CINQ QUESTIONS ESSENTIELLES SUR LE GÈNE

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CINQ QUESTIONS ESSENTIELLES SUR LE GÈNE
Cinq questions essentielles sur le gène suppresseur de tumeurs p53
CINQ QUESTIONS ESSENTIELLES SUR LE GÈNE
SUPPRESSEUR DE TUMEURS p53
P. HAINAUT
Unité des Mécanismes de la Cancérogenèse
Centre International de Recherche sur le Cancer
- Lyon -
Introduction
Bien qu’elles soient depuis 20 ans au coeur des préoccupations des biologistes moléculaires du cancer, les fonctions de la protéine onco-suppressive p53 ne sont encore
qu’imparfaitement comprises. L’étude de p53 et de ses
mutations a joué le rôle d’un "fil d’Ariane" pour permettre
l’exploration de nombreuses voies signalétiques intracellulaires dont le dysfonctionnement est associé au développement du cancer. Aujourd’hui, ce savoir a atteint une
telle diversité et une telle complexité qu’il est très difficile
de présenter un modèle simple et complet pour rendre
compte des rôles biologiques de la p53. Le but de cet article est de faire le point sur l’état actuel des connaissances
sur la régulation et la fonction de p53 et de discuter brièvement pourquoi ce gène est si souvent altéré au cours de la
carcinogenèse.
Question 1:
Pourquoi tant de publications sur p53 ?
Depuis sa découverte en 1979, p53 a fait l’objet de plus de
12000 publications et s’est taillé une place de choix au "hit
parade" des gènes les plus étudiés (1). Il doit ce remarquable succès à son implication fréquente dans presque tous
les types de cancers humains. Le gène p53 est situé sur le
bras court du chromosome 17 (17p13) et comprend 11 exons
(dont le premier n’est pas codant). Son produit est une
phosphoprotéine nucléaire dont le poids moléculaire apparent, 53000, a déterminé le nom de baptême. Cette protéine est exprimée de façon quasi-constante et dans presque tous les tissus. Elle est cependant peu abondante, car
elle est activement dégradée par le protéasome en quelques minutes et ne s’accumule donc pas dans la cellule.
On peut donc la considérer comme un facteur latent dont
l’activité s’éveille lorsque la protéine s’accumule suite à
sa stabilisation en réponse à des signaux bien précis. Pour
l’essentiel, on a longtemps considéré que tous ces signaux
avaient un commun dénominateur: la capacité d’induire
des cassures de chaînes de l’ADN (irradiation X ou gamma,
UV, stress oxydant, inhibiteurs des topoisomérases, carcinogènes chimiques) (2).
Revue de l'ACOMEN, 1999, vol.5, n°3
La liste des processus moléculaires où p53 pourrait jouer
un rôle est loin d’être close et fait l’objet d’intenses débats. Parmi ceux sur lesquels les chercheurs s’accordent,
on peut citer le cycle cellulaire, la mitose, la différenciation,
le développement, l’apoptose, la sénescence, la transcription, la réplication et la réparation de l’ADN, la stabilité
génomique et l’angiogenèse. Toutefois, la protéine p53
n’est pas essentielle à la vie : des souris dépourvues de
p53 peuvent se développer normalement, même si un défaut dans la morphogenèse du système nerveux central
entraîne une excencéphalie léthale chez près de 25% des
embryons femelles (3; 4). Les souris ont cependant une
durée de vie limitée car elles développent très rapidement
des tumeurs multiples. Lors de leur publication en 1992,
ces observations ont conduit à considérer p53 comme le
"suppresseur de tumeurs par excellence" (5), ou, selon
l’angoissante réflexion de David Lane, "la seule chose qui
se dresse entre nous et la mort par cancer" (6). Toutes ces
données ont contribué à conférer à p53 un statut quasimythique, grand coordonateur de l’homéostasie du génome et défenseur ultime de la cellule contre les effets
oncogènes des agents mutagènes.
