Le capteur de niveau voit au fond du trou

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CONTRÔLE DE PROCESS
Le capteur
de niveau voit au
fond du trou
▼
Taillée dans les Pyrénées,la carrière souterraine de OMG à St Béat évoque les mines,
avec ses galeries,ses explosifs pour faire sauter la roche,ses concasseurs,ses broyeurs et
ses volumineux engins.
S
on marbre ressemble à celui de Carrare, mais ses applications sont sans
doute plus étendues. Broyé et réduit
à l’état de poudre, le marbre de
St Béat est très connu des industriels du bâtiment, qui l’utilisent pour donner un aspect
patiné aux façades de bâtiments. Les fabricants d’aliments pour animaux s’en servent
pour incorporer dans leurs produits les
apports minéraux indispensables (les poules,
plus particulièrement, en ont besoin pour
faire la coquille des œufs). Le marbre de
St Béat est présent dans les colles, peintures,
enduits pour le bâtiL’essentiel
ment.
Plus
de
250 000 tonnes pro Dans le process d’extracduites chaque année,
tion du marbre de la carrière de OMG, il y a de nomplus de 1 000 clients
breux transferts de pierres
industriels : sans le
dans des cheminées et des
savoir, tout un chacun
silos taillés dans la roche
a vu ou utilisé un pro La mesure du niveau sur
duit comportant du
une cheminée posait des
marbre de St Béat.
difficultés du fait de la proAvec ses 9 carrières à
fondeur (20 m) et de l’étroitesse (3 m) de la cheminée
ciel ouvert et une car Le problème a été résolu
rière souterraine, avec
en utilisant un capteur
ses 50 véhicules et
radar focalisé
engins qui en impo Les conditions d’environsent, avec son usine, on
nement difficiles (poussièpeut imaginer que
re, bruit) ne perturbent pas
St Béat n’est que bruit
la mesure
et poussière. C’est tout
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Réputé pour sa blancheur, le marbre de St Béat (près de St Gaudens) est utilisé
dans de nombreuses industries, dans des applications très diverses. OMG qui
exploite une carrière souterraine (une mine, en quelque sorte) a dû relever de
nombreux défis pour mettre en place les automatismes de process. Parmi ces
défis, une mesure de niveau de pierres à l’intérieur d’une étroite cheminée de
20 m de haut…
le contraire. Situé près de St Gaudens au cœur
des Pyrénées centrales, dans un paysage verdoyant, St Béat porte bien son nom, évoquant la quiétude. Il est vrai qu’Onyx et Marbre
et Granulés (OMG) qui exploite la carrière
depuis 1934, fait de sérieux efforts pour protéger l’environnement. Des filtres limitent
les dégagements de poussières, les nuisances
sonores de l’usine ont été réduites, les
camions ne passent plus au cœur du village… Et après chaque fin d’exploitation, OMG
réintègre le site dans son environnement en
colorant avec des pigments naturels les carrières exploitées afin de leur donner un
aspect déjà vieilli. Ces efforts seront poursuivis à l’avenir. C’est un peu une nécessité
parce que St Béat a signé un bail de longue
durée avec le marbre : plusieurs géologues
venus étudier le gisement estiment les
réserves à environ 40 millions de tonnes.
Une production très automatisée
On s’en doute, la production est mécanisée
et automatisée. Quelques chiffres permettent de se faire une bonne idée de la performance obtenue : OMG emploie moins d’une
quarantaine de personnes qui se répartissent
dans les 10 carrières (d’où sont extraites
250000 tonnes chaque année), les trois unités de production de semoules, les deux unités de production de poudres et l’unité de
production de granulés. Si peu de monde
dans autant d’espace, on ne se bouscule pas!
La carrière souterraine que nous avons visitée est bien significative de la place qu’occupent les machines dans l’exploitation. Dans
les centaines de mètres de galeries, on trouve d’imposants concasseurs, broyeurs, tapis
et bandes transporteuses. Beaucoup de bruit,
de la poussière et pratiquement personne.
Les automatismes se chargent de tout.
Il n’y a pas beaucoup de mesures mais elles
sont capitales car ce sont elles qui permettent de définir la façon dont doivent être
effectués les tris et mélanges de matière de
façon à obtenir un produit homogène qui
sera ensuite traité par l’usine. Certaines
mesures posent de vrais problèmes techniques. Le cas s’est posé lorsqu’il a fallu
mesurer la hauteur des pierres à l’intérieur de
la cheminée qui alimente le concasseur. On
se trouve ici au niveau 2 de la carrière. Cette galerie communique avec la galerie située
en dessous via un trou (une cheminée), qui
traverse la galerie de part en part, soit une
vingtaine de mètres de profondeur. Le
concasseur se trouve juste en dessous. La
roche extraite (à l’explosif) est transportée
par camion depuis le front de taille et déversée dans la cheminée, afin d’être concassée.
