Allianz s`engage depuis 30 ans dans la recherche médicale
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Allianz s`engage depuis 30 ans dans la recherche médicale
Allianz s’engage depuis 30 ans dans la recherche médicale Prix Fondation Allianz - Institut de France Prix ADPS www.allianz.fr Avec vous de A à Z Le rôle sociétal de l’assureur C’est une fierté, pour Allianz France, que de s’associer à l’Académie des sciences pour récompenser les travaux d’exception menés par Edith Heard, chercheuse à la renommée internationale et professeur au Collège de France, dans le domaine de l’épigénétique. La cérémonie du Prix de Recherche 2013 vient sceller trente ans de collaboration étroite entre Allianz et l’Institut de France au service de la recherche médicale et de ses applications thérapeutiques. En tant qu’assureur, cet engagement dans la Fondation Allianz-Institut de France nous tient particulièrement à cœur, car il traduit, en plus de l’excellence de la sélection effectuée par la Commission scientifique, la conception que nous nous faisons de notre métier. Nous pensons, en effet, que l’assurance a un rôle sociétal important à jouer, avec une responsabilité particulière en matière de santé. Nous couvrons les risques, et nous pouvons aussi choisir d’aller au devant, en contribuant à leur réduction, à travers un soutien à la recherche médicale et aux actions de prévention. C’est le sens de notre engagement vis-à-vis de la Fondation, et aussi de l’Association de Prévoyance Santé (ADPS) qui représente l’ensemble des assurés d’Allianz France en santé individuelle, et qui mène une action unique en faveur de l’accès aux soins et de la prévention. L’ADPS a ainsi créé, en 2012, un Prix de Recherche sur la prévention du Vieillissement qui sera, cette année, remis concomitamment au Prix de Recherche de la Fondation Allianz-Institut de France. A travers l’histoire du Prix de Recherche, et des travaux récompensés durant ces trente dernières années, je vous invite à découvrir notre engagement en faveur du progrès de la science et de la recherche médicale, au service de nos assurés et de l’ensemble de nos concitoyens. Jacques Richier Président-Directeur Général d’Allianz France Les chiffres-clés d’Allianz France en Santé (fin 2012) Santé Individuelle • Chiffre d’affaires : 550 ME • 576 000 clients Santé Collective • Chiffre d’affaires : 711 ME 2 Préserver la santé de demain 30 ans d’engagement dans la recherche médicale Trente ans d’histoire de la biologie et de la médecine françaises s’animent sous nos yeux. Trente ans de succès, fascinants et éclectiques, que retracent en accéléré ces 30 prix de la Fondation Allianz – Institut de France attribués chaque année depuis 1984. Pour les illustrer, nous avons choisi cinq de ces aventures scientifiques. S’y ajoute le Prix 2013, octroyé pour la première fois à une femme : le professeur Edith Heard. Mais aussi le Prix ADPS de Recherche sur la prévention du Vieillissement, alloué pour la seconde année consécutive par l’Association de Prévoyance Santé (ADPS), en partenariat avec Allianz. Il récompense également une femme : Vera Gorbunova. Ces prix sont emblématiques de l’engagement d’Allianz en santé. « Allianz a toujours eu une action de mécénat en santé, rappelle Sylvain Coriat, directeur Assurances de personnes chez Allianz France. D’une part, Allianz attribue un prix annuel, en partenariat avec l’Institut de France, l’un des prix les plus généreusement dotés de l’Institut de France. D’autre part, poursuit Sylvain Coriat, Allianz développe une action de mécénat plus locale, via l’ADPS. Il s’agit d’un ensemble d’aides plus modestes mais bien plus nombreuses : actions sociales, manifestations pour faire connaître une maladie, soutien à la recherche locale... » Mais l’engagement d’Allianz va plus loin. « Notre conviction est que l’assureur doit apporter La santé au cœur du métier d’assureur un véritable service aux assurés, ajoute Sylvain Coriat. En menant des actions de prévention, de mécénat et d’aide sociale, mais aussi en aidant les assurés et en anticipant l’émergence des besoins de nos assurés. Cela va au-delà d’un simple remboursement de frais médicaux. » Parmi les services qu’Allianz propose aux assurés, figure leur orientation au sein de parcours de soins. « Nous guidons nos assurés vers les meilleurs professionnels de santé dont nous garantissons qu’ils proposent des tarifs négociés, avec un niveau de qualité irréprochable, indique Sylvain Coriat. Dans ce parcours de soins, Allianz a mis en place avec d’autres partenaires le réseau Santéclair, notamment pour l’optique et le dentaire. Les négociations collectives que nous menons dans ce cadre bénéficient exclusivement aux assurés, qui voient leur reste à charge baisser et qui s’assurent qu’ils ont un plan de soins pertinent. » Qui, mieux que ces aventures scientifiques, pourrait en témoigner ? Ces histoires de chercheurs illustrent la diversité des centres d’intérêt, la multiplicité des approches, la singulière créativité de ces chercheurs en sciences de la vie. Elles disent leur curiosité, leur imaginaire, leur inventivité. Mais aussi les failles et les doutes qui parfois les saisissent – et souvent les animent. Elles montrent le processus créatif à l’œuvre, racontent l’illumination de la découverte. Mais jamais les auteurs de ces découvertes n’oublient la finalité ultime de leurs travaux : améliorer la santé de l’homme. Cette année encore, l’Institut