Au cours des trois années écoulées, quatre découvertes
ont ramené notre vision de p53 à de plus justes proportions. Premièrement, le gène p53 n’est pas un gène unique.
Il fait partie d’une famille comprenant au moins deux autres
gènes, p73 et p51, dont les produits régulent l’expression
d’un répertoire de gènes qui recouvre celui contrôlé par
p53 (7). Même si ces gènes ne sont pas fréquemment mutés dans les cancers et font l’objet d’une régulation très
différente, ils pourraient comme effecteurs principaux être
responsables de certains effets biologiques attribués à p53.
Deuxièmement, la mutation de p53 n’est pas exclusivement
associée à la cancérogenèse. En effet, on a pu détecter
dans la peau humaine saine, des groupes de cellules exprimant un gène p53 muté. Ces cellules connaissent un destin parfaitement normal et son éliminées par desquamation
(8). Troisièmement, l’activation de p53 ne dépend pas exclusivement de la formation de lésions dans l’ADN. Parmi
les inducteurs non-génotoxiques, on peut citer certaines
cytokines (9), l’hypoxie (10), les drogues qui épuisent les
microtubules (11) ou les ribonucléotides (12), l’adhésion
cellulaire (13) et les inhibiteurs des désacétylases (14).
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P. HAINAUT
Quatrièmement, p53 ne contrôle pas l’ensemble des voies
signalétiques de la suppression tumorale. En particulier, la
protéine mdm2, longtemps considérée exclusivement
comme un régulateur négatif de p53, peut également agir
de façon indépendante dans la médiation des effets antiprolifératifs du TGFb (15). Ces quatre découvertes nous
amènent à réviser notre vision du rôle biologique de p53.
Elle n’est pas la seule à pouvoir activer la longue liste de
gènes-cibles identifiés à ce jour, sa mutation n’est pas la
condition nécessaire et suffisante à la transformation cancéreuse, elle n’est pas le détecteur exclusif des lésions de
l’ADN ni le point de convergence unique des voies signalétiques de la suppression tumorale.
Question 2 :
Par quels mécanismes la protéine p53
est-elle activée?
P53 est un facteur inductible qui, en réponse à certains
signaux, passe d’un état latent à un état actif par l’intermédiaire de toute une série de modifications posttraductionnelles coordonnées (16). Ces signaux ont fait
l’objet d’une intense activité de recherche au cours des
deux années écoulées. En l’absence de signaux inducteurs,
p53 est constitutivement instable, incapable d’activer la
transcription et de se lier spécifiquement à l’ADN. L’ instabilité résulte de l’interaction avec la protéine mdm-2, qui
permet le repérage par le protéasome (17;18). Mdm-2 est
aussi responsable du blocage de l’activité transcriptionnelle, car elle se lie à la région N-terminale de p53, qui
contient le domaine minimal de transactivation. Enfin, l’incapacité à lier l’ADN spécifique résulte de l’adoption par
p53 d’une conformation où le domaine C-terminal prévient
la formation d’un complexe stable entre la portion centrale
de p53 et l’ADN spécifique.
On peut décrire l’induction de p53 comme un mécanisme
en trois temps, qui conjugue à la fois un aspect quantitatif
(accumulation) et un aspect qualitatif (activation). Dans
un premier temps, plusieurs kinases, qui sont capables de
phosphoryler p53 dans la région N-terminale, peuvent dissocier l’interaction avec mdm-2 et entraîner la stabilisation
de la protéine. C’est notament le cas des kinases de la
famille de la phosphatidyl-inositol-3 kinase qui sont activées suite à l’induction de lésions de l’ADN, telles que la
protéine-kinase dépendante de l’ADN (DNAPK), Atm, le
produit du gène dont la mutation est responsable de
l’Ataxie-Télangectasie, et son proche cousin Atr. Une autre
voie de contrôle du complexe p53:mdm-2 implique p19 arf,
qui se lie à mdm-2 et "libère" ainsi p53. La protéine p19 arf
est un produit alternatif du locus INK4a, qui code aussi
pour l’inhibiteur de kinases cycline-dépendantes p16. Ce
locus est donc une sorte "d’agent double" de la suppression tumorale, capable de réguler l’activité des kinases
cycline-dépendantes de la phase G1 par au moins deux
mécanismes distincts (19; 20).
