1 Les auxiliaires d`élevage au Sénégal : problématique et
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1 Les auxiliaires d`élevage au Sénégal : problématique et
Les premiers soins de santé animale au 21ème siècle : adaptation des règles, des politiques et des institutions Mombasa, Kenya, 15-18 octobre 2002 Les auxiliaires d’élevage au Sénégal : problématique et perspectives d’actions Coly Raphaël 1, Youm Babacar G. 2 & Ly, Cheikh 2 1 Coordination du Projet PACE Sénégal, Direction de l’Elevage, Dakar, Sénégal Service d’Economie rurale et Gestion, Ecole Inter-Etats des Sciences et Médecine Vétérinaires de Dakar, EISMV, BP : 5077, Dakar 1 1. Introduction Comme dans la plupart des pays africains, le secteur de l’élevage constitue au Sénégal un maillon essentiel de l’économie nationale. Cependant la productivité des systèmes reste faible pour plusieurs raisons dont les contraintes en santé animale et la rigidité des systèmes d'élevage. Ainsi, en vue d'améliorer les systèmes de production, de nombreuses institutions étatiques et organisations non gouvernementales ont investi et sont intervenues dans la santé animale de base à travers la formation et l'encadrement des éleveurs, d'une part, et d'autre part, dans l'approvisionnement en produits et intrants vétérinaires. Ces interventions ont connu des évolutions particulières dans le cadre du désengagement de l'Etat et ont entretenu l’évolution toute particulière d’un système des auxiliaires qu’il est devenu incontournable d’évaluer pour des mesures idoines. Le recours à ce système alternatif par les pouvoirs publics et leurs partenaires au développement vise à améliorer la santé animale au Sénégal. A cet effet, les auxiliaires d’élevage sont considérés dans certains cas comme un levier extrêmement prometteur pour accroître l’accessibilité des services zoosanitaires en zone rurale. Jusque vers les années 70, les auxiliaires étaient unanimement appelés "vaccinateurs". Aujourd'hui, plusieurs termes sont utilisés par les projets et O.N.G. pour les désigner. Sous le vocable "assistants-vétérinaires" sont regroupés des éleveurs qui sont formés pour jouer un rôle dans la santé animale exclusivement. On y rencontre les Auxiliaires en Santé Animale (A.S.A.), les Délégués en Santé Animale (D.S.A.), les Auxiliaires Vétérinaires (A.V.), les Vétérinaires aux Pieds Nus (V.P.N.) et les para-vétérinaires. Les "Assistants" d'élevage sont, quant à eux, des éleveurs qui, en plus de la santé animale, reçoivent une formation pour jouer un rôle en zootechnie/alimentation, dans le suivi et la gestion des parcours et en zooéconomie. Ce sont les Promoteurs d'Elevage (P.E.), les Auxiliaires d'Elevage (A.E.) et les Relais techniques (R.T.). Toutes ces appellations révèlent des approches et conceptions différentes voire divergentes qui animent des critiques et controverses au sujet du personnel paravétérinaire, singulièrement depuis que la privatisation de la fonction vétérinaire est devenue une option claire de la part de pouvoirs publics. Le système des auxiliaires, dès ses débuts a été l’objet de vives critiques de la part des techniciens d’élevage. Malgré l’expérience, il continue d’être la cible de critiques plus ou moins justifiées surtout de la part des techniciens de base. Il importe donc de pouvoir visiter la question des auxiliaires afin de dégager des orientations plus précises et indispensables pour la reconstitution d'un cadre légal et réglementaire dans le sens de l'intérêt général. 2. Historique Durant les vingt dernières années, le secteur a fait l’objet de différentes réformes dont la plus récente a visé l’ajustement sectoriel global. Ainsi, le Sénégal s’est engagé dans un vaste programme d’ajustement sectoriel qui a entraîné la restriction des services de l’élevage et le transfert de certaines fonctions à d’autres acteurs. Depuis le début des années 80, l’environnement des services vétérinaires connaît des changements structurels fondamentaux. Ces changements sont introduits par des politiques de redressement économique et d’ajustement structurel mises en œuvre par la plupart des Etats africains et sous l’impulsion des institutions financières internationales. Après pratiquement une décennie d’expérimentation et de réalisations, les