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Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Coordinatrice Fouzia Msefer Alaoui, Association l’Avenir MANUEL DE FORMATION A L’ATTENTION DES MEDECINS DE PROXIMITE Nous remercions vivement l’Association Lalla Salma de Lutte Contre le Cancer, l’Union Internationale Contre le Cancer, Sanofi Aventis, la Société Marocaine d’Hématologie et Oncologie Pédiatrique, et le Ministère de la Santé pour leur soutien à la réalisation de ce manuel. Empreintes Edition Collection Medecines Sciences et Santé ® Siham Benchekroun Résidence Alia, 8, rue Essanaani, Appt.4. Bourgogne, Casablanca Tél : 022 26 01 84 — Fax : 022 36 70 35 [email protected] Dépot légal : 2008-2136 — ISBN : 9954-8247-6-6 Imprimerie El Maarif El Jadida Septembre 2008 Avant propos Le présent manuel traite des cancers de l’enfant de façon très simple. Il est destiné à être à la disposition des médecins marocains de proximité, dans le but de les aider à poser un diagnostic précoce et d’augmenter ainsi les chances de guérison des enfants malades. En effet, quand le diagnostic est tardif, le stade est déjà avancé car les cancers sont d’évolution plus rapide et de gravité plus grande quand ils touchent l’enfant. Il nécessite alors un traitement lourd, long, toxique, cher et difficile pour l’équipe soignante et le pronostic est très réservé. Par contre, quand le diagnostic est précoce et le traitement adéquat, 80% des enfants guérissent, et ce, à moindre coût financier, de souffrances ou de séquelles. Lorsque, en 2005, l’Union Internationale Contre le Cancer (UICC) et Sanofi-aventis ont lancé un appel à projets, l’Association l’Avenir avec l’accord de la Société Marocaine d’Hémato-Oncologie Pédiatrique (SMHOP) et des unités hospitalières d’hémato-oncologie pédiatrique au Maroc, a présenté le projet « Campagne Nationale pour le Diagnostic Précoce des Cancers de l’Enfant au Maroc ». Ce projet vise trois cibles potentielles : le grand public, la famille, les professionnels de santé de proximité. Concernant le grand public, une campagne nationale de sensibilisation et d’information sur le cancer a été menée par l’Association Lalla Salma de Lutte Contre le Cancer du 16 Mai au 16 Juin 2006, avec pour message principal « le cancer est curable si le diagnostic est précoce et le traitement adéquat ». Concernant les professionnels de santé, une étude qualitative des causes du diagnostic tardif a montré l’importance de cette cible : ces professionnels ne pensent pas souvent au cancer chez l’enfant, et quand ils y pensent, ils ne savent pas quoi ni comment faire. Nous avons ainsi entrepris une formation en plusieurs étapes et ce avec la participation de la SMHOP, de l’Association Lalla Salma de Lutte Contre le Cancer et du Ministère de la Santé : - En novembre 2006, nous avons organisé un séminaire de 3 jours à la Faculté de Médecine et de Pharmacie de Rabat pour 60 pédiatres de toutes les régions du Royaume, lesquels formeront les professionnels de santé de base et les autres pédiatres dans leur région ou province - Une planche affiche «Diagnostic précoce du cancer de l’enfant » destinée aux médecins de proximité a été élaborée suite à ce séminaire, puis a été distribuée dans toutes les régions du Maroc. 3 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc - Enfin, l’ouvrage que voici, guide simplifié de diagnostic précoce du cancer de l’enfant, est également destiné aux médecins de proximité à qui il sera distribué à l’occasion des prochains séminaires de sensibilisation qui seront organisés durant l’année en cours. L’objectif principal de cette formation est d’amener les premiers médecins qui voient l’enfant à penser à un cancer devant certains signes, savoir comment le confirmer simplement, comment orienter le malade et communiquer avec la famille. Le but ultime est de diagnostiquer précocément les cancers des enfants afin de les guérir plus souvent, tout en diminuant le cout global du traitement et en augmentant la qualité de vie. Les objectifs secondaires sont d’amener les médecins de proximité à surveiller l’enfant atteint de cancer, contribuer au traitement et soutenir l’enfant et sa famille. A court terme, il s’agit de consolider le réseau de médecins correspondants qui existe depuis de longues années, et à moyen terme, de créer des unités d’oncologie pédiatrique régionales capables de prendre en charge localement leurs malades. Le présent manuel ne prétend pas être un livre exhaustif d’oncologie pédiatrique, il repose sur l’expérience quotidienne des spécialistes qui l’ont écrit, et aussi, sur la connaissance qu’ils ont des problèmes rencontrés par les professionnels de santé de proximité, surtout ceux travaillant en dehors des grandes villes et avec des malades démunis. Nous espérons que ce document pourra aider les soignants dans leur travail quotidien. Fouzia Msefer Alaoui Coordinatrice 4 SOMMAIRE AVANT PROPOS GENERALITES • • • • Les cancers de l’enfant au Maroc, état des lieux Rôle du médecin de proximité dans les cancers de l’enfant La chimiothérapie anticancéreuse Facteurs étiologiques des cancers de l’enfant 9 15 22 25 CONDUITE À TENIR DEVANT • • • • • • • • • • • • Un syndrome anémique Un syndrome hémorragique Une adénopathie périphérique Une splénomégalie, Une masse abdomino-pelvienne Un syndrome cave supérieur Une anomalie du sinus uro-génital Une anomalie oculaire Une anomalie ORL Une douleur osseuse Une hypertension intracrânienne Une compression médullaire 31 34 37 40 43 47 51 54 57 60 63 66 PRINCIPALES PATHOLOGIES • • • • • • • • Les leucémies aigues Les lymphomes non hodgkiniens La maladie de Hodgkin Le néphroblastome Le neuroblastome Les tumeurs osseuses malignes primitives Les tumeurs germinales malignes de l’enfant Le rétinoblastome 71 77 81 86 93 96 101 107 5 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc SOINS DE SUPPORT • • • • Le syndrome de lyse tumorale La douleur chez l’enfant attent de cancer Transfusion en oncologie pédiatrique Les soins palliatifs en oncologie pédiatrique 113 116 119 122 ANNEXES • • • • • Infrastructures de prise en charge des malades atteints de cancer au Maroc Associations de lutte contre le cancer et maisons d’accueil Lectures recommandées - Quelques sites web utiles à visiter Planche affiche « diagnostic précoce des cancers de l’enfant » Planches images 6 129 131 135 136 137 Ont participé à cet ouvrage COORDINATRICE : Pr. Fouzia Msefer Alaoui Pédiatre hémato-oncologue. Association l’Avenir. Rabat. [email protected] COMITÉ DE RÉDACTION : Pr. Fouzia Msefer Alaoui Pr. Said Benchekroun Hématologue. Hôpital 20 Août 1953. Casablanca [email protected] Pr. Mhamed Harif Hématologue. Hôpital Mohamed V. Marrakech. [email protected] Pr. Mohamed Khattab Pédiatre hémato-oncologue. Hôpital d’Enfants. Rabat [email protected] ET, PAR ORDRE ALPHABÉTIQUE : Dr Aziza Addi Direction de l’épidémiologie et des maladies non transmissibles. Ministère de la santé [email protected] Pr. Mounia Alzemmouri Chirurgien pédiatre. Hôpital d’Enfants. Casablanca [email protected] Dr. Nadia Belqari Gestionnaire du dossier cancer. Direction des Hôpitaux et des soins ambulatoires. Ministère de la santé [email protected] Pr. Mohammed Charif Chefchaouni Ophtalmologue, Hôpital des spécialités. Rabat [email protected] Dr. Maria El Kababri Pédiatre hémato-oncologue. Hôpital d’enfants. Rabat [email protected] 7 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Pr. Mohamed El Khorassani Pédiatre hémato-oncologue. Hôpital d’Enfants. Rabat. [email protected] Pr. Mohamed Fehri Chirurgien pédiatre. Secteur privé. Casablanca. [email protected] Rhizlane Fila Responsable du Projet Diagnostic Précoce des Cancers de L’Enfant Association l’Avenir. Rabat [email protected] Dr. Zineb Ghanimi Pédiatre hémato-oncologue. Hôpital d’Enfants. Rabat [email protected] Pr. Hassan Gourinda Chirurgien pédiatre. Hôpital d’Enfants. Rabat [email protected] Pr. Leila Hessissen Pédiatre hémato-oncologue. Hôpital d’Enfants. Rabat. [email protected] Dr. Lamya Kanouni Radiothérapeute. Institut National d’Oncologie Sidi Mohamed Ben Abdallah. Rabat. [email protected] Pr. Amina Kili Pédiatre hémato-oncologue. Hôpital d’Enfants. Rabat [email protected] Pr. Abdallah Madani. Hématologue Hôpital 20 Août 1953 Casablanca [email protected] Dr. Mohammed Nasser Nachef Pédiatre hémato-oncologue. Hôpital d’Enfants. Rabat [email protected] Pr. Maati Nejmi Anesthésiste réanimateur. Service d’anesthésie, réanimation et traitement de la douleur. Institut National d’Oncologie. Rabat. [email protected] Pr. Siffedine Nejmi Anesthésiste réanimateur. Hôpital d’enfants. Casablanca [email protected] Pr. Saadia Zafad Hématologue. Hôpital 20 Août 1953 Casablanca [email protected] 8 LES CANCERS DE L’ENFANT AU MAROC, ETAT DES LIEUX Fouzia Msefer Alaoui Introduction Les cancers de l’enfant sont rares (1 à 3% des cancers humains) ; leur présentation est souvent spectaculaire ; leur localisation variée et potentiellement généralisée ; leur nature histologique, embryonnaire ou sarcomateuse ; leur évolution spontanée, rapidement fatale ; leur sensibilité aux traitements, souvent très grande. Les progrès thérapeutiques dont ont bénéficié les cancers de l’enfant font qu’on n’a plus le droit de les négliger, même dans les pays en développement, car, bien traités, près de 4 enfants sur 5 guérissent et rejoignent la cohorte des enfants du même âge avec les mêmes potentialités. La communauté internationale estime que l’incidence annuelle des cancers de l’enfant est de 10 à 15 nouveaux cas sur 100000 enfants de moins de 15 ans et que seuls 20% des malades dans le monde ont accès à des soins adéquats. Ceci nous amène à envisager l’existence de 1000 à 1500 nouveaux cas pédiatriques par an au Maroc. Qu’en est-il de leur accès aux soins ? Historique de l’oncologie pédiatrique au maroc Jusqu’à la fin des années 1970, les enfants atteints de cancer diagnostiqués étaient hospitalisés dans tous les services de pédiatrie, chirurgie, médecine, hématologie ou de spécialités selon la présentation la plus visible de leur cancer. Le diagnostic faisait toujours appel à la biopsie chirurgicale, le bilan était insuffisant, et l’arme thérapeutique essentielle était la chirurgie. La radiothérapie ne se faisait qu’à Casablanca et la chimiothérapie n’utilisait qu’un petit nombre de drogues, variable selon la disponibilité. Quand l’enfant ne mourait pas pendant l’hospitalisation, son suivi était très difficile, surtout s’il habitait loin de Rabat ou de Casablanca. Au total, un enfant atteint de cancer au Maroc était condamné à mort à brève échéance sauf quand sa tumeur était localisée, exceptionnellement curable par la chirurgie, ou quand sa famille pouvait lui offrir un traitement à l’étranger. Concernant ce dernier point, les transferts sanitaires se soldaient souvent eux-mêmes par un échec du fait de l’absence de coordination et de dialogue entre le centre « envoyeur » et le centre « receveur ». Beaucoup d’enfants étaient au-delà de toute ressource thérapeutique, et beaucoup encore partaient sans leurs parents et ne comprenaient pas ce qui leur arrivait. 9 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Au début des années 1980, deux petites équipes à Rabat et à Casablanca se sont attelés à améliorer la situation des enfants atteints de leucémies, puis très vite, des autres cancers. Deux unités ont été aménagées, d’abord unité de lieu, puis progressivement, unité de personnel et de gestion. Ces unités se sont agrandies pour répondre à une demande croissante de soins et ont utilisé très vite les soins ambulatoires en Hôpital de Jour (HDJ). Les hommes et les femmes de ces deux unités ont compris très tôt que l’oncologie pédiatrique n’était pas une affaire seulement médicale, mais concernait aussi les enfants, les parents et toute la société. C’est ainsi que sont nées deux associations de soutien aux deux unités : l’Association des maladies du sang, renommée Agir, et l’Association des Parents et Amis des enfants atteints de Cancer, l’Avenir. Ces deux ONG ont accompagné chaque unité dans son développement et les soutiennent sur les plans matériel et moral. Actuellement, une troisieme association, Noujoum, soutient une troisième unité, située dans l’Hôpital d’Enfants de Casablanca. En 1986, l’Institut National d’Oncologie Sidi Mohamed Ben Abdallah ouvre ses portes à Rabat, permettant aux enfants traités pour cancer de bénéficier de la radiothérapie à Rabat. En juin 1996, la Société Marocaine d’Oncologie Pédiatrique (SMOP) est créée et sa première action a été l’organisation du 3eme Congrès Continental de la SIOP en Afrique, à Rabat, en mai 1998. La SMOP est ouverte à tous les intervenants médicaux dans l’oncologie pédiatrique. Elle organise réunions et congrès, travaille sur des protocoles nationaux et organise le travail coopératif international. En octobre 2000, la coopération internationale est formalisée : - Celle de l’Hôpital d’Enfants St. Jude de Recherche de Memphis (SJCRH), USA, avec l’Oncologie Pédiatrique au Maroc. Ce partenariat a été concrétisé par la signature en octobre 2000 d’une convention entre l’Hôpital St Jude, les deux associations Agir et l’Avenir et les deux directeurs médicaux de programmes à Casablanca et Rabat. Ce partenariat est axé sur la formation des infirmières et des médecins, le développement de la communication par Internet et de la gestion des dossiers de malades, ainsi que la remise à niveau des techniques de diagnostic et de traitement. Après 8 ans de partenariat, le bilan est très positif. - Le Groupe Franco-africain d’Oncologie Pédiatrique (GFAOP) a été constitué en octobre 2000 et comprend des membres français et des membres africains. Il vise l’amélioration de la formation en soins et recherche au profit des enfants africains atteints de cancer. Neuf Unités Pilotes (UP) sont constituées (Rabat, Casablanca, Alger, Tunis, Oran, Dakar, Yaoundé, Abidjan, Tananarive) et travaillent ensemble sur quelques tumeurs (essentiellement le lymphome de Burkitt et le néphroblastome) avec des résultats encourageants. Ces résultats ont été présentés au congrès de la SIOP Septembre 2005 à Vancouver et le GFAOP s’est vu décerner le Prix SIOP - PODC. Par ailleurs 25 infirmières des UP, dont 8 marocaines, ont effectué des stages de 2 mois dans les services français d’Oncologie Pédiatrique. En Décembre 2005, dans le cadre de la Campagne « Mon Enfant Ma Bataille » lancée par l’Union Internationale contre le cancer (UICC), deux projets marocains sont acceptés pour être financés. Les 2 projets sont, d’une part « la douleur de l’enfant atteint de cancer » et d’autre part « une campagne nationale pour le diagnostic précoce des cancers de l’enfant ». En mars 2006, la SMHOP organise le 7ème Congrès Continental de la SIOP en Afrique à Marrakech en partenariat avec la SIOP Internationale, la PASPO, l’ICCCPO, les Associations l’Avenir, Agir et Noujoum. 10 Les cancers de l’enfant au maroc, état des lieux Situation actuelle - l’existant Unités d’oncologie pédiatrique 1. Casablanca • Le Service d’Hématologie et d’oncologie pédiatrique (SHOP), situé dans l’Hôpital du 20 août, comporte une unité de 13 lits pédiatriques et un grand hopital de jour (HDJ) commun aux enfants et adultes. Cette unité reçoit environ 250 nouveaux cas de cancers chaque année. §Le Service de Pédiatrie III, situé dans l’Hôpital d’Enfants de Casablanca, comporte une unité de 20 lits d’oncologie. Cette unité reçoit environ 60 nouveaux cas par an. §La Clinique Belvédère comporte une unité d’oncologie pédiatrique de 8 lits et 3 fauteuils, qui reçoit 40 nouveaux cas par an le plus souvent traités en ambulatoire. 2. Rabat • L’Unité d’Hémato oncologie pédiatrique (UHOP) de l’Hôpital d’Enfants d’une capacité de 21 lits d’hospitalisation interne et 14 lits d’HDJ, reçoit environ 350 nouveaux malades atteints de cancer et 120 nouveaux malades porteurs d’une maladie du sang. §Une unité privée dans la clinique Al Azhar permet de traiter environ 15 nouveaux malades par an. 3. Autres villes Dans plusieurs villes du Maroc, malgré l’absence d’unités bien structurées, il existe un ou deux médecins (pédiatres, hématologistes ou généralistes), un ou deux infirmiers impliqués dans la prise en charge des enfants atteints de cancer. C’est ainsi que, en collaboration avec les centres référents, des perfusions de chimiothérapie ou de transfusions sanguines sont pratiqués dans ces villes ainsi que le suivi de malades, grâce aux téléphones, fax, cahiers de correspondance et plus récemment, Internet. Environnement médical nécessaire à l’oncologie pédiatrique Il existe dans plusieurs villes, dans les mêmes structures que l’oncologie pédiatrique ou en dehors : • plusieurs services de chirurgie pédiatrique, viscérale et orthopédique • des services de soins intensifs pédiatriques • des laboratoires de pathologie • des centres de radiothérapie, universitaires et privés • des centres régionaux de transfusion sanguine • plusieurs laboratoires d’analyses médicales • plusieurs centres de radiologie • d’autres services de pédiatrie, notamment de maladies infectieuses, nutritionnelles, cardiaques et rénales. • d’autres services de spécialités, notamment neurochirurgie, ophtalmologie et ORL. Environnement social nécessaire à l’oncologie pédiatrique 1. A Casablanca, l’Association Agir soutient le SHOP par les médicaments, l’équipement, l’aménagement des locaux, etc.… De même l’Association Noujoum soutient l’Unité de l’Hôpital d’Enfants de Casablanca, notamment sur le plan psycho-affectif. 11 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc 2. A Rabat, l’Association l’Avenir soutient l’Unité d’Hémato-oncologie Pédiatrique (UHOP) et les malades par des médicaments, du matériel d’équipement, l’entretien des locaux, l’amélioration du confort, le plaidoyer scolaire et social, le personnel, l’animation, l’information, l’hébergement à Rabat (La Maison de l’Avenir), le transport… • A l’intérieur de l’UHOP, des intervenants non médicaux (institutrices, bénévoles) aident beaucoup les malades, leurs parents et leurs soignants. • De plus, l’Avenir offre à l’Unité des moyens de communication avec les malades et leurs médecins de proximité ce qui permet d’établir un réseau de médecins correspondants. Ceci évite un grand nombre de déplacements aux malades, et donne aux médecins régionaux une opportunité d’implication dans le traitement et le suivi des malades qu’ils adressent aux centres de références. • L’Association l’Avenir est membre fondateur de l’International Confederation of Childhood Cancer Parent Organisations (ICCCPO) qui a pour but de partager les informations et les expériences concernant les cancers de l’enfant et d’augmenter l’accès aux meilleurs soins des enfants atteints de cancer partout dans le monde. L’ICCCPO a décrété la journée du 15 Février, Journée Internationale du Cancer de l’Enfant. • Créée en Novembre 2005, l’Association Lalla Salma de lutte Contre le Cancer, bien qu’elle ne soit pas dédiée seulement à l’enfant, est venue consolider avec bonheur les efforts des associations qui soutiennent les enfants atteints de cancer et des équipes qui les soignent. Patients et Pathologies Si on additionne les nouveaux malades reçus chaque année dans les différentes structures d’oncologie pédiatrique publiques ou privées, de Casablanca ou de Rabat, on peut répondre à la question « qu’en est-il de l’accès aux soins ? » que 60 à 70% des enfants marocains atteints de cancer arrivent dans des structures de soins adaptés bien que souffrant d’insuffisances en moyens humains et matériels. Tous les types de cancers existent, mais avec une prédominance nette des lymphomes et des leucémies suivis des tumeurs solides en particulier les néphroblastomes. Les tumeurs cérébrales, très fréquentes dans les séries des pays développés, sont rares dans les unités d’oncologie pédiatriques marocaines, étant donné qu’elles sont suivies dans les services de neurochirurgie et de radiothérapie. Les malades arrivent encore dans un état parfois très grave à cause du retard de diagnostic et d’orientation ; l’histoire naturelle des cancers de l’enfant étant très rapide, une prise en charge de quelques semaines après l’apparition des premiers signes peut être déjà tardive. Les traitements donnés dans les unités de référence sont le plus souvent inspirés des protocoles internationaux, associant chimiothérapie, chirurgie et radiothérapie. La chirurgie est conservatrice chaque fois que possible sans mettre en jeu le pronostic vital. La douleur reste encore souvent sous traitée en raison de l’insuffisance de connaissance de la douleur et de disponibilité des antalgiques. Cependant, actuellement, plusieurs médecins dans chacune des unités sont formés ou en formation dans la prise en charge de la douleur. 12 Les cancers de l’enfant au maroc, état des lieux Dans l’évolution et le suivi, nous continuons à déplorer un nombre non négligeable de décès au début du traitement, de rechutes et de malades perdus de vue. La survie globale des malades traités dans les unités de référence varie selon les types de cancer et le pronostic initial. Tous cancers confondus, plus de 2 malades sur 3 guérissent. Dans certains cancers comme les lymphomes ou les néphroblastomes, ce sont 3 malades sur 4 qui guérissent. En ce qui concerne le suivi des malades, il se fait grâce à un cahier de correspondance, à une ligne téléphonique directe, à une information des parents et à la bonne volonté des médecins correspondants. La vie dans l’unité de Rabat est marquée par une ouverture de l’unité aux parents, à l’école, à l’animation. Nous essayons d’améliorer les conditions de traitement en offrant confort, hygiène, éducation, écoute, information, soutien social et psychologique, ainsi que l’assurance pour les parents qui le demandent, de trouver un lit ou une aide matérielle à la Maison de l’Avenir. Cependant, le grand nombre de malades, le petit nombre de personnel et l’exiguïté des locaux de l’unité ne permettent plus un développement optimal de l’oncologie pédiatrique, d’ou la naissance du projet de construction d’un nouveau centre de traitement des cancers de l’enfant. La construction d’un Centre d’Hémato Oncologie Pédiatrique (CHOP) dans l’Hôpital d’Enfants de Rabat, a commencé en octobre 2005 grâce à un financement du Ministère de la Santé. Son objectif global est d’améliorer la prise en charge des enfants atteints de cancers et de maladies hématologiques. Ses objectifs spécifiques sont l’amélioration de l’accueil, des traitements, de la recherche, de la formation en vue de décentralisation et enfin de la vie des malades, des parents et de l’équipe soignante. Dans le même sens, un projet d’aménagement d’une nouvelle unité d’hématologie et oncologie pédiatrique à l’Hôpital du 20 Août 53 est en cours d’exécution, avec le soutien de l’ALSCC. Cette unité permettra d’améliorer les conditions d’hospitalisation des patients, augmentera la capacité litière à 20 lits en plus d’un hôpital de jour de 15 lits. Conclusion En 25 ans, l’oncologie pédiatrique s’est développée au Maroc de façon très positive. Actuellement, cette discipline présente de nombreux points forts qui, malgré toutes les difficultés rencontrées, l’empêcheront de retourner en arrière : • Les quelques unités qui existent sont bien structurées grâce aux équipes dévouées et professionnelles qui y travaillent ; • Elles sont soutenues moralement et matériellement par des associations dynamiques et efficaces ; • Elles sont soutenues également par des médecins correspondants impliqués dans le traitement et le suivi de leurs malades ; • Ces unités ont compris l’intérêt des soins ambulatoires qui permettent à l’enfant malade de mener une vie la plus proche possible de la normale ; • Ces unités ont compris aussi la nécessité de travailler et prendre des décisions en commun : médecins, chirurgiens, radiothérapeutes, pathologistes, radiologues, biologistes, etc.… • La constitution de la Société Marocaine d’Oncologie Pédiatrique permet un travail homogène et facilite l’établissement de coopérations 13 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc • Ces unités jouissent d’une reconnaissance nationale et internationale • L’accès à ces unités est estimé à 60 - 70% de l’ensemble des enfants marocains atteints de cancer. Le meilleur témoignage du rôle positif de l’oncologie pédiatrique au Maroc peut être apporté par les centaines de jeunes gens survivants du cancer dont certains poursuivent des études ou sont sur le marché du travail, ont fondé une famille et ont donné naissance à de beaux enfants. 1200 1151 1000 951 800 440 63 41 36 34 34 22 17 9 Pneumoblastome 88 Fibromatose TGM Retinoblastome LAM RMH T osseuses Neuroblastome MDH Nephroblastome LAL 99 LMNH 0 205 PNET 200 LMC 255 Histiocytose 319 Meduloblastome 362 400 Hépatoblastome 500 Tumeurs 526 UCNT 600 Nombre et types des maladies oncologiques suivis à l’Unité d’Hémato-Oncologie Pédiatrique de l’Hôpital d’Enfants de Rabat entre 1982 et 2004 14 LE ROLE DU MEDECIN DE PROXIMITE DANS LES CANCERS DE L’ENFANT Fouzia Msefer Alaoui Le rôle du médecin généraliste ou non oncologue dans les cancers de l’enfant est primordial aussi bien dans le diagnostic précoce, l’orientation adéquate que dans la surveillance thérapeutique et pédiatrique de ce patient qui est d’abord un enfant. Le médecin traitant est un partenaire précieux des centres d’oncologie pédiatrique, essentiel dans la guérison d’un enfant ou dans l’accompagnement de ses derniers instants. Diagnostic précoce Les cancers de l’enfant ont vu leur pronostic s’améliorer de façon spectaculaire durant les vingt dernières années : trois enfants traités pour cancer sur quatre guérissent de leur maladie et pourront mener une vie normale. C’est dire la nécessité d’un diagnostic précoce pour donner à l’enfant les meilleures chances de guérir. Les signes cliniques d’appel sont très variables selon le cancer, sa localisation, son stade et l’âge de l’enfant. Il faut savoir que la plupart des cancers de l’enfant ont une histoire naturelle très courte (de 6 semaines à 6 mois) ; ainsi des signes d’apparition récente, sans raison évidente -notamment infectieuse- et survenant chez un enfant jusque là bien portant, doivent faire évoquer une possibilité de cancer. Une bonne écoute des parents et de l’enfant ainsi qu’un examen patient et orienté permettent souvent de ne pas passer à côté de quelque chose de grave. Une attention toute particulière doit être prêtée aux éléments suivants : • Une modification récente du comportement de l’enfant qui ne joue plus et qui devient trop calme ou triste, une fatigue sans raison apparente, une pâleur ou un syndrome anémique récents doivent faire évoquer une leucémie aiguë. Sans perdre de temps à donner du fer ou des vitamines, le premier médecin qui voit ce malade, même s’il ne trouve pas de syndrome tumoral ni hémorragique, doit demander un hémogramme avec un taux de réticulocytes. Une neutropénie, surtout si elle est associée à une anémie normocytaire arégénérative et à une thrombopénie est très évocatrice de leucémie aiguë, et ce, quel que soit le nombre de globules blancs (GB) et qu’il y ait ou non des blastes. 15 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc • Une adénopathie asymétrique, ferme, non douloureuse, qui persiste plus de 30 jours, fait évoquer une maladie de Hodgkin, même si le reste de l’examen est normal. Le premier test à faire est une intradermoréaction (IDR) à la tuberculine ; si elle est négative, une biopsie s’impose. Les médecins qui sont appelés à la pratiquer (chirurgiens ou ORL) sont priés de ne pas faire de geste large ou agressif tel le curage ganglionnaire. Ce geste n’est pas utile (chimiothérapie et radiothérapie efficaces) et laisse des séquelles esthétiques et fonctionnelles. • Un strabisme et surtout une leucocorie ou aspect d’œil de chat doivent faire évoquer un rétinoblastome et faire pratiquer un fond d’œil (FO). • Une toux sèche, une respiration sifflante (wheezing) qui ne cèdent pas rapidement aux bêtamimétiques doivent faire évoquer un lymphome médiastinal et faire demander une bonne radio pulmonaire debout en inspiration de face et profil. • Une invagination intestinale aiguë chez un enfant de plus de 2 ans doit faire suspecter un lymphome entéro-mésentérique et pratiquer un examen anatomopathologique de la pièce réséquée. • Une diarrhée liquidienne très fréquente (10 à 30 par jour) doit faire évoquer une petite tumeur maligne sécrétant du VIP, notamment un neuroblastome. • Des douleurs osseuses diffuses chez un jeune enfant pale, une exophtalmie asymétrique avec ou sans ecchymose palpébrale (Syndrome de Hutchinson) sont très évocatrices de neuroblastome métastatique à l’os. • Une augmentation de volume de l’abdomen fera rechercher une tumeur abdominale qui pourra être, selon la symptomatologie associée et l’âge, un lymphome abdominal, un néphroblastome, un neuroblastome, un hépatoblastome…Une échographie confirmera la tumeur, la rapportera à un organe et révélera d’autres signes ou localisations associés. L’existence d’une ascite plaide plus pour une tuberculose ou un Lymphome Non Hodgkinien (LNH). Un caractère séro-hématique trouble de l’ascite est très évocateur de ce dernier diagnostic. • Une asymétrie récente de la face (tuméfaction jugale, hypertrophie gingivale localisée, hypertrophie maxillaire) fait évoquer en premier lieu un lymphome maxillaire de Burkitt. Le lymphome étant très sensible à la chimiothérapie, le chirurgien est dispensé de faire un geste agressif tel l’hémi-maxillectomie qui pose de gros problèmes esthétiques et fonctionnels. Un rhabdomyosarcome est à évoquer aussi quand l’évolution est plus longue. • Une hypertrophie amygdalienne asymétrique fait penser à un lymphome amygdalien et fera pratiquer un examen anatomopathologique de l’amygdale réséquée. • Un amaigrissement important avec hypoacousie ou rhinorrhée unilatérales font évoquer un cancer du cavum (UCNT) surtout chez un adolescent et faire pratiquer une tomodensitométrie (TDM) du cavum puis une rhinoscopie avec biopsie de la tumeur éventuelle. 16 Le role du medecin de proximite dans les cancers de l’enfant • Une douleur localisée à un membre, persistante depuis plus de 10 jours, sans fièvre, doit faire penser à une tumeur osseuse maligne surtout chez un grand enfant, réaliser une radiographie du membre douloureux et l’interpréter minutieusement. Si elle tout à fait normale, on donnera un antalgique et on refera une radio 10 jours plus tard si la douleur persiste. Si la radio est de nouveau normale, on fera une scintigraphie au technétium. Orientation adéquate vers un centre de référence Dès que le médecin suspecte la possibilité d’une pathologie cancéreuse chez un enfant, il doit accepter de l’orienter vers un centre de référence d’oncologie pédiatrique pour confirmation du diagnostic et prise en charge thérapeutique initiale. Le sentiment normal de frustration ressenti par le médecin traitant doit s’effacer devant l’intérêt du malade. Plus tôt celui-ci sera pris en charge dans un service spécialisé, plus grandes seront ses chances de guérir. Un enfant atteint de cancer doit être traité non par un médecin isolé, aussi compétent soit-il, mais par une équipe pluridisciplinaire (chimiothérapeutes, chirurgiens, radiothérapeutes, pathologistes, radiologues,…) Le meilleur contact avec le service de référence est le téléphone, suivi d’un fax ou d’un e-mail pour discuter de l’indication et des modalités du transfert. Le malade transféré sera accompagné d’un résumé aussi complet que possible de tout ce qui a été pratiqué, des documents d’imagerie et des documents de cytologie ou de pathologie (blocs et lames, permettant de faire la relecture, l’Immunophénotypage ou l’Immunohistochimie). Par ailleurs, il est absolument indispensable que l’enfant malade soit accompagné des parents ou de leurs substituts pour diminuer un peu son angoisse de la maladie et de l’inconnu. L’enfant malade sera vu en consultation à son arrivée au centre par un médecin senior qui l’examinera, complétera son bilan initial et, après discussion avec le reste de l’équipe, prescrira un schéma de traitement visant à le mettre en rémission complète. Ce bilan et ce traitement sont souvent réalisés en Hôpital de Jour, à moins que l’état du malade n’exige une hospitalisation interne classique. Si le malade habite hors de la ville ou il est traité, il ira passer la nuit à l’hôtel, chez de la famille ou des amis, ou dans des maisons de parents construites à cet effet (Maison de l’Avenir à Rabat, Maisons de Vie Lalla Salma à Casablanca et Agadir ainsi que d’autres maisons de Vie prévues à proximité de chaque centre anticancéreux régional) Un résumé de son observation est alors adressé à chaque médecin ayant eu à s’occuper de l’enfant malade. A Rabat, ce résumé est consigné sur un simple cahier d’écolier qui est remis au malade. Chaque fois que celui-ci est revu, au centre de référence ou par son médecin de proximité, les constatations et le traitement éventuel sont notés. Ce cahier joue un rôle de communication ; il est appelé cahier de correspondance. Le médecin de proximité joue donc un grand rôle dans la surveillance de l’enfant, bien sûr de façon conjointe avec le centre de référence qui doit être disponible pour donner des explications ou résoudre un problème. Cette surveillance s’assurera d’abord que le traitement est bien compris et bien suivi. 