Dans un second temps, la région N-terminale de p53
interagit avec les molécules à activité histone-acetyl-transférase de la famille CBP/p300, qui acétylent des résidus
lysine localisés dans la partie extême du C-terminus (14;
21). Cette modification chimique initie un changement de
conformation qui libère le domaine central de la régulation
négative exercée par le C-terminus. Ce changement de conformation est complété et stabilisé par d’autres modifications post-traductionelles (phosphorylation, interactions
avec des protéines hétérologues) (22).
Enfin, dans un troisième temps, la p53 se lie à l’ADN d’une
façon dépendante des conditions d’oxydo-réduction (23).
L’architecture moléculaire du domaine de liaison à l’ADN
doit sa stabilité à la présence d’un atome de zinc coordonné par des résidus sensibles à l’oxidation-réduction.
La réduction de p53 pourrait être assurée par la Ref-1, une
protéine nucléaire possédant une double fonction
d’oxydoréductase et d’enzyme de réparation, qui est capable de contribuer à l’activation de la forme latente de
p53 in vitro (24) .
Ce modèle ne rend pas compte de l’ensemble des voies
signalétiques susceptibles d’induire p53. Il est probable
que l’induction par l’hypoxie (qui implique une interaction
directe avec le facteur induit par l’hypoxie Hif-1) ou par les
cytokines, utilise des mécanismes partiellement ou totalement différents (25). Dans tous les cas, cependant, on peut
considérer que l’induction est un processus complexe résultant de la modification coordonnée de différentes portions de la protéine.
Question 3 :
quelles sont les conséquences de
l’activation de p53 ?
Suite à son activation, p53 interagit avec plusieurs familles
de cibles moléculaires. D’une part, elle se lie spécifiquement à l’ADN et reconnaît des séquences-consensus localisées dans les régions régulatrices de gènes qui contrôlent du cycle cellulaire et/ou de l’apoptose. D’autre part,
elle interagit spécifiquement avec diverses protéines, dont
les constituants des grosses machines pluri-moléculaires
qui contrôlent la transcription, la réplication et la réparation de l’ADN. La p53 est donc une protéine multifonctionelle et ses effets biologiques ne peuvent être compris qu’en tenant compte de l’activation simultanée de plusieurs voies signalétiques complémentaires. On connaît à
ce jour près d’une centaine de "cibles" potentielles de p53
(gènes ou protéines) dont les principales sont présentées
au Tableau I.
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Revue de l'ACOMEN, 1999, vol.5, n°3
Cinq questions essentielles sur le gène suppresseur de tumeurs p53
- TABLEAU I Cibles moléculaires de p53
Facteur
Apo-1/
Fas/CD95
Bax-1
Bcl-2
BTG2
Cyclin A
Cyclin G
ERCC2/
ERCC3
Gadd45
IGF-BP3
IGF-I
IL-6
Killer/DR5
Mdm-2
MDR-1
NOS2/iNOS
p21waf-1
p85
PCNA
Pig-1
Pig-12
Pig-3
Pig-6
RPA
TBP
Thrombo-spondin-1
Activité
Mode de régulation
Fonction
Death signalling receptor
transcriptional activation?
apoptosis
Dominant-negative inhibitor of bcl2
Repressor of apoptosis
Inhibitor of proliferation
Cell-cycle regulation, S phase
Cell-cycle regulation
Helicases, TFIIH complex
transcriptional activation
transcriptional repression
transcriptional activation
transcriptional repression
transcriptional activation
activation by protein binding
apoptosis
apoptosis
?