processus de privatisation se consolident peu à peu et sont considérés comme irréversibles. En 1986, l’Etat 1 Coordination du Projet PACE Sénégal, Direction de l’Elevage, Dakar, Sénégal Service d’Economie rurale et Gestion, Ecole Inter-Etats des Sciences et Médecine Vétérinaires de Dakar, EISMV, BP : 5077, Dakar 2 1 Les premiers soins de santé animale au 21ème siècle : adaptation des règles, des politiques et des institutions Mombasa, Kenya, 15-18 octobre 2002 sénégalais prit des mesures de libéralisation de l’économie nationale. Dans le domaine de l’élevage, cette libéralisation touche plusieurs domaines. Le marché vétérinaire découlant essentiellement des besoins en produits physiques (médicaments, vaccins) est devenu le théâtre de plusieurs acteurs qui se partagent des fonctions curatives, préventives et parfois promotionnelles (LY et DOMENECH, 1999). Il s’agit essentiellement de prestataires de services publics ou privés, des éleveurs en groupement d’éleveurs, des organisations non gouvernementales et de ce qui est appelé le système des auxiliaires. 2.1. Les institutions nationales Jusque vers les années 70, les auxiliaires étaient unanimement appelés «vaccinateurs» (NDIAYE, 1996). Le Projet de Développement de l’Elevage au Sénégal Oriental (PDESO) a été l’institution première dans la formation des auxiliaires au Sénégal. Après le PDESO, d’autres institutions à actions nationales ou locales ont suivi. Aujourd’hui, les institutions intervenant au niveau national dans la promotion du système des auxiliaires sont des démembrements de l’Etat sénégalais et sont constituées essentiellement par la Direction de l’Elevage et les sociétés de développement. Par l’intermédiaire du Programme National de Vulgarisation Agricole (PNVA), du Projet d’Appui à l’Elevage (PAPEL) et du Programme PanAfricain de Lutte contre la Peste bovine (PARC), la Direction de l’Elevage du Sénégal se distingue particulièrement dans la formation et l’encadrement des auxiliaires. Le PNVA intervenant dans la zone sylvo-pastorale a officiellement formé 35 auxiliaires dans le département de Linguère entre 1989 et 1995 (NDIAYE, 1996). Le PAPEL quant à lui s’est intéressé à l’encadrement des auxiliaires déjà formés par le PNVA dans ce département. Le projet intervient également dans le Bassin Arachidier. Enfin, le PARC dont l’implication dans le système des auxiliaires se manifeste dans la définition des programmes de formation, n’a pas formé d’auxiliaires. Les sociétés de développement ont été nombreuses à intervenir de façon directe dans la formation des auxiliaires. Cependant, les sociétés impliquées dans le système et dont le rayon d’action est très important sont la Société de Développement des Fibres Textiles (SODEFITEX) et la Société pour l’Aménagement et l’Exploitation des Terres du Delta de la Vallée du Fleuve Sénégal et de la Falémé (SAED). A Kolda, la SODEFITEX a formé 227 relais techniques Une autre structure de développement impliquée dans le système des auxiliaires est l’Office National de Formation Professionnelle (ONFP). L’ONFP ne forme pas des auxiliaires mais définit des programmes de formation et de perfectionnement pour les auxiliaires, puis finance, sur la base d’un contrat, les structures de formation ciblées. En 1994, l’ONFP a financé la formation et le perfectionnement de 98 auxiliaires (NDIAYE, 1996). 2.2. Les institutions à implication locale La formation des auxiliaires est une activité programmée par certaines institutions dés leur conception. C’est pourquoi, la plupart des auxiliaires formés à travers le pays le sont par ces institutions. Parmi ces institutions, on peut citer : l’Association pour le Développement de Namarel et de ses Alentours (ADENA), qui, de 1991 à 1994, a formé 22 auxiliaires dans la zone sylvo–pastorale ; Vétérinaires Sans Frontières (VSF) ONG particulièrement présente à Kolda y a formé de 1992 à 1995, 72 auxiliaires (NDIAYE, 1996). Actuellement, beaucoup d’organisations s’occupent de santé animale à partir de structures d’intervention mises en place par ou avec le relais des collectivités locales. Très souvent, ces structures n’ont pas systématiquement pour objectif explicite l’amélioration de l’efficacité du système de santé animale et du suivi de leurs propres