17 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Surveillance de l’enfant traité pour cancer Surveillance pédiatrique L’enfant soigné pour cancer est d’abord un enfant avec des besoins spécifiques : • La croissance staturo-pondérale et pubertaire est importante à noter régulièrement du fait de la toxicité possible du traitement • L’alimentation doit être normalement équilibrée : il n’y a pas de régime alimentaire particulier en dehors du régime hyposalé associé à une corticothérapie éventuelle. • La scolarité peut être reprise dès que l’enfant est en rémission à condition de signaler à ses parents et enseignants le danger que représente la varicelle chez les immunodéprimés et les infections bactériennes chez les neutropéniques. • Le sport peut être pratiqué avec modération en évitant de se blesser en cas de thrombopénie. • La vie familiale doit être la plus proche possible de la normale. Les parents doivent éviter de céder à tous les caprices de l’enfant, sous peine d’en faire un « petit monstre ». • Des rappels de vaccinations : D.T.Coq Polio, BCG, HVB, sont à faire 6 mois après l’arrêt de la chimiothérapie. • Les soins dentaires et les soins de bouche sont importants pour prévenir les infections et les mucites ou du moins diminuer leur gravité. Surveillance médicale à la recherche d’une toxicité médicamenteuse Il est important de connaître les principales toxicités des drogues les plus utilisées chez l’enfant. Pendant le traitement : • Certaines toxicités sont communes et demandent un traitement symptomatique - troubles digestifs (vomissement, anorexie, diarrhée, mucites) - extravasation sous cutanée du produit injecté - hémorragie en rapport avec une thrombopénie, - infection ou fièvre en rapport avec une neutropénie ou un déficit immunitaire. dans ce sens, une antibioprophylaxie par le sulfametoxazole–trimétoprime est souvent prescrite en oncologie pédiatrique, surtout dans les leucémies qui nécessitent une chimiothérapie d’entretien prolongée. • D’autres sont plus spécifiques à certaines drogues : - la vincristine a une toxicité neurologique de gravité très variable, - les antracyclines doivent être évitées chez un malade porteur d’une cardiomyopathie, - le méthotrexate a plusieurs toxicités dont les principales sont neurologique et hépatique (surveillance d’un traitement au long cours par le dosage mensuel des transaminases). - l’endoxan a une toxicité urinaire, ce qui impose des boissons abondantes et l’arrêt du traitement en cas d’hématurie. Après l’arrêt du traitement, la surveillance est maintenue à cause de la possibilité de survenue de toxicité tardive : • Séquelles de radiothérapie - Osseuse : trouble de la croissance, asymétrie… - Digestive : iléite radique - Respiratoire : fibrose et insuffisance respiratoire (intérêt de l’exploration fonctionnelle respiratoire) - Neuropsychique en cas d’irradiation de tumeur cérébrale 18 Le role du medecin de proximite dans les cancers de l’enfant • Séquelles de chimiothérapie - Cardiaque : cardiomyopathies fréquentes et graves (nécessité de pratiquer des échographies cardiaques si le patient a reçu des antracyclines) - Pulmonaire : secondaire au traitement par des médicaments comme le méthotrexate ou la bléomycine - Reproduction : certaines drogues entraînent une azoospermie. La fertilité est moins touchée chez la fille. - Carcinogenèse : des tumeurs secondaires se voient de plus en plus. La chimiothérapie est incriminée, mais aussi la radiothérapie et la prédisposition génétique du malade. Dépistage d’une rechute ou récidive • • • L’examen clinique doit être complet à chaque consultation ; on s’inquiètera devant : - un gros testicule dur et asymétrique (rechute testiculaire) - une paralysie de nerfs crâniens (rechute méningée) - une obésité, boulimie ou somnolence (rechute méningée) - une pâleur avec syndrome tumoral (rechute médullaire) - une palpation abdominale douteuse - un retour de la symptomatologie initiale L’examen biologique est à faire au moindre signe d’appel. Certaines analyses sont pratiquées régulièrement selon des protocoles : - hémogramme - alphafoetoproteine (AFP) - catécholamines urinaires (VMA, HVA, Dopamine) L’examen radiologique est pratiquée devant la moindre suspicion de récidive : - radiographie pulmonaire - echographie abdominale Devant toute constatation ou suspicion de toxicité ou de récidive, le médecin correspondant se mettra en contact avec le centre de référence pour discuter de la conduite ultérieure. Conduite à tenir en cas de maladie virale au cours du traitement ou dans les 6 mois qui suivent son arrêt. Pneumopathie virale, rougeole, oreillons, rubéole, hépatite : arrêter la chimiothérapie pendant 1 à 2 semaines, donner un traitement symptomatique, assurer une surveillance clinique, biologique et radiologique à domicile et s’il y a des signes de gravité, à l’hôpital. Contacter l’unité de référence Varicelle ou zona : même attitude que plus haut. Si on voit le malade au stade pré clinique ou mieux, dans les 4 premiers jours qui suivent le contage, on lui injecte des gamma globulines spécifiques anti-varicelle zona. S’il est impossible de s’en procurer à temps, on donnera de l’acyclovir per os toutes les 8 heures pendant 5 à 7 jours. Si on le voit au stade de l’éruption, on doit le mettre immédiatement sous acyclovir injectable en perfusion, à raison de 10 mg par kilo toutes les 8 heures. Contacter l’unité de référence 19 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Conduite à tenir en cas de pronostic défavorable En cas de récidives itératives ou de rechute précoce ou encore de forme d’emblée péjorative (sarcome métastatique ou neuroblastome stade IV de l’enfant âgé de plus de 12 mois), il devient illusoire de donner un traitement à visée curative. Au centre de référence, on essaie d’informer les parents le plus clairement possible des limites thérapeutiques. La famille nous demande généralement de prendre le patient à domicile ou à proximité de son domicile. C’est là encore que le médecin de proximité peut jouer un rôle primordial : • Soutien psychologique aux parents et à l’enfant. Même en l’absence de formation en psychologie, une simple écoute disponible du médecin peut diminuer leur angoisse. • Information : les parents, même informés, refusent souvent la gravité de la situation et ont besoin qu’on leur explique plusieurs fois. • Traitement palliatif ou de confort : à la sortie du centre de référence, on prescrit généralement à l’enfant malade - une chimiothérapie par voie orale à visée triple : antitumorale, antalgique et psychologique - un traitement de la douleur, élément le plus important - tout autre traitement qui peut contribuer à son confort. • Le médecin de proximité doit : - s’assurer que l’enfant et la famille ont bien compris ce traitement et qu’ils le suivent, - le modifier selon sa toxicité ou son inefficacité, - l’expliquer en insistant sur les petits détails (horaire, précautions, …), les malades s’atachant aux détails et oubliant souvent le pronostic. Information de la famille La famille dont l’enfant est atteint de cancer pressent le diagnostic, est choquée par sa confirmation, veut protéger son enfant par le silence, écoute les explications données sur les besoins et l’évolution de la maladie, mais ne les entend pas. Cependant, le premier choc passé, la plupart des parents, quel que soit leur niveau économique et social, sont capables de s’avérer de bons partenaires si on les implique suffisamment. Il est essentiel qu’ils soient informés, simplement, que leur enfant est gravement malade, mais qu’il peut guérir si on le traite correctement, que les parents peuvent nous aider de plusieurs façons à le guérir. Ils peuvent comprendre que leur enfant est fragilisé par sa maladie et son traitement, et que par conséquent, il doit être protégé contre les infections, essentiellement la varicelle. Les parents doivent être au courant des différentes étapes du traitement et de la nécessité de respecter les intervalles entre deux cures. Ils doivent aussi être informés des structures d’accueil au centre de référence, aussi bien du point de vue médical que social. Enfin, il est essentiel qu’ils apprennent à lire la numération formule sanguine (NFS), surtout le chiffre des GB, des polynucléaires neurophiles (PNN), et des plaquettes (implication des laboratoires, des infirmiers, des médecins, du centre de référence et de proximité) 20 Le role du medecin de proximite dans les cancers de l’enfant Conclusion Le rôle du médecin non oncologue dans les cancers de l’enfant est essentiel. Il consiste à faire le diagnostic précoce qui conditionne le pronostic et la qualité de vie du patient, à orienter le malade de façon adéquate, et par la suite, à assurer une surveillance rigoureuse et prolongée conjointement avec le centre de référence. La communication de l’information entre les différents intervenants, y compris l’enfant lui-même et ses parents, doit être facilitée à toutes les étapes de la maladie. On doit souligner l’intérêt des associations des parents d’enfants atteints de cancer, qui interviennent beaucoup dans la prise en charge financière, sociale et psychoaffective. 21 LA CHIMIOTHERAPIE ANTI-CANCEREUSE Mhamed Harif La chimiothérapie anti-cancéreuse a révolutionné le pronostic des cancers de l’enfant. La majorité des cancers chez l’enfant est chimiosensible. La relative bonne tolérance de la chimiothérapie chez l’enfant comparée à l’adulte participe également aux bons résultats. L’administration de la chimiothérapie obéit à des protocoles précis dont l’application nécessite une équipe de soin spécialisée dans ce type de traitement. Elle s’intègre dans une approche globale de prise en charge des patients dans laquelle le diagnostic devrait être définitivement établi avant d’entreprendre ce traitement. Une information adéquate doit être donnée au patient et/ou ses parents sur la maladie, son traitement et ses complications. Un suivi du patient doit pouvoir être assuré pour évaluer l’évolution de la maladie mais aussi la toxicité immédiate et tardive du traitement. Mécanismes d’action et administration des anti-mitotiques Les anti-mitotiques interfèrent par des mécanismes variés sur la division cellulaire. Les cellules en division sont les plus sensibles. Sur le plan biologique, les grosses tumeurs comportent une proportion importante de cellules en phase G0 (cellules quiescentes) donc moins sensibles aux antimitotiques. D’autre part, la partie centrale des grosses tumeurs est mal vascularisée et donc peu accessible aux anti-mitotiques. Ces considérations rendent compte de l’importance du diagnostic précoce pour de meilleures chances de guérisons. Selon leur mécanisme d’action, ils sont classés en quatre grands groupes : alkylants, intercalants, anti-métabolites et poisons du fuseau (Tableau I). La plupart des antimitotiques ont un métabolisme hépatique et une élimination urinaire. Pour cette raison, l’étude des fonctions hépatique et rénale est systématique avant et durant le traitement. En cas d’insuffisance rénale ou hépatique les doses doivent être adaptées. Il faudra également prendre en considération les interférences médicamenteuses. Ainsi, par exemple, l’usage des anti-convulsivants augmente le catabolisme de certains anti-mitotiques. Le traitement fait souvent appel à plusieurs produits rentrant dans le cadre d’un protocole thérapeutique. Les produits utilisés ont des mécanismes d’actions variées permettant de vaincre les résistances. D’autre part, les modalités d’administrations tiennent compte de l’accessibilité des cellules tumorales. Ainsi, on utilise le méthotrexate à hautes doses pour une meilleure pénétration au niveau du système nerveux centrale permettant de traiter ou prévenir une localisation à ce niveau. 22 La chimiothérapie anti-cancréuse Tableau I : Classification des principaux anti-cancéreux utilisés chez l’enfant Alkylants Moutardes à l’azote Nitroso-urées Organoplatines Autres Chlorambucil, Chlorméthine, Cyclophosphamide, Ifosfamide, Melphalan. Carmustine, Fotémustine, Lomustine. Carboplatine, Cisplatine Busulfan, Dacarbazine, Procarbazine Intercalants (inhibiteurs de la topoisomérase) Anthracyclines Epipodophyllotoxines Autres Anti-métabolites Antagonistes foliques Antagonistes puriques Antagonistes pyrimidiques Poisons du fuseau Vinca-alcaloïdes Daunorubicine, Doxorubicine, Epirubicine, Idarubicine. Etoposide, Teniposide Bléomycine, Topotecan Méthotrexate 6-mercaptopurine, 6-thioguanine 5-fluoro-uracile, cytarabine, gemcitabine Vincristine, Vinblastine, Vindésine, Vinorelbine Autres Asparaginase, Trétinoïne Toxicité des anti-mitotiques Les antimitotiques ont une toxicité importante rendant leur maniement délicat et nécessitant une bonne expérience de l’équipe médicale et paramédicale. La myélosuppression est le principal et le plus dangereux effet secondaire. Les granulocytes sont les premiers à baisser du fait de leur courte demi-vie alors que l’anémie est plus tardive à survenir. Le taux des globules blancs diminue habituellement entre 5 et 14 jours. La neutropénie expose au risque infectieux qui est d’autant plus élevé que la neutropénie est plus profonde (inférieur à 500/mm3) et prolongée. Le développement récent de facteur de croissance hématopoïétique (GM-CSF et G-CSF) permet de réduire la durée et la profondeur de la neutropénie. Les nausées et vomissements sont très fréquents mais mettent rarement en jeu le pronostic vital. Les dérivés de platines sont les plus émétisants. Le mécanisme des vomissements est une stimulation des récepteurs de la sérotonine (5 hydroxy-tryptamine) situés au niveau des nerfs vagues et splanchniques. Les inhibiteurs de ces récepteurs tel l’ondansetron et le granisétron sont très efficaces dans la prévention et le contrôle de ces vomissements. D’autres toxicités sont également observés : oral, rénal, neurologique, hépatique, pulmonaire, cardiaque et cutanée. La toxicité gonadique est surtout observée avec les agents alkylants. Elle est dose dépendante et se voit plus volontiers chez les garçons de bas âge. Les cancers secondaires se voient suite au traitement par les alkylants, les épipodophylotoxines, les nitrosourées et les antracyclines. Le risque est plus élevé en cas d’association à la radiothérapie. Les cancers secondaires surviennent habituellement 5 années après le traitement. 23 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Les abords veineux La répétition des injections, la toxicité vasculaire de ces médicaments et le risque d’extravasation et de nécrose rendent nécessaires les mesures destinées à protéger le capital veineux. L’administration doit toujours être pratiquée en intra-tubulaire. Lorsqu’un abord périphérique est préconisé, le choix de la veine à ponctionner doit porter de préférence sur les veines du coude. L’injection doit être lente et toute réaction suspecte (douleur, rougeur…) doit faire arrêter l’injection immédiatement. Elle doit être faite par une infirmière habituée à ce type de traitement. L’abord veineux central est plus approprié pour l’administration au long cours de médicaments anti-cancéreux. Les veines le plus souvent abordées sont la veine jugulaire et le veine sous clavière. Le cathéter doit être constitué de matériaux permettant un maintien de longue durée (polyéthylène, silicone ou polyuréthane). Une héparinisation régulière est nécessaire pour maintenir leur perméabilité. Par ailleurs, la mise en place de ces cathéters majore le risque infectieux d’où la nécessité de mesures préventives lors de la manipulation de ces cathéters. Conditions pour la réalisation de la chimiothérapie La chimiothérapie peut être réalisée en hospitalisation classique ou en hôpital de jour. Le choix dépend de l’état du patient et des modalités d’administration. Ce traitement est au mieux conduit au niveau d’un centre spécialisé comportant un staff médical et paramédical expérimenté dans ce type de traitement et un plateau technique permettant un suivi optimal. Les doses sont données selon le poids et la surface cutanée. Le choix d’un programme thérapeutique doit se faire de manière concertée au sein d’une équipe multidisciplinaire. Le rôle des infirmières est particulièrement important. Elles doivent être entraînées en particulier pour la préparation des antimitotiques, la manipulation des cathéters centraux et aussi le bon suivi des effets secondaires. Le malade et/ou ses parents doivent être informés du traitement et de ses effets secondaires potentiels. Une éventuelle malnutrition, une altération des fonctions cardiaques, hépatiques ou rénales doivent être recherchées et faire adapter le traitement en conséquence. D’autre part, les patients devront être régulièrement évalués à la recherche d’effets secondaires au même titre que le suivi de la réponse tumorale au traitement. 24 Facteurs étiologiques des cancers de l’enfant Amina Kili La découverte d’un cancer chez l’enfant est une situation toujours difficile ; source de stress pour le thérapeute et de culpabilité pour les parents. De multiples interrogations sont alors posées quant à l’origine de ce cancer. La situation est d’autant plus épineuse que l’enfant est plus jeune. Age et facteur ethno géographique Près de 50% des cancers surviennent avant l’âge de 5 ans et sont représentés majoritairement par des tumeurs de type embryonnaire, des leucémies et des tumeurs cérébrales. Après l’âge de 10 ans, se rencontrent de manière prédominante les tumeurs des tissus de soutien (os et parties molles), les lymphomes et les tumeurs cérébrales. Les carcinomes, rares chez l’enfant, peuvent s’observer (surtout après 10 ans) au niveau de la thyroïde, du cavum ou d’autres types encore plus rares. Certaines particularités ethniques et/ou géographiques ont été mises en évidence dans le monde, avec une incidence très élevée des lymphomes de Burkitt en Afrique de l’Est; une incidence plus importante des neuroblastomes et néphroblastomes en Europe de l’Ouest et aux USA. Facteurs génétiques des cancers de l’enfant Les cancers héréditaires transmis sur un mode dominant Le rétinoblastome : Le rétinoblastome est familial dans 10 % des cas, et dans ce cas le plus souvent bilatéral et multifocal, de révélation précoce (50 % avant l’âge d’un an). Toutes les formes bilatérales de rétinoblastome sont héréditaires (20 à 40% des cas). A l’inverse, les rétinoblastomes non héréditaires sont unilatéraux et plus tardifs. Les formes sporadiques sont donc le plus souvent non héréditaires. Les néoplasies endocriniennes multiples (NEM) : Les NEM de type 2A et 2B sont transmises sur un mode autosomique dominant et ont en commun la survenue d’un carcinome médullaire de la thyroïde (dans 100 % des cas) et d’un phéochromocytome souvent bilatéral et malin (50 % des cas). 25 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Le syndrome de Li- Fraumeni Il a pour caractérisation phénotypique une agrégation familiale de sarcomes dans l’enfance, de cancers du sein, de tumeurs cérébrales et de leucémies. Syndrome pré- néoplasiques héréditaires Ils prédisposent inconstamment à une tumeur bénigne ou maligne essentiellement des lymphomes et des leucémies). On peut citer : - Les phacomatoses essentiellement la neurofibromatose de type I (maladie de Recklinghausen) - Les génodermatoses telle que xeroderma pigmentosum - Les syndromes d’instabilité chromosomique principalement l’Ataxie Télangiectasie et la maladie de Fanconi. D’autres syndromes d’instabilité chromosomique sont plus rares et exposent également à des cancers : c’est le cas du syndrome de Bloom et du syndrome de Werner. - Les déficits immunitaires congénitaux. Le risque le plus élevé est rencontré dans le syndrome de Wiskott- Aldrich (>15 %), puis dans l’ataxie télangiectasie (12 %), et l’hypogammaglobulinémie à expression variable. Les aberrations chromosomiques constitutionnelles - La trisomie 21: le risque de leucémie aigue est multiplié par 15 à 20. - Le chromosome Y : la persistance du chromosome Y dans les dysgénésies gonadiques mixtes expose à un risque élevé de gonadoblastomes et de carcinomes de l’endomètre - Le syndrome de Klinefelter (47 XXY) Les syndromes malformatifs et dysmorphiques La prévalence des malformations est d’environ 10% chez les enfants atteints de cancer contre 2,5% dans la population générale. - Aniridie congénitale et syndrome WAGR : elle expose à un risque de plus de 50% de néphroblastome (tumeur de Wilms), dont plus de 30 % de formes bilatérales. - Les anomalies de croissance : elles sont représentées essentiellement par le syndrome de Wiedman- Beckwith (gigantisme et viscéromégalie) et hémi hypertrophie corporelle ou d’un membre. Elles sont associées au néphroblastome, au corticosurrénalome, à l’hépatoblastome, et au phéochromocytome. -Les cryptorchidies : l’incidence des tumeurs germinales est multipliée par 40 ou 50, imposant leur traitement chirurgical précoce. Cancer et fratrie Les cas d’atteintes concordantes de jumeaux monozygotes sont en faveur du rôle de facteurs génétiques non identifiés. Pour les leucémies, il existe un risque très élevé si un des enfants est atteint pendant la première année. 26 Facteurs étiologiques des cancers de l’enfant Environnement et cancer de l’enfant Le rôle de l’environnement est considéré faible en cancérologie pédiatrique en dehors de situations particulières bien identifiées. -Les radiations ionisantes : le risque de cancer secondaire est accru, avec en particulier un risque de cancer thyroïdien après irradiation du cou. -Les rayons ultraviolets (UV) : en cas de prédisposition génotypique, (xeroderma pigmentosum, albinisme), il y a un accroissement du risque de mélanome lié à l’exposition solaire précoce. Les médicaments : rôle reconnu du diéthyhtilbestrol (Distilbène), conditionnant le risque d’adénocarcinomes génitaux. Après les traitements anti-cancéreux et immunosuppresseurs des greffes d’organes, le risque de cancer est multiplié par 100. Certaines drogues (agents alkylants, étoposide...), les associations chimio- radiothérapie dans certains cancers (maladie de Hodgkin) sont reconnues comme plus à risque. Les cancers développés chez les enfants exposés à ces traitements sont divers : myelodysplasies, leucémies aigues myéloblastiques, cancers du sein... Les agents chimiques et les polluants environnementaux comme les hydrocarbures, les pesticides, et insecticides... peuvent aussi exposer à des cancers Virus et cancer de l’enfant Le virus Epstein Barr (EBVs) est associé dans plus de 90 % des cas au lymphome de Burkitt africains (20 % en dehors de la zone d’endémie). Il est également associé au carcinome indifférencié du nasopharynx, avec une grande fréquence chez les sujets du pourtour méditerranéen et du sud-est asiatique. Le virus de l’hépatite B Est associé à l’hépatocarcinome. Le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) est associé à la survenue de lymphomes, par le biais du déficit immunitaire. Conclusion Les facteurs étiologiques des cancers de l’enfant sont certes très variés mais dans la plupart des cas, aucun facteur étiologique directement responsable n’est retrouvé. L’intérêt de la découverte d’un facteur causal ou potentiellement causal d’un cancer de l’enfant est d’assurer une surveillance programmée pour un diagnostic précoce. Dans d’autres cas un conseil génétique est possible. 27 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Conduites à tenir 29 Conduite à tenir devant un syndrome anémique Mhamed Harif L’anémie est très fréquente en consultation de pédiatrie. Elle peut révéler ou accompagner la plupart des pathologies cancéreuses. La diversité des étiologies nécessite une approche systématique basée sur un bon interrogatoire, un bon examen clinique et une bonne interprétation de l’hémogramme permettant de confirmer le diagnostic d’anémie et d’orienter les explorations complémentaires éventuelles. Diagnostic positif de l’anémie Signes cliniques • Anémie chronique : - les anémies chroniques sont habituellement bien tolérées. - la pâleur cutanée et conjonctivale est un signe constant - elle est habituellement associée à des signes cardiorespiratoires (dyspnée d’effort, tachycardie, souffle systolique anorganique) et neuromusculaires (asthénie, céphalées, vertiges, bourdonnements d’oreilles). • Anémie aigue : - elle est souvent mal tolérée même si elle est non sévère. - en plus de la pâleur, les signes d’hypovolémie sont fréquents et associent un pouls rapide parfois filant, une hypotension et parfois un véritable état de choc. Hémogramme L’anémie se définit comme une diminution du taux d’hémoglobine comparée aux normes pour l’âge et non pas du nombre de globules rouges ni de l’hématocrite bien que cette diminution peut être corrélée. L’hémogramme doit comporter systématiquement les constantes hématimétriques. L’étude du frottis sanguin sur lame doit être systématique en cas d’anomalie. 31 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Enquête étiologique L’enquête étiologique repose sur les données cliniques complétées par des examens complémentaires qui doivent être orientés par ces données cliniques et l’hémogramme. Eléments d’orientation clinique : • Des troubles phanériens (chute des cheveux, ongles plats cassants …) orientent vers une carence martiale • Un ictère et une splénomégalie orientent vers une anémie hémolytique • Un purpura et une fièvre orientent vers une insuffisance médullaire • Une pathologie inflammatoire aiguë ou chronique oriente vers une anémie inflammatoire Exploration complémentaire : Cette exploration doit être orientée par l’hémogramme. • En cas d’anémie hypochrome et/ou microcytaire, il convient d’étudier le métabolisme du fer. Cette étude peut être faite par le dosage du fer sérique et la capacité totale de fixation (CTF) ou l’évaluation des réserves par le dosage de la ferritinémie. En cas d’hyposidérémie associée à une élévation de la CTF ou de diminution du taux de ferritinémie, il s’agit d’une carence martiale, cause la plus fréquente d’anémie. Ailleurs, il peut s’agir d’une anémie inflammatoire. • En cas d’anémie microcytaire avec ferritinémie élevée et hyperréticulocytose, il s’agit d’une thalassémie. • En cas d’anémie normochrome normocytaire, il faudra faire une numération des réticulocytes. L’anémie est dite régénérative si la numération des réticulocytes trouve un taux de plus de 120000/mm3. Ailleurs elle est dite non régénérative. - en cas d’anémie non régénérative, il s’agit d’une anémie par insuffisance médullaire. Il peut s’agir d’une aplasie médullaire ou d’un envahissement médullaire dans le cadre d’une leucémie ou de métastases médullaires, par exemple de neuroblastome. - une anémie régénérative s’intègre souvent dans le cadre d’une anémie hémolytique. Signes évoquant une malignité • Survenue récente chez un enfant bien portant jusque là • Mauvaise tolérance • Présence d’autres signes d’insuffisance médullaire (hémorragies, infections) • Présence de syndrome tumoral (adénopathie, splénomégalie) • Présence de gros testicule ou d’anomalie des paires crâniennes • Anémie normocytaire, normochrome, non régénérative • Présence à l’hémogramme de thrombopénie, de neutropénie ou d’hyperleucocytose 32 Conduite à tenir devant un syndrome anémique Etiologies malignes possibles • Leucémie aigue lymphoblastique ou myéloblastique • Maladie de Hodgkin, plus rarement, surtout si l’anémie est de type inflammatoire • Toute tumeur solide à un stade de métastase médullaire ou occasionnant une anémie nutritionnelle ou inflammatoire. Orientation et Communication Devant une anémie récente chez un enfant, même isolée, le médecin doit systématiquement demander un hémogramme et en faire une interprétation correcte. Le traitement «à l’aveugle» par le fer ou autre traitement «anti-asthénique» est à éviter. Si nécessaire, le médecin doit proposer aux parents des examens complémentaires, une consultation spécialisée ou un transfert dans une structure spécialisée. Conclusion L’anémie chez l’enfant est très fréquente, le plus souvent d’origine carentielle. Cependant, chaque fois qu’elle est de survenue récente, mal tolérée ou s’intégrant dans un contexte de syndrome d’insuffisance médullaire, la possibilité d’une pathologie maligne sous-jacente doit être évoquée. L’hémogramme est nécessaire pour évaluer son degré et aider à préciser son étiologie. 33 Conduite à tenir devant UN SYNDROME HEMORRAGIQUE Maria EL Kababri Introduction Un syndrome hémorragique est un saignement cutané, muqueux ou viscéral, anormal parce que spontané ou disproportionné par rapport au traumatisme causal. Le diagnostic d’un syndrome hémorragique est le plus souvent clinique, il s’agit d’une urgence pédiatrique. Les causes sont multiples, dominées chez l’enfant par les causes infectieuses (purpura fulminans, thrombopénies virales ou autoimmunes) et les troubles constitutionnels de l’hémostase comme l’hémophilie. Dans de rares cas, le syndrome hémorragique peut être en rapport avec un cancer, essentiellement une leucémie aiguë. Circonstances de découverte • Une maman amène son enfant en consultation pour des lésions cutanées (purpura, ecchymose) ou un saignement (épistaxis, gingivorragie, hématurie) • Le médecin découvre un purpura lors d’une consultation pour un autre motif. Interrogatoire • A propos du syndrome hémorragique : - histoire : début, évolution, type. - signes accompagnateurs : fièvre, douleur, syndrome anémique. • A propos des antécédents - de l’enfant : grossesse, accouchement, premiers pas, saignement à la chute des dents de lait, anomalie constitutionnelle, vaccinations, alimentation, maladies infantiles, scolarité, traumatisme et notion d’intervention chirurgicale, notamment circoncision pour le garçon. - de la famille : anomalie connue, décès et leurs causes 34 Conduite à tenir devant un syndrome hemorragique Examen clinique L’aspect du syndrome hémorragique est un élément d’orientation capital : - caractère diffus ou localisé (nécessité d’examiner tout le corps) - purpura : peut être pétéchial, ecchymotique ou nécrotique. - hématome : saignement profond, musculaire, articulaire ou viscéral pouvant entrainer des compressions nerveuses ou autres. L’examen général recherche des signes physiques accompagnateurs : - hématologique : pâleur, splénomégalie - tumoral : abdomen, aires ganglionnaires, thorax, membres, tête Conclusion clinique Le médecin de proximité tiendra compte, dans sa conclusion clinique, du sexe, de l’âge, du fait que le syndrome hémorragique est isolé ou entre dans un cadre général, et envisagera des étiologies. Signes évoquant une malignité • Présence d’autres signes cliniques (pâleur, adénopathies, splénomégalie) • Rapidité de l’évolution Etiologies malignes possibles • Leucémie aigue, • Envahissement médullaire par : - un lymphome Non Hodgkinien, - un neuroblastome stade IV - un sarcome - une maladie de Hodgkin • Quand l’enfant est déjà connu et traité, le syndrome hémorragique peut être secondaire au traitement de la tumeur : - chimiothérapie : la plupart des produits antimitotiques sont responsables d’aplasie et peuvent être à l’origine de syndromes hémorragiques. Certains médicaments peuvent donner une cystite hémorragique : ifosfamide, cyclophosphamide - radiothérapie : les hémorragies peuvent en être une séquelle précoce : cystite hémorragique (irradiation pelvienne étendue) Bilan simple • NFS - Plaquettes à la recherche d’une thrombopénie, anémie ou neutropénie. • Myélogramme si la NFS laisse suspecter un envahissement médullaire. • Bilan de coagulation (TS, TP, TCA, fibrinogènémie) à la recherche de troubles de l’hémostase associés à certaines leucémies et lymphomes (CIVD) 35 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc • Echographie abdominale pour voir un hématome profond ou une tumeur abdominale ou ganglionnaire. Orientation et communication • Si la thrombopénie est profonde avec syndrome hémorragique, il est necessaire de transfuser en plaquettes car il y a un risque d’hémorragie cérébro-méningée. • S’il y a indication de transfert à un centre de référence, le médecin de proximité fera préciser la date du rendez vous, le nom du médecin qui verra l’enfant à l’unité de référence et les documents nécessaires, aussi bien techniques qu’administratifs. • Le médecin de proximité doit informer les parents de la raison du transfert : il peut s’agir d’un cancer, et dans ce cas, il vaut mieux qu’il soit traité tôt et dans un centre spécialisé pour avoir de grandes chances de guérir. • Le médecin de proximité doit aussi informer les parents de l’existence d’associations d’aide aux familles et leur donner leurs coordonnées. Par la suite, S’il ne reçoit pas systématiquement des nouvelles de son patient, le médecin de proximité doit les demander pour connaître le diagnostic et le traitement, pouvoir en informer la famille et prendre en charge l’enfant à son retour du centre de référence. 