se réjouit de voir l’élan généreux du groupe Allianz soutenir la recherche scientifique. Je ne m’aventurerai pas à rendre compte des travaux d’Edith Heard, mais je sais que les raisons qui ont conduit la commission scientifique à la choisir sont excellentes. Le premier Prix de Recherche fut décerné en 1984, selon les statuts de votre belle Fondation qui confirment votre vocation d’entreprise encourageant la recherche d’aujourd’hui pour préserver la santé de demain. Depuis, chaque année, une commission de savants sous la présidence du Professeur Guy Vincendon, biologiste de grande renommée, étudie les nombreux dossiers reçus dans les domaines les plus variés : génétique, biologie moléculaire, neurosciences, immunologie, épidémiologie ou cardiologie, et cette liste n’est pas exhaustive. Puis c’est à l’Académie des sciences que revient la responsabilité de désigner le lauréat final, un chercheur dont les travaux peuvent conduire à des applications cliniques, préventives et curatives en vue d’améliorer l’espérance de vie. Aussi, je veux ici remercier le groupe Allianz et chacune des personnalités engagées à nos côtés, contribuant au succès toujours plus grand du Prix de Recherche Allianz, et permettant à l’Institut de France de faire vivre les aspirations de ses fondateurs, qui en 1795 le vouaient tout entier à « diriger le vol du génie vers le but le plus utile et le plus sûr ». Gabriel de Broglie Chancelier de l’Institut de France L’excellence d’un palmarès Ce qui fait la qualité de ce prix, c’est d’abord l’excellence de son palmarès et la diversité des disciplines récompensées. Son originalité est d’honorer des chercheurs consacrés, mais encore en pleine activité – le plus souvent âgés de 40 à 55 ans. Les lauréats sont davantage couronnés pour une œuvre que pour une découverte ponctuelle. Ce qui n’exclut pas les « coups de cœur », lorsque le jury pressent une personnalité prometteuse... Par ailleurs, un gros effort est fait pour distinguer des découvertes qui ont ou peuvent avoir une application médicale. Mais pas toujours, comme l’illustre le prix 2013, attribué pour des travaux de génétique assez fondamentaux. Il s’agit enfin d’un prix très généreusement doté, qui mérite à cet égard une attention particulière. Professeur Jean-François Bach Secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences Cinq anciens lauréats se souviennent_________________ p. 4-11 La lauréate du Prix de recherche 2013 de la Fondation Allianz-Institut de France_ ________________________ p. 12-14 La lauréate du Prix ADPS 2013_ _______________________p. 15 3 Cinq anciens lauréats du Prix se souviennent Une expérience d’une violence inouïe Pour le jeune chercheur que j’étais alors, vivre tout cela fut une expérience très curieuse – et d’une violence inouïe. Je me souviens d’une très belle femme, émaciée, qui m’a dit : « j’espère que vous allez trouver quelque chose » – mais elle est morte avant. Je me souviens aussi de mon meilleur ami d’école primaire, mort à 42 ans du sida – trois mois avant l’arrivée des « trithérapies » – un traitement combiné qui a enfin permis de contrôler l’infection par le virus du sida. D’une très grande lucidité, il me rappelait certains portraits de Rembrandt qui semble avoir vu toutes les vicissitudes du monde. Simon Wain-Hobson, lauréat du Prix Allianz - Institut de France 2006 pour ses travaux sur le virus du Sida Des applications diagnostiques et thérapeutiques Professeur à l’Institut Pasteur, directeur du laboratoire de rétrovirologie moléculaire (Institut Pasteur, Paris). Relever le défi du séquençage du VIH Pour le jeune chercheur que j’étais, vivre l’aventure de la découverte du VIH puis les années noires du sida, de 1984 à 1995, fut une expérience d’une richesse et d’une violence inouïes. « Un an après avoir isolé le virus du sida, en 1984, Luc Montagnier recherchait un jeune biologiste moléculaire qui serait capable de séquencer ce virus. Je travaillais alors sur le virus de l’hépatite B, mais j’ai décidé de relever le défi. En septembre 1984, nous fûmes deux, à l’Institut Pasteur, à nous lancer dans l’aventure du clonage du génome du VIH : j’avais 30 ans, et l’étudiant qui m’accompagnait, 25. Nous savions qu’il s’agissait d’un rétrovirus, et la stratégie de clonage n’était pas si compliquée. Mais quand nous avons réussi ce travail, le directeur de l’Institut Pasteur, Raymond Dedonder, fut quand même un peu abasourdi. Le sprint contre Bob Gallo : David contre Goliath C’est alors qu’il a décidé de prendre les choses en main. Raymond Dedonder a mis en place un petit groupe « commando » et mobilisé cinq jeunes pastoriens, dont moi-même. Puis il nous a dit : « vous laissez tout tomber jusqu’à la fin du séquençage du VIH ». Malgré tout, nous nous sommes sentis très isolés : une poignée de Français face à la toute puissance de la machinerie américaine que dirigeait Robert Gallo : c’était David contre Goliath ! 