palais de tokyo / dossier enseignants - multi

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PALAIS DE TOKYO / DOSSIER ENSEIGNANTS /
PALAIS DE TOKYO / DOSSIER ENSEIGNANTS /
Décédé en Janvier 2005 dans un accident de moto, Steven Parrino constitue pour
beaucoup le modèle d'une activité artistique radicale et sans concession mêlée à un esprit
d'ouverture enclin à mélanger les genres et à activer les collaborations les plus variées.
Steven Parrino a fait la jonction, apparemment impensable, entre la culture pop et le
modernisme le plus radical. Il est celui qui a fait se rencontrer l'esthétique Hell's Angels et
l'art minimal. Celui qui, rêvant de créer un nouveau Cabaret Voltaire dans le No New York
des années 1980, a conçu des expositions où ses propres monochromes noirs servant de
paillassons aux savants fous de la Noise Music. Steven Parrino fut le Dr Frankenstein de
la peinture. Témoin de la mort annoncée de la peinture, il n'a eu de cesse de la ramener à
la vie en rapiéçant bout à bout les morceaux de son cadavre. La nécrophilie au secours du
Grand Art : un programme ambitieux auquel Steven Parrino s'est attelé pendant plus de
vingt ans, faisant fi des hiérarchies et du bon goût que la société génère.
Pour cette session, le Palais de Tokyo consacre la totalité de ses espaces d'expositions à
la figure d'un artiste qui n'a eu de cesse de faire voler en éclat les catégories et de
considérer le mode de la collaboration comme le matériau même de sa propre activité
créatrice. Conçue comme un triptyque, la session regroupe non seulement une sélection
d'oeuvres de Steven Parrino, mais aussi un choix de travaux d'artistes dont il s'est inspiré
et des pièces d'artistes qu'il a exposés, soutenus, et avec lesquels il a collaboré, couvrant
ainsi un champ allant du minimalisme au tatouage, en passant par le cinéma expérimental
des années soixante, la bande dessinée, le design industriel, la No Wave et le punk.
Texte d'introduction de Marc-Olivier Wahler, directeur du
Palais de Tokyo, à l'exposition "La Marque Noire".
Ce texte introduit d’emblée à plusieurs notions centrales dans l’histoire de l’art
contemporain : le « pop art », le « modernisme », leur mélange qu’on appelle parfois
« postmoderne », mais aussi les notions de « fin de l’art » ou encore celle d’art
« collaboratif » qui s’y rattachent. Précisément, c’est tout l’intérêt de Steven Parrino d’être
un artiste qui les condense dans son travail et sa seule personne. La visite de « La
Marque Noire » au Palais de Tokyo est ainsi l’occasion de les ressaisir.
PALAIS DE TOKYO / DOSSIER ENSEIGNANTS /
Le titre ambitieux de l’exposition «Steven Parrino, rétrospective, prospective » révèle la
volonté de traduire l’univers d’un artiste. En articulant l’exposition en trois volets, la
perception de l’œuvre de Steven Parrino n’en est pas réduit qu’à son simple travail, elle
est agrémentée d’autres artistes ayant des points de convergence avec lui. Bousculant les
principes muséologiques, « La Marque Noire » tente d’exprimer l’ensemble de ce que
constitue une personnalité du monde de l’art -avec ses influences et ses rencontres.
RETROSPECTIVE 1981-2004
Une centaine d'œuvres de Parrino sont présentées dans cet espace. Elles sont réparties
en trois espaces : dans la verrière, une sélection d'œuvres des années 80 et du début
des années 90, essentiellement des monochromes auxquels Parrino inflige des mauvais
traitements, -- lacérations, froissements, etc. On trouve ensuite une sélection d’œuvres
plus tardives de Steven Parrino. Ici, plus de monochromes, mais des films et des
sculptures qui semblent brûlées. Enfin, une sélection de dessins où se mêlent pop culture
(comic books américains, pornographie, SF) et interventions abstraites (aplats colorés ou
émaillés).
BEFORE (PLUS OU MOINS)
Il s'agit d'une exposition d'artistes très différents qui ont influencé Parrino d'une manière
ou d'une autre : Vito Acconci, Kenneth Anger, Donald Judd, Robert Smithson, Frank
Stella, Sturtevant, Andy Warhol.