cell cycle arrest?
cell-cycle arrest?
transcription/ DNA repair
Binding to PCNA
Inhibitor of IGF-I
Growth factor
Survival factor
Death signalling receptor
Oncogene
Multi-drug resistance
Inducible Nitric Oxide synthase
Inhibitor of CDK2-4 and 6
transcriptional activation
transcriptional activation
transcriptional repression
transcriptional repression
transcriptional activation
transcriptional activation
transcriptional repression
transcriptional repression
transcriptional activation
Regulatory subunit of PI3 kinase
Auxilliary subunit of polymerase δ
Galectin-7
Glutathione transferase homologue
Quinone oxidase homologue
Proline oxidase homologue
Replication protein A
TATA box-binding protein
Inhibitor of angiogenesis
transcriptional activation
transcriptional activation
transcriptional activation
transcriptional activation
transcriptional activation
transcriptional activation
inhibition by protein binding
inhibition by protein binding
transcriptional activation
cell cycle arrest ?
apoptosis
apoptosis?
apoptosis?
apoptosis
repression of p53
resistance to chemotherapy
control of oxidative stress
cell cycle arrest, G1 and
G2/M
apoptosis
DNA repair?
differentiation?
apoptosis
apoptosis
apoptosis
replication/ DNA repair
inhibition of transcription
Apoptosis?
Pour une liste bibliographique détaillée, voir réference 16.
On considère souvent que les conséquences de l’activation de p53 se résument à un dilemme cellulaire entre l’arrêt
du cycle cellulaire (en G1 et/ou en G2) et l’apoptose. Dans
le premier cas, la cellule disposerait d’un temps supplémentaire pour corriger l’ADN et se remettre en ordre de
marche avant d’initier la synthèse d’ADN ou la mitose. Il
s’agirait donc d’un mécanisme de contrôle propre à favoriser la réparation des dégats causés par des agents qui
endommagent l’ADN. Dans le second cas, la cellule serait
poussée à se "suicider" plutôt que de dupliquer et transmettre de l’ADN endommagé au delà de ses capacités de
réparation. Si cette intreprétation a l’avantage de fournir
un cadre conceptuel simple pour comprendre la suppression exercée par p53, elle n’en est pas moins en contradiction avec de nombreux faits. Ainsi, il n’est pas évident que
l’arrêt du cycle cellulaire induit par p53 soit réversible dans
des cellules primaires. Les cellules ainsi "stoppées" seraient donc éliminées de façon permanente du "pool" de
cellules capables de se diviser (26). De plus, il n’est pas
prouvé que l’induction de l’apoptose résulte de l’incapacité de la cellule à réparer l’ADN. Il s’agit au contraire
d’une réponse définie par une spécificité tissulaire, voire
cellulaire, qui résulte non seulement de l’induction coor-
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donnée de plusieurs cibles moléculaires de p53, mais aussi
de l’activation concommitante d’autres voies. Enfin, il est
possible que, dans la plupart des cellules, différentes voies
activées par p53 puissent co-exister dans un ordre de préséance bien précis. Par exemple, dans des cellules exposés
à l’irradiation, l’induction de p53 peut induire un arrêt du
cycle cellulaire en G1, par l’intermédiaire de l’inhibiteur de
kinases cycline-dependantes p21waf-1, qui contrôle indirectement la phosphorylation de la protéine Rb et donc
l’entrée en phase S. Si l’on inactive Rb (par exemple par
l’expression ectopique de l’oncogene E7 du virus du papillome), l’arrêt en G1 ne peut intervenir et la cellule entre
en apoptose. En fait, les cellules se comportent comme si
l’élimination de la voie d’arrêt en G1 dépendante p53 permettait l’expression d’une voie pro-apoptotique sousjacente. A l’inverse, l’activation de p53 peut induite un
arrêt du cycle qui "protège" les cellule d’une apoptose
provoquée par des voies indépendantes de p53, telles que
par exemple la privation du sérum. Ces observations suggèrent que les voies signalétiques induites par p53 sont
non-seulement parallèles et complémentaires, mais aussi
superposables (27).
