Etude Séralini : consommation d`OGM chez les rats et risques de

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Etude Séralini : consommation d`OGM chez les rats et risques de
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risques cancers
Etude de Séralini et al. : Toxicité à long terme d'un
herbicide Roundup et d'un maïs tolérant au Roundup
génétiquement modifiés.
Référence étudiée :
Séralini, G.­E., et al. Long term toxicity of a Roundup herbicide and a Roundup­tolerant genetically modified
maize. Food Chem. Toxicol. (2012), http://dx.doi.org/10.1016/j.fct.2012.08.005
La revue scientifique américaine Food and Chemical toxicology a publié le 19 septembre une étude
scientifique sur la toxicité à long terme de l'herbicide Roundup et de du maïs OGM NK 603 tolérant au Round
Up de la société Monsanto.
L’étude de Gilles­Eric Séralini, de l'Université de Caen, également président du Conseil scientifique du CRIIGEN
(Comité de recherche et d'information indépendantes sur le génie génétique), montre que des rats nourris
pendant 2 ans avec du maïs OGM, cultivés ou non avec du Round Up, et des rats alimentés avec une eau
contenant de faibles doses de l'herbicide, présentent une mortalité plus importante et plus précoce dans
plusieurs des groupe traités ainsi qu’une incidence plus importante de tumeurs dans certains groupes.
Nos commentaires Il s’agit d’une étude importante puisqu’elle étudie les effets sur la santé du maïs NK603 et du Round Up sur
une durée longue, c'est­à­dire 2 ans. C’est une durée importante par rapport à l’espérance de vie d’un rat et
la durée habituelle, 90 jours, pour ce type d’étude.
Si l’étude incite à poursuivre et approfondir la recherche des effets à long terme des OGM et pesticides, et
d’appliquer le principe de précaution, les résultats doivent néanmoins être interprétés avec beaucoup de
prudence.
Les principales limites de cette étude sont les suivantes :
L’étude portait sur 200 rats, divisés en 10 groupes de 10 rats mâles et 10 groupes de 10 rats femelles. Il
est difficile de tirer des conclusions à partir d’échantillons aussi petits et les différences observées entre les
groupes en termes de mortalité et de nombres de tumeurs ne sont pas statistiquement significatives.
Les rats choisis pour l’expérience sont connus pour développer fréquemment des tumeurs : 5 rats femelles
sur 10 du groupe contrôle, nourris sans OGM ni pesticides, ont eux aussi développés des tumeurs
mammaires ; chez les rats mâles, le nombre de tumeurs dans le groupe contrôle est même supérieur au
nombre de tumeurs dans les groupes nourris avec différentes quantités de maïs OGM traités avec du
Round Up.
L’étude a bénéficié du soutien financier du CRIIGEN, association anti­OGM, et s’accompagne d’une
campagne de communication singulière. Un conflit d’intérêt n’est pas à exclure, le premier auteur, connu
pour ses opinions anti­OGM, étant le président du Conseil scientifique de l’association ayant financé l’étude.
Ce type de conflit d’intérêt est habituellement reproché aux industriels, mais est tout aussi critiquable dans
le sens inverse.
Les auteurs ne précisent pas le régime d’alimentation des rats en dehors des OGM et des pesticides. Par
ailleurs, il est connu que les rats nourris trop abondamment ou avec un maïs contaminé avec un
champignon commun font plus facilement des cancers. Les auteurs ne font aucune mention de la
recherche de ce champignon.
Les OGM et pesticides sont sources d’inquiétude et de controverses, liées aux difficultés à mesurer
d’éventuels risques pour la santé. Dans ce contexte, l’étude questionne sur les mesures appropriées
d’’évaluation, notamment les durées requises pour des protocoles d’expérimentation. Si l’étude semble
indiquer un risque pour la santé, les limites expérimentales et statistiques rendent nécessaire d’interpréter les
résultats avec beaucoup de prudence. Elle rend nécessaire une expertise scientifique transparente des
mesures appropriées à apporter en attendant de confirmer ou infirmer les résultats par des études
rigoureuses, menées et financées sans conflit d'intérêt.
Pour aller plus loin
Que sont les OGM ?
Les organismes génétiquement modifiés (OGM) sont des organismes ou des microorganismes dont le matériel
génétique a été transformé d'une manière qui ne s'effectue pas par multiplication ou recombinaison
naturelles. Ces produits font l’objet d’un cadre réglementaire européen. Voir aussi le dossier sur les OGM sur le
site de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) : http://www.anses.fr/
Qui évalue les OGM ?
Depuis 2003, les OGM sont évalués par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA). Toutefois, à la
demande des ministères, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) continue à apporter son expertise
afin d'éclairer la décision gouvernementale lors du vote des Etats­membres pour autoriser ou non la mise sur
le marché européen d’un OGM pour une utilisation en alimentation humaine et animale. Dans ce cadre, pour
plus de la moitié des OGM étudiés, l’Agence estime que les données fournies par l’industriel ne sont pas
suffisantes pour conclure sur la sécurité sanitaire liée à la consommation de l’OGM.
