Ouvrages de soutènement, des techniques géosynthétiques matures ?

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Ouvrages de soutènement, des techniques géosynthétiques matures ?
5es Rencontres Géosynthétiques Francophones 2003 / 2004
Ouvrages de soutènement, des techniques géosynthétiques matures ?
Ph. Gotteland - Lirigm Polytech’Grenoble, UJF Grenoble 1 - Grenoble - France
Th. Dubreucq – Cete Ouest – Saint Brieuc – France
Y. Guerpillon – Scetauroute – Seyssin Grenoble - France
Résumé
Les techniques géosynthétiques pour la construction d’ouvrages de soutènement semblent matures.
C’est le bilan que nous pouvons faire des communications au congrès de Nice 2002. Différentes
techniques existent et se retrouvent complémentaires ou en concurrence sur le marché, telle ou telle
étant mieux adaptée à un projet donné. En complément de l’intérêt économique de ces solutions, la
réponse aux impératifs environnementaux apparaît comme catalyseur. En balance de ce bilan, la
recherche reste active tout spécialement dans l’éclairage du comportement en service ou sous
sollicitations spécifiques de type dynamique. Les modèles physiques multi-échelles gardent tout
leur intérêt. Ils complètent et valident le développement de modèles numériques permettant une
analyse fonctionnelle des concepts.
Mots clés : géosynthétiques, soutènement, ouvrages, expérimentations, modèles
Abstract (Are geosynthetic solutions mature for retaining wall structures?)
Geosynthetic engineering construction for retaining walls appears to be a mature technique. That’s
appeared from communications in Nice 2002 conference. Large numbers of solutions exist and
compete in the building market. Some specific techniques are well adapted for particular types of
project. Geosynthetic solutions are very interesting compared to classical solutions from both an
economic and environmental point of view. Environmental interest especially drives the
development of new techniques. Despite the basic states of maturity issues remain with
fundamental aspects of the technique. Academic and industrial research and development are very
active, especially in understanding the general in-service behaviour and response under specific
situations such as dynamic loading. Currently it appears essential that physical modelling in small
scale and/or full size be used in addition to numerical model investigations to analyse new
concepts.
Key-Words : geosynthetics, retaining wall, structures,experiments, models
1. Introduction
L’objectif de ce papier est de présenter un rapide bilan des communications faites au congrès de
Nice 2002 duquel nous pouvons faire ressortir les grands thèmes qui suivent.
La construction des ouvrages de soutènement en sol renforcé par géosynthétiques est une technique
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qui semble arrivée à maturité. Beaucoup d’ouvrages sont réalisés à travers le monde. Différentes
techniques existent de par le type des matériaux géosynthétiques utilisés, la réalisation du
parement… et se retrouvent en concurrence sur le marché. Les parements cellulaires semblent
prendre le dessus et sont majoritaires pour des parements très raide proche de la verticale. On
retrouve des dispositifs spécifiques de réalisation des parements, adaptation de technique de mur
poids, parement béton préfabriqué lié ou non aux renforcements, parement béton coulé lié, … Les
techniques de retournement de nappes se retrouvent surtout sur le renforcement de pentes avec
végétalisation à posteriori. L’intérêt économique des variantes géosynthétiques est maintenant bien
admis.
Les contraintes environnementales que ce soit pour l’intégration de l’ouvrage dans son
environnement (techniques de parement), ou l’utilisation des matériaux du site voire l’utilisation de
résidus valorisables, deviennent maintenant incontournables. Les méthodes de dimensionnement
différent selon les pays. Elles sont peu abordées et semblent donc apporter satisfaction. Toutefois
selon l’application de l’ouvrage et sa fonctionnalité, elles font apparaître des manques. Des
évolutions restent donc encore possibles [Segrestin & Gourc, 2002 ; Faure et al., 2002].