Ces artistes ont livré des pièces majeures, qui ont marqué l'art de ces cinquante dernières
années et il va sans dire que Steven Parrino connaissait bien leur travail. Il s’agit d’une
communauté d’artiste participant à la démarche de Steven Parrino. Sans être mentors ni
maîtres, les artistes de Before (plus ou moins) se confrontent et enrichissent l’œuvre de
Parrino, donnant une autre lecture de son travail.
BASTARD CREATURE
Bastard Creature est une sélection d'artistes que Steven Parrino, commissaire, a exposés.
Son titre est la contraction des deux expositions qu’il a faites à Bregenz et à Dijon, Bastard
Kids of Drella et Return of the Creature.
Bastard creature ne se contente pas de collecter les œuvres présentes lors de ces deux
expositions, les artistes ont été invités à présenter une œuvre spécialement pour cette
exposition, conservant ainsi l’idée d’émergence à laquelle tenait Steven Parrino.
Les artistes présents sont Richard Aldrich, Gardar Eide Einarsson, Amy Granat, Richard
Kern, Jutta Koether, Michael Lavine, Chuck Nanney, Amy O'Neill, Mai-Thu Perret, Blair
Thurman, Elizabeth Valdez, Banks Violette.
PALAIS DE TOKYO / DOSSIER ENSEIGNANTS /
La Marque Noire. Vue de l’exposition « Steven Parrino, rétrospective 1981-2004 » / Palais de Tokyo,
photos : Marc Domage
La Marque Noire. Vue de l’exposition « Bastard creature » / Palais de Tokyo, photos : Marc Domage
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LES NOTIONS PARCOURANT L’EXPOSITION /
MODERNISME
Le terme modernisme est souvent compris comme une variante plus récente de
modernité. Il revêt cependant une signification spécifique quand il traduit l'américain
« Modernism ». Dans son usage particulier, le « modernisme » (modernism) désigne un
courant artistique qui a mis la réflexivité au premier rang de ses préoccupations. Le
critique et théoricien Clement Greenberg a imposé, dans les années 1950, cette notion
dont il a fait la pierre de touche d'une histoire des arts tout entiers tendus vers l'épiphanie
de leur vérité ontologique. Alors que la tradition occidentale avait fait de l’équivalence
entre peinture et récit un dogme intangible (« ut pictura poesis »), à partir du XIXe siècle la
peinture moderne se dissocie de la littérature, rompt ses liens avec les textes canoniques
et puise ses sujets dans le seul domaine du visible, puis en elle-même. N'ayant plus
besoin de rendre lisible quelque récit que ce soit, elle peut cesser de représenter l'espace
tridimensionnel. Elle se sépare donc du théâtre comme de la sculpture pour concentrer
son attention sur les caractéristiques de son médium. Autrement dit, l’art n’a pour sujet,
d’après le modernisme, que lui-même. Son sujet, c’est sa forme : le pigment de la
peinture, le passage du pinceau, la taille de la toile, etc.
Les grands modernistes sont Donald Judd, Frank Stella, Elsworth Kelly ou, en France,
Daniel Buren et Olivier Mosset. Mais à certains égards, Steven Parrino en est un
également, dont tout le vocabulaire pictural est redevable du modernisme : grands
monochromes noirs, travail sur la toile proche de celui du groupe Support/Surface. Sinon
que Steven Parrino est aussi le témoin de la crise du modernisme, c’est-à-dire de
l’impossibilité qu’auront très vite rencontrée les artistes proche de Greenberg d’aller audelà d’une sorte de mutisme formaliste progressivement privé de tout contenu sensible,
politique ou même esthétique. Précisément, Steven Parrino est contemporain d’un
sentiment d’épuisement de l’art, parvenu à son essence, mais pour y disparaître, pour
reprendre les mots d’un autre moderniste, mais en littérature, Maurice Blanchot. Il est le
contemporain de la fin de l’art, de la mort de la peinture, qu’il va tenter de surmonter en s’y
enfonçant encore davantage.
L’œuvre de Steven Parrino peut se comprendre comme un essai pour continuer de faire
de l’art avec le rien légué par l’histoire de l’art. C’est ainsi qu’il troue ses monochromes ou
qu’il leur fait subir toutes sortes de violences. Paradoxalement, ce geste de destruction ou
de profanation restitue aux œuvres inexpressives du modernisme une forme de vie, de
pathétique. Planes et froides, elles deviennent plissées comme une peau, maltraitées
comme un corps souffrant. On croit les entendre gémir. De sorte que Steven Parrino peut
aussi bien apparaître comme le dernier moderniste que comme le premier maniériste du
vingtième siècle, son art tout en pli évoquant les dépositions du Christ d’un Zurbaran ou
d’un Gréco.
