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décryptages DIALOGUES
De l’eau dans le gaz
Médiateur
P
Pascal Galinier
rolos, écolos, même combat... « Après la mise en parallèle intellectuellement malhonnête de Mme Le Pen et de
M. Mélenchon, l’éditorial du
29 février constitue la goutte
d’eau qui fait déborder le vase », tance
Louis Vidonne (La Muraz, Haute-Savoie).
Quand nos lecteurs ont des convictions,
ils n’aiment pas qu’on les bouscule. Ce
qu’a fait manifestement l’éditorial titré
« Le pétrole flambe, le gaz de schiste
attend », dont parle cet abonné de longue date. Les lecteurs sont très en verve
sur ce sujet… explosif. « La rédaction en
chef aurait-elle fumé la moquette ou
inhalé du gaz de schiste qui aurait, à la
lire, des effets euphorisants ? », ironise
Claude Badet (Trèves, Rhône).
Que disait donc votre journal ? Que
les gaz de schiste, dont la France posséderait les plus grandes réserves d’Europe
avec la Pologne, pourraient constituer
« un substitut au pétrole », nonobstant
les dégâts écologiques que provoque la
fracturation hydraulique utilisée pour
extraire ce type de gaz. En somme, qu’il
ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du
bain, si l’on ose dire…
« Je sais bien qu’il y a un intense lobbying de la part des pétroliers et aussi du
gouvernement canadien. Y auriez-vous
été sensibles ? J’ai du mal à le croire »,
nous dit Dominique May Bauer (Paris),
qui ironise sur le « consulat Total »
ouvert dans la région canadienne où le
pétrolier français a un permis d’exploitation des gaz de schiste. « Vous ne lisez
pas votre propre journal », s’étonne
Julien Picquart (Vincennes), rappelant
les nombreux articles que nous avons
consacrés à la question – cent soixantehuit occurrences dans nos archives,
selon le décompte effectué
par le médiateur.
« En Ardèche, votre édito va être perçu
comme une déclaration de guerre »,
nous prévient Franck Bernon, de Malonset-Elze (Gard). « C’est vrai, le pire n’est
jamais sûr, reconnaît l’Ardéchoise Josia-
Courrier
Expression
Circonvolutionsou circonlocutions?
Dans l’article « Les conjurés de Beauvau rêvent d’un “Etat neutre” »
(Le Monde du 15 février), je lis: « Leur point commun, outre un usage
redoutable de circonvolutions administratives?… » Je ne pense pas qu’il
soit ici question de la complexité (méandres, dédale) des démarches auxquelles se trouvent confrontés les usagers, mais bien du langage compliqué dont usent les « conjurés». N’y aurait-il pas confusion involontaire
entre circonvolutions (cérébrales, par exemple) et circonlocutions?
C’est une erreur que l’on peut relever assez souvent tant dans les interventions orales que, quoique plus rarement me semble-t-il, dans les textes. La circonlocution, comme son nom l’indique, consiste à « tourner
autour du pot », pour parler familièrement. Au reste, certains mots ou
expressions sont assez souvent employés hors de propos : les candidats
deviennent des impétrants; celui qui sait nécessairement n’est pas sans
ignorer; la City, qui était le centre des affaires, n’en est plus que l’épicentre, mais certains ont, au contraire, la chance d’être à l’épicentre du combatet de pouvoir regarder de haut, du point de vue de Sirius en quelque
sorte, les malheureux qui se trouvent eux en plein centre de la mêlée.
Henri Ménahesse, Lesneven (Finistère)
Fiscalité
Démesure et désobligeance
A propos du projet de François
Hollande d’imposer à 75 % la partie des revenus au-dessus de 1 million d’euros par an, Christophe
Jallet, footballeur au PSG, a déclaré à la presse : « On aurait forcément l’impression de travailler
pour pas grand-chose…» S’il est
concerné par cette mesure éventuelle, c’est qu’il gagne plus de
1 million par an. S’il ne gagnait
que 1million par an (sic), cela équivaudrait aux salaires de 60 smicards. Ainsi, l’arrière d’une équipe de football estime qu’il « travaillerait pour pas grand-chose »
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Samedi 10 mars 2012
ne Brunet (Saint-Sauveur-de-Montagut).
Mais qu’écrira Le Monde le jour où un
séisme provoqué par fracturation
hydraulique concernera par exemple Tricastin ? » « Aurez-vous envie d’aller passer vos vacances dans les plus belles
régions de France une fois qu’elles seront
sinistrées par tous ces forages et que vous
ne pourrez plus boire l’eau du robinet ? »,
nous demande Alix Cauchois, du village
de Saint-Denis dans le Gard, zone menacée par les forages.