En balance de ce bilan plutôt positif, quelques questions sur le comportement réel en service et à la
rupture potentielle des ouvrages restent sans réponses effectives. Le comportement sous
sollicitations dynamiques reste encore largement à explorer. Ceci fait l’objet de recherches avec un
intérêt tout particulier pour le développement ou l’utilisation des méthodes numériques dont
l’objectif est l’analyse du fonctionnement des ouvrages sous sollicitations et la justification du rôle
fonctionnel de dispositifs particuliers (intercalement de nappes courtes, rôles et effets des blocs au
parement). On peut également analyser l’évolution des propriétés, essentiellement mécanique ici,
des matériaux, ce qui permet de faire des études prévisionnelles, prédictives ou explicatives du
comportement global (fluage, effet d’un comportement cyclique,…). Quelques développements en
3D montrent l’intérêt d’explorer ces approchent de calcul maintenant abordables avec les moyens
informatiques disponibles.
Le bilan fait également ressortir l’intérêt fort des études expérimentales, modèles physiques de
laboratoires pour la compréhension ou l’obtention de mécanismes, et des expérimentations tailles
réelles avec la difficulté de reproduire en laboratoire les spécificités des caractéristiques des
matériaux constitutifs. Pour convaincre rien de mieux qu’un ouvrage de référence taille réelle (voir
pour croire ! !).
2. Exemples de potentialité et d’adaptabilité des techniques géosynthétiques
L’intercalation de nappes de renforcement de différents modules est une possibilité intéressante [Di
Pietro, 2002]. Il s’agit ici du cas particulier de l’intercalation de nappes de grillage métallique
(J=8000 kN/m) et de nappes géogrilles (J=2000 kN/m) afin de réaliser des structures de grande
hauteur (pentes raidies ou mur de soutènement) (figure 1). L’économie réalisée par l’association
semble réelle comparativement à l’utilisation possible de l’une ou l’autre.
Il est possible d’utiliser les renforcements grillages à fort module pour assurer la bonne réalisation
du parement ou le renforcement secondaire court. Economiquement la géogrille est intéressante
comme renforcement principal. La possibilité d’utiliser un logiciel de dimensionnement permet
l’investigation de différents profils et d’optimiser le dimensionnement. Un ouvrage semi-vraie
grandeur instrumenté est présenté par ailleurs [Ghionna et al., 2002].
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Figure 1 : Détail de concept des renforcements primaire et secondaire, exemple d’ouvrage Leiria Portugal
[DiPietro 2002]
Un mur cellulaire de grande hauteur (16m) utilisant la technique Evergreen [Jaecklin & Zeiter,
2002] associée à un renforcement géotextile a été réalisé afin de constituer une protection phonique
à proximité de l’aéroport de Bruxelles. Le développement d’un nouveau procédé a permis la liaison
des éléments préfabriqués béton avec les nappes de renforcement. L’esthétique et l’intégration
environnementale étaient une des priorités du projet et un soin tout particulier a porté sur la
végétalisation effective du mur relativement raide.
La difficulté majeure réside dans la compatibilité des déformations du remblai avec le parement
cellulaire en béton relativement rigide. La bonne qualité de réalisation des éléments préfabriqués
(figure 2) autorise la réalisation des angles sans trop de problèmes.
Ce type de réalisation constitue une bonne protection contre les nuisances sonores.
Figure 2 : Ouvrage de protection phonique, vue globale et détails angle entrant [Jeacklin & Zeiter, 2002]
Les exigences environnementales et constructives pour la réalisation d’un ouvrage sur l’île de
Santorin en Grèce [Kollios & Pavlatos, 2002] ont pu être remplies grâce à la réalisation d’un
ouvrage à parement vertical renforcé par géogrilles. Les ouvrages, d’une hauteur maximale de 7m,
cumulent un linéaire de 750m, sous forme de ligne polygonale. Des renforcements primaires et
secondaires sont utilisés en interaction avec un matériau de remblaiement de type cendres
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volcaniques (figure 3). Durant la phase assez longue de construction les mesures de contrôle ont
confirmé le bon dimensionnement. De tels ouvrages pourront à l’avenir être à nouveau réalisés.