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La Marque Noire. Vue de l’exposition « Steven Parrino, rétrospective 1981-2004 » / Palais de Tokyo
Détail des œuvres : Parrino, Dancing on Graves et Cyclotron. Photos : Marc Domage
La Marque Noire. Vue de l’exposition « Steven Parrino, rétrospective 1981-2004 » / Palais de Tokyo,
Détail des œuvres : Parrino, Trashed Black Box. Photos : Marc Domage
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POP ART
Le Pop Art apparaît dans les années soixante, autour d’Andy Warhol, Roy Lichtenstein ou
Jasper Johns. Il consiste, à l’origine, à introduire dans l’espace du musée des objets tirés
de la culture populaire, canette de soupe, boîte de lessive ou drapeau américain. A la
différence du ready-made, cependant, il en fait souvent des répliques peintes ou sculptées
en forme de trompe-l’œil. Le Pop Art a été, pour cette raison, souvent comparé à un art
célébrant naïvement la société de consommation, mais il est loin de se réduire à ce lieu
commun. Contre l’expressivité vibrante d’un Rothko, d’un Motherwell ou d’un Newman, le
Pop Art revendique en fait une peinture sans profondeur, mécanique, superficielle, jugée
plus apte que les émois de la subjectivité romantique à dire le trouble de l’immédiat aprèsguerre.
L’intérêt de Parrino, artiste de la destruction, pour Warhol témoigne de la richesse de cette
ambiguïté. L'exposition qu'il organise en 1999 au Consortium de Dijon, « Bastard Kids of
Drella », s’inspire ainsi du surnom que Warhol s’était donné, "Drella", contraction de
"Cinderella" (Cendrillon) et "Dracula", deux êtres en lesquels Warhol se retrouvait. Gallien
Dejean, dans un texte intitulé Aluminium Clouds (CRASH), for Drella... explique : « Steven
Parrino exécute entre 1984 et 1988 une pièce sans titre composée de trois feuilles
blanches. (...) Sur la première, dont le centre a été consumé, une phrase est inscrite :
"Andy Warhol Frankenstein". (...) La seconde porte l'inscription "Andy Warhol's Dracula" et
la troisième "Andy Warhol's Bad". Dracula, parce que Warhol vide le monochrome de son
essence. Frankenstein, parce qu'il s'approprie les éléments de la culture, savants ou
populaires, et les rapièce les uns avec les autres. La dernière affirmation ("Andy Warhol's
Bad") est constitutive de l'ambiguïté qui réside dans son œuvre". La série Death in
America, monochromes réalisés en peinture aluminium sur toile reprend également le nom
de la première exposition personnelle de Warhol en Europe, en 1964, à la Galerie
Sonnabend de Paris, faite de carcasses de voitures sérigraphiées. Les monochromes de
Parrino montrent l'influence de l'univers urbain (New York) et métallique (moto) dans
lequel il vit. Leur surface parfois froissée peut évoquer un accident de la route. Quant à
Electrophilia, le nom du groupe de Steven Parrino, il se relie directement à la série des
Electric Chairs de Warhol présentées dans la partie historique de la Marque Noire. Toutes
séries d’œuvres qui font penser que Warhol était au moins aussi hanté par la mort que par
le glamour.
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La Marque Noire. Vue de l’exposition « Steven Parrino, rétrospective 1981-2004 » / Palais de Tokyo,
photos : Marc Domage
La Marque Noire. Vue de l’exposition « Steven Parrino, rétrospective 1981-2004 » / Palais de Tokyo,
photos : Marc Domage
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POSTMODERNISME
Steven Parrino mêle allègrement « high culture » et « low culture » dans son travail, pour
reprendre un partage inventé par Clement Greenberg dans son article « Art and Culture »
de 1938, repris ensuite par Theodor Adorno et bien d’autres. Motos et monochromes s’y
côtoient, ainsi que super-héros de bande-dessinées, héroïnes pornos ou monstres. Cette
manière de mélanger les genres et les médiums a été appelée « postmodernisme » par
contraste avec la recherche de pureté du modernisme décrit plus haut. Précisément, si le
modernisme se caractérise par la création de formes nouvelles, le postmodernisme
réutilise des formes préexistantes. Là où Le Corbusier veut renouveler complètement non
seulement le style des bâtiments mais la conception même de l'habitat, un architecte tel
que Ricardo Bofill utilise des éléments décoratifs empruntés à l'art classique ou antique
(colonnes, frontons, etc.), non d’ailleurs sans une forme d’ironie. L'œuvre postmoderne se
présente souvent comme un collage d'éléments hétéroclites qui ont perdu leur sens et leur
puissance originelle, ou que la tradition a enseveli sous le déjà-vu, aussi bien l’artiste
postmoderne semble-t-il parfois être un manipulateur désabusé d’éléments morts et sans
forces, qui ne retrouvent de leur vigueur qu’en étant ridiculisés.