programmes de formation. Elles ont souvent une implication ponctuelle caractérisée par une demande de la population à partir d’un besoin ressenti par elle-même ou les institutions. Dans ce cadre, le Programme Intégré de Podor (PIP) a formé en 1992, 34 auxiliaires membres de l’Association Dental Bamtaare Toro sur financement du CIMADE, une ONG française. L’Eglise Evangélique Luthérienne au Sénégal (EELS) dans le département de Linguère, de cette manière, a formé 40 auxiliaires de 1983 à 1994 et elle continue à travailler avec plus de 80 auxiliaires en 2001. Actuellement, l’EELS a recruté un docteur vétérinaire pour mieux comprendre le système et réussir son implication. La même situation est observée au CISV (ONG italienne) qui a formé dans le département de Linguère, plus particulièrement dans la Communauté Rurale de Mboula 22 auxiliaires. 2 Les premiers soins de santé animale au 21ème siècle : adaptation des règles, des politiques et des institutions Mombasa, Kenya, 15-18 octobre 2002 3. Evolutions possibles du système La fonction d’auxiliaire implique une mobilisation en temps relativement importante car les animaux sont éloignés du village, les soins peuvent être longs, la demande de services importante etc. Cette mobilisation doit aussi se faire généralement à des périodes où les travaux sont très importants comme en hivernage, alors que les revenus qu’elle procure sont insignifiants. La constitution progressive d’un «métier d’auxiliaire» semble être établie et les auxiliaires ont diverses compréhensions de leur rôle par rapport aux éleveurs et aux professionnels. On retrouve en concurrence le rôle d’assistant aux professionnels, le rôle d’agent communautaire, celui de conseiller aux éleveurs et un rôle informel dans le circuit de distribution des médicaments vétérinaires. Les nombreuses actions des auxiliaires dans le circuit de distribution des intrants vétérinaires, rendent celui-ci difficile à contrôler et, par conséquent, à assainir (figure 1). Laborex Cophase Sodepra Officines Pharmacies Senevet Labo Cabinets Vétérinaires Sopela Sosedel Proeles Commerçants Marchands Fraude Fraude Auxiliaires PVV ou Dépôt Louma Eleveurs + villages Figure 1. Circuits de distribution des intrants vétérinaires dans le département de Linguère. A l’origine, les programmes qui appuient la mise en place des auxiliaires présupposent que ceux-ci, parce qu‘ils sont éleveurs et nommés par un groupement travaillent d’abord pour l’intérêt collectif et leur groupement de référence, malgré les conditions difficiles. Il est, ainsi, légitime de se demander, si dans certains cas, les auxiliaires n’acceptent pas cette fonction plutôt dans le cadre d’une stratégie strictement individuelle et privée qui ne fait que s’appuyer sur l’opportunité économique offerte par un travail à finalité collective. On assiste ainsi à un véritable détournement d’objectif guidé par les intérêts personnels de l’auxiliaire. 3 Les premiers soins de santé animale au 21ème siècle : adaptation des règles, des politiques et des institutions Mombasa, Kenya, 15-18 octobre 2002 Il y a donc selon MESTRE (1995) deux évolutions : l’abandon de la fonction d’auxiliaire pour ne pas mettre en danger d’autres activités ou la rentabilisation de la fonction en devenant un vendeur de services et de médicaments. Cette deuxième évolution se renforce aujourd’hui avec l’installation de plus en plus importante des vétérinaires privés. En effet, la présence dans une zone d’intervention d’un vétérinaire privé se traduit par l’existence d’un prix auxiliaire pour les médicaments qui permet de dégager une marge par rapport au prix éleveur. La réalité du terrain montre aujourd’hui que la cohabitation entre privés et auxiliaires se précise et les rapports entre ces différents acteurs semblent être des rapports plutôt strictement commerciaux : le premier s’active dans la formation du second pour en faire non pas un agent de développement local mais plutôt un véritable partenaire commercial qui l’aide dans l’écoulement de ses produits. Dans la définition des contrats de travail qui en découle des dérapages sont enregistrés et sont à l’origine de la réticence de certains professionnels dans la formation des auxiliaires ou de certaines critiques portées au système. 