Figure 3 : Détails du parement ; vues en plan et en coupe [Kolios & Pavalatos, 2002]
A cause des limites d’emprise, 9 ouvrages de type pente raidie renforcée par géogrilles, d’une
hauteur maximale finale 16m, à pente uniforme ou à redans ont été construits afin de réaliser un
élargissement d’autoroute au Royaume Uni [Corbet et al., 2002]. Ils utilisent la technique de
retournement des nappes et de végétalisation des parements (figure 4). Différents types de
matériaux de remblais ont été utilisés en fonction des ouvrages et des hauteurs. L’espacement entre
nappes a été maintenu constant. Afin d’optimiser le dimensionnement une variation de la raideur
des renforcements en fonction du positionnement est faite.
Figure 4 : Lord Lees Reinforced slope, profil et vue du parement et liaison avec zone clouée [Corbet et al.,
2002]
Au dire des auteurs, le dimensionnement a été fait à l’aide du BS 8006, section 6, et utilisation de
coefficients de sécurité partiels donnés dans la certification du produit utilisé. Cette technique a
permis de respecter les contraintes environnementales liées au projet. Les principaux avantages
avancés par les auteurs sont : rapidité de construction, parement effectivement végétalisable,
flexibilité pour la réalisation des formes de parement, possibilité d’utilisation de matériaux
différents en gardant la même technique. Une étude économique a posteriori a confirmé que la
technique était la meilleure pour chacun des ouvrages réalisés.
La méthode de dimensionnement et la technique de construction retenues pour des grands murs,
remblais d’autoroute et culées construits au Brésil [Gomes & Martins, 2002] sont illustrées au
travers de trois exemples aux profils particuliers. L’analyse des coûts et la distribution par matériau
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sont particulièrement intéressantes (figure 5). On note que le coût des géosynthétiques (matériau et
pose ! ?) représente plus de 50% du coût de réalisation des ouvrages. Mais ces études de coût ont
permis de montrer les économies de construction, qui pour le cas de l’ouvrage BR381, représente
35% d’économie par rapport au coût initial prévu.
Les projets ont fait l’objet d’analyse particulière en service, à l’aide de résultats de mesure
d’instrumentation en place. Les déformations observées en service sont très faibles, bien moindre
que celles que les auteurs avaient envisagées lors des dimensionnements. Le dimensionnement en
service n’a pas encore livré tous ses secrets !!
Figure 5 : Distribution des coûts dans trois profils d’ouvrages examinés BR381, MG030, MG123 [Gomes &
Martins, 2002]
La construction en montagne demande une attention particulière, que ce soit pour la technicité des
ouvrages ou pour les délais limités de construction, imposés par les conditions climatiques. Le bon
choix de la technique et du géosynthétique de renforcement peut conduire à une solution
économiquement optimale. De telles contraintes de construction sont illustrées à partir d’un
exemple de remblais de protection paravalanche (figure 6), où, délai de construction, limite
d’emprise et intégration environnementale ont été satisfaits [Mannsbart, 2002].
Afin d’offrir une technique durable de renforcement de sol en milieu marin agressif immergé un
système de renforcement et d’attache aux panneaux de parement entièrement synthétique a été
développé [Orsat & Hall, 2002]. Plusieurs applications illustrent l’utilisation. L’innovation porte sur
le dispositif de liaison des renforcements avec les panneaux (figure 7). Une boucle est noyée
partiellement dans le béton au coulage et est ensuite liée aux bandes de renforcement par blocage à
l’aide de clés en fibres de verre. L’intérêt de la technique est la durabilité en milieu physicochimique agressif, la possibilité d’utilisation de remblais agressif, associée à l’efficacité des
parements en béton. La technique devient donc compétitive dans des domaines où elle était jusqu’à
présent écartée pour des questions de durabilité.
