CR du 14 juin 2016 Jardins d`Orient

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CR du 14 juin 2016 Jardins d`Orient
Actualités culturelles
CR du 14 juin 2016 : Jardins d’Orient de l’Alhambra au Taj Mahal
Exposition à l’Institut du Monde Arabe du 19 avril au 25 septembre 2016
L’IMA invite à un voyage à travers l’histoire des jardins de tradition islamique de l’Espagne à l’Inde.
Sur le parvis : un jardin éphémère installé par le paysagiste Michel Péna et une anamorphose
végétale du sculpteur d’espace François Abélanet.
L’exposition nous mène d’abord dans un monde ou depuis la nuit des temps, l’eau est un trésor
vital. Les jardins d’Arabie, de la Perse, de l’Espagne mauresque, de d’Inde moghol dépendaient de
l’irrigation. Les grandes civilisations du Proche-Orient ont inventés des techniques d’irrigation
ingénieuses : mécanismes hydrauliques, canaux de dérivation, digues, écluses, aqueducs, réseau
de rigoles, des norias tractées par des ânes.
C'est au 3° siècle avant JC que naissent sur les rives d’Euphrate les jardins des dieux. Les
légendaires jardins suspendus de Babylone étaient probablement le sanctuaire consacré au culte
d’Ishtar, déesse de l’Amour. Depuis l’antiquité, les récits de ces féeries végétales ont marqué
l’imagination enflammée des artistes et des poètes. Mais depuis les premières fouilles à l’aube du
20° siècle à ce jour, les archéologues n’ont trouvé nulle trace.
Le prototype du jardin d’agrément oriental est essentiellement originaire de Perse : un jardin de
délices débordant de fleurs, de fruits, d’arbres, d’oiseaux. Il est structuré par l’eau : bassins et
canaux imposent un dessin géométrique rigoureux. Emerveillées, les dynasties musulmans
adoptent ce modèle et le diffusent dans les territoires conquis de Cordoue à Agra en passant par
Damas, Marrakech, Samarkand et Ispahan. Partout le même esprit, la même symbolique : le
paradis verdit comme un jardin d’Orient. Paradis (paradaida en vieux-perse) signifie enclos ou
jardin. Des récents travaux des historiens démontrent que la description du paradis reflète des
formes de jardins préexistants.
Les souverains arabes qui s’installent en Andalousie au 8° siècle apportent leurs jardins
d’agrément à Grenade, Cordoue, Séville, Valence. On embarque pour une excursion vidéo à
Grenade avec le célèbre patio des lions, admirer l’art raffiné des jardins hispano-mauresques.
Celui de l’Alhambra est un des seuls jardins d’Europe qui ait conservé un caractère à peu près
islamique malgré les multiples destructions suivis d’innombrables reconstructions.
On déambule virtuellement avec les touristes entre des fontaines chantantes, des cascades
d’escalier et des bassins tranquilles. On apprend que grenadiers, lauriers, rosiers, jasmin, myrrhes
faisaient partie de la végétation originale du palais d’été du Generalife, identifiées grâce aux
études archéo-botanique de pollen fossilisé.
Maintenant, on est mûr pour rencontrer le prince en son jardin. Les miniatures persanes et
mogholes montrent la sphère princière comme l’aperçu du jardin céleste dont parle le Coran où
tous les sens sont sollicités. Le souverain y reçoit ses amis, poètes et artistes, rencontre sa bienaimée, accueille des ambassadeurs avec grand pompe.
La miniature révèle la beauté divine dans la création et prend l’image du jardin comme métaphore
de la contemplation mystique. Ces images sans ombre ni perspective, peintes dans des couleurs
pures illuminent des textes littéraires des grands poètes comme Ferdowsi (940 - 1020), Attar (1145
- 1220), Saadi (1210 - 1290).
Un film de Valérie Gaillard avec des magiques animations graphiques raconte l’histoire du Tapis
de Cracovie conservé par moitié au Louvre (4 X 4 m) et pour moitié en Pologne dans la cathédrale
de Cracovie. C’est un jardin vu à vol d’oiseau, image d’un jardin complexe à décrypter, véritable
dictionnaire de la symbolique islamique.
La Perse ancienne, longtemps un carrefour du monde, englobait autrefois l’Asie centrale et
absorbait l’influence de la Chine. Les miniatures persanes imitent alors les physionomies
chinoises : la rondeur des visages, les yeux bridés.
Avec Lovers picknicking, l’artiste irano-américaine Soodi Sharifi sème la zizanie dans le monde
idéalisé d’une miniature traditionnelle en y introduisant des motos, des autoroutes, des panneaux
de circulations, des éoliennes et des écrans géants. Des couples d’amoureux en jeans
envahissent son photocollage digitale de la série Maxiatures : une mise en scène ludique et
critique des la vie quotidienne de la jeune génération en Iran.
Reprenons notre parcours le long de l’allée des fontaines. Cours et patios sont rafraîchis par des
bassins. Des céramiques à lustre métallique multiplient les reflets de l’eau. Des motifs florales et
zoomorphes abondent sur les décors. Architectes et artistes français rapportent dessins et
tableaux de ces monuments musulmans.
Nous arrivons en Inde chez des Empereurs fous de fleurs : voilà Babur, surnommé le prince
jardinier, (1483 - 1530). Le premier Grand Moghol était un brillan monarque autant qu’un
horticulteur et paysagiste passionné. Sous l’empereur Akbar (1556 - 1605) le jardin envahit textiles
et vêtements. Le Grand moghol s’enveloppe dans un manteau agrémenté de motifs végétaux
comme dans un jardin illusoire, sorte d’antichambre du paradis.
Sous les Grands Moghols, les écoles miniaturistes vont adopter une subtile synthèse entre
l’héritage perse et des éléments hindous. Avec l’arrivée des Européens, l’art de la miniature
assimile des éléments occidentaux comme la perspective. Le dessin s’affine, les couleurs se font
plus légères.
Le jardin moghol est aussi une promesse de sérénité et d’éternité : L’Inde affectionne le jardin
tombeau dont le plus fameux est le Taj Mahal à Agra en marbre blanc paré de motifs floraux. Ce
mausolée, édifié par Shah Jahan pour son épouse défunte, est une transcription du paradis
islamique.
Entre Orient et Occident
On s’arrête devant les tirages photo grand format du jardin Majorelle à Marrakech, crée vers 1930
par le peintre français Jacques Majorelle (1886 - 1962). Une réinterprétation des canons
traditionnels rehaussée de bleu cobalt, rouge brique et jaune. Le site, menacé de destruction en
1980, a été sauvé par Yves St Laurent et Pierre Berger, aujourd’hui une Fondation porte leurs
noms.
Dernier regard avant la sortie : une œuvre qui capte l’attention, réveille l’intérêt, résume l’actualité :
Olive tree 2015 du jeune artiste palestinien Abdul Rahman Katanani : Sur un tronc d‘olivier
poussent des branches en fils de fer barbelés.
L’IMA propose des journées de réflexion autour du jardin d’Orient traitant des sujets clés du
patrimoine végétal, de l’héritage paysager, de l’espace vert dans les métropoles modernes,
d’environnement et d’écologie.

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