le «Règlement Suisse - Schellenberg Wittmer

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le «Règlement Suisse - Schellenberg Wittmer
NEWSLETTER
Mars 2004
Le nouveau Règlement Suisse d’Arbitrage
International (le «Règlement Suisse»)
Le nouveau Règlement Suisse d’Arbitrage International
(«Règlement Suisse») est entré en vigueur le 1er janvier 2004.
Adopté par les six principales chambres de commerce suisses
offrant des services en matière d’arbitrage (Bâle, Berne,
Genève, Lausanne, Lugano et Zurich), le Règlement Suisse
représente un développement majeur pour l’arbitrage commercial international en Suisse en mettant à la disposition de
ses utilisateurs un règlement moderne et harmonisé au niveau
suisse.
Le Règlement Suisse peut être téléchargé depuis le site Internet
www.swissarbitration.ch.
2 Champ d’application du Règlement Suisse
Le Règlement Suisse s’applique lorsqu’une clause arbitrale s’y
réfère. Si une clause arbitrale fait référence à l’un des règlements antérieurs des Chambres de Commerce de Bâle, Berne,
Genève, Lausanne, Lugano ou Zurich, le Règlement Suisse
s’appliquera en matière internationale si la notification d’arbitrage a été reçue le 1er janvier 2004 ou postérieurement. Ainsi,
une clause arbitrale renvoyant à l’un des règlements antérieurs
conduit à l’application du Règlement Suisse à moins que les
parties n’en conviennent différemment (articles 1.1 et 1.3).
3 Aspects institutionnels
1 Genèse du Règlement Suisse
Le processus ayant conduit à l’adoption du Règlement Suisse a
débuté au milieu des années 1990. Entre 2001 et 2003, un
groupe de travail composé de représentants des six chambres
et de spécialistes de la communauté suisse de l’arbitrage en a
rédigé la version finale.
Le Règlement Suisse se fonde dans une large mesure sur le
Règlement d’arbitrage de la CNUDCI (Commission des Nations
Unies pour le Droit Commercial International), soit une base
éprouvée et largement reconnue. Deux types principaux de
changements ont été apportés au Règlement CNUDCI. Celui-ci
ayant été conçu pour l’arbitrage ad hoc, il a d’abord fallu
l’adapter à l’arbitrage institutionnel. De plus, dès lors que le
Règlement CNUDCI date de 1976, il a également été
nécessaire de le moderniser pour tenir compte de la pratique
actuelle dans l’arbitrage commercial international. Cela s’est
traduit par diverses modifications et par l’introduction de
dispositions entièrement nouvelles, dont les plus importantes
seront commentées aux paragraphes 4 et 5 ci-dessous.
Le Règlement Suisse a été conçu pour l’arbitrage institutionnel.
Les chambres ont donc constitué un «Comité d’Arbitrage» et
un «Comité Spécial» pour administrer, superviser et apporter
leur soutien aux procédures se déroulant sous l’égide du
Règlement Suisse.
Le «Comité d’Arbitrage» est composé de praticiens des six
chambres ayant de l’expérience dans le domaine de
l’arbitrage. Il est chargé de la majeure partie des services
administratifs fournis aux utilisateurs du Règlement Suisse.
Le «Comité Spécial» est composé des membres du comité
d’arbitrage bénéficiant d’une expérience particulièrement
étendue de l’arbitrage commercial international. Le Comité
Spécial connaît des questions les plus importantes telles que
récusations, remplacements d’arbitres et, si nécessaire,
détermination du siège de l’arbitrage. Il a également pour rôle
de conseiller le Comité d’Arbitrage, par exemple sur
l’interprétation de clauses arbitrales ambiguës et, plus
généralement, quand le besoin s’en fait sentir.
4 Survol de la procédure selon le Règlement Suisse
S’agissant du déroulement de la procédure elle-même, le
Règlement Suisse est très similaire au Règlement CNUDCI, en
particulier en ce qui concerne les articles 15 à 37. Les paragraphes suivants traitent des changements et innovations les
plus importants apportés par le Règlement Suisse. Il est important de souligner que les parties et les arbitres sont libres de
déroger à la plupart des règles de procédure du Règlement
Suisse. En effet, l’autonomie procédurale des parties constitue
l’une des pierres angulaires de ce dernier.
arbitral; en principe, la réponse doit contenir d’éventuelles
demandes reconventionnelles et exception d’incompétence
(articles 3.7–3.10). Ceci constitue une amélioration notable du
Règlement CNUDCI aux termes duquel le défendeur ne
répond qu’une fois le tribunal arbitral constitué.