Pour que l’opération de concassage se passe
bien, il faut qu’il y ait toujours un lit de
matière en bas de la cheminée afin de protéger le tiroir du concasseur. Il ne faut pas
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Schéma du process
Capteur de niveau
Niveau 2
20 m
Extracteur
Concasseur
PHASE 2
Mesure de blancheur
PHASE 1
Pesage
6à7m
Broyeur
Détecteur capacitif
Détecteur capacitif
Niveau 1
8m
8m
8m
8m
20 m
Extracteur vibrant
Niveau 0
Pesage
Le niveau des différents silos de stockage des pierres broyées est mesuré à l’aide de capteurs à ultrasons.Ces silos ont une ouverture relativement large (8 m de côté) et l’angle d’ouverture relativement important du faisceau à
ultrasons (comparativement à celui du radar focalisé) n’est pas gênant.La mesure n’est perturbée ni par la poussière,ni par le bruit ambiant.
non plus que le niveau de pierres dans la
cheminée soit trop élevé, pour éviter tout
risque de bourrage. Comme il y a une grande tolérance sur le niveau de pierres dans la
cheminée, le plus simple serait que le chauffeur le vérifie lui-même, de visu. Mais c’est
impossible en pratique : il ne peut s’approcher au bord du trou (trop dangereux) et il
est impossible d’utiliser un jeu de miroirs
car il y a beaucoup de poussière (et, de surcroît, peu de lumière).
Les équipes techniques de OMG ont alors
envisagé d’installer un capteur de niveau et
lancé une consultation auprès des fabricants
spécialisés : « Les trois fournisseurs que nous avons
consultés nous ont tous proposés de réaliser une mesure
sans contact avec un transmetteur à ultrasons.Cette solution nous inspirait confiance car nous avions déjà une
expérience de l’ultrason », indiqueYvon Bescond,
responsable Electricité Instrumentation Automatismes du service Entretien/Travaux
Neufs. Les capteurs proposés ne se distinguaient ni en termes de performances ni en
termes de prix. Il a fallu alors trouver d’autres
critères pour choisir entre Endress+Hauser,Milltronics (aujourd’hui intégré dans Siemens) et
Vega. « Nous utilisions déjà du Milltronics etVega.L’offre
Endress+Hauser était concurrentielle, sans pour autant
apporter d’avantage significatif.Nous ne l’avons pas retenue parce que cela nous aurait obligés à avoir un troisième fournisseur en capteurs de niveau (avec ses incidences
en gestion, en maintenance) et à apprendre à utiliser un
nouveau logiciel », explique M. Bescond. Milltronics et Vega, qui restaient en lice, ne se départageaient pas franchement; la différence s’est
faite sur des petits riens, le relationnel, le
niveau de motivation du technico-commercial local, par exemple. Vega est retenu. L’application, faut-il le rappeler, comporte un
seul et unique capteur, ce qui n’incite pas
forcément à une débauche d’énergie pour
remporter l’affaire…
Le capteur de niveau à ultrasons est placé sur
OMG en quelques chiffres
Onyx et Marbre et Granulés (OMG) a été
créée en 1934 par François Dabos.
1971 constitue une autre date clé,
avec l’entrée dans le capital du groupe suisse Omya.
OMG emploie 40 personnes pour un
chiffre d’affaires de 8,6 M€ en 2004. La
société travaille avec 60 sous-traitants
et livre chaque année plus de
300 000 tonnes de marbre, sous forme
de granulés et poudres. Les granulés
font jusqu’à 16 mm de diamètre, les
semoules jusqu’à 4 mm.
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Il existe une dizaine de variantes de
granulés, qui répondent aux noms
empreints de poésie de Blanc Sost,
Blanc Arguenos, Blanc Lez, Bleu Turquin, Rouge Automne, Rose Corail,
Vert des Pyrénées, Vert des Alpes,
Ivoire doré, Silver Star… Les poudres
sont toutes dénommées “Béatite”.