4 Mais la course de vitesse s’engagea. Et durant six semaines, nous avons couru ce sprint contre nos concurrents outre-Atlantique. Je travaillais de 7 heures du matin à 19 heures, d’autres, de 10 heures du matin à 22 heures, et les deux informaticiens, de 13 heures à 3 heures du matin. En trois semaines, nous avons séquencé 90 % du génome du VIH – et les 10 % restants en trois autres semaines. Aujourd’hui, établir la séquence de 10 000 bases en quelques semaines, c’est tout à fait banal. Mais à l’époque, peu de laboratoires en étaient capables. Lors d’un meeting, le directeur de l’Institut Pasteur m’a demandé : « Simon, où en êtes-vous ? ». « C’est fini », lui ai-je répondu. Il en est resté coi. Nous étions si épuisés que nous n’avons pas réalisé tout de suite l’importance de notre travail. « Nous étions jeunes, enthousiastes et sans peur... Ce fut là notre force ! » Les Américains ont démarré leur course avant nous et ils l’ont terminée en même temps. Mais sur la ligne d’arrivée, nous les avons coiffés au poteau ! Car en janvier 1985, nous avons publié la séquence du virus du sida dans la revue Cell. Trois jours plus tard, l’équipe de Bob Gallo la publiait dans Nature. Le séquençage du VIH a conduit, comme on le sait, à la mise au point de tests de diagnostic et de dépistage. Par ailleurs, mon équipe a été la première au monde à identifier la protéase de ce virus. Cela a ouvert la voie au développement des « anti-protéases », une des classes thérapeutiques d’anti-rétroviraux (médicaments contre le VIH). Reste, aujourd’hui, l’immense défi d’un vaccin contre ce virus... Aujourd’hui, je me consacre à l’étude des cellules cancéreuses : il y a un lien avec l’analyse du virus du sida. Pourquoi ces cellules – comme le VIH – accumulent-elles autant de mutations ? 1984 André et Joëlle Boué Le diagnostic prénatal Dans les années 1980 et 1990, on pensait qu’il suffisait de 2 à 10 mutations pour qu’une cellule normale se transforme en cellule tumorale. On sait désormais qu’elle doit plutôt en accumuler 1 000 à 100 000... Une reconnaissance bienvenue Pourquoi le nier ? Recevoir ce prix de la Fondation Allianz-Institut de France, en 2006, m’a assurément touché et fait plaisir – même si la motivation principale d’un scientifique reste la fascination qu’il éprouve pour les nouveaux savoirs. J’ai été très sensible à ce prix – d’autant plus qu’il émanait de la France, mon pays d’adoption, car je suis d’origine anglaise. La science est un processus de plus en plus compliqué et difficile : dans ce contexte, il est certain que la reconnaissance par les pairs est d’une aide précieuse. » 1985 Michel Fardeau Les myopathies 1986 Pierre Freychet Le diabète 1986 Alain Carpentier Jean-Noël Fabiani La chirurgie cardiaque 1987 Claude Amiel Le rein et l’oreille interne 1988 Jean-Louis Mandel Le chromosome X humain 5 Cinq anciens lauréats du Prix se souviennent En mai 2013, vous avez reçu l’autorisation de l’ANSM (Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé) pour conduire un premier essai clinique de thérapie cellulaire cardiaque, avec ces cellules dérivées de cellules souches embryonnaires humaines. Philippe Menasché, lauréat du Prix Allianz - Institut de France 2003 pour ses travaux sur la thérapie cellulaire pour les pathologies cardio-vasculaires Chirurgien cardiaque à l’hôpital européen Georges Pompidou (HEGP, Paris), Unité Inserm « Thérapie cellulaire en pathologie cardio-vasculaire », université Paris-Descartes. Cet essai sera mené chez un petit nombre de patients que nous commençons à recruter, à l’Hôpital européen Georges Pompidou. Mais avant d’en arriver là, il nous a fallu revenir à des études de laboratoire. Nous avons dû trouver comment orienter les cellules souches embryonnaires, in vitro, vers un destin de cellules cardiaques contractiles. Puis nous avons testé différents biomatériaux pour incorporer, dans des patchs, les cellules déjà engagées dans une voie de différenciation vers des cellules cardiaques (cellules « prédifférenciées »). Nous avons ensuite greffé ces patchs sur des modèles animaux (rat et macaque), dans la zone du cœur où les cellules étaient devenues incapables de se contracter. Les résultats très encourageants obtenus justifient aujourd’hui d’évaluer cette approche chez des patients en situation d’impasse thérapeutique. En parallèle, nous travaillons, au laboratoire, à améliorer les performances de cette stratégie. 1989 Jean Rosa L’hémoglobine et ses maladies Avec le recul, en quoi ce prix vous a-t-il aidé ? A l’époque, l’équipe a perçu ce prix comme un encouragement très ferme à poursuivre ces travaux. En sus de l’aide matérielle, ce prix a été un élément de reconnaissance de notre travail, jugé crédible par un jury prestigieux. Nous avons tenté de répondre à cette promesse placée en nous : dix ans plus tard, nous avons sensiblement progressé, et nous espérons avoir acquis une crédibilité dans cette thématique devenue internationale. L’enjeu est d’importance : l’insuffisance cardiaque touche au minimum 120 000 personnes chaque année en France, et elle représente 3 % du budget de la santé dans les pays industrialisés. 1990 Pierre Tiollais L’hépatite B 1991 Michel Lazdunski Les canaux ioniques 1992 Claude Griscelli Un pionnier des cellules souches Ce prix a récompensé une approche nouvelle : l’introduction de la thérapie cellulaire dans l’arsenal thérapeutique en cardiologie. 