L’obligation pour le tribunal arbitral d’établir, après consultation des parties, un calendrier prévisionnel au commencement
de la procédure (article 15.3) représente un autre changement
par rapport au Règlement CNUDCI. Cela donne aux parties
une indication précise du déroulement prévu de l’arbitrage.
4.3 Constitution du tribunal arbitral
Conformément à l’article 6 du Règlement Suisse, les parties
peuvent s’entendre sur le nombre d’arbitres (arbitre unique ou
tribunal arbitral composé de trois membres). A défaut d’accord
des parties, le Comité d’Arbitrage tranche cette question au vu
de toutes les circonstances pertinentes. Lorsque la valeur litigieuse n’excède pas CHF 1 million, l’arbitrage est soumis à un
arbitre unique statuant en Procédure accélérée (articles 6.4 et 42.2).
4.1 Siège et langue de l’arbitrage
Les parties sont libres de fixer le siège de l’arbitrage n’importe
où en Suisse (article 1.2). Si la clause arbitrale fait simplement
référence à la Suisse sans indication d’une ville déterminée, le
Comité Spécial fixera le siège de l’arbitrage en prenant en
compte toutes les circonstances du cas d’espèce ou invitera le
tribunal arbitral à ce faire. Afin d’éviter ce processus, il est
vivement conseillé aux parties de spécifier la ville en Suisse où
le tribunal arbitral siègera.
Cela étant, la fixation du siège n’implique pas que la procédure
se déroulera en ce lieu. Les parties et le tribunal arbitral sont libres
de tenir audiences, délibérations, etc. ailleurs (articles 16.2–16.3).
Les parties sont également libres de choisir la langue de
l’arbitrage. Si elles ne l’ont pas fait, le tribunal arbitral décidera
(article 17). Il est cependant recommandé de déposer la
notification d’arbitrage en anglais, allemand, français ou italien; à défaut, les chambres peuvent demander une traduction
dans l’une des langues susmentionnées qui sont également les
langues de la correspondance avec les chambres (article 3.5).
Les parties sont libres de désigner les arbitres. Cependant,
toute désignation d’arbitre par les parties est sujette à confirmation par les chambres, lesquelles vérifient que les personnes
désignées présentent le degré d’indépendance requis (article
5). Cette liberté de choix constitue une différence importance
par rapport à la situation en vigueur précédemment à Zurich
où la Chambre de Commerce choisissait toujours l’arbitre
unique ou le président sur une liste préétablie.
Le Règlement Suisse stipule expressément que les arbitres doivent être et rester en tout temps impartiaux et indépendants des
parties (article 9). S’il y a des doutes raisonnables quant à leur
impartialité et leur indépendance, les parties peuvent demander la récusation auprès du Comité Spécial (articles 10–14).
4.4 Jonction de procédures; participation de tiers
Autre innovation, le Règlement Suisse contient une disposition
sur la jonction de procédures arbitrales et la participation de
tiers (article 4).
La partie souhaitant introduire une procédure arbitrale doit
déposer une notification d’arbitrage auprès de l’une des six
chambres (articles 3.1–3.6) dont les adresses figurent à
l’Annexe A du Règlement Suisse. Il est recommandé d’adresser
la notification d’arbitrage à la chambre de la ville du siège
de l’arbitrage.
Conformément à l’article 4.1, les chambres peuvent joindre
une nouvelle affaire à une procédure arbitrale pendante. Dans
certains cas exceptionnels, cela est possible même si les
parties à la nouvelle affaire ne sont pas identiques à celles à la
procédure pendante. Avant de décider de soumettre une
nouvelle affaire à un tribunal arbitral déjà constitué, les
chambres doivent consulter toutes les parties et le Comité
Spécial et tenir compte de toutes les circonstances telles que
les liens entre les deux affaires.