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Il est très difficile de résumer l’ensemble de ces mécanismes en une fonction globale et unique dont p53 serait
l’effecteur. En 1992, David Lane a proposé de surnommer
p53 le "gardien du génome", considérant ainsi que l’ensemble de ses fonctions suppressives permettaient à p53
de prévenir la prolifération de cellules contenant de l’ADN
anormal (28). Cette notion doit cependant être nuancée
par le fait que la cinétique d’induction de p53 en réponse
au stress génotoxique est relativement lente, par comparaison avec l’activation des mécanismes de réparation de
l’ADN. Il faut 24 ou 48 h pour que se manifeste l’arrêt en
G1 ou la mort par apoptose induite par p53, ce qui en fait
un intervenant tardif plutôt qu’un protecteur. Dans l’ensemble, il semble que le rôle physiologique de la p53 pourrait être d’agir comme un dernier recours afin de contrôler
la prolifération cellulaire et de pallier à l’éventuelle déficience des mécanismes normaux de réparation ou de surveillance de l’intégrité cellulaire. La particularité essentielle
de p53 est que sa structure moléculaire lui permet de fonctionner comme un "baromètre du stress intracellulaire",
par sa capacité à intégrer de nombreux signaux générés
lorsque la cellule s’écarte des conditions physiologiques
optimales. Ces signaux comprennent les changements de
température (qui influent sur la conformation de p53),
d’oxydo-réduction (qui modulent la liaison de p53 à l’ADN)
et l’activation de kinases impliquées dans plusieurs voies
de réponse au stress (Jun Kinases, MAP kinases, kinases
UV-induites ou membres de la famille des inositol-phosphate kinases) (16).
Question 4 :
Pourquoi le gène p53 est-il souvent
muté dans les cancers?
Le modèle "classique" de l’inactivation d’un gène suppresseur de tumeurs, comme défini par Knudson, implique
l’inactivation séquentielle des deux allèles, par exemple
par la délétion de l’un et la mutation ponctuelle de l’autre.
L’altération de p53 dans les cancers est loin de correspondre parfaitement à ce canon. Dans beaucoup de cancers,
l’allèle muté co-existe avec l’allèle normal, son produit s’accumule dans le noyau et fait l’objet d’une rétention sélective au cours de la progression tumorale, puisqu’on observe souvent l’accumulation nucléaire de p53 mutée jusque dans les métastases distantes. Cette rétention peut
s’expliquer par le fait que de nombreuses formes mutées
de p53 exercent un effet dominant-négatif capable d’inhiber la suppression exercée par la protéine sauvage (29). De
plus, il existe des arguments expérimentaux pour penser
que certains mutants pourraient exercer un effet promoteur sur la prolifération ou la progression tumorale, même
dans les cas où l’allèle normal est perdu (30). Le mécanisme exact de cet effet oncogénique, s'il existe, n’est cependant pas connu.
La sélection positive dont la protéine mutée fait l’objet
dans de nombreux cancers a conduit les pathologistes à
considérer que l’accumulation de p53 dans les cancers
pouvait être une méthode indirecte pour détecter une mutation. Si cette hypothèse se vérifie pour les trois quarts
des cancers du poumon, du colon, de la vessie ou de l’oesophage, ce n’est pas le cas d’autres pathologies. De plus,
près de 20% de toutes les mutations connues sont des
insertions, des délétions ou mutations non-sens qui ont
pour effet de prévenir l’expression de la protéine. La détection de p53 par immuno-cytochimie ne peut donc pas
être considérée comme un critère fiable pour identifier les
cancers où le gène p53 est muté.