6 Lorsque ce prix a distingué votre équipe, en 2003, où en étiez-vous de vos travaux de thérapie cellulaire ? Nous commencions les premiers essais cliniques de thérapie cellulaire dans l’insuffisance cardiaque. Plus précisément, c’est en 2000 que nous avons réalisé la toute première greffe au monde de cellules souches musculaires dans le cœur d’un patient souffrant d’insuffisance cardiaque. Le jury du Prix Allianz-Institut de France a donc récompensé une approche nouvelle : l’introduction de la thérapie cellulaire dans l’arsenal thérapeutique en cardiologie. Dix ans plus tard, on peut juger qu’il ne s’est pas trompé : cette approche n’a fait que se développer au plan international. Le thème pour lequel notre équipe a été honorée reste d’actualité. Et notre équipe est restée fidèle à cette thématique, en diversifiant ses méthodes. Depuis 2003, quelles ont été les évolutions de votre approche ? Notre objectif est toujours de restaurer la fonction cardiaque altérée, en remplaçant une partie des cellules cardiaques détruites ou endommagées par des cellules contractiles fonctionnelles ou par des molécules qu’elles produisent. Mais depuis nos transplantations pionnières, les connaissances ont évolué. Et nous avons tiré les leçons des premiers essais, aux résultats encourageants mais insuffisants. En 2003, les cellules greffées étaient issues du muscle de la cuisse des patients traités. Aujourd’hui nous évaluons la greffe de cellules cardiaques dérivées de « cellules souches » [cellules capables de se multiplier et de se différencier pour engendrer les différents types de cellules de l’organisme] issues d’embryons humains. De plus, nous incorporons désormais les cellules greffées dans un patch de fibrine déposé sur la zone malade du cœur, au moment de l’intervention chirurgicale : notre champ d’étude a ainsi été élargi à l’ingénierie tissulaire. Le système immunitaire 1993 Jean-Paul Lévy Le lymphocyte T tueur et les rétrovirus 1994 Edwin Milgrom Hormones et reproduction 1995 Yves Agid Maladies dégénératives 7 Cinq anciens lauréats du Prix se souviennent 1996 Jean Weissenbach Recevoir ce prix m’a encouragé à poursuivre mon programme de recherche sur le rôle des protéines télomériques. Il a surtout renforcé mon intérêt sur le rôle de ces protéines dans le développement des cancers. Éric Gilson, lauréat du Prix Allianz - Institut de France 2010 pour ses découvertes sur les télomères Si au départ mes recherches étaient très fondamentales, l’obtention de ce prix m’a poussé à développer des recherches à vocation plus médicale. Professeur à la Faculté de médecine de Nice, directeur de l’IRCAN (« Institute for Research on Cancer and Aging ») (unité mixte CNRS-Inserm, université de Nice, Sophia-Antipolis). Une découverte majeure sur le vieillissement Situés à l’extrémité de nos chromosomes, les télomères nous condamnent à vieillir. Mais ils offrent deux avantages évolutifs : ils permettent la reproduction sexuée et nous protègent des cancers. « Dans les années 1990, j’ai été l’un des premiers à me lancer dans l’aventure de l’analyse des « télomères ». A l’époque, on ne s’intéressait guère à ces régions extrêmement originales de notre génome. Les télomères se trouvent à l’extrémité de tous les chromosomes linéaires, que l’on trouve aussi bien chez l’homme que chez tous les « eucaryotes ». Depuis lors, on a compris toute l’importance de ces étonnantes régions chromosomiques. Les télomères interviennent dans les phénomènes de sénescence et de longévité, mais aussi dans le développement des cancers et de certaines maladies génétiques. Ils ont cette remarquable propriété : ils sont programmés pour diminuer de taille lors de chaque division cellulaire. Inexorablement, leur taille est ainsi peu à peu « grignotée » au fil du vieillissement de nos cellules. Et quand les télomères parviennent à un certain degré de raccourcissement, c’est un signal pour que la cellule arrête définitivement de se diviser : elle entre en sénescence. Des questions philosophiques L’existence de ces télomères soulève plusieurs interrogations métaphysiques : comment l’organisme « s’arrange-t-il » de cet état de fait ? Et pourquoi l’évolution a-t-elle sélectionné un système voué à faire vieillir ? On s’est aperçu que les télomères offrent au moins deux avantages évolutifs. D’une part, ils sont essentiels à la reproduction sexuée en permettant la division des cellules germinales en gamètes. Or cette reproduction sexuée assure un brassage génétique. Le prix à payer en est l’inconvénient de vieillir. D’autre part, les télomères nous protègent en partie du développement des cancers. Quand certaines de nos cellules commencent à devenir cancéreuses, les télomères raccourcissent anormalement vite et les cellules malades entrent en sénescence. Une enzyme qui empêche les télomères de raccourcir Nous disposons d’une enzyme capable d’empêcher le raccourcissement de nos télomères : c’est la « télomérase ». Une incitation à m’orienter vers l’étude du cancer Il existe des maladies génétiques rares liées à une déficience de cette enzyme. Les individus touchés vieillissent bien plus vite que la normale. En 1997, j’ai été parmi les premiers à identifier une protéine, TRF2, qui se lie spécifiquement à l’ADN des télomères. Toutefois la télomérase n’est active que dans les cellules de l’embryon et dans nos cellules germinales à l’origine des spermatozoïdes et des ovules. Elle a constitué la première brique de l’échafaudage moléculaire qui assure le fonctionnement de ces régions chromosomiques. 