36 Conduite à tenir devant UNE ADENOPATHIE PERIPHERIQUE Fouzia Msefer Alaoui Introduction Les adénopathies sont très fréquentes chez le jeune enfant ; elles sont banales le plus souvent, réactionnelles à une infection virale, bactérienne ou parasitaire. Dans de rares cas, elles peuvent être tumorales malignes. Circonstances de découverte • Une maman amène son enfant en consultation pour une adénopathie (une boule mobile le plus souvent dans un pli de flexion) • Le médecin découvre une adénopathie lors d’une consultation pour un autre motif Interrogatoire • A propos de l’adénopathie - histoire : début, évolution - signes accompagnateurs : douleur, syndrome anémique ou hémorragique, dyspnée • A propos des antécédents - de l’enfant : grossesse, accouchement, anomalie constitutionnelle, vaccinations, alimentation, maladies infantiles, scolarité - de la famille : anomalie connue, décès dans la fratrie Examen clinique • Examen de l’adénopathie : unique ou multiple, localisations, volume, sensibilité, mobilité, • Examen général à la recherche de signes physiques accompagnateurs : - hématologiques : purpura, pâleur, splénomégalie - tumoraux : masse abdominale ou thoracique, douleur des membres, anomalie ORL ou des paires crâniennes 37 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Conclusion clinique Le médecin de proximité tiendra compte, dans sa conclusion clinique, du sexe, de l’âge, du fait que l’adénopathie est isolée ou entre dans un cadre général, et envisagera des étiologies. Signes évoquant une malignité • Signes inflammatoires souvent absents • Localisation : unilatéralité ou asymétrie ; si cervicale, creux sus claviculaire et cervicale haute Etiologies malignes possibles • Maladie de Hodgkin si évolution lente et adénopathie localisée et isolée • Leucémie aigue si évolution rapide et adénopathie généralisée et accompagnée d’anémie, fièvre, ou syndrome hémorragique • Lymphome Non Hodgkinien si évolution rapide et adénopathie localisée • Autres maladies plus rares tel que l’histiocytose • Adénopathie d’extension locale ou régionale d’une tumeur Bilan simple • IDR à la tuberculine : si elle est franchement positive, ce n’est très probablement pas un cancer • NFS Plaquettes à la recherche d’une anémie, neutropénie ou thrombopénie • Radio pulmonaire pour voir le médiastin et les poumons • Echographie abdominale pour rechercher une adénopathie sous diaphragmatique, et pour analyser d’autres organes (intestins, reins…) • Myélogramme : à faire devant une adénopathie généralisée d’évolution rapide, accompagnée ou non d’autres signes cliniques et en cas de perturbation de l’hémogramme • Biopsie ganglionnaire : elle ne doit être faite qu’après une analyse correcte de l’hémogramme qui peut orienter vers une leucémie aigue et indiquer un myélogramme. Si elle est faite avant le myélogramme, elle risque de montrer à tort un aspect de LNH alors qu’il s’agit d’une localisation ganglionnaire de blastes leucémiques. Orientation et communication • Si l’IDR est négative et qu’il y a suspicion ou confirmation de cancer même sans précision, contacter le centre de référence le plus proche par téléphone, email ou fax • S’il y a indication de transfert, le médecin de proximité fera préciser la date du rendez vous (s’assurer que la date donnée n’est pas fériée), le nom du médecin qui verra l’enfant à l’unité de référence et les documents nécessaires, aussi bien techniques que administratifs. • Le médecin de proximité doit informer les parents de la raison du transfert : il peut s’agir d’un cancer, et dans ce cas, il vaut mieux qu’il soit traité tôt et dans un centre spécialisé pour avoir de grandes chances de guérir • Le médecin de proximité doit aussi informer les parents de l’existence d’associations d’aide aux familles et leur donner leurs coordonnées. 38 Conduite à tenir devant une adénopathie périphérique Par la suite, S’il ne reçoit pas systématiquement des nouvelles de son patient, le médecin de proximité doit les demander pour connaître le diagnostic et le traitement et pouvoir en informer la famille 39 Conduite à tenir devant une splénomégalie Laila Hessissen Introduction La splénomégalie est l’augmentation pathologique du volume de la rate. Les étiologies sont multiples et l’atteinte de la rate peut être primitive ou secondaire Circonstances de découverte • Un examen lors d’une consultation pour une affection aiguë • Une enquête clinique ou une anomalie biologique dans une famille à antécédent de pathologie constitutionnelle • Un examen systématique d’un enfant « sain » en sachant que dans chez 5 à 10% des enfants sains, la rate est palpable sans être pathologique. • Une plainte fonctionnelle abdominale, essentiellement une pesanteur ou une douleur abdominale, s’exprimant surtout en cas de rate volumineuse. Interrogatoire Le médecin doit s’intéresser essentiellement aux antécédents du patient : • l’origine géographique (endémie de leishmaniose) ou un voyage récent vers des régions d’endémies • les conditions de vie • l’existence d’une consanguinité des parents • les antécédents familiaux (maladie du sang, splénectomie..). En cas de suspicion d’une maladie constitutionnelle, il est utile de tracer un arbre généalogique • les antécédents personnels (surtout l’ictère néonatal) Examen clinique • L’examen de la rate est essentiellement clinique : - La technique d’examen est importante : enfant calme en décubitus dorsal ou latéral gauche, bras le long du corps et jambes semi-fléchies. 40 Conduite à tenir devant une splénomégalie L’examen permet de percevoir le bord inférieur de la rate dans l’hypochondre gauche et d’en mesurer le débord - Si la splénomégalie est volumineuse, le bord inférieur de la rate est recherché en partant de la région sous ombilicale et en remontant progressivement vers le rebord costal gauche. Une splénomégalie volumineuse pose un problème de diagnostic différentiel avec les tumeurs rétropéritonéales (rein et surrénale) et les gros lobes gauches du foie. - Si la splénomégalie est modérée, son bord inférieur, souple et tranchant, est mieux perçu en inspiration profonde. La rate est mobile avec la respiration. Une splénomégalie modérée pose le problème de diagnostic différentiel avec les rates ptosées et le débord splénique par distension abdominale - Autres caractéristiques de la splénomégalie : noter sa consistance dure, ferme ou molle, son caractère homogène ou nodulaire, son caractère douloureux ou non • L’examen général recherche les signes fonctionnels et physiques accompagnateurs : - syndrome hémorragique notamment purpura, - syndrome anémique, - syndrome tumoral notamment adénopathies, hépatomégalie - syndrome général : fièvre, fatigue, sueurs, ictère - autres : ascite, circulation collatérale, faciès particulier… Confirmation de la splénomégalie Si l’échographie abdominale est faisable, il faut la demander devant une suspicion de splénomégalie. • Elle permet de confirmer que : - la masse palpée correspond à une rate - la rate est effectivement augmentée de taille, et ceci, en mesurant le plus grand axe de la rate sur un plan coronale et en le comparant aux abaques de références selon l’âge, la taille et le poids du patient. Age du patient 3 mois 1 an 4 ans 8 ans 12 ans adulte Taille moyenne de la rate Environ 6 cm 7 cm 9 cm 10 cm 11.5 cm < 13 cm • Elle analyse l’échostructure de la rate, ce qui donne une orientation étiologique • Elle permet de rechercher les anomalies associées Signes évoquant une malignité • • • • Absence d’antécédents familiaux ou personnels particuliers Début brutal ou rapidement progressif Association d’un syndrome tumoral (adénopathies, hépatomégalie..) et/ou syndrome hémorragique et/ou syndrome fébrile Echostructure nodulaire de la rate et/ou présence d’adénopathies abdominales 41 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Etiologies malignes possibles • • • • Maladie de Hodgkin dans son stade avancé (III ou IV Ann Arbor) Leucémie aigue essentiellement lymphoblastique si évolution rapide, accompagnée d’anémie, fièvre, ou syndrome hémorragique Leucémie myéloïde chronique (rate volumineuse chez un grand enfant) Histiocytose de Langherans, surtout dans sa forme Letterer Siwe du nourrisson, avec les signes cutanés en maillot de bain, l’otorrhée, la fièvre et les signes respiratoires Bilan simple Il s’agit d’un bilan biologique essentiellement, parfois urgent • NFS Plaquettes à la recherche d’une anémie, neutropénie ou thrombopénie • Taux de réticulocytes • Frottis sanguin et goutte épaisse • Sérologie de leishmaniose • Médullogramme surtout en cas d’anémie arégénérative, neutropénie, hyperleucocytose et/ou thrombopénie • Radio pulmonaire pour voir le médiastin et les poumons • Echographie abdominale Orientation et communication Si la NFS est anormale et qu’il y a suspicion ou confirmation de cancer même sans précision, il faut contacter le centre de référence le plus proche par téléphone, email ou fax. S’il y a indication de transfert, le médecin de proximité fera préciser la date du rendez vous, le nom du médecin qui verra l’enfant au centre de référence et les documents nécessaires, aussi bien techniques que administratifs. • en cas de suspicion d’hémopathie aigue avec hyperleucocytose associée à la splénomégalie, il démarrera une hyperhydratation orale associée à de l’allopurinol • le médecin de proximité informera les parents - de la raison du transfert : il peut s’agir d’un cancer, et dans ce cas, il vaut mieux qu’il soit traité tôt et dans un centre spécialisé pour avoir de grandes chances de guérir - de l’existence d’associations d’aide aux familles (donner leurs coordonnées). Par la suite, S’il ne reçoit pas systématiquement des nouvelles de son patient, le médecin de proximité doit les demander pour connaître le diagnostic et le traitement et pouvoir en informer la famille. De plus, au retour de l’enfant, il doit assurer une surveillance du malade conjointement avec l’unité de référence. 42 Conduite à tenir devant UNE MASSE ABDOMINOPELVIENNE Mohammed Fehri - S. Zafad Les masses abdomino-pelviennes sont fréquentes chez l’enfant. Leur étiologie varie avec l’âge et la localisation. Elles se manifestent par une augmentation du volume de l’abdomen qui est très souvent d’évolution récente et elles ont rarement des symptômes spécifiques. Elles peuvent siéger sur n’importe quel organe abdominal ou pelvien, leur nature est très variée allant des malformations aux tumeurs malignes ou bénignes, sans omettre les masses d’origine infectieuses, parasitaires ou traumatiques. La démarche diagnostique est basée sur l’âge, les éléments cliniques minutieusement recueillis par le médecin et les données d’une échographie première réalisée dans des conditions optimales. L’âge de l’enfant est un élément capital dans l’orientation diagnostique : • les masses du nouveau né sont surtout malformatives d’origine génito-urinaire • celles de la première enfance sont dominées par le néphroblastome et le neuroblastome • celles du grand enfant sont essentiellement représentées par le lymphome et les tumeurs ovariennes Circonstances de découverte • Signes directs : - augmentation de l’abdomen plus ou moins rapide constatée par la maman au cours de la toilette ou rapportée par l’enfant lui-même - masse ou ascite constatée par le médecin consulté pour une douleur ou une fièvre • Signes fonctionnels : douleur, tension de l’abdomen, hématurie, troubles du transit Interrogatoire • • • A propos des signes actuels : début, intensité, évolution, A propos des signes accompagnateurs : troubles du transit, vomissements, troubles urinaires, troubles pubertaires A propos des antécédents de l’enfant et de la famille 43 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Examen clinique Attention : si l’enfant est jeune, penser au néphroblastome et éviter de palper violamment. • Examen abdomino-pelvien sans oublier le toucher rectal ; appréciation des caractéristiques de la masse : volume, localisation antérieure ou postérieure et dans les quadrants de l’abdomen, mobilité, consistance, sensibilité ; ascite, e la masse : volume, localisation antérieure ou postérieure et dans les quadrants de l’abdomen, mobilité, consistance, sensibilité, ascite; • Examen général : locorégional (scrotum, périnée, adénopathies) et général sans oublier la tension artérielle, l’évaluation d’œdème associé et d’éventuels signes de gravité. Conclusion clinique Le médecin de proximité tiendra compte, dans sa conclusion clinique, du sexe, de l’âge, du fait que la masse abdomino-pelvienne est isolée ou entre dans un cadre général, de sa localisation, sa date de début, ses répercussions régionales et générales, et il envisagera les étiologies. Signes évoquant une malignité • IDR à la tuberculine négative éliminant une tuberculose péritonéale qui est le principal diagnostic différentiel avec le lymphome non hodgkinien abdominal • Caractère relativement récent, non régressif • Associé à d’autres signes, notamment des adénopathies satellites • Antécédent de cancer dans la famille Etiologies malignes possibles • Un lymphome non hodgkinien est évoqué devant : - un âge autour de 7 ans - une masse mobile, médiane, bien identifiable, - associée à une lame d’ascite ou à une pleurésie - augmentant de volume en quelques jours - associée à un hydrocèle ou des oedèmes des membres inférieurs - une IDR à la tuberculine négative - associée à une atteinte ORL, des nerfs crâniens, ou testiculaire - parfois à l’occasion d’une invagination intestinale aigue • Un neuroblastome abdominal ou pelvien est évoqué devant : - un nourrisson - un mauvais état général - une tumeur postérieure, médiane, fixe, mal limitée, dure - des signes associés : ecchymose palpébrale, exophtalmie (syndrome de Hutchinson), nodules sous cutanés ou crâniens, douleurs osseuses diffuses, syndrome anémique, 44 Conduite à tenir devant une masse abdominopelvienne • Un nephroblastome est évoqué devant : - une masse bien limitée, latéralisée, donnant le contact lombaire - un état général assez conservé - une douleur abdominale - une HTA - une hématurie associée - une hémi hypertrophie corporelle - une aniridie • Une tumeur germinale maligne de l’ovaire est évoqué : - en cas de masse médiane et très mobile - chez une jeune fille en puberté ou pré puberté • Un hépatoblastome est évoqué : - en cas de masse hépatique unique - chez un enfant autour de 2-3 ans • Un foie métastatique d’un neuroblastome ou syndrome de Pepper si : - enfant âgé de moins d’un an - foie multi nodulaire énorme avec risque de gêne respiratoire - petite masse abdominale latéralisée (tumeur mère) - association à des nodules cutanés Bilan simple Il dépend de l’étiologie envisagée et des possibilités • IDR à la tuberculine • Radiographie pulmonaire • Echographie abdomino-pelvienne qui permet de préciser le siège de la masse (intra ou rétropritonéale), d’orienter sa nature, de mesurer son volume et de renseigner sur l’ensemble de l’abdomen. • Scanner tumoral en cas de suspicion de NBL ou d’hépatoblastome • Dosage des catécholamines urinaires et de l’alpha foetoproteine • NFS et un myélogramme éventuel • Ponction d’ascite ou de plèvre pour rechercher des blastes si on suspecte un LNH, à condition que le médecin de proximité soit habitué à ce geste et que le laboratoire de proximité habitué à cette analyse. Orientation et communication • Le médecin de proximité qui voit cet enfant ne doit pas perdre de temps à essayer de confirmer absolument le diagnostic précis. Un geste chirurgical n’est à faire qu’en cas d’urgence vitale. Dans ce cas, il faut absolument confier la pièce opératoire au laboratoire d’anatomie pathologique. Il doit contacter l’unité d’oncologie pédiatrique la plus proche (téléphone, fax ou mieux email) pour avoir un avis spécialisé 45 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc • Dans le cas d’un transfert, le médecin de proximité doit informer les parents, leur expliquer la cause, les informer sur les documents nécessaires (administratifs et médicaux, y compris le bloc d’anatomie pathologique éventuel) Par la suite, Si le diagnostic est confirmé et le traitement commencé, le médecin de proximité devrait recevoir des nouvelles de son malade et assurer conjointement le suivi pendant la durée du traitement et même le suivi à long terme pour dépister les rechutes ou les signes de toxicité. 46 CONDUITE A TENIR DEVANT UN SYNDROME CAVE SUPERIEUR Zineb Ghanimi Introduction Le syndrome cave supérieur correspond à un blocage du retour veineux cave supérieur, responsable d’une augmentation de la pression veineuse au niveau des membres supérieurs, de la tête et du cou. En hémato-oncologie pédiatrique, il est du le plus souvent à une augmentation du volume des adénopathies du médiastin supérieur et antérieur. Il s’agit d’une urgence de diagnostic, de prise en charge et de traitement. Circonstances de découverte • Une maman amène son enfant en consultation pour une toux, une modification de la voix, une gêne respiratoire en position couchée, un wheezing, une douleur thoracique, une déformation thoracique ou encore un comblement des creux sus claviculaires. • La consultation est motivée par l’absence d’amélioration d’une symptomatologie respiratoire d’un enfant correctement traité pour infection respiratoire • Ailleurs il peut s’agir d’une symptomatologie d’emblée inquiétante avec une léthargie ou angoisse, des céphalées, voire des convulsions. Dans ce cas, une radiographie pulmonaire se justifie d’emblée, avant l’examen minutieux du malade, permettant d’éviter des positions dangereuses et des discussions inutiles qui retardent le diagnostic. Interrogatoire • A propos de la symptomatologie -histoire : début, évolution, traitements antérieurs (corticoïdes ?) - signes accompagnateurs : douleur, syndrome anémique ou hémorragique, dyspnée, adénopathies, masse abdominale, signes cutanés • A propos des antécédents personnels et familiaux 47 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Examen clinique IMPORTANT : durant l’examen et les futures explorations, le patient ne doit être jamais couché en décubitus. Sa tête doit être soulevée de 30°, sinon il y a un risque de mort subite. • Regarder l’enfant tout nu : rechercher une cyanose de la face et des extrémités supérieures ou une suffusion conjonctivale • Ecouter l’enfant parler et respirer pour détecter une dysphonie ou d’un wheezing qui sont des signes de compression. • Rechercher une dysphagie. • Examen thoracique : - inspection à la recherche d’une circulation veineuse collatérale, d’une déformation (voussure ou un comblement des creux sus claviculaires) - palpation des espaces intercostaux et des vertèbres, - percussion à la recherche d’un syndrome de condensation ou d’épanchement liquidien • Examen général : - évaluer l’état général et nutritionnel, - rechercher d’emblée des signes de compression qui doivent alerter et éviter de coucher l’enfant sur le dos, - rechercher des signes physiques accompagnateurs : • hématologique : purpura, pâleur, splénomégalie, adénopathies • tumoraux : masse abdominale, tuméfaction des membres ou de la tête, nodules cutanés, ecchymoses palpébrales. Conclusion clinique Le médecin de proximité tiendra compte, dans sa conclusion clinque, du sexe, de l’âge, d’une anomalie thoracique retrouvée, de la rapidité d’installation,de l’évolutivité des signes, du contexte infectieux ou non, des anomalies cliniques accompagnatrices, du degré d’urgence. Signes évoquant une malignité • rapidité de l’installation, • signes de compression, • altération de l’état général, • insuffisance médullaire associée, • syndrome tumoral, • douleurs osseuses, • prurit, • fièvre importante nocturne et résistante aux traitements habituels, • absence de signes infectieux associés ou de notion de contage tuberculeux. 48 Conduite à tenir devant un syndrome cave superieur Etiologies malignes possibles devant un syndrome cave supérieur • Si l’installation est rapide, on pensera à : - une Leucémie Aigue Lymphoblastique avec élargissement médiastinal (phénotype T le plus souvent) surtout s’il y a des adénopathies généralisées avec anémie, fièvre, ou syndrome hémorragique - un Lymphome Non Hodgkinien avec élargissement médiastinal (phénotype T le plus souvent). L’épanchement pleural bilatéral, la masse abdominale et l’ascite sont plutôt évocateurs d’un lymphome de Burkitt qui est très rarement responsable d’un SCS • Si l’installation est lente, on pensera, après avoir éliminé la tuberculose, à : - La maladie de Hodgkin avec adénopathies médiastinales, surtout si l’enfant présente de la fièvre avec sueurs nocturnes, prurit, amaigrissement, IDR négative, vs élevée - D’autres tumeurs pouvant siéger au niveau du thorax : tératome, thymome, rares chez l’enfant. Bilan simple (sans retarder la prise en charge thérapeutique) • Radiographie pulmonaire de face et profil pour voir le médiastin et les poumons : analyse de la topographie des lésions (médiastin antérieur, moyen ou postérieur), du parenchyme pulmonaire et des lignes pleurales, recherche de signes de compression, comme une déviation de l’arbre bronchique ou de l’oesophage • NFS et Plaquettes à la recherche d’une anémie, neutropénie, thrombopénie ou hyperleucocytose • IDR à la Tuberculine ; si elle est franchement positive, ce n’est très probablement pas un cancer • VS ou CRP • Echographie thoracique pour identifier la nature liquidienne ou tissulaire de l’opacité radiologique, • TDM thoracique, si l’enfant tolère le décubitus, pour analyser le médiastin et le parenchyme pulmonaire, préciser le siége et l’accessibilité des lésions, guider un geste • Echographie abdominale pour voir s’il y a des adénopathies sous diaphragmatiques, des anomalies des intestins, des reins… • Ponction avec analyse chimique, cytologique, anatomopathologique et bactériologique d’un épanchement pleural ou d’une ascite à condition que le médecin de proximité soit habitué à ce geste et que le laboratoire de proximité habitué à cette analyse. • Myélogramme à faire en fonction des résultats de l’hémogramme et en évitant de coucher l’enfant ou de comprimer l’abdomen ou le thorax • Biopsie ganglionnaire périphérique accessible : A ne faire qu’après une analyse correcte de l’hémogramme qui peut orienter vers une leucémie aigue et indiquer un myélogramme. • Il ne faut jamais indiquer d’emblée une biopsie des ganglions médiastinaux au risque réel d’un arrêt cardiorespiratoire. Orientation et communication • Ne jamais commencer une corticothérapie à l’aveugle devant une symptomatologie respiratoire dont l’étiologie n’a pas été formellement reconnue. • Ne pas s’acharner à trouver un diagnostic dans un contexte d’urgence mais prendre contact avec un centre spécialisé. 49 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc • Ne pas banaliser une symptomatologie respiratoire en période d’épidémie sans pratiquer une radiographie pulmonaire. • Devant un tableau de détresse respiratoire, le transfert en milieu spécialisé est urgent et ne se conçoit que médicalement après avoir pris contact avec le centre de référence. Eviter de coucher l’enfant sur le dos, chariot d’urgence à proximité avec matériel d’intubation voir de trachéotomie. • Le médecin de proximité doit informer les parents de la raison du transfert : il peut s’agir d’un cancer, et dans ce cas, il vaut mieux qu’il soit traité tôt et dans un centre spécialisé pour avoir de grandes chances de guérir. • Le médecin de proximité doit aussi informer les parents de l’existence d’associations d’aide aux familles et leur donner leurs coordonnées. Par la suite S’il ne reçoit pas systématiquement des nouvelles de son patient, le médecin de proximité doit les demander pour connaître le diagnostic et le traitement et pouvoir en informer la famille. SYNDROME CAVE SUPÉRIEUR (Ne pas coucher l’enfant sur le dos, transfert en réanimation, chariot d’urgence à proximité, examen clinique minutieux et bilan de débrouillage, radio de thorax) Etat cardio-respiratoire stable Etat cardio-respiartoire précaire Diagnostic cyto/ histologique Gestes diagnostiques possibles : ponction pleurale, ponction d’ascite, médullogramme, biopsie d’adénopathies périphériques, biopsie ostéomédullaire Traitement Diagnostic Pas de diagnostic Traitement Evaluer le risque anesthésique Anesthésie possible Diagnostic cyto/ histologique Traitement Amélioration Diagnostic et traitement 50 Anesthésie impossible Discuter un traitement d’urgence en milieu spécialisé (corticoïdes 2mg/kg pendant 48h ou endoxan) Problème d’interprétation de la biopsie ensuite Non amélioration explorations périphériques et traitement empirique CONDUITE A TENIR DEVANT UNE ANOMALIE DU SINUS UROGENITAL Fouzia Msefer Alaoui Les anomalies acquises du sinus urogénital sont assez fréquentes chez l’enfant surtout très jeune. Cependant, leur diagnostic est souvent retardé puisque le périnée est souvent tabou, que ce soit pour les mamans qui n’osent pas consulter, ou pour les grands enfants qui n’osent pas en parler à leurs parents. Ce n’est que lorsqu’apparaissent des signes fonctionnels que le diagnostic peut être posé. Circonstances de découverte • Signes directs : bombement du périnée, issue d’un bourgeon vaginal, gros testicule • Signes fonctionnels : douleur, dysurie, rétention d’urines, hématurie, saignement vulvaire Interrogatoire • A propos des signes actuels : début, intensité, évolution • A propos des signes accompagnateurs • A propos des antécédents de l’enfant et de la famille Examen clinique • Examen urogénital sans oublier l’hymen, la vulve, les testicules et la pratique d’un toucher rectal • Examen général : locorégional et général Conclusion clinique Le médecin de proximité tiendra compte, dans sa conclusion clinique, du sexe, de l’âge, du fait que l’anomalie périnéale est isolée ou entre dans un cadre général, de sa durée, de ses répercussions régionales, et envisagera des étiologies. 51 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Signes évoquant une malignité • Caractère relativement récent • Non régressif • Associé à d’autres signes, notamment des adénopathies satellites • Antécédent de cancer dans la famille Etiologies malignes possibles • Un rhabdomyosarcome, encore appelé sarcome du sinus urogénital, est évoqué devant : - une dysurie ou une rétention urinaire - un jeune âge - un toucher rectal montrant une tumeur antérieure molle - un saignement ou un bourgeon vaginal ou une tumeur en grappe de raisin à la vulve - une histoire familiale de tumeur solide, notamment de cancer du sein chez la maman • Un neuroblastome pelvien ou en sablier est évoqué devant : - un nourrisson - une paraplégie ou une paraparésie - un toucher rectal montrant une tumeur postérieure dure - des signes associés : ecchymose palpébrale, exophtalmie, nodules sous cutanés ou crâniens, douleurs osseuses, syndrome anémique, • Une tumeur testiculaire se traduisant par un gros testicule ferme ou dur, qui reconnaît lui-même plusieurs causes possibles : - une tumeur germinale maligne - un rhabdomyosarcome para testiculaire - une localisation d’un lymphome non hodgkinien ou d’une leucémie aigue lymphoblastique (l’atteinte est généralement bilatérale) Bilan simple Il dépend de l’étiologie envisagée et des possibilités • examen spécialisé par un urologue pédiatre ou un chirurgien pédiatre si possible ; celui-ci ne doit pas faire de geste chirurgical sans concertation avec l’équipe médicale et chirurgicale du centre de référence le plus proche, sauf urgence • radiographie pulmonaire à la recherche de métastases pulmonaires • échographie abdomino-pelvienne et scrotale • scanner abdomino-pelvien, • dosage des catécholamines urinaires et de l’alpha foetoproteine • NFS et un myélogramme éventuel Orientation et communication • Le médecin de proximité qui voit cet enfant en rétention urinaire ou en dysurie doit d’abord soulager le malade • Ensuite il ne doit pas perdre de temps à essayer de confirmer absolument le diagnostic précis 52 Conduite à tenir devant une anomalie du sinus urogenital • Il doit contacter l’unité d’oncologie pédiatrique la plus proche (téléphone, fax ou mieux email) pour avoir un avis spécialisé • Dans le cas d’un transfert, le médecin de proximité doit informer les parents, leur expliquer la cause, les informer sur les documents nécessaires (administratifs et médicaux) • Si le médecin de proximité n’est pas urologue, un contact doit être pris avec un urologue, de préférence pédiatre, en vue d’assurer une prise en charge urologique pendant la durée du traitement et après, d’éventuelles séquelles urologiques. • Par la suite, Si le diagnostic est confirmé et le traitement commencé, le médecin de proximité devrait recevoir des nouvelles du malade et assurer conjointement le suivi pendant la durée du traitement et même le suivi à long terme pour dépister les rechutes ou les signes de toxicité, ou encore pour prendre en charge les séquelles. 53 CONDUITE A TENIR DEVANT UNE ANOMALIE OCULAIRE Fouzia Msefer Alaoui Charif Mohammed Chefchaouni Les anomalies oculaires sont assez fréquentes chez l’enfant et entrent souvent dans le cadre d’embryofoetopathies ou d’affections liées à l’hygiène ou à un déficit nutritionnel. Dans quelques cas cependant, elles peuvent constituer le premier signe d’appel d’une affection cancéreuse. Que l’enfant soit vu en premier par un ophtalmologiste, un pédiatre ou un généraliste, ces médecins doivent très vite se mettre en contact entre eux pour avoir un diagnostic précoce et une orientation adéquate. Circonstances de découverte • Signes directs : exophtalmie, strabisme, nystagmus, leucocorie, ecchymose palpébrale, aniridie, syndrome de Claude Bernard Horner • Signes fonctionnels : diplopie, cécité ou malvoyance constatée par les parents, douleur Interrogatoire • A propos des signes actuels : début, intensité, évolution • A propos des signes accompagnateurs • A propos des antécédents de l’enfant et de la famille Examen clinique • Examen ophtalmologique: le premier médecin qui voit l’enfant est généralement un ophtalmologiste • Examen général : hématologique, tumoral et général Conclusion clinique Le médecin de proximité tiendra compte, dans sa conclusion linique, du sexe, de l’âge, du fait que l’anomalie oculaire est isolée ou entre dans un cadre général, de sa durée, et envisagera des étiologies. 