L’étude expérimentale des mutants de p53 nous apprend
qu’ils diffèrent les uns des autres par leurs propriétés biochimiques et fonctionnelles (31). Certains mutants ont une
activité sauvage résiduelle et d’autres n’ont pas d’effet
dominant-négatif même s'ils ont apparement perdu toute
activité suppressive intrinsèque. De plus, l’expression de
ces propriétés diffère d’un type cellulaire à l’autre (29). Il
est donc abusif de considérer tous les mutants comme
équivalents sur le plan fonctionnel et, dans l’état de nos
connaissances, nous ne sommes pas en mesure de proposer une classification uniforme pour tous les mutants. Enfin, il faut aussi signaler que l’inactivation de p53 peut
intervenir par d’autres mécanismes que l’altération directe
du gène. Parmi ces mécanismes indirects, les plus significatifs sont la déstabilisation de p53 suite à l’amplification
et à la sur-expression de mdm-2 ou à l’expression de l’oncogène E6 des variants tumorigènes des virus du papillome.
Il n’existe pas d’arguments solides pour penser que le gène
p53 se distingue par une instabilité génétique particulière.
La mutation fréquente de p53 dans les cancers est donc la
conséquence d’un processus de sélection par lequel les
cellules ayant acquis cette altération prennent le pas sur
d’autres au sein de la tumeur. Quelle est la nature du mécanisme biologique responsable de cette pression de sélection ?
On peut formuler l’hypothèse que, dans la plupart des
tissus sains, l’induction de p53 en réponse au "stress"
n’est peut-être pas physiologiquement indispensable. L’homéostasie cellulaire peut être totalement assumée par des
mécanismes indépendants de p53. Le rôle de p53 serait
donc celui d’un "frein de secours" qui ne deviendrait indispensable que dans des cellules dont les mécanismes
régulateurs de la prolifération sont altérés, en particulier
dans les états pré-cancéreux.
Le modèle classique de la transformation cancéreuse propose que suite à l’occurrence d’un événement génétique
irréversible, initiateur, le développement d’un cancer requiert une phase de "promotion" (où la prolifération cellulaire est activée de façon réversible par des mécanismes
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épigénétiques, telle que par exemple la stimulation hormonale), qui permet la survenue d’autres altérations génétiques jalonnant une progression irréversible vers un phénotype malin. En fait, un des effets de l’événement initiateur pourrait être de "démasquer", à court ou à long terme,
les voies signalétiques de la p53. En d’autres termes, cet
(ou ces) événement(s) initiateur(s) auraient pour effet de
rendre la cellule dépendante de p53 pour le contrôle de sa
capacité à proliférer dans des conditions sub-optimales.
Dès lors, le contexte environnemental de l’apparition d’un
cancer va induire une pression dont la conséquence est la
sélection darwinienne de cellules possédant une p53 inactivée par mutation. On peut en effet comparer le terrain
tissulaire dans lequel se développe un cancer à un écosystème perturbé par des facteurs tels que l’exposition à
des agents cancérigènes, l’infection virale, l’inflammation
chronique ou l’hypoxie.
Dans beaucoup de tumeurs solides, l’hypoxie pourrait être
la principale cause de cette pression de sélection. Dès les
premières étapes du processus cancéreux, on assiste à la
formation d’une petite masse cellulaire moins bien oxygénée et irriguée que le tissu normal voisin, ce qui a pour
résultat d’induire p53 et de supprimer la prolifération. Il est
possible que cette situation se produise relativement fréquemment dans l’organisme et que, dans la plupart des
cas, l’activation de p53 comme "frein de secours" suffise à
l'élimination des groupes de cellules qui pourraient donner naissance à un cancer. La perte de la fonction suppressive de p53 peut donc autoriser l’émergence de clones capables d’échapper à la pression exercée par l’environnement immédiat pour proliférer dans des conditions suboptimales. En fonction du tissu, de l’organe et de la topographie locale, le stade où la p53 est activée peut varier de
quelques dizaines de cellules à plusieurs dizaines de millions de cellules. Suivant les cas, la mutation de p53 apparaîtra donc comme un évènement précoce ou tardif au cours
de la cancérogenèse, même si le mécanisme biologique qui
détermine sa sélection est fondamentalement le même.
