIXe siècle et qui a été modelé en fonction des nécessités du moment, soit pour l’implantation des bâtisses, soit pour la réalisation d’aires de jeux. En juillet 1943, le Camp Tourtet de Balata fut un haut lieu du soulèvement conduit par le Commandant Tourtet de l’Armée de Terre contre le régime incarné par l’Amiral Robert. Ce soulèvement venait compléter le mouvement de dissidence qui avait débuté suite au refus par de nombreux Antillais de reconnaître la capitulation française en 1940 et le gouvernement de Vichy représenté par l’Amiral Robert. Ce site est d’abord un vaste ensemble vert, de type semi humide qui conjugue tous les atouts dévolus aux espaces de jeux d’enfants, d’activités sportives et récréatives. La Ville a acquis l’ancien camp militaire Tourtet à Balata. Cette vaste propriété s’étend de la route de Balata à la voie d’accès à la Fontaine Didier. Outre des arbres remarquables, il y subsiste les vestiges des principaux bâtiments militaires et à ce jour s’y sont installés les locaux de l’ACOM (club de tir) et un terrain de football de quartier. Le site a également accueilli des activités sportives et culturelles ponctuelles. Sources : Office de Tourisme de Fort-de-France Note de Présentation Etude CE2A Dossiers de la ville et du GIP Vue des casernements du camp de Balata Les batteries de la Pointe des Nègres Dès le XVIIIe siècle, il existait une batterie sur le site (elle figure d’ailleurs sur la carte de Moreau du Temple datée de 1770). Le nom du site tirerait son origine d’un marché d’esclaves qui se tenait sur ce lieu de débarquement. La batterie de la Batterie basse de la Pointe des nègres (Photo : ComSup Antilles, 2006) Pointe des Nègres se compose en fait de deux batteries : • La batterie basse, située sur la côte rocheuse ; • La batterie haute, située une centaine de mètres Batteries de la Pointe des nègres, vue d’ensemble (Photo : L’atelier Jean-François Pradal / © GIP-GPV de FDF, avril 2008) plus à l’intérieur des terres. Le corps de garde situé en retrait de la batterie haute date du milieu du XIXe siècle. Batterie haute, corps de garde (milieu XIXe siècle) Le Fort Tartenson Fort Tartenson (Photo : ComSup Antilles, 2006) Culminant à 88 mètres d’altitude, le morne Tartenson fut utilisé dès le XVIIIe siècle comme site d’installation de batterie par les Anglais qui occupèrent cette position et l’utilisèrent pour bombarder le fort Saint-Louis lors des attaques qu’ils menèrent en Martinique, notamment lors de leur attaque victorieuse en 1762. Le fort Tartenson constitue l’avant dernier fort érigé au sein du système de défense de la baie de Fort-de-France. La position du fort Tartenson lui permettait, outre de protéger les flancs ouest du fort Desaix et d’occuper une position dominante au nord-ouest du fort Saint-Louis, de couvrir de son feu la batterie de la Pointe des Nègres et de croiser son tir avec les autres positions fortifiées de la baie de Fort-de-France. Commencée en 1867 (date portée) durant le second empire, la construction du fort Tartenson s’acheva en 1873 sous la IIIe République. (non loin de la fontaine Gueydon) jusqu’en mars 1906, date à laquelle il quitta la Martinique avec le voeu de revoir son pays mais il n’en eut pas le temps car il mourut en décembre 1906 à l’hôpital d’Alger après avoir séjourné à Blida. Le fort Tartenson avait, au début du XXe siècle, une capacité d’hébergement de troupes de 57 soldats du rang et de 4 officiers, outre le gardien de la batterie. Par la suite, de nouveaux bâtiments furent construits au milieu du XXe siècle pour héberger les troupes de l’armée de terre. Le fort Tartenson, utilisé par les dissidents, joua un rôle dans le ralliement de la Martinique à la France libre en 1943. Le fort Tartenson est devenu la propriété de la Ville au cours du second semestre de l’année 2009. Le fort est nettement plus petit en superficie que les forts Saint-Louis et Desaix mais son intérêt et son caractère historique lui sont surtout conférés par un autre élément ! Fort Tartenson, entrée monumentale En effet, Béhanzin, roi du Dahomey (ou encore d’Abomey, actuel Bénin), y séjourna avec une partie de sa cour de 1894 à 1898 durant son exil à la Martinique ; exil auquel il fut contraint après avoir été vaincu par les Français. Le roi Béhanzin fut ensuite logé à la villa des Bosquets Le roi Béhanzin et sa cour au Fort Tartenson ( Source : Archives départementales ) Monuments historiques et sites d’intérêt Le bassin de radoub Navires en cale sèche dans le bassin de radoub (Photo : ComSup Antilles, 2006) La forme de radoub ou cale sèche est une fosse en forme d’auge, maçonnée en gradins, dont l’une des extrémités communique ave la mer et se ferme par un bateau porte. Sa construction initiale de 1854 à 1868 pour la guerre du Mexique, pour la division navale et pour la Compagnie générale transatlantique. Il fut allongé entre 1941 et 1942 pour le radoub du