Mais là encore, Steven Parrino est en porte-à-faux avec une définition par trop univoque
du postmodernisme. L’ironie joue ainsi peu de rôle dans son travail, qui prend le
modernisme très au sérieux. Au contraire, par son usage du pathétique, Parrino semble
plus proche, on l’a dit, des maniéristes, voire des romantiques. Il y a une vraie croyance
dans la peinture, dans sa mort et dans sa résurrection, qui se donne notamment à voir
dans ses tous derniers travaux : sépulcre en plaques de placoplâtre percées de coups de
masse, comme un tombeau vide. Cônes d’encens brûlés qui forment des cercles
ésotériques. On pense à la phrase de Hölderlin, souvent citée par Heidegger : « Là où
croît le péril, croît aussi ce qui sauve ». Ou encore à la formule des évangiles : « Là où le
péché abonde, la grâce surabonde ». Ou encore aux procédures mortifiantes de la
théologie négative. Plus généralement, c’est peut-être tout le bagage protestant de
l’Amérique qui se donne à voir et à lire dans ce travail qui fait de l’enfoncement dans la
mort, l’impuissance, la damnation, la condition de possibilité même de la rédemption.
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La Marque Noire. Vue de l’exposition « Steven Parrino, rétrospective 1981-2004 » / Palais de Tokyo,
Détail des œuvres : Parrino, Study for a Model of the universe to Be placed in the forbidden Zone.
Photos : Marc Domage
La Marque Noire. Vue de l’exposition « Steven Parrino, rétrospective 1981-2004 » / Palais de Tokyo,
Détail des œuvres : Parrino, Exit, Dark Matter. Photos : Marc Domage
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LES ARTISTES /
BEFORE (plus ou moins)
Cette exposition a été montée par Olivier Mosset. Associé au groupe BMTP (Buren,
Mosset, Toroni, Parmentier), Olivier Mosset fait partie des plasticiens qui ont tenté de
pousser la peinture dans ses retranchements les plus radicalement matérialistes. De
même que Buren ne peint que des rayures, Mosset ne fait que des cercles depuis
plusieurs années. Au même titre que les artistes présentés, Mosset a eu une influence
importante dans le travail de Parrino (voir l’entretien avec Steven Parrino, dans la rubrique
« Pour aller plus loin » ci-après).
Donald Judd est un représentant majeur de l’art minimal. Refusant la transpiration de
l’âme de l’artiste dans les œuvres, l’art minimal de Judd se matérialise dans la sculpture.
Les données fondamentales de celle-ci reposent alors sur la forme géométrique réduite à
l’essentiel, le monochrome et le rapport de l’œuvre à l’espace.
Dans progression (1972), le spectateur peut percevoir l’influence de l’espace dans
l’appréhension d’une œuvre par les infimes variations des ombres qui surgissent, créant
un effet visuel près du trompe-l’œil.
Frank Stella a réalisé en 1960 ces « black paintings » (peintures noires) qui seront
sûrement les peintures qui annonceront le minimalisme. Son travail repose sur le principe
élémentaire du rapport couleur-forme. Et bien que ses oeuvres restent en deux
dimensions, elles se dégagent souvent de la forme rectangulaire des tableaux, ces toiles
prennent alors le nom de shaped canevas (toiles mises en forme).
Mas o Menos fait partie de celles-ci. Elle se caractérise par l’originalité de la forme de son
châssis qui détermine l’orientation des motifs de l’espace pictural, des bandes colorées qui
scandent la surface.
