LA POESIE D`APRES GUERRE L`après guerre se caractérise par un

Transcription

LA POESIE D`APRES GUERRE L`après guerre se caractérise par un
LA POESIE D’APRES GUERRE
L’après guerre se caractérise par un total renouveau de la poésie, renouveau lié à la disparition
d’une certaine façon de la poésie. En dehors d’Aragon et Eluard qui produisent encore des
œuvres magnifiques (mais déjà classiques), les surréalistes s’essoufflent, les idéologies n’ont
plus le même attrait, restent des parcours individuels ouverts sur des expériences poétiques
(recherche de nouvelles formes) ou sur une certaine transcendance (notamment chrétienne).
1. JACQUES PREVERT (1900-1977) : la poésie du quotidien
Avant de publier ses poèmes, Jacques Prévert fut un dialoguiste et scénariste de cinéma
extraordinaire.
Retenons :
1935 : Le crime de Monsieur Lange (de Jean Renoir)
1937 : Drôle de drame (M. Carné)
« Bizarre, bizarre, vous avez dit bizarre, comme c’est étrange »
1938 : Quai des Brumes (M. Carné d’après Carco)
1939 : Hôtel du Nord (M. Carné)
1942 / Les Visiteurs du Soir (M. Carné)
1945 : Les Enfants du Paradis (M. Carné)
Se situant dans la lignée des poètes troubadour, Prévert reste sans doute le dernier grand poète
populaire. Un succès immédiat en livre, amplifié par la mise en musique par Kosma qui
transforma ses poèmes en chansons. Certaines sont connues mondialement grâce à une
génération de chanteurs de très grand talent (Yves Montant, Juliette Greco, Serge Reggiani,
les frères Jacques)
Bibliographie :
1946 : Paroles
1946 : Histoires
1957 : Spectacle
1966 : Fatras
1972 : Choses et autres
1980 : Soleil de Nuit (posthume))
« Les feuilles mortes se ramassent à la pelle
Tu vois je n’ai pas oublié
Les feuilles mortes se ramassent à la pelle
Les souvenirs et les regrets aussi »
Extrait des Feuilles mortes, chanson mythique
1
Serge Gainsbourg rendra un hommage vibrant à Prévert en chantant en 1962 La Chanson de
Prévert
« O je voudrais tant que tu te souviennes
Cette chanson était la tienne
C’était ta préférée je crois
Qu’elle est de Prévert et Kosma »
2. RENE CHAR (1907-1988) ou la communication poétique
A l’opposé de Prévert, la poésie de Char est difficile d’accès et élitiste. Poète politiquement
engagé en tant qu’homme, il rédigea les feuillets d’Hypnos dans le maquis. Son inspiration
provient de la musique (il collabora avec Pierre Boulez) ou de la peinture (il fut ami de
Nicolas de Staël)
1934 : Le Marteau sans Maître
1946 : Feuillets d’Hypnos
1947 : Le Poème pulvérisé
1948 : Fureur et Mystère
1950 : Les Matinaux
1962 : La Parole en Archipel
1964 : Commune présence (anthologie)
1968 : Dans la pluie giboyeuse
1979 : Fenêtres dormantes et portes sur le Toi
1983 : Œuvres complètes dans la prestigieuse collection de la Pléiade
1985 : Dans le Voisinage de Van Gogh
3. FRANCIS PONGE (1899-1988) ou le parti pris des choses
Longtemps inconnu, il accéda à la reconnaissance dans les années 1960 (notamment grâce à
Philippe Sollers). Cherchant à effacer toute forme de lyrisme, il entend redonner la parole
aux choses afin qu’elles deviennent paroles. Pour ce faire, il refuse le vers et préfère la prose
d’où le titre de son 2nd recueil Proêmes (contraction de poème et prose)
1942 : Le Parti pris des Choses
1948 : Proêmes
1952 : La Rage e l’expression
1965 : Pour un Malherbe (essai)
1971 : La fabrique du Pré
1977 : Comment une figure de paroles et pourquoi (essai)
4. HENRI MICHAUX (1899-1984) ou l’exorcisme de l’hostilité
Né à Namur, Henri Michaux partage a vie entre les voyages bien réels Equateur, Turquie,
Inde, Chine) et les voyages imaginaires. A partir de 1956, il ajouta un troisième itinéraire à
2
ces voix d’exploration : la drogue. Pour ce poète aventurier, la poésie est un moyen
d’exorciser le poids du réel avec lequel il entretient une permanente relation conflictuelle.