croiseur Emile Bertin qui rejoint les FFL en 1943. Unique dans les petites Antilles et même dans l’ensemble du domaine français d’outre-mer, Par ses dimensions, la forme de radoub de Fort-de-France représente la plus grande construction civile en maçonnerie de pierre de taille réalisée dans l’outre-mer français. Le bassin de radoub de Fort-de-France est aussi l’unique équipement de cet âge et de ce type qui soit encore en service et exploité de façon rentable. Contemporain des édifices militaires (comme le Fort Saint-Louis) et des fontaines (Fontaine Mackau, Fontaine Gueydon), c’est aujourd’hui l’une des constructions en dur les plus anciennes qui subsistent à Fort-de-France. Les plans initiaux (1854, 1860) ont été élaborés sur place à l’initiative, non pas d’un ministère parisien, mais du Conseil général et d’une série de gouverneurs entreprenants et soucieux du développement économique de la Martinique, en particulier Gueydon et Maussion de Candé. La plupart des engins de levage, d’épuisement et de fondation ont été construits sur place, avec les moyens locaux et par des entreprises locales. Les maçonneries de la partie ancienne, réalisées par des ouvriers martiniquais, témoignent des savoirs faire traditionnels, en matière de taille de pierre et surtout de mortiers hydrauliques : un atelier de taille a fonctionné de 1864 à 1868 aux abords de la fouille et deux fours à chaux de 1860 à 1868 à l’extrémité de la Pointe Bouillé. Si une partie de la main d’œuvre a été salariée, l’autre consistait en prisonniers mexicains, en soldats condamnés pour indiscipline ou « disciplinaires » et en détenus (hommes et femmes) pour dette ou « dettiers » dont les cellules se trouvaient au Fort Desaix. En 1942 encore, les fouilles pour l’allongement ont été faites à la pelle et au panier par une main d’œuvre salariée, en grande partie féminine. (Source : Vincent Huyghues-Belrose) Le palais de justice et la statue de Victor Schoelcher Ancien palais de justice et place Légitime défense L’ancien palais de justice de Fort-de-France datant du milieu du XIXème siècle (en maçonnerie et bois qui précéda, in situ, celui construit en 1907) fut remplacé par le palais de justice édifié à partir de 1906 et inauguré en 1907. Ce dernier conserva cette fonction durant près d’un siècle jusqu’en janvier 2002, date à laquelle le nouveau palais de justice (abritant le tribunal de grande instance) édifié sur le boulevard général de Gaulle et mitoyen de la mairie entra en service. précédée d’un square baptisé place légitime défense, en hommage à la revue éditée en 1932 par un groupe d’étudiants marxistes martiniquais dont René Ménil. La statue de Victor Schoelcher, réalisée par Marquet de Vasselot et inaugurée en septembre 1904, y est positionnée centralement. Patio dit « allée des manguiers » Ancien tribunal actuellement Centre Culturel Camille Darsières Les ateliers du Sermac Inscrit, dans sa totalité, en tant que monument historique en décembre 1991, le palais de justice est devenu propriété de la ville de Fort-deFrance en juin 2005 puis a été rebaptisé centre culturel Camille Darsières après le décès de l’ancien député de la Martinique et adjoint au maire de Fort-de-France survenu le 14 décembre 2006. L’élévation antérieure de l’ancien tribunal est Carte postale de l’ancien palais de justice au début du XXè siècle (Source : Archives départementales) Statue de Victor Schoelcher (Photo : René-Charles Suvélor / © Ville de Fort-de-France) Les cimetières de la Levée et du Trabaud Baptisé « Cimetière des Riches » en raison des notables qui y sont enterrés, c’est aussi la nécropole la plus ancienne de Foyal. On y trouve des tombes collectives et des tombeaux de personnages publics (André Aliker, Jules Fanfan…), ou d’artistes (Léona Gabriel, Loulou Boislaville,…). A quelques centaines de mètres au nord-ouest, au dessus de l’autre rive du canal de Vassor et au sein du quartier de l’Ermitage se situe un autre cimetière, plus populaire, dénommé cimetière du Trabaud. De nombreux Foyalais et Martiniquais le surnomment « cimetière des pauvres » par opposition au précédent. Aux Antilles, les cimetières sont un peu la reproduction d’un habitat des vivants et divers éléments de l’architecture domestique ou publi- Cimetière de la Levée à l’ouest de la ville basse (Photo : L’atelier Jean-François Pradal / © GIP-GPV de FDF, avril 2008) que ont été réintégrés pour ériger certaines des tombes. (Sources : Office de Tourisme de Fort-de-France / Dossier GIP-GPV FDF) Cimetière de la Levée (vue d’une des allées) (Photo : René-Charles Suvélor / © Ville de Fort-de-France) Création graphique : TAG sarl 0596 73 28 89 le bassin de Fort-de-France appartient à la génération des grandes formes de radoub du Second Empire, dont on a découvert, en métropole, l’intérêt technique, architectural, pédagogique et pour l’animation culturelle (Cherbourg, Rochefort, Toulon).