La réponse à la notification d’arbitrage est déposée au début de
la procédure, pendant la phase de constitution du tribunal
A teneur de l’article 4.2 du Règlement Suisse, le tribunal
arbitral peut ordonner la participation de tiers ou autoriser leur
4.2 Introduction de la procédure
2
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Globalement, le rôle des structures institutionnelles selon le
Règlement Suisse reste modéré, notamment en comparaison
avec d’autres institutions arbitrales majeures. Cela résulte d’un
choix délibéré des chambres : il est préférable de laisser la
maîtrise de la procédure au tribunal arbitral et aux parties, le
rôle de l’institution devant se limiter à soutenir l’arbitrage en
fournissant uniquement les services administratifs nécessaires
pour en garantir la qualité et l’efficacité.
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intervention. La formulation de cette disposition a été gardée
volontairement flexible afin de permettre aux arbitres de
trouver des solutions appropriées dans chaque cas de figure.
4.5 Compétence en cas d’exception de compensation
L’article 21.5 du Règlement Suisse, qui innove également par
rapport au Règlement CNUDCI, confère au tribunal arbitral
une compétence très large pour connaître d’une exception de
compensation. Ainsi, le tribunal arbitral a compétence pour
trancher une telle exception même si la relation qui fonde la
créance invoquée en compensation n’entre pas dans le champ
de la clause arbitrale et même si une autre clause de résolution
des litiges régit cette créance.
4.6 La Procédure accélérée
La possibilité de résoudre un litige par voie d’arbitrage en
Procédure accélérée est une autre nouveauté importante
(article 42). La Procédure accélérée s’applique lorsque les
parties en sont convenues et, en principe, dans tous les cas où
la valeur litigieuse n’excède pas CHF 1 million.
Les caractéristiques de la Procédure accélérée sont les suivantes :
I les chambres peuvent raccourcir les délais pour la
constitution du tribunal arbitral;
I le nombre de mémoires est limité;
I le litige est tranché après une audience unique pour
entendre les témoins et les experts-témoins ou, si les parties
en conviennent, sur pièces uniquement;
I la sentence est rendue dans les six mois à partir de la date
à laquelle le dossier a été transmis au tribunal arbitral;
I la sentence est sommairement motivée (les parties peuvent
rendre seul une sentence. Ceci constitue une amélioration
notable et bien reçue au Règlement CNUDCI sous l’empire
duquel l’exigence d’une majorité conduisait parfois à des
situations de blocage ou à des compromis insatisfaisants.
De même que le Règlement CNUDCI, le Règlement Suisse
permet la rectification et l’interprétation de sentences ainsi que
le prononcé de sentences additionnelles (articles 35 à 37).
Contrairement à d’autres formes d’arbitrage institutionnel, en
particulier l’arbitrage CCI, la sentence ne fait pas l’objet d’un
examen préalable avant sa notification aux parties.
4.8 Confidentialité ; limitation de responsabilité
Le Règlement Suisse spécifie expressément que les parties, les
arbitres et toutes les personnes impliquées dans la procédure
sont tenues de maintenir confidentiels toutes sentences et
ordonnances de même que tout document produit dans la
procédure par une partie adverse (article 43). Cette disposition
peut revêtir une importance considérable dans les affaires
impliquant des secrets d’affaires.
L’article 44.1 limite la responsabilité des arbitres et des chambres aux cas de faute intentionnele ou de négligence grave.
L’article 44.2 prévoit également que les parties doivent
s’abstenir de chercher à faire témoigner les arbitres ou des
représentants des chambres dans des procédures judiciaires en
rapport avec la sentence. Cette disposition est conçue pour
décourager une tendance récente et fort malheureuse.
5 Frais
L’un des ajouts principaux au Règlement CNUDCI, qui résulte
de la nécessité d’adapter ce règlement à l’arbitrage institutionnel, concerne les frais de l’arbitrage. Les frais sont régis par les
articles 38 à 41 et par un barème (figurant à l’annexe B)
semblable à celui utilisé pour les procédures arbitrales selon
l’ancien règlement de la Chambre de Commerce de Zurich.
renoncer à toute motivation); et
I lorsque la valeur litigieuse n’excède pas CHF 1 million,
l’affaire est soumise à un arbitre unique.