Elaine Sturtevant est une artiste postmoderne, qui reprend les chefs d’œuvre pour les
copier. Sa réflexion s’élabore autour de la crise de l’originalité qui naît à la suite du Pop
Art. Elle interroge le spectateur sur la difficulté de distinguer l’œuvre du simulacre, sur la
perte d’expérience et de réalité face aux œuvres.
Sont présentées dans cette expositions les copies des « black paintings ». En choisissant
Frank Stella, elle use d’ironie, puisqu’elle détourne la célèbre phrase de celui-ci : « what
you see is what you see » (ce que vous voyez est ce que vous voyez).
Vito Acconci est un performer qui s’est fait remarquer par sa radicalité. A l’origine,
intéressé par la poésie, il la délaisse pour se consacrer aux autres médiums artistiques,
tels que la photographie et la vidéo. Lors de ses performances, il explore l’espace réel,
l’espace social entre le spectateur et lui, les limites physiques de son corps.
Claim Excerpts est une performance de l’artiste, retranché dans une cave d’une galerie,
les yeux bandés et armé d’un pied de biche. Le but est de déclencher un état second chez
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l’artiste que le visiteur peut observer par l’intermédiaire d’une caméra dans l’espace de la
galerie.
La Marque Noire. Vue de l’exposition « Before (plus ou moins) » / Palais de Tokyo, photos : Marc Domage
Détail des œuvres : Sturtevant, Black Paintings
La Marque Noire. Vue de l’exposition « Before (plus ou moins) » / Palais de Tokyo, photos : Marc Domage
Détail des œuvres : Warhol, Electric chair ; Acconci, Claim excerpts ; Stella, Mas o Menos
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Kenneth Anger est un cinéaste psychédélique qui s’est intéressé au satanisme. Il est
l’undes pionniers du cinéma expérimental des années 60. Il rompt avec la tradition établie
et les conventions filmiques, en expérimentant les domaines strictement visuel et auditifs.
Son film Invocation of My Demon Brother (1969), pièce du cycle Magic Lantern
correspond tout à fait à cette nouvelle esthétique, la bande-son étant réalisée dans un
premier temps par Mick Jagger, puis par le groupe electrophilia (Steven Parrino et Jutta
Koether) en 1990.
Robert Smithson est une figure emblématique du courant Land Art. Dans la vague
moderniste, le Land Art tente de s’échapper du cadre de l’art du chevalet et des
institutions. En voulant renouveler le lien entre art et vie, Smithson se heurte à la nature
éphémère des éléments qu’il utilise et au gigantisme de ses formes.
Rundown (1969) est un film documentaire représentant une benne déversant une coulée
d’asphalte du haut d’une colline à Rome. Anti-forme et geste pictural démesuré, cette
coulée noire contredit l’idée d’un asphalte qui fige les éléments.
Dans le film Swamp (1969), le spectateur suit la marche dans un marais de Nancy Holt,
guidée par la voix enregistrée de Robert Smithson et limitée dans sa vision au seul objectif
de la caméra. Cette expérience de la limitation de la perception et de la perte d’orientation
affecte le visiteur dans sa propre appréhension de l’œuvre.
L'exposition présente également Mirror Vortex (1964), une pièce sculpturale qui crée des
perspectives kaléidoscopiques.
Andy Warhol est une figure mythique du Pop Art. En réaction à l’art abstrait, le Pop Art
utilise les icônes de la société de consommation –la célèbre conserve de soupe Campellset ses techniques pour le principe sériel. Warhol croise le glamour et le morbide dans ses
thèmes, aux couleurs vives et saturées s’ajoute un motif récurrent et parfois violent,
tranchant totalement avec les symboles qu’il véhicule.
Appartenant à l’ensemble plus large des Disaster Series, les sérigraphies sur papier
Electric Chairs neutralisent cette image emblématique de l’Amérique qu’est la chaise
électrique au même titre que le Coca-Cola ou Marilyn Monroe.
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La Marque Noire. Vue de l’exposition « Before (plus ou moins) » / Palais de Tokyo, photos : Marc Domage
Détail des œuvres : Smithson, Mirror Vortex
La Marque Noire. Vue de l’exposition « Before (plus ou moins) » / Palais de Tokyo, photos : Marc Domage
Détail des œuvres : Warhol, Electric Chairs
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BASTARD CREATURE
Richard Aldrich présente quatre peintures de petit format englobant toutes ses
recherches plastiques : typographies, collages, abstraction, compositions graphiques
entre autres. Aldrich est aussi le fondateur du label Skul, qui a sorti la plupart des disques
du groupe de Steven Parrino : Electrophilia
Amy Granat a la particularité de pratiquer des films 16mm expérimentaux sans caméra.