54 Conduite à tenir devant une anomalie oculaire Signes évoquant une malignité • Caractère relativement récent • Non régressif • Associé à d’autres signes en dehors de l’œil • Antécédent de cancer dans la famille Etiologies malignes possibles • Un rétinoblastome en premier, devant : - une leucocorie : aspect blanc de la pupille (rapportée par la famille ou visible sur une photographie avec flash, ou constatée par le médecin) - un strabisme, - une histoire familiale de rétinoblastome ou de tumeur osseuse, • Un rhabdomyosarcome devant - une exophtalmie plutôt latéralisée d’évolution rapide : quelques jours. - une exophtalmie unilatérale d’évolution rapide avec signes inflammatoires sans syndrome infectieux général. - une histoire familiale de tumeur solide, notamment de cancer du sein chez la maman • Un neuroblastome devant : - une ecchymose palpébrale - un syndrome de Claude Bernard Horner - l’association à des nodules sous cutanés ou crâniens, des douleurs osseuses, un syndrome anémique, une masse abdomino-pelvienne, thoracique ou cervicale, • Un néphroblastome devant : - une aniridie - une masse abdominale avec ou sans hématurie • Une tumeur cérébrale devant : - un strabisme ou un nystagmus - d’autres signes neurologiques tels que ataxie, céphalées, hémiplégie, vomissements en jet… • Une histiocytose de Langherans devant : - une exophtalmie progressive, - des signes associés comme : polyurie polydipsie, otorrhée, signes cutanés, hépato -splénomégalie, déchaussement dentaire… • Un sarcome granulocytaire devant : - une exophtalmie rapidement progressive uni ou bilatérale associée à - des signes de leucémie aigue myéloblastique • Une localisation neuro-méningée d’une leucémie aigue ou d’un LNH Bilan simple Il dépend de l’étiologie envisagée et des possibilités • un examen ophtalmologique comportant une étude du FO • une photographie au flash 55 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc • une radiographie pulmonaire • une échographie abdominale • un scanner orbitaire et cérébral • un dosage des catécholamines urinaires • une NFS et un myélogramme éventuel Orientation et communication • Le médecin de proximité qui voit cet enfant suspect de cancer ne doit pas perdre de temps à essayer de confirmer absolument le diagnostic précis. • Il doit contacter l’unité d’oncologie pédiatrique ou d’ophtalmologie pédiatrique la plus proche (téléphone, fax ou mieux email) pour avoir un avis spécialisé • Dans le cas d’un transfert, le médecin de proximité doit informer les parents, leur expliquer la cause, les informer sur les documents nécessaires (administratifs et médicaux) • Par la suite, Si le diagnostic est confirmé et le traitement commencé, le médecin de proximité devrait recevoir des nouvelles de son malade et assurer conjointement le suivi pendant la durée du traitement et même le suivi à long terme pour dépister les rechutes ou les signes de toxicité. 56 CONDUITE A TENIR DEVANT UNE ANOMALIE ORL Fouzia Msefer Alaoui Les affections ORL sont très fréquentes et généralement banales chez l’enfant. Dans quelques cas cependant, elles peuvent constituer le premier signe d’appel d’une affection cancéreuse. Circonstances de découverte • Signes directs : adénopathie cervicale, tuméfaction jugale ou amygdalienne, bourgeon, gingivorragies, écoulement nasal ou auriculaire • Signes fonctionnels : ronflement, dysphagie, douleur maxillaire, auriculaire, dentaire • Signes généraux : fièvre Interrogatoire • A propos des signes actuels : début, intensité, évolution • A propos des signes accompagnateurs • A propos des antécédents de l’enfant et de la famille Examen clinique • Examen ORL (par le premier médecin qui voit l’enfant): dents, langue, gencives, amygdales, palais, conduit auditif, glandes sous maxillaires et parotides, narines, ouverture de la bouche à la recherche d’un trismus, recherche d’hypoacousie • Examen général : hématologique, tumoral et général Conclusion clinique Le médecin de proximité tiendra compte, dans sa conclusion clinique, du sexe, de l’âge, du fait que l’anomalie ORL est isolée ou entre dans un cadre général, de sa durée, et envisagera des étiologies. 57 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Signes évoquant une malignité • Caractère récent • Non régressif • Non inflammatoire • Ne répond pas aux antibiotiques • Associé à des signes généraux, notamment amaigrissement • Associé à d’autres signes en dehors de la sphère ORL Etiologies malignes possibles • Lymphome Non Hodgkinien (LMNH) devant : une hypertrophie gingivale asymétrique, un déchaussement des dents, un bombement du palais, une hypertrophie asymétrique des amygdales, une association à une masse abdominale • Leucémie aigue devant : une gingivorragie ou une adénopathie diffuse, surtout si association à un syndrome anémique, hémorragique ou à une splénomégalie. On pensera à une leucemie aigue myeloblastique s’il y a par ailleurs une hypertrophie gingivale importante. • Cancer du cavum (UCNT) sera évoqué s’il s’agit d’un grand enfant maigre, hypoacousie unilatérale, avec une otorrhée, rhinorrhée et adénopathie ferme du même côté. • Rhabdomyosarcome (RMS) est évoqué s’il y a une hypertrophie amygdalienne unilatérale, un bourgeon nasal ou du conduit auditif, avec ou sans écoulement • Histiocytose de Langherans s’il s’agit d’une otorrhée chez un nourrisson, avec déchaussement dentaire, splénomégalie ou un purpura vasculaire en maillot de bain. Bilan simple Il dépend de l’étiologie envisagée : • si on suspecte une leucémie aigue, une NFS s’impose • si on suspecte un LNH une échographie abdominale est souhaitable pour rechercher une localisation abdominale. • si on pense à un RMS ou UCNT, le meilleur examen à demander est le scanner, si cela est possible. • quoi qu’il en soit, quand la symptomatologie ORL prédomine, le médecin de proximité adresse l’enfant à un médecin ORL sans perdre de temps et en l’informant des étiologies possibles. Ce médecin ORL fera un examen spécialisé et éventuellement une biopsie de la tumeur. Orientation et communication • Le médecin de proximité ou le médecin ORL qui voit cet enfant suspect de cancer ne doit pas perdre de vue que les cancers de l’enfant évoluent très vite. Il ne doit pas perdre de temps à essayer de confirmer absolument le diagnostic, 58 Conduite à tenir devant une anomalie orl • Il doit contacter l’unité d’oncologie pédiatrique la plus proche (téléphone, fax ou mieux email) pour avoir un avis spécialisé (autres examens à faire), ou adresser au centre de référence (nom du médecin référent, date de rendez-vous) • Dans le cas d’un transfert, le médecin de proximité doit informer les parents, leur expliquer la cause, les informer sur les documents nécessaires (administratifs et médicaux). Par la suite, Si le diagnostic est confirmé et le traitement commencé, le médecin de proximité devrait recevoir des nouvelles de son malade et assurer conjointement le suivi pendant la durée du traitement et même le suivi à long terme pour dépister les rechutes ou les signes de toxicité. 59 CONDUITE A TENIR DEVANT UNE DOULEUR OSSEUSE Amina Kili Les douleurs osseuses et ostéo-articulaires sont fréquentes chez l’enfant et sont souvent d’origine infectieuse ou post infectieuse. Dans quelques cas cependant, elles peuvent constituer le premier signe d’appel d’une affection cancéreuse. Ces douleurs doivent alerter si elles sont persistantes, rebelles ou récidivantes sous traitement symptomatique ou alors si elles s’accompagnent d’autres signes faisant suspecter leur origine maligne. En effet, la douleur est un signe précoce des tumeurs osseuses malignes, elle précède la tumeur et même les signes radiologiques. Que l’enfant soit vu en premier par un pédiatre ou un orthopédiste, ces médecins doivent communiquer pour un diagnostic précoce et une orientation adéquate. Circonstances de découverte • Signes fonctionnels : douleur localisée à un segment de membre ou douleurs osseuses diffuses. boiterie ou esquive, attitude antalgique. • Signes directs : douleur à la mobilisation ou à la pression, asymétrie par rapport au côté controlatéral, tumeur, signes inflammatoires, circulation collatérale. Interrogatoire • A propos des signes actuels : début, intensité, évolution (caractère mécanique ou inflammatoire) • A propos des signes accompagnateurs • A propos des antécédents de l’enfant et de la famille (le traumatisme généralement n’est que révélateur et non causal) Examen clinique • Examen orthopédique de tous les segments de membres et les articulations, sans oublier l’examen des os plats ou des os courts • Examen général : hématologique, tumoral et général 60 Conduite à tenir devant une douleur osseuse Signes évoquant une malignité • Caractère relativement récent • Absence de fièvre sauf si leucémie • Association à une tumeur osseuse • Association à une fracture pathologique • Association à d’autres signes en l’occurrence hématologique • Age pré pubertaire ou pubertaire • Antécédent de cancer dans la famille, en particulier rétinoblastome Etiologies malignes possibles • Tumeur osseuse maligne primitive (TOP) essentiellement : - l’ostéosarcome lorsqu’il s’agit plutôt d’un adolescent - la tumeur d’Ewing quand l’enfant est plus jeune • Leucémie aigue évoquée quelque soit l’âge : - quand la douleur osseuse ou ostéo-articulaire est diffuse - devant un syndrome d’insuffisance médullaire ou un syndrome tumoral • Neuroblastome métastatique devant un jeune enfant qui présente : - une ecchymose sous palpébrale, une exophtalmie - une douleur osseuse diffuse - l’association à des nodules sous cutanés ou crâniens, un syndrome anémique, une masse abdomino-pelvienne, thoracique ou cervicale. • Métastases osseuses de tumeur mésenchymateuse maligne des parties molles ou de tumeur osseuse maligne… Bilan simple Il dépend de l’étiologie envisagée et des possibilités : • Radiographie standard de l’os concerné prenant l’articulation sus et sous jacente, datée et identifiée, avec cliché controlatéral comparatif. Si les clichés sont normaux et que la douleur persiste, ne pas hésiter à refaire des clichés après une quinzaine de jours. Les signes radiologiques évocateurs de TOP sont une lyse osseuse irrégulière associée ou non à une ostéocondensation. • Radiographie pulmonaire de face datée et identifiée, à la recherche de métastases de tumeur osseuse primitive ou de tumeur thoracique postérieure de neuroblastome, ou encore de médiastin de leucémie aigue lymphoblastique. • NFS à la recherche de signes d’insuffisance médullaire ; un myélogramme cherchera à confirmer le diagnostic de leucémie aigue ou d’envahissement médullaire métastatique. • Echographie abdomino-pelvienne à la recherche d’une tumeur primitive de neuroblastome Orientation et communication • Le médecin de proximité qui voit cet enfant suspect de tumeur osseuse primitive ou d’hémopathie maligne ne doit pas perdre de temps à essayer de confirmer absolument le diagnostic précis. 61 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc • Il doit éviter la prescription de corticoïdes dans l’hypothèse d’un RAA ; il doit analyser les données cliniques et éliminer un cancer, surtout une leucémie • Il doit contacter l’unité d’oncologie pédiatrique la plus proche (téléphone, fax ou mieux email) pour avoir un avis spécialisé • Il doit penser à évaluer la douleur et à prescrire un traitement antalgique adapté. • Dans le cas d’un transfert, le médecin de proximité doit informer les parents, leur expliquer la cause, les informer sur les documents nécessaires (administratifs et médicaux). Par la suite, Si le diagnostic est confirmé et le traitement commencé, le médecin de proximité devrait recevoir des nouvelles de son malade et assurer le suivi pendant la durée du traitement et même le suivi à long terme pour dépister les rechutes ou les signes de toxicité. A retenir Une douleur osseuse doit faire évoquer une tumeur osseuse primitive, d’autant plus qu’elle survient chez un jeune adolescent, qu’elle est localisée et qu’elle s’associe à une tumeur. Une douleur osseuse diffuse doit faire évoquer en premier lieu une leucémie aigue, ou un neuroblastome métastatique en fonction du contexte clinique. 62 CONDUITE A TENIR DEVANT UNE HYPERTENSION INTRACRANIENNE Maria El Kababri Introduction L’augmentation du volume cérébral, par une masse solide ou kystique ou liquide, à l’intérieur d’une structure osseuse crânienne fermée, se traduit par un syndrome clinique typique appelé syndrome d’hypertension intracrânienne (HTIC). Il s’agit toujours d’une urgence qui met en jeu : • le pronostic vital : risque de décès brutal par engagement cérébral • le pronostic visuel La sémiologie et les étiologies de l’HTIC varient selon l’âge : • Chez le nourrisson, les symptômes sont souvent tardifs et trompeurs ; la principale étiologie est l’hydrocéphalie, • Chez le grand enfant : la symptomatologie est plus évocatrice ; les principales causes sont représentées par les tumeurs cérébrales. Circonstances de découverte • Une maman amène son enfant en consultation pour des troubles du comportement, des céphalées, des vomissements, des troubles de la conscience ou une crise épileptique. • Le médecin découvre, lors d’un examen systématique, une augmentation du périmètre crânien. Interrogatoire • Les signes d’alerte sont : - chez le nourrisson : - troubles du comportement : agitation, apathie, somnolence, troubles de la vigilance. - réduction de l’appétit et vomissements progressifs. - chez le grand enfant : - céphalées à prédominance occipitale, en règle matinales. - vomissements en jet soulageant les céphalées, • Antécédents : rechercher un traumatisme ou une intervention chirurgicale. 63 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Examen clinique Selon l’âge et le degré d’HTIC : • Bombement de la fontanelle et/ou augmentation anormale du périmètre crânien. • Modification du tonus (hypotonie avec instabilité à la position assise) • Troubles visuels : diplopie par paralysie du VI • Troubles de la conscience : obnubilation, coma d’apparition rapide. • Signes neurovégétatifs : HTA, irrégularité du rythme cardiaque, pauses respiratoires, • Attitude guindée rachidienne, torticolis, raideur de la nuque, • Déficit neurologique • Tremblement intentionnel, ataxie cérébelleuse, • Examen général à la recherche de signes physiques accompagnateurs : - Fièvre, - Troubles neurovégétatifs : pression artérielle, fréquence cardiaque - Diabète insipide - Obésité ou cachexie (Tumeurs du plancher du 3ème ventricule) - Retard de croissance, retard pubertaire ou puberté précoce Il y a un risque d’engagement par : -hernie latérale : dilatation pupillaire unilatérale avec hémiplégie controlatérale qui peut devenir bilatérale avec dysfonction du tronc cérébral - hernie centrale : altération de la conscience, progression vers la décortication avec finalement perte des fonctions du tronc cérébral. Signes évoquant une malignité • Début brutal • Déficit neurologique, • Crises épileptiques • Torticolis • Troubles visuels Etiologies malignes possibles • Tumeurs de l’espace sus-tentoriel : astrocytome, ependymome, etc. • Tumeurs du cervelet : médulloblastome, ependymome, astrocytome, PNET • Tumeurs du tronc cérébral : gliome infiltrant du tronc cerebral, astrocytome, ependymome • Tumeurs des ventricules latéraux, 3 et 4ème ventricule. • Tumeurs de la région pinéale et de l’hypothalamus : tumeurs germinales malignes, pinéalomes ou pinéaloblastomes, PNET, craniopharyngiome • Métastases cérébrales des tumeurs solides et des hémopathies malignes. Bilan selon les possibilités • Fond d’œil : peut montrer un œdème papillaire ou des hémorragies • Radio du crâne : disjonction des sutures 64 Conduite à tenir devant une hypertension intracranienne • Scanner cérébral : déplacement des sutures, dilatation des ventricules, tumeur. • Echographie transfontanellaire pour les nourrissons Orientation et communication • Contacter l’unité de référence pour avis • Elévation de la tête (30°) sauf si hypotension artérielle, • Restriction en liquides : au maximum 50 ml/Kg/j chez les petits. • Traitement de la fièvre : l’hyperthermie augmente la pression intracrânienne. • Traitement des convulsions • Mannitol : 0,25 à 1 g/Kg en 10 à 30 minutes (soit mannitol 20% : 1,25-5 ml/Kg, ou Mannitol 10 % 2,5-10 ml/Kg) • Dexaméthasone : 1 à 2 mg/Kg IV comme dose de charge, la dose d’entretien est de 1 – 1,5 mg/ Kg/j divisée en 4 à 6 doses. • Transfert dans un service de neurochirurgie pour un complément de bilan, pose d’une dérivation ou une résection d’emblée du processus intra-crânien. Par la suite, Si le patient est transféré dans une unité de référence ou dans un service de neurochirurgie, le médecin devrait demander de ses nouvelles pour connaître le diagnostic et le traitement et pouvoir en informer la famille. 65 CONDUITE A TENIR DEVANT UNE COMPRESSION MEDULLAIRE Maria El Kababri Introduction La compression de la mœlle épinière ou des dernières racines rachidiennes formant la queue de cheval constitue une urgence diagnostique et thérapeutique neurochirurgicale. Il faut reconnaître rapidement les formes débutantes : douleurs rachidiennes et gêne motrice au niveau des membres inférieurs (difficultés de la marche). Le tableau de compression médullaire constituée est dominé par un syndrome lésionnel radiculaire associé à un syndrome sous lésionnel (moteur, sensitif, sphinctérien) et à un syndrome rachidien (douleur, raideur) Circonstances de découverte • Une maman amène son enfant en consultation pour : - une paraparésie ou paraplégie ou tétraplégie - des troubles sensitifs - des troubles sphinctériens - une masse abdominale - une détresse respiratoire • Le médecin découvre une anomalie à l’examen neurologique, Interrogatoire • Description du déficit par l’entourage : - siège, - type (sensitif ou moteur) - degré (déficit complet ou partiel) • Signes accompagnateurs : fièvre, signes focaux. • Ancienneté de chaque symptôme, évolution. Examen clinique 66 Conduite à tenir devant une compression medullaire Examen clinique La compression médullaire débutante - Douleurs rachidiennes tenaces, rebelles aux antalgiques : difficile à mettre en évidence chez l’enfant - Raideur segmentaire rachidienne - Troubles moteurs aux membres inférieurs - Troubles sensitifs et surtout sphinctériens (ils sont en général beaucoup plus tardifs). La compression médullaire constituée Le diagnostic est posé sur l’association d’un syndrome lésionnel, d’un syndrome sous lésionnel et souvent de signes rachidiens. • Le syndrome lésionnel est constitué de douleurs radiculaires souvent isolées au début. • Le syndrome sous lésionnel associe des troubles moteurs, sensitifs et sphinctériens. - L’atteinte motrice correspond à un syndrome pyramidal. L’atteinte pyramidale peut aboutir à une paraplégie ou une tétraplégie spastique - Les troubles sensitifs : picotements, fourmillements, brûlures (signant la souffrance cordonale postérieure) - Les troubles sphinctériens urinaires (miction impérieuse, dysurie) ou ano-rectaux (constipation) sont très tardifs. • Le syndrome rachidien comporte des douleurs permanentes et fixes, entraînant une boiterie une raideur segmentaire du rachis qui apparaît très précocement - une déformation segmentaire (cyphose, scoliose, torticolis) . Etiologies possibles • Causes extra-durales - Tumeurs malignes primitives ou métastases vertébrales d’une tumeur : tumeur d’Ewing, rhabdomyosarcome, plus rarement, lymphome ou leucémie, - Epidurite métastatique - Tumeurs vertébrales bénignes (hémangiome) - Neuroblastome en sablier • Causes intradurales extra-médullaires : méningiomes • Causes intra-médullaires : épendymome, astrocytome. Bilan selon les possibilités • • Radiographies rachidiennes simples • Myéloscanner et/ou IRM médullaire 67 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Orientation et communication • Contacter l’unité de référence pour avis • Les syndromes de compression médullaire doivent toujours faire discuter, avec les neurochirurgiens, l’indication d’une laminectomie urgente ou un traitement par la dexaméthasone : 0,25-2 mg/Kg/dose, 4 fois /jour • Si la symptomatologie n’est pas rapidement évolutive : ROT isolément vifs, parésies récentes et non évolutives en 24-28 heures et paralysies flasques installées depuis plusieurs jours, on peut commencer un traitement par la chimiothérapie, en coordination avec l’unité de référence Par la suite Si le patient est transféré dans une unité de référence ou dans un service de Neurochirurgie, il faudrait demander de ses nouvelles pour connaître le diagnostic et le traitement et pouvoir en informer la famille. 68 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Principales pathologies 69 LES LEUCEMIES AIGUES Mohammed Khattab Définition La leucémie aiguë (LA) résulte de la prolifération d’un précurseur hématopoïétique, bloqué à un stade donné de l’hématopoïèse. C’est une prolifération maligne, monoclonale, uniforme et diffuse dans la moelle osseuse. S’il s’agit d’un précurseur de la lignée lymphoïde, on parle de leucémie aiguë lymphoblastique (LAL). S’il s’agit d’un précurseur de la lignée non lymphoïde (myéloïde), on parle de leucémie aiguë non lymphoblastique ou leucémie aiguë myéloïde (LAM). Dans cette catégorie, on distingue 8 groupes: • LAM0 : prolifération d’un précurseur myéloïde très indifférencié • LAM1 : prolifération de myéloblastes indifférenciés • LAM2 : prolifération de myéloblastes différenciés • LAM3 : prolifération prédominante de promyélocytes • LAM4 : prolifération mixte de myéloblastes et de monoblastes • LAM5 : prolifération de monoblastes et/ou de promonocytes • LAM6 : prolifération d’érythroblastes (erythroleucémie) • LAM7 : prolifération de mégacaryoblastes Epidémiologie Les leucémies aiguës représentent 30% des cancers de l’enfant âgés de moins de 15 ans. La fréquence est variable selon le type : LAL = 75% et LAM = 15 à 20% (l’inverse chez l’adulte). Les LA se voient dans les deux sexes et à tous les âges, y compris à la naissance. Etiologies Aucune étiologie n’est retrouvée dans 90% des cas. Dans les autres cas, ce sont des facteurs à risque. A titre d’exemples: • Trisomie 21, maladie de Fanconi • Déficits immunitaires • Leucémie myéloïde chronique • Radiations ionisantes 71 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc • • • Benzène ; hydrocarbures ; solvants ; pesticides Radiothérapie et chimiothérapie (alkylants, etoposide) Virus (ex : Epstein Barr Virus ; HTLV-1) Aspects cliniques des leucémies aiguës Les symptômes apparaissent en quelques mois ou en quelques jours selon la gravité du type de LA. L’intensité et l’association des signes cliniques sont variables d’un malade à l’autre. Ils ne sont pas spécifiques des LA, mais plus ou moins évocateurs selon la richesse du tableau clinique. Insuffisance médullaire • • • Syndrome anémique Syndrome infectieux récidivant Syndrome hémorragique cutanéo-muqueux (purpura pétéchial, ecchymoses, gingivorragies, épistaxis, CIVD dans les LAM3) Syndrome tumoral • • Adénopathies superficielles • Adénopathies profondes médiastinales ou abdominales. • Splénomégalie et / ou hépatomégalie Syndrome de leucostase Il s’observe essentiellement dans les formes très hyperleucocytaires (GB > 100.000/mm3): • manifestations pulmonaires identiques à celles de l’œdème pulmonaire • manifestations neurologiques : troubles de la conscience, signes déficitaires Douleurs osseuses Ce sont des douleurs pseudo articulaires, de type inflammatoire. Elles sont spontanées et provoquées par la pression des os (membres, rachis surtout). Infiltration des organes extra-hématopoeïtiques • • • • • • • • 72 Méningites leucémiques : Céphalées sans fièvre, avec ou sans vomissements. Paralysie des nerfs crâniens (III, IV, VI et VII ++) Gros testicule ou palpation d’un nodule testiculaire. Tumeur de l’orbite ou chlorome (LAM) : exophtalmie uni ou bilatérale Muqueuses : hypertrophie gingivale, plus fréquente dans les formes monoblastiques. Peau : leucémides des LAM (nouveau-né et nourrisson). C’est une infiltration violacée nodulaire du derme et de l’hypoderme; plus ou moins inflammatoire et de siège variable. Reins : néphromégalie bilatérale Cœur : péricardite blastique ou infiltration myocardique Les leucemies aigues Diagnostic différentiel • Rhumatismes (rhumatisme articulaire aigu ; arthrite chronique juvénile) Les douleurs osseuses associées à une fièvre et une VS élevée se voient aussi bien dans un RAA que dans une leucémie aiguë. Une NFS doit être obligatoire avant d’envisager l’un des 2 diagnostics. En cas de doute, il ne faut débuter la corticothérapie qu’après avoir fait un myélogramme. • Ostéomyélite aiguë : Mêmes précautions que dans les rhumatismes. • Aplasies médullaires ou cytopénies Le myélogramme montre une moelle pauvre et graisseuse, mais non blastique. Dans ce cas, la biopsie Ostéomédullaire est impérative. Elle ne montre pas de myélofibrose et élimine le diagnostic de LA. • Leishmaniose viscérale Le tableau clinique peut simuler celui d’une LA (fièvre, pâleur, splénomégalie et pancytopénie). Les leishmanies peuvent être mises en évidence sur le myélogramme ou indirectement par les examens sérologiques. Mononucléose infectieuse - Elle associe typiquement une angine, des adénopathies avec ou sans hépatosplénomégalie. - NFS : hyperleucocytose avec des grands lymphocytes hyperbasophiles. - Pas d’anémie ou thrombopénie dans les formes habituelles. - Diagnostic : MNI test positif ; sérologie EBV positive. • Purpura Thrombopénique Idiopathique : Ici, il y a une thrombopénie périphérique avec une moelle osseuse riche en mégacaryocytes • Métastases médullaires d’un neuroblastome ou d’autres tumeurs malignes solides à cellules rondes de l’enfant (sarcome d’Ewing, rhabdomyosarcome, lymphome). Bilan d’une leucémie aiguë Bilan à visée diagnostique • Hémogramme : c’est un examen d’orientation et non de confirmation de LA. - Anémie normocytaire non régénérative (88%), plus ou moins profonde selon le délai d’apparition de la maladie. Le taux d’hémoglobine peut-être normal dans les LAL d’évolution très rapide. - Thrombopénie quasi-constante (75%) - Taux des globules blancs normal, diminué ou augmenté. Fait important : quel que soit le taux des GB, le taux des PNN est toujours effondré - Les blastes peuvent être observés ou non sur le frottis sanguin • Myélogramme : C’est l’élément clé qui permet de poser le diagnostic - confirmation du diagnostic de la leucémie aiguë : infiltration de la moelle osseuse par plus de 25% de cellules blastiques - identification de la nature lymphoïde ou myéloïde des blastes: - précision du sous type morphologique selon la classification Franco-Américano-Britanique (FAB). Pour les LAL : L1 ; L2 ; L3 et pour les LAM : LAM0 à LAM7 - précision du diagnostic et du phénotype immunologique : cette technique fait appel aux différents anticorps monoclonaux spécifiques des LAL et des LAM ainsi que du stade de la leucémisation 73 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Bilan à visée pronostique (bilan d’extension) La prise en charge des LA dépend des facteurs de risque qui sont à déterminer avant tout traitement : • Radiographie du thorax à la recherche d’adénopathies médiastinales • Echographie abdominale à la recherche d’adénopathies profondes ou d’autres lésions • Ponction lombaire (PL) à la recherche d’un éventuel envahissement blastique du LCR • Immunophénotypage des blastes • Caryotype des blastes (étude cytogénétique) à la recherche d’anomalies de nombre et/ou de structure • Biologie moléculaire (étude moléculaire) des blastes, si possible Les facteurs de pronostic ont été mieux définis dans les LAL. Ils reposent sur des critères liés au malade (âge et sexe) et à la maladie (clinique, biologie et imagerie). Bilan à visée thérapeutique D’autres examens sont nécessaires, soit pour une évaluation des risques du début du traitement, soit à titre de référence pour des examens de contrôle ultérieur : • Groupage sanguin + phénotypage érythrocytaire • Recherche d’agglutinines irrégulières • Ionogramme sanguin • Calcémie, phosphorémie, uricémie • Bilan d’hémostase • Bilan hépatique • LDH • ECG et échocardiographie • Fond d’œil • Sérologies virales : Hépatites B et C, CMV, HIV Conduite à tenir thérapeutique Les LAL et les LAM sont curables respectivement dans 70% et 50% des cas. Après un traitement préparatoire de 12 à 48 heures, la chimiothérapie débute par l’induction de la rémission et se poursuit par différentes étapes variables selon le type de LA et la forme pronostique. Traitement préparatoire à la chimiothérapie et prise en charge immédiate des urgences vitales Dans la majorité des cas, les LA ne sont pas une urgence thérapeutique. Les mesures suivantes sont nécessaires pour prévenir les complications vitales initiales : syndrome de lyse tumorale; syndrome cave supérieur ; leucostase pulmonaire ou cérébrale ; CIVD ; syndrome hémorragique ou un syndrome infectieux sévère. • hyperdiurèse alcaline, durant 3 jours ou jusqu’à la normalisation de l’uricémie. L’hyperhydratation est à poursuivre jusqu’à la disparition de l’hyperleucocytose et/ou du syndrome tumoral, soit en moyenne 3 à 7 jours. Elle se fait par voie IV ou orale. 74 Les leucemies aigues • prévention de l’hyperuricémie par le Purinethol® ou l’Uricozyme® • déparasitage par le métronidazole et Albendazole. • soins de bouche et traitement de toute porte d’entrée ou infection patente. Traitement d’induction C’est une polychimiothérapie qui vise à obtenir une rémission complète (RC) clinique et biologique ; à savoir un examen clinique normal, un hémogramme normal et un taux de blastes < 5% dans une moelle osseuse riche où toutes les lignées sont normalement représentées. Plus de 90% des LAL et 80% des LAM sont mises en rémission complète. Suite du traitement Une fois la RC obtenue, l’arrêt de la polychimiothérapie entraîne automatiquement une rechute de la leucémie. D’où la nécessité d’un traitement complémentaire pour maintenir cette rémission. C’est la succession des phases suivantes : Consolidation (2 mois), Intensification (2 à 6 mois), Entretien (2 ans). Prophylaxie cérébro-méningée systématique par chimiothérapie par voie générale et intra-thécale associée ou non à une irradiation de l’encéphale jusqu’à C2 (18 à 24 Gys). En l’absence de cette prévention, le taux des rechutes méningées dépasserait 50%. Ce traitement dure 2 à 3 ans en fonction du pronostic initial. Dans les LAM, la durée varie de 5 à 24 mois selon la qualité de l’intensification. A noter que les LAL3, dites leucémies de Burkitt, sont traitées comme les lymphomes non hodgkiniens. Greffe de cellules souches hématopoïétiques A partir de la moelle osseuse, cellules souches périphériques ou cellules du cordon, elle est réservée aux LA non curables par chimiothérapie classique (LAM, LAL de très haut risque, absence de rémission complète, rechutes précoces). Mesures adjuvantes • Transfusion de concentrés érythrocytaires et plaquettaires selon les données de l’hémogramme • Prévention et traitement des infections • Qualité de vie sous traitement - réalisation autant que possible d’une prise en charge thérapeutique de la LA la plus proche des conditions de vie normale du patient. - soutien psychologique et social du patient, de ses parents, de sa fratrie et de son entourage. Rechutes • Les rechutes peuvent être médullaires (30%), neuro-méningées (5-10%), testiculaires (5%), ovariennes (1-2%) ou oculaires. 75 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc • Les rechutes se manifestent le plus souvent par des anomalies de l’hémogramme, l’apparition de douleurs osseuses, une intolérance au traitement d’entretien, une hypertension intracrânienne, une atteinte des nerfs crâniens, une prise de poids importante ou une augmentation du volume d’un testicule. • La thérapie cellulaire demeure en général le seul espoir de guérison de ces rechutes. Conclusion La leucémie aiguë est une maladie à plusieurs facettes qui diffèrent par le type de prolifération blastique, la présentation clinique initiale, l’approche thérapeutique et l’évolution. Elle est curable grâce à l’adaptation de l’intensité du traitement aux facteurs de risque. En règle générale, il est aisé pour tout praticien de reconnaître une LA devant l’un des signes de l’insuffisance médullaire et / ou les anomalies de l’hémogramme. Néanmoins, il demeure indispensable de confier initialement au spécialiste toute LA, afin qu’il détermine le pronostic et définisse le protocole de prise en charge. Par la suite, une collaboration avec le pédiatre ou le médecin de proximité est nécessaire afin de mener le traitement dans les conditions les plus confortables pour l’enfant et sa famille. 