4.7 La sentence, y compris son interprétation et sa correction
Selon le Règlement Suisse, la sentence finale est réputée avoir
été rendue au siège de l’arbitrage (article 16.4). Dès lors que le
siège du tribunal arbitral est en Suisse, le chapitre 12 de la Loi
fédérale sur le droit international privé s’applique, avec ses
possibilités très limitées d’annulation de la sentence par le
Tribunal fédéral suisse.
Conformément à l’article 31.1 du Règlement Suisse, le
président du tribunal arbitral peut, en l’absence de majorité,
Il est important de souligner que la gestion des frais est laissée
au tribunal arbitral. Contrairement à d’autres institutions
arbitrales, les chambres n’administrent pas les finances de la
procédure. C’est donc au tribunal arbitral qu’il appartient de
déterminer le montant de ses honoraires ainsi que les frais
administratifs, dans une certaine fourchette, en tenant compte
de la valeur litigieuse, de la complexité de l’affaire, du temps
passé et d’autres circonstances pertinentes. Avant de rendre
une sentence sur les frais, le tribunal arbitral doit soumettre un
projet aux chambres pour consultation (article 40.4).
Le tribunal arbitral peut demander le paiement d’avances à
valoir sur les frais; les intérêts seront crédités à la partie ayant
fait l’avance. Les chambres reçoivent copie de toute demande
d’avance (article 41).
3
Contacts
Le Règlement Suisse offre un certain nombre d’outils destinés
à pérenniser le standard de qualité élevé qui a fait la réputation
de l’arbitrage international en Suisse. Ces instruments sont,
entre autres, la supervision de la constitution du tribunal
arbitral et la confirmation des arbitres par les chambres, la gestion du début de la procédure par les chambres, l’adoption
d’un calendrier de procédure ou encore la supervision par les
chambres des frais. Le Règlement Suisse garantit ainsi un
standard exigeant de qualité et d’efficacité tout en évitant des
interventions envahissantes ou inopportunes par l’institution.
Si vous avez des questions sur cet article ou sur le droit de
l’arbitrage, nous vous invitons à vous adresser à votre contact
habituel chez Schellenberg Wittmer ou à l’un des avocats
ci-dessous :
7 Clause arbitrale type
Il est vivement recommandé aux parties souhaitant résoudre
leurs litiges par voie d’arbitrage selon le Règlement Suisse
d’inclure dans leur contrat la clause arbitrale type suivante :
I A Genève:
GABRIELLE KAUFMANN-KOHLER
[email protected]
ELLIOTT GEISINGER
[email protected]
LAURENT LÉVY
[email protected]
I A Zurich:
«Tous litiges, différends ou prétentions nés du présent contrat
ou se rapportant à celui-ci, y compris la validité, la nullité,
d’éventuelles violations ou la résiliation du contrat, seront
tranchés par voie d’arbitrage conformément au Règlement
suisse d’arbitrage international des Chambres de Commerce suisses en vigueur à la date à laquelle la notification
d’arbitrage est déposée conformément à ce Règlement.
Le nombre d’arbitres est fixé à …. (un ou trois); [optionnel]
GEORG VON SEGESSER
[email protected]
ALEXANDER JOLLES
[email protected]
NATHALIE VOSER
[email protected]
Le siège de l’arbitrage sera… (ville en Suisse);
L’arbitrage se déroulera en… (insérer la langue désirée).»
8 Conclusion
La Suisse a toujours été l’un premiers lieux de l’arbitrage
commercial international. Le nouveau Règlement Suisse
contribue à perpétuer cette tradition et renforce même
l’importance de la Suisse en tant que centre d’arbitrage
international. Ce nouveau règlement fournit aux parties et aux
praticiens de l’arbitrage un ensemble de règles arbitrales
institutionnelles uniformes combinant les avantages d’un texte
éprouvé (le Règlement CNUDCI) et «l’état de la technique»
actuelle. En choisissant l’arbitrage conformément au
Règlement Suisse, les parties bénéficient d’un siège neutre
ayant une loi d’arbitrage moderne, ce qui offre la possibilité de
résoudre les litiges efficacement, de manière prévisible et à un
coût raisonnable.
15bis, rue des Alpes
Case postale 2088
CH-1211 Genève 1
Tél. +41 (0) 22 707 8000
Fax +41 (0) 22 707 8001
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6 Contrôle de qualité