Tour d`abandon dans le canton de Berne Le canton

Transcription

Tour d`abandon dans le canton de Berne Le canton
Kanton Bern
Canton de Berne
Parlamentarische Vorstösse
Interventions parlementaires
Numéro de l’intervention:
Type d’intervention:
044-2012
Motion
Déposée le:
22.02.2012
Déposée par:
Fuchs (Bern, UDC)
Cosignataires:
0
(porte-parole)
Urgente:
Date de la réponse:
Numéro de l’ACE
Direction:
29.08.2012
1241/2012
JCE
Tour d'abandon dans le canton de Berne
Le canton de Berne ne dispose hélas pas encore de tour d’abandon, bien que cette installation soit très utile et que même les sceptiques et pessimistes d’autrefois aient ouvert les
yeux à ce sujet ces dernières années. Depuis la création du premier tour d’abandon à
l’hôpital d’Einsiedeln le 9 mai 2011, le nombre de bébés retrouvés morts en Suisse a nettement diminué. Les tours d’abandon ont d’ailleurs également fait leurs preuves dans les
pays voisins.
Tandis que le corps inanimé d’un nouveau-né était retrouvé à Wimmis, un nourrisson en
bonne santé était déposé pratiquement en même temps dans le tour de l’hôpital
d’Einsiedeln.
Bébés déposés, abandonnés ou tués en Suisse (1996–2010) :
Le tour d’abandon est une main tendue dans les situations d’extrême détresse. Son but
est d’empêcher infanticides et expositions. Il permet à une mère qui se trouve dans une
situation inextricable de mettre son enfant entre de bonnes mains en gardant l’anonymat
et sans encourir de sanction. La mère et le père ont le droit de reprendre leur enfant jusqu’au terme de la procédure d’adoption, à condition que la filiation ait été incontestablement établie. L’adoption peut avoir lieu au plus tôt après une année.
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Il siérait au canton de Berne d’ouvrir au moins un tour d’abandon (p. ex. à l’Hôpital de l’Ile).
Même pour sauver ne serait-ce qu’un seul bébé, cela vaudrait la peine. Une telle installation a par ailleurs un coût de réalisation minime, qui pourrait même être entièrement pris
en charge pour le canton par des fondations connues.
Je charge donc le Conseil-exécutif, dix ans après mon intervention malheureusement infructueuse auprès de la ville de Berne, de créer au moins un tour d’abandon dans le canton de Berne. Ces dernières années nous ont prouvé que les tours d’abandon fonctionnent, sont connus du grand public, et sont donc utilisés.
Réponse du Conseil-exécutif
Le tour d’abandon est une main tendue dans les situations d’extrême détresse. Son but
est de permettre à une mère qui se trouve dans une situation difficile de mettre son enfant
entre de bonnes mains tout en gardant l’anonymat. La mère ouvre le tour, dépose l’enfant
dans le lit chauffant et s’éloigne. Après quelques minutes, un signal avertit l’hôpital que le
lit est occupé. La mère et le père ont le droit de reprendre leur enfant jusqu’au terme de la
procédure d’adoption. Une adoption peut avoir lieu au plus tôt une année après le dépôt
de l’enfant. Cette installation a pour but d’empêcher les infanticides et les abandons
d’enfants.
La thématique des tours d’abandon est liée à des problèmes nombreux et divers, qui touchent les gens au plus profond de leurs émotions. Les considérations suivantes représentent un état des lieux des connaissances actuelles sur le thème des tours d’abandon. Elles
ont pour but de donner un aperçu, sans prétendre à l’exhaustivité.
En Suisse, le premier tour d’abandon a été ouvert en 2001. Il est le fruit d’une collaboration entre l’hôpital d’Einsiedeln et l’Aide suisse pour la mère et l’enfant (ASME). Depuis
son ouverture, sept enfants y ont été déposés. Le 28 juin 2012, l’hôpital de Davos, en collaboration avec l’ASME, a ouvert le deuxième tour d’abandon de Suisse.