4. Failles du système Dès ses débuts, le système des auxiliaires a été l’objet de vives critiques de la part des techniciens d’élevage. Ces critiques ont trouvé un écho favorable au Séminaire de l’Elevage d’avril 1993 à Saly. En effet, il y a été recommandé l’arrêt pur et simple de la formation des auxiliaires vétérinaires (SAR, 1993). Cependant sur le terrain, cette recommandation n’a pas été suivie et les critiques continuent. Les dernières en date qui ont fait couler plus de salive que d’encre sont relatives à la conception et à l’exécution du système (NDIAYE, 1996). Les critiques sur la conception du système sont encore toujours l’œuvre de techniciens d’élevage. Pour ces derniers, l’exercice de la médecine vétérinaire doit reposer sur une base juridique et répondre à une déontologie. Le manque d’harmonisation des programmes de formation des auxiliaires ne facilite pas le contrôle des compétences des auxiliaires. Le système est accusé aussi d’occulter le problème des cadres intermédiaires que sont les Agents Techniques d’Elevage (ATE) et les Ingénieurs des Travaux d’Elevage (ITE). Selon NDIAYE (1996), les critiques concernent les modalités d’intervention des structures formatrices, l’attitude, le comportement et les interventions des auxiliaires. Les structures formatrices sont nombreuses et ne coordonnent pas leurs programmes. Une telle situation conduit nécessairement à des différences de compétences et pose un problème de contrôle de leurs activités. Certains auxiliaires outrepassent leurs prérogatives par exemple en travaillant hors de leur zone ou en effectuant des actes interdits comme l’usage des antibiotiques comme moyen de prévention. Sur le terrain, les ATE racontent que les auxiliaires substitueraient les produits vétérinaires en mettant dans les flacons vides des produits non médicamenteux. Par exemple, dans une bouteille d’IvomecND, ils mettraient de la glycérine et dans une bouteille d’AnabotND, de l’eau et de la craie blanche. Par ailleurs, les auxiliaires en complicité avec les éleveurs posent un problème de statistiques officielles sur le cheptel et les interventions vétérinaires puisqu’ils ne mentionnent pas toutes leurs interventions. 5. Recommandations Pour éviter les blocages observés et l’absence de politique claire sur la question des auxiliaires, il est nécessaire que soient engagés des échanges organisés entre les différents corps professionnels. Des concertations doivent jeter les bases d’un arbitrage de l’Etat qui, au préalable, doit prendre en compte le principe d’une ouverture de la pratique des soins aux animaux à d’autres corps que les vétérinaires. Aujourd’hui, l’utilisation des auxiliaires d’élevage est devenue une obligation économique pour les opérateurs privés mais des actions d’accompagnement doivent être entreprises en urgence. 5.1. Régulation et assainissement Les auxiliaires sont pour la plupart d’origine et de formation diverses. Leur régulation passe d’abord par une volonté politique de l’Etat en collaboration avec les autres acteurs, à mettre en place un cadre juridique et réglementaire combiné à un environnement financier favorable pour la médecine vétérinaire et les soins aux animaux. Face à la libéralisation du marché vétérinaire, l’assainissement du système des auxiliaires passe nécessairement par la création d’un partenariat entre auxiliaires et vétérinaires privés susceptibles de jouer 4 Les premiers soins de santé animale au 21ème siècle : adaptation des règles, des politiques et des institutions Mombasa, Kenya, 15-18 octobre 2002 un plus grand rôle dans leur contrôle. Pour la pérennisation d’une telle relation, la création d’une législation clarifiant le statut de tous les opérateurs et la mise en place de conditionnalités réglementant leurs interventions, le contenu et les modalités de formation s’avère indispensable. Il est nécessaire de : • définir un lien juridique entre les auxiliaires et les vétérinaires privés installés dans leurs localités ; • responsabiliser comme «donneurs d’ordre » hiérarchisés les opérateurs vétérinaires privés utilisant les auxiliaires afin qu’ils aient l’obligation d’établir des relations contractuelles transparentes, de participer à la formation continue et surtout de prendre la responsabilité