Quant aux marbres gris, la simple
énumération des noms montre bien
qu’il s’agit des produits les moins
blancs existant dans le gisement : Carbonate, Dolomie…
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Du capteur à ultrasons au capteur radar
HIER
Au départ
Capteur à ultrasons
AUJOURD’HUI
Quelques semaines plus tard
Capteur radar 26 GHz
Capteur à ultrasons
Faisceau à ultrasons
création d’un
faux écho
20 m
dépôts de pierres
sur la paroi de la cheminée
L’ouverture du faisceau à ultrasons est prévue
pour aller jusqu’au fond de la cheminée
la paroi de la galerie, quelques mètres audessus de l’ouverture de la cheminée. Au
début tout se passe bien. Pas pour longtemps,
se souvient M.Yves Reulet (service
Entretien/Travaux Neufs, Instrumentation Automatismes). « La
principale raison vient du fait que la
cheminée n’est pas rigoureusement
verticale mais légèrement oblique.
Avec le temps, des pierres se déposent sur la paroi,formant un talus,
rétrécissant le conduit de la cheminée.Le faisceau du capteur à ultrasons
n’étant pas suffisamment directif,il ne
pouvait plus atteindre le fond de la cheminée,il y avait des échos sur la paroi et du
coup le capteur indiquait que l’on
avait atteint le niveau haut,ce qui
était faux, bien évidemment… », La cheminée,
il faut dire, est relativeOn aperçoit ici le
capteur radar
focalisé placé
au-dessus de la
cheminée où sont
envoyées les pierres
extraites du front
de taille afin d’être
broyées dans le
concasseur placé en
bas de la cheminée,
au niveau en
dessous.
Le fonctionnement
du capteur n’est pas
perturbé par
la poussière très
présente à cet
endroit.
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Le faisceau du radar est localisé et présente
un angle d’ouverture très faible (4°). Il n’est
pas interrompu par la présence des pierres sur
la paroi de la cheminée.
La cheminée est partiellement obstruée. Le
faisceau à ultrasons est “coupé” par le dépôt
présent sur la paroi de la cheminée
ment étroite (3 m de côté) pour une profondeur d’une vingtaine de mètres...
Il fallait donc trouver un capteur présentant
un faisceau plus directif. « En ultrasons,
il n’était pas possible d’aller plus loin.Nous
avons alors proposé à OMG de tester
un capteur radarVegapuls 68,qui travaille à 26 GHz (il s’agit ici d’ondes
électromagnétiques),une fréquence
qui “marche”bien pour les matériaux solides les plus divers. La
poussière, très présente ici, ne perturbe pas la mesure.Mais dans l’application présente, le plus important,
c’est qu’il est possible d’utiliser une antenne parabolique permettant de limiter à 4°
l’ouverture du faisceau », argumente Philippe Cassaignau,
responsable Vega pour le
secteur Sud-Ouest. Le
capteur radar était déjà
présent dans le catalogue
lors de l’appel d’offres,
mais Vega, à l’instar de ses
concurrents, avait préféré proposer une solution à ultrasons,
moins onéreuse, et qui avait déjà fait
ses preuves dans ce type d’application. Le capteur radar est envoyé par
la poste, Vega s’engage à le reprendre
si les essais ne sont pas concluants.
Mais il n’y a pas de mauvaises surprises, le capteur installé depuis plus
de 6 mois maintenant donne pleinement satisfaction…
Une mesure de couleur en ligne
Le process mis en œuvre dans la carrière souterraine comporte bien
d’autres mesures. On y trouve
notamment des mesures de poids sur les tapis
transportant de la matière, des mesures de
blancheur de la pierre, des mesures d’humidité et d’autres mesures de niveau. La blancheur de la pierre est un critère plus particulièrement important ici (c’est elle,
rappelons-le, qui fait la réputation du marbre
de St Béat). Mais il y a “blanc” et “blanc”, il
est important de mesurer les variations de
teinte. Une première mesure de blancheur
est effectuée par un colorimètre placé juste
derrière le broyeur situé en aval du concasseur. Celui-ci calcule et donne en temps réel
les paramètres colorimétriques du produit. La
mesure de colorimétrie est associée à une
mesure d’humidité réalisée par un analyseur
infrarouge d’Infrared Engineering. « Cette mesure
complémentaire est indispensable, explique M. Bescond.Nos clients choisissent une teinte dans notre catalogue et nous leur livrons un produit sec.Mais il se trouve qu’un matériau donné ne présente pas la même teinte
selon qu’il est sec ou humide. En mesurant l’humidité,
nous pouvons en quelque sorte corriger la mesure donnée
par le colorimètre et anticiper la teinte qu’aura le matériau une fois sec ». Le minerai extrait de la carrière est classé en 4 catégories de blancheur.