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Figure 6 : Protection paravalanche Lanersbach, vue globale avale, coupe projet, vue de détail parement aval
[Mannsbart, 2002]
Figure 7 : Renforcement par bandes géosynthétiques et dispositif de connexion au parement béton
préfabriqué [Orsat & Hall, 2002].
L’acceptation d’une variante à une solution classique a permis la réalisation en Mai 2000 de culées
porteuses renforcées par géosynthétiques [Herold, 2002] (figure 8). Afin de contrôler les
déformations d’une telle structure une instrumentation a été placée dans chacune des culées:
déplacement du parement, inclinomètres, et mesure de pression totale. L’instrumentation doit rester
opérationnelle 5 ans. Des tests de roulage ont été effectués sur le tablier et une calibration de la
méthode de calcul est faite à partir des mesures ainsi qu’une analyse numérique par éléments finis
(FEM). L’étude technico-économique en terme de temps de construction et de coût montre les
intérêts manifestes de la technique en comparaison des méthodes conventionnelles.
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Figure 8 : Culée porteuse renforcée par géosynthétique, vue globale après réalisation [Herold, 2002].
A Minneapolis (USA) un mur à parement cellulaire de 13,4m de haut a été réalisé à proximité de
l’extension de 5 niveaux en déblais d’un centre commercial [Turgeon-Schramm & Paulson, 2002].
L’autostabilité de l’ouvrage renforcé sous chargement permet la non diffusion des poussées
latérales sur la structure (figure 9).
Figure 9 : Profil du mur parement cellulaire, vue de la zone de raccordement en phase constructive
[Turgeon-schramm & Paulson, 2002]
Ainsi, un espace vide existe entre les deux structures. Le mur cellulaire a été dimensionné à partir
de la méthode NCMA américaine. Des inclinomètres verticaux ont été placés dans l’ouvrage afin de
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mesurer les déplacements pendant et après la construction pour évaluer la déformation du parement
et ses performances. Pendant la construction un déplacement horizontal maximal de 65mm a été
observé, soit approximativement 0,5% de la hauteur du mur. Après 4 mois, les mesures indiquent
un déplacement de post-construction très faible de 7 mm. Comparé à ce qui était envisageable et
acceptable par rapport à la méthode de dimensionnement (de l’ordre de 200 à 250mm), les
déplacements observés sont faibles.
L’utilisation de cette technique a permis une économie importante comparativement à une solution
classique en béton armé et mur à contreforts. D’autre part, l’accès réduit du chantier était bien
adapté à cette technique.
3. Intérêt des modèles
3.1. Modèles numériques pour l’analyse
Les modèles numériques permettent une analyse fonctionnelle des concepts. Les possibilités
actuelles sont manifestes, et de nombreuses études portent sur le calage des paramètres. Comme les
modèles physiques à échelle réduite, ils ne restent que des modèles qui doivent être confrontés à la
réalité.
L’étude du comportement à la rupture d’un mur cellulaire renforcé par géosynthétiques est traitée à
l’aide d’un code Elément Fini (FEM, Plaxis) [Guler & Hamderi, 2002]. Les mécanismes de ruptures
obtenus sont comparés avec les méthodes de dimensionnement classiques à l’équilibre limite. Que
le matériau de remblai soit cohérent ou frottant, les mécanismes de rupture développés
numériquement tendent vers un mécanisme en glissement (figure 10).
Figure 10 : Maillage déformé amplifié 20 fois,
obtention de la zone de rupture par diminution
des propriétés résistantes [Guler & Hamderi, 2002]
Figure 11 : Maillage pour analyse numérique
FEM [Rajot, 2002]
La même approche est présentée [Rajot, 2002] sur un ouvrage à parement cellulaire type SUMO
avec des connexions aux renforcements par géogrilles HDPE (figure 11). L’analyse à l’aide d’un
code élément fini (SAGE) permet de localiser le niveau de renforcement le plus sollicité et
d’obtenir des valeurs critiques de 20% inférieures à celles données par la méthode classique de
dimensionnement (CARTAGE). Le problème de la modélisation réside dans l’obtention (choix,
détermination des paramètres…) des lois de comportement des matériaux en interaction sous
grandes déformations.