76 LES LYMPHOMES NON HODGKINIENS Mhamed Harif Introduction Proliférations malignes à partir des cellules lymphoïdes, les lymphomes non hodgkiniens (LNH) constituent un groupe d’affections hétérogènes par leurs présentations cliniques, leurs aspects histopathologiques et leurs pronostics. La présentation, le traitement et l’évolution des LNH de l’enfant se distinguent de ceux de l’adulte par le nombre moins important d’entités, le caractère de haut grade de malignité et la particulière réponse au traitement. Contrairement à ceux de l’adulte les formes ganglionnaires périphériques sont peu fréquentes. Les formes abdominales et médiastinales sont les plus fréquemment rencontrées. Les LNH de l’enfant sont une urgence diagnostique et thérapeutique. Les chances de guérison atteignent 75 à 90% selon le type et le stade d’extension. Epidémiologie Dans les pays développés, le LNH de l’enfant représente 10% des cancers de l’enfant et vient après les leucémies et les tumeurs cérébrales. En Afrique équatoriale il est le premier cancer de l’enfant. Au Maroc, il est le 2ème cancer de l’enfant après les leucémies. Le LNH de Burkitt africain se localise principalement au niveau maxillaire. Sa répartition géographique dépend des conditions climatiques: il s’observe avec une fréquence élevée en Afrique tropicale dans une région humide et chaude. Son incidence est plus faible lorsque l’altitude dépasse 1500m et dans les régions arides ou semi-arides. Cette répartition particulière a fait suspecter le rôle d’un agent infectieux. Les études ultérieures ont montré que le virus Epstein Barr participe au processus d’oncogènèse. Certains déficits immunitaires congénitaux exposent à la survenue de LNH. La probabilité de survenue de lymphome chez les enfants atteints de syndrome de Wiskott-Aldrich ou d’ataxie télangiectasie peut atteindre 25%. Le traitement immunosuppresseur augmente le risque de développement d’un lymphome. Après transplantation d’organe suivi d’un traitement immunosuppresseur le risque de développement d’un lymphome est estimé à 13 à 33%. Enfin, l’infection à Epstein Barr virus (EBV) est associée à la plupart des lymphomes des sujets immunodéprimés. 77 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Présentation clinique Chez l’enfant, la localisation abdominale est la plus fréquente suivie par l’atteinte médiastinale. Il s’agit de lymphomes dont l’extension est rapide vers les structures avoisinantes mais aussi vers la moelle osseuse et le système nerveux central. Les formes abdominales sont rarement localisées. Elles peuvent alors être révélées par une invagination intestinale aigue. Le plus souvent, elles se présentant sous forme de multiples masses en rapport avec l’infiltration digestive et/ou ganglionnaire. Souvent une ascite est associée. La localisation médiastinale évolue rapidement vers un syndrome cave supérieur et une pleurésie. La localisation maxillaire, très évocatrice d’un lymphome de Burkitt comporte outre la tuméfaction maxillaire, un déchaussement dentaire et parfois des adénopathies cervicales satellites. Moins souvent, il s’agit d’une atteinte ganglionnaire périphérique ou amygdalienne. Histopathologie Chez l’enfant, l’étude cytopathologique peut être suffisante. Elle est réalisée par une ponction à l’aiguille d’une masse digestive, ganglionnaire ou d’un liquide d’épanchement pleural ou péritonéal. Dans ce cas, le diagnostic est rapidement fait. Ailleurs une biopsie chirurgicale ou percutanée est indispensable. Il convient dans tous les cas de faire des empreintes sur lames en vue d’une confrontation entre l’étude cytopathologique et histopathologique. Il est à noter que l’étude morphologique reste la base de toute caractérisation des LNH ; cependant l’immuno-histochimie utilisant des anticorps plus ou moins nombreux, apporte un complément précieux pour le diagnostic et le pronostic. Trois types histopathologiques sont le plus fréquemment rencontrés : - Les lymphomes de type Burkitt à cellules B matures caractérisés par des anomalies chromosomiques spécifiques : translocation 8-14 le plus souvent, ou variantes 2-8 ou 8-22. - Les lymphomes lymphoblastiques. Ils ont en général des caractères immunologiques de cellules T. - Les lymphomes à grandes cellules qui sont moins fréquents ; la majorité sont B mais certains ont des marqueurs T (lymphomes anaplasiques à grandes cellules). Bilan et Pronostic Une fois le diagnostic établi un bilan exhaustif doit rapidement être fait afin de préciser l’extension de la maladie, son retentissement et l’état du patient afin d’adapter le traitement. L’examen clinique minutieux doit faire les mensurations tumorales, rechercher d’autres localisations ganglionnaires ou extra-ganglionnaires. Ces localisations doivent être répertoriées et mesurées afin de servir de référence pour l’évolution de la maladie sous traitement. Les examens complémentaires doivent être limités au strict nécessaire. L’exploration radiologique fait appel à la radio du thorax et à l’échographie abdominale. La TDM ne doit être préconisée qu’exceptionnellement. La recherche d’une localisation médullaire, qui peut être suspectée dès l’hémogramme par la mise en évidence d’une cytopénie ou de cellules lymphomateuses doit être confirmée par la réalisation d’un myélogramme. Dans les lymphomes lymphoblastiques ou de Burkitt la recherche d’une infiltration méningée est faite par l’étude cytologique du LCR par ponction lombaire et ce même en l’absence de toute symptomatologie évocatrice. 78 Les lymphomes non hodgkiniens A ce bilan tumoral, on associe systématiquement un bilan biologique recherchant le retentissement métabolique de la prolifération lymphoïde et en particulier un syndrome de lyse par le dosage de l’uricémie et des électrolytes (kaliémie++), une étude des fonctions rénale et hépatique. On fera également un dosage de LDH qui reflète la masse tumorale. On peut ainsi classer le lymphome dans l’un des stades de la classification couramment utilisée, dite de Murphy (tableau I). Arbitrairement, on ne classe dans les lymphomes que les envahissements médullaires comportant au plus 25 % de cellules tumorales ; au-delà, il s’agit de leucémies. Stade I Atteinte ganglionnaire ou extra-ganglionnaire unique en dehors du thorax et de l’abdomen Stade II Atteinte de plus d’une chaîne ganglionnaire ou extra-ganglionnaire du même coté du diaphragme. Atteinte extra-ganglionnaire avec envahissement ganglionnaire régional Atteinte médiastinale Atteinte abdominale diffuse Stade III Atteinte ganglionnaire ou extra-ganglionnaire de part et d’autre du diaphragme Atteintes para-spinale ou épidurale Stade IV Envahissement de la moelle osseuse ou du système nerveux central. Tableau I : Classification de Murphy Traitement Le traitement d’un enfant atteint de LNH ne se conçoit que dans un milieu spécialisé. Un traitement mal conduit initialement entrave significativement les chances de guérison du patient par le développement de clones résistants. Ce traitement tient compte des facteurs pronostiques et en particulier du type cyto-histopathologique, de la masse tumorale et de l’état clinique du patient. Les LNH de l’enfant se caractérisent par une grande sensibilité à la chimiothérapie. Dans tous les cas, il s’agit d’une polychimiothérapie. La chirurgie d’exérèse n’a pas d’indication sauf dans des formes très localisées en particulier abdominale. Avant l’institution de toute chimiothérapie, il convient de prendre en charge ou prévenir un syndrome de lyse cellulaire et de prendre en charge également les troubles nutritionnelles ou infectieux parfois associés. La prévention du syndrome de lyse est faite d’une hyperdiurèse alcaline et allopurinol. La prophylaxie neuro-méningée est systématique étant donné le tropisme neuro-méningé des LNH de l’enfant. Elle est faite de chimiothérapie intra-rachidienne et de méthotrexate à hautes doses, capable de passer la barrière hémato-méningée. Dans le lymphomes B (Burkitt - grandes cellules), le traitement fait appel à une polychimiothérapie intensive habituellement d’une durée de 3 à 4 mois. Les drogues utilisées sont la prednisone, la vincristine, l’endoxan, l’adriamycine, le méthotrexate à haute dose (≥3g/ m2) et l’aracytine. L’intensité et la durée du traitement sont adaptées à l’extension de la maladie. 79 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Dans les lymphomes de Burkitt, les rechutes sont toujours précoces dans la première année. Aussi, au-delà de ce délai, les enfants sont considérés comme guéris. Dans les lymphomes lymphoblastiques, le traitement est proche ou identique de celui des leucémies aigues lymphoblastiques. La durée du traitement est habituellement de 2 ans. Conclusion Les LNH de l’enfant sont actuellement guéris dans la majorité des cas. La mise en place d’un traitement adéquat permet d’atteindre des taux de guérison de 90% des cas de LNH de Burkitt et 75% des lymphomes lymphoblastiques. Un diagnostic précoce, une bonne mise en condition et l’administration d’un traitement adapté au type et au stade d’extension sont indispensables pour donner aux patients le maximum de chances. 80 LA MALADIE DE HODGKIN Abdellah Madani Le lymphome hodgkinien (LH) de l’enfant représente 5% environ des tumeurs malignes de l’enfant. Son pronostic s’est considérablement amélioré durant les 3 dernières décennies ; la survie à long terme est passée de 40% durant les années 60 à plus de 90% dans les années 90 dans les pays développés, faisant du LH un modèle de réussite en oncologie pédiatrique. Un diagnostic précoce et l’identification des facteurs pronostiques ont permis une adaptation des protocoles thérapeutiques afin d’obtenir les meilleurs résultats avec le minimum de séquelles à long terme. Dans les pays en développement et notamment au Maroc, la prise en charge du LH de l’enfant souffre de plusieurs entraves, en particulier le retard de diagnostic, et de ce fait, une proportion importante de malades se présente sous des formes très évoluées. Epidemiologie Le LH de l’enfant représente environ 5% des cancers de l’enfant. Son incidence présente des variations en fonction des régions dans le monde et des groupes ethniques. Parmi la population caucasienne des pays occidentaux, l’incidence est inférieure à 7 par million d’enfants d’âge inférieur à 15 ans. Les études épidémiologiques réalisées dans certains pays en voie de développement montrent une incidence plus élevée et un pic de survenue plus tôt dans la tranche d’âge entre 5 et 9 ans. Au Maroc, l’incidence exacte du LH de l’enfant n’est pas connue ; il représente 8% des tumeurs malignes de l’enfant admises au service d’hématologie et d’oncologie pédiatrique à Casablanca en 2003. Une autre particularité est retrouvée dans les séries des pays en développement : la grande fréquence des patients d’âge inférieur à 5 ans (12% à Casablanca et moins de 6% dans les séries occidentales) Histopathologie Le diagnostic de LH est histopathologique. Il repose sur la mise en évidence des cellules de Hodgkin et de Reed Sternberg (HRS) au sein d’un milieu inflammatoire. L’apport de l’immunohistochimie est primordial dans le diagnostic positif et différentiel du LH. La classification de Lukes-Rye, utilisée jusqu’à la moitié des années 1990, individualise 4 types histologiques : prédominance lymphocytaire, sclérose nodulaire, cellularité mixte et déplétion lymphocytaire. 81 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc La classification de l’OMS des lymphomes, utilisée actuellement, individualise 2 entités distinctes du LH. La forme classique du LH, représentant environ 95% des LH, comprend 4 sous types (SN, CM, DL, et le LH classique riche en lymphocytes) ; la forme dite à prédominance lymphocytaire nodulaire ne représente que 5% des LH et est plus apparentée à un Lymphome Non Hodgkinien. Classification d’Ann-Arbor modifiée à Cotswolds Stades Description Stade I Atteinte d’une aire ganglionnaire ou d’une structure lymphoïde Stade II Atteinte de 2 aires ganglionnaire ou plus du même coté du diaphragme. Stade III Atteinte ganglionnaire des 2 côtés du diaphragme. L’atteinte splénique est désigné par le suffixe S. - Stade III1 Avec ou sans atteinte splénique, hilaire, coeliaque ou portale. - Stade III2 Avec atteinte para-aortique, iliaque et mésentérique. Stade IV Atteinte d’un ou de plusieurs organes extralymphoïdes avec ou sans atteinte ganglionnaire. Désignations A Pas de symptômes Fièvre (> 38°C) ou sueurs nocturnes profuses ou perte de poids inexpliquée de plus de 10% durant les 6 derniers mois. B Présentation clinique Des adénopathies cervicales ou sus claviculaires sont présentes et constituent le mode de révélation le plus fréquent (70%) posant le problème de diagnostic différentiel des adénopathies cervicales chez l’enfant. Classiquement, les adénopathies du LH augmentent rapidement de volume et sont non inflammatoires. L’extension tumorale ganglionnaire se fait de proche en proche vers les aires ganglionnaires adjacentes. Deux tiers des patients présentent également des adénopathies médiastinales qui sont rarement compressives et pouvant être responsable d’une toux sèche, rarement d’une détresse respiratoire ou d’un syndrome cave supérieur. L’atteinte des sites sous diaphragmatiques est rarement révélatrice et survient dans environ 3% des cas. Les signes généraux comme la fièvre, les sueurs nocturnes et l’amaigrissement sont présents dans 25 à 30% des cas et peuvent parfois être révélateurs. Une splénomégalie est parfois associée aux adénopathies ou peut être révélatrice. Des manifestations auto-immunes peuvent révéler ou accompagner un LH à type d’anémie hémolytique auto-immune ou de purpura thrombopénique auto-immun. 82 La maladie de Hodgkin Bilan d’extension Il est essentiel pour déterminer le stade, préciser les facteurs pronostiques, poser les indications thérapeutiques, évaluer la réponse au traitement et préciser les aires à irradier. Le bilan d’extension est d’abord clinique, à la recherche de toute adénopathie palpable. Ces adénopathies seront consignées sur un schéma qui servira de base d’évaluation au cours du traitement. On recherchera également l’existence de signes d’évolutivité clinique. Sur le plan radiologique • La radiographie thoracique de face permet de mettre en évidence d’éventuelles adénopathies médiastinales et de calculer l’index médiastino-thoracique qui représente un facteur pronostic péjoratif quand il est supérieur à 33%. • L’échographie abdominale est utile pour la mise en évidence d’adénopathies intrapéritonéales, une atteinte splénique ou hépatique. A côté de ces 2 examens, • La tomodensitométrie thoraco-abdomino-pelvienne est actuellement pratiquée en routine, permettant de mettre en évidence de façon plus précise les aires ganglionnaires pathologiques et de mieux définir les aires d’irradiation. Sur le plan biologique Un bilan inflammatoire sera réalisé au diagnostic ainsi qu’un dosage du taux de LDH qui ont une valeur pronostique. La biopsie médullaire n’est plus systématique dans tous les stades. Elle n’est plus réalisée qu’en cas de présence de signes B ou dans les stades III ou IV. Classification La fréquence des stades est variable selon les séries. Dans les pays développés, les stades localisés (Stades I et II), sont les plus fréquents, représentant les 2/3 des patients environ, contrairement aux pays en développement où les stades avancés III et IV sont prédominants. Traitement La survie à long terme des enfants atteints de LH est actuellement supérieure à 90% dans les stades localisés et à 80% dans les stades diffus. Le traitement du LH de l’enfant est basé actuellement sur la chimiothérapie seule ou associée à la radiothérapie délivrée sur les sites initialement atteints. La radiothérapie La radiothérapie seule n’est plus indiquée dans le traitement du LH de l’enfant. L’utilisation de la chimiothérapie a permis de réduire les doses de radiothérapie, (passant de 36 Gy dans les séries anciennes à 15 Gy dans certaines séries actuelles) et de réduire les champs d’irradiation des champs étendus aux champs dits initialement envahis. 83 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Afin d’éviter les séquelles à long terme inhérentes à la radiothérapie, (Troubles de croissance, insuffisance thyroïdienne et cancers secondaires) l’abandon de la radiothérapie dans le traitement des LH de l’enfant est en cours d’évaluation. La chimiothérapie La chimiothérapie a connu une importante évolution depuis les bons résultats obtenus avec les protocoles princeps MOPP (Mechlorethamine, Oncovin, Procarbazine, Prednisone) et ABVD (Adriblastine, Bléomycine, Vinblastine, Dacarbazine). Ces protocoles calqués initialement sur les modalités thérapeutiques appliquées chez l’adulte ont donné des survies sans maladie supérieures à 80% dans les stades localisés et supérieures à 60% dans les stades diffus. Néanmoins, les séquelles à long terme de ces 2 protocoles chez l’enfant à type de toxicité gonadique et de leucémies secondaires observés avec le MOPP et de toxicité cardiopulmonaire avec l’ABVD se sont avérées inacceptables. Ceci a amené à mettre au point des protocoles de chimiothérapie adaptés à l’enfant, ayant une toxicité moindre et une efficacité au moins égale sinon supérieure. Au cours des années 90, avec l’identification de facteurs pronostiques du LH de l’enfant, est apparue la notion de traitement adapté. Une stratification en groupes pronostiques prenant en considération les facteurs pronostiques, est adoptée dans les protocoles thérapeutiques actuels. Traitement des formes particulières • Patients âgés de moins de 5 ans Les patients atteints de LH, âgés de moins de 5 ans représentent plus de 10% dans les séries des pays en développement. Leur bas âge les rend très sensibles au traitement et surtout à la radiothérapie, responsable de troubles de croissance très importants. Le traitement de ces patients est en général basé sur la chimiothérapie exclusive donnant des résultats satisfaisants. La radiothérapie pourra être utilisée en cas d’échec ou de rechute. • LH à prédominance lymphocytaire nodulaire Le LHPLN présente une évolution très lente et reste longtemps localisé. L’exérèse chirurgicale complète quand elle est possible peut suffire à condition d’une surveillance stricte et régulière. Dans les formes localisées, la radiothérapie exclusive est indiquée. La chimiothérapie n’est utilisée que dans les rares formes disséminées. La survie sans rechute est en général supérieure à 90%. Facteurs pronostiques et résultats thérapeutiques Le stade reste le facteur pronostique essentiel. D’autres facteurs pronostiques, variables en fonction des différentes séries ont été mis en évidence. Ils permettent, couplés au stade clinique, de définir des groupes favorables, intermédiaires ou défavorables. Un autre facteur pronostique essentiel, rapporté non seulement pour le LH mais également pour la plupart des cancers de l’enfant, est la réponse à la chimiothérapie. L’identification d’une mauvaise réponse aux premières cures de chimiothérapie (maladie dite réfractaire) est corrélée à une évolution défavorable amenant à intensifier précocement le traitement. 84 La maladie de Hodgkin Séquelles à long terme Avec l’amélioration du pronostic du LH de l’enfant, une attention particulière est donnée au risque de survenue de séquelles à long terme surtout chez des patients en période de croissance. Les risques sont inhérents à l’utilisation de la chimiothérapie et de la radiothérapie. Ils dépendent des régimes de chimiothérapie, du nombre de cures, des sites irradiés ainsi que de la dose totale délivrée. Ces séquelles à long terme comprennent le risque d’infertilité, d’atteinte cardio-pulmonaire, d’insuffisance thyroïdienne, de retard de croissance et de cancers secondaires. Les modalités thérapeutiques actuelles, prenant en considération les facteurs pronostiques, permettent de minimiser le risque de séquelles à long terme particulièrement dans les formes de bon pronostic pour lesquelles une réduction des doses de chimiothérapie et de radiothérapie est adoptée sans grever le pronostic Conclusion Le traitement du LH de l’enfant représente un succès thérapeutique majeur en oncologie pédiatrique. Néanmoins, sa prise en charge ne se conçoit qu’au sein d’une équipe multidisciplinaire habituée à traiter ce genre de patients. Les indications thérapeutiques doivent être pesées au début et continuellement adaptées à l’évolution de la maladie afin de permettre la meilleure évolution avec le moins de séquelles à long terme. L’analyse de nos résultats nous a amené à mettre au point un protocole national multicentrique et multidisciplinaire ayant plusieurs objectifs : uniformiser la prise en charge tant sur le plan diagnostic, du bilan d’extension et thérapeutique, obtenir un taux de survie supérieur à 80% dans les stades localisées et supérieur à 70% dans les stades diffus, réduire le nombre de patients perdus de vue à moins de 10% des patients (35% dans la série de 181 patients). 85 LE NEPHROBLASTOME Mohamed Nasser Nachef Introduction Le néphroblastome ou tumeur de Wilms est une tumeur maligne d’origine embryonnaire du rein. Il représente environ 5 % de l’ensemble des cancers de l’enfant, et se rencontre plus fréquemment entre 1 et 5 ans. Cette tumeur est rapidement progressive, mais a bénéficié d’importants progrès thérapeutiques avec en moyenne, 90% de guérison, grâce à une prise en charge spécialisée, et multidisciplinaire. Le traitement associe chimiothérapie préopératoire, chirurgie, chimiothérapie postopératoire, et si nécessaire une radiothérapie. Epidemiologie Le néphroblastome est la tumeur du rein la plus fréquente chez l’enfant (90 %) ; il représente environ 5 % de l’ensemble des cancers de l’enfant. C’est une tumeur de la petite enfance, observée le plus souvent entre 1 et 5 ans. La médiane de survenue est de 3 ans et ½.. Le sexe ratio est proche de 1. Les deux reins peuvent être atteints, mais le gauche un peu plus souvent que le droit. Dans 5 % des cas, la tumeur est bilatérale. Anomalies génétiques : dans 90% des cas, le néphroblastome est sporadique, c’est-à-dire ni familial, ni survenant dans un contexte de malformation ou de syndrome de prédisposition. Ces patients présentent néanmoins des anomalies génétiques du tissu tumoral (et non constitutionnelles). Malformations associées : dans 10 % des cas, le néphroblastome est associé à des syndromes poly malformatifs. Il n’y a donc pas de transmission génétique du syndrome. • Anomalies fréquemment associées au néphroblastome : - Malformations génito-urinaires : cryptorchidie, hypospadias, duplication rénale, rein en fer à cheval ou ambiguïté sexuelle. - Aniridie. - Hémi hypertrophie d’un segment corporel ou d’un hémicorps entier - Plus rarement microcéphalie, retard mental, cartilage mou et mal ourlé de l’oreille, cataracte congénitale. • Syndromes fréquemment associés au néphroblastome : - Le syndrome WAGR : tumeur de Wilms, une Aniridie, des malformations génito-urinaires et un retard mental. 86 Le nephroblastome - Le syndrome de Denys-Drash, associe des troubles de la différenciation sexuelle, un néphroblastome une insuffisance rénale. - Le syndrome de Wiedemann-Beckwith comprend une macroglossie, un omphalocèle, une viscéromégalie, un hyperinsulinisme, et une hémi hypertrophie corporelle. Anatomie pathologique Macroscopie Le néphroblastome naît dans le parenchyme rénal et se développe en refoulant les cavités calicielles. Une capsule entoure la tumeur qui peut être franchie par les cellules tumorales. L’envahissement hématogène est la règle : thrombose de la veine rénale, de la veine cave inférieure et même de l’oreillette droite. Les métastases se font dans 80% des cas dans les poumons, parfois dans le foie, rarement dans le squelette (en cas de sarcome à cellules claires). Microscopie Le néphroblastome contient, dans les formes «triphasiques», trois composantes principales : le blastème, le tissu à différenciation épithéliale, et le stroma conjonctif. Ces différents types cellulaires sont associés en proportion variable. Il existe des formes dites à prédominance blastémateuse, épithéliale ou mésenchymateuse. On distingue trois groupes de formes histologiques différentes parmi les néphroblastomes prétraités, le faible risque, le risque intermédiaire, et le haut risque. Clinique Ce sont, très souvent, les parents ou le médecin, qui détectent une tumeur abdominale chez l’enfant. Celle-ci est volumineuse, asymptomatique, rapidement progressive, chez un enfant en bon état général. Parfois c’est une hématurie, ou plus rarement, une fièvre, des douleurs abdominales dues à la distension abdominale ou à une hémorragie intra tumorale ; exceptionnellement, ce sont les signes d’une rupture ou d’une fissuration tumorale qui amènent à consulter. L’examen abdominal doit être prudent car la tumeur est fragile. Elle est volumineuse, à développement antérieur, ferme, lisse, peu mobile, indolore. Elle augmente rapidement de volume. La mesure de la pression artérielle permettra de retrouver parfois une HTA. Cette hypertension est liée à une sécrétion de rénine par la tumeur ou à la compression des vaisseaux rénaux. On retrouve une hématurie macroscopique dans 25 % des cas. Des malformations associées, doivent être recherchées : l’hémi hypertrophie corporelle, l’aniridie et de discrètes anomalies génitourinaires. Le reste de l’examen clinique est généralement normal. La tumeur de rein ainsi suspectée, la démarche suivante s’impose d’urgence: - prévenir tout traumatisme abdominal susceptible de rompre la tumeur en interdisant des activités à risque (sauts, vélo...) ; - confier l’enfant dans les meilleurs délais à une équipe multidisciplinaire spécialisée. Cette équipe va confirmer par l’imagerie l’existence de la tumeur, pratiquer un bilan biologique, définir les facteurs pronostiques, évaluer l’extension tumorale, et mettre en route un traitement adapté. 87 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Radiologie Abdomen sans préparation et urographie intraveineuse L’échographie domine la démarche diagnostique, et une fois réalisée, ni l’ASP ni l’UIV n’apportent d’informations supplémentaires. Echographie abdominale L’échographie abdominale permet le plus souvent à elle seule le diagnostic de tumeur rénale : elle rattache la masse palpable au rein, montre une masse hétérogène, solide, kystique et le plus souvent mixte. L’échographiste précise la taille de la tumeur. Les calcifications sont très rares (moins de10 % des cas). Il faut explorer de manière systématique la veine rénale, la veine cave inférieure jusqu’au niveau de l’oreillette droite à la recherche de thrombus tumoral, les ganglions rétro péritonéaux, le rein controlatéral et le foie. Tomodensitométrie abdominale Selon les différents protocoles, le scanner abdominal peut être systématique, ou pratiqué seulement en cas de doute sur le diagnostic. Il sert de référence. Grâce à l’injection de produit de contraste, il permet la détection des métastases hépatiques de petite taille et la découverte d’extensions intra vasculaires. Cet examen éliminera aussi une autre cause de masse rénale. Biologie Les LDH sont fréquemment élevées comme dans d’autres tumeurs. L’hypercalcémie peut orienter vers une forme rhabdoïde chez un nourrisson. L’anémie profonde ou qui s’aggrave ou résiste aux transfusions doit faire craindre une hémorragie intra tumorale ou une rupture et doit d’urgence orienter vers la chirurgie première. En pratique, il faut demander une NFS, un taux des plaquettes, un ionogramme sanguin, et le dosage des catécholamines urinaires. Diagnostic differentiel L’imagerie facilite la distinction entre pyélonéphrite en voie d’abcédation, malformations kystiques ou hydronéphrose et tumeur du rein. Le principal diagnostic différentiel est le neuroblastome. La présence beaucoup plus fréquente de calcifications et surtout la quantité anormalement élevée des métabolites des catécholamines (VMA et HVA sur la diurèse des 24h) orientent vers le neuroblastome. Bilan d’extension Radiographie standard du thorax. La radiographie de thorax de face et de profil recherche les métastases pulmonaires sous forme de nodules. Parfois c’est un petit nodule unique ; ailleurs, ce sont plusieurs nodules disséminés dans les deux champs pulmonaires réalisant l’aspect de lâcher de ballons. 88 Le nephroblastome Tomodensitométrie thoracique Le scanner du thorax n’est fait en général qu’en cas de métastases pulmonaires à la radiographie standard. Il permet de préciser le nombre exact, le siège, et la topographie des nodules. Il sert de référence pour l’évaluation de la réponse à la chimiothérapie pré opératoire. Scintigraphie osseuse Cet examen n’est utile qu’en cas de douleur osseuse. Il sera systématique dans les sarcomes à cellules claires. TDM cérébrale La TDM cérébrale n’est pratiquée que dans les tumeurs rhabdoïdes du rein ou les sarcomes à cellules claires du fait de leur fort pouvoir métastasant au cerveau. Traitement Le traitement du néphroblastome est un traitement multidisciplinaire associant chimiothérapie, chirurgie et radiothérapie. Cette prise en charge thérapeutique spécialisée et multidisciplinaire a permis une progression remarquable des taux de guérison, obtenue ces 40 dernières années (de 20 à plus de 90 %). Chimiothérapie initiale Le traitement du néphroblastome commence par une chimiothérapie pré opératoire. Celle-ci comprend l’association de vincristine et d’actinomycine D pendant 4 semaines dans les formes localisées. Dans les formes métastatiques d’emblée, on associe à ces deux produits, la doxorubicine en allongeant la durée à 6 semaines. Dans le néphroblastome bilatéral, on utilise aussi l’association de vincristine et d’actinomycine D, en poursuivant aussi longtemps jusqu’à une réduction tumorale maximale, afin d’épargner au mieux le parenchyme rénal. La chimiothérapie première diminue fortement le risque de rupture tumorale per-opératoire, rend la chirurgie plus aisée et modifie la classification opératoire. Chirurgie En général, la chirurgie est le deuxième temps du traitement ; sauf pour les nourrissons de moins de 6 mois chez qui la prédominance des tumeurs bénignes justifie la chirurgie première. La voie d’abord est abdominale transpéritonéale. Le temps chirurgical comprend la ligature du pédicule rénal, la néphrectomie large avec la couche cellulaire péri rénale. Les zones douteuses sont examinées soigneusement : le pédicule rénal, et les zones d’adhérences. Les ganglions régionaux sont prélevés. On recherche enfin d’éventuelles métastases péritonéales, hépatiques ou sur le rein controlatéral. 