8 A l’été 2013, j’ai ainsi montré que la principale protéine qui se lie à l’ADN des télomères joue aussi un rôle dans la régulation de l’immunité anti-cancer. Dès la naissance, cette enzyme disparaît quasiment de nos cellules somatiques qui forment l’ensemble de nos organes. » La cartographie du génome humain Jean-Louis Mandel, lauréat du Prix Allianz - Institut de France 1988 pour ses travaux sur le chromosome X 1997 Diane Mathis et Christophe Benoist Professeur de génétique humaine au Collège de France, Institut de Génétique et Biologie Moléculaire et Cellulaire de Strasbourg (IGBMC, Inserm-CNRS, Université Louis Pasteur). Des applications pour le diagnostic de maladies neurologiques « J’ai été le premier en France à m’intéresser à la recherche des gènes responsables de maladies héréditaires, dès 1982. Auparavant je conduisais des travaux de génétique très fondamentaux avec le professeur Pierre Chambon, mon mentor. Avec le recul, je me dis que ce prix m’a presque été attribué trop tôt : en 1988, je n’avais encore publié aucun résultat important ! Mais il a récompensé une approche jugée originale, et dont la puissance a été reconnue. Ce prix – le tout premier que j’ai reçu – a été très important pour moi. Il a doté mon laboratoire de moyens financiers non négligeables. Surtout, il a conforté la reconnaissance de mon travail en France. Un mécanisme de mutations très étonnant En 1982, on ignorait tout des gènes des maladies liées au chromosome X. L’idée était d’abord de les localiser le plus précisément possible, en analysant leur transmission au sein des familles atteintes. Puis de les identifier. Et enfin de comprendre leur fonction. Une quête que l’on pourrait comparer à la recherche d’une mine d’or en Afrique – mais sans disposer de carte de l’Afrique ! Car dans les années 1980, les généticiens ne pouvaient s’appuyer sur aucune carte du génome pour s’orienter. Il nous a fallu huit ans pour identifier les premiers gènes de maladies liées à l’X. En 1991, nous avons découvert un mécanisme de mutations très original : une expansion instable de fragments d’ADN, constitués de motifs répétés de trois « lettres » de l’ADN. Nous avons montré que ce type de mutations est responsable du syndrome de retard mental avec X fragile – la cause la plus fréquente de retard mental familial. Il explique aussi l’étrange mode de transmission familiale de cette maladie. Des applications diagnostiques immédiates A partir de nos travaux, un test diagnostique a immédiatement été développé : de 1991 à 2011, il sera utilisé dans tous les laboratoires de diagnostic du X fragile. Il a ensuite été montré que ces mutations instables sont à l’origine d’autres maladies neurologiques, comme l’ataxie de Friedreich, la maladie de Huntington ou la forme la plus fréquente de sclérose latérale amyotrophique. Au total, ce type de mutations est en cause dans plus de 15 maladies neurologiques. C’est en 1992 que Jean Weissenbach, au Généthon, a accompli l’exploit de réaliser la première carte complète du génome humain. Cette carte nous a permis de nous orienter bien plus rapidement dans le génome. Le point de départ d’une stratégie de thérapie génique En 1993, avec l’équipe de Patrick Aubourg, nous avons identifié le gène d’une autre maladie : l’adrénoleucodystrophie liée à l’X, une maladie démyélinisante très sévère. Pour l’anecdote, cette découverte a fait la « une » de la revue Nature... car elle a été publiée la semaine où sortait un film hollywoodien sur la maladie, « Lorenzo ». Pour l’équipe de Patrick Aubourg, l’identification de ce gène sera le point de départ du développement d’une stratégie de thérapie génique, dont ont bénéficié plusieurs enfants atteints. » Les techniques de transgénèse 1998 Gilles Thomas Le génome humain et ses applications cliniques 1999 Jacques Pouysségur Contrôle de la division cellulaire 2000 Philippe Sansonetti Intestin et bactéries Shigella 2001 Alain Prochiantz Nouveau mécanisme de communication intercellulaire 9 Cinq anciens lauréats du Prix se souviennent avec le laboratoire de Christine Holt, à Cambridge (Royaume-Uni), nous avons montré que ce transfert d’information guide le déplacement des « cônes de croissance » des neurones (l’extrémité de l’axone qui navigue, dans le système nerveux, à la recherche des cibles avec lesquelles elle doit établir un contact). Les homéoprotéines leur donnent une information sur leur position. Enfin, ces protéines se sont avérées avoir d’autres fonctions plus physiologiques, comme le développement tardif du cortex et sa physiologie adulte. Alain Prochiantz, lauréat du Prix Allianz - Institut de France 2001 pour sa découverte de messagers moléculaires dans les cellules nerveuses Vos travaux ont-ils des applications technologiques ou médicales ? Professeur au Collège de France, titulaire de la chaire « processus morphogénétiques », et directeur du Centre interdisciplinaire de recherche en biologie au Collège de France. Un nouveau moyen de communication entre les cellules A la fin des années 1980, nous avons découvert une nouvelle voie de signalisation cellulaire, qui entre en jeu dans le développement et la physiologie des organismes. Ce fut un résultat difficile à faire admettre, car il battait en brèche plusieurs idées reçues. Vous racontez avoir fait, il y a 25 ans, une observation fortuite qui a bousculé plusieurs idées établies... En 1984, nous avions observé qu’au cours du développement du système nerveux, deux cellules voisines, de types différents, peuvent échanger une information qui va déterminer la forme des cellules nerveuses ou neurones, en fonction de leur position. En recherchant les mécanismes impliqués, cinq ans plus tard, nous avons découvert que les cellules peuvent communiquer entre elles par le biais de messagers moléculaires inattendus : des « facteurs de transcription » – c’est-à-dire des protéines qui contrôlent l’activité des gènes en se liant à des régions spécifiques de l’ADN. En quoi ce résultat était-il iconoclaste ? Et comment a-t-il été reçu par vos pairs ? Ce résultat a suscité certaines interrogations dans la communauté scientifique. Il dérangeait, car il prenait à contrepied plusieurs dogmes. Jusqu’alors, on pensait que les facteurs de transcription restaient confinés dans le noyau pour y réguler l’activité des gènes. 