morale et juridique de leurs employés auxiliaires ; • renforcer les capacités de contrôle, de formation et d’information ; • procéder à un recensement national de tous les auxiliaires formés en s’appuyant sur les organisations formatrices et leurs collaborateurs privés ; • coordonner les formations en harmonisant les programmes de formation des auxiliaires et en les adaptant aux objectifs globaux visés par chaque structure formatrice ; • mettre en place avec les structures d’encadrement (ONG, projets..) des mécanismes de contrôle et de suivi et clarifier leurs relations avec les autres acteurs. Le tableau 1 présente un prototype de programme de formation pour les auxiliaires. Tableau 1. Proposition d’un programme de formation pour les auxiliaires d’élevage THEMES Structures formatrices Service de l’élevage (programme officiel)* Structures d’appui à l’élevage (Projets, ONG) Vétérinaires privés Pathologies étudiées Gestes techniques Connaissances médicaments Antiparasitaires Temps d’attente Traitements Maladies parasitaires Maladies nutritionnelles (pathologies) Reconnaissance des Maladies Déclarées Légalement Contagieuses (MDLC)* Maladies parasitaires Maladies nutritionnelles (pathologies) Reconnaissance des Maladies Déclarées Légalement Contagieuses (MDLC)* Injections (S/C, IM) Vaccinations Castration non sanglante Injections (S/C, IM) Vaccinations Castration non sanglante Antiparasitaires Temps d’attente Parasitoses Plaies et Soins de base Parasites et maladies parasitaires Pathologies Autres maladies** Injections (SC, IM) Vaccination Castration non sanglante Antiparasitaires Antibiotiques Vaccins Nouvelles spécialités apparues sur le marché Parasitoses Plaies Autres maladies** Alimentation et Traite Parasitoses Plaies et Soins de base Méthode de stockage des aliments distribution des aliments Complémentation alimentaire Hygiène alimentaire et de la traite NB : * Reconnaissance facilitant la surveillance de ces maladies par les pouvoirs publics en les déclarant. **Toutes les autres maladies (parasitaires, infectieuses etc..) dont le professionnel vétérinaire juge que le traitement par les auxiliaires est sans risque et pour lequel il s’engage à porter la responsabilité civile. Pour un meilleur suivi et une bonne canalisation des auxiliaires, la dotation aux vétérinaires privés de moyens logistiques (véhicules adaptés aux zones d’accès difficiles) à travers la facilitation de l’accès au crédit ou autres institutions de financement est importante. Et cela pour plusieurs raisons : • les auxiliaires sont localisés dans des zones d’accès difficile et leur supervision nécessite des déplacements ; • la supervision des auxiliaires pendant les campagnes de vaccination auxquelles ils sont fortement impliqués, nécessite également des moyens ; 5 Les premiers soins de santé animale au 21ème siècle : adaptation des règles, des politiques et des institutions Mombasa, Kenya, 15-18 octobre 2002 • • le fait de se rendre de temps en temps auprès des éleveurs accompagnés des auxiliaires, augmente chez eux la confiance accordée au service rendu ; les déplacements temporels effectués auprès des éleveurs permettront aux vétérinaires privés de consolider leurs rapports avec les éleveurs par le biais des conseils donnés, lesquels, finissent à long terme, par faire asseoir une clientèle potentielle. 5.2. Implication des organisations professionnelles Les structures professionnelles (ordre des docteurs vétérinaires, associations des ingénieurs…), ne doivent pas se limiter à la seule défense de leurs intérêts professionnels car elles doivent chercher à propulser chez leurs membres des normes supérieures de prestations de services. De cette manière, ces institutions peuvent crédibiliser leur profession et la faire respecter par tout autre corps voulant intégrer le métier vétérinaire, en l’occurrence les auxiliaires d’élevage. Une telle approche permet de participer aux orientations des politiques d’élevage qui ne doivent pas être à la seule discrétion des décideurs politiques. LY et DOMENECH (1999) affirment ainsi que le grand danger que court une institution professionnelle vétérinaire ne défendant que des intérêts professionnels est une orientation corporatiste recherchant des protections administratives. La mobilisation des forces du marché doit être mise à profit pour impulser une tendance favorisant des normes supérieures de prestations de services. 