Chacun voit midi à sa porte, mais le
sujet dépasse largement le cadre régional, et même français. C’est de Nuremberg, en Allemagne, que nous écrit Anne
Frémaux : « J’ai l’impression, en vous
lisant, de lire un vieux “journal à papas”
(ou à tontons), incapable de comprendre
les lignes qui bougent et l’aspiration des
peuples à une autre histoire. Soyez un
peu plus courageux et un peu plus audacieux ! »
A
défaut d’être audacieux, chère lectrice, convenez que l’éditorial en
question ne manquait pas de courage, prenant à contre-pied une certaine
« pensée unique » sur la question. « Un
éditorial est censé refléter la position du
journal, raison pour laquelle il est anonyme, rappelle Sylvie Kauffmann, directrice éditoriale au Monde. Il peut aussi
esquisser une analyse qui n’est pas forcément consensuelle au sein de la rédaction, ou qui ne correspond pas à celle du
responsable de la rubrique concernée,
s’il devait se contenter de 60 fois
le smic, plus 25 % des gains dépassant le million d’euros !
Je pense qu’il serait difficile de
commenter de tels propos sans
être désobligeant.
Claude Bourse, Montpellier
Démagogie et ignorance
François Hollande, avec sa proposition de taxer à 75 % les revenus
supérieurs à 1 million d’euros
annuels, a réussi un coup médiatico-démagogique certain. Cette
idée peut sans doute satisfaire les
99,9% des Français non concernés, mais il vient de se tirer une
balle dans le pied. Comme il n’a
jamais travaillé dans une entreprise (non plus d’ailleurs que la quasi-totalité de nos politiques…), il
ignore comment une entreprise
fonctionne, et on peut craindre
qu’il en soit de même dans son
entourage. Dès l’instant où il fait
part de sa proposition, les sièges
sociaux des multinationales à
New York, Tokyo, Séoul et ailleurs
adressent à leurs services compétents une demande très simple :
« Où faut-il déplacer nos implantations françaises (variante : projets
d’implantation en France) en Europe? » Indépendamment des délo-
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de justice à Paris, est adressé gratuitement sur demande à : Jeu Les Offres Culturelles du Monde - 80, boulevard Auguste-Blanqui - 75013 Paris.
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mais dont la direction éditoriale considère qu’elle peut, qu’elle doit enrichir le
débat, et mérite à ce titre d’être portée à la
connaissance des lecteurs. »
Sur les gaz de schiste, le débat reste
ouvert. Et le courrier de nos lecteurs montre qu’il est loin d’être tranché. «La sobriété et l’efficacité énergétique sont malheureusement bien plus taboues que l’exploitation des ressources non conventionnelles », observe Yann Louvel, de Crest (Drôme). Notre journal se doit d’exposer « les
deux lignes », comme le soulignait, sous
ce titre, la chronique Ecologie, trois jours
après le fameux édito (Le Monde daté
4-5 mars). Ce dont se félicite Alain Maillet
(Clichy, Hauts-de-Seine): « Bravo à Hervé
Kempf pour sa chronique. Elle résume
bien le dilemme majeur de notre époque
et prouve, Dieu merci, qu’il n’y a pas de
pensée unique dans votre journal. » Dont
acte.
Reste la question de fond. « A-t-on le
droit de laisser sous nos pieds une richesse
naturelle qui pourrait tirer le pays de l’ornière financière où il se trouve actuellement ? », observe Georges Henry, de Lonsle-Saunier (Jura). « Comment résister à la
tentation d’exploiter une telle manne ? »,
se demande plutôt Odile Tessier, à Vincennes (Val-de-Marne). Elle opte pour
une réponse volontariste, sinon utopique : « En réfléchissant sur son mode de
vie, par exemple. En faisant d’autres
choix. Bien sûr, c’est plus difficile. C’est
aussi plus courageux. Ne serait-ce pas plutôt cela, “la troisième voie de long terme”
calisations prévisibles de cadres
supérieurs français – et de leur
activité –, le message adressé à la
communauté économique internationale est calamiteux. Ce type
de décision ne peut avoir la moindre efficacité que s’il résulte d’un
consensus international, faute de
quoi il se retourne imparablement contre le pays qui l’adopte
en solitaire, c’est ce qu’on appelle
communément la concurrence…
M.Hollande n’a pas, semble-t-il,
tiré les leçons de la géniale réforme des 35 heures, c’était il est vrai
déjà une idée socialiste…
Dominique Brun
Neuilly-sur-Seine
(Hauts-de-Seine)
Politique
Bâillonner les Bayonnais ?
L’homme lige dans le droit féodal
est le vassal qui avait obligation
de soumission au suzerain. C’est
ainsi que Nicolas Sarkozy cherche
à imposer sa conception des rapports à l’autre dans sa campagne
sur mesure de candidat-président. En effet, aller à la rencontre
des Français imposerait semble-t-il à son égard un régime spécial de faveur dans la condescendance et de ferveur dans l’accueil,
tandis que ses adversaires politiques pourraient être malmenés
ou insultés à sa guise dans les
meetings en prouvant de la sorte
que les Français n’en veulent pas :
souvenons-nous de sa réaction
infantile à l’enfarinade de François Hollande comme s’il s’agissait d’une bonne blague de potache le chahutant dans une classe
de collège et à laquelle il aurait luimême aimé participer s’il avait
pu s’extraire de sa fonction qui,
malheureusement, l’oblige.
