Le mot de la Francophonie

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Le mot de la Francophonie
tribune libre
Le mot de la Francophonie
Par Amal Drissi Kacemi (centre cardiologique de Rabat, clinique Belvédère), président de la Société marocaine
de chirurgie cardiovasculaire.
Extrait de la présentation faite au 4th European and Francophone Aorta Masterclass, Saint-Malo, 10-12 octobre 2013.
La francophonie est une utopie et une nécessité.
Née au début du siècle dernier dans l’esprit d’un petit nombre
d’artistes et d’écrivains en réaction à l’expansionnisme de la
culture anglo-saxonne, l’idée de francophonie s’est traduit
politiquement en 1970 par la création de l’Organisation internationale de la francophonie. Celle-ci regroupe actuellement
77 pays avec plus de 220 millions de locuteurs francophones,
dont la moitié vient d’Afrique et du Moyen-Orient. On estime
qu’en 2050, il y aura plus de 700 millions de francophones
vivant pour la quasi-totalité en Afrique.
La francophonie n’est pas une culture en commun, mais plusieurs cultures en partage.
Carlos Alvarado, écrivain argentin, a écrit : « La force de cette
œuvre, c’est qu’elle a été écrite en français mais ne parle pas
de la France ».
Le français, « outil merveilleux trouvé dans les décombres
du colonialisme » (Léopold Sédar Senghor) ou « butin de
guerre » (Kateb Yacine), a permis que l’on retrouve parmi les
récipiendaires des grands prix littéraires ou sous la coupole
de l’Académie française des personnalités venant d’Afrique,
du Maghreb, du Moyen-Orient ou d’ailleurs, comme Amine
Maalouf, Tahar Ben Jelloun, Alain Mabanckou, Jonathan
Littell, Atiq Rahimi et bien d’autres, la liste n’étant heureusement pas exhaustive.
Toutefois le rayonnement de la langue française ne peut se
faire que par le développement du savoir en français. Selon
l’Unesco, en 2012, il y avait 3,6 millions d’étudiants internationaux, ce nombre ayant augmenté de 38 % en quatre ans
seulement. La mondialisation et l’amélioration des indices
de développement des pays du tiers-monde expliquent cette
croissance rapide. La France occupe une honorable quatrième place parmi les pays d’accueil.
Ils étaient ainsi plus de 200 000 provenant essentiellement du Maghreb
« La francophonie et de la Chine. Malheureusement,
seuls 8 % d’entre eux avaient opté n’est pas une culture
pour une discipline médicale ou en commun, mais
apparentée.
plusieurs cultures La francophonie est à la croisée des en partage. »
chemins.
D’un côté, le fort attrait pour la
France des jeunes Maghrébins et
Africains, de l’autre une France
moins bien notée dans la mobilité
européenne et qui veut développer son enseignement tertiaire. Pour cela, quoi de plus facile que d’angliciser les études
dans les universités françaises au risque d’y perdre… sa langue.
Mais on pourrait tout aussi bien promouvoir le français et la
francophonie en développant l’apprentissage du français dans
les pays émetteurs africains et maghrébins et en diminuant les
obstacles à l’admission de leurs étudiants.
C’est un choix cornélien… ou shakespearien. n
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CHIRURGIE THORACIQUE ET CARDIO-VASCULAIRE - 2014 ; 18(1) : 5
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