L'image est obtenue par la lumière passant dans les trous réalisés par ses soins et la
bande-son, de la même manière, est créée par la détérioration de la piste sonore. Pour
"La Marque Noire" elle présente le film qu'elle a réalisé en étroite collaboration avec
Parrino ainsi qu'une série de six films récents "the Saints" qui seront projetés sur l'une des
fenêtres du Palais de Tokyo, dans le cadre de l'intervention d'Olivier Mosset sur les
fenêtres du bâtiment.
Gardar Eide Einarsson pratique la photographie, la sculpture et l'installation. Il propose
ici "I am the master of my fate, I am the captain of my soul", un motif de grillage peint au
pochoir et à la bombe sur deux murs perpendiculaires. Cette pratique, qui emprunte à l'art
de la rue, se veut récurrente chez Einarsson.
Richard Kern produit des films et des photographies bien connus des milieux
underground depuis plusieurs décennies. Ses films sont en général courts, assez violents
et provocateurs. Pour "Bastard Creature" il montre "I Hate You Know", un film ayant pour
thème le meurtre et l'auto-mutilation réalisé en 1985.
Jutta Koether a collaboré étroitement avec Steven Parrino autour du projet musical
"Electrophilia". Elle se définit elle même comme "peintre, performer, participante". Sa
touche est très marquée par l'influence punk, avec une peinture noire ou très colorée. Elle
a en outre souvent collaboré avec des musiciens : Sonic Youth est un bon exemple.
Michael Lavine est un photographe américain qui a fait ses débuts aux côtés de la scène
grunge de Seattle avec des groupes comme Soundgarden ou Nirvana qui sont passés
d'un statut inconnu à la célébrité soudaine. Il est à présent bien installé dans l'univers de la
musique et des célébrités. Est présenté ici le portrait de Courtney Love, veuve sulfureuse
de Kurt Cobain, posant à genoux comme parfaite incarnation des noces du glamour et de
la mort.
Chuck Nanney utilise principalement des matériaux de récupération avec lesquels il
élabore des sculptures, des installations, des dessins et des bandes-son. Il affectionne
particulièrement les épingles, les extraits musicaux, le carton avec lesquels il confectionne
des oeuvres à l'aspect fragile, posées de façon précaire.
PALAIS DE TOKYO / DOSSIER ENSEIGNANTS /
La Marque Noire. Vue de l’exposition « Bastard creature » / Palais de Tokyo, photos : Marc Domage
Détail des œuvres : Aldrich, sans titre ; Jutta Koether, Female Force
La Marque Noire. Vue de l’exposition « Bastard creature » / Palais de Tokyo, photos : Marc Domage
Détail des œuvres : Amy Granat, Chemical scratch film et Spray Paint film
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Amy O’ Neill présente The Golden West, une demi-roue de chariot recouverte de
papillotes dorées tournant sur un podium. En pendant à l’installation, une vidéo projection
présentant des images d’archives sur le thème des festivités populaires et des parades de
rue. Amy O’Neill s’intéresse à ces dépouilles de carnavals depuis sa découverte de chars
de parade hors d’usage.
Mai-Thu Perret est une jeune artiste vivant entre New York et Genève qui propose
essentiellement des installations, des sculptures et des tableaux. Trois sculptures sont
présentées dans l'exposition sous le titre générique Heroine of the people. Deux sont
laquées en noir, la dernière est en papier mâché et grillage, dorée à la feuille d'or.
Blair Thurman met en scène l'imaginaire des circuits automobile et des voitures de
course. Il traduit les éléments du mythe pop américain en lignes abstraites dans son travail
(tableaux, installations ou structures en néon). Vanishing Point 2/3 : des néons colorés en
rouge qui reprennent un motif de customisation de voiture de course.
Elisabeth Valdez présente une série d'encres et de dessins sur papier, issus d'un livre qui
paraîtra en Juin 2007. Black Noise se veut un hommage collaboratif à Steven Parrino
sous la forme de bandes dessinées, toutes réalisées par un proche de l'artiste.