10 Or nos expériences prouvaient que des facteurs de transcription particuliers (des « homéoprotéines ») peuvent parfois sortir du noyau, franchir la membrane cellulaire pour s’exporter dans le milieu extracellulaire, puis pénétrer dans des cellules voisines pour en modifier de nombreux caractères, dont la forme. Deuxième dogme battu en brèche : on pensait jusqu’alors que les membranes cellulaires étaient des barrières imperméables aux agents hydrophiles. Mais il n’en est rien, car ces membranes peuvent laisser passer de tels agents quand elles sont déstabilisées par des processus physiologiques. Nous avons identifié les séquences en acides aminés responsables du passage de ces protéines à travers la membrane cellulaire. Cette identification a ouvert un nouveau champ de recherches en physico-chimie : la mise au point de « peptides-vecteurs ». Capables de traverser les membranes cellulaires, ces peptides « passe-murailles » peuvent être utilisés, si l’on y accroche divers composés, pour introduire ces composés d’intérêt pharmacologique dans les cellules. Ce sont donc des vecteurs qui peuvent servir d’outils pour la recherche ou pour la distribution de médicaments dans l’organisme, par exemple. Où en est le développement de ces peptides-vecteurs ? Juste après avoir découvert ce premier peptide, la « pénétratine », nous avons déposé un premier brevet, suivi de nombreux autres sur des thèmes voisins. A ce jour, une vingtaine de ces peptides ont été développés : il s’agit d’un domaine florissant de la recherche pharmacologique. Je pense que ce prix de la Fondation AllianzInstitut de France m’a été attribué pour cela : pour récompenser un développement technologique, susceptible d’avoir des applications scientifiques ou médicales. J’exprime ma gratitude vis-à-vis du jury de ce prix, qui a contribué à la reconnaissance de nos idées, longtemps considérées comme chimériques par nombre d’acteurs du monde académique. Fait rare pour un scientifique, vous avez publié de nombreux livres et monté des projets théâtraux. Comment concevez-vous cette activité littéraire, que vous qualifiez de « science nocturne », en lien avec votre travail de chercheur ? Ecrire est pour moi une façon de réfléchir, de faire la science sur un autre tempo. De « lever le nez du guidon », en quelque sorte. C’est aussi l’occasion de lire (on dit « re-lire »...) des auteurs contemporains ou plus anciens, tels Darwin, Claude Bernard ou Alan Turing. Ces « conversations » nous aident à comprendre les objets sur lesquels nous travaillons, leur genèse ou leur évolution. De ce fait, je ne vois pas l’écriture comme une activité séparée de la recherche : d’où le terme de « science nocturne ». Par ailleurs, si ces ouvrages ou activités théâtrales, non directement liés au laboratoire, permettent à un public plus large de s’intéresser à la science, si elles contribuent à faire entrer la science dans la culture, il faut s’en réjouir ! Car la compréhension, par un large public, de ce qui se passe « du côté de la science » me semble constituer une exigence des démocraties contemporaines. » 2002 Jean-Marc Égly Régulation de l’expression des gènes 2003 Philippe Menasché Protection du myocarde et transplantation cellulaire 2004 Patrice Courvalin Résistance des bactéries aux antibiotiques 2005 Marcel Méchali Réplication chromosomique 2006 Simon Wain-Hobson Lutte contre le virus du SIDA Quels ont été les prolongements de cette observation pionnière ? Cette observation a engagé mon laboratoire dans une nouvelle ligne de recherche, que nous poursuivons aujourd’hui. Nous avons peu à peu déroulé le fil des processus en jeu dans cette nouvelle voie de signalisation cellulaire. Nous avons montré que ce mode de communication entre cellules intervient dans de nombreux processus biologiques, au cours du développement et chez l’adulte. Par exemple, en collaboration 2007 William Vainchenker Hématologie 11 Prix de Recherche 2013 de la Fondation Allianz - Institut de France 2008 Par exemple, le gène FOXP3 réprime normalement le gène Her2 – qui est lui-même amplifié dans certains cancers du sein. D’où un risque de transformation tumorale, dans certaines cellules, si le gène FOXP3 muté est porté par le chromosome X actif. Ou si le gène sauvage est inactivé par une épimutation. Par ailleurs, certaines « marques épigénétiques » pourraient servir d’outils diagnostiques ou pronostiques en cancérologie pour améliorer les signatures moléculaires permettant de classifier les tumeurs et mieux choisir ainsi les traitements appropriés. Professeur au Collège de France, directrice du laboratoire de rétrovirologie moléculaire (Institut Curie-Inserm, Paris). Comprendre le rôle de l’épigénétique dans les cancers « Comment, chez les femelles de mammifères, se met en place « l’inactivation du chromosome X ? C’est une des questions que j’étudie à l’Institut Curie. Dans chaque cellule de mammifère femelle, tous les gènes (ou presque) présents sur l’un des deux chromosomes X sont réprimés. Cette inactivation se produit très tôt, au cours du développement de l’embryon