Un mécanisme analogue peut être invoqué pour expliquer
les mutations qui apparaissent suite à l’exposition à des
agents cancérigènes physiques ou chimiques (irradiation,
UV, carcinogènes chimiques). Dans ce cas, l’induction de
p53 par de tels agents constitue la pression de sélection
qui va favoriser l’émergence d’un clone où le "frein de
secours" n’est plus fonctionnel. Les tumeurs hématopoïétiques constituent un troisième cas de figure, qui peut cependant être interprété dans des termes analogues. Dans
des pathologies telles que les leucémies et les lymphomes,
p53 est rarement mutée dans les tumeurs primaires, mais la
fréquence de mutations augmente de façon très sensible
dans les tumeurs secondaires, en particulier les récurrences après chimiothérapie. Il est donc possible que l’induction de p53 par les agents cytotoxiques utilisés au cours
Revue de l'ACOMEN, 1999, vol.5, n°3
du traitement constitue la pression de sélection qui favorise l’émergence d’un clone contenant une p53 mutée.
Question 5 :
les mutations de p53 nous livrent-elles
la clé du cancer?
Les mutations de p53 constituent donc une importante
source d’information sur la nature des mécanismes de la
cancérogenèse. En effet, la nature du mécanisme biologique responsable de la pression de sélection se reflète dans
la nature chimique des mutations de p53 détectées dans
les tumeurs. Dans le cas d’une sélection par l’exposition à
des agents cancérigènes, les mutations représentent souvent une signature moléculaire d’un des carcinogènes impliqués (telles que par exemple les transversions G vers T
dans les cancers du poumon dus à la fumée du tabac, les
doubles transitions CC vers TT induites par les UV dans
les cancers de la peau autres que le mélanome et les transversions G vers T au codon 249 dans l’hépato-carcinome
dans certaines régions d’Afrique et d’Asie). Par contre,
dans le cas d’une pression de sélection d’origine endogène telle que l’hypoxie, on peut supposer que les mutations de p53 sélectionnées seront principalement le reflet
de mécanismes mutagènes spontanés (comme par exemple des insertions ou des délétions dues à des erreurs des
polymérases ou des transitions C vers T résultant de la
désamination spontanée de cytosines méthylées) (16; 32)
.
Près de la moitié des 10 000 mutations décrites à ce jour
peuvent être considérées comme la conséquence de mécanismes mutagènes endogènes. Les autres mutations sont
probablement le résultat de la formation de lésions de l’ADN
par des agents cancérogènes exogènes. La distinction entre
mutations d’origine endogène ou exogène n’est cependant pas toujours claire car certains types de mutations
peuvent être induits par plusieurs mécanismes, et parce
que la fréquence des mutations d’origine endogène peut
varier en fonction de l’efficacité des systèmes de réparation.