Banks Violette. Teinté de références au monde du heavy metal et du gothique, Kill
Yourself (twin) est une cascade de néons placée entre deux podiums de scène. Il est ici
question du thème du concert rock et de son pendant plus morbide : le suicide, parfois
considéré comme l’accomplissement du rock'n roll...
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La Marque Noire. Vue de l’exposition « Bastard creature » / Palais de Tokyo, photos : Marc Domage
Détail des œuvres : Mai-Thu Perret, Heroîne of the people
La Marque Noire. Vue de l’exposition « Bastard creature » / Palais de Tokyo, photos : Marc Domage
Détail des œuvres : Violette, Kill yourself ; Thurman, VanishingPoint 2/3
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ETC.
ENTRETIEN AVEC STEVEN PARRINO /
Ivo Zanetti : En fait, j'ai une question simple pour commencer. Comment avez-vous
rencontré Olivier Mosset ?
Steven Parrino : J'avais une exposition à Nature Morte, une petite galerie avec laquelle je
travaillais dans les années 80. J'empruntais des noms de clubs de moto pour les titres de
mes peintures. (...) Donc j'imagine qu'un ami d'Olivier est allé lui dire qu'un type faisait des
monochromes avec des titres comme Death to Motorcycle Gang... (...) Il voulait me
rencontrer... juste pour voir ce qui se tramait. C'est à peu près comme ça qu'on a fait
connaissance. Ca devait être autour de 1985, il y a donc presque 20 ans. Je me souviens
de son exposition à la galerie Olson, c'était avant que je le rencontre, il fait ces grands
monochromes noirs avec cette peinture brillante. J'ai beaucoup aimé et c'est très proche
de certains de mes travaux.
IZ : Vous êtes connus pour avoir fait un lien entre la moto et l'art minimal.
SP : C'est l'histoire du chopper. Prenez une grosse Harley, du type de celles qu'utilise la
police : en toile de fond, il y a l'idée du flic et du rebelle. Initialement, le chopper, c'est une
moto pour la police allégée de tous ses gros accessoires et rendue de cette manière aussi
légère que possible. (...) Et soudain, c'est comme si vous fabriquiez un objet minimal dans
le but d'aller plus vite. Vous retirez du poids, c'est une sorte de minimalisme pratique, et
finalement ça fait ressortir toute la beauté qu'il y avait sous le métal, ça réduit l'objet à son
essence, jusqu'à l'esthétique. (...) Ca a débuté avec l'expressionnisme abstrait qui traitait
de questions existentielles, des grandes lignes de l'existence. (...) Vous aviez aussi à cette
époque l'importation de la psychanalyse, Jung et Freud, et Pollock qui était même
constamment en psychanalyse. Et ensuite, vous aviez cette idée de l'atome qui circulait.
Ainsi, soudainement, toute votre existence, tout ce que vous pensiez de vous-même en
ces termes était réexaminé de manière radicale.
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ARTICLES SUR STEVEN PARRINO /
MOSSET, Olivier, Bomb Magazine, No. 56, Eté 1996 : 8, 1996
CHAILLOU, Timothée, extrait de "Scream Fresh", in VERSO Arts et lettres, n° 42 (Juillet
2006)
SEWARD, Keith, "Artists Books", Steven Parrino with a text by Lydia Lunch, Artforum
Décembre 1992, photo p. 85
QUELOZ, Catherine, "Inside the White Cube", Faces No. 5 & 6 Printemps 1987
MOUFARREGE, N.A. "East Village", Flash Art Hiver 1982
GAUTHIER, Michel, « Le foyer mis à sac », in L’Anarchème, MAMCO, 2002.
GAUTHIER, Michel, « Le temps des nécromants », in Fresh Théorie II, Léo Scheer, 2006.
LIVRES DE PARRINO /
- Amphetamine Monster Mill (1995)
Cet ouvrage est sorti à l'occasion d'une exposition éponyme de Parrino à la galerie Art et
Public de Genève. Il contient un texte de Robert Nickas.
- Exit / Dark Matter (2002)
Réappropriation de l'iconographie de la bande dessinée, des tabloïds, de la sous-culture
biker, No Wave et de la culture populaire américaine, ce livre a été le point de départ
d'une bande dessinée de 40 planches.
- The No Texts (1979-2003) (2003)
Florilège punk de pensées de Steven Parrino.
