Mars Apprendre coûte. Savoir vaut.

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Mars Apprendre coûte. Savoir vaut.
Société en nom collectif
Volume 7, Numéro 3
Mars 2012
CAPSULE JURIDIQUE EN DROIT IMMOBILIER
APPRENDRE COÛTE. SAVOIR VAUT.
Domaine de l’Orée du Bois Laplaine Inc. c. Garon 2012 QCCA 269
Par Me Annie Breault
Un arrêt récent de la Cour d’appel confirme la primauté du principe que seules
les parties à un contrat sont liées par les termes de ce contrat.
Les faits
Un contrat de courtage exclusif intervient entre M. Proulx et l’agence
immobilière Les Associés inc., par son représentant le courtier Garon. Ce
contrat de courtage vise la recherche de terrains pour fins de développement
immobilier. La rétribution y est prévue selon un barème pré-établi qui est
fonction du nombre de pieds carrés des terrains susceptibles de faire l’objet de
promesses d’achat acceptées.
Un deuxième contrat intervient entre M. Proulx et Garon. Il est intitulé
« Complément au contrat de courtage » et prévoit une indemnité visant à
compenser les efforts du courtier dans la recherche de terrains. Ainsi, dans
l’éventualité où les rétributions découlant de promesses d’achat n’atteignent pas
50 000 $, une indemnité y est prévue jusqu’à concurrence du montant de
50 000 $.
Aucune promesse d’achat acceptée n’aura lieu pendant la durée du contrat de
courtage. Garon intente une action contre M. Proulx et la société dont il est le
seul dirigeant, Domaine de l’Orée du Bois Laplaine Inc. Elle réclame par ces
procédures l’indemnité de 50 000 $ prévue au Complément.
Décision de la Cour du Québec
En première instance, la Cour du Québec accueille l’action intentée par le
courtier Garon. S’agissant de prospection de terrains, la Cour conclut que les
ententes entre les parties n’avaient pas à revêtir de forme obligatoire. Elle
conclut ainsi que le Complément constitue un contrat de services prévoyant un
dédommagement et non une rétribution.
La Cour conclut que le courtier Garon a l’intérêt juridique suffisant compte tenu
que le Complément est intervenu entre elle et M. Proulx.
La société et M. Proulx sont condamnés solidairement et ce, bien que le contrat
de courtage et le Complément soient intervenus seulement avec M. Proulx. La
Cour est d’avis que la société est l’alter ego de M. Proulx qui l’utilise
indistinctement de lui. À preuve, la Cour retient que les promesses d’achat ont
été présentées au nom de cette société.
Arrêt de la Cour d’appel
La Cour d’appel retient l’argument de la société Domaine de l’Orée du Bois
Laplaine inc. Cette société n’étant pas partie ni au contrat de courtage ni au
Complément, elle ne peut être tenue responsable. La Cour d’appel rappelle
qu’une société bénéficie d’une personnalité juridique distincte et qu’en l’absence
de fraude ou d’abus de droit, il n’y a pas lieu de soulever le voile corporatif et de
lui opposer les ententes conclues par M. Proulx.
La Cour d’appel conclut également que le Complément fait partie intégrante du
contrat de courtage. Ainsi, le courtier immobilier n’a pas l’intérêt requis pour
intenter des procédures qui y sont liées, ce droit appartenant exclusivement à
l’agence immobilière.
Commentaires
Cet arrêt de la Cour d’appel, bien que n’y faisant pas référence spécifiquement,
est conforme à la législation applicable. En effet, l’article 35 du Règlement sur
les conditions d’exercice d’une opération de courtage, sur la déontologie des
courtiers et la publicité (L.R.Q. c. C-73.2, r.1) prévoit l’obligation pour un
courtier de verser sans délai à l’agence pour laquelle il agit toute rétribution
reçue dans le cadre d’une transaction. Il s’agit d’une exigence incontournable et
ce, qu’il s’agisse d’un immeuble principalement résidentiel ou non : toute
rétribution doit transiter par le biais de l’agence immobilière.
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Également il s’agit d’un rappel de la nécessité pour les agences immobilières et
les courtiers de s’assurer de bien identifier les parties à un contrat de courtage.
En l’instance, un avis de modification aurait dû être signé dès le moment où le
courtier a réalisé que les promesses d’achat étaient présentées à un nom autre
que celui du client inscrit au contrat de courtage.
Dans la même veine, il n’est pas inutile de rappeler l’importance pour le courtier
de s’assurer d’une signature dûment autorisée lorsque la cliente est une
compagnie et ce, par l’obtention d’une résolution du conseil d’administration
autorisant la personne désignée à agir au nom de la compagnie.
Finalement, le raisonnement de la Cour du Québec à l’effet de qualifier de
contrat de services le Complément au contrat de courtage de façon à qualifier
l’indemnité qui y est prévue de dédommagement et non de rétribution ne résiste
pas à l’analyse. Ce serait dire que le travail d’un courtier entraîne le paiement
d’une rétribution s’il y a vente, mais qu’il s’agit que d’un dédommagement s’il
n’y a pas vente.
À notre avis, le Complément au contrat de courtage était une indemnité qui
pouvait valablement être convenue, compte tenu qu’il n’était pas question du
courtage exclusif d’un immeuble principalement résidentiel.
Il faut rappeler que le contrat de courtage exclusif visant un immeuble
principalement résidentiel est régi par un formalisme auquel les courtiers ne
peuvent déroger. Notamment, la clause de rétribution est réglementée et le texte
prévoit expressément que le paiement de la rétribution a lieu lors de la signature
de l’acte notarié.
Un arrêt rendu en 2008 par la Cour suprême du Canada permet de croire que le
Complément de contrat serait jugé illégal en matière d’immeuble principalement
résidentiel.
Dans l’arrêt ACAIQ c. Proprio Direct inc. (2008 CSC 32), la majorité de la Cour
suprême du Canada a confirmé que la décision du Comité de discipline de
l’ACAIQ était raisonnable. Le Comité de discipline avait conclut que les frais
d’inscription non remboursables exigés par Proprio Direct inc. étaient une
pratique contrevenant à la Loi sur le courtage immobilier puisque payables
même en l’absence de vente de l’immeuble résidentiel.
Me Annie Breault a été admise au Barreau du Québec en 1993. Au cours de sa pratique, Me
Breault s’est spécialisée dans le domaine du litige civil et commercial. Me Breault a été bâtonnière
du Barreau de Laval pour l’année 2007-2008.
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