Les mutations observées dans les cancers du poumon chez
les fumeurs sont un bon exemple de la façon dont différents mécanismes biologiques "coopèrent" à l’établissement d’un spectre de mutations. Près d’un quart des mutations sont des transitions C vers T résultant de la
désamination spontanée de cytosines méthylées et ont
probablement une origine endogène. Par contre, près de
40% des mutations sont des transversions G vers T. Dans
des systèmes expérimentaux, les métabolites du
benzo(a)pyrène, un des carcinogènes majeurs de la fumée
du tabac, sont capables d’induire de telles mutations. Dans
les cancers du poumon, les mutations G vers T ne sont pas
réparties de façon égale sur les deux brins de l’ADN : elles
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affectent presque exclusivement le brin d’ADN non transcrit, ce qui suggère que les lésions pro-mutagènes sur le
brin transcrit font l’objet d’une réparation préférentielle
par les mécanismes de réparation couplés à la transcription. Enfin, les mutations s’observent essentiellement aux
codons qui ont la double caractéristique d’être des sites
d’adduction des métabolites du benzo(a)pyrène et de correspondre à des résidus essentiels pour la stabilité des
interactions entre la protéine et l’ADN. En conséquence,
on peut observer chez les fumeurs un spectre de mutations unique, différent de celui détecté dans les cancers
du poumon des non-fumeurs (33).
Ces observations permettent d’envisager l’utilisation des
mutations de p53 comme marqueurs biologiques en épidémiologie moléculaire, afin de définir des spectres de mutations spécifiques en fonction des facteurs de risque individuels, des variations géographiques, de l’origine ethnique et de l’exposition environnementale ou occupationnelle. A l’avenir, de telles informations seront précieuses
pour identifier des individus (ou des populations) à risque
et pour mettre en place des mesures préventives.
Un autre domaine où l’analyse des mutations et une source
de grands espoirs d’application médicale est la pathologie
moléculaire. Il existe une littérature très importante sur la
signification biologique d’éventuelles corrélations entre
les mutations et le diagnostic ou le pronostic des cancers.
Ces approches se sont révélées relativement décevantes
dans la mesure où leurs conclusions sont rarement
généralisables au delà d’une étude particulière. En général, la présence d’une mutation est corrélée avec un pronostic défavorable, mais la mutation ne constitue pas à
elle seule un indicateur indépendant. Il en va de même
pour la signification possible de la mutation de p53 comme
prédicteur de la réponse de la tumeur aux traitements chimioor radio-thérapiques. En effet, de nombreux agents chimiothérapeutiques induisent une apoptose p53-dépendante
et il existe une base expérimentale solide pour penser que
la mutation de p53 diminue la sensibilité des cellules à
l’effet cytotoxique des agents anti-cancéreux (34).
A plus long terme, la masse des connaissance accumulées
sur p53 nous permettra de mettre au point de nouvelles
approches directement utiles au traitement du cancer. Dès
le début des années 90, des essais on été entrepris en vue
d’exploiter la p53 sauvage dans des approches de thérapie
génique visant à restaurer la fonction du gène dans les
cellules cancéreuses (35). Ces approches n’ont guère donné
que des effets de faible amplitude et se heurtent à des
obstacles considérables sur le plan du ciblage des cellules
cancéreuses, des niveaux d’expression des transgènes et
de leur stabilité dans les cellules cibles. Une autre piste
consiste à tirer parti de notre connaissance de la biochimie
et de la biologie structurale pour mettre au point des ap-
proches pharmacologiques destinées à restaurer ou à augmenter l’activité et/ou la stabilité de la p53. Plusieurs laboratoires ont développé des mini-peptides dirigés contre la
portion C-terminale de p53 et qui restaurent au moins partiellement la fonction de certains mutants, probablement en
agissant sur leur conformation (36). Un des domaines d’application de telles méthodes pourrait être la chimio-protection plus que la thérapie proprement dite: en augmentant
l’activité de la p53 dans les cellules normales, on pourrait
conférer aux tissus sains des patients une meilleur protection contre les effets toxiques des protocoles de traitement actuellement en vigueur. Jusqu’à présent, la recherche sur p53 a été au centre d’une formidable avancée conceptuelle concernant notre connaissance des mécanismes
du cancers. L’enjeu des années à venir est de transformer
cette connaissance théorique en un bénéfice pratique pour
la prévention, la détection et le traitement du cancer.
REMERCIEMENTS
Je remercie Catherine Méplan pour sa relecture critique et
son aide bibliographique.
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