femelle. Faute de quoi, l’embryon meurt prématurément ! Les femelles ont ainsi trouvé cette étonnante façon d’établir une parité « à rebours » vis-à-vis des mâles – qui eux n’ont qu’un seul chromosome X… Cette inactivation du X est un processus épigénétique (voir encadré page suivante). Une double dose de X, létale pour l’embryon... Notre équipe vient de montrer que lors du développement embryonnaire, la présence de deux chromosomes X actifs bloque la différenciation des cellules. C’est pour cette raison qu’une « double dose » du X est létale pour l’embryon femelle. Mes recherches sont très fondamentales et j’ai la chance de travailler à l’Institut Curie, 12 La prédisposition aux maladies virales et bactériennes de l’enfant 2009 Bertran Auvert A la recherche de traitements anti-cancer ciblant l’épigénome Edith Heard, lauréate du Prix Allianz - Institut de France 2013 pour ses travaux sur l’épigénétique L’inactivation du chromosome X est un processus vital pour les femelles de mammifères. Il est mis en place au cours de l’embryogenèse, mais se trouve perturbé dans certains cancers. Jean-Laurent Casanova dédié à la recherche sur le cancer et à ses traitements. D’où mon intérêt pour comprendre le rôle des processus épigénétiques dans le développement des cancers. Nous venons ainsi de montrer qu’il existe, sur le chromosome X inactif, plusieurs gènes qui sont réactivés de manière aberrante, dans certaines tumeurs du sein. Les épimutations, de plus en plus souvent mises en cause dans des cancers Quand on séquence le génome des cellules tumorales, on découvre de nombreux gènes mutés. Mais il arrive qu’on ne trouve pas de mutations dans les gènes où l’on s’y attendait ! De plus en plus souvent, des changements épigénétiques (« épimutations ») paraissent incriminés dans l’évolution des cancers. L’inactivation ou l’expression aberrante de certains gènes - sans que leur séquence nucléotidique soit affectée - peut avoir un impact sur la prolifération, la survie ou l’invasivité des cellules tumorales. Il existe plusieurs gènes « suppresseurs de tumeurs » sur le chromosome X. Ces recherches soulèvent l’espoir de parvenir à traiter certains cancers à l’aide de molécules qui cibleraient spécifiquement les marques épigénétiques en cause. On dispose déjà de quelques médicaments de ce type. Les progrès à cet égard devraient être rapides, car on dispose d’outils permettant d’établir le profil de l’épigénome des patients atteints de cancer. On peut désormais suivre comment cet épigénome évolue après traitement, dans l’espoir de réussir à mettre au point de nouvelles molécules anti-cancer qui cibleraient l’épigénome. » L’épidémiologie du VIH en Afrique 2010 Dans le laboratoire d’Edith Heard à l’Institut Curie. Éric Gilson Rôle des télomères dans le cancer et le vieillisssement 2011 L’épigénétique, une discipline en plein essor L’épigénétique, c’est la transmission de changements de caractères qui ne sont pas fondés sur des variations de séquence de l’ADN. Un phénomène qui bafoue les lois de l’hérédité classique, régies par la génétique mendélienne. Les caractères épigénétiques sont dus à la présence ou à l’absence de « marques chimiques » qui « taguent » spécifiquement certaines séquences de l’ADN – activant ou inactivant ainsi certains gènes. Ces marques sont transmises à la descendance, au fil des divisions cellulaires ou des générations sexuées. L’épigénétique fascine, car elle dessine un paysage du vivant où « tout n’est pas inscrit dans la séquence de l’ADN ». Elle explique pourquoi, par exemple, chacun de nous est constitué de cellules aussi différentes que nos cellules du foie, de la peau, du cerveau, des muscles ou des os… Olivier Pourquié Cela, alors que toutes ces cellules possèdent le même patrimoine génétique. L’épigénétique fascine, car elle soulève tout un jeu de questions essentielles : quelle part joue-t-elle dans le développement d’un individu ? dans l’hérédité ? dans l’apparition de maladies comme les cancers ? Quel est, dans cette « hérédité épigénétique », le poids de facteurs de l’environnement : la nutrition du père ou de la mère durant ou avant la grossesse, l’exposition précoce à des polluants ou toxiques, ou encore des stress majeurs vécus par les ascendants, etc. ? Enfin, quelle est l’importance de ces processus épigénétiques dans l’évolution des espèces ? Autant d’interrogations captivantes, qui mobilisent aujourd’hui de très nombreux laboratoires à travers le monde. Le développement embryonnaire des muscles et des vertèbres 2012 Giacomo Cavalli La transmission héréditaire de la mémoire cellulaire 2013 Edith Heard L’inactivation du chromosome X chez les femelles de mammifères 13 Prix ADPS 2013 de Recherche sur la prévention du Vieillissement Edith Heard, une généticienne à l’Institut Curie Elle est la première femme scientifique à recevoir, en 2013, ce prestigieux prix de la Fondation Allianz-Institut de France. Quand Edith Heard fut nommée professeur au Collège de France, en avril 2012, elle a rejoint les 4 seules autres femmes – pour 47 hommes… – titulaires d’une chaire pérenne dans cette vénérable institution. C’était la première fois qu’une femme si jeune (47 ans) était nommée au Collège de France. Au début des années 1980, cette native du Royaume-Uni entame des études de physique à l’université de Cambridge. Un an plus tard, elle opte pour la biologie, discipline qui lui paraît plus dynamique. Puis elle s’oriente vers la génétique