1927 : Qui je fus ?
1932 : Un Barbare en Asie
1934 : La Nuit Remue
1938 : Plume
1945 : Epreuves, Exorcismes
1961 : Connaissance par les gouffres
1972 : Emergences, résurgences
1975 : Idéogrammes en Chine
1982 : Chemins cherchés, chemins perdus, transgression
1985 : Déplacements, dégagements (posthume)
5. SAINT JOHN PERSE (1887-1975) ou l’épopée intérieure
Issu d’une famille d’aristocrate, il appartient à une génération plus ancienne (celle de PierreJean Jouve), mais par reconnaissance tardive et par le fait que ses œuvres majeures furent
écrite après guerre, il se rapproche de cette génération. A la suite de Claudel et sous son
influence, son œuvre secrète et difficile déploie le langage en immenses étendues rythmiques
et en larges plages de symboles. Exilé aux Etats-Unis où il s’établit définitivement, il fut plus
célèbre hors de nos frontières (il est sans doute le poète français le plus traduit). En 1960, son
œuvre a été couronné par le prix Nobel de littérature.
1911 : Eloges
1924 : Anabase
1944 : Exil
1946 : Vents
1957 : Amers
1960 : Chroniques
1962 : Oiseaux
1969 : Chanté par celle qui fut là
1971 : Chant pour un équinoxe
« Morganatique au loin l’Epouse, et l’alliance, clandestine ! … chant d’épousailles, ô Mer,
sera pour vous le chant : « Mon dernier chant ! mon dernier chant ! et qui sera d’homme
de mer … » Et si ce n’est ce chant, je vous le demande, qu’est-ce qui témoignera en faveur
de la Mer – la Mer sans stèle ni portiques, sans Alyscamps ni Propylées, la Mer sans
dignitaires de prévues à ses terrasses circulaires, ni rang de bêtes batées d’ailes à l’aplomb
des chaussées ? »
Amers, Invocation
3
6. YVES BONNEFOY (1923- ) entre désir et désert
A force d’intériorité la poésie se mue en une quête qui ne s’ouvre plus désormais sur
l’évidence immédiate du surnaturel ou du sacré. Le poète reste donc suspendu entre le désir
qui l’anime, l’angoisse qui le tourmente, le désespoir qui le guette d’où un art d’alternance :
mouvement / immobilité ; jour / nuit ; désir / désert.
1953 : Du Mouvement et de l’Immobilité de Douve
1958 : Hier régnant Désert
1959 : Pierre écrite
1975 : Dans le Leurre du Seuil
1983 : La Présence de l’Image
Signalons encore que pour Bonnefoy, l’image doit toujours l’emporter sur l’idée (idéal de
« l’anti-Platon » qu’il s’était fixé dans sa jeunesse)
« Je nommerai désert ce château que je fus,
Nuit cette voix, absence ton visage,
Et quand tu tomberas dans la terre stérile
Je nommerais néant l’éclair qui t’a porté. »
Vrai Nom, 1953
7. EUGENE GUILLEVIC (1907- )
Né en Bretagne à Carnac, Guillevic est constamment attentif à tout rendre concret, palpable et
à révéler le sacré qui émane du quotidien.
1942 : Tevraque (contraction de « tevra » et « aqua », terre et eau)
1961 : Carnac
1963 : Sphère
1966 : Avec
1969 : Ville
1970 : Paroi
1979 : Etrier
« J’ai joué sur la pierre
De mes regards et de mes doigts
Et mêlées à la mer,
S’en allant sur le mer,
Revenant par la mer,
J’ai cru à des réponses de la pierre. »
4
8. EDMOND JABES (1912-1991) ou le retour au livre
Mystique, Edmond Jabès cherche au cœur de sa culture juive, une exigence poétique qui
s’appuie sur la quête de l’identité d’un homme du livre.
1947 : Le Fond de l’Eau
1955 : L’Ecorce du Monde
1963 : Le Livre des Questions
1965 : Le Retour au Livre
1969 : Elya
1976-1980 : Le Livre des Ressemblances
« Sur le bord de la route,
Il y a des feuilles
Si fatiguées d’être feuilles,
Qu’elles sont tombées.
Sur le bord de la route
Il y a des juifs,
Si fatigués d’être juifs,
Qu’ils sont tombés.
Balayez les feuilles.
Balayez les juifs.
Les mêmes feuilles repoussent-elles au printemps ?
Y a-t-il un printemps pour les juifs piétinés ?
Le Retour au Livre
5