89 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc La classification opératoire va participer à la décision thérapeutique. Cette classification se fonde sur le compte-rendu opératoire. On distingue trois stades opératoires : • Stade I : tumeur localisée au rein, et complètement enlevée. • Stade II : tumeur qui s’étend en dehors du rein, et complètement réséquée. • Stade III : rupture tumorale pré ou per opératoire, et exérèse incomplète. La pièce opératoire doit être adressée immédiatement au laboratoire d’anatomie pathologique sans l’ouvrir. C’est le pathologiste qui procédera à la manipulation de la pièce pour confirmer le diagnostic, préciser le sous type histologique et définir le stade. Radiothérapie Le néphroblastome est une tumeur très radiosensible à des doses relativement faibles. Cette irradiation utilise les hautes énergies, se fait par deux champs opposés, antérieurs et postérieurs, cinq fois par semaine, à la dose de 1.8 Gray/séance, avec protection personnalisée. Le volume cible est basé sur l’extension initiale, et sur les comptes rendu opératoire et anatomopathologique. La dose totale est adaptée au risque, (stade local, et type histologique). Dans certaines indications on fait appel à la radiothérapie de l’abdomen total, ou les poumons. Chimiothérapie postopératoire Elle diffère selon les protocoles. Elle associe Vincristine, Actinomycine D, Doxorubicine, Etoposide, Carboplatine, et Cyclophosphamide, selon des schémas différents selon le stade et le type histologique. Toxicité - sequelles Chimiothérapie Tous les produits peuvent être toxiques : • toxicité commune (alopécie, vomissements, mucite, et hématologiques) • toxicité sélective - neurologique : neuropathie périphérique, iléus paralytique (Vincristine) - hépatique : maladie veino occlusive (Actinomycine D) - cardiaque : (Doxorubicine) - rénale : tubulopathie (Carboplatine) - auditive (Carboplatine) - vésicale : cystite hémorragique (Cyclophosphamide) Radiothérapie De même, la radiothérapie est responsable de certains effets secondaires : • osseuse : déformation vertébrale, retard de croissance • digestive : grêle radique • hépatique : hépatomégalie, thrombopénie, ascite. 90 Le nephroblastome • rénale • pulmonaire • gonadique : ovaires, testicules • cardiaques : cardiomyopathie si dose >35 Gy Chirurgie Une hypertrophie compensatrice du rein restant suit la néphrectomie et restaure la fonction rénale normale. Cas particuliers Formes néonatales La tumeur de Bolande, ou néphrome mésoblastique, représente 3/4 des tumeurs à cet âge. Le traitement en est chirurgical. Si exceptionnellement, il s’agit d’une tumeur de Wilms, aucun traitement postopératoire n’est conseillé pour le stade I. Pour des stades plus étendus, une chimiothérapie très prudente doit être discutée. Si l’irradiation est nécessaire, on tente de la retarder le plus possible. Formes bilatérales La chimiothérapie préopératoire prolongée par l’association de Vincristine et Actinomycine D, jusqu’à réduction maximale est la règle. L’imagerie (scanner spiralé et IRM) permet de suivre l’évolution sous traitement. La chirurgie conservatrice est à privilégier et reste très difficile. L’histologie et le stade d’extension de chaque côté déterminent l’attitude thérapeutique. On effectue une néphrectomie partielle sur le rein le moins atteint dans un premier temps puis on effectue une deuxième néphrectomie partielle sur le rein le plus envahi. Si cette attitude n’est pas possible, on effectue une néphrectomie bilatérale complète qui conduira à la dialyse. Formes métastatiques Dans environ 10% des cas, les néphroblastomes sont métastatiques dès le diagnostic. Le site préférentiel des métastases est pulmonaire (80% des cas). Les autres localisations métastatiques concernent le foie, l’abdomen, le squelette, et les ganglions extrarégionaux. Le pronostic des formes extra pulmonaires en général et des formes combinées étendues reste globalement plus mauvais que celui des formes pulmonaires isolées. Surveillance Les chances de guérison sont d’autant meilleures qu’une éventuelle récidive est découverte plus tôt. Un examen clinique et radiologique (échographie abdominale et radiographie pulmonaire) doit être fait toutes les 6 semaines environ la première année, puis tous les 3mois la deuxième et la troisième année. Ce suivi peut être plus serré en cas de formes métastatiques initiales, ou peut inclure des radios osseuses en cas de signes d’appel dans le sarcome à cellules claires. 91 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Résultats Les résultats se sont considérablement améliorés depuis 20 ans, grâce à l’utilisation des protocoles multicentriques ; et grâce à la collaboration des différentes disciplines de chaque centre. La survie actuarielle globale à 5 ans est passée de 64 % dans les années 70 (protocole SIOP 1) à 91% dans les années 90 (protocole SIOP 9). Cette survie dépend de plusieurs facteurs pronostiques, tel que le stade et le type histologique. Conclusion Devant une masse abdominale avec ou sans hématurie chez un enfant de moins de 5 ans, en bon état général ; le diagnostic de tumeur rénale doit être suspecté. L’échographie vient confirmer le diagnostic de néphroblastome. Une radiographie pulmonaire à la recherche de métastases doit être faite, avant de confier le patient au centre de référence le plus proche. Avant d’adresser le patient on doit prévenir les parents de la nécessité d’interdire certaines activités à risque, et de prévenir tout traumatisme abdominal susceptible de rompre la tumeur. Il ne faut surtout pas faire de biopsie tumorale. De même la chirurgie première est à interdire. Un malade atteint d’un néphroblastome diagnostiqué tôt et traité par une équipe multi disciplinaire spécialisée, a 9 chances sur 10 de survivre à sa maladie. 92 LE NEUROBLASTOME Mounia Alzemmouri Le neuroblastome est une tumeur dérivée de la crête neurale. Il se développe sur les chaînes sympathiques et peut donc siéger dans l’abdomen, le thorax, le cou ou le pelvis. Les manifestations cliniques sont donc variées et dépendent de la localisation de la tumeur primitive et des éventuelles métastases. L’imagerie, la biologie et l’histologie permettent de faire le diagnostic précis et de proposer une prise en charge adaptée alliant chimiothérapie, chirurgie et parfois radiothérapie. Le pronostic est variable et dépend de plusieurs paramètres dont l’âge, la localisation et la dissémination à distance. Epidemiologie et anatomopathologie Le neuroblastome est une tumeur fréquente qui touche environ 1/7500 naissances vivantes. C’est la tumeur solide maligne la plus fréquente en France en dehors des tumeurs cérébrales. Au Maroc, elle vient après le lymphome et le néphroblastome. Il n’existe pas de prédominance de sexe. Le neuroblastome peut se voir à tous les âges depuis la période néonatale mais l’âge moyen au diagnostic est autour de 2 ans. Sur le plan histologique, il s’agit d’une tumeur à cellules rondes appartenant au groupe des tumeurs neuroblastiques. L’extension se fait essentiellement vers la moelle osseuse, l’os et le foie. L’atteinte du poumon, bien que plus rare, doit systématiquement être recherchée. Clinique La diversité de la localisation rend la clinique variable en fonction de la localisation primitive et de l’extension loco-régionale ou à distance. Signes en rapport avec la tumeur primitive • Abdomen : c’est la localisation la plus fréquente surrénalienne ou latéro-vertébrale. Elle se manifestera par des douleurs abdominales mais sera le plus souvent diagnostiquée au stade de masse palpable. • Thorax : la tumeur est médiastinale postérieure et peut se révéler par des signes de compression tels une dyspnée ou un syndrome de Claude Bernard Horner. 93 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc • Cou : les signes de compression sont rapidement au premier plan et la tumeur souvent visible. • Pelvis : les signes révélateurs sont le plus souvent des signes de compression urinaire ou rectale. Signes en rapport avec l’extension • Syndrome de compression médullaire : il est en rapport avec l’extension intracanalaire du neuroblastome et constitue une urgence thérapeutique. • Syndrome de Hutchinson : il associe exophtalmie et hématomes périorbitaires et témoigne de l’envahissement orbitaire de la tumeur. • Syndrome de Pepper : c’est l’association d’un neuroblastome surrénalien et d’une infiltration métastatique nodulaire du foie. Il va se révéler par la distension abdominale ou par une détresse respiratoire en rapport avec la compression par l’hépatomégalie qui peut être monstrueuse. Paraclinique Imagerie • Le couple échographie-TDM permet de retenir le diagnostic du neuroblastome dans la majorité des cas. • L’IRM sera utilisée dans les neuroblastomes avec envahissement intracanalaire appelées tumeurs en sablier. • La scintigraphie au MIBG (méta-iodo-benzyl-guanidine) peut confirmer le diagnostic et faire le bilan d’extension dans le même temps mais son utilisation reste limitée dans notre contexte en raison de son coût prohibitif. • La radio du thorax sera demandée systématiquement à la recherche de métastases pulmonaires. • La scintigraphie au technétium peut être utilisée à la recherche de métastases osseuses en cas de signes d’appel. Biologie Le dosage des dérivés urinaires des catécholamines VMA (acide vanilylmandélique) et HVA (acide homovanilique) peut confirmer le diagnostic de neuroblastome et permet la surveillance après traitement. Cytologie et anapathologie • La biopsie chirurgicale ou percutanée échoguidée ou scanno-guidée sera réalisée pour la confirmation diagnostique et l’établissement du pronostic. • Le myélogramme et la biopsie ostéo-médullaire sont réalisées à la recherche de l’envahissement médullaire et peuvent apporter la confirmation du diagnostic avant les autres examens complémentaires. 94 Le neuroblastome Traitement Le traitement combine chimiothérapie, chirurgie et parfois radiothérapie et sera adapté à chaque malade. • La chirurgie sera réalisée en première intention si la tumeur est localisée et jugée opérable sans sacrifice d’organe et sans risque vital pour le malade. Sinon, elle sera réalisée après chimiothérapie. • La chimiothérapie a un rôle majeur dans le traitement. Elle sera utilisée en pré et/ou en postopératoire. Les drogues utilisées sont le cyclophosphamide, la doxorubicine ; la vincristine et les sels de platine. • La radiothérapie garde une place quand la chirurgie est impossible ou incomplète. Elle est utilisée avec prudence en raison de l’importance des séquelles chez un petite enfant en croissance. Pronostic Le pronostic du neuroblastome est variable mais reste cependant réservé en raison du stade souvent métastatique au diagnostic ( 50% des cas) Les facteurs pronostiques sont : • L’âge : les nourrissons de moins d’un an ont un meilleur pronostic quelque soit le stade de la tumeur. • Le siège de la tumeur primitive : les neuroblastomes thoraciques et cervicaux sont de meilleur pronostic. • L’extension de la tumeur conditionne le pronostic. Le taux de survie pour les neuroblastomes métastatiques n’excède pas les 30% dans les meilleurs centres. - Le grade histologique : le pronostic est différent selon le degré de différenciation et donc de maturation des cellules. - l’oncogène N-myc : Les tumeurs qui amplifient cet oncogène sont de mauvais pronostic et nécessitent un traitement plus lourd. Conclusion Le neuroblastome est une tumeur assez fréquente de l’enfant qui gagnerait à être diagnostiquée précocement avant l’apparition de métastases, lesquelles aggravent fortement son pronostic. 95 LES TUMEURS OSSEUSES MALIGNES PRIMITIVES Amina Kili Introduction Les tumeurs osseuses malignes (TOM) constituent 6 à 10% de l’ensemble des tumeurs de l’enfant et de l’adolescent. Les plus fréquentes sont l’ostéosarcome et la tumeur d’Ewing (90% des cas). Les autres tumeurs (chondrosarcome, fibro-histiocytome malin, adamantinome, chondrome, angiosarcome et lymphome malin) sont exceptionnelles chez l’enfant. Les progrès de l’imagerie, le développement du traitement multidisciplinaire avec l’utilisation d’une chimiothérapie première et de traitements chirurgicaux conservateurs ont considérablement amélioré le taux de survie et la qualité de vie des patients. Dans notre pays, ces tumeurs souffrent d’un retard de diagnostic, par retard de consultation ou par errance diagnostique, ce qui grève le pronostic vital et fonctionnel. Epidemiologie Les tumeurs osseuses malignes sont rares. Aux Etats Unis, l’incidence de ces tumeurs est estimée à 8,7 par an et par million d’habitants de moins de 20 ans. En France, la fréquence de l’ostéosarcome est évaluée à 2 cas par an et par million d’habitants ce qui représente un peu plus de 100 nouveaux cas par an dont 70% touchent des enfants. La tumeur d’Ewing représente 5 à 15% des tumeurs osseuses primitives malignes. Elle arrive en 2éme position dans la population pédiatrique après les ostéosarcomes. Au Maroc, les tumeurs osseuses malignes occupent le 5ème rang après les leucémies aigues, les lymphomes, les néphroblastomes et les neuroblastomes. A l’unité d’Hémato-Oncologie de Rabat, 20 à 29 nouveaux cas par an sont vus. Certains facteurs favorisent la survenue d’un ostéosarcome: • des antécédents d’irradiation ou de traitement par des agents alkylants • des antécédents de rétinoblastome héréditaire, syndrome de li- fraumeni ou syndrome de Rothmund- Thomson. Les tumeurs d’Ewing se rencontrent quasi exclusivement chez les sujets de peau blanche. En dehors de cela, aucun facteur favorisant la survenue d’une tumeur d’Ewing n’a été clairement incriminé. 96 Les tumeurs osseuses malignes primitives Démarche diagnostique devant une tumeur osseuse Circonstances de découverte 1- La douleur Chez l’enfant, la douleur n’est pas toujours exprimée ou elle est sous estimée. Elle peut, lorsque la lésion siège au membre inférieur, se traduire par une boiterie. La douleur peut aussi être projetée (douleur de genou pour une tumeur de la hanche et inversement) ou une tumeur vertébrale peut être à l’origine d’une compression radiculaire, souvent traduite par une sciatique. Le type et l’horaire de la douleur peuvent être évocateurs de certaines lésions. Des douleurs nocturnes, térébrantes font plutôt penser à un processus malin, exceptées les classiques douleurs de l’ostéome ostéoïde qui sont nocturnes et calmées par l’aspirine. Il importe de ne pas négliger toute douleur inhabituelle chez l’enfant, en particulier les douleurs rachidiennes qui ne sont pas banales et doivent toujours être explorées. 2- La tumeur La découverte par un enfant ou sa famille d’une tuméfaction palpable est le mode habituel de révélation dans notre contexte. La tumeur est rarement diagnostiquée au stade de la douleur isolée. Par ailleurs, la perception d’une tuméfaction clinique est inconstante, n’est pas spécifique des tumeurs malignes et peut se voir dans certaines tumeurs bénignes (kyste osseux anévrysmal, ostéoblastome). A la différence des ostéosarcomes, les tumeurs d’Ewing s’accompagnent de tumeurs des parties molles, souvent, volumineuses, en particulier au niveau des os plats. 3- La fracture pathologique: La fracture pathologique est une fracture survenant sur une lésion préexistante. Elle révèle souvent les tumeurs kystiques et en particulier chez l’enfant les kystes essentiels. Les fractures consécutives à un traumatisme mineur sur un os fragilisé par une tumeur maligne ne sont pas exceptionnelles. Il faut y penser et examiner soigneusement la trame osseuse afin de ne pas immobiliser par une ostéosynthèse une lésion qui deviendrait évidente quelques semaines plus tard. Il faut éviter toute chirurgie sanglante sur la tumeur. Ces pièges sont à éviter d’autant plus qu’on trouve souvent à l’anamnèse une histoire de traumatisme révélateur. 4- Autres symptômes : • Les lésions du sacrum ou du bassin peuvent évoluer sans douleur jusqu’à provoquer des troubles moteurs ou sphinctériens par compression nerveuse ou mécanique. • Une tumeur costale à développement purement intra thoracique se manifeste par des troubles respiratoires ou par un épanchement pleural. • Une tumeur vertébrale peut se manifester par des signes de compression médullaire ou radiculaire. • Des signes généraux, en particulier de la fièvre, peuvent se voir dans les tumeurs d’Ewing. • Par ailleurs, la découverte peut être fortuite à l’occasion d’une radiographie faite pour une autre pathologie. 97 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc L’examen clinique L’examen physique est souvent banal et ne permet pas une orientation précise. Une fièvre, une inflammation locale orientent vers un sarcome d’Ewing ou une ostéite. Cet examen se doit d’être complet et attentif et ne doit jamais omettre une évaluation de la douleur de l’enfant pour adapter le traitement antalgique. La localisation de la tumeur peut orienter le diagnostic : les ostéosarcomes siégent essentiellement au niveau des métaphyses des os longs. Les localisations au genou (extrémité inférieure du fémur et extrémité supérieure du tibia ou du péroné sont les plus fréquentes, « près du genou et loin du coude ». Le sarcome d’Ewing est plus fréquemment localisé au niveau des os plats en particulier au niveau de l’aile iliaque et des côtes mais peuvent également intéresser les os longs. Dans ce cas, la diaphyse est plus souvent atteinte que la métaphyse. L’imagerie L’imagerie permet de différencier une tumeur bénigne d’une tumeur maligne, d’évaluer l’extension tumorale et de définir les facteurs pronostiques. • Des radiographies standard de face et de profil suffisent à évoquer ou à faire le diagnostic dans la majorité des cas. Ces radiographies doivent être de bonne qualité, prenant l’articulation sus et sous jacente. Elles doivent au mieux toujours être couplées à une radiographie pulmonaire. Leur analyse va permettre de préciser : - Le siège de l’image osseuse : - la majorité des tumeurs sont métaphysaires. - une localisation diaphysaire fait évoquer un sarcome d’Ewing. - les localisations épiphysaires doivent faire évoquer trois diagnostics d’ailleurs très rares chez l’enfant : chondrosarcome, chondroblastome ou une tumeur à cellules géantes - L’aspect de la tumeur : la première étape consiste à distinguer une tumeur maligne d’une tumeur bénigne pour laquelle une biopsie n’est pas toujours nécessaire (c’est le cas d’une dysplasie fibreuse, d’un fibrome non ossifiant, d’une exostose, d’un kyste osseux simple…). Les arguments en faveur d’une tumeur maligne sont : - une taille tumorale supérieure à 6 cm de diamètre au diagnostic - une matrice tumorale plus ou moins calcifiée ou ossifiée - des réactions périostées lamellaires, interrompues et perpendiculaires. Une apposition périostée en « bulbe d’oignon » est caractéristique d’un sarcome d’Ewing. Une réaction en «feu d’herbe» est fréquemment retrouvée dans les ostéosarcomes. Un triangle de Codman fait suspecter une tumeur maligne. - des destructions corticales et un envahissement des parties molles - une lésion développée de part et d’autre du cortex est presque toujours maligne - Le caractère ostéocondensant et/ou ostéolytique est en faveur d’un ostéosarcome. Une tumeur ostéolytique évoque plutôt une tumeur d’Ewing. • TDM / IRM Dans des situations rares les radiographies standard sont insuffisantes pour évoquer un diagnostic ; c’est le cas pour les tumeurs du rachis et des os plats ou la TDM et l’IRM permettent une analyse tridimensionnelle de la lésion et peuvent aider au diagnostic. 98 Les tumeurs osseuses malignes primitives Bilan d’extension tumorale locale Si l’aspect radiologique est en faveur d’une lésion maligne, la recherche de métastases et le bilan d’extension locorégionale doivent être pratiqués avant la biopsie. La tomodensitométrie (TDM) ou mieux, l’imagerie par résonance magnétique (IRM) est l’examen de choix pour évaluer l’extension locale d’une tumeur maligne. Cette évaluation est indispensable pour permettre au chirurgien de planifier son intervention en fonction ou non de d’une atteinte articulaire et de définir le niveau de résection osseuse. L’ensemble de l’os malade doit être soigneusement examiné à la recherche de petites métastases osseuses séparées de la tumeur primitive par du tissu sain (skip métastases) qui sont aisément détectées dans la cavité médullaire. Les rapports avec les vaisseaux, la peau et les tissus sous cutanés sont également bien étudiés. Bilan de l’extension tumorale à distance ou métastatique Une scintigraphie osseuse au technétium montre toujours une hyperfixation au niveau de la tumeur primitive. L’intérêt de cet examen réside surtout dans la recherche d’autres localisations osseuses. Le cliché de thorax et la TDM thoracique sont indispensables à la recherche de métastases pulmonaires. Environ 10 à 20% des ostéosarcomes sont métastatiques au diagnostic. Le siége des métastases est pulmonaire dans 90% des cas et osseux dans 10 % des cas. Dans le cas de la tumeur d’Ewing, la fréquence des métastases est plus élevée (20 à 30% des cas). Elles intéressent non seulement le poumon et l’os mais également la moelle osseuse et sont plus fréquentes chez les malades ayant une localisation pelvienne. Biopsie et diagnostic histologique La biopsie réalisée de préférence après le bilan d’extension, doit être faite : • par des mains expérimentées • de préférence par le chirurgien qui prendra ensuite en charge le traitement • dans un délai rapproché de 8 à 10 jours. Ce délai sera mis à profit pour les explorations complémentaires. • l’aspect histologique ne suffit pas toujours à lui seul pour poser avec certitude un diagnostic de tumeur osseuse maligne. Il faut toujours confronter l’examen histologique aux données cliniques et radiologiques pour établir le diagnostic dont dépend le traitement • le prélèvement biopsique doit parvenir à l’anatomo-pathologiste accompagné des renseignements cliniques et des images radiologiques représentatives. • le malade doit être référé au centre de traitement toujours accompagné des radiographies réalisées initialement et du bloc anatomopathologique (ou des lames) pour une relecture. Traitement L’amélioration du pronostic est liée à l’utilisation d’une chimiothérapie associée à un traitement local. La chimiothérapie initiale permet une prophylaxie des métastases et une diminution la taille de la tumeur primitive. Cette chimiothérapie est suivie d’un traitement local, chirurgie dans l’ostéosarcome et chirurgie associée ou non à la radiothérapie dans le sarcome d’Ewing. 99 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc La chirurgie est souvent conservatrice après la chimiothérapie. L’amputation reste nécessaire lorsque l’envahissement local des parties molles est important. La chirurgie est complétée d’une chimiothérapie adjuvante. La radiothérapie continue à avoir des indications dans les formes inopérables du sarcome d’Ewing mais elle est plus fréquemment utilisée en complément de la chirurgie pour assurer le contrôle loco- régional. Aspects particuliers de la prise en charge Prise en charge de la douleur : Le parcours d’un enfant atteint d’une tumeur osseuse maligne est caractérisé par une succession de phases pénibles, ayant chacune sa dimension douloureuse, altérant sa qualité de vie. La douleur qui dure a des conséquences physiques et psychologiques importantes. Un enfant ou un adolescent pris en charge pour une tumeur osseuse maligne sera confronté à de multiples situations douloureuses, que ce soit dans la période diagnostique, thérapeutique ou post-thérapeutique. L’évaluation de la douleur conditionne une prise en charge individuelle et adaptée. Ainsi, dés la première consultation, il faut penser à soulager et à traiter la douleur. Spécificité de la prise en charge des adolescents : Les tumeurs osseuses malignes sont des tumeurs de l’adolescent. Plus de la moitié des cas est diagnostiquée entre 10 et 14 ans et c’est le troisième cancer survenant chez les 10–24 ans. L’adolescence est une phase de changements biologiques, physiques et psychosociaux. La prise en charge d’adolescents malades nécessite les compétences d’une équipe spécialisée capable d’assurer des soins mais aussi une prise en charge psychologique adaptée tout au long de ce « parcours douloureux». Conclusion Les tumeurs osseuses malignes primitives restent rares ce qui rend leur diagnostic difficile et souvent tardif. Il faut y penser devant toute douleur osseuse localisée, inexpliquée, prolongée ou récidivante et réaliser des radiographies simples. Le diagnostic et le traitement de ces tumeurs sont urgents. Une tumeur ne s’accompagne d’une tuméfaction qu’à un stade déjà évolué. Il ne faut jamais hésiter à demander un avis spécialisé ou reconsidérer son diagnostic. La finalité est d’améliorer le pronostic de ces tumeurs chez nos enfants qui arrivent malheureusement et souvent à des stades avancés où la tumeur est déjà multi métastatique et où le traitement conservateur est impossible. La prise en charge des tumeurs osseuses malignes de l’enfant ne se conçoit qu’au sein d’un centre spécialisé et d’une équipe multidisciplinaire. Leur traitement est actuellement codifié et aucune improvisation ne sera au profit du jeune patient. Le traitement des tumeurs osseuses malignes est urgent. De la précocité du diagnostic et de la prise en charge dépend le pronostic. 100 LES TUMEURS GERMINALES MALIGNES DE L’ENFANT Saadia Zafad - Laila Hessissen Introduction Le terme de « tumeur germinale » regroupe une variété de tumeurs qui diffèrent par leur présentation clinique, leur histologie et leur biologie mais qui partagent toutes la même origine : les cellules germinales primitives (CGP). Elles constituent environ 4 % des tumeurs de l’enfant avec un premier pic d’âge avant trois ans et un second après 12 ans. Deux tiers d’entre elles environ sont bénignes. Les tumeurs germinales malignes ont connu une amélioration considérable de leur pronostic avec un taux de guérison qui dépasse actuellement les 80%. Embryogenese Les CGP constituent l’origine commune des spermatozoïdes et des ovules et donc de la lignée germinale. Elles sont mises en évidence à la deuxième semaine dans l’ectoderme primaire (épiblaste) de l’embryon humain (Fig. 1). Elles subissent une première migration extra embryonnaire dans l’endoderme de la vésicule vitelline. Depuis là et en passant à travers le mésentère, elles vont coloniser les crêtes génitales (futurs ovaires et testicules). Cette migration s’effectue entre la 4e et la 6e semaine. Une migration pathologique des CGP permet d’expliquer leur implantation dans des sites ectopiques (région sacrococcygienne, Rétro-péritonéale, médiastinale, intracrânienne, pinéale). 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. Cellules germinales primordiales Intestin postérieur Ectoderme Intestin antérieur Ebauche cardiaque Vésicule vitelline secondaire Endoderme (jaune) Mésoderme (rouge) Cavité amniotique Figure 1:Embryon de 4 semaines 101 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Histologie Les tumeurs germinales regroupent différents types histologiques qui reflètent l’étape de la différenciation à laquelle s’est arrêtée la cellule au moment de sa transformation maligne (Fig.2). Celleci peut intéresser des cellules qui sont restées au stade germinal (germinomes) ou des cellules qui se sont différenciées vers des aspects embryonnaires ou extra embryonnaires (tératomes). 1- Les germinomes (séminomes dans le testicule, dysgerminome dans l’ovaire), représentent seulement 15 % des tumeurs germinales chez l’enfant. Ils siègent préférentiellement dans l’ovaire, le médiastin antérieur et la région pinéale. 2- Les tumeurs du sinus endodermique ou du sac vitellin représentent la variété la plus fréquente chez l’enfant avec deux pics d’incidence chez le très jeune enfant (région sacrococcygienne) et l’adolescent (ovaire). Ces tumeurs secrètent l’alpha-foetoprotéine (α-FP) qui est un marqueur tumoral permettant le diagnostic de ces tumeurs et la surveillance sous traitement (Tableau I). AFP Non Séminome pur hCG/ßhCG Possible Carcinome embryonnaire Possible Possible Tératome Non Non T.Vitteline Oui Non Chorio-carcinome Non Oui Tableau I : Tumeurs Germinales Malignes et marqueurs biologiques 3- Les choriocarcinomes sont plus rares dont la composante syncytiotrophoblastique secrète la sous-unité ß de l’hormone chorionique gonadotrophique (ß HCG). Ce marqueur tumoral permet le diagnostic de ces tumeurs et la surveillance sous traitement. 4- Les carcinomes embryonnaires ne montrent pas de différentiation évidente en histologie et ils ne sont pas secrétants. 5- Les tératomes sont composés de tissus provenant de l’endoderme, du mésoderme (ossifications) et de l’ectoderme : à côté des formes complètement matures, de bon pronostic chez l’enfant, on distingue des formes avec composante maligne issue de l’un et/ou l’autre des 4 premiers groupes. Cellule germinale primitive Cellule germinale totipotente = Carcinome embryonnaire Cellule germinale indifférenciée Différenciation en structures extra embryonnaires Séminome = Dysgerminome = Germinome Au dépens du sac vitellin = Tumeur vitelline Différenciation en structures embryonnaires Au dépens du trophoblaste = Choriocarcinome Ectoderme, mesoderme et endoderme embryonnaire = tératome Figure 2 : Les différents types de tumeurs germinales en fonction du degré de différenciation 102 Les tumeurs germinales malignes de l’enfant Presentations cliniques La présentation clinique d’une TGM dépend de l’âge de l’enfant et du type histologique et de la localisation de la tumeur. Les localisations les plus fréquentes testiculaire ou ovarienne. Les autres localisations sont essentiellement sacro coccygiennes, médiastinales et cérébrales. (Tableau II) Siège Fréquence Âge Histologie nouveau-né > 2/3 bénins Signes d’appel troubles sphinctériens déformation de la fesse, masse au TR Sacrococcyx 40 % ovaire 30 % puberté 2/3 bénins douleurs et masse abdominale testicule 15 % < 2 ans 4/5 malins (AFP+++) gros testicule indolent intra-crânien (pinéale) 5% tout âge tous types paralysie de l’élévation du regard médiastin 5% tout âge tous types (ßHCG+) masse médiastinale antérieure Autres : rétro-péritoine vagin tête et cou 5% < 2 ans < 2 ans nouveau-né mixte malin bénin examen systématique hémorragies masse à la naissance Tableau II : Les principales présentations cliniques des tumeurs germinales de l’enfant Localisation testiculaire Les tumeurs testiculaires sont de types histologiques différents selon l’âge de survenue. Chez le nourrisson, la tumeur est souvent découverte précocement par la mère, par la palpation d’une bourse augmentée de volume. Ces tumeurs, vitellines sur le plan histologique, s’accompagnent d’un taux élevé d’α-FP. Chez l’adolescent, le diagnostic peut être fait avec plusieurs mois de retard, du fait de la négligence du patient et/ou des parents, ou du fait de la méconnaissance de ces tumeurs par le médecin consulté. Elles sont plus volumineuses et plus étendues. Il s’agit de tumeurs mixtes sur le plan histologique sécrétant de l’HCG et de l’α-FP. 103 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Une tumeur germinale peut également survenir sur un testicule ectopique. Dans ce cas, la palpation d’une bourse vide associée à une masse pelvienne ou inguinale ou à des douleurs abdominales doit faire évoquer le diagnostic. t Naissance t 0 à 4-5 ans t Adolescent et adulte jeune Tératome mature ou ± immature Tumeur vitelline pure ou Tératome mature / immature Séminomes ou tumeur mixte Localisation ovarienne Les tumeurs ovariennes surviennent essentiellement chez les adolescentes et les jeunes adultes et sont presque toujours mixtes et sécrétantes. Elles comprennent, en proportions diverses, l’ensemble des différentes composantes des tumeurs germinales malignes. Les séminomes ne représentent que 20% des tumeurs germinales malignes de l’ovaire. Elles sont longtemps asymptomatiques et, de ce fait, révélées tardivement par une augmentation de volume de l’abdomen et/ou des douleurs abdominales. Beaucoup plus rarement, elles se manifestent par un tableau d’urgence chirurgicale à l’occasion d’une torsion ou d’une rupture. La tumeur peut également être découverte devant une gynécomastie, une puberté précoce, des adénopathies ou de façon fortuite. Toute masse de l’ovaire doit être suspecte de malignité jusqu’à preuve du contraire Localisation sacro coccygienne Les tumeurs sacro coccygiennes sont de type histologique différent selon l’âge de survenue. Chez le nourrisson de moins de 2 mois, il s’agit le plus souvent de tératomes bénins. Toute tumeur découverte après cet âge sont fortement suspecte de malignité t <2 mois t 2 à 6 mois t > 6mois Tératome mature ou immature Tumeur maligne hautement probable Tumeure maligne contenant le plus souvent de la tumeur vitelline Selon leur développement, endo ou exo pelvienne, ces tumeurs sont révélées par l’apparition : • d’une tumeur dans le sillon inter fessier, • l’augmentation du volume d’une fesse, ou • des troubles du transit, 104 Les tumeurs germinales malignes de l’enfant • une rétention urinaire avec, éventuellement, une compression urétérale et hydronéphrose. Le toucher rectal permet de sentir une masse dure, bombant au niveau de la paroi postérieure du rectum. Localisation médiastinale Les tumeurs médiastinales sont, le plus souvent, détectées lors de problèmes respiratoires. On effectue une radiographie du thorax qui montre une opacité médiastino-pulmonaire souvent antérieure et pouvant contenir des calcifications. En cas de tumeur médiastinale, les dosages d’α-FP et d’HCG doivent être réalisées car il s’agit habituellement de tumeurs mixtes sécrétantes. Localisation cérébrale Elles surviennent essentiellement dans la région pinéale et supra sellaire. Les signes cliniques dépendent de la localisation et du volume tumoral. Les tumeurs pinéales se manifestent essentiellement par un syndrome d’hypertension intracrânienne alors que les TGM supra sellaires s’accompagnent souvent de signes d’hypopituitarisme ou de dysfonctionnement hypothalamique à type de diabète insipide ou de retard statural. Le diagnostic est posé par le dosage sanguin et/ou dans le LCR des marqueurs tumoraux ou par biopsie stéréotaxique. Autres localisations Elles sont exceptionnelles et peuvent se localiser au niveau du vagin, la région rétro péritonéale, le cou (tumeurs parapharyngées) et la face (orbite, nasopharynx, cavité buccale, joue). Le bilan initial Le bilan initial comprend : - le dosage de l’α-FP, de l’HCG et de la βHCG libre - une échographie et/ou un scanner de la localisation initiale, pour préciser l’extension tumorale locale. - la recherche de métastases pulmonaires (radiographie pulmonaire +/- scanner) et hépatique. - En cas de tumeur testiculaire, on explore les ganglions lombo-aortiques, en particulier de L2 par une échographie et un scanner, abdominaux. - En cas de tumeur sacro-coccygienne, on recherche des métastases vertébrales qui sont fréquemment associées à cette localisation par une IRM de la colonne lombo-sacrée et une scintigraphie osseuse. Stratégie therapeutique Les possibilités thérapeutiques La chirurgie initiale n’est souhaitable que si le bilan préopératoire permet d’espérer une chirurgie complète et non délabrante (localisations ovariennes et testiculaires), ou pour faire le diagnostic d’une grosse tumeur non sécrétante. Après la chimiothérapie, la chirurgie s’impose devant un reliquat tumoral. 