et choisit un sujet de thèse en cancérologie, à l’Imperial Cancer Research Fund de Londres. Elle rejoint ensuite l’Institut Pasteur en 1990, pour identifier les séquences responsables de l’inactivation du X. Elle se souvient de débuts difficiles : « mes résultats ne concordaient pas avec les dogmes en vigueur. Cela m’a forcée à concevoir d’autres hypothèses et d’autres stratégies. » En 1997, elle obtient enfin un résultat positif. Elle part aux Etats-Unis, à Cold Spring Harbor, pour apprendre des techniques utiles à son approche épigénétique. Elle revient à Paris en 2001 et monte une jeune équipe à l’Institut Curie. Elle y dirige aujourd’hui une unité Institut CurieInserm-CNRS de 100 personnes – dont sa propre équipe d’environ 15 personnes. Prix ADPS 2012 Rochelle Buffenstein Professeur de biologie à l’Université de Rochester (Etats-Unis). Les mystères du rat-taupe nu « Lorsque je suis arrivée à l’université de Cambridge, ce fut un choc pour moi, confie-t-elle : nous n’étions que deux filles, sur les 23 étudiants de première année en physique de mon collège. On m’a fait comprendre que je n’étais pas tout à fait à ma place ». Mais la pugnacité, alliée à une forme de douceur, n’est pas la moindre de ses qualités. « Je fais partie d’une génération de femmes pour lesquelles il restait un peu difficile de percer en sciences. Clairement, cela a changé aujourd’hui. Avec le recul, je réalise la chance que j’ai eue de mener ma carrière en France – où il était bien plus facile pour une femme de mener de front vie professionnelle et familiale ». Un phénomène épigénétique Cette chatte à pelage en « écaille de tortue » illustre un phénomène épigénétique : l’inactivation du chromosome X. Chez le chat, le chromosome X porte un gène qui détermine la couleur du pelage. L’inactivation aléatoire d’un des deux chromosomes X se traduit, chez la femelle, par une mosaïque de couleurs différentes. Ces couleurs dépendent de l’origine du X inactivé (paternelle ou maternelle) dans les cellules de la peau. 14 Vera Gorbunova, lauréate du Prix ADPS 2013 de Recherche sur la prévention du Vieillissement pour ses travaux sur le rat-taupe nu D’où vient l’exceptionnelle résistance aux cancers et au vieillissement du « rat-taupe nu », ce minuscule alien souterrain ? Vera Gorbunova a levé un coin du voile sur ce fascinant mystère, qui défie le monde de la biologie. C’est une bien étrange créature, un « extraterrestre » lilliputien qui sidère les laboratoires du monde entier. Nu comme un ver, rose et plissé, quasi-aveugle : tel est, en sa grâce extravagante, le rat-taupe nu Heterocephalus glaber, pour les scientifiques. Issu de la corne de l’Afrique, son milieu d’origine, il a acquis une dimension de star internationale, scrutée sous l’objectif (des microscopes) des scientifiques de tous pays. Car sous ses airs d’ectoplasme inoffensif et fragile, ce mini-rongeur constitue l’une des plus formidables énigmes de la biologie des cancers et du vieillissement. Jugez plutôt : de la taille d’une souris, il bénéficie d’une longévité dix fois supérieure à celle de sa « cousine ». Soit plus de 30 ans pour le rat-taupe, contre trois à quatre ans seulement pour la souris. Cet animal hors norme présente un autre don stupéfiant : sa vie durant, il ne développera aucun cancer. D’où lui vient cette extraordinaire capacité de résistance aux tumeurs ? Véra Gorbunova, fournit une première explication moléculaire à cette incroyable aptitude de défense anti-cancer. En juin 2013, son équipe de l’université Rochester (Etats-Unis) a publié ce travail dans la prestigieuse revue Nature. « Les tissus de rat-taupe nu produisent de grandes quantités d’une molécule particulière, un acide hyaluronique de très haut poids moléculaire, résume Gérard Friedlander, professeur de physiologie à la Faculté de Médecine Paris Descartes et directeur du centre de recherche Prix ADPS 2013 Vera Gorbunova « Croissance et signalisation » (Inserm, Hôpital Necker-Enfants malades). Cette molécule leur confère deux propriétés bénéfiques : elle rend leur peau particulièrement élastique. Et elle dote ces animaux d’une résistance unique aux cancers. » Cinq fois plus grande que son équivalent chez l’homme ou la souris, la molécule d’acide hyaluronique du rat-taupe nu protège la peau de ce rongeur de ses passages répétés le long des étroits boyaux qu’il colonise. Mais elle bloque aussi les divisions cellulaires incontrôlées qui provoquent des tumeurs. Car a contrario, les chercheurs ont observé le développement de tumeurs lorsqu’ils supprimaient cette substance de l’organisme du rat-taupe – en produisant des animaux génétiquement modifiés. « Si nous parvenons à comprendre comment ces animaux ont trouvé la clé d’une vie plus longue et d’une résistance aux cancers, peut-être pourrons-nous en tirer des enseignements pour améliorer la longévité et les défenses anti-tumorales de l’espèce humaine », espère Gérard Friedlander. Nu comme un ver, rose et plissé, quasi-aveugle : tel est le rat-taupe nu - Heterocephalus glaber. 15 www.allianz.fr Document à caractère publicitaire COM18023 - V01/14 - Imp01/14 - Réalisation Alloscan (Groupe Amalthéa) - Crédits photos : Fotolia - Noak / Le Bar Floréal /I nstitut Curie - Nina Leroux / OmégaTV - Frédéric Stevens / Institut de France - University of Rochester. Allianz France Société anonyme au capital de 859 142 013,88 euros. Siège social : 87, rue de Richelieu - 75002 Paris. 303 265 128 RCS Paris.