Les potentialités de modélisation des ouvrages renforcés ont été examinées à partir d’une approche
3D (Flac3D) [Gotteland et al., 2002]. L’application présentée porte sur la prise en compte de l’effet
3D sous une sollicitation localisée. Les différences obtenues sont importantes comparativement à un
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calcul 2D plus classique. Pour certains ouvrages l’approche 3D peut s’avérer nécessaire. Ceci est
illustré par Fan & Chou (2002) où le mécanisme de ruine observé (effet de poutre induit par butées
latérales) ne peut être analysé cinématiquement que par une approche en 3D.
3.2. Modèles réduits et recherche des mécanismes
Un des principaux intérêts des modèles réduits réside dans l’identification de mécanismes basés sur
des études répétitives.
Une étude en laboratoire effectuée sur modèles réduits de type petits rouleaux [Kupec & McGown,
2002] a permis d’examiner le rôle effectif de la forme du parement d’un ouvrage de soutènement
renforcé (figure 12). La réalisation d’un parement non linéaire permet au concepteur de contrôler la
pression des terres, en distribution et amplitude. Ceci a un effet non négligeable sur la pression en
pied de parement. Des bénéfices techniques et esthétiques peuvent être attendus de la réalisation de
telles formes nouvelles.
Figure 12 : Parements linéaires et incurvés, cas du modèle L = 0.33 H3 [Kupec & McGown, 2002]
Figure 13 : Vue de dessus du modèle
réduit pour étude de la distribution des
renforcements [Kulczykowski, 2002]
Figure 14 : Vue du parement de
l’expérimentation vraie grandeur [Ghionna et
al., 2002]
Dans le même ordre d’idée, l’effet de la distribution des efforts mobilisables dans les renforcements
a été étudié à partir de modèles réduits [Kulczykowski, 2002]. Chaque modèle est de hauteur
constante et utilise le même renforcement (raideur, longueur et position) (figure 13). Afin de jouer
sur la traction limite qu’il est possible de mobiliser par niveau de renforcement et de l’adapter à la
position du renforcement en profondeur, des largeurs variables de bandes de renforcements sont
retenues. On obtient ainsi une distribution mobilisable d’efforts: triangulaire, uniforme ou mixte.
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On observe un comportement à la rupture différent en fonction des modèles. La distribution
triangulaire semble la plus performante.
3.3. Modèles vraie ou semi-vraie grandeur instrumentés
Un ouvrage instrumenté semi-vraie grandeur a été réalisé [Ghionna et al., 2002] (figure 14), avec un
parement en nappes retournées et deux types de renforcement à rigidité différente placés en
alternance. Le chargement s’est fait jusqu’à la rupture et les résultats des mesures sont analysés en
comparaison des méthodes de dimensionnement par équilibre limite prenant en compte la rigidité
des renforcements. Des analyses sont en cours à partir de calculs numériques (FLAC 2D).
Une série d’essais expérimentaux à échelle semi-vraie grandeur, hauteur des ouvrages 3,6m, avec
des renforcements géosynthétiques ou métalliques a permis l’obtention de données de bonnes
qualités [Bathurst et al., 2002a]. Ces données sont utilisées en comparaison de résultats numériques
obtenus à partir d’une analyse par Différences Finies (Flac2D). Les parements sont de type
cellulaire par superposition de blocs. Un parement est fait par retournement des nappes. La rupture
se fait par chargement au-delà de la limite de calcul prévue. Le comportement en déformation est
différent. Il apparaît directement lié à la raideur et au nombre de renforcements (figure 15).