Environ 300 tours d’abandon sont installés à travers l’Europe: il en existe plus de 100 en
Allemagne et en Autriche («Babyklappen»), environ 45 en République tchèque et environ
40 en Italie («culle per la vita»). Alors que la Suisse ouvre de nouveaux tours, comme en
témoignent la récente ouverture de Davos et le projet pour l’hôpital de Zollikerberg,
l’Allemagne prend la direction opposée: la ministre allemande de la famille Kristina Schröder veut empêcher l’installation de nouveaux tours d’abandon en fixant un cadre légal favorisant les «naissances confidentielles». Ses revendications s’appuient sur une étude de
l’Institut allemand de la jeunesse (Deutsche Jugendinstitut, DJI) publiée en 2011 et sur
une prise de position du Conseil d’éthique allemand (Deutscher Ethikrat) publiée en 2009
et traduite sous le titre «Le problème de la remise anonyme d’enfant». Il ressort de ces
travaux que le nombre d’infanticides en Allemagne n’a pas reculé malgré l’introduction des
tours d’abandon. Le Conseil d’éthique allemand recommande de fermer les tours installés
en Allemagne; il considère l’offre de tours d’abandon problématique aux plans éthique et
juridique, en particulier parce que cette solution constitue une violation du droit de l’enfant
à connaître son origine et à construire une relation avec ses parents biologiques. Selon le
Conseil d’éthique, les expériences faites à ce jour portent à conclure que les tours
d’abandon n’interpellent pas forcément les femmes qui risquent de tuer ou d’abandonner
leur nouveau-né. De même, l’étude de l’Institut allemand de la jeunesse montre que les
utilisatrices ne peuvent être classées dans un groupe défini. Enfin, cette même étude
confirme le soupçon selon lequel les tours d’abandon seraient utilisés de manière impropre: des enfants morts, handicapés ou déjà âgés de quelques mois seraient déposés dans
le tour.
Pour la Suisse, l’auteur de la motion reprend les statistiques de l’ASME sur les bébés déposés, abandonnés ou tués entre 1996 et 2010. Selon l’Office fédéral de la statistique
(OFS), il n’est effectué aucun recensement des bébés abandonnés dans l’ensemble de la
Suisse. Pour ce qui est des bébés tués en Suisse (enfants de moins d’une année), l’OFS a
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recensé douze cas entre 1995 et 2000, onze entre 2001 et 2005 et six entre 2006 et 2009.
Les chiffres mentionnés dans la motion n’ont donc pas pu être attestés formellement.
Des sondages réalisés auprès de femmes qui ont eu recours à des offres de remise anonyme d’enfant montrent que les pressions physiques et mentales subies avant, pendant et
après la naissance et la remise anonyme sont énormes. En règle générale, il existe toute
une série de raisons et de problèmes qui poussent les mères à abandonner leur enfant de
manière anonyme. Installer des tours d’abandon sur la base du seul critère de l’anonymat
revient à faire abstraction des multiples pressions mentales, physiques et médicales qui
ont poussé la mère à abandonner son enfant de manière anonyme. Si la femme ne recourt
pas à une cellule de conseil après avoir remis son enfant, elle restera seule face à ses
problèmes antérieurs. Autrement dit, la remise anonyme doit être assortie d’une prestation
de conseil; la solution des tours d’abandon ne permet pas à elle seule à la femme de résoudre ses problèmes.
Conclusion
Le problème est plus complexe qu’il n’y paraît au premier abord. Le Conseil-exécutif estime que le thème mérite un examen plus approfondi. Une réflexion plus poussée permettra
aussi de prendre en compte les expériences du nouveau tour d’abandon de Davos et de
clarifier la responsabilité et le financement éventuels d’une offre permettant la remise anonyme d’enfant. Pour ces motifs, le Conseil-exécutif propose d’adopter la motion sous forme de postulat.
En parallèle, il faut cependant soutenir et faire connaître au public le large éventail d’offres
efficaces qui existent déjà en matière d’assistance pour les femmes en situation d’extrême
détresse, offres qui émanent aussi bien d’organismes publics d’aide à l’enfance et à la
jeunesse que de prestataires privés et de centres de consultations en matière de grossesse.
Proposition:
Adoption sous forme de postulat
Au Grand Conseil
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