105 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc La chimiothérapie a pris la première place dans le traitement des formes étendues. Les médicaments efficaces sont les sels de platine (Cisplatine, Carboplatine), la Vinblastine, l’Etoposide, la Bléomycine et l’Ifosfamide. Tous ces produits sont toujours donnés dans le cadre de poly chimiothérapies. Les indications de la radiothérapie sont de plus en plus restreintes. Elle trouve sa place dans les TGM cérébrales souvent inaccessibles à la chirurgie. Les indications thérapeutiques 1- En cas de tumeurs sécrétantes La chirurgie d’exérèse tumorale initiale n’est indiquée que si la tumeur est localisée et si l’exérèse complète peu mutilante parait possible d’emblée. Ceci concerne essentiellement les tumeurs gonadiques. Si l’exérèse est complète, seule une surveillance des marqueurs tumoraux est pratiquée (α-FP et/ou ßHCG). Ces marqueurs doivent se normaliser dans les 3 mois qui suivent l’opération. Dans le cas où ces marqueurs ne se normaliseraient pas, s’ils augmentent après normalisation ou si la baisse n’est que temporaire, la chimiothérapie devient nécessaire. La chimiothérapie est indiquée pour les tumeurs étendues d’exérèse initiale impossible (tumeurs extragonadiques, métastatiques, ascite…) ainsi que pour les tumeurs opérées d’emblée dont les marqueurs ne se sont pas négativés, ou dont l’exérèse a été incomplète. La chirurgie secondaire après chimiothérapie n’est indiquée que s’il n’y a pas eu de chirurgie initiale, s’il n’y a eu qu’une biopsie ou s’il persiste un résidu tumoral. Dans ces cas de figures, la chirurgie doit être la plus complète mais la plus conservatrice possible. Il faut toujours faire l’exérèse de l’organe atteint même en l’absence de résidu, exemples : • exérèse du coccyx en cas de tumeur sacro coccygienne • orchidectomie par voie inguinale si atteinte testiculaire • ovariectomie si atteinte ovarienne… 2- En cas de tumeurs non sécrétantes Il s’agit des tératomes immatures et des séminomes. Le traitement commence par l’exérèse de la tumeur, ce qui permet de porter le diagnostic, les marqueurs étant négatifs (sauf une éventuelle petite sécrétion d’HCG < 50 mUi/ml dans certains cas de séminomes). La chirurgie est complétée par de la radiothérapie ou la chimiothérapie. En conclusion Les TGM constituent un groupe hétérogène, de part les types histologiques, l’âge de survenue et la localisation initiale. Les marqueurs tumoraux sont un élément essentiel pour le diagnostic en tenant compte des variations liées à l’âge. Le pronostic est actuellement excellent grâce au traitement basé essentiellement sur la chirurgie qui doit être conservatrice et qui sera associée ou non à une chimiothérapie. 106 LE RETINOBLASTOME Mohammed Charif Chefchaouni Introduction Le rétinoblastome (RB) est une tumeur maligne intraoculaire qui touche le nourrisson et le jeune enfant. C’est la tumeur intra oculaire la plus fréquente chez l’enfant. Elle est unilatérale dans 2/3 des cas et bilatérale dans 1/3 des cas. La prise en charge d’un enfant atteint de RB est pluridisciplinaire et à vie ; elle est assurée par un ophtalmologiste, un oncologue pédiatre, un radiothérapeute, un généticien, un oculariste et le médecin de famille. Un diagnostic précoce permet la guérison dans 90% des cas. Epidémiologie L’incidence est identique dans tous les pays : 1 cas pour 18000 naissances. Au Maroc, l’incidence est estimée à 50 nouveaux cas par an dont la plupart sont des formes sporadiques. A l’unité d’oncologie pédiatrique de l’Hôpital d’Enfants de Rabat, le RB représente 74% de toutes les tumeurs orbitaires et 2% parmi les nouveaux cas de cancers tous types confondus. Génétique • Le gène du RB est un antioncogène situé sur le chromosome 13. Lorsque le gène est intact, il empêche le développement des cellules cancéreuses même si un seul allèle est présent. • Le RB unilatéral est habituellement non héréditaire. Mais il faut savoir que 15% des enfants porteurs d’un RB unilatéral sont porteurs du gène et peuvent le transmettre à leur descendance. • Les formes bilatérales et/ou pluri focales (plusieurs tumeurs dans le même œil) sont d’origine génétique. • Lorsque un allèle manque au niveau des cellules germinales, toutes les cellules de l’organisme n’ont qu’un seul allèle et chaque fois qu’une cellule perd son deuxième allèle elle se transforme en cellule cancéreuse ; c’est pour cela qu’il y a un risque plus élevé que la moyenne de développer un deuxième cancer après le RB chez ces enfants. 107 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Circonstances de découverte • L’âge de découverte du RB unilatéral est entre 2 et 3 ans, les formes bilatérales sont découvertes en général avant 1 an. • Le signe d’appel le plus fréquent est la leucocorie. C’est un reflet blanc de la pupille remarqué par l’entourage, parfois sur des photos prises avec flash. Son signalement doit être pris tôt au sérieux par le médecin, même si il ne le trouve pas. On doit alors faire pratiquer par un ophtalmologiste expérimenté un examen minutieux de la totalité des deux rétines du nourrisson, et ce, dans des conditions favorables avec une bonne dilatation des pupilles et une anesthésie générale. • Le strabisme est le deuxième signe d’appel après la leucocorie, il traduit l’existence d’une tumeur intéressant la macula et responsable d’une perte de la fonction visuelle centrale. Il est parfois très précoce et souvent interprété à tort comme une faiblesse passagère des muscles oculo-moteurs. Il est donc obligatoire de faire un fond de l’œil à tout enfant strabique. • Dans les pays développés, la quasi totalité des rétinoblastomes est diagnostiquée lorsque la tumeur est encore endo oculaire. • Au Maroc, les extensions extrasclérales révélatrices se voient encore, elles sont responsables d’une exophtalmie avec leucocorie voir buphtalmie. • Certaines formes rares peuvent se manifester sous formes d’uvéites ou de cellulites orbitaires aiguë avec douleurs, chémosis et œdème des paupières. Diagnostic positif Il repose essentiellement sur 3 éléments : • L’examen du fond de l’œil est réalisé après dilatation pupillaire et de préférence sous anesthésie générale. Le RB se présente sous forme de lésions blanches, saillantes qui envahissent progressivement la cavité vitréenne. • L’échographie montre une masse tissulaire intavitréenne avec présence de calcifications intra tumorales. • La TDM montre l’existence de masses intra-oculaires prenant le contraste après injection et montre surtout les calcifications tumorales très évocatrices du rétinoblastome. Elle permet également dans les formes évoluées de mettre en évidence un envahissement du nerf optique ou une extension extra sclérale. Diagnostic différentiel Le diagnostic différentiel se fait avec les autres causes de leucocorie : cataracte congénitale, la persistance du vitré primitif, le décollement de rétine, la fibroplasie rétrolentale et les autres tumeurs intra oculaires. Traitement Ce traitement a deux buts : préserver la vie et préserver la vue. • L’énucléation, bien que mutilante, a contribué à la transformation du pronostic vital de l’affection. Elle est indiquée dans le traitement des tumeurs évoluées inaccessibles aux traitements 108 Le retinoblastome conservateurs, elle consiste à enlever le globe oculaire après désinsertion des muscles oculomoteurs et section du nerf optique. Le volume du globe est remplacé par une bille. Après 6 semaines l’oculariste peut confectionner une prothèse après moulage de la cavité conjonctivale. • La radiothérapie externe : ce traitement efficace a permis à de nombreux enfants de conserver une vision utile, malheureusement au prix de séquelles majeures, c’est pour cette raison que l’orientation thérapeutique actuelle se fait vers une diminution des irradiations externes. Actuellement elle reste indiquée dans les tumeurs volumineuses inaccessibles aux traitements conservateurs même après chimiothérapie de réduction et lorsqu’il y a un envahissement vitréen diffus. • La chimiothérapie : - Chimiothérapie néoadjuvant qui permet une réduction de la masse tumorale initiale ce qui la rend plus accessible à un traitement conservateur local. - Chimiothérapie complémentaire, permet d’éviter les métastases après énucléation. - Plus récemment la chimiothérapie est utilisée comme traitement conservateur exclusive, surtout à défaut de traitement local. • Le traitement local est plus performant depuis l’avènement de la thermo-chimiothérapie, qui consiste à réaliser une perfusion de carboplatine suivie dans les deux heures par un traitement de la tumeur par le laser diode. • Les autres traitements locaux sont représentés par : La cryothérapie : elle consiste à geler la tumeur par une cryode, elle s’applique aux petites tumeurs antérieures. La curiethérapie : elle est utilisée pour les tumeurs périphériques non accessibles à une cryothérapie. • Les indications thérapeutiques dépendent de la taille de la tumeur, de son siége, de l’uni ou de la multiplicité des foyers tumoraux et enfin de l’existence d’une extension vitréenne, choroïdienne ou extra oculaire associée. • Dans le RB unilatéral, l’énucléation est souvent le moyen thérapeutique de choix. L’examen anatomopathologique conditionne ensuite le pronostic et l’attitude thérapeutique. Trois situations peuvent se présenter : - Pas d’envahissement du nerf optique ou envahissement de sa portion pré laminaire et/ou envahissement choroïdien minime ou absent : pas de traitement adjuvant. - Un envahissement choroïdien massif et ou de la chambre antérieure ainsi qu’un envahissement du nerf optique rétro laminaire nécessitent une chimiothérapie adjuvante : 2 cycles alternés Carboplatine - Etoposide et CADO (soit vincristine, cyclophosphamide, adriamycine). - Envahissement de la tranche de section du NO et/ou de ses gaines méningées et/ou envahissement extra-scléral : radiothérapie orbitaire en plus de la chimiothérapie. Le pronostic vital est bon dans les formes endo-oculaires, le pronostic fonctionnel dépend du type de traitement conservateur utilisé et de la taille et du siége de la tumeur par rapport à la macula. Surveillance et conseil génétique Le risque de récidives tardives, de complications thérapeutiques ou d’un deuxième cancer dans les formes bilatérales impose une surveillance à long terme. 109 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc La surveillance ophtalmologique comporte la surveillance des yeux traités, le contrôle systématique des yeux controlatérales pour les rétinoblastomes unilatéraux et la surveillance des sujets à risque. Le conseil génétique a pour but d’informer les sujets atteints et leurs apparentés du risque pour leur descendance de développer une tumeur, et de déterminer les enfants qui doivent être surveillés pour permettre un traitement précoce. Le calcul de risque repose sur les règles de la dominance autosomique avec pénétrance du gène de 90%. • Formes familiales : - Sujet atteint, ayant un parent ou un premier enfant atteint : le risque pour sa descendance de développer une tumeur est de 45%. - Sujet non atteint, ayant un parent et un germain atteint : la probabilité d’être porteur asymptomatique étant de 9%, le risque global pour sa descendance est d’environ 4%. • Formes sporadiques bilatérales : - Sujet atteint, le risque pour sa descendance sera de 45%. - Parents ayant un 1er enfant atteint : il y a un risque pour qu’un des parents soit porteur d’une mutation non exprimée avec un risque pour une grossesse ultérieur de 5%. • Formes sporadiques unilatérales : - Sujet atteint : le risque pour la descendance est estimé à 5%. - Pour les parents, le risque pour une grossesse ultérieure pourrait être de l’ordre de 1%. Dépistage et diagnostic précoce La présence d’une leucocorie chez un nourrisson doit attirer l’attention des parents et du personnel médical et paramédical, d’ou l’intérêt d’un programme de sensibilisation par exemple lors des journées nationales de vaccination. Dans les formes familiales, le dépistage permet un diagnostic précoce et donc un traitement conservateur. Si l’un des parents présente un RB bilatéral, il y a 50 % de risque de le transmettre à chaque enfant. On conseille une surveillance mensuelle du fond de l’œil de tous les enfants depuis leur naissance, sauf si l’étude chromosomique confirme avec certitude que le nouveau né n’est pas porteur de l’anomalie génétique. De même, si l’un des parents est porteur d’un RB unilatéral, une étude chromosomique et/ou une surveillance sont indiquées. Si un enfant présente un RB, les frères et sœurs doivent être surveillés. Conclusion Dans les pays développés le rétinoblastome est une maladie curable dans 95% des cas et la préservation d’une fonction visuelle de l’œil atteint devient la préoccupation thérapeutique. Au Maroc, la situation s’améliore progressivement grâce au travail d’équipe de tous les intervenants en oncologie pédiatrique, cependant le retard au diagnostic et par conséquent le stade avancé des tumeurs nécessite souvent un traitement chirurgical mutilant associé à un traitement complémentaire lourd et coûteux. Pour améliorer cette situation, nous insistons sur la sensibilisation de la population, des infirmiers, des généralistes et des pédiatres sur la gravité de cette maladie, afin d’en reconnaître les signes du début que sont la leucocorie et le strabisme et d’orienter l’enfant rapidement vers un centre spécialisé. 110 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Soins de support 111 LE SYNDROME DE LYSE TUMORALE Mohammed Khattab Définition Le Syndrome de Lyse Tumorale (SLT) associe une hyperuricémie, une hyperkaliémie et une hyperphosphorémie (et secondairement une hypocalcémie). Ces anomalies métaboliques peuvent conduire à une insuffisance rénale aigue et des troubles du rythme cardiaque mettant en jeu le pronostic vital. Le SLT est dû à la lyse brutale et massive des cellules malignes et à la libération de leur contenu dans les espaces extra-cellulaires (potassium, acide urique, phosphore). Physiopathologie Le SLT se voit 12 à 72 heures après le début de la chimiothérapie. Parfois, il se manifeste spontanément avant tout traitement. L’hyperuricémie est dûe au catabolisme des acides nucléiques des cellules lysées en acide urique. Très peu soluble dans les urines, celui-ci précipite dans le parenchyme rénal, les tubules distaux et les canaux collecteurs. La précipitation est d’autant plus importante que les urines sont concentrées et acides. Les conséquences sont une néphropathie uratique et une lithiase xanthique. L’hyperphophorémie aboutit à la formation de complexes de phosphates de calcium entrainant une hypocalcémie. L’insuffisance rénale aiguë peut-être causée par une hyperuricémie, une infiltration rénale maligne, un obstacle tumoral à l’écoulement urinaire ou une sous perfusion rénale. Cette dernière est secondaire aux vomissements, aux hémorragies, à l’hypoprotidémie ou à la perte des liquides dans l’ascite et l’épanchement pleural. L’hypoprotidémie peut-être générée par la perte des protéines dans les épanchements, une anorexie ou des troubles hépatiques. Etiologies Le SLT se voit essentiellement dans : • les leucémies aigues lymphoblastiques hyperleucocytaires > 100.000 GB/mm3, ou hypertumorales (polyadénopathies et hépatosplénomégalie importante, néphromégalie, ascite et pleurésie, élargissement médiastinal) 113 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc • les lymphomes non hodgkiniens abdominaux de Burkitt étendus • les lymphomes non hodgkiniens médiastinaux Le SLT est très rare dans les autres hémopathies et tumeurs solides. En règle générale, plus la masse tumorale est étendue, sa vitesse de prolifération importante, et la maladie chimiosensible, plus le risque de SLT est accru. Les autres facteurs de risque du SLT sont un taux initial élevé de LDH, uricémie, oligurie, insuffisance rénale, et un âge avancé. Diagnostic clinique Le SLT peut être asymptomatique. Les signes cliniques apparaissent rapidement après le début de la chimiothérapie : • signes précoces de l’hyperuricémie: nausées, vomissements, diarrhée, anorexie. • signes neuro-muculaires: crampes, paraesthésies distales, troubles digestifs, asthénie, hypotonie, aréfléxie, apathie, torpeur, parfois convulsions et coma. • signes rénaux: oedèmes, oligurie, anémie, troubles du rythme. • mort subite, souvent due à l’hyperkaliémie Diagnostic biologique • LDH très élevée • Hyperuricémie, hyperkaliémie, hyperphosphorémie, hypocalcémie. Bilan initial Il est systématique chez tout patient à risque de SLT. • NFS ; • Ionogramme sanguin, urée, créatinémie, uricémie, phosphorémie, calcémie; • Albuminémie; • Ionogramme urinaire; • ECG si kaliémie > 6mEq/l • Echographie ou scanner si masse abdominale ou pelvienne. Prévention et traitement curatif La prévention du SLT est capitale et doit être précoce et soutenue. La chimiothérapie ne doit être démarrée que 12 à 24heures après les mesures suivantes : Hyperdiurèse alcaline Trois à 4l/m2/j ou 200cc/kg/j chez le nourrisson ; 2/3 Sérum Glucosé 5% et 1/3 Sérum Bicarbonaté. Il faut s’abstenir d’un apport potassique et calcique les 3 premiers jours ou jusqu’à ce que le déficit en Ca++ et K+ soit symptomatique. L’hyperdiurèse est à poursuivre jusqu’à la réduction de la masse tumorale. 114 Le syndrome de lyse tumorale Lutte contre l’hyperuricémie • Allopurinol (Zyloric®) per-os 10 mg/kg/j en 3 prises (250 à 500 mg/m2/j sans dépasser un maximum de 800 mg) pendant 7 à 10 jours. Les fortes doses peuvent conduire à une néphropathie xanthique. • Ou mieux l’urate-oxydase IV (Uricozyme®) ; Uricase®). Dans ce cas, l'alcalisation des urines est inutile. • Ou mieux encore : rasburicase 0,20 mg/kg /j x 5j. 1 perfusion/j en 30 min après dilution dans 50 ml de NaCl 0.9% (contre-indiquée si allergie ou déficit en G6PD). L’alcalinisation des urines est également inutile. Surveillance clinique et biologique durant toute la période de risque de SLT • Mesure du poids 1 à 2 fois /j; • Examen physique, plusieurs fois par jour: tension Artérielle, signe de Chvostec, signe de Trousseau, troubles du rythme, signes de tétanie, oedèmes; • Diurèse 400cc/m2 et pH urinaire ≥ 7 toutes les 4 heures; • Monitorage cardiaque (scope) sinon ECG (à la recherche d’Onde T pointue et QRS large dans les hyperkaliémies, élargissement du QT dû à l’hypocalcémie, arythmie). • Ionogramme sanguin, urée, créatininémie, uricémie, calcémie, phosphorémie, 2 à 3 fois par jour; • Ionogramme urinaire, 1 fois par jour. - Les bicarbonates doivent être arrêtés dès que leur taux sérique dépasse 30 mEq/l ou que le pH urinaire est supérieur à 7.5 ou que l’uricémie devient normale, sinon il y a un risque de néphropathie (calculs de xanthine et d’hypoxanthine ; cristallisation du complexe phosphate de calcium) - Il faut se méfier de la pseudohyperkaliémie sans anomalies cardiaques sur le scope ou l’ECG. Elle est dûe à la lyse des GB, GR et plâquettes dans les LAL hyperleucocytaires. Dans ce cas, il faut doser le K+ plasmatique et non sérique. - Il faut adapter la réanimation en fonction des paramètres cliniquo-biologiques de surveillance, et rajouter du NaCl à l’hydratation en cas de vomissements, fièvre ou diarrhée. Une diurèse normale n’exclue pas une insuffisance rénale. - En l’absence de réponse à la diurèse ou d’installation d’une insuffisance rénale, il faut donner le furosémide IV 0,5 à 1mg/kg/4-8H. Cependant avant d’administrer les diurétiques, il faut s’assurer que le patient est correctement hydraté et qu’il n’est pas en hypovolémie. Il faut corriger une éventuelle hypoalbuminémie. - S’il y a oligurie et insuffisance rénale avancées, il faut procéder à une hémodialyse ou à défaut, une dialyse péritonéale. - S’il y a un éventuel obstacle à l’écoulement urinaire, autre cause d’insuffisance rénale (diagnostic différentiel avec le SLT), il faut faire un sondage urinaire. Conclusion Le SLT est une urgence métabolique extrême à l’origine d’une grande mortalité et morbidité. Il se voit essentiellement dans les LAL hyperleucocytaires et lymphomes non hodgkiniens de Burkitt étendus et médiastinaux. Il faut le reconnaître et le prévenir à temps, selon une réanimation rigoureuse collant à la clinique, la biologie et la physiopathologie de ce syndrome. 115 LA DOULEUR CHEZ L’ENFANT ATTEINT DE CANCER Sifeddine Nejmi Introduction Le profil de la douleur cancéreuse en pédiatrie est différent de celle du cancer de l’adulte. Soixante à soixante-dix pour cent des adultes atteints de cancer ont des douleurs en rapport avec le cancer. Chez l’enfant cancéreux, la douleur directement liée à la maladie cancéreuse ne survient que dans 25% des cas. Cette douleur est le plus souvent secondaire aux traitements anti-cancéreux (chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie) ou induite par des actes aigus invasifs à visée diagnostique ou thérapeutique. Etiologies des douleurs chez l’enfant cancereux L’enfant, au cours de sa maladie, ne subit pas une mais des douleurs d’étiologies différentes : 1. Douleurs directement liées au cancer : Elles surviennent par infiltration tumorale directe des tissus de l’organisme. Les douleurs par envahissement des structures osseuses (ostéosarcome ou sarcome d’Ewing) ou nerveuses (tumeurs du système nerveux central) sont les plus fréquentes. 2. Douleurs liées aux traitements : la douleur des mucites chimio ou radio-induites est particulièrement invalidante. Les neuropathies périphériques sont secondaires aux chimiothérapies principalement la Vincristine et sont doses dépendantes. 3. Douleurs liées aux actes aigus invasifs : les douleurs interviennent dès la première hospitalisation lors des explorations diagnostiques (prélèvements sanguins, biopsies ostéo-médullaires, myélogrammes, ponctions lombaires …). Examen d’un enfant cancereux potentiellement douloureux La douleur est partout en cancérologie pédiatrique chez l’enfant, toutefois les enfants manifestent une certaine atonie psychomotrice, ils se plaignent peu ce qui rend le dépistage difficile. • Le but de l’examen clinique d’un enfant cancéreux potentiellement douloureux est de rechercher : - les signes directs de douleur : position antalgique au repos, protection spontanée des zones douloureuses, attitude antalgique dans le mouvement, contrôle exercé par l’enfant quand on le mobilise, réaction à l’examen des zones douloureuses; 116 La douleur chez l’enfant atteint de cancer - les signes d’expression volontaire de la douleur : plaintes somatiques, localisations par l’enfant des zones douloureuses; - les signes d’atonie psychomotrice : manque d’expressivité, désintérêt pour le monde extérieur, lenteur et rareté des mouvements. • La conduite de l’examen clinique de l’enfant cancéreux st la suivante : - Le regarder pour voir comment il entre dans la salle, comment il s’installe, quelle position il prend ou il conserve ; le regarder avant d’entrer en contact verbal ou corporel. Utiliser le jouet comme premier médiateur. - L’écouter, lui et ses parents. C’est facile lorsque l’enfant peut s’exprimer, car l’interrogatoire est alors dirigé par des mots. - L’examiner : l’habillage et le déshabillage seront le plus possible effectués par les parents et il sera noté scrupuleusement les zones de blocage, les évitements, les positions antalgiques. L’examen est progressif, complet, comparatif, répété afin de s’assurer de la permanence du signe. La sensibilité est examinée des zones les plus superficielles aux plus profondes, puis les masses musculaires, les insertions tendineuses, les articulations, les os, sont méthodologiquement examinés. • L’évaluation de la douleur fait appel aussi à certains outils : règles, grilles, dessins représentatifs corporels. Traitements antalgiques Généralités et règles fondamentales Les médicaments antalgiques sont classés en fonction de trois paliers thérapeutiques de la classification de l’OMS selon leur puissance antalgique : • Palier 1 : antalgiques non opioïdes (paracétamol et anti-inflammatoire non stéroïdiens) • Palier 2 : antalgiques opioïdes faibles tel la codéine. • Palier 3 : antalgiques opioïdes forts dont le chef de file est la morphine. La puissance de l’antalgique doit être adaptée à l’intensité de la douleur ressentie par l’enfant. Les médicaments antalgiques doivent être prescrits de façon systématique (et non à la demande), à horaires fixes et à posologies déterminées en fonction du poids et de l’âge de l’enfant. Il faut privilégier la voie orale, qui demeure la plus facile à utiliser. Médicaments antalgiques des douleurs nociceptives • Palier 1 : antalgiques non opioïdes - Paracétamol : la posologie actuellement recommandée par voie orale est de 15 mg/kg toutes les 6 heures. - Ibuprofène : disponible sous forme de sirop 20mg/ml (AMM à partir de 6mois). La posologie est de 10 mg/kg toutes les 8 heures (soit 30 mg/kg/j). • Palier 2 : antalgiques opioïdes faibles - Codéine : seule, elle est disponible sous forme de sirop (Codenfan ® 1 ml = 1 mg) (AMM à partir d’un an). La posologie est de 0.5 à 1 mg/kg toutes les 6 heures (sans dépasser 6 mg/kg/j). Le sirop est accompagné d’un dispositif gradué de 1 à 15 mg. 117 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc - Codéine associé au paracétamol : une seule présentation est actuellement disponible au Maroc sous forme de comprimés contenant 400 mg de paracétamol et 20 mg de codéine (Codoliprane ®) (AMM à partir de 6 ans et 14 kg). La posologie est de ½ comprimé pour 15 kg toutes les 4 heures (sans dépasser 6 comprimés par jour) • Palier 3 : antalgiques opioïdes forts La morphine est l’antalgique de choix du palier 3 : • La morphine orale à libération immédiate : aucune forme orale à libération immédiate : au Maroc, il existe des comprimés sécables (Sevrédol). Cependant, une préparation magistrale à base d’ampoules injectables de chlorydrate de morphine peut être réalisée hors AMM pour obtenir un « sirop » de morphine orale à 0.5, 1 ou 2 mg/ml en l’édulcorant par du sirop de grenadine. La posologie initiale est de 0.2 mg/kg toutes les 4 heures (soit 1.2 mg/kg/j). • La morphine orale à libération prolongée ou retard : une seule forme galénique existe au Maroc (Moscontin ® 10, 30, 60 et 100 mg). Les plus petits comprimés étant dosés à 10 mg, la dose journalière minimale est de 20 mg. Le comprimé s’adresse donc en début de traitement à des enfants de 20 kg (en général à partir de 6 ans), en situation chronique, capables d’avaler (et non de croquer ou d’écraser) les comprimés. Médicaments antalgiques des douleurs neuropathiques Les douleurs neuropathiques nécessitent l’utilisation de molécules plus spécifiques : • Les antidépresseurs : sont indiqués dans les douleurs neuropathiques permanentes à type de brûlures. L’amitriptyline (Laroxyl ®) est utilisé à la dose initiale de 0.3 mg/kg pour atteindre progressivement la dose de 1 mg/kg/j. • Les anti-épileptiques : sont indiqués dans les douleurs neuropathiques intermittentes en salve (décharges électriques). Ce sont le clonazépam (Rivotril ®) et la carbamazépine (Tégrétol®). Prévention de la douleur liée aux gestes invasifs Les douleurs liées aux gestes invasifs et répétitifs doivent être prévenus. Cela est possible en utilisant seuls ou en association : • La crème EMLA ® (Euretic Mixture of Local Anesthesics) : L’indication de choix de la crème EMLA ® est la ponction veineuse, mais elle ne doit pas se limiter à cette seule indication. Elle peut être utilisée pour la ponction de chambre implantable, la ponction lombaire. • Le MEOPA (Mélange Equimolaire Oxygène Protoxyde d’Azote) : est un gaz inodore permettant d’obtenir une analgésie de surface pour les gestes douloureux de courte durée, tels que les ponctions lombaires ou les myélogrammes. Conclusion L’enfant cancéreux est confronté tout au long de l’évolution de sa maladie et de son traitement à de multiples évènements douloureux qui diminuent considérablement sa qualité de vie. La douleur de l’enfant cancéreux est un symptôme habituel que les soignants doivent prendre en charge quotidiennement. 118 TRANSFUSION EN ONCOLOGIE PEDIATRIQUE Mohammed Khattab L’anémie, la thrombopénie et leurs conséquences peuvent s’observer à différentes phases de la prise en charge des cancers. Elles sont dûes à deux grands mécanismes : • Infiltration de la moelle osseuse par des blastes (leucémies, lymphomes) ou cellules métastatiques (neuroblastome,…) • Chimiothérapie et / ou radiothérapie. Transfusion érythrocytaire L’anémie est notée lors du diagnostic du cancer dans 2/3 des cas et présente chez 80% des malades sous chimiothérapie. Elle est habituellement de type normochrome normocytaire. Quand faut-il transfuser? L’anémie s’installe progressivement. Elle est habituellement plus tolérée chez l’enfant que chez l’adulte. C’est pour cette raison que les cures de chimiothérapie sont en général espacées de 1 à 4 semaines selon leur intensité pour permettre à la moëlle osseuse de récupérer ses capacités. La transfusion n’est donc indiquée que lorsque l’anémie est mal tolérée ou quand elle est associée à un état morbide (problème cardiaque ou pulmonaire). On recommande comme seuil transfusionnel un taux d’Hb à 7 ou 8g/dl au début d’une nouvelle cure de chimiothérapie ou radiothérapie. Remarque importante: En cas d’hyperleucocytose > 100.000/mm3, il faut éviter la transfusion jusqu’à réduction des GB en dessous de 50.000/mm3. Sinon l’hyperviscosité sera aggravée de leucostase avec des troubles neurologiques et pulmonaires (hypoxie, tachypnée, dyspnée, désorientation, agitation, convulsions ou coma). Quel produit transfuser ? C’est le culot globulaire (CG) dit aussi concentré érythrocytaire qui doit être utilisé pour corriger l’anémie. Chaque fois que c’est possible, ce CG doit être phénotypé (rhésus et kell) et déleucocyté pour éviter les problèmes d’allo immunisation érythrocytaires et plâquettaires, les réactions transfusionnelles fébriles et les infections. 