Figure 15 : Coupe de principe des murs à parement cellulaire, déplacement du parement en fonction du
chargement [Bathurst et al., 2002a].
Toute une série d’ouvrages expérimentaux vraie grandeur réalisée dans la dernière décennie est
décrite par Ohta et al., (2002) (figure 16). L’objectif poursuivi était de montrer l’efficacité des
techniques de renforcement dans la construction des ouvrages. L’analyse des comportements
observés des ouvrages est en cours.
Figure 16 : Mise en pré-tension des inclusions, vue ouvrage en fin de construction 1996, partie en surplomb,
partie en flexion [Ohta et al., 2002].
L’étude semi-vraie grandeur d’une pile en parement cellulaire renforcée par nappes de géogrilles
non liées aux blocs est présentée par Adams et al. (2002) (figure 17). Sous sollicitation verticale, le
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gonflement latéral faible des parements peut être directement relié au tassement en tête de pile. Il
n’y a pas de gonflement net de l’ouvrage. Ce principe de non gonflement a été retenu dans la
méthode de dimensionnement de deux ouvrages vraie grandeur pour la Federal Highway
Administration.
Figure 17 : Pile porteuse, principe du chargement par vérinage [Adams et al., 2002].
4. Domaines productifs de recherche
4.1. Comportement sous sollicitations sismiques
La recherche dans le domaine du comportement sous sollicitation sismique est très active, et de
nombreuses contributions asiatiques (spécialement japonaises) portent dans le domaine. On
retrouve une approche expérimentale très poussée, multi échelles avec comparaison des techniques.
L’extension au comportement sous impact est intéressante et devrait se poursuivre en réponse aux
attentes de compréhension du comportement des ouvrages renforcés face aux impacts de type bloc
par exemple.
Figure 18 : Etude modèle réduit sur table
vibrante [Bathurst et al., 2002b].
Figure 19 : Efforts globaux de connexion en fonction
de l’accélération suivant la possibilité de
déplacement du pied ou non [Bathurst et al., 2002b].
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Une série de 14 essais sur modèles réduits a été réalisée au Royal Military College du Canada pour
déterminer l’effet des conditions aux limites en pied du mur [Bathurst et al., 2002b] (figure 18). Les
résultats expérimentaux montrent que la condition de pied de l’ouvrage a un effet important sur la
réponse de l’ouvrage à une sollicitation sismique. Si le mouvement horizontal en pied est bloqué, le
parement de l’ouvrage mobilise une grande partie de la poussée. En particulier on constate que la
composante verticale est bien supérieure à la composante liée au poids du parement. Un pied libre
en déplacement horizontal a permis de réduire les déformations latérales et les efforts induits dans
les nappes de renforcement en comportement statique et cyclique (figure 19). Ceci a permis
d’identifier quelques lacunes dans le dimensionnement de ces ouvrages sous sollicitation sismique.
La condition en déplacement n’est pas prise en compte dans les méthodes de dimensionnement à
l’équilibre limite. Les forces d’entraînement verticales sur les renforcements à l’amont du parement
induisent des forces de connections importantes durant la sollicitation.
Une autre observation importante est l’amplification de l’excitation entre la base et le haut de
l’ouvrage. L’hypothèse classique retenue pour les dimensionnements en pseudo statique d’une
accélération constante semble erronée pour le calcul des ouvrages renforcés.
L’étude comparée du comportement des ouvrages renforcés avec les techniques plus anciennes du
mur poids [Koseki et al., 2002] et mur poids incliné [Huang 2002] a été également réalisée sur
modèles réduits et table vibrante (figure 20). Pour de faibles sollicitations sismiques les relations
entre déplacement et accélération en tête d’ouvrage sont quasi identiques entre les techniques mur
poids et mur renforcé, même si les relations sont complètement différentes entre le déplacement en
tête du parement et la pression des terres sur le parement. Pour de fortes sollicitations sismiques
l’augmentation de déplacement pour le mur renforcé est plus faible en comparaison de celle du mur
poids ce qui parait très intéressant. Après localisation de la rupture, l’ouvrage renforcé se fragilise
fortement.