Selon le résultat de la mesure combinée couleur/humidité, il est aguillé (à l’aide de
bypass) vers un des 4 silos de stockage situés
en amont.
Les silos en question ont également été instrumentés. Un peu à l’image de la cheminée
d’alimentation du concasseur, ces silos sont
creusés dans le marbre de la galerie inférieure
(et traversent de part en part cette galerie). Ils
ont une ouverture 8 m de côté pour une
hauteur de 20 m et leur capacité utile est
d’environ 2000 tonnes. Le niveau de minerai présent dans chacun des silos est mesuré
à l’aide de capteurs à ultrasons, sans contact.
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Le problème de mesure est ici beaucoup plus
simple que celui rencontré pour la mesure du
niveau dans la cheminée. L’ouverture est en
effet beaucoup plus large et le silo étant taillé
verticalement, il n’y a pas de risque de
grosses accumulations de matière sur les
parois. Les modèles installés, fournis également par Vega,fonctionnent sans problème. La
présence de poussière ne pose pas de difficultés. Par contre, le bruit des engins et des
chutes de pierre pourrait être plus gênant.
Mais les craintes ont été vite dissipées en plaçant le capteur suffisamment haut au-dessus
des silos…
Le minerai issu de la carrière et livré à l’usine est obtenu en mélangeant le contenu des
silos. Le dosage est réalisé en faisant varier le
débit à la sortie des silos. Bien entendu, selon
la demande de l’usine, le dosage va varier.
Pour s’assurer que le produit livré correspond bien à la teinte demandée, un deuxième colorimètre (associé ici aussi à un hygromètre infrarouge) est placé au-dessus du tapis
transporteur du minerai vers la benne du
camion de livraison.
Tout cela, on l’a dit, est largement automatisé. Les machines, fabriquées par des constructeurs spécialisés, ont leurs propres automa-
tismes intégrés. Les constructeurs de ces
machines ont bien entendu des équipes de
maintenance. Mais ces équipes sont souvent
peu étoffées et sillonnent le monde. « Les
pannes ne préviennent pas et lorsqu’elles surviennent, il
nous est difficile de faire venir immédiatement une équipe qui est déjà mobilisée sur un problème difficile au fond
de l’Afrique ou de la Russie », observe M. Bescond.
Du coup, il faut être pragmatique. Des pièces
de rechange sont stockées sur place, du
moins pour les pièces critiques. OMG n’a pas
grand pouvoir pour imposer tel ou tel type
d’automatisme aux constructeurs, ou alors
le prix à payer est trop élevé. Pour faire face
à toute situation, la société a donc recherché
des spécialistes locaux de telle ou telle
marque d’automatismes.
Un serveur Web
en guise de supervision
Les machines (concasseurs, broyeurs, tapis,
trémies, etc.) sont pilotées par un automate
TSX57 de Schneider Electric. Ce constructeur a
surtout été choisi pour son service de proximité. L’architecture retenue est assez classique.
L’automate, bien à l’abri dans une armoire
électrique, pilote des entrées/sorties déportées
sur un bus de terrain FIP IO, de 400 m de
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long. « Ce choix s’explique par des raisons d’économie,
mais surtout par des raisons liées à l’environnement particulier d’une carrière, commente M. Reulet.Avec
les chutes de pierres,avec les nombreux engins en mouvement, il y a des risques réels de rupture de câbles. Il est
beaucoup plus simple de réparer un câble de bus de terrain
qu’un toron de câbles d’entrées/sorties fil à fil ».
Ce qui est plus original, c’est qu’un serveur
Web est embarqué à bord de l’automate et
que toutes les informations liées au process
sont stockées en permanence dans l’automate. Il n’y a pas de supervision sur PC à
proprement parler. Les informations embarquées dans l’automate peuvent être restituées
sur un PC quelconque à l’aide d’un applicatif écrit en JavaScript et développé en interne par M. Bescond : « Je n’avais aucune expérience de ce langage et je l’ai appris sur le tas. Fort
heureusement,j’ai pu compter sur l’aide des techniciens de
Schneider,ce qui fait qu’aujourd’hui,nous avons une application opérationnelle sans avoir à acquitter une quelconque
licence d’exploitation ».
On signalera enfin que la transmission
des informations entre l’automate et le
PC est assurée par un réseau Ethernet,
avec une transmission radio entre la carrière et l’usine…
Jean-François Peyrucat
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