5.3. Implication des structures d’appui à l’élevage (ONG, Projets) Les activités des projets en matière de santé animale sont nombreuses et diversifiées. Les problèmes se posent dans les cas des auxiliaires formés puis abandonnés à eux-mêmes quelquefois durant le projet même et à la fin du projet. Les manquements observés font que les auxiliaires, dans la mesure où leur activité devient purement privée et commerciale et n’est pas réellement au service ou sous le contrôle de leur groupe ou de celui d’autres opérateurs, peuvent certainement s’intégrer dans les réseaux de marchés clandestins. Pour pallier ces situations, il est nécessaire d’adopter une démarche impliquant de : • sortir du cadre «projet» qui impose, dans une programmation souvent prédéfinie en dehors des acteurs, la réalisation d’actions et l’atteinte de résultats quantifiés de façon rigide dans un temps fixe, sans toujours prévoir la pérennisation des structures mises en place ; • associer au management des auxiliaires, les vétérinaires privés ainsi qu’à l’élaboration des programmes de formation ; • avoir des thèmes fédérateurs porteurs et adaptés à l’évolution socio-économique de la zone, qui pourraient être suivis et contrôlés par les privés de la localité ; • harmoniser les actions entre les différents intervenants dans la zone pour favoriser leur collaboration. 5.4. Responsabilisation des vétérinaires privés Si la fourniture et la privatisation des services vétérinaires sont relativement évidentes dans les régions offrant un potentiel élevé ou moyen, le grand défi à relever par les vétérinaires privés est celui des prestations de services dans les régions les plus reculées. Pour ce faire, le recours à des auxiliaires d’élevage apparaît comme la meilleure approche afin d’améliorer les conseils et l’appui aux éleveurs. On ne peut attendre des auxiliaires qu’ils aient l’expérience et les compétences des vétérinaires hautement qualifiés et il est important de reconnaître les limites dans leur formation. Les responsables des services d’élevage devraient veiller à ce que ne soient pas formés trop d’auxiliaires. De plus, lors de leur formation, il faut souligner les dangers d’un sous-dosage des médicaments et essayer d’impliquer les vétérinaires dans la surveillance en les liant aux activités d’un cabinet. Un tel lien est bénéfique aussi bien pour les vétérinaires mais aussi pour les auxiliaires. Les auxiliaires sont particulièrement bien placés pour créer un environnement porteur indispensable pour que les vétérinaires étendent leurs pratiques et soient tentés de travailler également dans les régions actuellement peu attrayantes. C’est pourquoi, dans leur relation avec les privés qui paraît être la seule alternative pouvant valoriser leurs compétences, une supervision permanente par ces derniers, doit être prévue, de même qu’une formation destinée à renforcer leurs motivations et leurs aptitudes. 6 Les premiers soins de santé animale au 21ème siècle : adaptation des règles, des politiques et des institutions Mombasa, Kenya, 15-18 octobre 2002 6. Expérimentation en cours dans le cadre du PACE pour la liaison entre praticiens vétérinaires et auxiliaires. Dans le cadre de la surveillance épidémiologique des maladies animales, le Programme PACE développe une approche nouvelle qui vise l’implication des éleveurs et de leurs associations dans le contrôle des maladies. Cette ultime échelle que constituent les éleveurs finalise l’établissement d’une chaîne cohérente pour une meilleure assise du système de surveillance épidémiologique. Elle a pour ambition d’identifier et de former les relais déjà existants pour la collecte de données au niveau des troupeaux et de la diffusion des informations sanitaires utiles vers les éleveurs. L’intervention s’appuiera sur les activités nécessaires susceptibles d’améliorer leurs capacités d’identification et de surveillance des principales maladies animales afin d’en faire un maillon utile et efficace au système global de surveillance épidémiologique. Des projets antérieurs comme le Programme National de Vulgarisation Agricole (PNVA), le Projet de Développement des Espèces à Cycle court (PRODEC) et le Projet d’Appui à l’Elevage (PAPEL) ainsi que des ONG ont aidé à la formation de ces relais dénommés «auxiliaires d’élevage». Bon nombre d’entre eux ont pu être intégrés par les vétérinaires privés dans leurs cabinets. Ils rendent service à ces derniers lors des interventions de masse comme les campagnes de vaccination, et sont même parfois chargés de gérer un dépôt de pharmacie placé par le privé dans des villages éloignés de leur point d’installation. Ils devront à cet effet jouer un rôle très actif dans le programme, en tant qu’éléments de base pour l’épidémiosurveillance. L’objectif visé dans ce programme est d’améliorer les connaissances épidémiologiques des principales maladies animales des éleveurs à l’effet de mieux les impliquer dans la surveillance épidémiologique des principales maladies animales. Dans ce programme, il ne s’agit pas de former de nouveaux relais techniques au sein des éleveurs mais, d’organiser une série de rencontres de sensibilisation avec ceux déjà opérationnels et rattachés à des cabinets vétérinaires privés à l’effet de les préparer à une implication effective dans la surveillance épidémiologique. Pour ce faire, les vétérinaires privés seront mis à contribution dans l’identification et la sélection de ces auxiliaires. Car la plupart d’entre eux sont utilisés lors des campagnes de vaccination pour la sensibilisation des éleveurs, la vaccination des animaux et également pour les activités de routine telle que la distribution des médicaments vétérinaires. Seuls, les auxiliaires qui officient donc sous la responsabilité d’un vétérinaire privé seront conviés à ces rencontres car pour des besoins de contrôle des agissements de ces derniers et pour pouvoir mesurer ultérieurement les résultats et les impacts de l’implication de ces auxiliaires, il est impératif de disposer de ces informations auprès des vétérinaires privés. Ces mesures-repères ou indicateurs seront, entre autres, le nombre de foyers signalés aux vétérinaires privés par les auxiliaires. Pour une meilleure efficacité de la perception des instructions données à l’occasion de ces rencontres et une application efficiente du programme et de l’utilisation des outils didactiques, il est préférable que ces derniers aient été alphabétisés, formés dans le cadre de programmes de structures d’intervention (projets, ONG, etc..) ou par les vétérinaires privés qui les utilisent et qu’ils soient issus d’un groupement d’éleveurs. Le nombre d’auxiliaires à former étant au nombre de 300 sur l’ensemble du territoire, une répartition moyenne de 6 par vétérinaire privé sera retenue pour cette première expérience. Les vétérinaires privés ciblés sont au nombre de 46. Les rencontres de sensibilisation seront des fora organisés au niveau des régions. Ces rencontres dureront une journée entière et réuniront les vétérinaires privés de la localité et auxquels les auxiliaires à inviter sont rattachés, les représentants des maisons d'éleveurs et les Inspections Régionales des Services Vétérinaires. 7. Conclusion Les auxiliaires dans leur rôle d’assistants aux professionnels et d’agents communautaires pour l’exécution des services offerts aux éleveurs sont devenus des acteurs de développement local importants. Aujourd’hui, la tendance s’oriente vers une collaboration avec les vétérinaires privés installés dans la zone. Une telle 7 Les premiers soins de santé animale au 21ème siècle : adaptation des règles, des politiques et des institutions Mombasa, Kenya, 15-18 octobre 2002 évolution constitue une dimension nouvelle et stratégique qui doit faire l’objet de mesure d’accompagnement afin que les systèmes de santé animale soient plus performants. 8. Bibliographie consultée BA, M. La commercialisation des intrants vétérinaires au Sénégal. La situation post-dévaluation et les perspectives Mamadou, Thèse Doct. vét. Dakar. N° 3 – 2001. CISSE, A. La Profession Vétérinaire au Sénégal - Activités, Moyens et Contraintes face à la Privatisation. - Thèse Doct. vét. Dakar - N° 5 - 1996. LEONARD, D.K., LEE, K.P., LY C. & WOODS, P.S. .The new institutional economics of privatising veterinary services in Africa. 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