Figure 20 : Modèles réduits de mur poids incliné et renforcé pour études sur table vibrante [Huang 2002]
Afin de développer un nouveau type de culée parasismique - grave traitée au ciment renforcée par
géogrilles connectées au parement rigide monobloc supportant directement la charge du tablier
(figure 21) - des tests comparatifs avec la technique classique ont été réalisés [Watanabe et al.,
2002]. Les résultats de la solution renforcée sont bien meilleurs que ceux de la technique classique.
Le rôle de la connexion entre les renforcements et le parement culée est essentiel pour la stabilité
dynamique de ce dernier. Dans ce cas, les géosynthétiques jouent essentiellement un rôle d’attache
du parement et non de renfort du matériau amont.
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Figure 21 : Culée de pont-rail, techniques traditionnelles (Japon), cisaillement à la connexion renforcement
mur-culée, technique alternative d’une grave traitée renforcée par géogrilles [Watanabe et al., 2002].
Des études sur modèles réduits ont permis de montrer l’effet bénéfique de bielles (tiges) d’attache
pour des ouvrages préchargés et précontraints de piles intermédiaires pour une meilleure stabilité
[Uchimura et al., 2002]. L’effort dans les tiges s’oppose à la déformation de l’ouvrage et suit le
même comportement cyclique. Ceci minimise la déformation de flexion de la pile induite par le
chargement latéral cyclique. La pré-tension de la tige va jouer un rôle important dans son maintien
en traction lors de la sollicitation, une forte pré-tension contribue à une bonne stabilité sous
sollicitation sismique. Notons l’approche par essais en centrifugeuse et table vibrante [Izawa et al.,
2002] qui simulent une méthode pseudo statique, où les forces horizontales sont appliquées
uniformément sur la hauteur de l’ouvrage et sur une période longue. Dans ces conditions la rupture
se produit relativement sous faible sollicitation horizontale comparativement à des essais sur table
vibrante. Ceci met en avant la représentativité effective des modèles physiques à échelle réduite. Un
modèle ne reste qu’un modèle !
L’étude sous sollicitation dynamique localisée est importante et fait l’objet de développements
intéressants [Peila et al., 2002, Nomura et al., 2002]. Afin d’étudier le comportement d’un remblai
renforcé par géogrilles sous l’impact d’un bloc de grande énergie, un vaste programme de recherche
a été entrepris en Italie [Peila et al., 2002]. L’étude porte sur la réalisation d’essais à échelle vraie
grandeur sur un site d’essai dédié à ce type d’étude, et une modélisation par éléments finis (FEM)
du comportement (figure 22).
Pour ce type d’étude dynamique, l’étude vraie grandeur parait la seule possible.
Plusieurs ouvrages, renforcés ou non pour comparaison, ont été testés sous impacts ponctuels ou
répétés. Plusieurs matériaux de remblais ont été testés, ainsi que plusieurs niveaux d’énergie
d’impact des blocs. Chacun des tests a fait l’objet d’une modélisation à l’aide d’un code aux
éléments finis explicites pouvant prendre en compte les grandes déformations par une approche 3D.
Quelques premières constatations peuvent être utilisées pour le dimensionnement mais restent à être
confirmées par des études complémentaires.
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Figure 22 : Merlon renforcé soumis à l’impact de blocs
[Peila et al., 2002]
4.2. Association avec des matériaux de remblai résiduels
Une des potentialités fortes des matériaux géosynthétiques est leur utilisation pour le renforcement
des matériaux résiduels. La bi ou multi fonctionnalité effective de géocomposites peut alors s’avérer
intéressante et ouvrir de nouvelles voies de développement. Le cas des matériaux résiduels fins est
un bon exemple.
