Il faut expliquer les vertus des tronçons à 30km/h

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Il faut expliquer les vertus des tronçons à 30km/h
«Il faut expliquer les vertus des tronçons à
30km/h»
Sécurité routière L’Association suisse des ingénieurs et des experts en
transports plaide pour abaisser la vitesse en ville.
Par Caroline Zuercher 12.11.2015
L’instauration de davantage de tronçons limités à 30?km/h permettrait de «calmer le
trafic et surtout de rendre la ville plus conviviale pour tout le monde».
Image: Steeve Iuncker Gomez
Quelle est la vitesse optimale des véhicules dans les localités? Pour ses 50 ans,
l’Association suisse des ingénieurs et des experts en transports (SVI) a consacré
une trentaine de manifestations à cette question. Elle tire de ces discussions
avec des experts privés et publics douze recommandations, présentées hier à
l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich. Son président, Christian Camandona,
répond à nos questions.
Vous plaidez pour une généralisation du 30 km/h sur les routes
secondaires dans les localités. N’est-ce pas une chicanerie?
Ces mesures sont perçues comme une chicanerie par ceux qui n’en voient pas les
objectifs, tels que calmer le trafic et surtout rendre la ville plus conviviale pour
tout le monde. Mais comme planificateurs, elles nous donnent une plus grande
marge de manœuvre pour aménager l’espace public, sans tenir compte
uniquement des automobilistes. Il est impossible de déterminer les vitesses
optimales de manière scientifique. Ces limitations sont basées sur un consensus
social, qui est renégociable. Selon moi, on gagnerait beaucoup si on en installait
davantage.
La vitesse est déjà souvent restreinte à 30 km/h!
La limitation générale est à 50 km/h dans les localités. Une baisse à 30 km/h est
le fruit d’une dérogation. Pour cela, vous devez démontrer qu’une réduction de
vitesse améliorera entre autres la sécurité pour les piétons et les cyclistes ou
diminuera les nuisances sonores… Cela demande beaucoup d’efforts
administratifs! Il faudrait inverser la vapeur, prévoir que le 30 km/h est la
norme pour les routes secondaires. Bien sûr, cela ne se fera pas d’un jour à
l’autre.
En attendant, que préconisez-vous?
Nos interlocuteurs dans les communes et les cantons appliquent souvent à la
lettre les normes en vigueur. Mais celles-ci ne tiennent pas compte de tous les
usagers dans un contexte spécifique donné. Et puis, elles sont interprétables.
Souvent, les gens se cachent derrière l’idée qu’en ville, on a le droit de rouler à
50 km/h. On peut casser ces images arrêtées et en discuter! Le Canton de Berne,
par exemple, ose faire les choses différemment: des limitations à 30 km/h ont
été instaurées sur certaines routes principales. Et ça marche à merveille pour
tout le monde.
Voulez-vous réduire la vitesse partout?
Non, ce n’est pas le remède miracle partout! Il faut réfléchir à la fonction de
chaque tronçon. La Ville de Bâle estime qu’environ 75% de son réseau pourrait
passer à 30 km/h. Sur les routes cantonales, le 30 km/h est intéressant s’il y a
des commerces et de l’habitat qui génèrent des déplacements et un grand
nombre de personnes traversant la route. Mais certains tronçons sont faits pour
rouler à 50 km/h et le resteront – par exemple, les axes pénétrant dans les
agglomérations et ceux où il n’y a pas de contraintes spécifiques telles que des
écoles ou la forte présence d’usagers autres que ceux générés par le trafic
motorisé.
Souvent, ces limitations ne sont pas respectées. Dès lors, sontelles utiles?
La mise en œuvre est un souci. Nos routes ont été prévues pour rouler à 50 km/h
ou plus. Pour revenir en arrière et proposer des limites que tout le monde
comprenne, il faudrait tout réaménager. Ce n’est pas possible. L’objectif n’est
pas non plus de multiplier les modérateurs de vitesse. Dès lors, il faut surtout
expliquer à ceux qui y voient un embêtement que le 30 km/h est un avantage
pour d’autres usagers dont ils font parfois eux aussi partie. Il faut rester crédible
en proposant des restrictions là où les avantages seront visibles pour tout le
monde.
Les automobilistes ne veulent pas perdre de temps. Que
répondez-vous?
Les transports publics expriment aussi cette inquiétude. Mais il ne faut pas
oublier qu’actuellement, la vitesse moyenne à l’heure de pointe en ville est déjà
en dessous de 30 km/h. Certains itinéraires demanderont probablement un peu
plus de temps si la vitesse autorisée baisse. Sur le moment, vous remarquerez
que vous roulez moins vite. Mais au final, vous perdez peut-être une minute sur
votre temps de déplacement: cela fait-il une différence? Nos études ont montré
que, plus que la vitesse, c’est la capacité des carrefours qui détermine la fluidité
d’un axe.
Le document du SVI consacré à la thématique est disponible sur Internet:
www.svi.ch/vitesse (24 heures)
(Créé: 12.11.2015, 21h22)
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