Ainsi, si des militants socialistes
de Bayonne se sont contentés au
passage de brandir le recueil des
soixante propositions du PS sous
son nez, une véritable insulte à sa
personne, ce qu’il qualifie de manque de respect n’a d’égal que l’irrespect qu’il s’autorise lui-même
vis-à-vis des candidats non présidents sur les épaules desquels ne
pèse pas le poids de charges gouvernementales mais qui sont
redevables du crime de lèsemajesté.
Jean-Pierre Netter
Paris
évoquée par votre éditorial ? »
« Avant de poser la question : “On remplace le pétrole par quoi ?”, n’est-il pas
plus pertinent de se demander aujourd’hui “comment moins consommer de
pétrole ?” », résume Rémi Sabonnadière
(Grenoble), qui tient à préciser : « Je ne
suis pas écolo. »
C’est bien un changement d’époque
qui est en jeu. « Le logiciel des “trente glorieuses”, ce tabou de la croissance sans
entraves, est dépassé, estime Philippe
Brand, de Thonon-les-Bains (HauteSavoie). Il faut entrer dans l’ère de la
mutation énergétique pour éviter une
mutation climatique gravissime et bientôt intolérable.»
Un débat de fond qui semble échapper
aux responsables politiques en lice pour
la présidentielle, peste Rainer Geiger
(Paris) : « Dans cette campagne électorale,
certains ont pris l’habitude de se référer
au prétendu modèle allemand. Seraientils prêts à concéder que c’est une coalition
gauche-Verts qui a introduit les réformes
qui constituent aujourd’hui la base de la
stabilité et le succès économique, et que
l’Allemagne est chef de file en ce qui
concerne la croissance verte et l’essor des
énergies renouvelables ? Nous avons
besoin d’un véritable débat démocratique
sur ces questions. »
Message transmis. Sera-t-il entendu ?
Le combat, comme le débat, continue. p
[email protected]
Mediateur.blog.lemonde.fr
se soit jamais soucié des viandes
casher… Marine Le Pen nous faisait l’autre jour sur France Inter
un grand numéro sur la souffrance des animaux abattus selon le
rite musulman. Mais, quid des élevages en batterie des poules, poulets, cochons ? Quid de la tauromachie, de la chasse à courre ?
Etiqueter, pourquoi pas. Alors il
faut étiqueter tous les produits et
indiquer, entre autres, le mode
d’élevage, le bio, etc. Je précise que
je suis agnostique, laïque, sachant
que la république laïque garantit
l’exercice des cultes dès lors que
cet exercice ne trouble pas l’ordre
public.
Jacques Piraud
Sartrouville (Yvelines)
Controverse du Net Vanessa Asse
Du poids de l’image en politique
Dominique de Villepin aime les symboles. Il l’a une fois de plus fait
savoir, dans une interview au Monde (daté du 2 mars), illustrée par une
pose peu ordinaire: de dos, les mains contre une cheminée. Un cliché
du photojournaliste Olivier Laban-Mattei suggéré par l’ancien ministre
pour éviter les traditionnelles photos de candidats, arborant leur plus
beau sourire, leur meilleur profil, à l’approche de tout objectif. L’ancien
premier ministre a voulu cette pose unique pour évoquer une figure de
la mythologie grecque, Sisyphe.
Dans les poèmes d’Homère, Sisyphe, fils d’Eole et d’Enarete, fait figure d’homme astucieux. Il aurait notamment développé le commerce.
Mais, pour avoir défié les dieux, il est condamné à faire rouler éternellement une lourde pierre jusqu’en haut d’une colline, dont elle redescend
chaque fois avant même qu’il ait atteint le sommet.
Comme figure de l’effort, Dominique de Villepin n’a pas trouvé
mieux. « Artistiquement, c’est intéressant, peut-être même subversif»,
estime un utilisateur de Facebook. Plusieurs rappellent que « le ridicule
ne tue pas » et certains saluent même l’homme qui s’est opposé à la
guerre en Irak à la tribune de l’ONU.
Mais le message qu’il voulait faire passer par cette image était-il bien
clair? Rien n’est moins sûr, à en juger les contributions d’autres internautes du Monde.fr. Car aux posts plutôt positifs se succèdent des dizaines de commentaires plus intransigeants: « Bizarre, cette idée de se battre pour les Français en leur tournant le dos », note cette utilisatrice de
Facebook; « Sans la légende du Monde qui aurait compris la métaphore ? » s’interroge celui-là.
Comme souvent sur les réseaux sociaux, certains utilisateurs ne
manquent pas une occasion de plaisanter: « S’il avait les mains sur le
capot d’une voiture et pas sur une cheminée Louis XV, on penserait qu’il
a été arrêté par la BAC. » Tout un symbole !
La longue marche
des maoïstes népalais
Par Philippe Descamps
Controverse
Halal, casher…
La controverse autour de la viande halal prend un tour particulièrement lamentable. Quelques
réflexions naïves. Un ministre,
fût-il le premier, n’a pas à
conseiller aux religions ce qu’elles
ont à faire pour se « moderniser».
Bien évidemment la polémique
sur l’abattage rituel des animaux
vise à stigmatiser nos compatriotes musulmans. Curieux qu’on ne
MARS 2012
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