A Singapour, les matériaux de déblai amont ont été réutilisés en remblai lors de l’implantation d’un
ouvrage sur une pente [Wei et al., 2002]. Cette réutilisation a été imposée par des contraintes
environnementales. Afin de pouvoir réaliser une pente avale de 60°, une solution de type sol
renforcé a été retenue (figure 23), et a permis de satisfaire le cahier des charges en terme de coût et
de contrainte environnementale. La réutilisation du sol fin peu drainant a pu se faire grâce à
l’utilisation d’un géocomposite associant par des nappes de non-tissé et de tissé une fonction de
drainage et de renforcement.
Afin de contrôler le comportement pendant la construction, à court puis à moyen et long terme du
matériau de remblai et des nappes de renforcement, une instrumentation a été mise en place. Des
essais d’extraction sur le renforcement ont été réalisés afin de déterminer les paramètres d’interface
(figure 23). Les nombreuses informations obtenues confirment le bon fonctionnement de l’ouvrage
et permettront à terme de calibrer des approches calculatoires.
On retrouve cette problématique dans Li et al. (2002) où il est montré que l’augmentation de
pression interstitielle se fait durant la phase constructive. Ce problème se retrouvera dans les
remblais renforcés en association avec les sols fins cohérents. Le chargement des ouvrages accentue
fortement la pression interstitielle. Le comportement global de l’ouvrage peut en être modifié avec
redistribution des contraintes et des poussées. Evidemment le comportement aux interfaces est
modifié et le frottement est réduit. L’intérêt des géocomposites bi-fonctions (figure 24) est mis en
avant par des travaux expérimentaux sur modèles réduits [Yasuhara et al., 2002]. Les tests
réalisés montrent la bonne fonctionnalité de tels matériaux pour augmenter les performances
globales (drainage et renforcement) (figure 25).
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Figure 23 : Coupe et instrumentation du profil, distribution des déformations dans les géocomposites, essais
d’extraction sur chantier [Wei et al., 2002].
Figure 24 : Echantillon géocomposite [Yasuhara
et al. 2002]
Figure 25 : Tassement de préchargement en
fonction de l’inclusion utilisée [Yasuhara et al.
2002
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5. Conclusions et perspectives
L’état de l’art qu’il est possible de dresser au travers des communications présentées au congrès de
Nice 2002 montre le dynamisme, la variété et l’adaptabilité des techniques géosynthétiques pour la
réalisation des ouvrages de soutènement. Apparemment arrivés à maturité, les concepts évoluent
vers plus de technicité et proposent des solutions adaptées à chaque impératif du cahier des charges.
La concurrence existe et telle ou telle solution apparaît mieux adaptée. Les contraintes
environnementales constituent un facteur incontournable important et catalysent les techniques
géosynthétiques.
Toutefois, utilisés en interaction les géosynthétiques et les nouveaux composites matériaugéosynthétiques doivent être investigués. L’avenir du développement et de l’innovation nous
semble dans cette voie, avec la réutilisation plus systématique des sols anthropiques résiduels,
matériaux du site, matériaux naturels fins ou grossiers, agressifs mécaniquement et/ou
chimiquement, les résidus valorisables. La valorisation des résidus naturels ou industriels est une
voie particulière d’études à mener par le développement d’écotechnique associant judicieusement
les composites géosynthétiques et la valorisation de matériaux. Au delà des solutions techniques, le
respect des réglementations est un aspect important.
La modélisation physique et numérique permet la validation d’idées et de concepts nouveaux. Des
développements sont encore possibles et les évolutions actuelles des matériels autorisent des
modélisations plus précises et ciblées en fonction des objectifs. Complémentaires, toutes les
approches physiques multi-échelles et numériques paraissent non dissociables pour concourir au
développement des techniques.
6. Bibliographie
Toutes les références citées proviennent des proceedings du Septième Congrès International
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