119 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Quelle quantité transfuser ? La quantité à transfuser doit être calculée selon l’une des deux règles suivantes: • (Hb désirée – Hb patient) x Poids en kg x 3 • 10 à 20 cc/kg de poids arrondi à l’unité pour éviter la déperdition du sang. En général, chaque unité (poche) de CG contient 200 à 250 cc. 10cc/kg de CG transfusés augmentent l’Hb de 2 à 2,5 g/dl. Il n’est pas indispensable que l’Hb désirée dépasse 10g. La transfusion doit s’étaler sur une durée de 4 heures (ou plus en cas de problème cardiaque ou d’anémie sévère). Transfusion plaquettaire La thrombopénie est omniprésente dans les leucémies et chez les malades sous chimiothérapie. Quand faut-il transfuser? L’évaluation du risque hémorragique ne se base pas uniquement sur le taux des plaquettes, mais également sur la recherche des signes hémorragiques (pétéchies, épistaxis, hématurie,…). Il faut toujours s’assurer de l’absence d’une coagulation intravasculaire disséminée (CIVD) qui nécessite un traitement spécifique. En général, il faut prescrire une transfusion plaquettaire : • quand le taux des plaquettes est < à 10.000/mm3 • quand il est compris entre 10.000 et 20.000/mm3, mais avec en plus: - des signes hémorragiques cutanéo-muqueux; - des facteurs aggravants: fièvre, sepsis, troubles de l’hémostase, hyperleucocytose > 100.000 GB/mm3; - avant certaines explorations (myélogramme, biopsie ostéo-médullaire, ponction lombaire). Néanmoins, il faut être prudent dans deux types de cancers où la transfusion plaquettaire doit être prophylactique et curative : les leucémies aigues myéloblastiques en cours d’induction où le taux des plaquettes doit être maintenu au-dessus de 20.000 à 30.000/mm3 et les tumeurs cérébrales malignes où ce taux doit être > 50.000/mm3. De plus, la première ponction lombaire du bilan d’extension des leucémies aigues lymphoblastiques requiert 100.000 Plaq/mm3. A noter qu’une chirurgie majeure nécessite plus de 50.000 Plaq/mm3, tandis qu’une chirurgie mineure (pose de cathéter veineux central, extraction dentaire, trachéotomie) réclame plus de 20.000 Plaq/mm3. Quels produits transfuser ? Il y en a deux qui diffèrent par la qualité et l’indication. • Concentré standard plaquettaire (CSP) issu de la double centrifugation d’une unité de sang total prélevée de façon classique chez un donneur. • Concentré unitaire plaquettaire (CUP) obtenu par cytaphérèse, dont 200 à 300 ml équivalent à 6-10 CSP. 120 Transfusion en oncologie pediatrique Au centre de transfusion, ces produits doivent être conservés 5 jours au maximum à température ambiante (20-24°) sous agitation horizontale douce et continue. Il est souhaitable de transfuser des plaquettes dès leur réception dans l’unité clinique. Comme chez tous les malades atteints de cancers et sous chimiothérapie, les concentrés plaquettaires doivent être déleucocytés pour prévenir les réactions transfusionnelles. Quelle quantité transfuser ? En principe, 10 ml de concentrés plaquettaires/kg augmentent le taux des plaquettes de 50 à 100.000/mm3. Il faut transfuser 1 CSP par 5 à 10kg de poids corporel. Cette quantité est à augmenter de 1/3 en présence de fièvre, infection, CIVD ou maladie hépatique. La transfusion se fait en 30 à 60 mn dont il faut surveiller le premier quart d’heure pour déceler d’éventuelles réactions adverses : fièvre, réactions allergiques, transmission d’infections virales et bactériennes, allo-immunisation. Moyens adjuvants Si un saignement ne tarit pas complètement sous transfusion plaquettaire et après avoir été assuré de l’absence de troubles de la coagulation, on peut donner : - un agent antifibrinolytique, tel l’acide epsilon-aminocaproïque (hemocaprol) qui contribue au maintien du caillot en cas d’hémorragie muqueuse. - Desmopressine ou DDAVP (minirin) qui renforce l’adhésion plaquettaire à l’e Il ne faut pas oublier de comprimer l’endroit de la ponction veineuse, lombaire ou myélogramme pendant 5 à 15 mn. En cas de thrombopénie, il faut toujours proscrire l’acide acétyl-salicilique, l’ibuprofene et tout autre anti-inflammatoire non stéroïdien. Conclusion La transfusion sanguine est un acte courant lors du diagnostic et au cours du traitement de la maladie. Les indications doivent se baser sur les principes cités dans ce texte pour lutter contre l’anémie mal tolérée et l’hémorragie patente ou risquée. Les bénéfices en coût et effets adverses sont à mesurer. 121 LES SOINS PALLIATIFS EN ONCOLOGIE PÉDIATRIQUE Laila Hessissen Les cancers de l’enfant ne représentent qu’un faible pourcentage du total des cancers. Des progrès importants ont été faits dans ce domaine et actuellement le cancer de l’enfant est considéré comme une maladie curable avec un taux de guérison qui peut atteindre 75%. On estime donc qu’environ un tiers à un quart des enfants décèdera de son cancer ou des complications toxiques liées aux traitements. Cette constatation introduit une phase particulière de la prise en charge de l’enfant cancéreux qui est celle des soins palliatifs, véritable défi professionnel et éthique pour les médecins en général et les oncologues pédiatres en particulier. Aux problèmes liés aux soins palliatifs en général vont s’ajouter ceux spécifiques à l’âge : la souffrance liée à cette mort prématurée, la difficulté de définir le rôle décisionnel des parents et de l’enfant et le problème poignant de discuter avec un enfant de sa propre mort. les soins palliatifs : une véritable philosophie des soins Les soins palliatifs doivent s’inscrire dans la continuité avec les soins curatifs. La médecine palliative n’est pas une médecine d’abandon. On peut distinguer deux phases dans l’accompagnement d’un enfant en fin de vie : 1- La première est celle de l’échec des thérapeutiques à visée curative ou le constat de complications toxiques incurables. Il devient alors nécessaire de prendre la décision difficile d’arrêter les traitements agressifs et d’entrer dans une phase palliative du traitement. 2- La deuxième phase s’étend de la décision d’entrer en soins palliatifs au décès de l’enfant ; elle peut durer plusieurs mois, voire plusieurs années. Le concept de la mort chez l’enfant Une fois la nécessité des soins palliatifs reconnue par les soignants, il va se poser le douloureux problème de l’approche de l’enfant quant à l’explication de sa mort imminente. La conceptualisation de la mort se développe très progressivement dans l’enfance : • Avant l’âge de trois ans, l’enfant n’a aucune notion de la mort. Il réagit aux privations et à la séparation qui sont perçues comme une ″mort″. • Entre deux et six ans, c’est probablement ce qu’il craint le plus parmi tous les phantasmes qui l’assaillent ; il pense que la mort est temporaire et réversible comme le sommeil. 122 Les soins palliatifs en oncologie pédiatrique Il croit que ses idées ou actions peuvent causer la mort. • Vers l’âge de 10 ans, l’enfant développe un concept adulte de la mort : la mort est universelle, inévitable et irréversible. Il réalise que la mort est une fin, et qu’elle peut toucher tout le monde y compris ceux qu’il aime. Il comprend la physiologie et les détails de la mort. • L’adolescent est celui qui perçoit le concept de mort avec le plus de souffrance, étant capable de se projeter dans l’avenir et d’avoir une vive conscience du deuil qu’il faut faire. Ses réactions alternent entre le déni, l’injustice et la colère. Il cherche dans l’irrationnel l’explication de sa mort. Dialogue et communication L’enfant L’enfant atteint de cancer perd successivement ses repères de vie, de lieu, de temps, et se trouve parachuté dans un univers qu’il ne connaît pas. Outre les effets directs du traitement (perte de cheveux, modification de l’image du corps), il est également confronté à un bouleversement de son univers proche : perte de la notion de toute- puissance des parents, séparation d’avec ses frères et sœurs, isolement d’avec ses pairs. En général, au stade avancé de la maladie, l’enfant a acquis la même maturité et la même perception de l’existence que beaucoup d’adultes en bonne santé. Il faudra veiller à donner à l’enfant des repères sur l’état de sa maladie et sur les décisions médicales. Il devra être libre d’exprimer ses désirs, ses objectifs et ses craintes. Quel que soit son âge, l’enfant tente de partager ses craintes avec ses proches ; il peut être envahi d’un développement d’images inquiétantes ; il cherche alors à tisser des liens avec un interlocuteur rassurant, le plus souvent la mère mais ce peut être un soignant, surtout chez l’adolescent. Le contact avec l’enfant peut être facilité par l’utilisation de moyens de communication non verbale en s’aidant de dessins, de musique ou de marionnettes. Les parents L’annonce du diagnostic provoque, pour les parents, une rupture avec «la vie d’avant». L’annonce de la mort prochaine de leur enfant va entraîner une nouvelle rupture : il attendaient la guérison ; il leur faut maintenant attendre la mort de leur enfant. Le soignant est confronté à une famille éprouvée sur le plan psychologique et financier ; la maladie de leur enfant ayant entraîné endettement, pertes de bien et parfois divorce. Dans ce climat de désagrégation de la maîtrise de la réalité et des émotions, la redéfinition des priorités soignantes est indispensable de façon à ce qu’il n’apparaisse ni aux parents ni à l’enfant, qu’il existe une rupture avec la stratégie offensive de la période précédente. Il est important d’expliquer aux parents, dans la mesure du possible, ce que la progression de la maladie va provoquer au niveau physique et au niveau psychologique. Il faut être attentif à leurs problèmes familiaux, sociaux et pécuniaires, afin de tenter de comprendre leur difficulté et les guider. Il est également recommandé de discuter assez précocement d’un sujet assez délicat qui est celui de réanimer ou non l’enfant en cas d’arrêt cardio-respiratoire, en prenant bien soins de préciser que si le décès survient, ce sera à cause de la maladie et non pas à cause du refus de réanimer. 123 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Quelque soit le cas, les parents doivent être impliqués activement, dans la mesure du possible, dans la prise en charge de leur enfant. Quand on ne peut plus guérir, on peut soulager Une étude faite sur les symptômes que présentent les enfants cancéreux en fin de vie a montré que la fatigue, la douleur, la dyspnée, l’anorexie, les nausées et vomissements, la constipation et la diarrhée étaient les plaintes les plus fréquentes. En matière de soins palliatifs, c’est la qualité de vie qui prime. Il devient important de soulager l’enfant par un traitement symptomatique non agressif. Indication Douleur ou dyspnée agitation Médicaments Morphine Lorazepam Haloperidol Prurit Diphenylhydramine Nausée et vomissement Prochlorperazine Ondansetron Convulsion Diazepam Sécrétions Hyoscyamine Doses 0.3 mg/kg peros toutes les 3-4 h 0.05 mg/kg peros toutes les 3-4 h 0.01-0.02 mg/kg per os toutes les 8-12 h 0.5-1 mg/kg peros toutes les 6-8 h 0.1-0.15 mg/kg peros toutes les 6-8h 0.15 mg/kg peros ou IV toutes les 6-8 h 0.3-0.5 mg/kg toutes les 2-4 h 0.0625-0.5 mg peros toutes les 4h Pour l’enfant de 2-12 ans 0.125-0.25 mg peros toutes les 4h Pour l’enfant > 12 ans Tableau I. Médicaments utilisés dans les symptômes les plus fréquents en soins palliatifs pédiatriques Les possibilités thérapeutiques en cas de fatigue sont limitées mais on peut essayer d’atténuer ce symptôme. Les moyens à utiliser sont la réévaluation des doses de médicaments ayant une action centrale, la réduction du temps d’inactivité, de l’insomnie, la correction de certains troubles métaboliques et le traitement d’une dépression associée. L’exercice est très bénéfique pour soulager la sensation de fatigue. Le traitement de la douleur est la pierre angulaire de la prise en charge de l’enfant en phase palliative. Dans les grandes douleurs comme celle du sida ou du cancer, l’approche thérapeutique suit les recommandations de l’OMS. Le traitement se base sur l’utilisation d’antalgiques pris de manière régulière, selon trois paliers, à horaires fixes, en fonction de la taille et du poids de l’enfant et de la cinétique propre à chaque produit. En soins palliatifs, la plupart des traitements antalgiques sont utilisés hors autorisation de mise sur le marché. Le paracétamol est à utiliser à la dose de 60mg/kg/j avec une dose de charge de 20mg/kg. La codéine est commercialisée sous forme de sirop (CODENFAN®) et la dose recommandée est de 0.5 à 1 mg/kg toutes les 4 à 6 h, la limite d’âge étant fixée à un an. La morphine à libération prolongée MOSCONTIN®, très utile en soins palliatifs, présente plusieurs entraves à son utilisation. Sa prescription doit se faire sur un carnet à souche et, selon la législation marocaine, l’ordonnance ne peut pas couvrir plus de sept jours de traitement. Il est en pratique très difficile de renouveler une ordonnance tous les sept jours. Une alternative intéressante est celle d’utiliser le chlorhydrate de buprémorphine TEMGESIC® qui existe sous forme de 124 Les soins palliatifs en oncologie pédiatrique comprimé sublingual et de solution injectable utilisable en sous-cutané et dont la prescription peut se faire sur une ordonnance simple. L’indication d’une chimiothérapie dite de « confort » peut parfois être discutée et a pu entraîner temporairement le soulagement de certaines douleurs osseuses. Dans notre contexte, le cyclophosphamide par voie orale est la drogue la plus prescrite. La corticothérapie peut avoir un effet spectaculaire sur la douleur. Elle peut également stimuler l’appétit, traiter les vomissements et entraîner une euphorie, mais les effets secondaires sont tout aussi importants. La dyspnée est un symptôme difficile à traiter. Elle est angoissante pour l’enfant, la famille et les soignants. On peut avoir recourt au drainage et à la radiothérapie. Certains gestes comme ouvrir les fenêtres, aérer l’enfant avec un éventail et mettre l’enfant en position demi-assise peuvent soulager la sensation de suffocation. On peut également avoir recours aux techniques de relaxation, aux anxiolytiques et à l’oxygénothérapie. Les nausées et vomissements peuvent être traités par de l’ondansetron ou le cas échéant, par une association de déxamethazone et d’anxiolytiques. La lutte contre la constipation se base sur des mesures hygièno-diététiques qui sont le régime riche en fibres et les boissons abondantes et sur l’utilisation de laxatifs par voie orale type lactulose. L’anorexie chez l’enfant en phase terminale est multifactorielle. Elle peut être en rapport avec une dépression, une peur de vomir, une constipation ou une mucite. Les parents supportent souvent très mal de voir leur enfant ne plus du tout s’alimenter et beaucoup sont demandeurs d’hydratation parentérale. Dans ces cas, une hydratation simple est prescrite pour éviter à l’enfant le sentiment désagréable de soif et on peut prescrire des boissons hyperénergétiques disponibles depuis peu au Maroc (FORTINI). La voie parentérale que ce soit pour la nutrition ou pour l’hydratation est à éviter. Dans certains cas, on peut être amené à transfuser l’enfant. Les seuils théoriques de transfusion sont remplacés par des indications de confort en fonction de la clinique : dyspnée d’effort invalidante, signes d’hémorragie extériorisée. Il est important d’avoir expliqué cette nouvelle stratégie transfusionnelle aux parents afin que ceux-ci l’acceptent et intègrent le changement par rapport aux traitements antérieurs. Si un épisode fébrile survient, un traitement probabiliste sera institué en essayant de privilégier la forme galénique la moins contraignante pour l’enfant. Dans ce contexte, les quinolones associent efficacité et confort d’utilisation. L’humidification des lèvres et l’application des corps gras, associée au traitement spécifique d’infection fongique ou herpétique, permettent de maintenir la bouche dans un état d’hygiène correcte. Les hospitalisations doivent être évitées au maximum. L’idéal serait de prendre en charge l’enfant à domicile par une équipe mobile de soins palliatifs mais en l’absence d’une telle structure au Maroc, on ne peut qu’insister sur la prise en charge par le médecin de proximité. Cette prise en charge à proximité ne peut se faire dans de bonnes conditions que si le médecin a été tenu au courant de l’évolution de la maladie de l’enfant et qu’il est en contact permanent avec le médecin traitant. 125 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Aspect psychosocial des soins palliatifs La particularité des soins palliatifs en pédiatrie est que la prise en charge concerne toute la famille. Il faut être attentif aux besoins de l’enfant mourant en le maintenant dans un endroit calme entouré de sa famille. Il aura besoin de distractions (jeux, musique, peinture, livres), de massages, de photos de famille et de jouets qui lui sont familiers. L’aide aux parents doit tenir compte de leur situation actuelle et des problèmes générés par la longue maladie de leur enfant (divorce, endettement). Il faut les aider à décider, dans la mesure du possible, du lieu des traitements et du décès et les assister dans les soins de leur enfant. Les frères et sœurs peuvent avoir des difficultés à supporter l’anxiété et la douleur que leurs parents endurent. Il est très difficile pour eux de reconnaître que les parents forts, puissants, ne peuvent pas solutionner le problème. Il faut les encourager à parler, à poser des questions, et discuter leurs sentiments. Ils ont besoin de dire « au revoir ». Le deuil : la mort d’un enfant est contre-nature Le décès survient après une période de souffrance de quelques jours à plusieurs mois. Cette souffrance, même si elle n’est pas physique, est morale. Après le choc et le désespoir initiaux, vient une période de résignation. Si le décès survient à l’hôpital, les parents auront à gérer la dure épreuve du transport du corps qui, au-delà des problèmes administratifs, s’avère être très coûteuse pour les familles marocaines. Si le décès survient à domicile, il faudra téléphoner aux parents pour présenter des condoléances et leur proposer un entretien s’ils en ressentent le besoin. Les soignants travaillant dans des unités d’oncologie pédiatrique sont soumis à un stress important qui a été décrit sous le nom de «burn out». Les réactions vont dépendre du lien que le soignant avait avec l’enfant et sa famille, de ses croyances spirituelles et religieuses, de sa capacité à gérer ses émotions et de son expérience personnelle. Le stress va se manifester par des insomnies, une irritabilité, des palpitations cardiaques et une sensation de vide ou de douleur. Les soignants doivent pouvoir disposer d’un espace de repos où ils peuvent se retrouver entre eux, partager leurs expériences et organiser de réunions de soutien entre collègues. Actuellement il existe des équipes de psychologues spécialisés dans la gestion du stress des soignants. La vie familiale doit être impérativement séparée de la vie professionnelle et on doit savoir profiter du temps libre pour évacuer les pensées négatives. Le repos, le sommeil et une alimentation équilibrée sont également conseillés. Conclusion Les soins palliatifs font partie intégrante de la prise en charge de l’enfant atteint de cancer. Parler de soins palliatifs revient à reconnaître l’existence de situations d’échec et donc à entreprendre une nouvelle stratégie qui vise à offrir la meilleure qualité de vie à l’enfant en phase terminale et à sa famille. Au Maroc, tout reste à faire dans le domaine des soins palliatifs pédiatriques, allant de la prise de conscience par les soignants de l’importance du sujet, à l’organisation d’équipes de soins fixes ou mobiles. 126 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc ANNEXES 127 Infrastructure de la prise en charge des malades atteints de cancer au Maroc Aziza Addi Structures de prise en charge du cancer existantes Ville Secteur Public Rabat Privé Public Casablanca Privé Type de traitement Etablissement Capacité litière Institut National d’Oncologie 270 lits X X X Service d’Hématologie et Oncologie Pédiatrique Hôpital d’Enfants 31 lits et fauteuils X X X Service d’Oncologie Hôpital Militaire Mohammed V 16 lits radiothérapie X X X Centre Al Azhar 20 lits X X X Centre d’Oncologie Nakhil 24 lits et fauteuils X X X Service d’Oncologie Ibn Rochd Hôpital Ibn Rochd 56 lits X X X Service d’Hématologie et Oncologie Pédiatrique Hôpital 20 août 1953 37 lits X X X Unité d’Hematologie et Oncologie Service de Pédiatrie 3 Hôpital d’Enfants 31 lits et fauteuils X X X Centre Al Kindy 18 lits X X X Clinique le Littoral 19 lits X X X Chirurgie Chimio Radio thérapie thérapie Oujda Public Centre d’Oncologie Cheikh Zayed 25 lits X X X Agadir Public Centre Régional d’Oncologie Hassan II 25 lits X X X Al Hoceima Public Centre Régional d’Oncologie d’Al Hoceima 67 lits X X X 129 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Structures en cours de réalisation dans le secteur public Ville Secteur Etablissement Capacité litière Public Centre National de Traitement de la Douleur INO 10 lits Public Centre d’Hématologie et Oncologie Pédiatrique. Hôpital d’Enfants Public Type de traitement Chirurgie Chimio thérapie Radio thérapie — — — 70 lits et fauteuils X X X Centre d’Oncologie Ibn Rochd Hôpital Ibn Rochd 53 lits X X X Public Aménagement et équipement d’une unité d’oncologie pédiatrique Hôpital 20 août 1953 37 lits et fauteuils X X X Marrakech Public Centre d’Oncologie Hôpital Mohammed VI 47 lits X X X Fès Public Centre d’Oncologie Hôpital Hassan II en cours X X X Tanger Public en projet X X X Meknès Public en projet X X X Rabat Casablanca Centre Régional d’Oncologie Centre Régional d’Oncologie Statistiques communiquées par la direction de l’Epidimiologie et de lutte contre les maladis, ministère de la santé, septembre 2008 130 Annexes Maisons d’hébergement des malades et de leurs familles au Maroc Nom de la maison d’accueil Ville Coordonnées Observation Rabat Hay Nahda II 10.000 Tèl : 037 75 41 74/89 Fax : 037 75 60 11 [email protected] Maison de l’AMINO Rabat En face de l’Institut National d’Oncologie, Hébergement des malades Sidi Med Ben Abdallah soignés à l’INO et de leurs Tèl et Fax : 037 56 36 92 familles [email protected] Maison de Vie de l’ALSC 3, rue Nador Préfecture Derb Sultan El Fida Casablanca Tél : 022 83 83 23 [email protected] Maison de l’Avenir Hébergement des enfants soignés à l’Hôpital d’Enfants de Rabat et de leurs familles Hébergement des malades soignés à l’Hôpital Ibn Rochd et de leurs familles Hôpital Hassan II Agadir Tél : 028 84 09 05 [email protected] Hébergement des malades soignés à l’Hôpital Hassan II et de leurs familles Maison de vie de l’ALSC Fès (en construction) Nouveau Centre Hospitalier Universitaire de Fès Route de Sefrou [email protected] Hébergement des malades soignés au Centre d’Oncologie Hassan II et de leurs familles Centre d’hébergement de la Fondation Al-Hoceima Mohamed V pour la solidarité Al-Hoceima Hébergement des malades du Centre Régional d’Oncologie d’Al-Hoceima et de leurs familles Centre Achifae Route de Jrada, Oujda 60.000 Tél. : 036 70 44 66 Fax : 036 70 63 00 [email protected] Hébergement des malades soignés au Centre d’Oncologie d’Oujda Maison de vie de l’ALSC Agadir Oujda 131 ASSOCIATIONS MAROCAINES DE SOUTIEN CONTRE LE CANCER Association Lalla Salma de Lutte contre le Cancer Domaine d’activité : Lutte contre le cancer (adulte et enfant) Présidente effective : Son Altesse Royale La Princesse Lalla Salma Coordonnées : Villa n° 1, Touarga Fouaka, Mechouar Saîd Rabat- Maroc Tél. : +212 (0) 37 66 10 55 ; Fax : +212 (0) 37 66 10 66 E-mail : [email protected] Site Web : www.contrelecancer.ma Population cible : Les personnes atteintes de cancer au Maroc Mission : Lutter contre le cancer au Maroc est la mission première de l’Association. Cette lutte s’exprime à travers quatre domaines d’intervention: • l’aide aux malades et à leurs familles, et notamment l’amélioration de la qualité de vie des citoyens atteints de cancer et celle de leurs proches. • l’information et la prévention. • le soutien au corps médical et la recherche clinique et opérationnelle. • l’aide et l’assistance à la création de centres d’oncologie et à leur équipement. Association de soutien aux malades du sang, AGIR Domaine d’activité : Soutien aux malades du sang et aux enfants atteints de cancer Coordonnées : Av Hassan II Angle Rond Point Saint-Exupéry et rue Allal Fassi Casablanca, Maroc Tél.: (212)22 26 59 56 / 22 227805 Fax: (212) 22 27 26 30 / 22 208101 E-mail: [email protected] Population cible : Les malades admis au service d’hématologie et d’oncologie pédiatrique de l’Hôpital du 20 Août Casablanca Objectifs et réalisations • Soutien en médicaments et équipement médical • Projet de construction d’une maison de parents • Aménagement d’une nouvelle unité pédiatrique, avec le soutien de l’ALSC • Réalisation de la première unité de greffe de moelle osseuse au Maroc, Association des Parents et Amis des Enfants atteints de Cancer, L’AVENIR Domaine d’activité : Soutien aux Enfants Atteints de Cancer Présidente d’Honneur : Son Altesse Royale La Princesse Lalla Meryem Coordonnées : Maison de l’Avenir, Hay Nahda II, Rabat Tel: 037 75 41 74 / Fax: 037 75 60 11 www.almoustakbal.org / [email protected] 132 Annexes Population cible : les enfants soignés pour cancer à l’Hôpital d’Enfants de Rabat Objectifs et mission • Amélioration des conditions médicales et sociales du traitement des cancers de l’enfant au Maroc • Soutien matériel et moral (médicaments, matériel, école, animation) • Soutien aux parents notamment par la réalisation de la Maison de l’Avenir (hébergement des familles) • Information et sensibilisation sur les cancers de l’enfant et l’importance du diagnostic précoce • Contribution à la formation Association de Parents pour le Soutien aux Enfants Malades, Noujoum Domaine d’activité : Soutien aux enfants atteints de cancer Coordonnées : Association Noujoum ; 9, Rue Ahmed El Mokri, Casablanca 20.000 Fax : 0 22 94 59 82 [email protected] www.noujoum.org Population cible : Les enfants soignés pour cancer à l’Hôpital d’Enfants de Casablanca et Hôpital Mamounia à Marrakech Objectifs et actions: • Soutien moral et divertissement de l’enfant à l’hôpital • Financement des traitements et de matériel hospitalier • Prise en charge du salaire de trois infirmière supplémentaires • Prise en charge d’examens médicaux pratiqués hors CHU • Interventions médicales et sociales à l’Hôpital Mamounia de Marrakech Association des Amis de l’Institut National d’Oncologie, AMINO Domaine d’activité : soutien aux malades de l’Institut National d’Oncologie Coordonnées : AMINO, Centre d’oncologie Moulay Abdellah, 10.000 Rabat Tèl : 037 56 36 92 Fax : 037 56 36 92 [email protected] Population cible : les malades de l’Institut National d’Oncologie Sidi Mohammed ben abdallah Objectifs : • Apporter aux patients cancéreux nécessiteux une aide matérielle et morale • Prodiguer conseil et soutien aux personnes face au cancer • Améliorer certaines structures d’accueil de l’Institut National d’Oncologie (INO) • Participer à la création de structures inexistantes • Mener avec les organismes concernés ou intéressés des campagnes de sensibilisation aux facteurs de risque pouvant entraîner certains cancers Association Achifae pour les malades d’oncologie d’ Oujda Domaine d’activité : Soutien aux malades d’oncologie d’Oujda Coordonnées : Centre Achifae d’hébergement des malades d’Oncologie Route de Jrada, Oujda 60.000 Tél. : 036 70 44 66 Fax : 036 70 63 00 E-mail : [email protected] 133 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Population cible : Les malades traités à l’unité d’oncologie, Hôpital El Farabi, Oujda Objectifs : • Hébergement des malades en provenance d’autres villes et de leurs familles • Aide à l’accès aux soins dans de meilleures conditions Association de Développement pour l’Aide aux Malades du Sang, ADAMS Domaine d’activité : soutien aux malades du sang d’Oujda Coordonnées : Boulevard Razi, immeuble Al Mourabitine, 3eme etage N°1 oujda 60.000 Maroc Tèl :036 69 79 32 [email protected] . www.adamsoujda.org Population cible : malades du sang de la région de l’oriental Objectifs : • Soutien matériel et moral aux malades du sang pendant et après le traitement • Développement des soins pour les malades du sang de la région de l’oriental • Sensibilisation du public Association Touche de Guérison contre le cancer dans l’oriental Domaine d’activité : prévention et lutte contre le cancer dans l’oriental Coordonnées : Boulevard El bourayj, N°4 El Kods Oujda 60.000 Maroc Tèl : 036 50 42 48 Fax : 036 50 42 48. [email protected] Population cible : adulte et enfant atteints de cancer à oujda Objectifs : • Sensibilisation des femmes sur le diagnostic précoce • Prévention et dépistage • Accompagnement moral des malades cancéreux. Association des malades cancéreux d’Al-hoceima, AMCA Domaine d’activité : Soutien aux malades atteints de cancer Coordonnées : Rue Mohamed V. Imm 2000 4éme étage. Apprt 25 Al-hoceima . Maroc Tèl : 039 98 37 63 Fax : 039 98 37 63 [email protected] Population cible : les malades atteints de cancers (adultes et enfants) Objectifs : • Faciliter l’accès aux soins malades cancéreux • Améliorer les conditions matérielles et morales des malades atteints de cancer • Informer et sensibiliser le public sur le cancer et l’importance du diagnostic précoce et traitement adéquat. 134 Annexes LECTURES RECOMMANDEES - Lemerle Jean. Cancers de l’Enfant. Paris : Flammarion-Medecine, Collection Encyclopédie des cancers,1992 - Schaison Gérard. Hématologie de l’Enfant. Paris : Flammarion-Medecine-sciences,1993 - Kalifa Chantal et coll. Cancers de l’enfant. Paris : Flammarion-Medecine-Sciences, Collection Pédiatrie, 2008 - Sommelet Danièle. Hématologie pédiatrique. Paris : Doin, Collection Progrès En Pédiatrie, 1990. - Philip A Pizzo. Principles and practice of pediatric oncology (5ème edition). Williams and Wilkins 2005 - Les cancers de l’enfant, Numéro spécial. Espérance Médicale 2002;80 (9) - Oncologie pédiatrique. Revue Marocaine des Maladies de L’Enfant 2004 : 4 QUELQUES SITES WEB UTILES A VISITER Association Lalla Salma de lutte contre le cancer (ALSC) www.contrelecancer.ma Association l’Avenir : www.almoustakbal.org Association Agir : www.association-agir.org Association Noujoum: www.noujoum.org Société Marocaine d’Hémato-Oncolgie Pédiatrique (SMHOP) www.smhop.info Société Internationale d’Oncologie Pédiatrique (SIOP) : www.siop.nl Union Internationale Contre le Cancer : www.uicc.org International Cancer Children Confederation Parents Organisation (ICCCPO) www.icccpo.org St Jude Children Research Hospital www.stjude.org www.cure4kids.org Institut Gustave Roussy Villejuif France www.igr.fr Groupe Franco-Africain d’Oncologie Pédiatrique (GFAOP) www.igr.fr/gfaop International Network of Cancer Treatment and Research www.inctr.org http://www.unimedia.fr/homepage/oncopediatrie http://www.virtualpediatrichospital.org/ www.semonslespoir.ass.fr www.pediadol.org www.chu-rennes.fr www.chu-rouen.fr 135 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc 136 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Lymphome Burkitt Lymphome Burkitt après traitement Lymphome Burkitt Lymphome Burkitt Lymphome Burkitt abdominal 137 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Osteosarcome Osteosarcome 138 Nephroblastome Maladie de Hodgkin Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Leucémie aigue lymphoblastique Leucémie aigue lymphoblastique Syndrome cave supérieur Zona Taches pigmentées neurofibromatose 139 Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Paralysie faciale aparaissant à la mimique méningite blastique Obésité - méningite blastique Neuroblastome - Syndome de Pepper 140 Neuroblastome - Syndrome de Hutchinson Diagnostic précoce des cancers de l’enfant au Maroc Histiocytose HSC Histiocytose LS Nodules craniens Histiocytose LS Retinoblastome bilatéral - leucocorie 141