DISQUES DE PARRINO /
Steven Parrino a joué et enregistré de la musique sous le nom Electrophilia, seul ou
accompagné d'artistes comme Steve Di Benedetto ou Jutta Koether, artiste et
enseignante américaine d'origine allemande qui l'accompagnait au clavier pendant qu'il
jouait de la basse. Sa musique est proche de la Noise et éclaire sa peinture sous un autre
angle : celui du larsen ou de la distorsion. Les deux relèvent de l'anarchie présente dans
le punk rock : "chaos to order chaos", pour reprendre les mots de Steven Parrino.
- Electrophilia - Live France 1999 (1999)
- Electrophilia - Schock wave troop (2002)
- Electrophilia - Black Noise Practitioner (2004)
PALAIS DE TOKYO / DOSSIER ENSEIGNANTS /
EXPOSITIONS DE STEVEN PARRINO /
Expositions personnelles (sélection)
2006 : "Rétrospective 1977-2004", 22 Février - 7 Mai 2006, Mamco, Genève, Suisse
2003 : "Death in America", Galerie Jean Brolly, Paris
1998 : CAN, Neuchatel, Suisse
1995 : "Amphetamine Monster Mill", Art & Public, Genève
1988 : Galerie Sylvana Lorenz, Paris
1984 : Nature Morte Gallery, New York, NYC
Expositions collectives (sélection)
2006 : "Cosmic Wonder", Yerba Buena Center for the Arts, San Francisco, CA
2005 : "The Painted World", P.S.1 Contemporary Art Center, Long Island City, NY
2004 : "Following and to be followed", Le Consortium, Dijon
2000 : "Punk and Bloat", Molloy College, Rockville, New York
Performances (sélection)
1999 : "Trashed Black Room", concert-performance d'Electrophilia, Le Consortium, Dijon
1995 : 45's, John Gibson Gallery, New York, NYC
1988 : Filter, Atheneum University of Dijon
1986 : Butt, "Modern Longings", The Kitchen, New York, NYC
1982 : Filter, Genève
1979 : Disruption, University of Hartford, Connecticut
LES JEUDIS DE LA MARQUE NOIRE /
Drapeau noir sur No New York
Retrouvez le programme des jeudis sur internet : www.palaisdetokyo.com
Rédaction du dossier enseignants : Adeline Wessang, Louise Hervé, Mark Alizart et
Agnès Noël
PALAIS DE TOKYO / DOSSIER ENSEIGNANTS /
CONTACT /
Pour définir les modalités et le contenu pédagogique de votre visite, prenez contact avec :
Benjamin Bardinet
Responsable de l’Action éducative
01 47 23 90 79
[email protected]
INFORMATIONS PRATIQUES /
Horaires des visites : 14h, 16h ou 19h du mardi au vendredi
Tarif : Une visite sur mesure de 1h30 : 70 € (billets d'entrée compris).
ACCES TRANSPORTS /
METRO
ligne 9 (Pont de Sèvres-Mairie de Montreuil) descendre à Alma Marceau ou Iéna
ligne 6 (Nation Charles de Gaulle Étoile) descendre à Trocadéro
BUS
- ligne 32 descendre à Iéna.
- ligne 42 descendre à Alma-Marceau.
- ligne 63 descendre à Iéna ou Alma-Marceau.
- ligne 72 descendre à Musée d'art moderne-Palais de Tokyo.
- ligne 80 descendre à Alma-Marceau.
- ligne 92 descendre à Alma-Marceau.
RER C
(C1 Pontoise, C2 Massy-Palaiseau, C3 Argenteuil, C4 Dourdan-la-Forêt, C5 Versailles
Rive Gauche, C6 Saint-Martin d'Étampes, C7 Saint-Quentin-en-Yvelines, C8 VersaillesChantiers) descendre à Pont de l'Alma.
PROCHAINE EXPOSITION /
THE THIRD MIND
27/09 - ??
William Burroughs et Brion Gysin ont collaboré ensemble de nombreuses années à
l’écriture d’un livre qui n’a jamais vu le jour. Intitulé The Third Mind, ce livre devait être un
collage monstre de textes et de dessins dont il ne reste que 32 planches. S’inspirant de
cette histoire, Ugo Rondinone, artiste de renommée internationale, proposera à son tour
une exposition intitulée The Third Mind : un montage inédit d’œuvres d’artistes
envahissant les 3000 mètres carrés du Palais de Tokyo. A voir absolument à partir du 27
septembre…