La Grande Barrière de corail "infiltrée" par l`industrie

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La Grande Barrière de corail "infiltrée" par l`industrie
La Grande Barrière de corail "infiltrée" par l’industrie minière et gazière
03/02/14 10:50
La Grande Barrière de corail "infiltrée" par
l’industrie minière et gazière
LE MONDE | 01.11.2013 à 11h33 • Mis à jour le 31.01.2014 à 09h19 |
Colin Folliot (/journaliste/colin-folliot/) (Sydney, correspondance)
La Grande Barrière de corail, en 2009. | AFP/Great Barrier Reef Marine Park
La Grande Barrière de corail, inscrite sur la liste du Patrimoine mondial de
l'Unesco depuis 1981, est-elle bien protégée ? Pour s'en assurer , le ministre
australien de l'environnement, Greg Hunt, a ordonné, jeudi 31 octobre une
enquête sur la Great Barrier Reef Marine Park Authority (GBRMPA),
l'organisme chargé de sa protection. Deux des cinq membres de son bureau,
Jon Grayson et Tony Mooney, sont en effet soupçonnés de conflits d'intérêts
avec les industries des mines et du gaz.
Un reportage de la télévision ABC affirmait, mercredi, que Jon Grayson était actionnaire
d'une entreprise de services à l'industrie gazière. Situé au nord-est de l'Australie , l'Etat du
Queensland, qu'il représente au sein de la GBRMPA, a pris sa défense , affirmant qu'il
n'avait pas de « fonction active » dans l'entreprise, tout en précisant qu'il avait le droit d'y
garder une « fonction passive ».
En qualité de « simple » actionnaire, Jon Grayson pourrait néanmoins « tirer directement
bénéfice d'une extension du port gazier de Gladstone » (situé dans le Queensland, en
face de la Grande Barrière), note Louise Mathieson, de Greenpeace.
Tony Mooney est cadre d'une entreprise minière, Guilfoard Coal, qui lui verse un salaire
annuel de 250 000 dollars australiens (175 000 euros), pour gérer ses relations avec les
partenaires extérieurs. « Je suis certaine qu'il est plus facile de gérer des partenaires
comme la Marine Park Authority quand on siège directement au bureau », raille Louise
Mathieson.
ENJEU STRATÉGIQUE
Pour Guilfoard Coal, l'enjeu est d'autant plus stratégique que l'entreprise projetterait de
s'installer dans le Queensland afin d'y développer six mines. Dans une publication
professionnelle, Tony Mooney écrivait même : « il y a une opportunité pour l'exportation
de charbon par le port de Townsville et celui, bientôt agrandi, d'Abbot Point », deux ports
également situés sur la côte du Queensland.
Que ce soit à Townsville, à Abbot Point ou à Gladstone, les ports miniers de l'Etat du
nord-est de l'Australie font en ce moment l'objet d'importants projets d'extension censés
http://www.lemonde.fr/planete/article/2013/11/01/la-grande-barriere…corail-infiltree-par-l-industrie-miniere-et-gazie_3506815_3244.html
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La Grande Barrière de corail "infiltrée" par l’industrie minière et gazière
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répondre au boom minier que connaît la région depuis plusieurs années.
Ces projets inquiètent particulièrement les organisations écologistes et les scientifiques.
« Nous savons que la principale menace qui pèse sur la barrière de corail est la
sédimentation », une conséquence directe des chantiers réalisés, affirme Daniel Gschwind,
ancien membre du bureau de la GBRMPA. Ainsi, la transformation d'Abbot Point en
premier port d'exportation de charbon au monde, devrait entraîner le rejet de 3 millions de
mètres cubes de boue dans la zone protégée.
Lire : La Grande Barrière de corail a perdu la moitié de ses coraux depuis 1985
(/planete/article/2012/10/02/la-grande -barriere-de-corail -a -perdu -la-moitie-de-ses -coraux-depuis 1985_1768896_3244.html)
Les risques sont tels que, depuis juin 2012, l'Unesco menace de placer la Grande Barrière
de corail sur la liste du Patrimoine mondial menacé. En un quart de siècle, le plus vaste
ensemble corallien du monde, destination phare du tourisme mondial, qui s'étend sur près
de 350 000 km², a perdu la moitié de ses coraux, en partie sous l'effet de tempêtes et du
réchauffement, mais également à cause d'activités industrielles.
C'est justement sur le dossier des extensions portuaires que les soupçons de conflits
d'intérêts sont les plus critiques. ABC a révélé des documents de travail devant définir la
position de principe de la GBRMPA face à ces projets. En mai 2012, le brouillon de
l'équipe scientifique de l'organisation proposait une formule sans concession : « L'autorité
ne soutient pas les activités portuaires ou leur développement dans des zones où elles
peuvent dégrader la biodiversité côtière. »
PORTE OUVERTE
Mais, quatre mois plus tard, le bureau nuançait cette position par une formule nettement
moins ferme : « Dans les décisions concernant les activités portuaires, l'impact potentiel
sur la biodiversité côtière devra être une considération-clé. » Laissant ainsi la porte
ouverte à au moins une partie des projets controversés.
Alors que le ministre de l'environnement a repoussé à mi-décembre sa décision d'autoriser
ou non l'extension du port d'Abbot Point, cette affaire renforce les opposants au projet.
« Nous ne devons pas procéder à cette extension », a réagi la sénatrice Christine Milne,
chef de file des Verts, qui réclame aussi la démission immédiate de Jon Grayson et de
Tony Mooney.
Lire (en zone abonnés) : L’Australie sacrifie l’environnement pour relancer son
économie (/planete/article/2013/10/14/l-australie -sacrifie-l-environnement-pour-relancer -son economie_3495176_3244.html)
L'Australian Marine Conservation Society, par la voix de sa porte-parole, Felicity Wishart,
regrette quant à elle que « les plans de méga-ports le long de la côte été accélérés et le
gouvernement leur accordé un traitement spécial ». Elle demande donc une enquête
approfondie, qui examine aussi « le rôle du gouvernement dans cette accélération ».
Colin Folliot (/journaliste/colin-folliot/) (Sydney,
correspondance)
Journaliste au Monde
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