Au­delà de sa participation au processus d’évaluation des OGM, l’Anses, comme d'autres agences
européennes, contribue à l’établissement et à l’évolution de documents guide encadrant les modalités
d’évaluation de ces produits. L’Anses cherche ainsi à identifier toute nouvelle information devant être prise en
compte dans le cadre de la réglementation européenne.
Résumé de l’étude (traduction française du
résumé des auteurs) :
Les effets sur la santé d’un maïs génétiquement modifié résistant au Roundup, cultivé avec ou sans
Roundup, et du Roundup seul, ont été étudié pendant 2 ans chez des rats. Dans la population femelle, tous
les groupes traités meurent 2­3 fois plus que les groupes contrôles, et meurent plus rapidement. Cette
différence était visible dans 3 groupes mâles nourris aux OGM. Tous les résultats étaient dépendants des
hormones et du sexe, et les profils pathologiques étaient comparables. Les femelles ont développé de
volumineuses tumeurs mammaires, presque toujours plus fréquemment que les groupes contrôles et plus
précocement. L’hypophyse était le deuxième organe le plus touché. L’équilibre hormonal (hormones
sexuelles) était modifié par les OGM et les traitements au Roundup. Chez les mâles traités, l’atteinte hépatique
et la nécrose hépatique étaient 2.5 à 5.5 fois plus importantes. Cette pathologie a été confirmée par
microscope électronique et à transmission. Des atteintes marquées et sévères du rein étaient généralement
1.3 à 2.3 plus importantes chez les cas. Les mâles présentaient des tumeurs palpables, 4 fois plus
volumineuses que les cas contrôles, qui apparaissaient jusqu’à 600 jours plutôt. L’analyse des données
biochimiques a confirmé des atteintes du rein, pour tous les traitements et les deux sexes. 76% des
paramètres altérés étaient en rapport avec une atteinte du rein. Ces résultats peuvent être expliqués par les
effets non linéaires de perturbation endocrinienne du Round­Up, mais aussi par la sur­expression du gène
modifié des OGM, et ses conséquences métaboliques. [Séralini, G.­E., et al. Long term toxicity of a Roundup
herbicide and a Roundup­tolerant genetically modified maize. Food Chem. Toxicol. (2012),
http://dx.doi.org/10.1016/j.fct.2012.08.005].
Voir aussi l'Avis du 19 octobre 2012 des Académies nationales d’Agriculture, de Médecine, de Pharmacie, des
S c i e n c e s , d e s T e c h n o l o g i e s , e t V é t é r i n a i r e s u r c e t t e p u b l i c a t i o n : http://www.academie­
sciences.fr/activite/rapport/avis1012.pdf Evolution récente
Cette publication "Long term toxicity of a Roundup herbicide and a Roundup­tolerant genetically modified
maize" de Séralini et al. a été retirée de la revue Food and chemical toxicology le 28 novembre 2013, comme
l'a indiqué le rédacteur en chef de la revue, A. Wallace Hayes. Ce dernier a indiqué que bien qu'il n'y ait eu "ni
fraude, ni mauvaise interprétation des données " et que "lorsque l'étude a été réexaminée après publication
par un panel d'experts, l'auteur a accepté de fournir toutes les données demandées, et qu'il s'est montré très
coopératif tout au long du processus de révision", "les résultats présentés, s'ils ne sont pas incorrects, ne
permettent pas de conclure". Il est reproché aux auteurs la variété de rats utilisée et le nombre de rats par
groupe (10 de chaque sexe pour chaque produit testé). Pour lire l'annonce complète du retrait de cette
publication, cliquez ici.
L'Anses a été saisie le 27 juin 2014 par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la
Répression des Fraudes (DGCCRF) pour la réalisation de l'appui scientifique et technique suivant : analyse des
différences de la publication de Séralini et al. (2014) "Republished study: long­term toxicity of a Roundup
herbicide and a Roundup­tolerant genetically modified maize" par rapport à la publication initiale (Séralini et al.
(2012) "Long term toxicity of a Roundup herbicide and a Roundup­tolerant genetically modified maize"). Et
l'Anses conclue dans cette note que la publication de Séralini et al. (2014) ne remet pas en cause les
conclusions de l'avis initial du 19 octobre 2012 (saisine 2012­SA­0227) sur la publication de Séralini et al.
(2012). Pour télécharger (pdf) cette note d'appui scientifique et technique de l'Anses du 2 décembre 2014 :
https://www.anses.fr/sites/default/files/documents/BIOT2014sa0155.pdf
Auteur : Unité Cancer et Environnement
Mise à jour le 21 avr. 2016
Copyright 2016 ­ Centre Léon­Bérard