Description des œuvres Le médium utilisé pour illustrer l`Histoire
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Description des œuvres Le médium utilisé pour illustrer l`Histoire
Description des œuvres Le médium utilisé pour illustrer l’Histoire des temps modernes, et par là-même les conflits, est sans conteste la photographie. Tout individu peut être le témoin d’un fait d’actualité et devenir passeur de l’information en utilisant un téléphone portable. Les images des évènements de l’actualité se démocratisent. À l’heure de la dématérialisation de l’image, la photographie serait-elle le seul médium pour représenter les faits historiques actuels ? Stéphane Pencréac’h ne semble pas le penser. Depuis des siècles, l’Histoire est racontée à travers la peinture ; celle-ci a pratiquement toujours été au sommet dans la classification des genres. Lors de la série des « Sublimations », l’artiste avait intégré des photographies à ses peintures, non pas comme médium relais de l’information, mais comme simple moyen plastique. Le passage de l’argentique au numérique a laissé une plus large place à la retouche, mettant à mal les principes d’authenticité et de crédibilité de l’image comme témoignage de l’Histoire. Le peintre historien est le seul peintre de l’âme, les autres ne peignent que pour les yeux (La Font de Saint-Yenne). L’artiste reprend dans ce cycle la continuité des allers-retours, des effets miroir, des reflets et du double. La lumière, la couleur et l’espace contribuent à cette illusion qui interroge la construction de l’image : la peinture a cette capacité à renvoyer la force qui a présidé à sa création (SP). Fil conducteur et cohérence dans les quatre peintures : cette figure allongée qui pourrait être appelée « martyr », semblant brûlée par une lumière caravagesque, est une évocation directe aux gisants médiévaux, les Christ mort de Holbein ou de Champaigne. « Ce corps en lévitation scénographié dans une prédelle, mêle l’actuel à l’intemporel. Cette porosité d’un tableau à l’autre est à la fois un gage de cohérence du cycle et l’affirmation que la peinture d’Histoire est le lieu de la mise en scène des évènements selon le parti-pris de l’artiste » 1. L’espace est celui du ciel marqué par l’apesanteur selon le procédé classique du trompe-l’œil. La technique du « tiré » consistant à étaler la peinture jusqu’à épuisement de la matière, donne ces effets flous. > « Tombouctou initie la série dans un large panoramique en trois panneaux cernés de noir comme un écran de cinéma. La figure centrale, pouvant évoquer une Piéta ou un touareg à la fois digne et menaçant, est confrontée à la mort ; le gisant représente la victime collatérale souvent au premier rang des manifestations. Les deux panneaux latéraux montrent un corps d’homme en lévitation dans un raccourci maîtrisé. Distribuée de gauche à droite, une tâche de sang devient un astre solaire ou plutôt la planète Mars dans ce contexte de guerre. Dans la fenêtre s’ouvrant à gauche de la composition, apparaissent les grands slogans que les salafistes et les intégristes affichaient dans toute la ville aux « trois cent trente trois saints ». Un procédé de floutage altère en partie l’image, créant un système d’écran où s’enregistre la scène. Le rouge et le noir dominent. Un horizon vert bascule pour montrer la cité à l’épreuve du sang. » 1 L’ensemble des citations du communiqué de presse sont extraites du texte « Peinture d’Histoire » écrit par Gilbert Perlein en décembre 2013. > « L’organisation en trois panneaux de Tunis est rythmée par les trois colonnes du premier plan. La peinture d’Histoire ne peut ignorer la grande Histoire, celle du peuple tunisien trouvant son origine en Carthage. La figure centrale, propulsée à l’avant plan, est le point de départ du Printemps arabe : Mohammed Bouzizi qui choisit de s’immoler par le feu. Le corps du martyr reprend la figure de Tombouctou, placé en élévation et projeté dans l’univers du spectateur. La seconde figure venant relayer la composition de Tombouctou est celle du touareg placée ici dans l’autre sens. Positionné en bord de cadre, tel que le Portrait d’Aristote du Titien, le personnage regarde le visiteur et l’interpelle. Le point de fuite est situé totalement à l’aile gauche de la composition, inclinant l’horizon marin et faisant converger la foule des banlieues vers le centre ville. En contrepoint, un des slogans les plus marquants brandi par les femmes l’injonction « Dégage ». » > « Dans Tripoli, la partition du tableau se fait par le milieu, en miroir. Le corps supplicié se dédouble, toujours ce corps d’homme, torse nu, pantalon noir, qui n’est plus en lévitation mais pendu par les pieds, un voile sur son visage tuméfié. La ville en proie aux flammes provoque une foule déferlante à l’extérieur du rempart sous les bannières nationales. Le volet de droite sur fond rouge présente une image allusive de la photographie officielle de Nicolas Sarkozy, marquant l’implication de la France, l’histoire en train de s’écrire. Dessous, un portrait de Khadafi, portant la coiffe traditionnelle, est peint selon le procédé de l’anamorphose renvoie à l’œuvre Les Ambassadeurs d’Holbein. À gauche, un enfant tente d’échapper à la ville sous les bombes. Cet éternel Gavroche révolutionnaire indique que Delacroix a laissé sa propre lecture aux révolutions françaises. » > « Le Caire synthétise l’Égypte par une construction pyramidale dans un point de fuite centré de manière très précise. Cette mise en perspective est comme la promesse d’une renaissance et de lendemains qui chantent. Les écrans latéraux s’ouvrent eux-aussi dans la perspective, telles des façades d’un grand boulevard canalisant la foule ; le peuple brandit drapeaux et slogans. Une jeune femme expose un slogan souvent repris. Sur le panneau de droite figure Hosni Moubarak derrière les barreaux. Une fresque plus composite laisse apparaître des empreintes de mains sanglantes, siglées de l’aigle de Saladin, emblème de la République Arabe unie, tel un phœnix. Dans l’horizon nocturne, les faubourgs du Caire et les pyramides de Guizèh. L’évocation de l’ancienne Égypte entre en résonance avec le moment présent historique. Le peuple au centre de la composition est fort des valeurs qu’il partage et riche de ses racines, de sa culture et de ses mythes. Anubis est représenté faisant la moisson des morts de la guerre civile et tend en offrande des flèches pharaoniques. Au dessus plane une figure mystérieuse comme l’ange de la Liberté ou de l’Histoire elle-même. »