Fluorures
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Fluorures
Fluorures Le fluor est un gaz halogène présent dans la nature uniquement sous forme de fluorures, dont le plus important quantitativement est le fluorure de calcium (spathfluor). On le trouve également dans la cryolithe (alumino-fluorure de sodium), dans de nombreux silicates (topaze, tourmaline, apatite, lépidolithe…) sous forme de fluoro-phosphates. Les fluorures sont beaucoup employés dans l’industrie : pétrochimie, synthèse organique, verre, production d’aluminium (le procédé de décomposition électrolytique de l’alumine à l’état fondu utilise un « fondant », mélange de cryolithe et de fluorure de calcium, pour abaisser la température de fusion de l’aluminium). Ainsi, le fluor, qui se dégage sous forme de composés volatils, est le principal polluant de l’industrie de l’aluminium. Les fluorures ont des propriétés insecticides et raticides. Sous forme de fluorures alcalins, ils sont utilisés comme antirouille. Le fluor parvient facilement à l’organisme, en grande partie par les eaux de boisson ainsi que par les fruits et légumes. Le thé est le végétal le plus riche en fluor, celui-ci passant facilement dans l’eau de l’infusion. La richesse de l’eau en fluorures varie suivant son origine (la plupart des eaux minérales en contiennent des quantités notables, les plus riches étant d’origine éruptive profonde, comme l’eau de Vichy), mais dépend le plus souvent de contaminations industrielles ou agricoles : zones de production ou d’utilisation de phosphates et d’engrais phosphatés, et surtout rejets des usines de production d’aluminium par électrolyse. Les fluorures sont de puissants inhibiteurs enzymatiques qui agissent sur plusieurs enzymes de la glycolyse comme l’énolase phospho-énol-pyruvique. Ils inhibent également la lipase et diverses enzymes de la phosphorylation oxydative. Les fluorures forment avec le calcium, les phosphates et le fer des sels très stables et insolubles. Ainsi l’apatite (phosphate de calcium complexe), composant minéral de l’os et de l’émail, est-elle transformée en fluoro-apatite, beaucoup plus stable et moins accessible à la résorption calcique. Cette propriété est à l’origine de leur tropisme très important pour les zones calcifiées de l’organisme et de leur utilisation thérapeutique dans la prévention des caries (aux doses de 1 à 2 mg par jour). En revanche, leur utilisation dans le traitement préventif de l’ostéoporose trabéculaire (posologie : 25 à 50 mg par jour) est abandonnée, en raison du risque de fluorose iatrogène. Au niveau dentaire (surtout chez les enfants), ils diminuent la solubilité de l’émail dans les acides provenant du métabolisme glucidique des micro-organismes de la plaque dentaire et inhibent la formation de ces acides. De ce fait, de nombreux pays d’Europe et les États-Unis supplémentent systématiquement l’eau potable en fluorures (0,5 à 1 mg/l). La fluoration de l’eau n’existe pas en France. L’absorption intestinale du fluor est très rapide et quasi totale. Dans la circulation sanguine, le fluor se trouve sous forme libre, mais disparaît rapidement par suite de son affinité pour les tissus osseux et dentaires (50 % des doses absorbées sont stockés dans le tissu osseux). Le taux sérique du fluor est en équilibre physicochimique avec celui du fluor osseux. Le taux de base en fluorures est donc un bon reflet du contenu osseux en fluor. L’élimination des fluorures est essentiellement urinaire et débute rapidement avec l’exposition, mais peut se prolonger plusieurs jours, car la demi-vie d’élimination des fluorures est triphasique (7 heures, 10 jours, 8 ans). L’absorption pulmonaire est importante pour les personnes exposées professionnellement aux poussières et aux fumées (ou au gaz comme l’acide fluorhydrique). La méthode de dosage des fluorures, dans le sérum et les urines, utilise une électrode ionique sélective. La technique analytique utilise une méthode par incrément sur chaque échantillon. Le dosage des fluorures dans le sang ou le plasma en fin de poste de travail est un bon reflet de la charge corporelle et de l’exposition des heures précédentes ; cependant, ce dosage n’apporte pas d’avantage par rapport au dosage dans les urines s’il n’y a pas d’altération de la fonction rénale. Il n’est pas répertorié de valeur d’indice d’exposition, mais seulement une valeur de référence dans la population générale. Le dosage dans les urines permet, pour un prélèvement effectué en début de semaine, avant la reprise du poste de travail, d’évaluer la charge corporelle, tandis qu’un prélèvement effectué en fin de poste de travail permet d’évaluer le niveau d’exposition pendant la durée du poste : • sérum ou plasma (population générale) : < 20 μg/l ; • urines : – population générale : < 1 mg/g de créatinine ; – sujet exposé : avant prise du poste : < 3 mg/g de créatinine ; à la fin du poste de travail : < 10 mg/g de créatinine. L’interprétation des résultats obtenus doit tenir compte d’un apport éventuel de fluorures par l’alimentation ou par une eau de boisson. Certains médicaments contiennent des taux non négligeables de fluorures. Les dérivés fluoro-hydrocarbonés augmentent l’élimination urinaire du fluor. Les principaux signes de l’intoxication aiguë sont des troubles gastrointestinaux importants (nausées, vomissements, diarrhées), des troubles neuromusculaires (accès de tétanie par hypocalcémie, convulsions) et un collapsus avec fibrillation ventriculaire pouvant entraîner la mort. Ces manifestations s’expliquent par l’inhibition de certaines enzymes de la glycolyse et la précipitation du calcium. L’inhalation provoque une irritation des muqueuses nasales avec épistaxis. L’intoxication chronique (fluorose) est plus fréquente. On note, après une longue exposition de plusieurs années, des lésions d’ostéoporose au niveau des vertèbres, du bassin et des côtes. Sur le plan biologique, on notera une hypocalcémie avec une calciurie faible. Chez les enfants, l’apport modéré de fluor exerce une action prophylactique des caries dentaires, tandis qu’un apport trop important de fluor pendant la période de développement des dents entraîne une atteinte dentaire connue sous le nom de mottled teeth, montrant l’aspect caractéristique de dents avec un émail crayeux et des pigmentations brunes. ☞ ( Calcium Barbier F. Fluor et fluorures minéraux. EMC - Toxicologie-Pathologie professionnelle 1992 ; 16-002-F-20, 8 p. Biotox. Fluorures. Fluorures urinaires. Mise à jour : septembre 2006. Disponible sur : http://www.inrs.fr Lauwerys RR. Toxicologie industrielle et intoxications professionnelles : Dérivés du fluor. – 4e édition. Paris : Masson, 1999 ; pp. 604-619.